N° 394

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 18 juillet 2007

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l' accord-cadre entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Belgique sur la coopération sanitaire transfrontalière ,

Par M. André VANTOMME,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Serge Vinçon, président ; MM. Jean François-Poncet, Robert del Picchia, Jacques Blanc, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Jean-Pierre Plancade, Philippe Nogrix, Mme Hélène Luc, M. André Boyer, vice - présidents ; MM. Jean-Guy Branger, Jean-Louis Carrère, Jacques Peyrat, André Rouvière, secrétaires ; MM. Bernard Barraux, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Pierre Biarnès, Didier Borotra, Didier Boulaud, Robert Bret, Mme Paulette Brisepierre, M. André Dulait, Mme Josette Durrieu, MM. Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Pierre Fourcade, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Gisèle Gautier, Nathalie Goulet, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Hubert Haenel, Robert Hue, Joseph Kergueris, Robert Laufoaulu, Louis Le Pensec, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Charles Pasqua, Daniel Percheron, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Yves Rispat, Josselin de Rohan, Roger Romani, Gérard Roujas, Mme Catherine Tasca, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet.

Voir le numéro :

Sénat : 257 (2006-2007)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser l'approbation de l'accord-cadre sur la coopération sanitaire transfrontalière signé entre la France et la Belgique à Mouscron le 30 septembre 2005.

Cet accord-cadre est pratiquement identique à celui que la France a signé avec l'Allemagne le 22 juillet 2005 et dont le Parlement a autorisé l'approbation au mois d'octobre 2006. Il vise à faciliter et encourager les coopérations nouées par les acteurs locaux en matière de santé, de part et d'autre de la frontière franco-belge, en leur donnant une base juridique claire et en évitant certaines lourdeurs administratives auxquelles se heurte actuellement la mise en oeuvre de ces coopérations.

L'objectif est de faciliter l'accès aux soins pour les populations frontalières, en leur permettant de s'adresser indifféremment à des établissements ou professionnels de santé des deux pays. Il s'agit aussi de mieux coordonner l'offre de soins, afin de pallier les lacunes et d'éviter des capacités redondantes. Enfin, ces coopérations peuvent donner lieu à des politiques sanitaires locales définies en commun, par exemple en matière de prévention.

Plus généralement, cet accord-cadre s'inscrit dans une volonté de développer, dans tous les domaines, les projets transfrontaliers.

Votre rapporteur présentera tout d'abord le dispositif de l'accord-cadre du 30 septembre 2005 avant d'évoquer la mise ne oeuvre des coopérations en matière sanitaire dans la zone frontalière franco-belge.

I. L'ACCORD-CADRE DU 30 SEPTEMBRE 2005 SUR LA COOPÉRATION SANITAIRE TRANSFRONTALIÈRE FRANCO-BELGE

A. LES OBJECTIFS GÉNÉRAUX ET LE CHAMP D'APPLICATION DE L'ACCORD

L'accord-cadre signé le 30 septembre 2005 entre les ministres français et belge de la santé a pour objet de préciser le cadre juridique de la coopération sanitaire transfrontalière entre la France et la Belgique. L'article 1 er indique qu'il vise :

- à assurer un meilleur accès à des soins de qualité pour les populations de la zone frontalière ;

- à garantir une continuité des soins à ces mêmes populations ;

- à optimiser l'organisation de l'offre de soins , en facilitant l'utilisation ou le partage des moyens humains et matériels ;

- et à favoriser la mutualisation des connaissances et de pratiques .

L'accord franco-allemand du 22 juillet 2005 mentionnait également un cinquième objectif : le recours plus rapide aux secours d'urgence. La partie allemande avait notamment souhaité que soit explicitement posé le principe selon lequel les professionnels de santé des services de secours d'urgence peuvent intervenir indifféremment de part et d'autre de la frontière. L'accord franco-belge ne comporte quant à lui aucune disposition spécifique sur les secours d'urgence, les deux parties considérant que ce domaine est couvert par les objectifs généraux de l'accord et qu'au regard de leurs législations respectives, il n'y avait pas lieu de prévoir des dispositions analogues à celles de l'accord franco-allemand. De surcroît, dès qu'elle sera transposée, à savoir en principe avant le 20 octobre 2007, la directive européenne 2005/36/CE du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles devrait permettre de régler toute éventuelle difficulté.

