Rapport n° 32 (2009-2010) de M. Dominique LECLERC , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 14 octobre 2009

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N° 32

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 14 octobre 2009

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur la proposition de loi présentée par MM. Claude DOMEIZEL, Gérard MIQUEL, Jean-Pierre BEL, Mmes Raymonde LE TEXIER, Annie JARRAUD-VERGNOLLE, Gisèle PRINTZ, Jacqueline ALQUIER, Claire-Lise CAMPION, M. Bernard CAZEAU, Mme Jacqueline CHEVÉ, M. Yves DAUDIGNY, Mme Christiane DEMONTÈS, M. Jean DESESSARD, Mme Samia GHALI, MM. Jacques GILLOT, Jean-Pierre GODEFROY, Claude JEANNEROT, Serge LARCHER, Jacky LE MENN, Mme Michèle SAN VICENTE-BAUDRIN, M. René TEULADE et les membres du groupe socialiste (2) , apparentés (3) et rattachés (4) portant diverses dispositions relatives au financement des régimes d' assurance vieillesse des fonctions publiques hospitalière et territoriale ,

Par M. Dominique LECLERC,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : Mme Muguette Dini , présidente ; Mme Isabelle Debré, M. Gilbert Barbier, Mme Annie David, M. Gérard Dériot, Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, Raymonde Le Texier, Catherine Procaccia, M. Jean-Marie Vanlerenberghe , vice-présidents ; MM. Nicolas About, François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Gisèle Printz, Patricia Schillinger , secrétaires ; M. Alain Vasselle, rapporteur général ; Mmes Jacqueline Alquier, Brigitte Bout, Claire-Lise Campion, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mme Jacqueline Chevé, M. Yves Daudigny, Mme Christiane Demontès, M. Jean Desessard, Mme Sylvie Desmarescaux, M. Guy Fischer, Mme Samia Ghali, MM. Bruno Gilles, Jacques Gillot, Adrien Giraud, Mme Colette Giudicelli, MM. Jean-Pierre Godefroy, Alain Gournac, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, M. Claude Jeannerot, Mme Christiane Kammermann, MM. Marc Laménie, Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Jacky Le Menn, Jean-François Mayet, Alain Milon, Mmes Isabelle Pasquet, Anne-Marie Payet, M. Louis Pinton, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, MM. René Teulade, François Vendasi, René Vestri, André Villiers.

(2) Ce groupe est composé de : Mmes Jacqueline Alquier, Michèle André, MM. Serge Andreoni, Bernard Angels, Alain Anziani, David Assouline, Bertrand Auban, Robert Badinter, Jean-Pierre Bel, Claude Bérit-Débat, Jean Besson, Mme Maryvonne Blondin, M. Yannick Bodin, Mme Nicole Bonnefoy, MM. Yannick Botrel, Didier Boulaud, Martial Bourquin, Mme Bernadette Bourzai, M. Michel Boutant, Mme Nicole Bricq, M. Jean-Pierre Caffet, Mme Claire-Lise Campion, M. Jean-Louis Carrère, Mme Françoise Cartron, M. Bernard Cazeau, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, M. Yves Chastan, Mme Jacqueline Chevé, MM. Gérard Collomb, Pierre-Yves Collombat, Roland Courteau, Yves Daudigny, Yves Dauge, Marc Daunis, Jean-Pierre Demerliat, Mme Christiane Demontès, M. Claude Domeizel, Mme Josette Durrieu, MM. Alain Fauconnier, Jean-Luc Fichet, Jean-Claude Frécon, Bernard Frimat, Charles Gautier, Mme Samia Ghali, MM. Jean-Pierre Godefroy, Jean-Noël Guérini, Didier Guillaume, Claude Haut, Edmond Hervé, Mmes Odette Herviaux, Annie Jarraud-Vergnolle, M. Claude Jeannerot, Mme Bariza Khiari, MM. Yves Krattinger, Philippe Labeyrie, Serge Lagauche, Mme Françoise Laurent-Perrigot, M. Jacky Le Menn, Mmes Claudine Lepage, Raymonde Le Texier, MM. Alain Le Vern, Jean-Jacques Lozach, Roger Madec, Philippe Madrelle, Jacques Mahéas, François Marc, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Pierre Mauroy, Rachel Mazuir, Louis Mermaz, Jean-Pierre Michel, Gérard Miquel, Jean-Jacques Mirassou, Robert Navarro, Mme Renée Nicoux, MM. Jean-Marc Pastor, François Patriat, Daniel Percheron, Jean-Claude Peyronnet, Bernard Piras, Roland Povinelli, Mme Gisèle Printz, MM. Marcel Rainaud, Daniel Raoul, Paul Raoult, François Rebsamen, Daniel Reiner, Thierry Repentin, Roland Ries, Mmes Michèle San Vicente-Baudrin, Patricia Schillinger, MM. Michel Sergent, René-Pierre Signé, Jean-Pierre Sueur, Simon Sutour, Mme Catherine Tasca, MM. Michel Teston, René Teulade, Jean-Marc Todeschini, André Vantomme et Richard Yung.

(3) Apparentés : MM. Jean-Etienne Antoinette, Jacques Berthou, Jacques Gillot, Mme Virginie Klès, MM. Serge Larcher, Claude Lise, Georges Patient et Richard Tuheiava.

(4) Rattachés administrativement : Mmes Marie-Christine Blandin, Alima Boumediene-Thiery, MM. Jean Desessard, Jacques Muller et Mme Dominique Voynet.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

598 rect. bis (2008-2009) et 32 (2009-2010)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Cette proposition de loi, dont le premier signataire est notre collègue Claude Domeizel, président de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), a pour objet de préserver l'équilibre financier de la caisse , à l'heure où celle-ci est confrontée à deux évolutions qui affectent sensiblement et durablement ses comptes.

La première tient aux mutations démographiques en cours depuis une vingtaine d'années. Comme l'ensemble des régimes de retraite, le régime des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers connaît une dégradation continue de son ratio démographique (rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de cotisés) sous l'effet du vieillissement de la population, qui entraîne une progression plus rapide des charges de prestations que des produits de cotisations.

La seconde est liée aux transferts de personnels opérés dans le cadre de la décentralisation . La mise en oeuvre des transferts de compétences aux collectivités territoriales prévus par l'« acte II » de la décentralisation a en effet pour corollaire une intégration massive d'agents de l'Etat dans la fonction publique territoriale. Celle-ci se traduit par un afflux de nouveaux affiliés à la CNRACL qui sont les cotisants d'aujourd'hui, mais aussi les pensionnés de demain.

Ces tendances lourdes ont évidemment donné lieu à des travaux de projection financière, dont les résultats s'avèrent particulièrement inquiétants. Sur la période 2020-2050 , le solde de la caisse ne cesserait de se dégrader , même s'il resterait positif jusque vers 2018-2019. Le déficit atteindrait 1,1 milliard d'euros en 2020 et 11,3 milliards d'euros en 2050 .

Fortement menacé à moyen et long terme, l'équilibre des comptes de la CNRACL l'est aussi à plus brève échéance en raison de l'incidence financière non négligeable de certains dispositifs comme la surcompensation entre régimes spéciaux ou les exonérations de cotisations pour les personnels des centres communaux et intercommunaux d'action sociale (CCAS et CIAS). Aussi, la présente proposition de loi vise d'une part, à neutraliser les effets financiers de ces mesures , d'autre part, à régler la question de la compensation financière des transferts de personnels entre l'Etat et la CNRACL dans le cadre de la deuxième vague de décentralisation.

Consciente de l'équilibre financier précaire de la caisse, votre commission souscrit pleinement à ces objectifs et tient plus particulièrement à apporter son soutien à trois mesures :

- la poursuite de la diminution du taux de recouvrement de la surcompensation afin que le dispositif puisse prendre fin en 2012, conformément à ce que prévoit la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites ;

- le rétablissement du champ d'application initial de l'exonération de la cotisation patronale d'assurance vieillesse sur les rémunérations des aides à domicile employées par les CCAS et CIAS, mesure qui figure à l'article 18 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 ;

- l'instauration d'un dispositif de neutralisation des effets financiers des transferts de personnels entre l'Etat et la CNRACL, mécanisme qui est repris par l'article 27 du projet de loi de finances pour 2010.

