N° 213

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2011-2012

Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 décembre 2011

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur la proposition de loi tendant à améliorer l' information du marché financier en matière de franchissements de seuils en droit boursier ,

Par Mme Nicole BRICQ,

Sénatrice,

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Marini , président ; M. François Marc, Mmes Michèle André, Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, Aymeri de Montesquiou, Roland du Luart , vice-présidents ; M. Philippe Dallier, Mme Frédérique Espagnac, MM. Claude Haut, François Trucy , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Jean Arthuis, Claude Belot, Michel Berson, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Joël Bourdin, Christian Bourquin, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Pierre Caffet, Serge Dassault, Vincent Delahaye, Francis Delattre, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, Jean-Paul Emorine, André Ferrand, François Fortassin, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Jean Germain, Charles Guené, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Yves Krattinger, Dominique de Legge, Marc Massion, Georges Patient, François Patriat, Jean-Vincent Placé, Jean-Marc Todeschini, Richard Yung.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

695 (2010-2011)

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Lors de son audition devant la commission des finances, le 16 juin 2011, Jean-Pierre Jouyet, président de l'Autorité des marchés financiers, estimait que « nous ne pouvons pas rester avec des dispositions qui ne sont pas dignes d'une grande démocratie financière. Pour que le marché fonctionne bien il faut que toute influence significative qui s'exerce sur une société cotée apparaisse clairement. C'est l'intérêt des actionnaires, celui de la société mais aussi des intervenants que d'avoir des règles du jeu qui, peu importe les instruments utilisés, soient parfaitement claires ».

De fait, en octobre 2010, le groupe LVMH révélait une brusque et importante montée au capital de la société Hermès International par le biais d'instruments financiers complexes qui lui avaient permis, les mois précédents, d'échapper - légalement - à ses obligations en matière de déclarations de franchissements de seuils.

La présente proposition de loi, déposée en juin dernier par notre collègue Philippe Marini, tend précisément à faire évoluer la législation sur les déclarations de franchissements de seuils en vue de mettre un terme à ce type d'abus.

Lors de l'examen de la proposition de loi relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives, dite « Warsmann IV », notre collègue député Etienne Blanc, rapporteur, a fait adopter par la commission des lois de l'Assemblée nationale un article additionnel reprenant la substance de la présente proposition de loi (devenu l'article 21 bis ).

Compte tenu de l'importance du sujet pour le bon fonctionnement des marchés financiers, votre commission des finances a décidé d'examiner la présente proposition de loi au fond, tout en se saisissant pour avis de l'article 21 bis de la proposition de loi « Warsmann IV ».

Les analysées exposées dans le présent rapport se rapportent donc également à l'article 21 bis de la proposition de loi « Warsmann IV ».

I. LE RÉGIME DES FRANCHISSEMENTS DE SEUILS VISE À ÉVITER LES PRISES DE CONTRÔLE RAMPANTES

A. UN OBJECTIF D'INFORMATION ET DE TRANSPARENCE

En octobre 2008, le rapport de Bernard Field sur les déclarations de franchissement de seuil 1 ( * ) rappelait que « la préservation des droits des actionnaires d'une société cotée ne peut s'accommoder de la dissimulation des intérêts économiques et des objectifs réels d'un investisseur dès lors que celui-ci détient directement ou indirectement une fraction significative du capital ou des droits de vote ».

Le régime des franchissements de seuils est donc une obligation d'information imposée aux personnes physiques ou morales qui détiennent des actions de sociétés cotées. Ainsi, dès lors qu'elles possèdent une certaine quantité d'actions (il existe onze seuils, cf. infra ), elles doivent en informer l'émetteur et l'Autorité des marchés financiers (AMF), cette dernière étant chargée de rendre l'information publique.

La réglementation sur les franchissements de seuils répond à « un double objectif. D'un côté, elle vise à protéger les actionnaires en les tenant informés des variations du capital et des droits de vote . Ainsi, ils peuvent savoir qui détient, ou envisage de détenir le contrôle de la société , et ils peuvent prendre des décisions d'investissement plus éclairées . Cette dimension était surtout présente à l'origine de la réglementation. D'un autre côté, la réglementation vise également à permettre aux dirigeants des sociétés cotées de mieux connaître les évolutions de leur actionnariat et d'anticiper ainsi une éventuelle offre publique d'acquisition hostile . Elle est donc aussi, dans une certaine mesure, un mécanisme d'alerte anti-OPA » 2 ( * ) .

En France, les prémisses de cette réglementation sont à rechercher dans la loi n° 66-357 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales. Mais, il faut attendre la directive 88/627/CEE du Conseil du 12 décembre 1988 concernant les informations à publier lors de l'acquisition et de la cession d'une participation importante dans une société cotée en bourse pour assister à une harmonisation des règles applicables dans l'Union européenne.

Ces dispositions sont aujourd'hui reprises au sein de la directive dite « Transparence » 3 ( * ) . Celle-ci est toutefois d' harmonisation minimale et les législations nationales peuvent prévoir des règles plus contraignantes. A ce titre, les articles L. 233-7, L. 233-9 et L. 233-14 du code de commerce et le Règlement général de l'AMF (RGAMF) précisent les règles applicables en droit français.


* 1 Groupe de travail de l'AMF présidé par Bernard Field, Rapport sur les déclarations de franchissement de seuil de participation et les déclarations d'intention , octobre 2008.

* 2 Pierre-Henri Conac, Les franchissements de seuil , Dalloz, mars 2011.

* 3 Directive 2004/109/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 2004 sur l'harmonisation des obligations de transparence concernant l'information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé et modifiant la directive 2001/34/CE.

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