Rapport supplémentaire n° 320 (2007-2008) de M. Auguste CAZALET , fait au nom de la commission des finances, déposé le 7 mai 2008

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N° 320

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 7 mai 2008

RAPPORT SUPPLÉMENTAIRE

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur la proposition de loi présentée par M. Michel MERCIER renforçant le contrôle comptable du revenu minimum d' insertion ,

Par M. Auguste CAZALET,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; MM. Claude Belot, Marc Massion, Denis Badré, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Jean-Pierre Masseret, Joël Bourdin , vice-présidents ; M. Philippe Marini, rapporteur général, M. Philippe Adnot, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Moreigne, François Trucy , secrétaires ; MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Mme Marie-France Beaufils, M. Roger Besse, Mme Nicole Bricq, MM. Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, Jean-Claude Frécon, Yves Fréville, Christian Gaudin, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Jean-Jacques Jégou, Alain Lambert, Gérard Longuet, Roland du Luart, François Marc, Michel Mercier, Gérard Miquel, Henri de Raincourt, Michel Sergent, Henri Torre, Bernard Vera.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

212 et 235 (2007-2008)

AVANT-PROPOS

Notre collègue Michel Mercier a déposé, le 15 février 2008, une proposition de loi n° 212 (2007-2008) renforçant le contrôle comptable du revenu minimum d'insertion.

Cette proposition de loi a donné lieu à un premier rapport 1 ( * ) , examiné par votre commission des finances le mardi 25 mars 2008 . A l'issue du large débat auquel a donné lieu cet examen, votre commission avait décidé, à ce stade, de ne pas adopter de conclusions sur cette proposition de loi et avait donné mandat à notre collègue Jean Arthuis, président, pour proposer, le cas échéant, après la discussion en séance publique, une motion de renvoi en commission.

Votre rapporteur souhaitait, en effet, approfondir ses investigations sur un sujet sensible qui s'insère dans le cadre de la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion (RMI) et créant un revenu minimum d'activité (RMA).

Lors de l'examen en séance publique de la présente proposition de loi, le 26 mars 2008, la motion de renvoi en commission présentée à l'issue de la discussion générale par notre collègue Jean Arthuis, président, a été adoptée par le Sénat .

Depuis cette date, et ainsi qu'il s'y était engagé, votre rapporteur a pu se rendre dans trois départements afin d'y étudier précisément les rapports qu'y entretiennent les conseils généraux avec les caisses d'allocations familiales dans le cadre de la gestion du RMI. Chacun de ces déplacements a donné lieu à des entretiens à la fois avec les services du conseil général et avec la direction de la caisse d'allocations familiales concernée. Ces déplacements ont eu lieu dans le Rhône le jeudi 17 avril 2008, dans la Sarthe le mercredi 23 avril 2008 et en Vaucluse le jeudi 24 avril 2008. Votre rapporteur tient tout particulièrement à remercier nos trois collègues présidents de conseils généraux, Michel Mercier, Roland du Luart et Claude Haut , qui l'ont accueilli au cours de ces déplacements.

Les informations recueillies par votre rapporteur lors des auditions organisées sur place ont permis d'avoir une vision plus claire des enjeux et de proposer des aménagements à la proposition de loi de notre collègue Michel Mercier, proposition de loi qui apparaît très opportune.

Le présent rapport 2 ( * ) a donc pour objet de présenter les conclusions auxquelles a abouti votre commission des finances afin, d'une part, d'améliorer la collaboration entre les organismes payeurs, que sont les caisses d'allocations familiales et les caisses de mutualité sociale agricole, et les conseils généraux et, d'autre part, de permettre aux départements de mieux assumer la gestion du revenu minimum d'insertion dans le cadre de la loi précitée du 18 décembre 2003 portant décentralisation du RMI.

INTRODUCTION

Votre rapporteur tient à saluer le travail effectué à la fois par les caisses d'allocations familiales, les caisses de mutualité sociale agricole et les conseils généraux dans le domaine de la gestion du revenu minimum d'insertion . Il a pu constater sur place que les équipes des conseils généraux et des caisses d'allocations familiales collaborent, de manière générale, de façon très satisfaisante .

Malgré les améliorations législatives souhaitables que présente cette proposition de loi, le travail des organismes payeurs que sont les caisses d'allocations familiales et les caisses de mutualité sociale agricole est apparu particulièrement satisfaisant à votre rapporteur . Ces organismes ont en particulier permis, lors du transfert de la gestion du revenu minimum d'insertion de l'Etat au département, d'assurer la continuité de la gestion d'un dispositif socialement essentiel et avec lequel les conseils généraux devaient se familiariser. Les départements ont, d'ailleurs, exprimé leur reconnaissance vis-à-vis de l'aide alors apportée, notamment par les caisses d'allocations familiales.

Votre rapporteur salue aussi l'implication de l'ensemble des conseils généraux dans la gestion du RMI . Il apparaît, en effet, que ceux-ci se sont très fortement engagés dans une politique de suivi et de réinsertion sociale de ces bénéficiaires . Cette implication des départements donne tout son sens au RMI, qui doit en effet être à la fois une allocation permettant de subvenir aux besoins des plus démunis et un contrat social visant à réinsérer les bénéficiaires.

La loi précitée n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion (RMI) et créant un revenu minimum d'activité (RMA) fait des départements les pilotes du dispositif du RMI , en leur transférant la charge financière du dispositif. Les départements sont devenus entièrement responsables de la politique de réinsertion sociale , qu'ils exercent notamment au travers des contrats d'insertion. La responsabilité de cette politique implique nécessairement pour eux de disposer de tous les éléments permettant de connaître les bénéficiaires du RMI, les montants versés et d'opérer les contrôles nécessaires. Dans la lignée de la loi précitée du 18 décembre 2003, et pour permettre aux départements d'exercer pleinement cette nouvelle responsabilité, il semble à votre rapporteur tout à fait nécessaire de leur accorder les moyens qu'elle requiert. C'est dans cette perspective que, malgré la qualité du travail des caisses d'allocations familiales et des caisses de mutualité sociale agricole, certaines améliorations législatives sont, de toute évidence, nécessaires .

Votre rapporteur a enfin pu constater, lors de ses contrôles sur place, la grande complexité du travail des services départementaux et des CAF dans la gestion du RMI. Il demande des compétences techniques précises, une capacité à gérer un dispositif de masse tout en limitant les erreurs de traitement, un échange de données permanent, des contrôles stricts et une organisation technique et informatique fiable. Il importe donc de renforcer les synergies entre les conseils généraux et les organismes payeurs, de permettre aux départements de piloter de manière efficace les dépenses de RMI et, plus globalement, de favoriser les échanges de bonnes pratiques.

Le dispositif du revenu de solidarité active (RSA), qui devrait être généralisé en 2009, sera d'une complexité supérieure à celle du RMI du fait de la nécessité d'agréger un plus grand nombre d'informations.

Il apparaît donc à votre rapporteur que la clarification des relations entre les organismes payeurs et les conseils généraux doit être un préalable à la mise en place du RSA. Les départements doivent être en mesure de gérer de manière satisfaisante le dispositif du RMI pour pouvoir prendre en charge le dispositif du RSA . La présente proposition de loi n'en est que plus légitime et sa mise en oeuvre, plus urgente.

EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE PREMIER - Amélioration de l'information des conseils généraux sur l'acompte qui leur est demandé par les organismes payeurs au titre du revenu minimum d'insertion et de la prime forfaitaire

Commentaire : le présent article prévoit l'amélioration de l'information des conseils généraux sur l'acompte qui leur est demandé par les organismes payeurs au titre du revenu minimum d'insertion et de la prime forfaitaire.

I. LA SITUATION ACTUELLE

A. LES OBLIGATIONS RÉGLEMENTAIRES

L'article L. 262-30 du code de l'action sociale et des familles dispose que le service du RMI et de la prime forfaitaire « est assuré dans chaque département par les caisses d'allocations familiales et, pour leurs ressortissants, par les caisses de mutualité sociale agricole, avec lesquelles le département passe, à cet effet, convention ».

La réglementation actuelle prévoit que chaque organisme payeur passe avec le conseil général une convention qui précise les modalités du « versement par le département d'acomptes mensuels aux organismes payeurs » 3 ( * ) . En pratique, les dates prévues par les conventions pour le versement de ces acomptes varient entre les départements, dans le respect de la contrainte de neutralité des flux financiers posée par l'article L. 262-31 du même code, la caisse d'allocations familiales (CAF) transmettant chaque mois au président du conseil général un document où figure le montant de l'acompte à payer.

Par ailleurs, l'article R. 262-78 du code de l'action sociale et des familles dispose que « les caisses d'allocations familiales et de mutualité sociale agricole transmettent mensuellement au département les données de gestion nominatives, financières et de pilotage statistique utiles à l'actualisation de leurs fichiers sociaux, telles qu'elles les transmettaient au représentant de l'Etat dans le département antérieurement au 31 décembre 2003 ». Cet article est censé permettre au département de disposer des informations nécessaires au pilotage du RMI dont la charge lui a été confiée par la loi de décentralisation de 2003 4 ( * ) .

B. LA PRATIQUE DE TRANSMISSION DES INFORMATIONS

Toutefois, malgré cette réglementation, il apparaît que la transmission des informations entre les organismes payeurs et les départements est lacunaire . Elle a, d'ailleurs, déjà fait l'objet de plusieurs critiques formulées notamment par l'inspection générale des affaires sociales (IGAS). Ainsi, le rapport de synthèse sur la gestion du revenu minimum d'insertion 5 ( * ) rendu par l'IGAS en novembre 2007 indique que « la dispersion de l'information ne permet pas de répondre complètement aux besoins accrus de pilotage des conseils généraux ».

En pratique, divers outils ont été mis en place pour permettre aux départements d'accéder aux informations relatives au RMI . Votre rapporteur a constaté, lors de ses contrôles sur place, que la qualité et la nature des informations transmises par les CAF aux départements étaient très variables. En effet, non seulement les conventions peuvent différer sur le sujet mais, surtout, la pratique des relations entre les services départementaux et les CAF peut varier fortement en fonction des demandes des premiers et de la qualité des relations entre les deux entités .

L'outil CAFPRO , accessible sur internet, permet aux agents des services départementaux habilités d'accéder aux informations personnelles concernant chaque bénéficiaire du RMI. Les données présentes dans CAFPRO sont très détaillées, tant sur la situation personnelle que sur les allocations perçues par les bénéficiaires.

Cet outil présente toutefois deux lacunes . D'une part, il nécessite le numéro d'allocataire pour accéder aux informations le concernant. Par conséquent, il ne permet pas d'obtenir des données agrégées comme, par exemple, la liste des personnes ayant reçu une allocation pour un mois donné, puisqu'il faudrait pour cela vérifier, pour chaque numéro d'allocataire, s'il a reçu ou non une allocation.

