II. L'IMPACT ATTENDU SUR L'ANNÉE 2009

A. UN PIB ACCRU D'ENVIRON 0,5 POINT EN 2009 ?

1. Un impact de l'ordre de 0,5 point de PIB en 2009, selon les estimations disponibles

Votre rapporteur général a présenté les principaux mécanismes économiques des plans de relance dans son rapport relatif au projet de loi de finances rectificative pour 2008. Aussi se contentera-t-il de des quelques rappels de l'encadré ci-après.

Le fonctionnement d'un plan de relance : quelques rappels

Schématiquement, selon les estimations usuelles, dans le cas de la France, la situation est la suivante :

- un euro de dépense publique supplémentaire, en particulier d'investissement public, augmente le PIB d'environ un euro (on dit que le « multiplicateur keynésien » est égal à 1) :

- un euro d'allégements fiscaux augmente le PIB d'environ 50 centimes d'euros (on dit que le « multiplicateur keynésien » est égal à 0,5).

Ces effets se font sentir dans un délai d'un an.

Le niveau modeste du multiplicateur keynésien vient de l'épargne et des importations, qui réduisent la diffusion de la mesure dans l'économie.

Cependant, pour une relance au niveau de l'ensemble de l'Union européenne, qui est une économie relativement fermée, on estime que le multiplicateur keynésien est environ deux fois plus élevé que pour une relance purement française. Ainsi, si chaque grand Etat européen ne bénéficie que pour moitié de son plan de relance, les Etats européens ont collectivement davantage intérêt à mener de telles politiques.

En pratique, du fait de l'impossibilité d'augmenter indéfiniment l'investissement public, on ne voit guère comment concevoir un ensemble de mesures à la fois massives et au multiplicateur keynésien élevé.

Selon les différentes estimations disponibles, le plan de relance présenté par le gouvernement augmenterait la croissance du PIB de la France d'environ 0,5 point en 2009.

Ainsi, selon le dossier de presse « l'impact économique du plan de relance de 26 milliards d'euros est évalué à 0,6 point de PIB ». L'ordre de grandeur retenu par les conjoncturistes paraît légèrement inférieur, mais analogue, comme l'indique le tableau ci-après.

L'impact du plan de relance, selon diverses estimations

(en points de PIB)

Impact sur le PIB en 2009

Source

Gouvernement

0,6*

Dossier de presse de décembre 2008

Crédit agricole

0,3-0,5

« CA Eco News » n° 120, 8 décembre 2008

OFCE

0,3

« Lettre de l'OFCE », 23 décembre 2008

* Il n'est pas précisé si cet impact concerne la seule année 2009. Le gouvernement estime cependant, dans le programme de stabilité 2009-2012 transmis à la Commission européenne en décembre 2008, que pour l'année 2009, l'impact global des mesures prises (y compris l'exonération de TP pour les investissements de 2009 et l'éco-PTZ) est de 0,8 point de PIB, l'impact global de la politique budgétaire (y compris le libre jeu des stabilisateurs automatiques) étant évalué à 1 point de PIB.

Cet ordre de grandeur paraît vraisemblable. Le raisonnement suivi par le Crédit agricole et l'OFCE - de même, peut-on supposer, que le gouvernement - est, schématiquement, le suivant :

- les investissements publics , qui représentent environ la moitié du plan, ont un multiplicateur proche de l'unité, et, si on prend en compte le fait qu'ils ne seront pas réalisés dés le début de 2009, mais au mieux progressivement sur l'année, augmentent donc le PIB d'un peu moins de 0,5 point ;

- les allégements fiscaux en faveur des entreprises, qui constituent des mesures de trésorerie , ont pour objet d'empêcher un « scénario catastrophe » où la « frilosité » des banques susciterait de graves problèmes de trésorerie pour les entreprises, mais, dans l'hypothèse où un tel risque ne se concrétiserait pas, ne soutiendraient pas véritablement l'activité.

