B. BILAN ET PERSPECTIVES DE LA POLITIQUE DU MÉDICAMENT

A côté des honoraires médicaux, le sous-objectif « dépenses de soins de ville » comporte un deuxième volet : celui des produits de santé.

Le montant total (ville + hôpital) des dépenses de médicaments remboursées par l'assurance maladie s'est élevé à 25,3 milliards d'euros en 2007 , dont 20,1 milliards pour les seuls médicaments remboursés dans le cadre du sous-objectif de l'Ondam consacré aux soins de ville. Cette dépense représente environ 30 % des dépenses de soins de ville et 15 % des dépenses totales d'assurance maladie.

La croissance des dépenses de médicaments s'est caractérisée depuis plusieurs années par un taux d'augmentation supérieur à celui de la progression de l'Ondam .

Cette évolution est en partie due à une déformation de la consommation pharmaceutique au profit des produits les plus chers. Le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie indique : « voici dix ans, moins de 5 % du chiffre d'affaires concernait les produits de plus de 20 euros. Aujourd'hui ce pourcentage atteint 48 %. »

Cette situation, décrite sous le nom d'« effet structure », n'a pas fait obstacle à une hausse modérée de la dépense au cours des dernières années grâce aux différentes mesures arrêtées par le Gouvernement.

Taux de croissance des dépenses de médicaments

2003

2004

2005

2006

2007

2008*

6,1 %

6,2 %

6,8 %

0,8 %

3,8 %

3,8 %

* Estimation commission des comptes de la sécurité sociale, septembre 2008, hors effet franchise.

Source : annexe 1 du PLFSS pour 2009

1. La contribution du plan médicament à la réduction du déficit de l'assurance maladie

En 2004, confronté au déficit de l'assurance maladie et à l'accroissement rapide des dépenses de santé, le Gouvernement a décidé d'engager une politique pluriannuelle de réduction des dépenses dans le secteur du médicament . Près de 9 milliards d'euros d'économies étaient attendus de l'amélioration et du fonctionnement du système de soins. Les actions sur les produits de santé devaient contribuer à ce redressement à hauteur de 2,3 milliards.

Un plan pluriannuel « médicament » (2004-2007) a donc été présenté concomitamment avec la réforme de l'assurance maladie. Les informations disponibles montrent que ses objectifs ont été largement atteints, puisqu'une économie de 2,8 milliards a été réalisée sur cette période .

Son mode opératoire a consisté en des actions conjuguées visant à faire baisser le coût d'acquisition des médicaments. Deux voies ont été suivies en ce domaine : une première en direction de médicaments génériques dont la prescription et la délivrance ont été favorisées tandis qu'une baisse des prix était décidée simultanément ; une seconde en direction des médicaments princeps pour lesquels des baisses de prix ciblées ont été mises en oeuvre. Initialement évaluée à 350 millions d'euros, cette action a affiché un rendement quasiment double de celui attendu.

Economies réalisées dans le cadre du plan médicament
et de la maîtrise médicalisée sur les produits de santé

(en millions d'euros)

2005

2006

2007

Total
2005-2007

Rappel des objectifs à fin 2007

Génériques

255

730

280

1 265

1 050

Adaptation de la prise en charge

0

460

20

480

250

Adaptation des conditionnements

0

14

23

37

180

Baisses de prix ciblées

245

250

170

665

350

Tarifs des dispositifs médicaux

13

80

0

93

250

Marges de distribution

0

0

0

0

100

Médicaments à l'hôpital (liste en sus, rétrocession...)

210

0

0

210

100

Total plan médicaments 2005-2007

723

1 534

493

2 750

2 280

Maîtrise médicalisée (médicaments)

17

120

259

396

829

Total économies médicaments

740

1 645

752

3 146

3 109

Source : Direction de la sécurité sociale

Enfin, un troisième poste d'économie important résulte de l'adaptation de la prise en charge. Cette évolution fait suite à la mise en oeuvre d'une nouvelle politique d'évaluation du service médical rendu (SMR) des produits de santé. En 2005, le ministre chargé de la santé a demandé à la Haute Autorité de santé (HAS) de procéder à la réévaluation du SMR de 245 médicaments. La HAS s'est prononcée en faveur d'un retrait du remboursement de 218 médicaments auparavant remboursés à 35 % et pour lesquels une prise en charge par la solidarité nationale ne se justifie plus selon elle.

A ces économies prévues dans le cadre du plan médicament, il convient d'ajouter celles produites par le développement de la maîtrise médicalisée dans le cadre de la convention médicale : la modération des prescriptions a permis une économie estimée à 395 millions d'euros sur la période 2005-2007.