D'autre part, CAFPRO ne donne accès à aucun historique : il ne présente que des données ponctuelles, qui peuvent être modifiées en temps réel par les CAF en fonction de l'évolution de la situation du bénéficiaire. Par conséquent, lorsque le conseil général reçoit le montant de l'acompte mensuel, qui correspond aux versements effectués deux mois auparavant, CAFPRO ne permet pas d'accéder aux données relatives à ces versements puisque les informations concernant chaque bénéficiaire ont pu être modifiées depuis lors. Ces raisons expliquent que CAFPRO, bien qu'il soit un outil précis et efficace, ne constitue pas un outil de contrôle transversal pour les services départementaux.

Ceux-ci reçoivent, par ailleurs, un tableau de bord mensuel, qui ne comprend pas de liste nominative des bénéficiaires, ainsi qu'une liste nominative, dite « LB 48 », relative aux bénéficiaires du RMI ayant un droit réel sur le mois. Or, cette dernière ne représente qu'environ 80 % de l'acompte demandé aux conseils généraux. Cette différence résulte essentiellement des régularisations de versement de RMI.

Les régularisations ou rappels de paiement de RMI

Les régularisations ou rappels de paiement de RMI correspondent à des cas où le bénéficiaire n'a pas reçu, à la date du paiement mensuel, l'allocation à laquelle il aurait pu prétendre, pour des raisons variables (notamment, par exemple, pour non renvoi dans les délais de la déclaration trimestrielle de revenus), et où il régularise a posteriori sa situation, ce qui donne lieu à un versement tardif de l'allocation pour la période considérée.

Ces versements ne sont pas effectués lors du paiement du mois suivant, le RMI étant une allocation d'urgence et la situation des bénéficiaires ne leur permettant pas, en règle générale, d'attendre un mois supplémentaire pour obtenir une régularisation de leur allocation. Les versements des régularisations sont ainsi opérés tout au long du mois et non lors des versements mensuels.

Les régularisations sont possibles dans un délai de deux ans, l'article L. 262-40 du code de l'action sociale et des familles disposant que « l'action du bénéficiaire pour le paiement de l'allocation ou de la prime forfaitaire instituée par l'article L. 262-11 se prescrit par deux ans ».

Les régularisations de RMI n'étant pas versées lors du règlement unique une fois par mois, mais en divers versements, effectués tout au long du mois, les CAF ne transmettent pas actuellement une liste des bénéficiaires des régularisations conjointe à celle des bénéficiaires du règlement mensuel 6 ( * ) . Cette information lacunaire, qui exclut donc les versements liés aux régularisations, ne permet pas, par conséquent, aux conseils généraux, de détailler précisément le montant de l'acompte qui leur est demandé chaque mois. Or, en pratique, les rappels de paiements sont d'un montant élevé : ils ont ainsi représenté pour la CAF de Lyon, en 2007, 27 millions d'euros, à comparer aux 100,5 millions d'euros des versements mensuels.

Par ailleurs, les informations nominatives transmises correspondent au mois en cours alors que l'acompte payé par le conseil général correspond aux versements effectués deux mois auparavant. Or, en deux mois, les situations ont pu largement changer. Ainsi, il est apparu au cours des différents contrôles sur place effectués par votre rapporteur que les départements ne disposent pas des informations qui leur permettraient de détailler le montant de l'acompte qu'ils versent chaque mois aux organismes payeurs. En l'état actuel, les données transmises par les organismes payeurs ne leur permettent notamment pas de reconstituer l'ensemble des versements nominatifs aux allocataires dont la somme constitue l'acompte qui leur est demandé.

C. LES AUTRES DOCUMENTS DE PILOTAGE

Les résultats trimestriels sont des éléments statistiques agrégés, présentant des résultats consolidés, dont les départements sont destinataires. Très utiles pour apprécier l'évolution globale du dispositif, ils ne sont toutefois pas adaptés pour avoir une connaissance nominative précise des versements nécessaire aux contrôles dont les conseils généraux sont demandeurs.

Enfin, les résultats annuels personnalisés présentent le détail personnalisé de la situation des bénéficiaires, figée au 31 décembre d'une année.

II. LE DISPOSITIF PRÉVU PAR L'ARTICLE PREMIER DE LA PROPOSITION DE LOI

Le présent article prévoit la transmission automatique au département, par l'organisme payeur, des documents justificatifs des prestations versées pour le compte du département, lors de chaque demande de versement formulée au département par l'organisme en question.

Sont ainsi visés le RMI, toute contribution liée au RMI ainsi que toute contribution liée à tout contrat d'insertion. L'objectif de cette disposition est d'améliorer l'information lacunaire du département sur la situation des bénéficiaires des prestations et d'inclure non seulement les bénéficiaires du RMI mais aussi ceux de tout contrat d'insertion donnant lieu à une contribution financière , notamment le contrat d'insertion - revenu minimum d'activité ( CI-RMA ), créé par la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion (RMI) et créant un revenu minimum d'activité (RMA) -, et le contrat d'avenir , instauré par la loi de programmation pour la cohésion sociale n° 2005-32 du 18 janvier 2005.

Le présent article confère donc un champ très large aux documents qui doivent faire l'objet d'une transmission des organismes payeurs aux départements. Il dispose ainsi que doit être transmis « tout document justificatif récapitulant les bénéficiaires, les prestations, l'objet de la prestation et son montant ».

III. LES CONCLUSIONS DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LA NÉCESSITÉ POUR LE DÉPARTEMENT DE DISPOSER D'INFORMATIONS PRÉCISES

L'implication des départements dans la politique de réinsertion rend nécessaire, pour les services départementaux, de connaître avec la plus grande précision possible les bénéficiaires du RMI, afin d'assurer leur suivi.

Outre le poids financier de la politique de réinsertion mise en place par les conseils généraux, le coût direct du RMI et de la prime forfaitaire est particulièrement élevé pour les finances départementales. Ainsi, dans le budget primitif du département du Rhône pour l'année 2008, les dépenses de RMI sont évaluées à 159,3 millions d'euros sur l'année, pour un budget prévisionnel du département en faveur de la solidarité de 718,3 millions d'euros.

Ces raisons justifient que les départements puissent disposer, pour chaque acompte qui leur est demandé, du détail précis des versements nominatifs dont la somme constitue l'acompte demandé . Ce détail devrait notamment inclure l'objet de la prestation (RMI, prime forfaitaire...), ainsi que la nature du versement (versement mensuel, régularisations...).

Votre rapporteur tient à souligner que cette exigence de transparence ne remet nullement en cause la qualité du travail des caisses d'allocations familiales et des caisses de mutualité sociale agricole : il s'agit simplement de permettre au conseil général de disposer des justificatifs de dépenses nécessaires pour lui permettre de piloter dans des conditions satisfaisantes cette dépense importante.

B. LA RÉDACTION PROPOSÉE PAR VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances vous propose donc de préciser et de codifier, au sein du code de l'action sociale et des familles, l'article premier de la présente proposition de loi , qui concerne les informations transmises au conseil général lors de chaque demande d'acompte. La rédaction proposée dispose qu' à chaque demande de versement d'acompte transmise aux conseils généraux au titre du RMI et de la prime forfaitaire, les organismes payeurs leur présentent le détail des versements nominatifs aux différents allocataires permettant ainsi de reconstituer la somme totale de cet acompte .

L'étude concrète des relations entre les organismes payeurs et les services départementaux a permis de constater que l'outil informatique des caisses d'allocations familiales constitue souvent un frein, voire un obstacle, à une meilleure information des départements : développé pour gérer l'attribution d'un grand nombre de prestations, il n'a pas été conçu pour permettre de disposer de données financières agrégées.

L'établissement de la liste détaillée des versements dont la somme est égale à l'acompte mensuel, s'il est possible, demande, en l'état actuel des systèmes d'informations, un important travail de retraitement. La caisse d'allocations familiales de Lyon a ainsi procédé, à la demande du conseil général du Rhône, à la réalisation de cette liste mais au prix d'un travail lourd et relativement long. Par conséquent, votre rapporteur a jugé qu'il convenait de laisser un délai d'environ 6 mois aux organismes payeurs, délai qui lui semble largement suffisant pour la mise en oeuvre de cet article, afin qu'ils puissent, le cas échéant, adapter leurs systèmes d'informations à cette nouvelle exigence. Cette disposition n'entrerait ainsi en vigueur qu'à compter du 1 er janvier 2009 , comme le prévoit l'article 6 des conclusions de votre commission sur la présente proposition de loi.

L'obtention de ces informations détaillées à chaque demande d'acompte est une nécessité absolue pour les départements, dans le cadre de la nouvelle responsabilité que constitue pour eux la gestion du RMI.

Or, l'obstacle que constitue l'outil informatique dans sa configuration actuelle explique en grande partie les difficultés d'aboutissement de certains groupes de travail organisés entre l'Assemblée des départements de France et la Caisse nationale d'allocations familiales sur la question des transmissions d'informations entre ces deux partenaires.

Votre rapporteur estime donc qu'il convient de sortir de cette impasse et d'assurer, par la loi, une mise en oeuvre la plus rapide possible de cette exigence.

Votre commission vous propose donc, dans ses conclusions, d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 2 - Information du département lors de la reprise des versements après une décision de suspension des droits au RMI

Commentaire : le présent article prévoit que l'information du président du conseil général est obligatoire lors de la reprise des versements à la suite d'une décision de suspension des droits.

I. LA SITUATION ACTUELLE

Les contrôles effectués sur place par votre rapporteur l'ont amené à constater une autre lacune dans les relations entre les conseils généraux et les organismes payeurs.

En effet, il semble que, dans certains cas, lorsqu'un bénéficiaire a été suspendu (par exemple, pour ne pas avoir transmis sa déclaration trimestrielle de revenus), il puisse à nouveau bénéficier de versements de l'organisme payeur en régularisant sa situation auprès de cet organisme (en l'espèce, en lui transmettant sa déclaration trimestrielle de revenus), sans que les services départementaux en soient informés .

Cette reprise des versements recouvre deux cas :

- une reprise des versements pour l'avenir, après la période de suspension, lorsque le bénéficiaire est réintégré dans ses droits,

- un rappel des paiements non versés pendant la période de suspension, lorsque le bénéficiaire régularise a posteriori sa situation et justifie qu'il avait droit à l'allocation pendant la période où son versement avait été suspendu.

Actuellement, si l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles dispose que la reprise d'un versement, à la suite d'une suspension décidée par le président du conseil général, pour absence ou non-respect du contrat d'insertion , ne peut être faite par l'organisme payeur que « sur décision du conseil général », il ne prévoit pas systématiquement d'informer les services départementaux de la reprise d'un versement lorsque la suspension résulte d'une raison autre que l'absence ou le non-respect d'un contrat d'insertion.