L'accord-cadre s'applique dans le périmètre de quatre régions françaises - Champagne-Ardenne, Lorraine, Nord-Pas-de-Calais et Picardie - et de treize arrondissements belges situés de la mer du Nord à la frontière luxembourgeoise (Veurne, Ieper, Kortrijk, Mouscron, Tournai, Ath, Mons, Thuin, Philippeville, Dinant, Neufchâteau, Virton et Arlon).

Dans ce périmètre, il s'applique à toute personne pouvant bénéficier des prestations de l'assurance-maladie de l'une des parties et résidant ou séjournant temporairement dans cette zone frontalière (article 2).

L'accord-cadre est mis en oeuvre par les autorités compétentes en matière d'organisation de l'accès aux soins et de sécurité sociale (article 2).

B. LES CONVENTIONS DE COOPÉRATION SANITAIRE

La mise en oeuvre de la coopération sanitaire transfrontalière s'effectue sur la base de conventions de coopération sanitaire (article 3).

Le droit français actuel permet déjà, sous certaines conditions, la passation de conventions de ce type, par exemple entre organismes de sécurité sociale et établissements de soins établis dans un autre pays de l'Union européenne. Toutefois ces conventions sont soumises à approbation ministérielle.

L'accord-cadre donnera désormais une base juridique plus forte aux conventions locales de coopération qui pourront être conclues et mises en oeuvre sans autorisation ministérielle préalable .

Ces conventions organisent la coopération entre des structures et ressources sanitaires situées dans la zone frontalière, y ayant un point d'ancrage ou faisant partie d'un réseau intervenant dans cette zone. Elles peuvent prévoir à cette fin des complémentarités entre structures et ressources sanitaires existantes , ainsi que la création d'organismes de coopération ou de structures communes.

L'article 3 indique également que les conventions « prévoient les conditions et modalités obligatoires d'intervention des structures de soins, des organismes de sécurité sociale et des professionnels de santé, ainsi que de prise en charge des patients ».

L' objet des conventions peut porter sur cinq domaines:

- l' intervention transfrontalière des professionnels de santé , notamment ses aspects statutaires ;

- l' organisation du transport sanitaire des patients ;

- la garantie d'une continuité des soins incluant en particulier l'accueil et l'information des patients ;

- les critères d'évaluation et de contrôle de la qualité et de la sécurité des soins ;

- les moyens financiers nécessaires à la mise en oeuvre des coopérations .

L'arrangement administratif général relatif aux modalités d'application de l'accord-cadre, signé lui aussi à Mouscron le 30 septembre 2005, précise que les critères d'évaluation et de contrôle de la qualité et de la sécurité des soins portent en particulier sur :

- une politique de qualité en matière de gestion des risques (notamment sur l'ensemble des vigilances, la distribution du médicament, la transfusion sanguine, l'anesthésie, la gestion des risques iatrogènes et des infections nosocomiales) ;

- l'actualisation des connaissances des professionnels de santé ;

- la transmission des informations médicales relatives aux patients ;

- la prise en charge de la douleur.

Les conventions doivent préciser la méthodologie associée à la mutualisation des bonnes pratiques.

Il est précisé que les conventions déjà existantes doivent se conformer à l'accord-cadre. L'arrangement administratif du 30 septembre 2005 fixe à cet effet un délai maximal d'un an à compter de l'entrée en vigueur de l'accord-cadre.

Les personnes et autorités pouvant conclure des conventions de coopération ont été définies par l'arrangement administratif du 30 septembre 2005. Il s'agit, pour la France, des directions départementales et régionales d'action sanitaire et sociale , des agences régionales d'hospitalisation et des unions régionales de caisses d'assurance-maladie . Pour la Belgique, il s'agit de l'Institut national d'assurance-maladie-invalidité, des organismes assureurs (Caisse auxiliaire d'assurance maladie-invalidité et Caisse des soins de santé de la Société nationale des chemins de fer belges) et des dispensateurs de soins (praticiens, kinésithérapeutes, infirmiers, auxiliaires paramédicaux, établissements hospitaliers, établissements de rééducation fonctionnelle et de réadaptation professionnelle).

C. LES MODALITÉS DE PRISE EN CHARGE DES SOINS

En matière de remboursement des soins , l'accord-cadre se réfère à la réglementation européenne (règlement (CE) n° 1408/71 de coordination des régimes de sécurité sociale dans l'Union européenne), mais permet également d'aller au-delà en facilitant la prise en charge des hospitalisations réalisées dans le pays voisin .

