IV. LE PROGRAMME 164 : « COUR DES COMPTES ET AUTRES JURIDICTIONS FINANCIÈRES »

A. UN PROGRAMME RÉPONDANT À PLUSIEURS FINALITÉS

Le programme 164 « Cour des comptes et autres juridictions financières » répond aux prescriptions des articles XIV 24 ( * ) et XV 25 ( * ) de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Il englobe la Cour des comptes et les 26 Chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC) .

S'agissant de la Cour des comptes, le dernier alinéa de l'article 47 de la Constitution énonce qu'elle « assiste le Parlement et le gouvernement dans le contrôle de l'exécution des lois de finances ». En outre, la LOLF, en son article 58, introduit deux nouvelles attributions d'assistance du Parlement à la Cour :

- le dépôt d' un rapport conjoint au dépôt du projet de loi de règlement , relatif aux résultats de l'exécution de l'exercice antérieur et aux comptes associés, par mission et par programme ;

- la certification de la régularité, de la sincérité et de la fidélité des comptes de l'Etat .

Parallèlement, l'article 12 de la loi organique n° 2005-881 du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale confie à la Cour des comptes, outre l'établissement du rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, la mission de certifier les comptes combinés des branches du régime général de la sécurité sociale.

Le Premier président de la Cour des comptes, M. Philippe Séguin , est responsable du présent programme.

B. LA PRÉPONDÉRANCE DE L'ACTION « CONTRÔLE EXTERNE ET INDÉPENDANT DE LA RÉGULARITÉ ET DE L'EFFICACITÉ DE LA GESTION PUBLIQUE »

L'action de soutien pèse pour le quart du programme. Après ventilation de ses crédits de paiement, il ressort trois actions de politique publique de poids budgétaires inévitablement très inégaux. Ainsi, l'action « Contrôle externe et indépendant de la régularité et de l'efficacité de la gestion publique » représente, à elle seule, 57,6 % des crédits de paiement de l'ensemble du programme.

C. UNE PROGRESSION SIGNIFICATIVE DES CRÉDITS : + 5, 8 %

Le présent programme, dont plus de 86 % des crédits concernent le personnel , s'appuie, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement, sur une enveloppe de 181,7 millions d'euros 26 ( * ) , en progression de 5,8 % par rapport au budget accordé pour 2006.

L'accroissement des crédits, d'un montant total de 10 millions d'euros, est réparti comme suit : 7 millions d'euros pour les dépenses de rémunération (création d'emplois, mesures catégorielles et évolution du point fonction publique), 1,7  million d'euros pour les dépenses de fonctionnement et 1,3 million d'euros pour les dépenses d'investissement.

La LOLF a induit des modifications dans la gestion interne des juridictions financières, avec notamment la mise en oeuvre d' un système de contrôle de gestion et d' une déconcentration des crédits de fonctionnement . Cette déconcentration est fondée sur un principe de responsabilité accrue des gestionnaires, en particulier dans les CRTC, qui bénéficient d'une véritable délégation de crédits au sein de budgets opérationnels de programme (BOP) locaux.

Il convient, en outre, de relever que 2007 sera l'année de célébration du bicentenaire de la création de la Cour des comptes et du vingt-cinquième anniversaire des CRTC, manifestations pour lesquels une dépense prévisionnelle de 0,4 million d'euros est prévue.

D. UNE ÉVOLUTION DES EFFECTIFS (+ 8 ETPT) ET DES DÉPENSES DE PERSONNEL (+ 4,7 %) LIÉE À L'ADAPTATION À DE NOUVELLES MISSIONS ET AUX EFFETS DES RÉFORMES STATUTAIRES

Pour 2007, le plafond d'emploi autorisé pour le présent programme est fixé à 1.851 ETPT , soit une progression de 8 ETPT par rapport à l'exercice 2006 (création de 10 ETPT de catégorie A + et disparition de 2 ETPT de catégorie C).

Parallèlement, les dépenses de titre 2 (dépenses de personnel) passent de 149,8 millions d'euros à 156,9 millions d'euros , soit une hausse de 4,7 %. Cette augmentation résulte essentiellement de l'accroissement du poste « Prestations sociales et allocations diverses », de 0,5 million d'euros en loi de finances initiale pour 2006 à 1,2 million d'euros pour 2007, en lien avec le transfert en gestion de 401 ETPT, auparavant mis à disposition des juridictions financières par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, et du budget d'action sociale qui leur est relatif.

1. Les besoins résultant des nouvelles missions de certification dévolues à la Cour des comptes

La Cour des comptes s'est récemment vu attribuer deux nouvelles missions d'assistance au Parlement qui nécessitent l'attribution de moyens supplémentaires.

Tout d'abord, dans le cadre de la LOLF, l'article 58 lui confie une mission de certification des comptes de l'Etat , pour laquelle la Cour des comptes s'est attachée à renforcer ses moyens humains par redéploiements internes (en affectant des magistrats, des rapporteurs et des assistants à des tâches de certification) ce qui a permis de couvrir près de la moitié des besoins estimés. Toutefois, des apports supplémentaires ont été jugés nécessaires avec, en 2006, 20 emplois créés pour lesquels les procédures de sélection se poursuivent afin de compléter les effectifs. Pour remplir sa mission de certification des comptes de l'Etat, la Cour des comptes a décidé d'engager une politique de recrutement d'« experts » 27 ( * ) issus du secteur privé et encadrés par des magistrats .