Or, il serait très utile pour les services départementaux de savoir quels allocataires entrent à nouveau dans le dispositif à la suite d'une suspension de l'allocation. Cela leur permettrait, notamment, de mieux identifier et de suivre avec plus d'attention ces allocataires, qui semblent davantage susceptibles de ne pas répondre aux obligations relatives au versement du RMI.

II. LES CONCLUSIONS DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article, proposé par votre commission des finances, prévoit donc d'introduire dans le code de l'action sociale et des familles un nouvel article L. 262-24-1 afin d'obliger l'organisme payeur à informer le président du conseil général lors de toute reprise des versements faisant suite à une suspension de droits. L'organisme payeur devrait préciser le nom de l'allocataire concerné et expliciter le motif de la reprise du versement de l'allocation.

Cette information obligatoire vise à la fois le cas où le versement de l'allocation ne reprend que pour l'avenir et celui où le versement correspond à une régularisation pour la période de la suspension.

Votre commission vous propose donc, dans ses conclusions, d'adopter cet article.

ARTICLE 3 - Renforcement des informations transmises aux conseils généraux sur les paiements indus

Commentaire : le présent article tend à préciser les informations que l'organisme payeur doit transmettre au conseil général s'agissant des paiements indus.

I. LA SITUATION ACTUELLE

A. LES VERSEMENTS INDUS REPRÉSENTENT DES MONTANTS IMPORTANTS

Le RMI est une allocation à caractère déclaratif. Ainsi, tout demandeur est considéré comme bénéficiaire légitime de l'allocation, à moins qu'il soit ultérieurement prouvé qu'il n'y avait pas droit. Ce caractère déclaratif résulte de la « philosophie » du RMI, qui est une allocation d'urgence, destinée à secourir les plus démunis. Il est donc impératif qu'un demandeur puisse en bénéficier rapidement.

L'effet pervers de ce caractère déclaratif est de produire un certain nombre de versements indus. Sont considérés comme indus tous les versements pour lesquels il est, a posteriori , avéré que le bénéficiaire n'y avait pas droit . C'est le cas, par exemple, lorsque le contrôle d'un bénéficiaire permet de révéler qu'il avait omis une partie de ses revenus dans sa déclaration, et que, par conséquent, l'allocation dont il a bénéficié était surévaluée.

Les motifs des indus sont toutefois très variables . Ils peuvent résulter de changements de situation familiale non déclarés, d'erreurs dans la déclaration de revenu, de transmission tardive de déclarations de revenus, d'oubli de déclaration des allocations chômage, d'erreurs matérielles de l'organisme payeur, etc.

Le montant des indus se révèle, en pratique, très élevé . Ainsi, selon les informations recueillies par votre rapporteur, le montant des mises en indus par la CAF de Lyon au titre du RMI, pour l'année 2007, s'élève à plus de 13,5 millions d'euros pour un versement de RMI annuel total de 119 millions d'euros, soit un taux de 11,3 %.

B. LA RÉCUPÉRATION DES INDUS

L'article L. 262-41 du code de l'action sociale et des familles, précisé par l'article R. 262-73 du même code, définit actuellement les modalités de récupération des indus versés par les organismes payeurs.

Dans un premier temps, les organismes payeurs sont habilités à récupérer les sommes indûment versées sur les allocations ou primes forfaitaires à échoir des bénéficiaires de ces indus, dans la limite de 20 % de ces allocations ou primes forfaitaires, sauf si l'allocataire opte pour le remboursement de l'indu en une seule fois ou si un échéancier a été établi avec son accord.

L'article R. 262-73 précité prévoit ensuite que, « à défaut de récupération sur les allocations ou primes forfaitaires à échoir, le président du conseil général constate l'indu et transmet au payeur départemental le titre de recettes correspondant pour le recouvrement ».

En pratique, comme votre rapporteur a pu le constater, lorsqu'un bénéficiaire de versement indu n'a pas reçu d'allocation pendant une période de trois mois, la charge de la récupération de l'indu est transférée au département. La récupération des indus par les CAF s'avère relativement efficace puisque qu'elle permet de réduire d'environ deux tiers le montant des indus transférés, ce qui s'explique par l'efficacité des CAF et par la simplicité du mode de récupération qui s'opère par prélèvement à la source sur les allocations versées.

Ainsi, le montant total des indus constatés en 2007 dans le département de la Sarthe s'est élevé à près de 3,65 millions d'euros, mais le montant des indus transférés au département s'établit à 1,28 million d'euros. Le montant des indus transférés au conseil général du Rhône s'est élevé à 4,94 millions d'euros pour l'année 2007 (en très forte hausse, + 30 % par rapport à 2006), pour un montant total d'indus constatés de 13,56 millions d'euros.

Toutefois, sur le total des indus transférés aux conseils généraux, il apparaît que seuls 10 % environ parviennent à être récupérés, en raison essentiellement de la fréquente précarité des bénéficiaires des paiements indus. Par conséquent, la charge nette des indus est, pour le conseil général, importante .

Par ailleurs, votre rapporteur a pu constater sur place que le payeur départemental était largement débordé par la charge croissante que représente, pour lui, la récupération des paiements indus d'allocations . Le travail de récupération est en effet lourd et coûteux, et les résultats décevants au regard des sommes finalement recouvrées. Les départements peuvent fixer un seuil de récupération des indus plus élevé que le seuil réglementaire, qui est de 77 euros 7 ( * ) , mais certains craignent, s'ils le font, d'inciter à la fraude. Il conviendrait donc d'initier une réflexion pour déterminer le moyen d'assurer une récupération des indus plus efficace et moins coûteuse.

Ces constats expliquent que, sans remettre en cause le caractère déclaratif du RMI, il faille améliorer l'information dont le conseil général dispose au sujet des paiements indus.

II. LES CONCLUSIONS DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article, proposé par votre commission des finances, vise à préciser les modalités de récupération des indus. Il tend à compléter l'article L. 262-41 précité du code de l'action sociale et des familles et, ce faisant, rend inutile toute disposition réglementaire d'application. Deux améliorations essentielles sont apportées, qui visent :

- d'une part, à ne transférer les indus au département que lorsque le droit au RMI ou à la prime forfaitaire a cessé, c'est-à-dire après quatre mois d'absence de recouvrement, contre trois aujourd'hui . Cette disposition est opportune puisque, tant que le bénéficiaire est maintenu dans le dispositif du RMI, il est susceptible de percevoir des allocations sur lesquelles les organismes payeurs pourront plus facilement récupérer l'indu que si celui-ci a déjà été transmis au département. L'article R. 262-42 du code de l'action sociale et des familles prévoit la sortie du dispositif, qui est en pratique effectuée automatiquement, lorsque le bénéficiaire n'a pas reçu de versements au titre du RMI ou a été suspendu pendant une période de « quatre mois civils successifs » ;

- d'autre part, à s'assurer que l'organisme payeur, lorsqu'il transmet au département un indu, fournit bien, outre le nom du bénéficiaire du paiement indu et les sommes en cause (montant initial de l'indu et somme restant à recouvrer), le motif précis justifiant du caractère indu de ce versement . Il est, en effet, apparu que cette transmission d'informations n'était pas toujours effective. Certains départements bénéficient de cette information, d'autres pas. Or, il est essentiel que la qualité des informations transmises au département ne soit pas dépendante de circonstances locales mais qu'elle soit garantie pour l'ensemble des conseils généraux. Ils pourront utilement mettre à profit ces informations, d'une part pour assurer le recouvrement des indus et, d'autre part, pour contrôler les bénéficiaires si ceux-ci sont amenés à entrer à nouveau dans le dispositif du RMI.

A cet égard, le présent article dispose, comme le faisait déjà l'article R. 262-42 précité, que si le débiteur est à nouveau bénéficiaire du RMI ou de la prime forfaitaire, le payeur départemental peut procéder au recouvrement du titre de recettes par précompte sur les allocations ou primes forfaitaires à échoir, dans la limite de 20 % de ces allocations ou primes forfaitaires.

Votre commission vous propose donc, dans ses conclusions, d'adopter cet article.

ARTICLE 4 - Contenu des conventions passées entre les conseils généraux et les organismes payeurs

Commentaire : le présent article tend à permettre aux conseils généraux qui le souhaitent de demander une modification de la convention passée avec l'organisme payeur afin d'y inclure certains éléments.

I. LA SITUATION ACTUELLE

La signature d'une convention entre le département et les organismes payeurs est prévue par l'article L. 262-30 du code de l'action sociale et des familles qui dispose que « le service de l'allocation et de la prime forfaitaire instituée par l'article L. 262-11 est assuré dans chaque département par les caisses d'allocations familiales et, pour leurs ressortissants, par les caisses de mutualité sociale agricole, avec lesquelles le département passe, à cet effet, convention ».

Ainsi, en reprenant très largement une convention-type, les organismes payeurs et les conseils généraux ont signé des conventions ayant notamment pour objet de déterminer l'étendue de la délégation de gestion consentie par le département à l'organisme payeur ainsi que les modalités de mise en oeuvre de cette délégation.

II. LE DISPOSITIF PRÉVU PAR L'ARTICLE 2 DE LA PROPOSITION DE LOI

A. L'OBLIGATION DE SIGNER UNE CONVENTION

D'une part, le présent article prévoit l' obligation de signer une convention dans un délai de six mois entre chaque département et chaque organisme versant des prestations aux bénéficiaires du RMI. Certaines conventions ayant pu été renégociées très récemment, votre rapporteur estime que les objectifs de cet article, qui répond à un réel besoin, peuvent être atteints sans nécessairement remettre en cause l'ensemble des conventions signées par les départements.

B. LES ÉLÉMENTS À PRÉCISER DANS LA CONVENTION

D'autre part, le présent article détermine une liste d'éléments que ces conventions devraient notamment inclure :

1°) « les délais de paiement entre le département et l'organisme payeur » : l'article L. 262-31 du code de l'action sociale et des familles pose un principe de neutralité financière qui est précisé par l'article D. 262-67 du même code. En pratique, toutes les conventions auxquelles votre rapporteur a eu accès précisent cet élément ;

2°) « les modalités d'échanges de données entre les partenaires », ce qui est effectivement essentiel et mérite d'être précisé ;

3°) « l'imputation des indus selon leur origine », ce qui pourrait renvoyer à la possibilité, dans le cadre d'une négociation entre le conseil général et l'organisme payeur, qui assure à titre gratuit le service de l'allocation et de la prime forfaitaire, de prévoir, le cas échéant, que l'organisme payeur conserve à sa charge tout ou partie du montant des indus qui lui sont directement imputables ;

4°) « les délégations de gestion consenties par le département à l'organisme payeur » : cet élément semble déjà prévu par les articles D. 262-63 et suivants du code de l'action sociale et des familles ;

5°) « plus généralement, la convention doit définir les modalités de nature à permettre à chacun des partenaires de connaître la réalité des droits et la situation des bénéficiaires », formule qui paraît se rattacher aux objectifs généraux sous-tendant l'aménagement des conventions existantes.

