ARTICLE 29 ter (nouveau)
Diverses dispositions fiscales dans le domaine de l'assurance

Commentaire : introduit par l'Assemblée nationale sur l'initiative du gouvernement, avec l'avis favorable de la commission, le présent article prévoit, parmi diverses mesures fiscales dans le domaine de l'assurance, l'exonération d'impôt sur les sociétés et de taxe professionnelle les activités de gestion des contrats d'assurance maladie solidaires et responsables.

Introduit par l'Assemblée nationale sur l'initiative du gouvernement, avec l'avis favorable de la commission , le présent article propose diverses mesures fiscales dans le domaine de l'assurance :

- le I du présent article exonère d'impôt sur les sociétés les opérations de gestion de contrats d'assurance maladie dits responsables et solidaires , car respectant certaines conditions permettant de maîtriser la progression des dépenses d'assurance maladie et tendant à une meilleure couverture des populations considérées comme les plus fragiles ;

- le II du présent article prévoit l'exonération de taxe professionnelle pour les mêmes opérations , quel que soit le statut de l'organisme gestionnaire (entreprise d'assurance, mutuelle ou institution de prévoyance) ; par conséquent, les opérations des mutuelles et des institutions de prévoyance n'entrant pas dans le champ d'exonération seraient soumises à la taxe professionnelle ;

- afin de prendre en compte que ne seraient exonérées d'impôt sur les sociétés et de taxe professionnelle que les opérations des mutuelles et des institutions de prévoyance n'entrant pas dans le champ des contrats d'assurance maladie solidaires et responsables, le III du présent article prévoit une fiscalisation progressive pour la détermination du bénéfice imposable ;

- le IV prévoit la possibilité de constituer une provision en franchise d'impôt pour faire face aux fluctuations de sinistralité afférentes aux opérations d'assurance de groupe : il s'agit d'atténuer l'effet de la fiscalisation de certaines activités telle qu'elle résulterait des dispositions des I, II et III du présent article ;

- les V à XI ouvrent le régime fiscal des groupes prévu à l'article 223 A du code général des impôts (CGI) aux entreprises d'assurance qui ne sont pas dotées de capital et établissent des comptes combinés ;

- les XII et XIII définissent les délais d'entrée en vigueur des dispositions du présent article.

I. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A. LES EXONÉRATIONS FISCALES DES OPÉRATIONS SUR LES CONTRATS D'ASSURANCE MALADIE SOLIDAIRES ET RESPONSABLES

1. Les exonérations d'impôt sur les sociétés

Le I du présent article vise à exonérer d'impôt sur les sociétés les opérations de gestion de contrats d'assurance maladie dits solidaires et responsables .

Il est proposé que l'exonération porte tant sur les opérations afférentes aux contrats complémentaires obligatoires que sur celles relatives aux contrats surcomplémentaires facultatifs, visés respectivement au 2° et au 1° du texte proposé pour le 2 de l'article 207 du CGI. L'exonération inclut non seulement les résultats des opérations, mais aussi les frais financiers de gestion des contrats (« la quote-part des produits financiers, afférents aux opérations portant sur la gestion des contrats »).

Il doit s'agir de contrats solidaires et responsables (a) ; l'organisme gestionnaire doit respecter des critères qualitatifs (part des contrats responsables dans l'ensemble des contrats gérés) et quantitatifs (nombre de contrats gérés) (b) ; des dispositions sont enfin prévues pour éviter l'utilisation abusive des exonérations (c) et limiter les effets de seuil (d).

a) La notion de contrats responsables et solidaires

(1) Les contrats responsables

Pour les contrats surcomplémentaires facultatifs , les critères proposés pour retenir la notion de responsabilité reprennent ceux déjà appliqués pour exonérer les contrats d'assurance maladie de taxe spéciale sur les conventions d'assurance :

« (...) à la condition que l'organisme ne recueille pas d'informations médicales, lors de l'adhésion, auprès de l'assuré au titre de ce contrat ou des personnes souhaitant bénéficier de cette couverture, que les cotisations ou les primes ne soient pas fixées en fonction de l'état de santé de l'assuré, que ces garanties ne couvrent pas la participation mentionnée au II de l'article L. 322-2 du code de la sécurité sociale et qu'elles respectent les conditions mentionnées à l'article L. 871-1 du même code. Un décret précise les modalités de détermination de ces résultats. »