I. LA BONNE SANTÉ FINANCIÈRE RETROUVÉE DU RÉGIME

1. Un régime structurellement excédentaire devenu déficitaire

Créée par l'ordonnance n° 45-993 du 17 mai 1945, la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) est devenue l'un des principaux régimes spéciaux de sécurité sociale au sens de l'article L. 711-1 du code de la sécurité sociale. En 2008 , elle assurait, grâce aux cotisations versées par un peu plus de deux millions d'actifs cotisants , le paiement des retraites de 912 193 pensionnés relevant, pour 481 082 d'entre eux, de la fonction publique territoriale et, pour 431 111, de la fonction publique hospitalière.

La montée en charge progressive du régime est intimement liée à l'essor des collectivités locales dans la France d'après-guerre ; le recrutement de fonctionnaires territoriaux se traduisant par un afflux de cotisants à la CNRACL. Cette tendance s'est poursuivie et même accélérée dans les années 1980 avec la première vague de décentralisation. Le régime est donc structurellement caractérisé par un ratio démographique (rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités) plus favorable que la plupart des autres régimes, bien que celui-ci se dégrade depuis une vingtaine d'années sous l'effet du vieillissement de la population (4,5 en 1982 ; 3,62 en 1995 ; 2,7 en 1999 ; 2,21 en 2008). Cette démographie spécifique a permis à la CNRACL de connaître, jusqu'en 1992, des exercices excédentaires et de disposer de réserves.

Paradoxalement, le ratio démographique favorable du régime est aussi à l'origine de ses difficultés financières , caractérisées par un résultat déficitaire à partir de 1992 et l'épuisement de ses réserves à compter de 2000. En effet, en raison de sa composition démographique avantageuse, la CNRACL participe au financement des autres régimes de retraite, via les mécanismes de solidarité interrégimes créés dans les années 1970 (compensation généralisée) et 1980 (surcompensation). Ainsi, au cours de la décennie 1990, un tiers des ressources de la caisse est consacré non pas aux prestations servies aux retraités des fonctions publiques territoriale et hospitalière, mais à l'équilibre financier d'autres régimes. Cette situation a d'abord contraint la CNRACL à consommer ses réserves, puis à avoir recours au dispositif d'avance sur trésorerie autorisé par les lois de financement de la sécurité sociale pour 1998 et 1999, afin d'honorer le paiement des pensions de ses assurés ainsi que les sommes dues au titre des mécanismes de compensation.

2. Un plan de redressement bénéfique pour le régime

La détérioration des comptes du régime a donné lieu, à la fin des années 1990 , à une longue concertation avec les élus locaux dans le cadre d'un groupe de travail, placé sous l'égide du comité des finances locales. Ces travaux ont permis de montrer que les besoins de financement croissants de la caisse résultaient non seulement de la dégradation continue du ratio démographique, mais aussi du niveau particulièrement élevé des transferts de compensation. Aussi, dans ses conclusions, le groupe de travail a-t-il insisté sur la nécessité d'un effort, partagé et équilibré entre l'Etat et les employeurs locaux, pour résoudre les difficultés financières de la caisse.

A l'issue de cette concertation, un « plan de redressement » de la CNRACL a été mis en oeuvre. Celui-ci s'est traduit par l'augmentation progressive du taux de cotisation des employeurs et par la diminution du taux de recouvrement de la surcompensation entre régimes spéciaux selon le calendrier ci-dessous.

Evolution du taux de recouvrement de la surcompensation
et du taux de cotisation employeur à la CNRACL

Taux de recouvrement
de la surcompensation

Taux de cotisation employeur

2002

30 %

26,10 %

2003

27 %

26,50 %

2004

24 %

26,90 %

2005

21 %

27,30 %

2006

18 %

27,30 %

2007

15 %

27,30 %

2008

12 %

27,30 %

Cet effort paritaire de l'Etat et des collectivités locales a porté ses fruits puisque la caisse enregistre, depuis 2003, des résultats positifs . Au 31 décembre 2008 , le compte de résultat du régime était excédentaire et s'établissait à 320 millions d'euros . Dans son rapport d'activité 2008, la CNRACL note que l'amélioration des comptes s'explique notamment par :

- les mesures progressives de relèvement du taux de la contribution employeur qui ont abouti à un taux égal à 27,30 %, stable depuis 2005 ;

- la baisse progressive du taux de la surcompensation spécifique aux régimes spéciaux fixé à 12 % en 2008 et 2009 ;

- l'impact de la réforme des retraites de 2003 en matière de validation de services. En effet, tous les agents recrutés avant le 1 er janvier 2004 avaient jusqu'au 31 décembre 2008 pour valider leurs services de non-titulaire, ce qui a entraîné une augmentation sensible du flux et une ressource supplémentaire pour la CNRACL ;

- l'accroissement du nombre de cotisants en raison de l'intégration de personnels de l'Etat dans la fonction publique territoriale, conséquence de la mise en oeuvre de l'« acte II » de la décentralisation.

Par ailleurs, l'ensemble de ces mesures a permis de consolider les réserves de la CNRACL qui s'élevaient, à la fin 2008 , à 2,1 milliards d'euros après affectation du résultat.

Compte de résultat de la CNRACL de 2004 à 2008

(en millions d'euros)

EMPLOIS

2004

2005

2006

2007

2008

Prestations

9 355,7

9 977,4

10 713,2

11 509,2

12 433,8

n/(n-1)

+ 6,6 %

+ 7,4 %

+ 7,4 %

+ 8,0 %

Compensations

2 857,1

2 601,4

2 449,2

2 453,6

2 453,7

n/(n-1)

- 8,9 %

- 5,9 %

+ 0,2 %

+ 0,0 %

Autres emplois techniques

80,3

106,9

156,2

155,0

137,0

n/(n-1)

+ 33,1 %

+ 46,1 %

- 0,7 %

- 11,6 %

Frais de gestion

80,6

82,3

83,0

83,4

87,5

n/(n-1)

+ 2,2 %

+ 0,9 %

+ 0,4 %

+ 5,0 %

Autres emplois

12,9

9,5

26,3

16,6

26,9

n/(n-1)

- 26,3 %

+ 176,3 %

- 36,8 %

+ 62,1 %

TOTAL emplois

12 386,5

12 777,5

13 427,8

14 217,8

15 138,9

n/(n-1)

+ 3,2 %

+ 5,1 %

+ 5,9 %

+ 6,5 %

RESSOURCES

2004

2005

2006

2007

2008

Cotisations affectées

12 134,4

12 736,8

13 290,5

14 101,5

14 759,8

n/(n-1)

+ 5,0 %

+ 4,3 %

+ 6,1 %

+ 4,7 %

Autres ressources techniques

439,9

461,5

472,6

533,1

624,7

n/(n-1)

+ 4,9 %

+ 2,4 %

+ 12,8 %

+ 17,2 %

Autres ressources

33,7

39,6

33,2

48,0

74,6

n/(n-1)

+ 17,7 %

- 16,3 %

+ 44,7 %

+ 55,4 %

TOTAL ressources

12 607,9

13 237,9

13 796,2

14 682,6

15 459,1

n/(n-1)

+ 5,0 %

+ 4,2 %

+ 6,4 %

+ 5,3 %

Résultat et report à nouveau

2004

2005

2006

2007

2008

Résultat net

221,4

460,5

368,4

464,8

320,2

Report à nouveau

519,9

980,4

1 348,8

1 813,6

2 133,8

Encours de trésorerie

2004

2005

2006

2007

2008

Encours moyen

196,0

177,0

419,0

709,0

1 166,0

En 2009, les charges du régime devraient augmenter de manière significative sous l'effet de la hausse du montant des prestations, elle-même due à une augmentation d'environ 6 % de l'effectif des pensionnés ainsi qu'à la revalorisation des pensions. Malgré le report en 2010 de la baisse du taux de recouvrement de la surcompensation prévu initialement en 2009 , la situation financière de l'institution devrait être à l'équilibre cette année.

II. UN ÉQUILIBRE FINANCIER NÉANMOINS MENACÉ

1. Des projections financières inquiétantes à moyen et long terme

L'amélioration des comptes de la CNRACL depuis le plan de redressement ne doit cependant pas occulter l'évolution contrastée entre les charges de prestations qui augmentent plus rapidement (8 % en 2008) que les produits de cotisations (5 % en 2008). En effet, le choc démographique auquel sont confrontés tous les régimes de retraite influe sensiblement sur les comptes de la caisse. Même si son ratio démographique continue d'être plus favorable que celui de la plupart des autres régimes de retraite (2,21 contre 1,45 dans le régime général, 0,67 à la SNCF, 1 à la RATP), il devrait fortement se dégrader à moyen terme.