III. LES CONCLUSIONS DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'article 4 proposé par votre commission des finances reprend, en le modifiant, le dispositif prévu par l'article 2 de la proposition de loi.

A l'issue des contrôles sur place et sur pièces que votre rapporteur a pu effectuer, il a constaté que les conventions passées entre les conseils généraux et les organismes payeurs étaient un outil efficace permettant, en matière de gestion du RMI, d'assurer une bonne collaboration entre ces deux partenaires.

Toutefois, au vu des difficultés parfois rencontrées par certains départements, que votre rapporteur a pu constater lors de ses déplacements et qui font l'objet des trois articles précédents, il convient de permettre aux présidents de conseils généraux qui le souhaitent d'obtenir une modification des conventions passées avec les organismes payeurs, soit par le biais d'une convention entièrement nouvelle, soit par le biais d'un avenant à la convention existante , afin d'y inclure spécifiquement :

1°) les modalités d'échanges de données entre les partenaires, notamment au regard des obligations de détail de l'acompte mensuel posées par l'article 1 er ;

2°) les modalités d'information du président du conseil général lors de la reprise des versements après une période de suspension de l'allocation, posées par l'article 2 ;

3°) le degré de précision du motif des indus transférés au département posé par l'article 3 ;

4°) les engagements de qualité de service et de contrôle, pris par l'organisme payeur, notamment en vue de limiter les paiements indus.

Le dispositif proposé par votre commission des finances complète donc le texte initial de la proposition sur les points suivants :

- il laisse les conseils généraux libres de demander l'inclusion de ces dispositions : comme votre rapporteur a pu le constater, les relations entre les conseils généraux et les organismes payeurs sont très variées et il ne lui semble donc pas opportun d'obliger chaque département à renégocier des conventions qui peuvent parfois déjà satisfaire les deux parties ;

- il modifie les 1°) et 4°) précédemment analysés du texte initial, dans la mesure où ces éléments sont déjà visés par certaines dispositions réglementaires existantes ;

- il est plus précis s'agissant des modalités d'échanges d'informations que la convention devra prévoir ;

- il ne retient pas la notion « d'imputation des indus selon leur origine », en préférant mettre l'accent sur les engagements de qualité de service et de contrôle, pris par l'organisme payeur, notamment en vue de limiter les paiements indus. Il a semblé préférable à votre rapporteur de retenir cette approche, car les organismes payeurs assurent le service du RMI et de la prime forfaitaire à titre gratuit. Il est inévitable que des indus imputables à l'organisme payeur voient le jour, en raison d'erreurs humaines ou techniques. Il semble donc préférable de s'intéresser à la fréquence et aux conséquences des indus, sous l'angle des engagements de qualité de service et de contrôle auxquels se réfère l'article D. 262-68 du code de l'action sociale et des familles. Cette disposition semble de nature à permettre des échanges plus fructueux et plus harmonieux entre les parties prenantes à la convention.

Ces aménagements aux conventions actuelles devraient permettre aux départements de trouver, avec les organismes payeurs, les solutions techniques les plus appropriées pour satisfaire leurs besoins d'information.

Votre commission vous propose donc, dans ses conclusions, d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 5 - Confrontation des données des organismes payeurs avec celles d'autres administrations publiques

Commentaire : le présent article précise les règles applicables en matière de confrontation des données des organismes payeurs avec celles dont disposent d'autres administrations publiques.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA CONFRONTATION DES DONNÉES DES ORGANISMES PAYEURS RELATIVES AUX BÉNÉFICIAIRES AVEC CELLES DONT DISPOSENT D'AUTRES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

L'article L. 262-33 du code de l'action sociale et des familles fixe le cadre applicable aux relations entre les organismes payeurs et d'autres administrations publiques, comme les services fiscaux, en vue de vérifier les déclarations des bénéficiaires.

Il dispose ainsi que « pour l'exercice de leur mission, les organismes payeurs mentionnés à l'article L. 262-30 vérifient les déclarations des bénéficiaires. A cette fin, ils peuvent demander toutes les informations nécessaires aux administrations publiques, et notamment aux administrations financières, aux collectivités territoriales, aux organismes de sécurité sociale, de retraite complémentaire et d'indemnisation du chômage ainsi qu'aux organismes publics ou privés concourant aux dispositifs d'insertion ou versant des rémunérations au titre de l'aide à l'emploi, qui sont tenus de les leur communiquer ».

B. LA TRANSMISSION AUX DÉPARTEMENTS DES INFORMATIONS RELATIVES AUX CONFRONTATIONS DE DONNÉES

L'article L. 262-33 précité dispose, par ailleurs, que « les personnels des organismes précités ne peuvent communiquer les informations recueillies dans l'exercice de leur mission qu'au président du conseil général et au président de la commission locale d'insertion définie à l'article L. 263-10 ».

II. LE DISPOSITIF PRÉVU PAR L'ARTICLE 3 DE LA PROPOSITION DE LOI

Le présent article a pour objet d'instaurer la transmission aux conseils généraux des résultats de la confrontation de fichiers, pour leur permettre d'exercer un contrôle plus approfondi du droit au RMI. Il prévoit ainsi que, tous les mois, les conseils généraux sont destinataires des « résultats de confrontation » des fichiers des CAF et de la MSA, des ASSEDIC, ainsi que des services fiscaux, et ce afin de « faciliter la connaissance des situations individuelles ou familiales des bénéficiaires au regard du droit au revenu minimum d'insertion ».

III. LES CONCLUSIONS DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article des conclusions de votre commission reprend, en les aménageant, les dispositions prévues par l'article 3 de la proposition de loi.

Votre rapporteur est favorable à ce que le contrôle des bénéficiaires par confrontation de données soit renforcé . Il convient toutefois de veiller à ce que les modalités de ce contrôle respectent les prescriptions applicables en ce domaine et auxquelles veille, notamment, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).

Votre commission des finances vous propose donc de faire évoluer la rédaction du présent article, afin :

- d'une part, de renforcer le contrôle par confrontation de données avec les organismes d'indemnisation du chômage et l'administration fiscale, mais également avec les URSSAF 8 ( * ) , qui n'étaient pas visées par le texte initial de la proposition de loi ;

- d'autre part, d'améliorer l'information dont les présidents de conseils généraux disposent à l'issue de ces confrontations ;

- enfin, de prévoir la transmission mensuelle aux services du conseil général de la liste nominative des contrôles effectués par les organismes payeurs , en précisant la nature du contrôle effectué. Ces informations sont, en effet, nécessaires pour assurer une bonne coordination entre les contrôles exercés par les CAF et la politique de suivi des allocataires dont le département a la charge.

La mise en oeuvre de ces nouvelles dispositions requiert très vraisemblablement des adaptations des systèmes d'information. Par conséquent, votre rapporteur suggère que l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions soit fixée au 1 er janvier 2009 , afin de laisser, le cas échéant, le temps nécessaire à leur mise en oeuvre. La fixation de cette date d'entrée en vigueur fait l'objet de l'article 6 des conclusions de votre commission.

A. GARANTIR LES CONFRONTATIONS ET AUGMENTER LEUR FRÉQUENCE

En pratique, votre rapporteur a constaté que la confrontation des fichiers des caisses d'allocations familiales était en général opérée mensuellement avec ceux des Assedic et une fois par an avec ceux de la direction générale des impôts, récemment intégrée au sein de la direction générale des finances publiques.

Il apparaît à votre rapporteur que l'encadrement plus strict de ces confrontations de données serait bénéfique, d'une part pour garantir leur réalisation périodique et, d'autre part, pour assurer une confrontation plus fréquente avec les données des services fiscaux.

La confrontation des données interviendrait donc chaque mois avec les fichiers des ASSEDIC et avec ceux des URSSAF .

Elle continuerait à intervenir une fois par an avec les fichiers de l' administration fiscale , une fois ouvert le droit au RMI. Il conviendrait toutefois qu'elle intervienne aussi, de manière systématique, en plus de la confrontation annuelle, à l'occasion de la première liquidation de l'allocation , et ce afin de prévenir le risque d'indus.

B. ASSURER UNE MEILLEURE INFORMATION DES CONSEILS GÉNÉRAUX SUR L'ISSUE DES CONTRÔLES

Par ailleurs, en pratique, votre rapporteur a constaté que les caisses d'allocations familiales disposent de peu d'informations sur l'issue des confrontations de données qui sont opérées . Ces confrontations sont en effet informatisées et conduisent, dans la plupart des cas, à des modifications informatiques automatiques, pour lesquelles les caisses d'allocations familiales elles-mêmes ne disposent pas des noms des bénéficiaires dont les revenus ont été modifiés suite aux confrontations de données effectuées. Ainsi, par exemple, la caisse d'allocations familiales de Lyon ne dispose que d'un tableau qui indique, pour chacune des confrontations mensuelles effectuées avec les Assedic, le nombre de régularisations de situations auxquelles la confrontation a donné lieu ainsi que le montant des paiements indus et des rappels correspondant à ces régularisations.

Or, il apparaît clairement qu'une meilleure information sur les bénéficiaires dont les revenus sont modifiés suite aux confrontations de données permettrait une amélioration des contrôles opérés à la fois par les organismes payeurs et les services départementaux.

La nouvelle rédaction proposée prévoit donc que les organismes payeurs transmettent chaque mois au président du conseil général la liste nominative des allocataires dont la situation a été modifiée suite aux confrontations mensuelles de données .

Il prévoit également que ces organismes transmettent chaque mois aux services du conseil général la liste nominative des contrôles effectués, en précisant la nature du contrôle (appel téléphonique, confrontation de données, contrôle sur place, etc.). Ces informations sont, en effet, nécessaires pour assurer une bonne coordination entre les contrôles effectués par les CAF et la politique de suivi des allocataires dont le département a la charge.

Enfin, même si cet aspect n'est pas abordé dans le cadre de la présente proposition de loi, votre commission souhaite que les actions menées dans le cadre de la nouvelle délégation nationale de lutte contre la fraude soient portées à la connaissance des conseils généraux, lorsqu'elles peuvent avoir des incidences sur les politiques qu'ils conduisent.

Votre commission vous propose donc, dans ses conclusions, d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 6 - Dispositions finales

Commentaire : le présent article fixe au 1 er janvier 2009 l'entrée en vigueur des articles 1 er et 5 de la présente proposition de loi et prévoit que les dispositions de celle-ci s'appliqueront au revenu de solidarité active, lorsqu'il sera généralisé.