Pour les contrats complémentaires obligatoires , les obligations suivantes sont définies dans le premier alinéa du texte proposé par le I du présent article pour le 2° du 2 de l'article 207 du CGI :

« à la condition que les cotisations ou les primes ne soient pas fixées en fonction de l'état de santé de l'assuré, que ces garanties ne couvrent pas la participation mentionnée au II de l'article L. 322-2 du code de la sécurité sociale et qu'elles respectent les conditions mentionnées à l'article L. 871-1 du même code. Un décret précise les modalités de détermination [des] résultats » des opérations sur lesquelles porte l'exonération.

(2) Les contrats solidaires

Le bénéfice fiscal proposé au présent article a pour objet de permettre, en contrepartie, des tarifs plus favorables (ou la prise en charge partielle de cotisations) pour les populations les plus fragiles.

C'est pourquoi, en application des dispositions proposées par le I du présent article pour le 3° du 2 de l'article 207 du CGI, les contrats d'assurance maladie doivent être non seulement responsables, mais également solidaires.

La notion de contrats solidaires renvoie à l'obligation de satisfaire cumulativement deux critères :

- d'une part, l'organisme doit être inscrit sur la liste des gestionnaires de la couverture maladie universelle (CMU) , visée à l'article L. 861-7 du code de la sécurité sociale ;

- d'autre part, il convient de satisfaire au moins une des quatre conditions suivantes afin d'assurer une meilleure couverture des personnes les plus fragiles :

. « b. [Ces organismes] mettent en oeuvre au titre des contrats d'assurance maladie des dispositifs de modulation tarifaire ou de prise en charge des cotisations liées à la situation sociale des membres participants ou des souscripteurs. Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application de cette disposition ;

. « c. Les titulaires de l'attestation de droit accordée par les organismes bénéficiant du crédit d'impôt [ pour l'acquisition d'une couverture maladie complémentaire ] défini aux articles L. 863-1 à L. 863-6 du même code représentent une proportion minimale, fixée par décret en Conseil d'Etat, des membres participants ou souscripteurs des contrats d'assurance maladie relatifs à des opérations individuelles et collectives à adhésion facultative souscrits auprès de l'organisme. Cette proportion est comprise entre 3 % et 6 % ;

. « d. Les personnes ayant atteint l'âge prévu au 1° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale représentent une proportion minimale, fixée par décret en Conseil d'Etat, des membres participants ou souscripteurs de contrats d'assurance maladie souscrits auprès de l'organisme. Cette proportion est comprise entre 15 % et 20 % ;

. « e. Les personnes âgées de moins de 25 ans représentent une proportion minimale, fixée par décret en Conseil d'Etat, des bénéficiaires des contrats d'assurance maladie souscrits auprès de l'organisme. Cette proportion est comprise entre 28 % et 35 % ».

Les deux derniers paragraphes relatifs à l'âge des participants ou des souscripteurs traduisent la volonté d'assurer une mutualisation des risques intergénérationnelle. La multiplicité des critères proposés aux paragraphes b, c, d et e ci-dessus rend par ailleurs compte de la diversité des actions de solidarité conduites dans la couverture du risque santé par les entreprises d'assurance, les mutuelles et les institutions de prévoyance.

b) Les bénéficiaires

Tous les organismes gestionnaires (entreprises d'assurance, mutuelles, institutions de prévoyance), quel que soit leur statut, seraient éligibles à l'exonération.

Toutefois, des seuils qualitatifs sont proposés afin d'éviter que l'exonération ne bénéficie à des organismes ne gérant qu'une trop faible proportion de contrats responsables dans leur portefeuille d'activités. Ce pourcentage de contrats responsables est exprimé non pas de manière absolue, mais par tranche, afin de permettre des adaptations de ce seuil en fonction de la diffusion plus ou moins rapide des contrats responsables :

- pour les contrats surcomplémentaires facultatifs, il s'agit de respecter « une proportion minimale [de souscripteurs et membres participants couverts par des contrats responsables], fixée par décret en Conseil d'Etat, de l'ensemble des souscripteurs et membres participants des contrats d'assurance maladie relatifs à des opérations individuelles et collectives à adhésion facultative souscrits auprès de l'organisme. Cette proportion est comprise entre 80 % et 90 % » ;

- pour les contrats complémentaires obligatoires, cette proportion, également fixée par décret en Conseil d'Etat, est comprise entre 90 % et 95 % : ces pourcentages plus élevés s'expliquent par le fait que les contrats facultatifs sont également à adhésion individuelle (ce qui tend à diminuer la part potentielle des contrats responsables dans le portefeuille d'activités), alors que les contrats obligatoires sont souscrits exclusivement dans le cadre d'opérations collectives.