Selon les projections du conseil d'orientation des retraites (Cor) présentées dans son cinquième rapport de novembre 2007, les effectifs cotisants de la CNRACL augmenteraient rapidement jusqu'en 2020 , année où ils atteindraient près de 2,1 millions de personnes. Ce dynamisme s'expliquerait notamment par une croissance soutenue de l'emploi dans les collectivités territoriales, déjà observée ces dernières années, et le transfert entre 2006 et 2025 de près de 130 000 personnes provenant de la fonction publique d'Etat dans le cadre de la décentralisation. Entre 2020 et 2050, le nombre de cotisants se stabiliserait . En conséquence, la masse des cotisations augmenterait rapidement jusqu'en 2015 (2,9 % par an en moyenne), puis au rythme du salaire moyen (1,8 % par an).

Sur l'ensemble de la période de projection (2020-2050), la croissance des effectifs de retraités serait particulièrement forte . En effet, la vigueur de l'emploi dans les collectivités territoriales et l'hypothèse d'une poursuite de la forte croissance des effectifs cotisants jusque vers 2020 conduisent à prévoir des flux annuels de retraités beaucoup plus élevés que par le passé. Le nombre de retraités atteindrait ainsi 1,3 million en 2020 puis 2 millions en 2050 , soit 3,5 fois plus qu'en 2003. La masse des pensions progresserait de 3,2 % par an en moyenne sur la période .

Au final, le solde technique 1 ( * ) de la caisse se dégraderait sur toute la période de projection . Il resterait toutefois positif jusque vers 2018-2019 . Le déficit atteindrait 1,1 milliard d'euros en 2020 et 11,3 milliards d'euros en 2050 .

CNRACL - Résultats du scénario de base

Projections du COR 2007

2006

2015

2020

2030

2040

2050

Nombre de cotisants (millions)

1,9

2,1

2,1

2,1

2,1

2,1

Total des cotisations (mds d'euros)

13,2

17,0

18,6

22,2

26,6

31,9

en % de Pib

0,74

0,77

0,77

0,77

0,77

0,77

Nombre de pensionnés de droit direct (millions)

0,7

1,1

1,3

1,7

1,9

2,0

Pension moyenne de droit direct (euros)

14 085

14 152

14 433

15 588

17 503

20 683

Total des pensions (mds d'euros)

10,6

16,3

19,7

27,2

34,9

43,2

en % de Pib

0,59

0,74

0,82

0,95

1,01

1,05

Solde technique (mds d'euros)

2,6

0,7

- 1,1

- 5,0

- 8,3

- 11,3

en % de Pib

0,14

0,03

- 0,05

- 0,17

- 0,24

- 0,27

Rapport démographique

2,5

1,8

1,5

1,2

1,0

1,0

Source : Cor

Il est à préciser que les projections élaborées par le Cor en 2007 reposent sur des hypothèses de taux de chômage (4,5 %) et de progression de la productivité du travail (1,8 % par an) devenues caduques en raison de la crise économique. Les nouvelles projections du Cor, attendues dans les prochaines semaines, devraient donc revoir à la hausse les déficits envisagés initialement.

2. La nécessité de garantir l'équilibre financier du régime

Face à la dégradation inéluctable du ratio démographique du régime, les auteurs de la présente proposition de loi estiment indispensable de garantir l'équilibre financier de la CNRACL . Or, il s'avère que certaines mesures ont une incidence financière non négligeable sur les comptes de la caisse :

- la surcompensation qui, malgré la baisse de son taux de recouvrement depuis le début des années 2000, continue de peser lourdement sur les comptes. En 2008, la charge de compensation spécifique s'élevait ainsi à 0,87 milliard d'euros pour la CNRACL ;

- l' exonération de la cotisation patronale d'assurance vieillesse sur les rémunérations des aides à domicile employées par les centres communaux et intercommunaux d'action sociale (CCAS et CIAS) instaurée en 1999. Celle-ci se traduit par un manque à gagner de l'ordre de trente millions d'euros par an pour la caisse ;

- les transferts de personnels de l'Etat consécutifs aux transferts de compétences aux collectivités territoriales prévus par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

Cette proposition de loi vise donc d'une part, à neutraliser les effets financiers de ces différentes mesures , d'autre part, à clarifier les relations financières entre l'Etat et le régime de retraites des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers dans le cadre de la deuxième vague de décentralisation.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er - (article 9 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites) - Réduction du taux de recouvrement de la surcompensation

Objet : Cet article a pour objet de préciser le calendrier de la baisse progressive du taux de recouvrement de la surcompensation jusqu'à sa disparition prévue en 2012.

I - Le dispositif proposé

Le système d'assurance vieillesse français se caractérise par une multiplicité de régimes structurés en fonction de critères d'appartenance professionnelle. L'ambition affichée en 1945 de créer un régime unique de sécurité sociale a été rapidement battue en brèche par le souhait de préserver l'existence de régimes préexistants (régimes spéciaux du secteur public, régimes complémentaires d'entreprise), de mettre en place un régime complémentaire pour les cadres et de placer hors du nouveau dispositif des professions qui ne souhaitaient pas y participer (travailleurs indépendants).

La généralisation de la sécurité sociale, qui a accompagné une longue période de croissance économique et la diffusion du modèle salarial, n'a pas pour autant mis fin à la diversité des régimes. Dès le milieu des années 1970, il n'était plus question d'unification des régimes de retraite mais d'achèvement de la généralisation de la couverture vieillesse et d'harmonisation des règles entre les régimes. S'est alors imposée la nécessité de mécanismes de compensation financière permettant d'une part, de remédier aux inégalités provenant des déséquilibres démographiques ainsi qu'aux disparités contributives entre les différents régimes de sécurité sociale, d'autre part, de traduire une volonté de solidarité, conforme à la logique du système de protection sociale élaboré après-guerre.

La loi n° 74-1094 du 24 décembre 1974 a instauré une compensation financière dite généralisée entre les régimes de base de la sécurité sociale au titre des risques maladie-maternité, prestations familiales et vieillesse. Cette compensation fonctionne en deux temps :

- entre l'ensemble des régimes de salariés et l'ensemble des régimes de non salariés, elle neutralise les effets purement démographiques résultant des transferts de population d'un secteur à l'autre ;

- pour les régimes de salariés, elle neutralise également les effets résultant des inégalités de capacités contributives entre les différentes catégories de salariés.

Depuis 1985, s'ajoute à cette compensation une compensation supplémentaire, dite surcompensation, spécifique aux régimes spéciaux de retraite (fonctionnaires de l'Etat, CNRACL, mines, marins, SNCF, RATP, EGF, CRPCEN, Banque de France, Seita, CAMR), instituée par la loi de finances pour 1986 n° 85-1403 du 30 décembre 1985. Celle-ci poursuit des objectifs similaires à ceux de la compensation généralisée, à savoir la compensation des disparités démographiques entre les régimes spéciaux et la résorption des inégalités de capacité contributive entre les assurés de ces régimes.

Malgré les intentions louables qui sous-tendent sa création, la surcompensation est, depuis les années 1990, l'objet de nombreuses critiques. Tout d'abord, l'homogénéité présumée des régimes spéciaux, justifiant la mise en place d'un mécanisme spécifique de solidarité, est sujette à caution puisque ni l'assiette de cotisation, ni la qualité des prestations, ni les conditions de financement de ces régimes ne sont homogènes. Ensuite, les règles de calcul de la surcompensation sont elles-mêmes contestables. Par rapport à la compensation généralisée, dont la prestation servant de référence est égale à la prestation moyenne la plus faible des régimes bénéficiaires, la prestation servant au calcul de la surcompensation est beaucoup plus élevée puisqu'il s'agit de la pension moyenne de l'ensemble des régimes participants.

Le cas de la CNRACL est particulièrement révélateur des effets pervers du mécanisme de la surcompensation. Titulaire du meilleur rapport démographique des principaux régimes de retraite, la CNRCAL est le régime de salariés qui contribue le plus aux flux financiers correspondants à cette mesure. Au cours de la décennie 1990, près d'un tiers des ressources de la caisse était ainsi consacré à l'équilibre financier d'autres régimes. Le relèvement continu du taux de recouvrement de la surcompensation (de 22 % à l'origine à 30 % en 1992, puis 38 % en 1993) a largement participé à la dégradation des comptes de la caisse. Alors qu'avant 1992, les excédents courants de la CNRACL suffisaient à couvrir le financement des pensions des assurés et des sommes dues au titre des mécanismes de péréquation, à partir de cette date, la caisse enregistre un déficit croissant et se voit contrainte de consommer ses réserves.