Par ailleurs, dans le cadre de la loi organique n° 2005-881 du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, la Cour des comptes a reçu pour mission de certifier les comptes des organismes nationaux du régime général de sécurité sociale. Cette nouvelle tache nécessitera, elle aussi, des moyens supplémentaires. Le projet de loi de finances pour 2007 prévoit ainsi la création de 10 postes (de niveau A+), dont 2 autofinancés par redéploiement interne. Ici aussi, la Cour des comptes conduit une politique d'« experts », dix d'entre eux devant être dédiés à la certification les comptes des organismes nationaux du régime général de sécurité sociale.

Au-delà d'un renforcement des effectifs 28 ( * ) , ces nouvelles missions conduisent à recourir à des méthodes différentes et normées (audit des systèmes d'information, des procédures, analyse des risques, tests et sondages, dans le cadre de travaux étroitement planifiés) et impliquent, également, d' appréhender dans leur ensemble les circuits comptables complexes de l'Etat et des branches du régime général de la sécurité sociale, ainsi que d'innombrables opérations . Elles représentent donc un défi en termes de méthode, de compétence et d'organisation que devra relever la Cour des comptes.

2. L'impact des nécessaires réformes statutaires

Si les 1.851 ETPT du programme incluent les 401 ETPT mis à disposition des juridictions financières par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie 29 ( * ) , ce qui représente un premier pas vers l'indépendance vis-à-vis de Bercy, une modification des statuts de ces personnels est nécessaire, dans la mesure où l'autonomie budgétaire des juridictions financières implique une gestion directe des personnels .

Une première évolution statutaire a eu lieu, en 2006, par la loi n° 2006-769 du 1 er juillet 2006 réformant le code des juridictions financières. Ce texte prévoit la mise en oeuvre de mesures statutaires, (principalement de dispositions en matière d'avancement de grade et d'amélioration de la carrière du corps) concernant les magistrats et les conseillers-maîtres en service exceptionnel , et aura un impact financier estimé à hauteur de 0,1 million d'euros 30 ( * ) .

S'agissant des personnels de catégorie B et C (819 agents au total), il est prévu la création de corps administratifs et techniques propres aux juridictions financières d'ici la fin de l'année. Ces corps remplaceront les corps actuels, qui ne concernent jusqu'à présent que la Cour des comptes, et assureront aux personnels un véritable déroulement de carrière. S'agissant des personnels de catégorie A , (721 agents de catégorie A + et 311 agents de catégorie A), une réflexion est en cours, sans qu'aucune piste ne soit écartée : création de corps spécifiques aux juridictions financières ou rattachement à d'autres corps. Une analyse des besoins d'emploi est actuellement menée et ses conclusions devraient être connues en 2007. Le coût prévisionnel de ces mesures est évalué à 0, 4 million d'euros.

3. L'importance des détachements et des mises à disposition

Après examen des effectifs du programme, le nombre de mises à dispositions et de détachements apparaît considérable :

- ETPT originaires d'autres administrations et contribuant à la mise en oeuvre du programme : au sein de la Cour des comptes , le nombre de détachements se porte à 213 ETPT et celui des mises à disposition à 68, pour un total de 281 ETPT . Au sein des CRTC , le nombre de détachements s'élève à 427 et celui des mises à disposition à 339, soit un total de 766 ETPT. Ainsi, sur les 1.851 ETPT du programme, 1.047 (soit 56,6 %) sont originaires d'autres administrations que les juridictions financières ;

- magistrats (en ETPT) exerçant des fonctions à l'extérieur du programme : s'agissant de la Cour des comptes , on dénombre 14 ETPT , dont 6 exerçant en cabinets ministériels. Concernant les CRTC , le nombre se porte à 6 ETPT . Au total, ce sont donc 20 ETPT qui exercent des fonctions à l'extérieur du programme.

4. Une répartition des effectifs qui reflète le poids des actions du programme

Les 1.851 équivalents temps plein travaillés (ETPT) du programme , se répartissent de la manière suivante entre les quatre actions du programme :

- Action 1 « Contrôle externe et indépendant des comptes publics », correspondant au contrôle de la régularité de plus de 1.100 comptes publics nationaux par la Cour des comptes et de plus de 40.000 comptabilités locales par les CRTC. Cette action recouvre en outre les missions de certification des comptes de l'Etat et du régime général de la Sécurité sociale respectivement dévolues par la LOLF et la loi organique n° 2005-881 du 2 août 2005 : 21,8 % des emplois du programme ;

- Action 2 « Contrôle externe et indépendant de la régularité et de l'efficacité de la gestion publique », rassemblant le contrôle de la qualité de la gestion et du bon emploi des fonds publics par la Cour des comptes (organismes de sécurité sociale et entreprises publiques y compris) et par les CRTC (collectivités territoriales, établissements publics locaux et tout organisme privé bénéficiant de concours publics). Elle constitue, en terme quantitatif, la première activité des juridictions financières et mobilise 44,7 % des emplois du programme ;