Le choix de critères exclusivement qualitatifs, à savoir la proportion de personnes couvertes par des contrats responsables, est toutefois apparu poser de réelles difficultés aux opérateurs dont les contrats concernent un nombre élevé de personnes, pour lesquels les seuils proposés n'auraient été atteignables qu'à condition de segmenter l'activité. Or, la plupart des personnes couvertes par des contrats responsables adhérent à des contrats gérés par ces grandes sociétés : il aurait été paradoxal que seules les petites assurances, mutuelles et institutions de prévoyance couvrant une minorité des bénéficiaires de contrats responsables aient été exclusivement visées par l'exonération.

Au regard d'une analyse fine du portefeuille d'activités des principaux groupes d'assurance, le présent article a conduit à retenir, alternativement au critère qualitatif, un critère quantitatif qui inclurait l'ensemble des principales sociétés d'assurance et mutuelles dans le champ de l'exonération : sont donc également couverts les contrats responsables représentant au moins 150.000 personnes (pour les contrats facultatifs) et 120.000 personnes (pour les contrats obligatoires). Selon les informations communiquées à votre rapporteur général, il s'agit de sociétés dont une nette majorité des souscripteurs et bénéficiaires de leurs contrats, ou au moins une forte minorité, relèvent d'un contrat responsable (la part minimale de contrats responsables serait ainsi de l'ordre de 60 % pour les contrats facultatifs, et de 70 % pour les contrats obligatoires).

c) Les dispositifs anti-abus

Deux mesures au présent article prévoient d'éviter une utilisation abusive du dispositif d'exonération.

D'une part, le texte proposé pour le 4° du 2 de l'article 207 du CGI tend à ce que les critères de définition des contrats responsables et solidaires soient appréciés au niveau des groupes , au titre de leurs activités imposables en France : il s'agit d'éviter des montages juridiques où les critères à satisfaire seraient respectés dans différents établissements du groupe, mais pas au sein du groupe lui-même.

D'autre part, le texte proposé pour le 5° du 2 de l'article 207 du CGI vise à exclure du champ de l'exonération les contrats responsables en complément desquels il serait conclu d'autres contrats remettant en cause le caractère responsable des premiers contrats conclus .

d) La prise en compte des franchissements de seuils

Enfin, le texte proposé pour le 6° du 2 de l'article 207 du CGI prévoit une certaine tolérance en cas de franchissement des seuils prévus pour définir le caractère solidaire des contrats.

Ainsi, les organismes qui ont bénéficié de l'exonération d'impôt sur les sociétés continueraient à en bénéficier « au titre de la première année au cours de laquelle, parmi les conditions mentionnées au 3° » pour définir les contrats solidaires « ils ne satisfont pas aux conditions mentionnées au c, au d ou au e », à savoir :

- (c) : une part minimale des membres participants ou souscripteurs des contrats d'assurance maladie, bénéficiaires du crédit d'impôt au titre d'une couverture maladie complémentaire ; cette part, définie par décret en Conseil d'Etat, est comprise entre 3 % et 6 % de l'ensemble des participants ou souscripteurs ;

- (d) : une proportion de personnes âgées de plus de 65 ans supérieure à un seuil minimal fixé par voie réglementaire (compris entre 15 % et 20 %) ;

- (e) : une proportion de personnes âgées de moins de 25 ans supérieure à un seuil minimal fixé par voie réglementaire (compris entre 15 % et 20 %).