Les transferts au titre de la surcompensation devenant trop importants, plusieurs aménagements au dispositif ont été progressivement mis en oeuvre. La loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 a tout d'abord plafonné, pour chaque exercice comptable, le montant de la compensation entre régimes spéciaux à 25 % du total des prestations servies par chaque régime. Puis, au début des années 2000, le Gouvernement s'est engagé à diminuer le taux de recouvrement de la surcompensation entre régimes spéciaux, le ramenant de 38 % à 34 % au 1 er janvier 2000, puis à 30 % au 1 er janvier 2001.

Le législateur a ensuite saisi l'opportunité que constituait la réforme des retraites de 2003 pour mettre progressivement fin au mécanisme de la surcompensation : l'article 9 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 dispose que la surcompensation prendra définitivement fin au 1 er janvier 2012. Durant cette période de neuf ans, il est prévu que le taux de la surcompensation sera progressivement réduit dans des conditions fixées par décret.

Or, après avoir été abaissé à 12 % en 2008, le taux de recouvrement est resté à ce niveau en 2009. Ce gel de la diminution du taux s'explique par la volonté de ne pas accroître les charges de l'Etat, déjà sous forte contrainte financière. Le mécanisme de la surcompensation entre régimes spéciaux est en effet corrélé à la subvention d'équilibre versée par l'Etat à certains de ces régimes structurellement déficitaires : si le taux de la surcompensation augmente, ces régimes spéciaux nécessitent une subvention d'équilibre de l'Etat moins importante ; à l'inverse, si le taux diminue, leur besoin de financement s'accroît, ce qui contraint l'Etat à augmenter sa subvention.

Afin d'éviter un nouveau gel de la diminution du taux de recouvrement de la surcompensation, le présent article complète l'article 9 de la loi du 21 août 2003, en précisant que, pour les exercices 2010 et 2011, la réduction du taux sera au moins égale à cinq points.

II - Le texte accepté par votre commission en vue de la séance publique

Lors de l'examen du projet de loi portant réforme des retraites en 2003, votre commission s'était félicitée de l'initiative prise par l'Assemblée nationale tendant à prévoir la disparition progressive de la surcompensation entre régimes spéciaux. Elle considérait en effet que ce mécanisme pesait lourdement sur les comptes de la CNRACL et expliquait pour partie la dégradation de la situation financière de la caisse.

Votre commission note avec satisfaction que, conformément à ce que prévoit l'article 9 de la loi du 21 août 2003, le taux de recouvrement de la surcompensation a été continument abaissé entre 2000 et 2008. En revanche, l'interruption de ce mouvement à la baisse en 2009 marque un coup d'arrêt regrettable à cette évolution.

Afin que le dispositif puisse prendre fin en 2012, il est indispensable que la baisse du taux se poursuive en 2010 et 2011. Aussi, votre commission partage le souci des auteurs de la présente proposition de loi tendant à accélérer le calendrier de la diminution progressive du taux. Elle estime toutefois qu' il n'est pas du ressort de la loi de prévoir de combien de points le taux de recouvrement doit être abaissé. Une telle mesure relève du pouvoir réglementaire , comme le précise d'ailleurs l'article 9 de la loi du 21 août 2003. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique s'est ainsi engagé auprès du directeur de la CNRACL à ce que le taux diminue de quatre points par an d'ici 2012 : le taux de recouvrement devrait donc s'établir à 8 % en 2010, 4 % en 2011 et devenir nul en 2012.

En conséquence, et pour permettre le débat en séance publique sur la base du texte initial de la proposition de loi, votre commission n'a pas modifié cet article.

Article 2 - (article 46 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat) - Contribution employeur due par les collectivités territoriales pour les fonctionnaires de l'Etat détachés

Objet : Cet article vise à limiter le taux de la contribution employeur due par les collectivités territoriales pour la couverture des charges de pension des fonctionnaires de l'Etat détachés sans limitation de durée dans ces collectivités.

I - Le dispositif proposé

En application du principe de la double carrière, posé à l'article 45 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat, le détachement est la position du fonctionnaire placé hors de son corps ou cadre d'origine, mais continuant à bénéficier dans ce corps ou dans ce cadre d'emploi de ses droits à l'avancement et à la retraite.

Il résulte de l'article 46 que le fonctionnaire détaché ne peut être affilié au régime de retraite dont relève la fonction de détachement, ni acquérir, à ce titre, des droits quelconques à pensions ou allocations, sous peine de la suspension de la pension de l'Etat. Par conséquent, un fonctionnaire détaché continue de relever des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite.

La collectivité accueillante est, quant à elle, redevable envers l'Etat d'une contribution pour la constitution des droits à pension de l'intéressé. Le taux de cette contribution est le même que celui de la contribution employeur due par l'Etat pour la couverture des charges de pension de ses propres agents. Fixé par voie réglementaire, ce taux était de 39,5 % en 2007 de 50 % en 2008 et de 60,14 % en 2009 en application du décret n° 2008-1534 du 22 décembre 2008.

A cette position de détachement de droit commun s'ajoute une nouvelle position administrative - le détachement sans limitation de durée - créée par l'article 109 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Celle-ci organise de nouveaux transferts de compétences aux collectivités territoriales, notamment dans les domaines des routes, des ports, des aéroports et du fonds de solidarité pour le logement. Cet article 109 prévoit que, dans le délai de deux ans à compter de la date de publication des décrets de transferts définitifs de services, les fonctionnaires de l'Etat affectés dans un service ou une partie de service transférés à une collectivité territoriale ou à un groupement de collectivités, qui seront pendant cette période mis à disposition de la collectivité, peuvent :

- soit opter pour le statut de fonctionnaire territorial, auquel cas ils seront intégrés dans un cadre d'emplois de la fonction publique territoriale ;

- soit choisir de rester dans la fonction publique d'Etat, auquel cas ils seront placés en position de détachement sans limitation de durée.

Dans le cas où l'agent, dans le délai fixé par la loi, n'opte ni pour l'une, ni pour l'autre possibilité, il est automatiquement placé en position de détachement sans limitation de durée.

Cette nouvelle position administrative figure également dans le projet de loi relatif au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l'évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers, dernier transfert de service prévu par les actes I et II de la décentralisation.

Concernant les droits à la retraite, l'agent qui a choisi d'intégrer la fonction publique territoriale est désormais affilié à la CNRACL, en tant que fonctionnaire territorial. Dans ce cas, la collectivité accueillante verse à la caisse une contribution employeur pour la constitution des droits à pension de l'intéressé. Le taux de cette contribution est actuellement de 27,30 %.

En revanche, l'agent qui a décidé de rester dans la fonction publique d'Etat ou qui n'a pas utilisé son droit d'option dans le délai imparti, et qui est donc placé en position de détachement sans limitation de durée, continue de bénéficier de ses droits à la retraite dans son corps d'origine, ainsi que de relever des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite. Dans ce cas, la collectivité d'accueil est tenue de verser, comme pour le détachement de droit commun, une contribution à l'Etat au titre des droits à pension de l'intéressé. Le taux de cette contribution est égal au taux de la cotisation employeur payée par l'Etat pour ses propres agents, à savoir 60,14 % en 2009.

Dans le cadre de l'accueil des agents détachés, l'Etat compense aux collectivités les charges directes et immédiates (rémunérations, charges sociales) résultant de ces transferts. Dans cette compensation est intégrée la contribution payée par la collectivité au taux de l'année de transfert de l'agent considéré. Par exemple, pour un agent ayant été transféré en 2007, la collectivité accueillante verse en 2009 une contribution au taux de 60,14 %. En contrepartie, l'Etat lui compense les charges afférentes au titre de l'année 2007. Dans cette compensation est comprise la contribution versée par la collectivité au taux en vigueur l'année du transfert de l'agent, soit 39,5 % en 2007. Sachant que le taux de la contribution payée par la collectivité pour l'agent détaché augmente chaque année - comme le taux de la cotisation employeur versée par l'Etat pour ses agents -, un écart subsiste entre le taux de l'année n considérée et le taux en vigueur l'année de transfert de l'agent. Autrement dit, la compensation versée par l'Etat ne couvre pas intégralement la contribution payée par la collectivité.

