III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : AMÉLIORER LE TEXTE POUR MIEUX PROTÉGER LES ENTREPRENEURS

La recherche de simplicité qui préside à la définition des formalités que doivent remplir les entrepreneurs individuels pour constituer le patrimoine d'affectation ne doit pas conduire à remettre en cause la sécurité juridique. Là encore, l'impératif de protection doit guider le législateur.

A. MAINTENIR LA DÉCLARATION D'INSAISISSABILITÉ

Le projet de loi propose de supprimer pour l'avenir le dispositif de la déclaration d'insaisissabilité, dès lors que serait pleinement accessible le statut de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée. En d'autres termes, pour un entrepreneur qui souhaiterait bénéficier d'une protection supplémentaire de son patrimoine, il serait contraint de faire le choix du statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée.

L'étude d'impact annexée au projet de loi affirme que ce dispositif n'a pas rencontré le succès escompté, s'appuyant paradoxalement sur des chiffres qui démentent apparemment, au moins pour partie, cette affirmation. Seraient approximativement recensées 12 000 déclarations de 2003 à 2009, dont 10 000 pour la seule année 2009, ce qui signifie que le rythme est passé de quelques centaines par an à 10 000 la dernière année. Sous réserve de l'exhaustivité des chiffres avancés, avec une telle accélération, sans doute due à la crise économique, on peut affirmer que l'insaisissabilité commence enfin à rencontrer le succès. Sa suppression, au motif qu'elle n'intéresserait pas les entrepreneurs, perd largement de sa pertinence.

En outre, par pragmatisme, le législateur doit veiller à donner aux entrepreneurs la liberté de choisir eux-mêmes la forme de protection ou la forme d'exercice professionnel qui leur convient le mieux. Votre commission est donc très attachée au maintien de la déclaration d'insaisissabilité.

De même, votre commission a écarté pour l'avenir la suppression de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, alors même que le projet de loi semble y inviter : il s'agit là encore d'un outil à la disposition des entrepreneurs pour servir de cadre juridique à leur activité professionnelle, offrant des protections et des avantages particuliers 27 ( * ) , quant bien même son régime sert de modèle au statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée, comme en atteste le tableau comparatif figurant dans l'étude d'impact annexée au projet de loi 28 ( * ) : le statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée fait en quelque sorte délibérément de la concurrence à l'entreprise unipersonnelle.

Quant au cumul du statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée et de l'insaisissabilité 29 ( * ) , il doit être laissé à la libre appréciation de l'entrepreneur, car il donnerait encore un niveau supplémentaire de protection. En tout état de cause, seule la résidence principale, en partie, pourrait être concernée par les deux dispositifs, dans le respect des règles d'affectation, lesquelles peuvent conduire l'entrepreneur à affecter une partie de sa résidence principale.

Ainsi, une partie de la résidence principale déclarée insaisissable peut être affectée au patrimoine professionnel ou, à l'inverse, une partie de la résidence principale affectée au patrimoine professionnel peut être déclarée insaisissable. Dans pareils cas, en vertu de l'article L. 526-1, la déclaration d'insaisissabilité est opposable aux créanciers professionnels dont les droits sont nés postérieurement à sa publication. Il s'agirait d'une dérogation à la règle selon laquelle le patrimoine affecté constitue le gage des créanciers professionnels. Il existerait par conséquent plusieurs catégories de créanciers professionnels.²

* 27 L'entreprise unipersonnelle a régulièrement fait l'objet de simplifications (suppression du capital minimal de la société à responsabilité limitée en 2003, statuts-types en 2005...). Dernière simplification en date, l'article 8 de la loi n° 2009-1255 du 19 octobre 2009 tendant à favoriser l'accès au crédit des petites et moyennes entreprises et à améliorer le fonctionnement des marchés financiers dispense dans certaines conditions d'établir le rapport de gestion (article L. 232-1 du code de commerce).

* 28 Au demeurant, cette forme de société répond à l'exigence de la directive n° 89/667/CEE du 21 décembre 1989 en matière de droit des sociétés concernant les sociétés à responsabilité limitée à un seul associé. La directive prévoit toutefois qu'un Etat membre peut ne pas mettre en place la société unipersonnelle à responsabilité limitée lorsque sa législation autorise, avec des garanties équivalentes, le patrimoine d'affectation.

* 29 Un tel cumul des deux dispositifs s'apparenterait à la formule de l'entreprise personnelle à responsabilité limitée préconisée par le rapport Champaud en 1978.

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