Selon les estimations de votre commission des finances, l'impact sur le PIB du plan de relance, tel qu'indiqué par le gouvernement, pourrait être de l'ordre de 0,5 point en 2009.

2. Un impact cumulé des plans de relance européens de l'ordre d'1 point de PIB ?

Comme on l'a indiqué dans l'encadré ci-avant, au niveau des 5 principales économies de l'Union européenne, le montant global des plans est de l'ordre de 1,3 point de PIB, soit équivalent à celui du plan français. Leur composition moyenne est légèrement différente : l'investissement public serait légèrement moins important, mais en sens inverse le soutien de la trésorerie des entreprises serait légèrement moindre, au profit de la demande des ménages.

Les principaux plans de relance européens, selon l'OFCE (montant global) : le cas de la France et des 5 principales économies de l'Union européenne

(en milliards d'euros et en %)

France

5 principales économies
de l'Union européenne*

Mds €

% du PIB

Mds €

% du PIB

Total investissement public

8**

0,4

26,9

0,3

Y compris FCTVA**

10,5

0,5

Soutien à la trésorerie des entreprises

13,9**

0,7

36,8

0,4

Hors FCTVA**

11,6

0,6

Aide aux secteurs

2

0,1

5,7

0,1

Politiques de l'emploi et aides aux ménages

2

0,1

38,6

0,4

Suppression impôt sur le patrimoine

1,8

0,0

Baisse de la TVA

11,5

0,1

Autres

6,3

0,1

Total

26

1,3

126

1,3

* Calcul de votre rapporteur général.

** L'OFCE considère que, sur les 10,6 milliards d'euros d'investissement public indiqués par le gouvernement, 2,5 milliards d'euros, correspondant à l'anticipation du versement des attributions du FCTVA, peuvent être assimilés à un soutien de la trésorerie.

Source : d'après la Lettre de l'OFCE, 23 décembre 2008

Au total, au niveau de l'Union européenne , le multiplicateur des différents plans de relance est vraisemblablement proche de l'unité, ce qui correspond à un impact en 2009-2010 supérieur à 1 point de PIB. Cependant, la totalité de ces plans ne devant pas être mise en oeuvre dès 2009, l'impact sur la croissance en 2009 devrait être légèrement inférieur à 1 point de PIB.

B. UN ALÉA IMPORTANT LIÉ À LA RAPIDITÉ DE MISE EN oeUVRE DE L'INVESTISSEMENT PUBLIC

La question de la réalisation de l'investissement public dans les délais prévus constitue un aléa majeur.

Contrairement au plan britannique, qui, de nature presque exclusivement fiscale, ne pose pas de problème de mise en oeuvre, le plan français pose en effet la question de ses modalités pratiques.

A titre indicatif, le tableau ci-après présente un scénario moins favorable que celui du gouvernement, selon lequel la mesure relative au FCTVA ne se traduirait que marginalement par un investissement supplémentaire de la part des collectivités territoriales, et les investissements publics seraient également répartis entre 2009 et 2010.

Le plan de relance : quelques scénarios

(en milliards d'euros)

Plan tel qu'indiqué par le gouvernement

Total 2009-2010
effectif (commission
des finances)*

Un scénario moins favorable
(commission des finances)

Total affiché

2009

2010

2009

2010

Total*

Dépenses de l'Etat

11,5

9,8

1,6

11,2

6,4

2,6

9,0

« Programme exceptionnel d'investissement public »

4,0

2,7

1,4

4,0

2,0

2,0

4,0

« Soutien exceptionnel à l'activité économique et à l'emploi » (hors FSI)

2,6

2,6

0,0

2,6

2,6

2,6

« Effort exceptionnel en faveur du logement et de la solidarité »