C'est pourquoi, le présent article entend limiter le taux de la contribution payée par les collectivités pour les agents détachés. Pour ce faire, il complète l'article 46 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat en précisant que ce taux ne peut être supérieur à celui fixé pour la contribution employeur versée par les collectivités territoriales à la CNRACL au titre des droits à pension de leurs agents, soit 27,3 % actuellement (taux stable depuis 2005).

II - Le texte accepté par votre commission en vue de la séance publique

Votre commission fait observer que, jusqu'à présent, environ deux tiers des agents transférés (soit un peu plus de 70 000 personnes) ont opté pour l'intégration dans la fonction publique territoriale, tandis qu'un tiers a choisi de rester dans la fonction publique d'Etat et d'être placé en position de détachement sans limitation de durée.

D'après les projections réalisées, les collectivités territoriales seront à terme gagnantes puisque le nombre d'agents intégrant la fonction publique territoriale sera supérieur à celui des agents restant rattachés à la fonction publique d'Etat. L'afflux d'agents territoriaux se traduira par un surcroît de cotisations pour la caisse.

C'est pourquoi, votre commission considère qu' il n'est pas souhaitable de revenir sur les modalités de compensation des agents détachés, au risque de réactiver la polémique sur la question de la compensation des transferts de personnels à laquelle l'article 4, ci-après, tente justement de mettre fin.

Toutefois, afin de permettre la discussion en séance publique du texte initial de la proposition de loi, votre commission n'a pas modifié cet article.

Article 3 - (art. L. 241-10 du code de la sécurité sociale) - Exonération des cotisations patronales d'assurance vieillesse pour les centres communaux et intercommunaux d'action sociale

Objet : Cet article a pour objet d'une part, de préciser le champ d'application de l'exonération des cotisations patronales d'assurance vieillesse sur les rémunérations des aides à domicile employées par les centres communaux et intercommunaux d'action sociale (CCAS et CIAS), d'autre part, de créer une compensation intégrale de cette exonération versée directement par l'Etat à la CNRACL.

I - Le dispositif proposé

La loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 a posé le principe d'une exonération totale de la cotisation patronale d'assurance vieillesse sur les rémunérations des aides à domicile employées, en qualité de titulaire, par un centre communal ou intercommunal d'action sociale (CCAS ou CIAS). Cette mesure, codifiée à l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale, est entrée en vigueur le 1 er janvier 1999.

Une note de la Caisse des dépôts et consignations du 7 octobre 1999 adressée aux CCAS et aux CIAS précise les modalités d'application de l'exonération. Celle-ci porte sur les rémunérations des aides à domicile ayant la qualité d'agent titulaire. Ces fonctionnaires ont pour mission d'accomplir chez les personnes âgées ou handicapées un travail matériel, moral et social contribuant à leur maintien à domicile. Ils accomplissent des travaux d'entretien courant du logement, confectionnent les repas et prodiguent les soins sommaires d'hygiène. En aucun cas, ils ne pratiquent des soins qui exigent la possession de diplômes officiels.

En application du protocole d'accord signé le 25 janvier 2006 entre le Gouvernement et certaines organisations syndicales (« accords Jacob »), l'ensemble des cadres d'emplois de la catégorie C de la fonction publique territoriale, en particulier ceux relevant de la filière médico-sociale, ont été restructurés. Les aides à domicile sont désormais regroupées dans le cadre d'emplois des agents sociaux.

La rémunération de ces agents, quel que soit leur grade (agent social, agent social qualifié de deuxième classe, agent social qualifié de première classe), est exonérée de la cotisation patronale d'assurance vieillesse pour la fraction de leur rémunération versée en contrepartie des tâches effectuées auprès des personnes visées au III de l'article L. 242-10 du code de la sécurité sociale, à savoir :

- les personnes ayant à charge un enfant ouvrant droit au complément d'éducation spéciale mentionnée à l'article L. 541-1 du code de la sécurité sociale ;

- les personnes titulaires de l'allocation compensatrice pour tierce personne, les personnes titulaires d'une majoration pour tierce personne (servie au titre de l'assurance invalidité et de l'assurance vieillesse, de la législation des accidents du travail ou d'un régime spécial de sécurité sociale ou de l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes civiles de la guerre) ;

- les personnes remplissant la condition de dépendance requise pour l'ouverture du droit à la prestation spécifique dépendance (PSD) ;

- les personnes se trouvant dans l'obligation de recourir à l'assistance d'une tierce personne pour accomplir les actes ordinaires de la vie et titulaires ;

- les personnes bénéficiaires de prestations d'aide ménagère aux personnes âgées ou handicapées au titre de l'aide sociale légale, les personnes bénéficiaires de prestations d'aide ménagère aux personnes âgées ou handicapées dans le cadre d'une convention conclue entre les CCAS ou CIAS et un organisme de sécurité sociale.

L'article L. 214-10 n'est applicable qu'aux rémunérations versées à une aide à domicile au titre de son activité au domicile privé d'une personne entrant dans son champ d'application. En conséquence, les rémunérations des agents sociaux employés par un établissement d'accueil pour personnes âgées ou handicapées géré par un CCAS ou CIAS ne peuvent, en aucun cas, être exonérées (à l'exception des logements-foyers, considérés comme le domicile substitutif de la personne dépendante).

A l'origine circonscrit aux rémunérations des seuls aidants à domicile, agents titulaires du cadre d'emplois des agents sociaux, le champ d'application de l'exonération a été progressivement étendu, sous l'effet de la jurisprudence de la Cour de Cassation (arrêt du 11 octobre 2007 « Centre communal d'action social de Roissy-en-Brie »). Celle-ci a en effet interprété les dispositions de l'article L. 214-10 dans un sens extensif en octroyant le bénéfice de cette exonération à tous les agents titulaires des CCAS-CIAS qui, quel que soit leur cadre d'emploi, ont pour activité principale l'aide à domicile.

Cet élargissement du champ d'application de l'exonération s'est traduit par un manque à gagner croissant pour la caisse jusqu'en 2007, comme l'illustre le tableau ci-dessous.

Historique des exonérations de contributions depuis 1999
Situation au 30 avril 2009

(en millions d'euros)

Année

Total des exonérations

Evolution

1999

9,3

2000

11,4

23 %

2001

13,8

21 %

2002

15,9

15 %

2003

17,7

11 %

2004

19,1

8 %

2005

21,5

13 %

2006

26,7

14 %

2007

30,1

13 %

2008
(données provisoires)

28,0

- 7 %

Total

193,5

Source CNRACL

Afin de revenir au champ d'application initial du dispositif, le du présent article modifie l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale en précisant que l'exonération ne s'applique qu'aux rémunérations des fonctionnaires relevant du cadre d'emplois des agents sociaux.

En outre, il est proposé au que l'Etat compense intégralement à la CNRACL cette exonération, au motif que celle-ci se traduit par un manque à gagner de l'ordre de trente millions d'euros par an pour la caisse.

II - La position de votre commission en vue de la séance publique

En ce qui concerne le 1° de cet article , votre commission approuve le rétablissement du champ d'application initial de l'exonération de cotisation patronale , à savoir les rémunérations des agents sociaux titulaires employés par les CCAS et les CIAS. La décision de la Cour de Cassation du 11 octobre 1997, en étendant le bénéfice de l'exonération aux rémunérations de tous les agents titulaires, va en effet à l'encontre de la volonté initiale du législateur. Elle a, par ailleurs, des conséquences non négligeables sur les comptes du régime.

Votre commission constate d'ailleurs que le souci de recentrer le dispositif sur le public initialement visé est partagé par le Gouvernement puisque la mesure est également proposée par l'article 18 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 . Elle y est donc favorable .

En revanche, sur le 2° de cet article qui instaure une compensation intégrale de cette exonération, votre commission considère que cette disposition n'est pas opportune dans le contexte actuel des finances publiques . Elle représenterait en effet une charge supplémentaire pour l'Etat, déjà sous forte contrainte financière.

Toutefois, afin de permettre la discussion en séance publique du dispositif proposé, votre commission n'a pas modifié cet article.

Article 4 - (article 108 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales) - Neutralisation des conséquences financières des transferts de personnels entre la CNRACL et l'État dans le cadre de la décentralisation

Objet : Cet article vise à neutraliser les impacts financiers, tant pour la CNRACL que pour l'Etat, des transferts de personnels opérés dans le cadre de la décentralisation.