Comme votre rapporteur l'a déjà évoqué ci-avant, les dispositions des articles 1 er et 5 de la présente proposition de loi nécessiteront vraisemblablement l'adaptation des systèmes d'information dont disposent les caisses d'allocations familiales, ceux-ci étant davantage prévus pour faciliter une gestion de masse des bénéficiaires que pour permettre de produire des données de pilotage agrégées de la politique en matière de revenu minimum d'insertion.

Par conséquent, votre rapporteur suggère ( I ) que l'entrée en vigueur des dispositions de ces deux articles soit fixée au 1 er janvier 2009 , afin de laisser, le cas échéant, le temps nécessaire à leur mise en oeuvre. Les autres dispositions de la présente proposition de loi seraient donc, a contrario , d'application immédiate.

En outre, le présent article prévoit, dans son II , que toutes ces dispositions s'appliqueront, à compter de sa mise en oeuvre dans l'ensemble des départements, au revenu de solidarité active (RSA), qui devrait, une fois généralisé, remplacer notamment les dispositifs de RMI et de prime forfaitaire. Il s'agit, par ce biais, de réaliser des économies d'échelle et de renforcer les synergies entre la réponse apportée aux besoins actuels des départements et les réflexions relatives à la mise en oeuvre du RSA. Les demandes légitimes formulées dans le cadre du présent texte trouveront donc également à s'appliquer, avec un intérêt peut-être encore plus grand, dans le cadre de la mise en oeuvre du RSA.

Votre commission vous propose donc, dans ses conclusions, d'adopter cet article.

AUDITION DE M. MARTIN HIRSCH, HAUT COMMISSAIRE AUX SOLIDARITÉS ACTIVES CONTRE LA PAUVRETÉ

Au cours d'une réunion tenue le mardi 6 mai 2008 , sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l' audition de M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté , sur la gestion du revenu minimum d'insertion (RMI) et la mise en place du revenu de solidarité active (RSA).

M. Jean Arthuis, président , a rappelé que cette audition, ouverte aux membres de la commission des affaires sociales, devait permettre de faire le point sur deux sujets :

- d'une part, les modalités de gestion du revenu minimum d'insertion, la commission devant examiner le lendemain le rapport de M. Auguste Cazalet sur la proposition de loi de M. Michel Mercier renforçant le contrôle comptable du revenu minimum d'insertion (RMI) ;

- d'autre part, la mise en place du revenu de solidarité active (RSA), dont le président de la République a annoncé la généralisation en 2009.

M. Jean Arthuis, président , a souligné que les départements avaient besoin d'informations complémentaires à celles qui leur sont aujourd'hui transmises par les caisses d'allocations familiales, afin de mieux piloter la dépense liée au RMI. Il a observé que la mise en place du RSA impliquait donc, au préalable, une gestion satisfaisante du RMI.

M. Martin Hirsch a indiqué que le RMI, dont on fêtait le vingtième anniversaire, avait connu trois périodes :

- une première phase au cours de laquelle ce dispositif avait permis d'accorder un revenu minimum à des personnes qui ne pouvaient pas travailler et qui n'avaient pas de ressources. Il était ainsi monté en charge conformément aux prévisions initiales pour bénéficier à quelques centaines de milliers de personnes ;

- une deuxième période durant laquelle le nombre de bénéficiaires du RMI avait crû, globalement, de manière importante. Cette prestation avait également été accordée à des personnes capables de travailler, pour lesquelles elle n'avait pas été conçue à l'origine, à la suite notamment de périodes de chômage. Ceci reflétait certains dysfonctionnements économiques et sociaux, notamment du marché du travail ;

- une troisième période, entamée en 2003, marquée par la décentralisation aux conseils généraux de la responsabilité de la gestion du RMI, les caisses d'allocations familiales (CAF) continuant à servir la prestation.

M. Martin Hirsch a observé que ces réformes avaient été absorbées rapidement et n'avaient pas posé de problèmes majeurs en termes de gestion, les acteurs ayant su répondre aux défis auxquels ils étaient confrontés.

En revanche, il a noté que deux démarches complémentaires étaient aujourd'hui menées :

- d'une part, le souci, traduit dans la proposition de loi présentée par M. Michel Mercier, de tirer des enseignements des relations entre les CAF et les conseils généraux et d'assurer une plus grande transparence ainsi qu'une meilleure information sur la gestion du RMI ;

- d'autre part, le projet de mise en oeuvre du RSA, dont une préfiguration était actuellement expérimentée par certains départements.

M. Martin Hirsch a déclaré partager les objectifs tendant, d'une part, à ce que ces prestations remplissent leur rôle de « sortie par le haut » vers le marché du travail, permettant d'atteindre un équilibre dans lequel les revenus du travail constituent la majeure partie des revenus et, d'autre part, à ce que les prestations soient financées et contrôlées conformément aux principes de gestion rigoureuse des finances publiques. Il s'est dit en accord avec les orientations de la proposition de loi présentée par M. Michel Mercier, même s'il s'est interrogé sur le calendrier de mise en oeuvre de ces dispositions et sur la manière de les instaurer, compte tenu de la perspective de généralisation du RSA en 2009.

Il a indiqué que deux chantiers étaient en cours :

- le renforcement des contrôles, grâce notamment à la récente mise en place d'un fichier national des allocataires, qui devrait être étendu d'ici la fin de l'année 2008 à l'ensemble de leurs ayant droits. Il a précisé que ce renforcement des contrôles s'appuyait également sur des croisements de fichiers, notamment ceux de l'administration fiscale et des organismes d'indemnisation du chômage, et a jugé souhaitable que les fichiers des CAF et des URSSAF soient également rapprochés ;

- la réforme des minima sociaux et la mise en place du RSA, qui se substituerait au RMI, à l'allocation de parent isolé (API), à la prime pour l'emploi (PPE), aux dispositifs d'intéressement ou de primes forfaitaires de retour à l'emploi, afin de définir un ensemble homogène destiné à assurer une croissance régulière des revenus en cas de reprise du travail. Cette réforme aurait un impact important sur les bénéficiaires de ces prestations et sur les acteurs impliqués dans leur gestion. M. Martin Hirsch a ajouté que seraient également refondus les systèmes d'information des CAF, afin notamment de tenir compte des expériences actuelles et du besoin d'informations complémentaires en matière de gestion des prestations. Cela le conduisait à porter une attention particulière à la question du calendrier de mise en oeuvre des dispositions de la proposition de loi présentée par M. Michel Mercier.

M. Martin Hirsch a précisé que la version future du RSA serait plus large que la version en cours d'expérimentation dans certains départements et a souligné deux différences notables :

- la nouvelle version du RSA engloberait les travailleurs pauvres, alors que la version actuelle est limitée aux allocataires du RMI et de l'API ;

- elle serait plus simple que la version actuelle, qui se conjugue avec d'autres prestations ou dispositifs existants comme la prime pour l'emploi (PPE), dans la mesure où le RSA aurait vocation à s'y substituer.

Le coût du RSA devrait correspondre à la somme des dépenses liées au RMI (6 milliards d'euros), à l'API (un milliard d'euros), à la prime de retour à l'emploi et aux dispositifs d'intéressement (quelques centaines de millions d'euros), à la prime pour l'emploi (4,5 milliards d'euros), à laquelle s'ajouterait 1,5 milliard d'euros supplémentaires mobilisés à l'occasion de cette réforme. Au total, le nouveau dispositif devrait être plus juste, plus progressif et permettre d'éviter les trappes à inactivité et à pauvreté.

Il a précisé que le coût supplémentaire provenait de l'intégration, dans le dispositif, des personnes aux revenus faibles, afin d'assurer une égalité de traitement en cas de situation équivalente. En outre, il a indiqué que la mise en place du RSA serait l'occasion de revoir le régime des droits connexes, afin qu'ils soient fonction des ressources et non plus des statuts liés au bénéfice de telle ou telle prestation.

M. Jean Arthuis, président , a souhaité savoir si l'allocation de solidarité spécifique (ASS) serait intégrée dans le dispositif du RSA.

M. Martin Hirsch a indiqué que ce point faisait l'objet de discussions. Il a estimé que, dans un souci de simplification, l'ASS pourrait être intégrée dans le RSA, mais il a précisé que cette question devrait être abordée avec les partenaires sociaux et prendre en compte les réflexions en cours sur l'indemnisation du chômage.

M. Philippe Marini, rapporteur général , s'est montré très favorable à l'inclusion de l'ASS au sein du RSA, en jugeant inutile d'attendre que la personne se trouve dans une situation plus précaire pour être prise en charge par ce dispositif.

Il a salué la volonté, annoncée par le président de la République, de redéployer une partie de la prime pour l'emploi vers le RSA, en notant qu'elle rejoignait une analyse antérieurement conduite par la commission et devrait permettre une meilleure soutenabilité des finances publiques. Il a toutefois souhaité obtenir des précisions sur les projections de montée en charge du RSA, ainsi que sur les modalités concrètes de redéploiement de la PPE.

M. Martin Hirsch a indiqué que la première étape de la mise en oeuvre du RSA consistait à rassembler l'ensemble des crédits consacrés aux prestations et des publics concernés - bénéficiaires de minima sociaux ; travailleurs pauvres dont la moitié ne bénéficie ni de la prime pour l'emploi, ni du RMI ; personnes gagnant un peu plus que le SMIC - et à ajouter 1,5 milliard d'euros au montant actuel de ces dépenses, afin de constituer l'effort global correspondant au revenu de solidarité active. La question qui se pose ensuite est celle du « centre de gravité » retenu pour la nouvelle prestation. Il a observé qu'une prestation trop diluée, selon l'analyse de la Cour des comptes, n'avait ni effet redistributif, ni effet incitatif et que la solution retenue consisterait donc à recentrer le champ de la PPE sur les plus bas revenus.

M. Martin Hirsch a indiqué, par ailleurs, que la réflexion sur les modalités de recentrage de la PPE sur les personnes les plus modestes, dans le cadre de la mise en place du RSA, se poursuivait, rappelant que l'arbitrage sur le montant consacré au RSA avait été rendu très récemment. Il a précisé que des consultations étaient en cours à ce sujet, notamment avec les partenaires sociaux et l'Assemblée des départements de France. Il a estimé, pour sa part, qu'un recentrage de la PPE, pour un montant pouvant varier entre 100 millions et 2 milliards d'euros, était souhaitable. Jugeant que le RSA serait plus incitatif et plus redistributif que le système actuel, il a fait observer que le retour au travail des bénéficiaires, favorisé par ce nouveau dispositif, permettrait d'en alléger le coût.

M. Auguste Cazalet, rapporteur , a indiqué avoir constaté, au cours de ses déplacements sur place, que les conseils généraux ne disposaient pas des instruments de pilotage nécessaires en matière de gestion du RMI. Il a précisé que le problème résultait en partie des systèmes d'information des caisses d'allocations familiales qui ne permettent pas de fournir des indicateurs de gestion performants. Il a ainsi jugé que la proposition de loi de M. Michel Mercier était opportune et nécessaire dans la perspective de la mise en place du RSA et a demandé à M. Martin Hirsch s'il était prêt à soutenir cette démarche. Il a enfin souligné que les conclusions de la commission sur cette proposition de loi, qu'il présenterait le lendemain, veilleraient à assurer une transition avec le dispositif du RSA.