1,9

1,5

0,1

1,6

0,8

0,8

1,6

Paiement des dettes envers les fournisseurs de la Défense

0,5

0,5

0,5

0,5

0,5

FCTVA

2,5

2,5

2,5

0,5**

-0,2

0,3

Recettes de l'Etat

10,5

9,2

-0,5

9,2****

9,2

-0,5

9,2****

Remboursement du crédit d'impôt recherche

3,8

3,8

-1,0

2,8

3,8

-1,0

2,8

Remboursement des crédits d'impôt de retour en arrière des déficits

1,8

1,8

-0,3

1,5

1,8

-0,3

1,5

Mensualisation du remboursement de la TVA

3,6

3,6

3,6

3,6

0,0

3,6

Amortissement exceptionnel

0,7

0,7

0,7

0,0

0,7

0,7

Doublement du PTZ

0,6

0,1

0,6****

0,0

0,1

0,6****

Total Etat

22,0

19,0

1,1

20,4****

15,6

2,1

18,2****

Dépenses des administrations sociales

0,1

0,1

0,0

0,1

0,1

0,0

0,1

Investissement des entreprises publiques***

4,0

4,0*****

-1,4*****

2,6

2,0

2,0

4,0

EDF

2,5

2,5*****

-0,8*****

1,7

1,3

1,3

2,5

GDF Suez

0,2

0,2*****

-0,1*****

0,1

0,1

0,1

0,2

RATP

0,5

0,5*****

-0,2*****

0,3

0,3

0,3

0,5

SNCF

0,3

0,3*****

-0,1*****

0,2

0,2

0,2

0,3

La Poste

0,6

0,6*****

-0,2*****

0,4

0,3

0,3

0,6

TOTAL GENERAL

26,0

23,1

-0,3

23,2****

17,7

4,1

22,3****

En points de PIB

1,3

1,2

0,0

1,2

0,9

0,2

1,1

Estimation de l'impact sur le PIB (en points de PIB) (commission des finances)

0,5

0,1

-

0,3

0,3

-

* Ce total prend en compte le contrecoup en 2010 des mesures fiscales de trésorerie et des anticipations d'investissement des entreprises publiques, et les AE non couvertes. ** On considère ici que si la mesure a bien un coût pour l'Etat, elle suscite peu d'investissement public supplémentaire.*** Répartition figurant dans le dossier de presse de décembre 2008. **** Afin d'évaluer l'impact économique, on prend ici en compte non le seul coût budgétaire du PTZ sur la période (0,1 milliard d'euros en 2010), mais son coût sur la totalité de la durée du prêt (0,6 milliard d'euros). ***** Le gouvernement ne fournit pas de répartition temporelle. On suppose que la totalité de l'anticipation d'investissement a lieu en 2009, et que l'investissement s'en trouve réduit d'un tiers de ce montant chacune des trois années suivantes.

Sources : informations publiées par le gouvernement, calculs de votre commission des finances

Le principal aléa du plan de relance concerne le délai de réalisation des investissements publics.

1. Des investissements qui seraient très concentrés sur 2009

Le gouvernement prévoit de réaliser, en ce qui concerne l'Etat :

- dans le cas du « Programme exceptionnel d'investissement public », 2,7 milliards d'euros d'investissements en 2009, et 1,4 milliard d'euros en 2010 ;

- dans le cas du programme « Effort exceptionnel en faveur du logement et de la solidarité », 1,5 milliard d'euros en 2009 et 0,1 milliard d'euros en 2010.

Par ailleurs, bien que, dans son dossier de presse de janvier 2009, le gouvernement ne précise pas la répartition attendue des 4 milliards d'euros d'investissement des entreprises publiques , l'année concernée semble être 2009. Selon les informations obtenues par votre rapporteur général, tel est en particulier le cas en ce qui concerne EDF , qui, avec 2,5 milliards d'euros, doit fournir plus de la moitié de la contribution des entreprises publiques au plan de relance.