I - Le dispositif proposé

La mise en oeuvre des transferts de compétences aux collectivités territoriales prévus par l'« acte II » de la décentralisation a pour corollaire une intégration massive d'agents de l'Etat dans la fonction publique territoriale. Ces personnes relèvent désormais de la CNRACL qui reçoit leurs cotisations et leur versera leurs pensions lorsqu'ils partiront à la retraite.

Depuis le 1 er janvier 2007, 72 200 agents de l'Etat ont ainsi opté pour une intégration dans la fonction publique territoriale. Selon des estimations réalisées en 2008, ce flux représente près de 500 millions d'euros de cotisations annuelles supplémentaires pour la CNRACL. Dans le même temps, le régime a versé environ sept cents pensions pour un montant de 4 milliards d'euros.

Ces transferts de personnels ayant été imposés aux collectivités territoriales, l'article 108 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, modifié par l'article 65 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable, pose le principe d'une compensation financière intégrale des charges assurées pour le compte de l'Etat au profit de la CNRACL au titre de l'intégration des agents transférés. Ainsi, il est prévu qu'une fraction de la TVA visée à l'article 256 du code général des impôts est affectée à la caisse dans des conditions fixées par une loi de finances.

Véritable point d'achoppement entre l'Etat et les collectivités territoriales, la question de la compensation financière des transferts fait l'objet d'analyses divergentes.

D'un côté, la CNRACL considère que ces transferts représentent un coût supplémentaire pour le régime de l'ordre de 13 milliards d'euros. La caisse va en effet devoir verser des pensions pour lesquelles elle n'a pas reçu les cotisations correspondant à l'ensemble des années prises en compte dans le calcul.

De l'autre, l'Etat estime que la CNRACL est gagnante dans cette opération. Selon les estimations de la direction du budget 2 ( * ) , la caisse enregistrerait un solde positif sur les vingt prochaines années grâce à l'arrivée de nouveaux cotisants dans le cadre de la décentralisation. Sur les trente années suivantes, le solde de la caisse s'équilibrerait. Il faut préciser que ces calculs ont été réalisés en considérant que tous les départs en retraite des agents ayant été transférés seront remplacés. Or, rien ne permet d'assurer que les collectivités locales remplaceront tous les agents qui leur ont été affectés dans le cadre de la décentralisation.

Compte tenu de la difficulté à rapprocher ces deux positions, un modus vivendi a été trouvé. Il n'est désormais plus question de compenser les effets financiers des transferts, mais de les neutraliser.

L'objectif poursuivi est triple :

- revenir à un schéma d'« avant décentralisation » dans lequel l'Etat, via le compte d'affectation spéciale Pensions (CAS Pensions) reçoit les cotisations de ces anciens agents (devenus agents territoriaux) et leur verse leurs pensions ;

- permettre que les transferts de personnels soient neutres financièrement pour la CNRACL ;

- rendre le mécanisme le plus transparent possible pour les agents concernés.

Le nouveau mécanisme de neutralisation financière proposé par le présent article fonctionnera comme suit :

- la CNRACL reversera chaque année au CAS Pensions visé à l'article 51 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 portant loi de finances pour 2006 les cotisations perçues pour les fonctionnaires ayant intégré la fonction publique territoriale, au taux de cotisation en vigueur à la CNRACL ;

- le CAS Pensions remboursera à la CNRACL les pensions versées par celle-ci aux nouveaux fonctionnaires territoriaux.

Autrement dit, les personnels transférés resteront à la charge de l'Etat, la CNRACL ayant un simple rôle de gestionnaire (encaissement des cotisations, versement des prestations).

Il est prévu que ce dispositif prenne effet à compter du 1 er janvier qui suit la promulgation de la présente proposition de loi et s'applique pendant toute la période durant laquelle la CNRACL sera amenée à verser des pensions aux agents transférés. Les cotisations reçues par la caisse en 2007, 2008 et 2009 resteraient acquises au régime qui, en contrepartie, conserverait à sa charge les prestations versées.

Par ailleurs, l'article précise que les modalités d'application du dispositif sont renvoyées à une convention qui devra être conclue entre l'Etat et la CNRACL.

II - Le texte accepté par votre commission en vue de la séance publique

Votre commission se félicite qu'une troisième voie, faisant l'objet d'un consensus, ait été trouvée pour rapprocher les positions de la CNRACL et de la direction du budget. Le dispositif de neutralisation proposé permet de mettre fin aux incessantes querelles de chiffres sur le montant de la compensation des transferts de personnels et ainsi, de revenir à une situation d'« avant décentralisation ».

Cette solution de compromis figure d'ailleurs à l'article 27 du projet de loi de finances pour 2010 . La seule différence réside dans le fait que cet article prévoit que les modalités d'application du dispositif seraient renvoyées, non pas à une convention entre l'Etat et la caisse, mais à un décret pris après avis du conseil d'administration de la CNRACL. En effet, seule une mesure réglementaire peut rendre applicable une disposition législative ; en aucun cas une convention.

Votre commission n'a pas modifié cet article.

Article 5 - (art. 575 et 575 A du code général des impôts) - Gage

Objet : Cet article vise à compenser les pertes de recettes éventuelles résultant de l'application de la présente proposition de loi pour l'Etat et les organismes de sécurité sociale.

I - Le dispositif proposé

Les mesures prévues par la présente proposition de loi risquent d'entraîner, dans une proportion que votre commission n'est pas en mesure de chiffrer avec exactitude, des charges nouvelles ou des pertes de recettes :

- pour l'Etat : c'est notamment le cas de la limitation de la contribution employeur due par les collectivités territoriales pour la couverture des charges de pension des fonctionnaires de l'Etat détachés sans limitation de durée et celui de l'instauration d'une compensation intégrale, au bénéfice de la CNRACL, de l'exonération de cotisations patronales d'assurance vieillesse pour les agents sociaux employés par les CCAS et les CCIAS ;

- pour la CNRACL : le nouveau dispositif de neutralisation financière prévu à l'article 4 risque, dans un premier temps, d'être défavorable à la caisse car le montant des cotisations reversées par celle-ci au CAS Pensions sera supérieur à celui des pensions remboursées par ce dernier.

En contrepartie, les dispositions prévues devraient entraîner des économies ou des recettes nouvelles :

- pour la CNRACL : en raison de la réduction puis de l'extinction du taux de la surcompensation, du recentrage du dispositif d'exonération de cotisations patronales d'assurance vieillesse au bénéfice des CCAS et des CCIAS sur les seuls aidants à domicile agents titulaires du cadre d'emplois des agents sociaux, ainsi que de l'instauration d'une compensation intégrale de cette exonération par l'Etat ;

- pour les collectivités territoriales : la limitation du taux de la contribution employeur versée par celles-ci pour couvrir les droits à pension des fonctionnaires de l'Etat détachés sans limitation de durée a précisément pour finalité de ne pas les pénaliser ; les collectivités territoriales n'ont en effet pas choisi d'accueillir ces agents.

En conséquence, le présent article prévoit de gager les pertes de recettes éventuelles, de façon assez traditionnelle, par la création de taxes additionnelles aux droits sur les tabacs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II - Le texte accepté par votre commission en vue de la séance publique

Par cohérence avec la position exprimée sur les articles précédents et laissant au Gouvernement le soin de lever le gage s'il le juge utile, votre commission n'a pas modifié cet article.

Ainsi que l'indique le document exposant la nouvelle procédure législative résultant de la révision constitutionnelle et comme l'ont rappelé les présidents de séance les 26 mars et 30 avril 2009, « conformément à un accord conclu entre les présidents de groupe et de commission et acté par la Conférence des Présidents, les propositions de loi ou de résolution inscrites à l'ordre du jour réservé sont discutées sur la base du texte initial, sauf souhait contraire du groupe politique intéressé ».

En conséquence et conformément aux engagements pris vis-à-vis du premier signataire de la présente proposition de loi, la commission a décidé de ne pas modifier le texte proposé et de l'adopter en l'état afin de laisser le débat s'instaurer en séance publique, tout en maintenant les réserves que lui inspirent plusieurs de ses dispositions.

Source : Les guides pratiques du Sénat - La nouvelle procédure législative, p. 18.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 14 octobre 2009 sous la présidence de Muguette Dini, présidente, la commission a tout d'abord procédé, sur le rapport de Dominique Leclerc , à l'examen des amendements et à l'élaboration du texte qu'elle propose pour la proposition de loi n° 598 rectifié bis (2008-2009), présentée par Claude Domeizel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, portant diverses dispositions relatives au financement des régimes d'assurance vieillesse des fonctions publiques hospitalière et territoriale.