Sur le fond de la proposition de loi, M. Martin Hirsch a déclaré être à « 100 % favorable » à ce que les relations entre les caisses d'allocations familiales et les conseils généraux soient plus transparentes. Il s'est toutefois déclaré soucieux de l'intégration du dispositif prévu par la proposition de loi dans le chantier général de refonte des minima sociaux.

M. Michel Mercier a remarqué que si l'objectif poursuivi par le RSA était largement consensuel, il convenait toutefois, pour assurer sa réussite, d'apporter au préalable davantage de transparence dans la gestion du RMI. Il a rappelé que la compensation par l'Etat du transfert du RMI aux départements était déficitaire de plusieurs millions d'euros, précisant que cette somme s'élevait à 30 millions d'euros par an dans le département du Rhône. Par ailleurs, il a regretté que l'aide de l'Etat prévue pour participer au financement des contrats d'avenir n'ait jamais été versée. Jugeant que, dans ce contexte, les dépenses de RMI pesaient sur les finances départementales, il a appelé de ses voeux un éclaircissement des engagements de l'Etat sur ces sujets. Enfin, tout en reconnaissant la « bonne volonté » des caisses d'allocations familiales, il a souhaité, pour que le RSA fonctionne, qu'il soit remédié à une situation où le département ne sait pas précisément à quoi correspondent les sommes qu'il verse et prend néanmoins à sa charge les paiements indus.

Sur la question des relations entre les conseils généraux et les caisses d'allocations familiales, M. Martin Hirsch a indiqué prendre en compte la situation des départements et travailler, à ce sujet, en étroite liaison avec certains départements et avec l'Assemblée des départements de France. Il s'est par ailleurs engagé à ce que le RSA produise moins de paiements indus que le RMI. M. Jean Arthuis, président , a demandé si, pour parvenir à cet objectif, une déclaration mensuelle remplacerait l'actuelle déclaration trimestrielle. M. Martin Hirsch a indiqué y être favorable.

Sur la question de la contribution de l'Etat au financement des nouveaux contrats aidés, il a rappelé l'engagement pris par Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, de verser les sommes dues par l'Etat. Au sujet de la compensation par l'Etat aux départements du transfert du RMI, il a fait valoir que l'Etat versait 500 millions d'euros par an aux départements dans le cadre du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI). Enfin, il a souligné que le surcoût du RSA serait financé par l'Etat et non par les départements et qu'un accord était actuellement recherché avec l'Assemblée des départements de France sur la répartition du financement du RSA.

M. Eric Doligé a mis en garde contre une éventuelle généralisation du RSA avant que des solutions n'aient été apportées aux questions soulevées par son expérimentation. Il s'est inquiété des modalités de compensation du coût du RSA pour les départements, indiquant que, dans le Loiret par exemple, ce coût pourrait atteindre 8 millions d'euros. Il a enfin interrogé M. Martin Hirsch sur l'éventuel surcoût résultant du versement du RSA à un grand nombre de travailleurs qui se situent en dessous du seuil de pauvreté.

M. Roland du Luart a souligné son intérêt pour le RSA, qui devrait permettre de remplacer plusieurs allocations par une prestation unique. Il a toutefois manifesté des craintes quant à la complexité du futur dispositif. Il a rappelé, en accord avec les déclarations de MM. Michel Mercier et Eric Doligé, le manque de compensation par l'Etat du transfert du RMI aux départements, évaluant ce manque à 24 millions d'euros dans la Sarthe. Il a déclaré être favorable au RSA, souhaitant néanmoins, au préalable, que la proposition de loi de M. Michel Mercier soit adoptée et que soit mise en place une forme de solidarité interdépartementale.

Mme Nicole Bricq s'est interrogée sur l'éventuel impact du RSA sur l'allocation aux adultes handicapés (AAH). Elle a, par ailleurs, demandé si la compensation des écarts territoriaux, prévue dans le Livre vert relatif au RSA, était incluse dans le montant de 12 milliards d'euros prévu pour son financement.

M. Serge Dassault a regretté, en qualité de rapporteur des crédits de la mission « Travail et emploi », que de nouvelles dépenses soient prévues, au lieu de poursuivre l'objectif de retour à l'équilibre budgétaire, et que davantage d'aide publique soit nécessaire pour inciter les chômeurs à la reprise d'activité.

M. Claude Belot a fait état du succès de l'expérimentation du RSA en Charente-Maritime, tout en précisant ne disposer que d'un recul de quatre mois depuis sa mise en place. Il a appelé de ses voeux une vision dynamique du RSA, jugeant qu'il permettrait de réintégrer davantage de bénéficiaires des minima sociaux au sein du marché du travail. Il a ainsi estimé que les départements gagneraient à mettre en place ce nouveau dispositif, qui favorise la diminution du nombre d'allocataires.

M. Bernard Cazeau , constatant que le système déclaratif actuel du RMI était générateur d'indus, s'est interrogé sur son évolution dans le cadre de l'instauration du RSA. Estimant que le principe du RSA était une bonne chose, il s'est toutefois inquiété de sa charge financière, qui avant d'être évaluée à 1,5 milliard d'euros l'avait été à 3 milliards d'euros.

M. Jean Arthuis, président , a enfin demandé si les crédits de la « prime de Noël » seraient ajoutés aux 12 milliards d'euros prévus pour le RSA.

En réponse à M. Eric Doligé, M. Martin Hirsch a indiqué que le RSA n'entrainerait pas de charges supplémentaires pour le département du fait de l'intégration à son dispositif des « travailleurs pauvres », puisque l'éventuel surcoût par rapport à la prime pour l'emploi serait compensé par l'Etat.

En réponse à M. Roland du Luart, M. Martin Hirsch a reconnu que davantage de transparence était nécessaire entre l'Etat et les départements, dans le cadre d'un « contrat de confiance », et que les départements avaient besoin de meilleurs outils de pilotage du RMI. Il a souligné que le RSA permettait déjà, là où il était expérimenté, d'obtenir de meilleures informations sur la situation des allocataires. Revenant sur la question d'une éventuelle péréquation financière entre les départements, il s'y est déclaré favorable, tout en reconnaissant que cette question dépassait le cadre de la mise en place du RSA.

Répondant à Mme Nicole Bricq, M. Martin Hirsch a indiqué qu'en l'état actuel du projet, il n'était pas prévu d'intégrer l'AAH dans le RSA, du fait des spécificités importantes de cette allocation.

M. Martin Hirsch a remercié M. Claude Belot pour son implication dans l'expérimentation du RSA. Il s'est par ailleurs félicité que, dans le cadre de cette expérimentation, les deux tiers des retours à l'emploi se fassent vers le secteur marchand.

En réponse à M. Bernard Cazeau, M. Martin Hirsch a rappelé sa volonté que le RSA mette fin au système « archaïque » de déclaration trimestrielle de ressources. Il a proposé, par ailleurs, de prendre en compte les insatisfactions actuelles des départements en matière de financement du RMI pour trouver un accord entre l'Etat et l'Assemblée des départements de France dans le cadre du RSA. Il a enfin souligné que l'objectif poursuivi par le RSA de faire accéder au marché du travail les bénéficiaires de minima sociaux était partagé par l'ensemble des acteurs.

Répondant à M. Serge Dassault, M. Martin Hirsch a fait valoir que le système du RSA permettrait une transition entre l'allocation minimale et les revenus du travail. Il a jugé souhaitable que la France participe au mouvement de nombreux pays, notamment européens, vers la mise en place de systèmes de solidarité active similaires au RSA.

Enfin, en réponse à M. Jean Arthuis, président, M. Martin Hirsch a relevé que la « prime de Noël » était un système inégalitaire du fait de son caractère ponctuel, car il exclut les allocataires sortis du dispositif au moment de son versement. Il a affirmé sa volonté de corriger cet effet pervers.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une réunion tenue le mercredi 7 mai 2008 , sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l' examen du rapport de M. Auguste Cazalet, rapporteur, sur la proposition de loi n° 212 (2007-2008) renforçant le contrôle comptable du revenu

M. Auguste Cazalet, rapporteur , a indiqué que le renvoi en commission de la proposition de loi de M. Michel Mercier renforçant le contrôle comptable du RMI, décidé par le Sénat le 26 mars 2008, lui avait permis de mener des investigations complémentaires sur pièces et sur place et, notamment, de se rendre dans trois départements.

Après avoir salué le travail effectué à la fois par les caisses d'allocations familiales, les caisses de mutualité sociale agricole et les départements dans le domaine de la gestion du RMI, il a observé que les informations dont disposaient les conseils généraux pour piloter cette dépense étaient aujourd'hui insuffisantes.

La loi du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité (RMA) faisant des départements les pilotes du dispositif du RMI, M. Auguste Cazalet, rapporteur , a jugé indispensable qu'ils puissent disposer de tous les éléments leur permettant de connaître les bénéficiaires du RMI ainsi que les montants versés et d'opérer les contrôles nécessaires. Il a donc estimé que, malgré la qualité du travail des caisses d'allocations familiales (CAF) et des caisses de mutualité sociale agricole, certaines améliorations législatives étaient nécessaires. Il a également souligné le besoin de renforcer aujourd'hui les synergies entre les différents acteurs impliqués dans la gestion du RMI.

En outre, il a relevé que le dispositif du revenu de solidarité active (RSA), qui devrait être généralisé en 2009, serait d'une complexité supérieure à celle du RMI. Dès lors, il a indiqué que la clarification des relations entre les organismes payeurs et les conseils généraux lui apparaissait être un préalable à la mise en place du RSA, les départements devant être en mesure de gérer de manière satisfaisante le RMI pour pouvoir prendre en charge ce nouveau dispositif. Il a donc estimé que la proposition de loi présentée par M. Michel Mercier n'en était que plus légitime et sa mise en oeuvre, plus urgente.

Puis M. Auguste Cazalet, rapporteur , a commenté les six articles contenus dans ses conclusions, qui s'inscrivaient dans la philosophie générale du texte initial.

Il a indiqué que le premier article prévoyait l'amélioration de l'information des conseils généraux sur l'acompte qui leur était demandé par les organismes payeurs au titre du RMI et de la prime forfaitaire, cette disposition entrant en vigueur le 1 er janvier 2009.

Il a noté que le deuxième article, qui ne figurait pas dans le texte initial, rendait obligatoire l'information du président du conseil général lors de la reprise des versements faisant suite à une décision de suspension des droits.