2. Les exonérations de taxe professionnelle

Dans le droit actuel, les mutuelles et unions de mutuelles sont exonérées de taxe professionnelle en raison de leur statut, en application des dispositions du 1° de l'article 1461 du CGI. Pour leur part, les institutions de prévoyance tendent à être exonérées non pas en droit, mais en fait, compte tenu de la définition de leurs activités comme non-lucratives.

La nouvelle rédaction proposée par le A du II du présent article pour le 1° de l'article 1461 du CGI exonère de taxe professionnelle les entreprises d'assurance, les mutuelles et les institutions de prévoyance s'agissant des opérations portant sur les contrats d'assurance responsables et solidaires . La définition du champ de l'exonération de taxe professionnelle est identique à celle prévue pour l'impôt sur les sociétés par le I du présent article. A contrario , toutes les autres activités de ces organismes sont assujetties à la taxe professionnelle , notamment pour la couverture d'autres risques que la maladie et les contrats d'assurance maladie qui ne présentent pas un caractère solidaire et responsable.

Le B du II du présent article propose cependant de maintenir l'exonération de taxe professionnelle pour les opérations réalisées en général par les institutions de prévoyance, via des groupements de moyens, au profit de l'AGIRC et de l'ARRCO . Le maintien de l'exonération actuelle pour l'AGIRC et l'ARRCO est justifié par le fait qu'il s'agit de régimes obligatoires, dont la gestion ne revêt pas de caractère lucratif et doit être confiée à des organismes extérieurs à l'AGIRC et l'ARRCO qui constituent des structures très souples.

3. La fiscalisation progressive des opérations des mutuelles et des institutions de prévoyance n'entrant pas dans le champ des exonérations

Les activités des mutuelles et des institutions de prévoyance sont donc ainsi partiellement imposables à l'impôt sur les sociétés et à la taxe professionnelle .

Le dispositif proposé par le III du présent article prévoit une fiscalisation progressive : pour la détermination du bénéfice imposable, les mutuelles et les réserves spéciales pourront constituer un « compte de réserve spéciale de solvabilité », dont les dotations seraient admises à déduction à hauteur de :

« 100 p. 100 du montant du résultat imposable pour l'exercice ouvert en 2008 ;

« 90 p. 100 pour l'exercice ouvert en 2009 ;

« 80 p. 100 pour l'exercice ouvert en 2010 ;

« 60 p. 100 pour l'exercice ouvert en 2011 ;

« 40 p. 100 pour l'exercice ouvert en 2012 ;

« 20 p. 100 pour l'exercice ouvert en 2013 » .

Les sommes prélevées sur la réserve spéciale de solvabilité sont rapportées au résultat imposable de l'exercice en cours à la date du prélèvement.

B. LA CRÉATION D'UNE PROVISION POUR FAIRE FACE AUX FLUCTUATIONS DE SINISTRALITÉ

Le IV du présent article vise à insérer un nouvel article 39 quinquies GD dans le CGI pour prendre en compte les fluctuations de sinistralité sur les opérations imposables des organismes d'assurance : il est proposé de créer une provision en franchise d'impôt pour faire face à ces fluctuations de sinistralité .

1. Le principe de la provision : faire face aux fluctuations de sinistralité dans le cadre des contrats dits de désignation

a) La constitution d'une provision spécifique

Le texte proposé par le IV du présent article pour le I de l'article 39 quinquies GD du CGI définit le principe de la provision : « faire face aux fluctuations de sinistralité afférentes aux opérations d'assurance de groupe contre les risques décès, incapacité et invalidité réalisées dans le cadre des contrats d'assurance » offrant une protection sociale complémentaire aux salariés, conformément aux dispositions définies des articles L. 912-1 et L. 912-2 du code de la sécurité sociale.

Il s'agit d'une catégorie spécifique de contrats dits « contrats de désignation », mis en place dans le cadre d'accords de branche, et par conséquent applicables à tous les salariés de la branche. Les partenaires sociaux choisissent le prestataire pour un mandat d'une durée ordinaire de cinq ans.

La provision est calculée pour l'ensemble des contrats visés par la désignation professionnelle.

b) Une provision destinée à couvrir les résultats techniques déficitaires

Ainsi que le précise le premier alinéa du texte proposé pour le IV de l'article 39 quinquies GD du CGI, la provision vise à compenser les résultats techniques déficitaires de l'exercice, « dans l'ordre d'ancienneté des dotations annuelles ».

