b) Un plan en apparence également réparti entre recettes et dépenses

Selon le Gouvernement, l'effort de 17,4 milliards d'euros se répartirait entre 8,4 milliards d'euros pour les recettes et 9 milliards d'euros pour les dépenses, ce qui lui permet d'afficher un effort portant essentiellement sur les dépenses.

Il parvient à ce résultat symbolique en considérant que le raccourcissement de la phase transitoire de la réforme des retraites est une pure mesure de dépenses, alors qu'il aura également un impact sur les recettes.

Dans le cas de l'année 2012 , il repose aux trois quarts sur les recettes. Les 7 milliards d'euros prévus pour 2012 devraient en effet porter, selon le Gouvernement, pour 5,2 milliards d'euros sur les recettes et seulement 1,8 milliard d'euros sur les dépenses. En 2013, l'effort porterait encore à 60 % sur les recettes.

La proportion s'inverse ensuite. Cependant, les montants en cause sont moins importants (1,9 milliard d'euros d'effort supplémentaire en moyenne de 2014 à 2016, contre 7 milliards en 2012 et 4,6 milliards en 2013). En outre, aucun élément tangible ne documente la manière dont les économies de dépenses seront obtenues.

c) Le vrai montant du plan d'ici 2016 : 11,4 milliards d'euros, si l'on retire les annonces non documentées en matière de dépenses

Les informations actuellement disponibles conduisent à s'interroger sur le véritable montant du plan , qui à ce stade semble de l'ordre de 11,4 milliards d'euros , et non 17,4 milliards d'euros.

En effet, il ressort du dossier de presse que sur les 11,7 milliards d'euros de mesures annoncés, seuls 11,4 milliards ont un véhicule juridique plus ou moins clairement identifié, comme le montre le tableau ci-après (encore indicatif à ce stade), élaboré à partir du tableau précédent.

La répartition du plan du 7 novembre entre ses véhicules juridiques :
quelques montants indicatifs

(en milliards d'euros)

Impact sur le solde de 2016

PLFR décembre 2011

5,8

Amendements au PLF 2012 (?)

3,1

PLFRSS 2012 (et mesures réglementaires sur la sécurité sociale)*

2,5

Dispositions sur les dépenses purement programmatiques à ce stade**

6,0

Total

17,4

* Y compris la réduction de l'ONDAM 2012 de 2,8 % à 2,5 % (0,5 milliard d'euros par an), non explicitement indiquée par le dossier de presse comme relevant du PLFRSS.

** La révision à la baisse des dépenses de l'Etat et de l'ONDAM ne devrait pas correspondre à des mesures précises au-delà de 2012.

Source : commission des finances, d'après le dossier de presse du Gouvernement

Le principal texte concerné serait la loi de finances rectificative de fin d'année (5,8 milliards d'euros). Dans le cas de la sécurité sociale, le prochain projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2012, qui doit être examiné en conseil des ministres le 26 novembre, contribuerait pour seulement 2,5 milliards d'euros. Diverses dispositions fiscales 62 ( * ) , pour un montant de 3,1 milliards d'euros, devraient logiquement relever d'amendements au projet de loi de finances pour 2012.

Surtout, on observe que 6 milliards d'euros de mesures sur les dépenses (soit le tiers des 17,4 milliards d'euros annoncés) correspondent à des mesures qui, selon les informations disponibles, seraient purement déclaratoires .

Ces 6 milliards d'euros représentent la quasi-totalité des 7,2 milliards d'euros d'« économies supplémentaires sur l'Etat et l'assurance maladie » figurant dans le dossier de presse, et qui, si l'on s'appuie sur le texte du dossier de presse, peuvent être décomposés entre Etat et sécurité sociale conformément au tableau ci-après.