Il a expliqué que le troisième article tendait à préciser les informations que l'organisme payeur devait transmettre au conseil général s'agissant des paiements indus, en complétant les dispositions législatives actuelles afin d'apporter, en particulier, deux modifications :

- la première visait à ne transférer les indus au département que lorsque le droit au RMI ou à la prime forfaitaire a cessé, c'est-à-dire après quatre mois d'absence de recouvrement, contre trois aujourd'hui ;

- la seconde visait à s'assurer que l'organisme payeur, lorsqu'il transmettait au département un indu, fournissait bien, outre le nom du bénéficiaire du paiement indu et les sommes en cause, le motif précis justifiant du caractère indu de ce versement.

M. Auguste Cazalet, rapporteur , a indiqué que le quatrième article, suivant la philosophie générale du texte initial de la proposition de loi, tendait à permettre aux conseils généraux qui le souhaitaient de demander une modification de la convention passée avec l'organisme payeur afin d'y inclure les éléments suivants :

- les modalités d'échanges de données entre les partenaires, notamment au regard de l'obligation de détailler l'acompte mensuel posée par l'article 1 er ;

- les modalités d'information du président du conseil général lors de la reprise des versements après une période de suspension de l'allocation ;

- le degré de précision du motif des indus transférés au département ;

- enfin, les engagements de qualité de service et de contrôle, pris par l'organisme payeur, notamment en vue de limiter les paiements indus.

Il a noté que le cinquième article, qui reprenait, en les aménageant, les dispositions de l'article 3 du texte initial, précisait les règles applicables en matière de croisement des données des organismes payeurs avec celles dont disposent les organismes d'indemnisation du chômage et l'administration fiscale, mais également avec les URSSAF, en visant :

- d'une part, à renforcer le contrôle par croisement de données avec ces organismes, en augmentant leur fréquence ;

- d'autre part, à améliorer l'information dont les présidents de conseils généraux disposent à l'issue de ces croisements ;

- enfin, à prévoir la transmission mensuelle aux services du conseil général de la liste nominative des contrôles effectués par les CAF, en précisant la nature du contrôle effectué, et ce afin d'assurer une bonne coordination entre les contrôles exercés par les CAF et la politique de suivi des allocataires dont le département a la charge.

La mise en oeuvre de ces nouvelles dispositions nécessitant très vraisemblablement des adaptations des systèmes d'information, M. Auguste Cazalet, rapporteur , a précisé que leur entrée en vigueur serait fixée au 1 er janvier 2009, afin de laisser aux organismes concernés le temps nécessaire pour les mettre en oeuvre de manière satisfaisante.

Puis il indiqué que le dernier article précisait les dates d'entrée en vigueur de certaines mesures et prévoyait une articulation entre les dispositions de cette proposition de loi et la mise en place du RSA.

Enfin, il a estimé que ces conclusions, dont le haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté avait déclaré la veille devant la commission partager les objectifs, paraissaient équilibrées et de nature à résoudre certaines des difficultés rencontrées aujourd'hui.

M. Jean Arthuis, président , s'est félicité des investigations ainsi menées et a souligné que la mise en place du RSA devait prendre appui sur un pilotage effectif et irréprochable du RMI.

M. Michel Mercier a remercié le rapporteur pour ses travaux et a rappelé que sa proposition de loi ne remettait nullement en cause le RMI mais était destinée à permettre aux conseils généraux d'avoir une connaissance précise de leurs charges. Puis il a fait état de l'évolution du nombre de bénéficiaires du RMI dans le département du Rhône, en observant que leur diminution ne s'était pas traduite par une baisse identique et concomitante de l'acompte demandé au conseil général. Il a également souligné l'importance des paiements indus, qui représentaient près de 18 millions d'euros.

Notant l'accord du haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté avec les objectifs de la proposition de loi et ses réserves s'agissant du calendrier retenu pour son application, il a souligné que la généralisation du RSA, qui se traduirait par une extension très importante du nombre de personnes couvertes par ce nouveau dispositif, ne pourrait être menée que si les conseils généraux disposaient des outils de suivi et de pilotage adaptés. A cet égard, il a fait part de son souhait de voir les dispositions de la proposition de loi entrer en vigueur aussi tôt que possible.

M. Jean Arthuis, président , a indiqué que la mise en place du RSA entraînerait une modification des systèmes d'information des CAF, ce qui avait conduit le rapporteur à proposer que certaines dispositions n'entrent en vigueur qu'à compter du 1 er janvier 2009, afin de veiller à la cohérence des réformes entreprises.

M. Michel Mercier a souhaité que M. Auguste Cazalet, en sa qualité de rapporteur spécial de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », puisse s'assurer, par le biais de contrôles, que les CAF se préparent effectivement à répondre aux exigences posées par cette proposition de loi dès le 1 er janvier 2009.

Il a ensuite mis en évidence les enjeux que représenteraient en 2009, pour les conseils généraux, le cadre de gestion des tutelles issu de la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs ainsi que la mise en place du RSA.

M. Jean Arthuis, président , a constaté que le pilotage du RMI avait longtemps été déficient et que les systèmes d'information utilisés par les CAF, essentiellement destinés à assurer un traitement de masse des prestations, en étaient le reflet. Il a mis en évidence, de manière plus générale, la nécessité de renforcer le pilotage des dispositifs sociaux et d'opérer davantage de contrôles dans ce domaine.

M. Auguste Cazalet, rapporteur , a observé que les insuffisances des systèmes d'information actuels des CAF, expliquent une large part des difficultés rencontrées par les conseils généraux dans leur pilotage du RMI.

M. Roland du Luart , après avoir remercié MM. Michel Mercier et Auguste Cazalet pour leurs travaux, a souligné l'importance de la question abordée par cette proposition de loi. La mise en place de ces dispositions lui apparaît ainsi être un préalable à la mise en oeuvre du RSA, dont il a souligné le coût potentiellement élevé pour les départements. Il a estimé que ces derniers devaient donc disposer au plus vite des outils de pilotage adéquats.

M. Jean Arthuis, président , a relevé que les systèmes d'information étaient au coeur de la réforme de l'Etat.

M. Claude Haut a indiqué que les conseils généraux rencontraient tous les mêmes difficultés et a approuvé sur le fond les orientations de la proposition de loi présentée par M. Michel Mercier. Il a toutefois observé que les difficultés de financement du RMI, essentielles à ses yeux, ne trouvaient pas de réponse dans ce cadre. Il a souligné l'importance de la question de la compensation aux départements des charges qui leur sont transférées, notamment dans la perspective de la généralisation du RSA.

M. Jean Arthuis, président , a relevé que la proposition de loi ne comportait pas de dispositions relatives au financement du RMI, son objet étant de permettre aux départements de disposer des instruments de pilotage adéquats.

M. Michel Moreigne a mis en évidence la nécessité de clarifier cette question du financement préalablement à la mise en place du RSA. Il s'est également interrogé sur les risques encourus par les payeurs départementaux à raison de paiements indus, en cas de mise en cause de leur responsabilité.

M. Michel Mercier , prenant comme exemple la situation du département du Rhône en matière d'indus, a indiqué que le payeur départemental n'était pas en cause puisque ce sont les CAF qui servent le RMI.

M. Jean Arthuis, président , a observé que nombre d'indus découlent directement du régime déclaratif du RMI. A cet égard, il a noté que le souhait, exprimé par le haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté lors de son audition devant la commission le 6 mai 2008, de passer d'une déclaration trimestrielle de revenus à une déclaration mensuelle, ce qui devrait contribuer à limiter ces indus.

M. Claude Belot a rappelé la réussite de l'expérimentation du RSA dans le département de la Charente-Maritime, qui permet d'augmenter le nombre d'allocataires qui sortent du dispositif des minima sociaux « par le haut », vers le marché du travail. Au sujet des relations avec la CAF, il a indiqué que tous les conseils généraux avaient connu des problèmes similaires. Il a insisté sur la nécessité de disposer des outils appropriés pour opérer des contrôles sur les bénéficiaires afin de prévenir les paiements indus, ceux-ci s'avérant par la suite difficilement récupérables. Enfin, il s'est interrogé sur la perspective d'un renforcement de l'autorité des conseils généraux sur les CAF.

Mme Marie-France Beaufils a remercié M. Claude Belot pour son intervention, indiquant partager son souci de prévenir les indus, qu'elle a jugés très préjudiciables pour les bénéficiaires, qui doivent par la suite les rembourser. Elle a souligné deux enjeux principaux : celui de l'accompagnement des bénéficiaires pour leur permettre de sortir du dispositif d'allocations et celui du financement futur du RSA. Elle a regretté qu'il faille recourir à la loi pour améliorer les relations entre les CAF et les conseils généraux et a rappelé que M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, avait émis des doutes sur l'opportunité de la proposition de loi présentée par M. Michel Mercier dans le contexte de la mise en place du RSA. Elle a souhaité que les bénéficiaires du RMI ne soient pas « stigmatisés ». Enfin, elle s'est interrogée sur la pertinence de l'attribution aux CAF du rôle de paiement du RMI.

M. Michel Mercier a précisé que le seul objectif de la proposition de loi qu'il avait présentée était de produire moins de paiements indus, arguant que ces sommes pourraient être utilisées utilement par ailleurs.

M. Jean Arthuis, président , a réaffirmé que la proposition de loi n'allait pas à l'encontre de l'intérêt des bénéficiaires du RMI mais se contentait d'améliorer les instruments de pilotage du dispositif pour le rendre plus transparent.

M. Gérard Miquel a estimé que la proposition de loi pourrait permettre de verser le RMI de façon plus juste et équitable. Puis il s'est interrogé sur la mise en commun des fichiers entre les différentes CAF, notamment pour les départements limitrophes.

M. Jean Arthuis, président , a indiqué que cette mise en commun semblait être en cours et que le gouvernement pourrait être utilement interrogé à ce sujet lors de l'examen, en séance publique, des conclusions de la commission sur la proposition de loi.

M. Gérard Miquel a regretté qu'après vingt ans de mise en oeuvre du RMI cette coordination entre les CAF ne soit toujours pas effective. Il s'est par ailleurs déclaré convaincu que la gestion du RMI et de l'éventuel RSA serait, à terme, intégralement confiée aux départements, ce qui rendrait le dispositif plus lisible pour ses bénéficiaires.

M. Philippe Adnot , tout en indiquant entretenir dans le département de l'Aube de très bonnes relations avec la CAF, a jugé que l'avantage de la proposition de loi était d'éviter que la bonne gestion du RMI ne soit dépendante de circonstances locales. Il a, par ailleurs, regretté que le délai prévu pour l'entrée en vigueur de certaines dispositions de la proposition de loi soit fixé au 1 er janvier 2009, estimant que les conditions étaient réunies pour une mise en oeuvre immédiate de la proposition de loi. Enfin, il s'est inquiété de la perspective de généralisation du RSA, en l'absence d'analyse des résultats des expérimentations, et a demandé à M. Jean Arthuis, président, s'il disposait de davantage d'informations à ce sujet.

