c) La confiance dans la signature française s'effrite

A l'heure où votre rapporteur spécial élaborait le présent rapport, l'écart de financement des titres français à dix ans avec les titres allemands de même maturité atteignait des records, à 170 points de base 12 ( * ) . Si la France se finance encore à des conditions de taux qui peuvent être jugées bonnes, ce creusement du spread témoigne de la détérioration relative de la confiance des marchés à l'égard de notre signature .

Le spread franco-allemand est influencé par des facteurs financiers divers. Lorsque le niveau de stress et de volatilité des marchés financiers augmente, ce qui a été le cas récemment notamment en raison de l'émergence de doutes sur la cohésion de la zone euro, les investisseurs réagissent en se reportant en priorité vers les titres allemands car ces derniers sont légèrement plus liquides , ce qui tend à accroître l'écart de taux avec l'Allemagne. L'écart de taux est également influencé par la qualité relative de crédit de la France et de l'Allemagne, qui dépend des niveaux des déficits publics. Or, même s'il s'est réduit en 2010 (de 4,3 à 2,8 points de PIB), la France présente encore un écart de déficit public sensible avec l'Allemagne, de même qu'avec les Pays-Bas, également notés AAA.

A ce stade, et en dépit des informations envoyées « par erreur » par l'agence Standard & Poor's à certain de ses abonnés sur la dégradation de la note française 13 ( * ) , les trois principales agences de notation ont jusqu'à présent confirmé la notation AAA avec une perspective stable de la France . Moody's a néanmoins indiqué qu'elle était susceptible de revoir la perspective de la notation de la France dans les prochains mois 14 ( * ) .

Bien qu'il n'existe pas de modèle évaluant l'impact instantané de la perte du AAA, les conditions de financement de la Belgique peuvent éventuellement servir de référence. Ce pays est noté AA+, soit un cran en dessous de la France, et se finance aujourd'hui à environ 120 points de base au-dessus de notre pays. Si la France se finançait aux taux de la Belgique, en tenant compte du profil d'émissions des titres français, cela représenterait un surcoût sur la charge d'intérêts de l'ordre de 2,5 milliards d'euros par an la première année, et de 14 milliards d'euros en charge annuelle au bout de sept ans.

Le maintien de la notation AAA de la France à moyen terme apparaît donc crucial et dépendra de l'atteinte par l'Etat de ses objectifs de réduction des déficits et d'amélioration de la trajectoire de ses finances publiques 15 ( * ) et de la normalisation de la situation en Europe , qui engendre des risques pour la France du fait de l'exposition de son secteur bancaire à la situation de nombreux pays de la zone euro.


* 12 Récemment, l'annonce de l'agence de notation Moody's indiquant qu'elle était susceptible de revoir la perspective stable de la notation française à l'aune des développements futurs sur les finances publiques et les engagements hors bilan de l'Etat, ainsi que les incertitudes quant à l'issue des tensions sur le marché des dettes souveraines en zone euro, a exercé une forte pression haussière sur le différentiel de taux franco-allemand. Après être repassé sous la barre des 100 points de base, à la suite des conclusions du Conseil européen du 26 octobre, le différentiel s'inscrit de nouveau à la hausse.

* 13 Le 10 novembre 2011, l'agence a annoncé à certains de ces abonnés que la note de la France était abaissée. Cette annonce était liée, selon l'agence, à une erreur technique. Le Gouvernement a sollicité de l'Autorité des marchés financiers une enquête à ce sujet.

* 14 Cette annonce ne constitue pas une nouvelle notation.

* 15 Selon l'AFT, « les décisions récentes annoncées par le gouvernement afin d'atteindre les objectifs de déficit en 2012 et 2013 ont été bien reçues par les économistes de marché ».

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