La contribution d'EDF au plan de relance

Selon les informations obtenues par votre rapporteur général, les investissements d'EDF en France devraient passer de 5,8 milliards d'euros en 2008 à 8,3 milliards d'euros en 2009, soit une augmentation de 2,5 milliards d'euros (+ 43 %). EDF consoliderait ainsi sa position de premier investisseur du pays .

Cette augmentation proviendrait de l'accélération d'investissements programmés sur les années suivantes. Un peu moins de la moitié de cet effort concerne le parc de production, un quart les réseaux de transport et de distribution, le reste devant concerner notamment les investissements en Corse, dans les départements et collectivités d'outre-mer ainsi que des investissements spécifiques en matière d'énergies renouvelables.

Cet effort ne devrait pas affecter directement le niveau des tarifs réglementés de vente d'électricité, dont l'avenir est actuellement examiné par une commission présidée par M. Paul Champsaur et qui doit rendre ses conclusions au printemps 2009. Si nécessaire, le groupe EDF devra donc financer ce programme exceptionnel par l'emprunt, conformément à la logique du plan de relance : pour que leur supplément d'investissement soutienne pleinement l'activité économique, il ne faut pas que les entreprises publiques le financent par une augmentation des tarifs.

Votre rapporteur général ne dispose pas d'information particulière en ce qui concerne les investissements d'EDF en 2010. Cependant, si les 2,5 milliards d'euros prévus sont effectivement dépensés en 2009, les investissements devraient logiquement s'en trouver réduits à due concurrence les années suivantes. A défaut, la mesure ne consisterait pas en une anticipation d'investissements.

2. Une répartition égale des investissements publics entre 2009 et 2010 pourrait ramener l'impact sur le PIB à seulement 0,3 point en 2009

Le rythme de consommation des crédits dépendra de paramètres externes à la seule diligence de l'exécutif, tels que, par exemple, la situation du marché automobile pour la consommation des crédits de la « prime à la casse », ou la simplification de certaines règles d'urbanisme et la réactivité des collectivités territoriales, des bailleurs et des promoteurs qui conditionnent la réalisation effective des projets de construction ou de rénovation de logements.

La question des délais est particulièrement importante, dans la mesure où, selon les prévisions actuelles, après avoir été fortement négative au dernier trimestre 2008, la croissance devrait redevenir positive au troisième ou au quatrième trimestre de 2009, comme l'indique le tableau ci-après.

Les prévisions de croissance trimestrielle pour 2008 et 2009

(en %)

Sources : Consensus Forecasts, Insee

A titre illustratif, votre rapporteur général a examiné un scénario moins favorable que celui retenu par le gouvernement, afin d'évaluer ce qui se passerait si ces investissements étaient plus lents que prévu, et s'effectuaient pour moitié en 2010 (ou, ce qui économiquement aurait un effet analogue, qu'en 2009 la réalisation des investissements soit fortement concentrée sur la fin de l'année). Ce scénario suppose par ailleurs que, pour des raisons indiquées ci-après en détails dans le commentaire de l'article 1 er du présent projet de loi de finances rectificative, la mesure relative au FCTVA se traduit par un investissement supplémentaire de seulement 0,5 milliard d'euros de la part des collectivités territoriales.

Dans ce scénario moins favorable, le plan de relance est réduit des 2 milliards d'euros correspondant à 80 % de la mesure FCTVA. En sens inverse, comme les entreprises publiques investissent moins rapidement, leur investissement continue d'être accru en 2010 par le plan de relance, au lieu d'être diminué d'un montant estimé à 1,4 milliard d'euros si la totalité des investissements étaient anticipés en 2009. Ainsi, dans ce scénario, le montant global du plan sur 2009-2010 est de l'ordre de 22 milliards d'euros au lieu de 23 milliards d'euros.

La répartition de l'impact du plan entre 2009 et 2010 serait très différente de celle prévue par le gouvernement, puisque dans ce scénario l'impact sur le PIB serait de l'ordre de 0,3 point en 2009 comme en 2010.

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