M. Jean Arthuis, président , a indiqué ne pas disposer d'informations précises sur les résultats des expérimentations et a souhaité que davantage d'éléments soient transmis à la commission lorsque les leçons des expérimentations pourraient être tirées.

La commission a alors adopté les conclusions présentées par son rapporteur sur la proposition de loi n° 212 (2007-2008) renforçant le contrôle du revenu minimum d'insertion, le groupe socialiste s'abstenant et le groupe communiste, républicain et citoyen votant contre.

CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

ARTICLE PREMIER

Après l'article L. 262-30 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un article L. 262-30-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 262-30-1 - Lorsque les organismes payeurs mentionnés à l'article L. 262-30 transmettent au président du conseil général une demande de versement d'acompte au titre du revenu minimum d'insertion et de la prime forfaitaire instituée par l'article L. 262-11, ils joignent à cette demande les montants nominatifs, bénéficiaire par bénéficiaire, des versements dont la somme est égale au montant global de l'acompte, en précisant l'objet de la prestation et la nature de chaque versement. ».

ARTICLE 2

Après l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un article L. 262-24-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 262-24-1 - Lorsque, à la suite d'une suspension de l'allocation, l'organisme payeur procède à une reprise de son versement et, le cas échéant, à des régularisations relatives à la période de suspension, il en informe le président du conseil général en précisant le nom de l'allocataire concerné et en explicitant le motif de la reprise du versement de l'allocation. ».

ARTICLE 3

L'article L. 262-41 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigé :

« Art. L. 262-41 - Tout paiement indu d'allocation ou de la prime forfaitaire instituée par l'article L. 262-11 est récupéré par l'organisme payeur mentionné à l'article L. 262-30.

« Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d'aide sociale dans les conditions définies à l'article L. 262-39.

« Sauf si l'allocataire opte pour le remboursement de l'indu en une seule fois ou si un échéancier a été établi avec son accord, l'organisme payeur mentionné au premier alinéa procède au recouvrement de tout paiement indu d'allocation ou de prime forfaitaire par retenue sur le montant des allocations ou des primes forfaitaires à échoir, dans la limite de 20 % de ces allocations ou primes forfaitaires.

« Lorsque le droit à l'allocation ou à la prime forfaitaire a cessé, le président du conseil général constate l'indu et transmet au payeur départemental le titre de recettes correspondant pour le recouvrement.

« L'organisme payeur transmet chaque mois au président du conseil général la liste des indus ainsi constatés faisant apparaître le nom de l'allocataire, l'objet de la prestation, le montant initial de l'indu ainsi que le solde restant à recouvrer. Il explicite également le motif du caractère indu du paiement.

« Dans le cas où le droit à l'allocation ou à la prime forfaitaire a cessé, le remboursement doit être fait en une seule fois ou selon un échéancier établi par le payeur départemental. Toutefois, si le débiteur est à nouveau bénéficiaire du revenu minimum d'insertion ou de la prime forfaitaire, le payeur départemental peut procéder au recouvrement du titre de recettes par précompte sur les allocations ou primes forfaitaires à échoir, dans les conditions et limites prévues au troisième alinéa.

« La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf manoeuvre frauduleuse ou fausse déclaration. ».

ARTICLE 4

A la demande du président du conseil général, afin de renforcer la connaissance de la réalité des droits et de la situation des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion et de la prime forfaitaire instituée par l'article L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles, la convention mentionnée à l'article L. 262-30 du même code est remplacée par une nouvelle convention ou fait l'objet d'un avenant, passés entre le conseil général et l'organisme payeur, afin d'y inclure :

1°) les modalités d'échanges de données entre les parties, notamment pour l'application de l'article L. 262-30-1 du code de l'action sociale et des familles ;

2°) les modalités de mise en oeuvre de l'article L. 262-24-1 du même code ;

3°) le degré de précision du motif des paiements indus constatés par le conseil général en application de l'article L. 262-41 du même code ;

4°) les engagements de qualité de service et de contrôle, pris par l'organisme payeur, notamment en vue de limiter les paiements indus.

ARTICLE 5

L'article L. 262-33 du code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les organismes payeurs mentionnés à l'article L. 262-30 procèdent chaque mois à la confrontation de leurs données avec celles dont disposent les organismes d'indemnisation du chômage et les organismes de recouvrement des cotisations de sécurité sociale. Ils procèdent, à l'occasion de la première liquidation de l'allocation et chaque année, à la confrontation de leurs données avec celles dont dispose l'administration des impôts. Ils transmettent chaque mois au président du conseil général la liste nominative des allocataires dont la situation a été modifiée à la suite de ces échanges de données. ».

2° Au quatrième alinéa, les mots : « à ceux-ci » sont remplacés par les mots : « au président du conseil général, au président de la commission locale d'insertion définie à l'article L. 263-10 ».

3° Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les organismes payeurs transmettent chaque mois au président du conseil général et au président de la commission locale d'insertion définie à l'article L. 263-10 la liste de l'ensemble des allocataires ayant fait l'objet d'un contrôle, en détaillant la nature du contrôle et son issue. ».

ARTICLE 6

I. Les dispositions des articles 1 er et 5 de la présente loi entrent en vigueur le 1 er janvier 2009.

II. Les dispositions de la présente loi s'appliquent au revenu de solidarité active à compter de sa mise en oeuvre dans l'ensemble des départements.

ANNEXE : PERSONNES AUDITIONNÉES

I. PERSONNES AUDITIONNÉES OU RENCONTRÉES À PARIS

A. HAUT COMMISSARIAT AUX SOLIDARITÉS ACTIVES CONTRE LA PAUVRETÉ

- M. Martin Hirsch , haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté ;

- Mme Marianne Duranton , conseillère technique chargée des relations avec le Parlement au cabinet de M. Martin Hirsch ;

- Mme Virginie Magnant , conseillère technique chargée des questions budgétaires au cabinet de M. Martin Hirsch.

B. MINISTÈRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE

- Mme Mathilde Lignot-Leloup , conseillère en charge du pôle synthèse, comptes sociaux et comptes publics au cabinet de M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;

- M. Pierre Pedinielli , conseiller en charge des relations avec le Parlement au cabinet de M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

C. CAISSE NATIONALE D'ALLOCATIONS FAMILIALES

- M. Frédéric Marinacce , directeur des prestations familiales de la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF).

D. CAISSE CENTRALE DE LA MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE.

- Mme Danièle Saint-Martin , agent comptable de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole.

E. ASSEMBLÉE DES DÉPARTEMENTS DE FRANCE

- M. Jean-Michel Rapinat , chef du service social de l'Assemblée des départements de France ;

- Mme Marylène Jouvien , chargée des relations avec le Parlement de l'Assemblée des départements de France.

II. PERSONNES AUDITIONNÉES À L'OCCASION DE DÉPLACEMENTS SUR PLACE

A. PERSONNES RENCONTRÉES À LYON LE JEUDI 17 AVRIL 2008

1. Conseil général du Rhône

- M. Pierre Jamet , directeur de cabinet du président, directeur général des services du conseil général du Rhône ;

- Mme Anne-Camille Veydarier , déléguée générale du pôle intégration sociale au conseil général du Rhône ;

- Mme Martine Montmasson , directrice du service de l'insertion au conseil général du Rhône.

2. Caisse d'allocations familiales de Lyon

- M. Marc Tixier , président du conseil d'administration de la caisse d'allocations familiales de Lyon ;

- M. Philippe Simonnot , directeur général de la caisse d'allocations familiales de Lyon ;

- Mme Josiane Bertin , agent comptable de la caisse d'allocations familiales de Lyon ;

- M. Christian Toupenet , directeur des prestations de la caisse d'allocations familiales de Lyon.

B. PERSONNES RENCONTRÉES AU MANS LE MERCREDI 23 AVRIL 2008

1. Conseil général de la Sarthe

- M. Joël Bignon , directeur de la direction du développement territorial au conseil général de la Sarthe ;

- Mme Catherine Truillard , directrice de la direction des finances du conseil général de la Sarthe ;

- Mme Myriam Thireau , responsable du bureau allocation RMI au conseil général de la Sarthe ;

- Mme Chantal Chauveau , responsable du pôle gens du voyage au conseil général de la Sarthe.

2. Caisse d'allocations familiales de la Sarthe

- M. Jean-Michel Blin , président du conseil d'administration de la caisse d'allocations familiales de la Sarthe ;

- Mme Corinne Hallez , directrice de la caisse d'allocations familiales de la Sarthe ;

- M. Christian Saussaye , directeur adjoint de la caisse d'allocations familiales de la Sarthe ;

- M. Jacques Blondy , sous directeur du pôle allocataires de la caisse d'allocations familiales de la Sarthe ;

- Mme Isabelle Le Fouest , agent comptable de la caisse d'allocations familiales de la Sarthe.

C. PERSONNES RENCONTRÉES EN AVIGNON LE JEUDI 24 AVRIL 2008

1. Conseil général de Vaucluse

- M. Alain Bartoli , directeur général des services du conseil général de Vaucluse ;

- M. Patrice Federighi , directeur général adjoint du conseil général de Vaucluse ;

- M. Christophe Beguet , directeur adjoint insertion au conseil général de Vaucluse ;

- Mme Dominique Bauer-Chevrier , responsable du service instruction ouverture des droits RMI au conseil général de Vaucluse.

2. Caisse d'allocations familiales de Vaucluse

- Mme Anne-Mary Perrin , directrice de la caisse d'allocations familiales de Vaucluse ;

- Mme Isabelle Potel , sous-directeur en charge des prestations à la caisse d'allocations familiales de Vaucluse ;

- M. Thierry Autard , agent comptable de la caisse d'allocations familiales de Vaucluse.

* 1 Rapport n° 235 (2007-2008) fait au nom de la commission des finances, déposé le 25 mars 2008.

* 2 Le présent rapport se concentre sur l'analyse des articles de la présente proposition de loi et ne reprend pas l'exposé général auquel avait donné lieu le premier rapport précité de votre rapporteur.

* 3 Article D. 262-67 du code de l'action sociale et des familles.

* 4 Loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion (RMI) et créant un revenu minimum d'activité (RMA).

* 5 Rapport RM 2007-165P, novembre 2007.

* 6 Votre rapporteur a pu constater, lors d'un déplacement à la CAF de Vaucluse, que des listes journalières de bénéficiaires ayant fait l'objet d'une régularisation, présentées par prestation comptable, existent d'ores et déjà, mais ne sont pas transmises aux conseils généraux.

* 7 Certains départements retiennent ainsi des seuils de 200 ou 300 euros.

* 8 Unions de recouvrement pour la sécurité sociale et les allocations familiales.

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