2. La détermination du montant de la provision

a) La dotation de la provision est admise à hauteur de la différence (appelée bénéfice technique) entre les primes reçues et les sommes versées au titre des sinistres

La détermination du montant de la provision est définie dans le texte proposé au II de l'article 39 quinquies GD du CGI :

- la dotation annuelle de la provision est admise à hauteur du bénéfice technique de l'ensemble des contrats visés par la désignation professionnelle, net de cessions en réassurance ;

- le montant total de la provision ne peut excéder 130 % du montant total des cotisations afférentes à l'ensemble de ces contrats, nettes d'annulations et de cessions en réassurance, acquises au cours de l'exercice.

b) Une définition précise du bénéfice technique

Calculé avant réintégration de la provision servant à compenser les résultats déficitaires, le bénéfice technique est précisément défini, dans le texte proposé au III de l'article 39 quinquies GD du CGI, comme la différence entre :

- d'une part, « le montant des primes ou cotisations » relatives aux sinistres « diminuées des dotations aux provisions légalement constituées, à l'exception de la provision pour participation aux excédents » ;

- d'autre part, « le montant des charges de sinistres, augmenté des frais imputables à l'ensemble des contrats considérés, à l'exception de la participation aux bénéfices versée, ainsi que d'une quote-part des autres charges ».

c) L'intégration des intérêts techniques dans le bénéfice technique

Par ailleurs, le bénéfice technique peut donner lieu à des intérêts techniques, susceptibles de majorer l'ensemble des primes (nettes de frais) encaissées par l'assureur : ces primes, dans le droit des contrats d'assurance, sont appelées provisions mathématiques.

Le texte proposé par le présent article prévoit explicitement que si, « au cours de l'exercice, des intérêts techniques sont incorporés aux provisions mathématiques légalement constituées et afférentes aux contrats concernés, le bénéfice technique comprend le montant de ces intérêts ».

d) Le devenir des provisions non utilisées

Le texte proposé par le IV du présent article pour le deuxième alinéa du IV de l'article 39 quinquies GD du CGI prévoit la possibilité où les dotations constituées en vue de la provision n'ont pas pu être utilisées , conformément à leur objet, dans un délai de dix ans.

Dans ce cas, ces provisions « sont transférées à un compte de réserve spéciale la onzième année suivant celle de leur comptabilisation. Ce transfert ne peut avoir pour effet de porter le montant total de cette réserve au-delà de 70 % du montant total des cotisations (...). L'excédent de ces dotations est rapporté au bénéfice imposable de la onzième année suivant celle de leur comptabilisation ».

3. Les transferts de portefeuille

Le texte proposé pour le troisième alinéa du IV de l'article 39 quinquies GD du CGI détermine le transfert de la provision en cas de cession de portefeuille :

« En cas de transfert de tout ou partie d'un portefeuille de contrats, la provision correspondant aux risques cédés est également transférée et rapportée au bénéfice imposable du nouvel organisme assureur dans les mêmes conditions que l'aurait fait l'assureur initial en l'absence d'une telle opération ».

4. Dispositions finales

Le premier alinéa du texte proposé pour le V de l'article 39 quinquies GD du CGI prévoit un décret en Conseil d'Etat pour définir « les modalités de comptabilisation, de déclaration et d'application » de la provision, « notamment en ce qui concerne la détermination du bénéfice technique ».

5. Un dispositif plus favorable que l'actuelle provision qui n'est pas limitée aux contrats de désignation

Le second alinéa du texte proposé pour le V du même article précise que l'application des dispositions prévues au titre de la provision pour fluctuation des risques de sinistralité « est exclusive de l'application aux mêmes contrats des dispositions de l'article 39 quinquies GB du présent code », lequel prévoit un autre régime de provision pour faire face aux fluctuations de sinistralité afférentes aux opérations d'assurance de groupe (dont les modalités ont largement inspiré le dispositif proposé au présent article).

Le régime défini à l'article 39 quinquies GB du CGI est plus large que le dispositif proposé par le IV du présent article qui, comme il a été souligné plus haut, ne concerne que les contrats dits de désignation.

