B. LA RÉGLEMENTATION DU PRIX DU LIVRE PAR LA LOI DE 1981 : UN BILAN TRÈS POSITIF

En effet, le secteur se trouve dans une situation particulière, liée à la réglementation du prix de vente du livre. Historiquement, le secteur a quasiment toujours été régulé dans un objectif de valorisation de la qualité et du conseil, plutôt que de concurrence par les prix. Comme l'a indiqué M. Hervé Gaymard à l'occasion de son audition par votre commission le 16 décembre dernier : « contrairement aux idées reçues, la fixation du prix du livre par l'éditeur a toujours été réglementée, sauf durant l'entre-deux-guerres et de 1978 à 1981. En 1981, tant M. Jacques Chirac que M. François Mitterrand, candidats à l'élection présidentielle, ont pris position en faveur du prix unique, et la loi a été adoptée à l'unanimité. »

Rappelons que cette loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre a instauré en France le principe d'un prix unique de vente du livre, fixé par l'éditeur ou par l'importateur. Les détaillants peuvent pratiquer sur ce prix un rabais maximum de 5 %, quel que soit l'acheteur (à l'exception des bibliothèques et des établissements scolaires) et quelle que soit la période de l'année.

Votée à l'unanimité par le Parlement, cette loi a été renforcée en 2003 à l'occasion de la transposition en droit français de la directive européenne sur le droit de prêt, les rabais consentis aux collectivités ayant notamment été plafonnés.

Toutefois, les évolutions juridiques, technologiques - avec le développement des technologies numériques - et concurrentielles - avec celui de la vente en ligne - ont conduit certains députés à s'interroger sur la pertinence de cette loi aujourd'hui.

Dans ce contexte, un groupe de travail a été constitué au sein du Conseil du livre 2 ( * ) , mis en place en 2008 par Mme Christine Albanel, alors ministre de la culture et de la communication, pour dresser un bilan d'application de la loi, comparer les effets de ce dispositif aux situations particulières des autres pays, notamment au sein de l'Union européenne, et formuler, le cas échéant, des propositions de modernisation et de renforcement du texte et, plus largement, des préconisations visant à améliorer la situation des différents acteurs de la chaîne du livre et à en préserver les grands équilibres.

Le rapport 3 ( * ) du groupe de travail, présenté par notre collègue Hervé Gaymard, conclut à la pertinence, encore aujourd'hui, de la loi de 1981.

L'objectif principal de la loi, qui était de favoriser l'égalité d'accès des citoyens au livre, a été satisfait, en permettant le maintien d'un réseau de diffusion et de distribution des livres diversifié sur l'ensemble du territoire. Outre le maintien de 3 500 librairies indépendantes, la loi a permis la montée en puissance de nouveaux acteurs (grandes surfaces culturelles spécialisées et alimentaires, clubs de livres, ventes par Internet).

Parallèlement, le marché a progressé de 3 % en moyenne par an, le nombre d'exemplaires vendus ayant augmenté de 50 % entre 1986 et 2007.

Votre commission partage les propos de M. Hervé Gaymard, pour qui : « il s'agit d'une loi de développement durable sur les plans :

- culturel, permettant la diversité de l'édition française ;

- économique, favorisant le maintien d'un réseau de librairies supérieur au réseau américain ;

- territorial, compte tenu des enjeux en termes d'aménagement du territoire et de diffusion de la culture pour le plus grand nombre. »

LA RÉPARTITION DES VENTES DE LIVRES PAR LIEU D'ACHAT
EN VALEUR (2007)

Librairies (tous réseaux confondus)

24,4 %

Librairies (grandes librairies et libraires spécialisées)

17,7 %

Grands magasins

0,3 %

Maisons de la presse, librairies-papeteries

6,4 %

Grandes surfaces culturelles spécialisées

21,2 %

Grandes surfaces non spécialisées (dont hypermarchés)

21,4 %

Ventes par internet

7,9 %

VPC et clubs (hors internet)

16,3 %

Courtage

0,4 %

Soldeur / Occasion

1,4 %

Autres (comités d'entreprise, kiosques, gares, salons...)

7,0 %

Sources : TNS-Sofres et rapport de M. Hervé Gaymard précité.

Comme l'indique le rapport précité, la loi sur le prix du livre a soutenu « la vitalité et la diversité de l'édition, avec la création de nouvelles entreprises innovantes et réactives, indispensables au paysage éditorial français et le développement d'une offre de livres large et diversifiée . »

Enfin, il est important de souligner qu'elle n'a pas eu d'effet inflationniste et que le livre a moins augmenté sur le long terme que d'autres biens et services. En effet, le prix du livre n'a augmenté que de 11 % en 11 ans (entre 1998 et 2009).

Il s'agit d'une véritable chaîne de valeur, à laquelle participent tous les acteurs de la filière. Précisons que le prix public d'un livre se répartit ainsi qu'illustré ci-après.

* 2 Le Conseil du livre, directement rattaché au ministre de la culture et de la communication, est un organe interprofessionnel et interministériel chargé de débattre des grands sujets transversaux et de mutualiser les études et les expérimentations.

* 3 Rapport remis à Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication, le 10 mars 2009, sur la « Situation du livre : évaluation de la loi relative au prix du livre et questions prospectives », à la suite de la mission confiée à M. Hervé Gaymard par le Conseil du Livre, mis en place par la ministre le 30 juin 2008, dans le cadre d'un groupe de travail dont votre collègue Serge Lagauche et votre rapporteur sont membres.

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