Dominique Leclerc, rapporteur, a rappelé que la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) est l'un des principaux régimes spéciaux de la sécurité sociale. En 2008, elle assurait, grâce aux cotisations versées par un peu plus de deux millions d'actifs cotisants, le paiement des retraites de 900 000 pensionnés, soit 480 000 relevant de la fonction publique territoriale et 420 000 de la fonction publique hospitalière. La proposition de loi vise à préserver l'équilibre financier de la CNRACL, à l'heure où celle-ci est confrontée à deux évolutions qui affectent sensiblement et durablement ses comptes :

- d'une part, les mutations démographiques qui affectent, comme l'ensemble des régimes de retraite, le régime des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers. Le vieillissement de la population provoque une dégradation continue de son ratio cotisants/pensionnés, ce qui entraîne une progression plus rapide des charges de prestations (8 % en 2008) que des produits de cotisations (5 % en 2008) ;

- d'autre part, les transferts de personnels consécutifs à la décentralisation qui se sont traduits par une intégration massive d'agents de l'Etat dans la fonction publique territoriale. Il en résulte un afflux de nouveaux affiliés à la CNRACL qui sont les cotisants d'aujourd'hui, mais aussi les pensionnés de demain.

Les projections financières sont donc particulièrement inquiétantes : le solde de la caisse resterait positif jusque vers 2018-2019, mais ne cesserait de se dégrader sur la période 2020-2050. Le déficit atteindrait ainsi 1,1 milliard d'euros en 2020 et 11,3 milliards d'euros en 2050. Encore s'agit-il d'un minimum car ces prévisions, élaborées par le conseil d'orientation des retraites (Cor) en 2007, reposent sur des hypothèses de taux de chômage (4,5 %) et de progression de la productivité du travail (1,8 % par an) démenties par la crise économique et qu'il faut réévaluer.

Fortement menacé à moyen et long terme, l'équilibre des comptes de la CNRACL l'est aussi à brève échéance par l'incidence financière de certains dispositifs : la surcompensation entre régimes spéciaux et les exonérations de cotisations patronales pour les centres communaux et intercommunaux d'action sociale (CCAS et CIAS). Dans ce contexte, cette proposition de loi poursuit deux objectifs : neutraliser les effets financiers de ces mesures et régler la question de la compensation financière des transferts de personnels.

Dominique Leclerc, rapporteur, a ensuite présenté les mesures proposées par le texte. L'article 1er précise le calendrier de la baisse progressive du taux de recouvrement de la surcompensation jusqu'à sa disparition prévue en 2012. Instaurée en 1985, la compensation spécifique (ou surcompensation) organise des transferts financiers entre régimes spéciaux afin de réduire les conséquences des déséquilibres démographiques qui leur sont propres. L'intention était louable mais le mécanisme a engendré des effets pervers, en particulier pour la CNRACL qui est le régime de salariés qui contribue le plus à la surcompensation en raison de son ratio démographique favorable. Les transferts au titre de la surcompensation devenant trop importants, le législateur a décidé, lors de la réforme des retraites de 2003, d'abaisser chaque année son taux pour y mettre définitivement fin en 2012. Or, après avoir été ramené progressivement de 27 % en 2003 à 12 % en 2008, ce taux n'a plus varié depuis lors. Pour relancer le mouvement à la baisse, il est ici proposé, pour 2010 et 2011, de le réduire d'au moins cinq points.

L'article 2 concerne les agents de l'Etat détachés auprès des collectivités territoriales, dans le cadre des transferts de compétences prévus par la deuxième vague de décentralisation. La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a en effet prévu que les fonctionnaires de l'Etat concernés par ces transferts peuvent :

- soit intégrer la fonction publique territoriale. Dans ce cas, la collectivité accueillante verse une contribution employeur pour la constitution des droits à pension de l'intéressé, dont le taux est actuellement de 27,30 % ;

- soit rester dans la fonction publique d'Etat et être placés en position de détachement. Dans ce cas, la collectivité d'accueil est tenue de verser une contribution à l'Etat au titre des droits à pension de l'agent, dont le taux est de 60,14 % en 2009.

Partant du principe que les collectivités n'ont pas choisi d'accueillir les agents détachés, l'article entend aligner la contribution employeur sur celle versée pour les agents intégrant la fonction publique territoriale.

L'article 3 porte sur le dispositif, créé en 1999, d'exonération des cotisations patronales d'assurance vieillesse sur les rémunérations des aidants à domicile, agents titulaires du cadre d'emplois des agents sociaux, employés par les CCAS et CIAS. Une décision de la Cour de cassation de 2007 a étendu le bénéfice de cette exonération à tous les agents titulaires des CCAS et des CIAS qui, quel que soit leur cadre d'emplois, ont pour activité principale l'aide à domicile. Face à ce manque à gagner croissant pour la CNRACL, cet article propose de rétablir le champ d'application initial de l'exonération. Le souci est d'ailleurs partagé par le Gouvernement, puisque la même mesure figure à l'article 18 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010. L'article 3 propose, en outre, de créer une compensation intégrale de cette exonération versée directement par l'Etat à la CNRACL, au motif que toute exonération doit être compensée.

L'article 4 a pour objet de neutraliser l'impact financier, tant pour la CNRACL que pour l'Etat, des transferts de personnels opérés dans le cadre de la décentralisation. Véritable point d'achoppement entre l'Etat et les collectivités territoriales, la question de la compensation financière des transferts est l'objet d'analyses divergentes :

- d'un côté, la CNRACL considère que ces transferts représentent un coût supplémentaire pour le régime ; la caisse va, en effet, devoir verser des pensions pour lesquelles elle n'a pas reçu les cotisations correspondant à l'ensemble des années prises en compte dans le calcul ;

- de l'autre, l'Etat estime que la CNRACL est gagnante dans cette opération, puisque les deux tiers des agents transférés choisissent d'intégrer la fonction publique territoriale et donc de s'affilier à la caisse.

Compte tenu de la difficulté à rapprocher ces deux positions, un modus vivendi a été trouvé. Il n'est désormais plus question de compenser les effets financiers des transferts, mais de les neutraliser :

- la CNRACL reversera chaque année au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » les cotisations perçues pour les fonctionnaires ayant intégré la fonction publique territoriale ;

- le CAS « Pensions » remboursera à la CNRACL les pensions versées par celle-ci aux nouveaux fonctionnaires territoriaux.

Autrement dit, les personnels transférés resteront à la charge de l'Etat, la CNRACL ayant un simple rôle de gestionnaire (encaissement des cotisations, versement des prestations). Cette solution de compromis est d'ores et déjà inscrite dans l'article 27 du projet de loi de finances pour 2010.

Enfin, l'article 5 prévoit de gager, de façon assez traditionnelle, les pertes de recettes éventuelles résultant des dispositions de la proposition de loi par la création de taxes additionnelles aux droits sur les tabacs.

Afin de prendre la mesure de l'économie générale de la proposition de loi, Dominique Leclerc, rapporteur, a indiqué avoir procédé à l'audition du directeur général et du président de la CNRACL, ainsi qu'à celle de la direction du budget. Ces auditions lui ont permis de se faire une idée plus précise de la situation financière actuelle de la CNRACL et de ses perspectives d'évolution, et d'en retenir, pour l'essentiel, quatre conclusions :

- l'équilibre financier actuel de la caisse est effectivement très précaire. L'effet d'aubaine que constitue, pour la CNRACL, l'arrivée de nouveaux cotisants venant de la fonction publique d'Etat ne doit pas faire oublier que ceux-ci sont ses futurs pensionnés ;

- il est indispensable de poursuivre la diminution du taux de recouvrement de la surcompensation, afin que le dispositif puisse prendre fin en 2012, conformément à ce que prévoit la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites ;

- il y a urgence à rétablir le champ d'application initial de l'exonération de la cotisation patronale d'assurance vieillesse dont bénéficient les CCAS et les CIAS pour éviter qu'elle ne pèse trop sur les comptes de la caisse ;

- il est nécessaire de mettre fin aux incessantes querelles de chiffres sur le montant de la compensation des transferts de personnels entre l'Etat et les collectivités, en instaurant un dispositif de neutralisation de leurs effets financiers.