Le plan du 7 novembre 2011 : décomposition des 7,2 milliards d'euros d'économies supplémentaires sur l'Etat et l'assurance maladie

(en milliards d'euros)

En écart par rapport à l'absence de mesure

En mesures nouvelles*

Véhicule juridique

2012

2013

2016

2012

2013

Moyenne 2014-2016

Dont Etat**

0,5

1,5

4,5

0,5

1,0

1,0

Amendements au PLF 2012 ( ?) ***

Dont assurance maladie**

0,7

1,2

2,7

0,7

0,5

0,5

PLFRSS 2012 ( ?) et mesures réglementaires ***

Total

1,2

2,7

7,2

1,2

1,5

1,5

* Calculs de la commission des finances. La présentation en mesures nouvelle indique l'évolution du montant de la mesure par rapport à l'année précédente. Dans un souci de simplification, on retient ici le terme dans le cas de mesures relatives aux dépenses, bien que l'expression soit habituellement réservée à celles relatives aux seules recettes.

** Répartition entre Etat et assurance maladie réalisée par la commission des finances à partir des éléments figurant dans le texte du dossier de presse.

*** Pour les années postérieures à 2012, les montants seraient essentiellement programmatiques.

Source : commission des finances, d'après le dossier de presse du 7 novembre 2011

Les économies relatives à l'année 2012, de 1,2 milliard d'euros, sont clairement identifiées dans le texte. Dans le cas de l'Etat, « 0,5 milliard d'euros supplémentaires seront économisés en 2012 sur le Budget de l'Etat ». Dans celui de la sécurité sociale, « 0,7 milliard d'euros supplémentaires seront également économisés en 2012 au titre de la maîtrise des dépenses de Sécurité Sociale », dont 0,5 milliard pour l'ONDAM 63 ( * ) . Dans le premier cas, il conviendra de modifier en ce sens le projet de loi de finances pour 2012. Dans le second, l'ONDAM devrait être modifié par le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale devant prochainement être déposé par le Gouvernement.

En revanche, pour les années suivantes les économies ne sont pas précisées . Dans le cas de l'Etat, le dossier de presse indique seulement qu'« à partir de 2013, les dépenses de l'Etat diminueront en valeur d'un milliard d'euros par an » ; dans celui de la sécurité sociale, que l'effort consistant à retenir en 2012 un ONDAM de 2,5 % au lieu de 2,8 %, correspondant à une économie de 0,5 milliard d'euros par an 64 ( * ) , « sera poursuivi jusqu'en 2016 ». Les sommes en jeu sont de 6 milliards d'euros 65 ( * ) de 2012 à 2016 .

Ces déclarations n'ont en elles-mêmes pas davantage de contenu que toutes les programmations qui se sont succédé jusqu'à présent .

Surtout, il résulte de ce qui précède que la communication du Gouvernement, selon laquelle le plan porte principalement sur les dépenses, est cosmétique.

L'argumentation selon laquelle le plan commence par un effort sur les recettes avant que les mesures de dépenses ne prennent le relai est un artifice destiné à masquer le fait que seul l'effort en dépense de 2012 - qui représente 1,2 milliards d'euros sur les 7,2 annoncés sur la période - est vraiment documenté.

Dès 2013, le Gouvernement nous demande de nous contenter d'un espoir - celui d'un ONDAM à 2,5 % respecté sur toute la période - et de l'engagement de durcir la norme de dépense de l'Etat. Mais un tel engagement, pris par une majorité sortante à six mois de l'élection présidentielle, peut-il être jugé crédible s'il ne s'accompagne pas de la présentation des modalités de sa mise en oeuvre ?


* 62 Rabot, suppression du « Scellier » fin 2012, rabot et recentrage des prêts à taux zéro sur le neuf, réduction de 20 % du crédit d'impôt développement durable (CIDD).

* 63 « La progression de l'ONDAM 2012, initialement fixée à 2,8 % dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2012, sera ramenée à 2,5%, ce qui représente 500 millions d'euros d'économies supplémentaires. Cet effort sera poursuivi jusqu'en 2016. Par ailleurs, un effort d'économies supplémentaire de 120 millions d'euros sur les dépenses de gestion des caisses de Sécurité Sociale et de 100 millions d'euros sur les fonds de la protection sociale sera réalisé en 2012. »

* 64 L'objectif de 2,8 % prévu par les textes actuels concerne chaque année de 2012 à 2015.

* 65 4 milliards d'euros pour l'Etat et 2 milliards d'euros pour la sécurité sociale.

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