C. L'ABSENCE PRÉJUDICIABLE DE RÉGLEMENTATION EUROPÉENNE

1. Une jurisprudence abondante mais une législation inexistante

Le droit communautaire applicable aux jeux d'argent et de hasard, et a fortiori aux jeux en ligne, est réduit et majoritairement jurisprudentiel . Les jeux d'argent ont ainsi été exclus du champ de la directive du 8 juin 2000 sur le commerce électronique et de la directive du 12 décembre 2006 sur les services dans le marché intérieur (dite « directive services »), bien que la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) ait qualifié cette activité de prestation de services . A défaut de texte spécifique, c'est donc le Traité instituant la Communauté européenne qui régit directement le secteur, en particulier ses articles 43, relatif à la liberté d'établissement, et 49, relatif à la libre prestation de services .

Le secteur est donc de facto soumis à la libre appréciation de la Commission européenne, gardienne des traités, et aux précisions apportées par la jurisprudence de la CJCE. Il en est longtemps résulté une certaine insécurité juridique pour les Etats membres et une grande hétérogénéité des régimes nationaux applicables , que la montée en puissance de l'offre transfrontalière sur Internet a rendues de plus en plus préjudiciable à la protection des joueurs.

De ce point de vue, on peut distinguer sommairement deux types de régulations nationales dans l'Union européenne :

- les Etats et territoires, tels Malte et Gibraltar, qui ont « parié » sur une reconnaissance mutuelle des agréments à moyen terme et ont donc privilégié l'attractivité de leur réglementation juridique et fiscale ;

- ceux qui ont privilégié la protection du consommateur domestique - par exemple l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, la France ou l'Italie - et appliquent donc une réglementation plus stricte, le cas échéant par un monopole public d'exploitation.

Les Etats qui ont privilégié le monopole public, en particulier la France, se sont appuyés sur les restrictions admises par l'article 46 du Traité CE à la libre-prestation de services, éclairées par la jurisprudence de la CJCE, en particulier dans ses arrêts Schindler du 24 mars 1994, Zenatti du 21 octobre 1999, Gambelli du 6 novembre 2003, Placanica du 6 mars 2007, et récemment Santa Casa du 8 septembre 2009.

Les restrictions imposées par les Etats membres, et le cas échéant les monopoles, doivent être justifiées par des « motifs impérieux d'intérêt général », parmi lesquels peuvent figurer la protection des consommateurs, la prévention de la fraude et de l'incitation des citoyens à une dépense excessive liée au jeu, et la prévention de troubles à l'ordre social en général. En outre, ces limitations ne sont admises que si elles respectent des principes communautaires de non-discrimination, de nécessité, de proportionnalité et de cohérence .

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