2. La poursuite d'une politique de maîtrise des dépenses de médicaments

L'achèvement du plan pluriannuel ne signifie pas pour autant que le Gouvernement et l'assurance maladie ont renoncé à toute mesure d'économie ou d'optimisation de la dépense dans le domaine du médicament . Dans la continuité des mesures précédentes, une orientation complémentaire est suggérée avec l'ajout de l'analyse médico-économique.

a) Une contribution au plan d'économies prévu par le projet de loi de financement

La construction de l'Ondam pour 2009 repose à la fois sur des recettes nouvelles, évaluées à 1,4 milliard d'euros, et sur un plan d'économies de 2,2 milliards d'euros.

L'économie la plus importante proviendra d'une action sur les prix qui concernera en priorité les médicaments sous brevet mais également les médicaments génériques et les dispositifs médicaux.

Le Gouvernement a par ailleurs prévu d'agir sur la marge de distribution des médicaments et promeut toujours le développement de l'utilisation des grands conditionnements.

Des économies sont également attendues de la gestion médicalisée des produits de santé. Il s'agit là d'une des premières applications de l'analyse médico-économique à la prescription et à la prise en charge des produits de santé.

Plan médicament 2009

Régime général

Tous régimes

Mesures d'économies intégrées à l'Ondam 2009

593

690

Plan médicament : baisse de prix des médicaments sous brevet et convergence des prix par classe

292

340

Plan médicament : accroissement des baisses de prix des médicaments génériques

34

40

Baisse de prix sur les dispositifs médicaux

43

50

Gestion médicalisée de la liste des produits de santé remboursables et suites des recommandations médicoéconomiques de la HAS

112

130

Marges de distribution des médicaments en ville et en rétrocession

86

100

Développement de l'utilisation des grands conditionnements

26

30

b) Le développement de la médico-économie

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 avait confié une compétence nouvelle à la Haute Autorité de santé en lui permettant d'émettre des recommandations et avis médico-économiques sur les stratégies de soins, de prescription ou de prise en charge les plus efficientes.

Le renforcement de son rôle souhaitait notamment répondre aux observations de la Cour des comptes fondées sur des comparaisons internationales montrant que d'autres pays définissent des priorités « et restreignent plus énergiquement l'accès au remboursement de certains médicaments » 5 ( * ) .

L'analyse médico-économique doit permettre d'orienter la maîtrise médicalisée des dépenses en agissant sur le comportement des différents acteurs : professionnels de santé et assurés. On peut en espérer la réduction des actes redondants, la diminution des surprescriptions et le recours plus systématique aux thérapeutiques qui, pour une efficacité médicale équivalente, ont un coût moins élevé pour la collectivité.

A partir de 2009, le Gouvernement souhaite développer le recours à la médico-économie en s'appuyant sur des référentiels élaborés par la Haute Autorité de santé et en définissant des stratégies thérapeutiques et médicamenteuses .

Dans un premier temps, les efforts seront concentrés sur la lutte contre les prescriptions excessives de certains médicaments . A cet effet, le ministère chargé de la santé a adressé, le 7 avril dernier, un courrier à la Haute Autorité de santé afin que cette dernière élabore des référentiels relatifs aux traitements utilisés contre l'hypertension, le mauvais cholestérol et les ulcères. L'objectif affiché est de réduire les prescriptions de certaines catégories de prescriptions, coûteuses pour l'assurance maladie et dont la justification médicale n'est pas établie.

En réponse à cette demande du Gouvernement, la Haute Autorité de santé a publié une fiche pour le bon usage des médicaments contre l'hypertension artérielle, dans laquelle elle recommande aux médecins de prescrire en première intention les molécules les moins chères. La publication des autres référentiels demandés par le Gouvernement au mois d'avril dernier est attendue pour 2009.

Cette situation a d'ailleurs provoqué un début de polémique entre le Gouvernement et la Haute Autorité de santé, le ministre chargé de la sécurité sociale ayant critiqué la lenteur mise à la publication des référentiels.

Ce débat met l'accent sur les enjeux liés au développement de l'analyse médico-économique et, plus largement, à la mission de la Haute Autorité de santé qui doit tenir compte de l'intérêt thérapeutique des soins et de leur impact sur les comptes de l'assurance maladie.

Ce recours à ces nouveaux instruments se heurte à la résistance - et on l'a déjà constaté lors de la publication des référentiels relatifs à la prise en charge des diabétiques en 2006 - des acteurs médicaux, qui hésitent à s'engager dans le strict respect des recommandations, et des patients, qui craignent que ces mesures ne se traduisent par un rationnement des soins .

* 5 Cour des comptes, la sécurité sociale, septembre 2007.

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