Le dispositif ici envisagé pour l'article 39 quinquies GD du CGI est par ailleurs nettement plus favorable que celui défini par l'article 39 quinquies GB du même code :

- dans le dispositif proposé pour l'article 39 quinquies GD du CGI, la dotation annuelle de la provision peut atteindre le niveau du bénéfice technique dans la limite de 130 % du montant des cotisations, alors que l'article 39 quinquies GB prévoit une provision limitée à 75 % du bénéfice technique, dans une limite comprise entre 23 % et 100 % (selon le nombre d'assurés) du montant des primes et cotisations ;

- les provisions non utilisées peuvent être affectées à un compte spécial de provision, alors que l'article 39 quinquies GB du CGI prévoit seulement que les provisions non utilisées soient rapportées, dans un délai de dix ans, au bénéfice imposable de la onzième année suivant celle de leur comptabilisation.

C. L'APPLICATION DU RÉGIME FISCAL DES GROUPES AUX ORGANISMES D'ASSURANCE

1. La création d'un régime de groupe spécifique

Le V du présent article modifie l'article 223 A du CGI, afin d'adapter le régime d'intégration fiscale aux groupes d'entreprises d'assurance, de mutuelles ou d'instituts de prévoyance, dont la cohérence ne résulte pas systématiquement de liens en capital.

a) Le régime de groupe ou le régime de l'intégration fiscale

L'article 29 du présent projet de loi comporte un certain nombre de dispositions relatives au régime d'intégration fiscale. Compte tenu du commentaire détaillé effectué à cet article, ne seront retracés ici que les principaux éléments du régime de l'intégration fiscale et plus particulièrement les conditions de constitution.

Le régime de l'intégration fiscale, régime optionnel , donc sans agrément préalable, permet à la société tête de groupe, dite société intégrante, d'être seule redevable de l'impôt sur les sociétés (IS) dû par ses filiales et sous-filiales dont elle détient, directement ou indirectement, et de manière continue au cours d'un exercice, au moins 95 % du capital.

La société intégrante choisit librement, avec leur accord, les sociétés à intégrer dont elle détient au moins 95 % du capital. Elle peut mettre fin à tout moment à l'intégration d'une filiale, de façon définitive ou temporaire.

La société mère intégrante comme les filiales intégrées doivent être de droit français et relever de l'IS dans les conditions de droit commun.

Aux termes de l'article 223 A précité, la société mère ne peut être détenue, directement ou indirectement, à 95 % ou plus par une autre société française soumise à l'IS . Il est toutefois possible pour une société d'être intégrante lorsqu'au moins 95 % de son capital est détenu par une personne morale soumise à l'IS dans les conditions de droit commun, dès lors que cette détention est indirecte et réalisée par l'intermédiaire d'une ou plusieurs personnes morales qui ne sont pas soumises à cet impôt . De même, aux termes de l'article 223 L, un dépassement temporaire du seuil de 95 % par la société détentrice de la société mère est possible, sous réserve que la situation soit régularisée avant la clôture de l'exercice au cours duquel ce dépassement a eu lieu.

b) Le dispositif proposé

1) Un nouveau critère d'intégration

L'application du régime d'intégration fiscale aux entreprises d'assurance, aux mutuelles ou aux instituts de prévoyance , nécessite la révision du critère d'intégration.

Le du V du présent article propose ainsi d'insérer un nouvel alinéa au sein de l'article 223 A du CGI afin de définir les critères qui peuvent donner lieu à une intégration fiscale des groupes de sociétés d'assurance, mutuelles et instituts de prévoyance.

Si l'intégration fiscale de droit commun repose sur le seul critère d'une détention minimal de capital par la société mère (95 %), le nouvel alinéa propose un nouveau critère associant le périmètre de combinaison des comptes et la qualité des liens entre les sociétés appartenant à cette combinaison.

Ce nouveau critère reprend en fait la rédaction des articles L. 345-2 du code des assurances, L. 212-7 du code de la mutualité et de l'article L. 931-34 du code de la sécurité sociale, chacun de ces articles précisant la définition d'un groupe de sociétés d'assurance, de mutuelles, ou d'instituts de prévoyance.

Le du V du présent article précise par ailleurs que les sociétés membre d'un groupe tel qu'il est défini par le présent article ne peuvent être mères d'un groupe formé dans les conditions de droit commun, c'est-à-dire fondé sur des liens capitalistiques.