La présente proposition de loi répond donc à un certain nombre de préoccupations justifiées et qu'il partage. Cependant, elle n'a pas reçu son assentiment sur trois points :

- tout d'abord, l'article 1er, relatif à la diminution du taux de recouvrement de la surcompensation, relève plus du domaine réglementaire que du domaine législatif ;

- ensuite, les collectivités territoriales n'ont pas intérêt à revenir sur les modalités de compensation des agents détachés comme le prévoit l'article 2, au risque de réactiver la polémique sur la question de la compensation des transferts à laquelle l'article 4 tente justement de mettre fin ;

- enfin, à l'article 3, l'instauration d'une compensation intégrale de l'exonération de cotisation patronale au bénéfice des CCAS et des CIAS lui a paru peu opportune dans le contexte actuel des finances publiques. Elle représenterait, en effet, une charge supplémentaire pour l'Etat, déjà sous forte contrainte financière.

Ceci étant, selon un accord conclu entre les présidents de groupe et de commission du Sénat, il est désormais prévu que le texte débattu en séance publique soit celui de la proposition de loi initiale, si tel est le souhait de son auteur. C'est pourquoi, conformément aux engagements pris vis-à-vis de Claude Domeizel, premier signataire de la proposition de loi et président de la CNRACL, Dominique Leclerc, rapporteur, n'a pas présenté d'amendements et a proposé, au stade de la commission, d'adopter la proposition de loi en l'état afin de laisser le débat s'instaurer en séance publique sur le texte dans sa version initiale.

Jacky Le Menn a estimé que l'analyse du rapporteur sur la situation de la CNRACL fait écho aux éléments que la proposition de loi évoque légitimement. Pour autant, il n'a pas partagé les réticences exprimées sur l'article 3 relatif à la compensation de l'exonération de cotisation patronale pour les CCAS et les CIAS car les difficultés financières de l'Etat ne doivent pas occulter celles des collectivités territoriales, notamment dans le contexte actuel de réforme de leur financement.

Saluant la grande expertise de Claude Domeizel sur la question des régimes spéciaux de retraite, Guy Fischer a rappelé l'historique de la surcompensation, dont le taux a considérablement augmenté à certains moments. Les ponctions ainsi opérées sur les comptes de la CNRACL ont d'ailleurs permis aux autres régimes spéciaux d'assurer leur survie. Aujourd'hui, il existe une volonté commune de préserver les équilibres financiers de la caisse et de supprimer la surcompensation, car il est nécessaire de tenir compte à la fois du mouvement de décentralisation et des problèmes de la fiscalité locale. Au final, il s'est déclaré favorable à la proposition de loi en l'état, sans partager les réserves exprimées in fine par le rapporteur.

René Teulade s'est à son tour déclaré en accord avec les remarques générales du rapporteur, tout en souhaitant attirer l'attention sur les incertitudes liées aux projections, quelles qu'elles soient, car les évolutions économiques et démographiques ne peuvent être pleinement anticipées, notamment au-delà de dix ans. Le Cor, dont il est membre, actualisera début 2010 ses prévisions, ce qui doit inciter à la prudence dans ce domaine. Dans le même ordre d'idées, la décentralisation a entraîné d'importants transferts de personnels de l'Etat vers les collectivités territoriales, principalement vers les départements, mais on ne peut pas prévoir l'avenir d'un tel mouvement. Enfin, il a estimé que le problème de la CNRACL se pose également pour d'autres régimes de retraite et que la société doit s'adapter aux nouveaux équilibres démographiques : désormais, le départ en retraite ne signifie plus la fin de toute activité économique ou sociale et les retraités ont même plutôt tendance, notamment par les aides qu'ils apportent à leurs enfants et petits-enfants, et parfois même à leurs propres parents, à y occuper une place centrale.

Catherine Procaccia a estimé contraire à l'esprit de la révision constitutionnelle l'obligation d'examiner en séance publique le texte initial d'une proposition de loi, sans que la commission saisie au fond n'en débatte et n'y apporte d'amendements. Cette situation conduit à s'interroger sur le rôle des commissions dans la nouvelle procédure législative.

Nicolas About a précisé que, selon la nouvelle procédure, c'est le texte adopté par la commission saisie au fond qui vient en débat en séance publique. Dans ces conditions, le débat devient caduc dans le cas où l'examen par la commission aboutit à une suppression pure et simple des articles d'une proposition de loi. C'est pourquoi un accord conclu entre les présidents de groupe et de commission et acté par la Conférence des présidents prévoit que les propositions de loi ou de résolution inscrites à l'ordre du jour réservé sont discutées sur la base du texte initial, ce qui permet de ne pas vider de son sens la notion nouvelle d'ordre du jour réservé aux groupes minoritaires et d'opposition.

Paul Blanc s'est également étonné de cet accord qui, pour les propositions de loi ou de résolution concernées, diminue l'intérêt du passage du texte en commission. Sur le fond, il a regretté que le texte proposé ne traite que le cas de la CNRACL, et pas celui des nombreux autres régimes spéciaux. C'est pourquoi il s'abstiendra sur la présente proposition de loi.

Dominique Leclerc, rapporteur, a tout d'abord confirmé qu'en tant que rapporteur, il n'a pas souhaité présenter d'amendement à ce stade de l'examen du texte pour que le débat puisse pleinement avoir lieu en séance publique. Pour autant, la position qu'il propose à la commission de prendre montre qu'elle joue son rôle en débattant du contenu du texte en discussion. Il a rappelé avoir lui-même signé plusieurs propositions de loi qui n'ont jamais pu, dans la procédure précédente, être inscrites à l'ordre du jour et qui n'ont donc pas donné lieu à examen en commission. La nouvelle façon de procéder présente donc des points positifs.

Sur le fond, les dispositions de deux des quatre articles principaux de la proposition de loi sont d'ores et déjà inscrites, pour l'une, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, pour l'autre, dans le projet de loi de finances, ce qui donne satisfaction aux auteurs de la proposition de loi.

De plus, la loi de 2003 sur la réforme des retraites a posé clairement le principe de la disparition progressive de la surcompensation d'ici 2012, même si le taux n'a pas baissé en 2009. Pour autant, il est nécessaire de bien garder en mémoire que seule la CNRACL a été sollicitée pour contribuer au financement des autres régimes spéciaux tous déficitaires - car elle dispose de réserves. Qui plus est, entre 1995 et 2005, si les effectifs de l'Etat ont progressé de 7 %, ceux de la fonction publique hospitalière ont crû de 21 % et ceux de la fonction publique territoriale de plus de 30 %. Enfin, si on peut comprendre le souhait de la CNRACL d'entendre le Gouvernement et le Parlement confirmer la disparition progressive de la surcompensation, l'article 1er de la proposition de loi relève du domaine réglementaire, plus que du domaine législatif.

En définitive, seul l'article 2 de la proposition de loi, relatif aux modalités de prise en charge des cotisations des agents de l'Etat détachés auprès des collectivités territoriales, peut encore poser un problème.

Ceci étant, la situation démographique des fonctions publiques territoriale et hospitalière reste positive pour les finances de la CNRACL, dont les réserves devraient augmenter encore quelques années. Le rendez-vous sur les retraites sera l'occasion, en 2010, de débattre de l'ensemble de ces sujets.

Muguette Dini, présidente , a rappelé que, conformément à l'accord conclu entre les présidents de groupe et de commission, le rapporteur a proposé d'adopter le texte en l'état, au stade de la commission, afin de laisser le débat s'instaurer en séance publique. Cette situation est effectivement nouvelle car, auparavant, rares étaient les propositions de loi à être inscrites à l'ordre du jour du Sénat.

Interrogée par Alain Milon et Sylvie Desmarescaux sur la procédure d'amendement aux propositions de loi, elle a indiqué que le délai-limite de dépôt des amendements en vue de l'adoption du texte de la commission avait été fixé au lundi 12 octobre à 16 heures et qu'aucun amendement ne lui était parvenu. Tout sénateur peut à nouveau déposer des amendements jusqu'au 23 octobre, en vue de l'examen en séance publique prévu le 29 octobre.

Avec les réserves précédemment exposées, la commission a adopté l'ensemble de la proposition de loi sans modification.

* 1 Solde technique = (total des cotisations + versements du FSV au titre des majorations pour enfants et du chômage) - total des pensions

* 2 La direction du budget applique la méthode dite « des comptes projetés » qui consiste à effectuer une projection de 2007 à 2050 des masses de cotisations et de prestations, en tenant compte des effets de la décentralisation constatés pour les années 2007, 2008 et 2009 et de ceux attendus pour les années suivantes.

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