- Action 3 « Conseil et expertise », comprenant notamment l'assistance au Parlement et au gouvernement par la Cour des comptes, mais également l'expertise internationale, à travers les missions de commissariats au compte exercées par les juridictions financières dans plusieurs organismes internationaux (UNESCO, Interpol) : 10,9 % des emplois du programme ;

- Action 4 « Soutien aux activités des juridictions financières » qui regroupe les activités d'état major assurées par le Premier président assisté du secrétariat général de la Cour des comptes et, pour certaines de ses attributions, du procureur général : 22,6 % des emplois du programme .

E. VERS DE NOUVEAUX PROGRÈS EN MATIÈRE DE MESURE DE LA PERFORMANCE

1. Une mesure déjà pertinente

La LOLF a incité les juridictions financières à mettre en place une véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, ainsi qu'un contrôle de gestion , contrepartie indispensable de l'autonomie budgétaire.

Cette année encore, il y a lieu de se féliciter de ce que les juridictions financières, Cour des comptes y compris, s'inscrivent dans une démarche de performance .

Les deux indicateurs sur l'efficience des fonctions de « Soutien » dans les juridictions financières apparaissent toujours excellents , qu'il s'agisse de celui sur le poids de la masse salariale de la fonction « Soutien » par rapport à la masse salariale globale des juridictions financières ou de celui du poids de la « dépense soutien » par rapport à l'ensemble des crédits des juridictions financières.

En revanche, trois indicateurs appellent quelques remarques.

S'agissant de l'indicateur mesurant la proportion des entités contrôlées par rapport à l'ensemble du champ de contrôle , la question de la cohérence d'unité de mesure peut être soulevée, cet indicateur éta nt exprimé avec un simple nombre pour la Cour des comptes mais en pourcentage pour les CRTC.

S'agissant de l'indicateur relatif aux masses financières contrôlées par rapport au nombre de jours travaillés , là encore, l'unité de mesure diffère puisqu'elle s'exprime en « jours par rapport » pour la Cour des comptes (ce qui mériterait quelques précisions méthodologiques, bien qu'il s'agisse d'une unité de mesure traditionnelle à la Cour des comptes) et en « euro par jour » pour les CRTC (ce qui semble plus conforme à la mesure recherchée par l'indicateur).

Enfin, l'indicateur concernant la proportion des travaux réalisés dans les délais légaux ou réglementaires impartis affiche une cible de 95 % quand le même indicateur affichait 100 % dans le projet de loi de finances initiale pour 2006. Cette correction traduit uniquement la volonté d'introduire un plus grand réalisme dans cette cible en tenant compte d'inévitables retards, échappant parfois aux juridictions financières (retards d'autres administrations se répercutant « en bout de chaîne » sur les juridictions).

2. La recherche de nouvelles améliorations

En matière d'amélioration de la prise en compte de la performance, il convient de relever qu'un groupe de travail interne, associant des représentants de la Cour et des CRTC, mène actuellement une réflexion sur l'adéquation des indicateurs à la mesure de la performance en vue du projet de loi de finances pour 2008.

F. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

- La progression significative des crédits de paiement (+ 5,8 %) procède pour les deux tiers de mesures de personnel (création d'emplois, mesures catégorielles et augmentation de la valeur du point de la fonction publique).

- Il conviendra d'être attentif à l'évolution des statuts des personnels mis à disposition des juridictions financières par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie , ainsi que de leurs incidences en matière de gestion des ressources humaines.

- En concertation avec la Cour des comptes , il conviendra de veiller à l'adéquation des moyens avec ses nouvelles missions : certification des comptes de l'État et certification des comptes du régime général de la sécurité sociale .

- Enfin, si la démarche de performance engagée par les juridictions financières mérite d'être saluée, il sera porté une attention particulière aux conclusions du groupe de travail chargé d'améliorer les indicateurs de performance lors du projet de loi de finances pour 2008 .

* 24 L'article XIV proclame que « tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée ».

* 25 L'article XV énonce que « la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ».

* 26 Somme à laquelle il convient d'ajouter 2,79 millions d'euros au titre des fonds de concours (dont la part essentielle provient de crédits issus de la rémunération de services rendus au titre du Commissariat aux comptes des comptes de l'ONU et de l'UNESCO), soit un total de 184,5 millions d'euros.

* 27 Recrutés à temps plein sous contrat à durée déterminée de 3 ans, ces « experts » font bénéficier la Cour des comptes de leurs compétences en matière d'audit. Trente-cinq seront, au total, dédiés à la certification des comptes de l'Etat.

* 28 Au total, le nombre d'ETPT employés à la certification est estimé à une centaine (45 experts, 20 magistrats et une trentaine d'assistants).

* 29 Soit 100 postes de catégorie A, 176 postes de catégorie B et 125 postes de catégorie C.

* 30 Une partie de cette réforme avait déjà été financée sur la loi de finances pour 2006.

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