Il faut en effet rappeler que la réglementation communautaire permet aux assurés d'un régime français qui reçoivent des soins dans un autre État membre, qu'ils soient en situation de résidence ou de séjour temporaire, de se faire rembourser des frais exposés, dans les mêmes conditions que s'ils étaient affiliés au régime du lieu des soins, dès lors qu'ils présentent un document communautaire attestant l'ouverture de leurs droits en France (carte européenne d'assurance maladie pour les soins inopinés reçus à l'occasion d'un séjour temporaire ou autorisation préalable E 112 pour les soins programmés, ambulatoires comme hospitaliers).

Par ailleurs, pour se conformer à la jurisprudence européenne , la réglementation française pose désormais le principe selon lequel « les caisses d'assurance maladie procèdent au remboursement des frais des soins dispensés aux assurés sociaux et à leurs ayants droit dans un État membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen, dans les mêmes conditions que si les soins avaient été reçus en France » (article R 332-3 du code de la sécurité sociale). Toutefois, hors l'hypothèse de soins inopinés, le remboursement des frais des soins hospitaliers ou nécessitant le recours aux équipements matériels lourds ne peut être effectué que sur autorisation préalable . Cette autorisation ne peut être refusée que si les soins envisagés ne figurent pas parmi les soins dont la prise en charge est prévue par la réglementation française ou s'il apparaît qu'un traitement identique ou présentant le même degré d'efficacité peut être obtenu en temps opportun en France, compte tenu de l'état du patient et de l'évolution probable de son affection (article R 332-4). Cependant, les assurés sociaux qui ne peuvent recevoir en France les soins appropriés à leur état sont dispensés de l'autorisation préalable lorsque leur prise en charge s'effectue dans le cadre de conventions passées, après autorisation conjointe du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé de la santé, entre les organismes de sécurité sociale et les établissements de soins qui les accueillent (article R 332-5).

L'accord-cadre franco-belge stipule précisément, dans son article 5, que les conventions de coopération sanitaire pourront prévoir une autorisation automatique pour les soins reçus dans la zone frontalière et normalement soumis à autorisation préalable, ce qui constitue une simplification par rapport à l'article R 332-5 du code de la sécurité sociale, puisque l'approbation préalable des conventions par les ministres en charge de la santé et de la sécurité sociale n'est plus exigée. Toutefois, dans ce cas de figure, les conventions de coopération peuvent prévoir une tarification spécifique des actes et soins reçus.

L'article 5 de l'arrangement administratif du 30 septembre 2005 récapitule les trois modalités possibles de prise en charge, par l'institution compétente, des soins reçus dans le cadre d'une convention de coopération :

- sur la base des tarifs du lieu des soins , dans le cadre des règlements communautaires relatifs à la coordination des régimes de sécurité sociale et lorsque l'assuré peut présenter au prestataire de soins un document communautaire attestant l'ouverture de ses droits;

- sur la base des tarifs de l'État d'affiliation , dans le cadre de la prise en charge de soins pouvant être obtenus en application de la jurisprudence dite « Kholl et Decker » de la Cour de Justice des Communautés européennes relative à la libre prestation de services et à la libre circulation des marchandises en matière de soins de santé;

- sur la base de tarifs spécifiques négociés entre les autorités signataires de la ou des conventions de coopération sanitaire, à avaliser par les autorités nationales compétentes.

D. LES AUTRES DISPOSITIONS DE L'ACCORD-CADRE

L'article 4 impose aux parties de prendre toutes les mesures éventuellement nécessaires en vue de faciliter le franchissement de la frontière commune pour la mise en oeuvre de l'accord-cadre.

L'article 6 précise que le droit applicable en matière de responsabilité médicale sera celui de l'État sur le territoire duquel ont été prodigués les soins. Les professionnels de santé et établissements et services de santé qui dispensent des soins dans le cadre d'une convention de coopération sont tenus à une obligation d'assurance responsabilité civile pour les éventuels dommages qui pourraient être causés par leur activité dans le cadre de la coopération sanitaire transfrontalière.

Le suivi de l'accord-cadre incombera à une commission mixte composée des représentants des autorités compétentes de chacun des deux États (article 7). Elle règlera les difficultés éventuelles liées à l'application ou à l'interprétation de l'accord-cadre. Elle pourra proposer d'y apporter des modifications. Elle élaborera chaque année un rapport d'évaluation sur la mise en oeuvre du dispositif de coopération. La commission mixte exercera également un contrôle de conformité des conventions aux dispositions de l'accord cadre.

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