2) Précisions des modalités en cas de changement de catégorie de groupe

L'insertion d'un nouveau mode de constitution de groupe implique de préciser les modalités de changement d'une catégorie à une autre. Ce changement entraîne nécessairement la cessation du groupe tel qu'il existait et la création d'un nouveau groupe.

Dans cette perspective, le du X du présent article ainsi que le 4 ° du IX organise les modalités de transition.

Le du X propose d'insérer un nouvel alinéa à l'article 223 S du CGI afin de préciser qu'un groupe cesse d'exister :

- si  créé selon les conditions de droit commun, il se reconstitue selon les nouvelles modalités prévues par le présent article ;

- si  créé selon les nouvelles modalités, il se reforme selon les règles de droit commun ;

- si une société, non intégrante, du groupe formé selon les nouvelles modalités, souhaite être la société mère de ce groupe.

Par coordination, le du IX du présent article insère au sein de l'article 223 L du CGI un nouvel alinéa, afin de préciser les modalités de la cessation évoquée ci-dessus. Le premier groupe est ainsi réputé avoir cessé exister à la date de clôture de l'exercice qui précède le premier exercice du nouveau groupe. La durée de ce nouvel exercice peut, par conséquent, être supérieure ou inférieure à 12 mois. Enfin, il est précisé, à l'instar du régime de droit commun, que le résultat d'ensemble du groupe est susceptible d'être majoré dans le cadre de la « déneutralisation » d'opérations, qui sont dès lors réimposées.

3) Mesures de coordination

Compte tenu de l'insertion d'un nouvel alinéa au sein de l'article 223 A du code général des impôts et d'un nouveau mode de constitution de groupe, un certain nombre de mesures de coordination sont nécessaires.

Le et le du V du présent article comme les VI , VII, IX sauf le , ainsi que les du X , et XI sont des mesures de coordination.

D. LES CONDITIONS D'ENTRÉE EN VIGUEUR : DÉLAIS ET APPROBATION PAR LA COMMISSION EUROPÉENNE

Compte tenu des opérations de retraitement comptable qu'impliquent les dispositions proposées au présent article, le XII du présent article propose une application des dispositions suivantes aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2008 :

- l'exonération d'impôt sur les sociétés visée au I du présent article ;

- la constitution de la provision pour faire face aux fluctuations de sinistralité, définie au IV ;

- les mesures relatives au régime fiscal des groupes prévues aux V à XI du présent article.

Par ailleurs, conformément aux dispositions du XIII du présent article :

- ne s'appliqueraient qu'à compter des impositions dues au titre de l'année 2010 les dispositions du A du II du présent article redéfinissant le champ d'imposition à la taxe professionnelle (incluant les activités des mutuelles et des institutions de prévoyance, hormis les opérations relatives aux contrats d'assurance maladie responsables, et excluant les activités des entreprises d'assurance relevant des contrats responsables) ;

- les dispositions excluant du champ de la taxe professionnelle les opérations réalisées au profit de l'AGIRC et de l'ARRCO s'appliqueraient à compter des impositions dues au titre de 2007.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS ET TAXE PROFESSIONNELLE : UNE CLARIFICATION NÉCESSAIRE

1. Une équité de traitement conforme au droit communautaire

Votre rapporteur général se félicite que le dispositif proposé par les I et II du présent article, après concertation avec l'ensemble des professions intéressées, permette d'assurer une équité de traitement fiscal entre les entreprises d'assurance, les mutuelles et les institutions de prévoyance , nonobstant les différences de statut entre ces organismes. Cette approche, fondée sur la nature des produits commercialisés, lui apparaît comme la seule conforme au droit communautaire.

Par ailleurs, l'exonération proposée pour les contrats d'assurance maladie responsables et solidaires encourage leur commercialisation.

2. Un bilan financier équilibré à terme

Au plan financier, votre rapporteur général observe que les mesures proposées respectent, à terme, l'équilibre des finances publiques de l'Etat et des collectivités territoriales, bien que le présent article prévoie une entrée en vigueur très progressive et que les données communiquées par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie sont très lacunaires .

a) Le bilan financier pour la taxe professionnelle

Alors que les dispositions relatives à la taxe professionnelle n'entreraient en vigueur qu'à compter des impositions dues au titre de 2010, celles-ci n'ont pas fait l'objet de chiffrages précis.

Compte tenu de la composition de l'actif des organismes d'assurance (comportant une proportion relativement faible d'actifs immobiliers), les enjeux budgétaires sont limités : selon les informations communiquées à votre rapporteur général par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, l'ensemble des sommes versées au titre de la taxe professionnelle par les entreprises d'assurance se chiffrerait en dizaines de millions d'euros par an. Les modifications proposées auraient un impact du même ordre de grandeur, compte tenu de l'exonération pour les entreprises d'assurance au prorata des opérations relatives aux contrats d'assurance-maladie solidaires et responsables, et au regard de la fiscalisation pour les mutuelles et les institutions de prévoyance à l'exclusion des opérations portant sur les contrats solidaires et responsables.

Votre rapporteur général est toutefois surpris de la faiblesse de ces montants et souhaiterait disposer d'informations plus détaillées en séance publique.

b) Le bilan financier concernant l'impôt sur les sociétés

Compte tenu du niveau plus élevé des montants d'impôt sur les sociétés (IS), le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a effectué des simulations concernant l'IS qui ne peuvent être que des estimations devant prendre en compte différents paramètres (en particulier, le développement des contrats d'assurance maladie responsables et des autres activités).

S'agissant des pertes de recettes, l'exonération nouvelle dont bénéficieraient les entreprises d'assurance au titre de l'impôt sur les sociétés pour les contrats solidaires et responsables représenterait un coût immédiat qui pourrait atteindre 100 à 150 millions d'euros par an.

Concernant les recettes attendues de la fiscalisation de la plupart des activités des mutuelles et des institutions de prévoyance, il peut être dressé le bilan suivant :

- les opérations portant sur les contrats autres que responsables pourraient représenter des gains annuels de « plusieurs dizaines de millions d'euros » par an ;

- les activités médico-sociales des mutuelles relevant du livre III du code de la mutualité (par exemple, les centres de soins optiques et auditifs opérant dans les mêmes conditions que le secteur concurrentiel) génèreraient des recettes fiscales annuelles inférieures à 10 millions d'euros ;

- en revanche, les opérations effectuées au titre des contrats de prévoyance couvrant d'autres risques que la maladie représentent des plus-values potentielles de recettes fiscales (dont le plein effet ne commencera qu'à partir de 2014) pouvant être évaluées à une centaine de millions d'euros chaque année.

Ces données n'intègrent pas la nouvelle provision pour fluctuation de sinistralité, dont devraient notamment bénéficier les institutions de prévoyance. L'impact budgétaire en serait limité. Des précisions sur ce point devront également être apportées par le gouvernement.

B. LES MODALITÉS DU RÉGIME FISCAL DES GROUPES POUR LES ORGANISMES D'ASSURANCE

Les dispositions de V à IX du présent article proposent d'adapter le régime fiscal de groupe aux différents organismes d'assurance. Il crée à cet effet une nouvelle catégorie de groupe, dont la différence avec le régime de droit commun réside dans le critère d'intégration.

En effet, ces organismes sont aujourd'hui exclus du régime d'intégration fiscale, compte tenu du critère d'intégration qui repose sur des liens capitalistiques, la société mère devant au moins détenir 95 % des filiales pour pouvoir les intégrer. A cet égard, votre rapporteur général se félicite de cette mesure d'équité.

Le présent article propose ainsi de mettre en place un critère associant le périmètre de combinaison des comptes et la qualité des liens entre les sociétés appartenant à cette combinaison. Ce critère reprend la rédaction des articles des codes concernés qui définissent un groupe de sociétés d'assurance, de mutuelles ou d'instituts de prévoyance. Compte tenu de l'insertion de ce nouveau critère, le présent article organise également les modalités de transition d'une catégorie de groupe à une autre.

Votre rapporteur général remarque ainsi que l'adaptation ne porte que le critère d'intégration, et que par conséquent les autres dispositions du régime d'intégration fiscale de droit commun s'appliquent aux organismes d'assurance qui souhaitent bénéficier de l'intégration fiscale.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

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