B. ... AUJOURD'HUI À LA CROISÉE DES CHEMINS

1. Le retrait programmé des troupes de la coalition
a) Le retrait des forces françaises combattantes dès fin 2012
(1) Un engagement du Président de la République

Conformément à l'engagement pris devant les Français par le Président de la République, les forces françaises combattantes se retireront d'Afghanistan avant la fin de l'année 2012.

Actuellement, 3 400 militaires français sont engagés, pour des missions de sécurisation et d'appui à l'armée afghane, de formation en école et sur le terrain, et de soutien.

Conformément aux annonces lors du Sommet de l'OTAN à Chicago, les 20 et 21 mai 2012, il a été décidé :

- un départ des forces combattantes d'ici la fin de l'année 2012 ;

- le maintien d'une présence militaire en 2013 afin de permettre la manoeuvre logistique de retrait des matériels français, en toute sécurité ;

- la poursuite de la mission de formation des forces afghanes dans le cadre de la FIAS jusqu'en 2014.

Dans le cadre du processus de transition et des engagements de la France au sein de la force de l'OTAN et vis-à-vis des Afghans, les armées vont procéder, d'ici la fin de l'année 2012, au retrait des dispositifs conduisant des missions de combat, soit environ 2 000 militaires :

- dans le cadre de la transition de la Surobi puis de la Kapisa, désengagement de la brigade La Fayette et des conseillers insérés au sein de l'armée afghane ;

- fin du désengagement du détachement d'avions de combat déployé à Kandahar, déjà réduit fin 2011.

A la fin de l'année 2012, 2 000 militaires français auront été désengagés. Le désengagement de leurs matériels et équipements prendra plus de temps et s'étalera sur 2013.

Après le désengagement de la brigade La Fayette et du détachement aérien de Kandahar, il restera au sein de la FIAS en Afghanistan environ 1 400 militaires français, ceux qui oeuvrent directement au profit de la coalition et ceux qui opèrent sur le désengagement logistique français et sa protection. Les éléments logistiques et de protection seront désengagés dès le courant de l'année 2013, au fur et à mesure des avancées de la manoeuvre logistique.

Le dispositif français qui sera directement engagé au profit de la FIAS, aux côtés des Afghans, jusqu'à la fin 2014, comptera environ  400 militaires :

- des militaires français insérés dans les états-majors de la coalition (une centaine) ;

- les militaires qui arment l'hôpital militaire à Kaboul qui fournit un soutien santé au profit de la coalition et des Afghans (une centaine) ;

- le dispositif français de formation des militaires afghans qui poursuit sa mission jusqu'au transfert de la responsabilité des écoles militaires aux Afghans (environ 150 militaires).

Par ailleurs, environ un millier de militaires seront directement engagés dans la mission de désengagement logistique , répartis entre :

- le bataillon logistique qui assure le retrait et le retour des matériels des forces françaises (il reste plus de 900 véhicules dont 500 blindés, des hélicoptères, près de 1 400 conteneurs) ;

- les éléments de protection qui assurent la sécurité du dispositif français restant, avec des éléments terrestres et un détachement hélicoptère qui sera adapté au nouveau format.

D'après les informations recueillies par votre rapporteur, le dispositif de protection stricto sensu devrait comprendre environ  300 hommes destinés à renforcer la compagnie de garde actuelle de l'emprise de WAREHOUSE pour être en mesure d'assurer exclusivement la protection des troupes françaises (insérés, formateurs, agents civils) et de participer aux escortes du bataillon logistique.

Votre commission attirera l'attention du gouvernement sur la priorité absolue qui doit être la sienne de préserver la sécurité de nos soldats : la sécurité doit primer sur le calendrier.

Actuellement, les forces française en Afghanistan disposent encore de 900 véhicules dont environ 500 blindés, 14 hélicoptères (4 Tigre, 5 Gazelle, 3 Caracal, 2 Cougar) ; 2 avions de transport militaire C160 et près de 1 400 conteneurs . Depuis la fin de l'année 2011 et les premiers désengagements de soldats français, environ 200 véhicules et 100 conteneurs ont déjà été retirés.

Les deux voies principales de sortie actuellement utilisées sont :

- la voie aérienne directe depuis la métropole (la plus coûteuse) ; pour mémoire, le rapport du coût entre un transit strictement aérien et un transit strictement terrestre est de 4 pour 1 ;

- la voie multimodale (maritime et aérienne) via les Émirats Arabes Unis.

Le rapatriement du matériel excédentaire par ces voies a été achevé début juin 2012 et a permis de renvoyer en métropole de l'ordre de  250 véhicules et 200 containers.

Pour les autres matériels, une réflexion a été engagée pour étudier leur rapatriement à un moindre coût. Toutes les capacités (aériennes, terrestres et maritimes) et tous les itinéraires ont été envisagés afin de tisser un réseau de voies le plus dense possible, gage de liberté d'action. Plusieurs pistes sont privilégiées :

- une voie Sud par le Pakistan . Solution multimodale (voie routière et maritime). Longtemps fermée, cette option, économiquement très intéressante, serait de nouveau ouverte ;

- une solution multimodale par le Kazakhstan , par gros porteurs affrétés, puis transit par voie ferrée via le Kazakhstan et la Russie vers l'Europe. Cette option nécessiterait une extension de l'accord bilatéral de transit avec le Kazakhstan ;

- une solution terrestre (voie routière et voie ferrée) par l'Ouzbékistan ou le Kazakhstan et la Russie vers l'Europe. Cette option nécessiterait de négocier des accords de transit avec l'Ouzbékistan.

Le gouvernement a récemment nommé l'Ambassadeur Stanislas de LABOULAYE pour le suivi des accords de transit.

Estimation du coût de rapatriement d'un containeur par les différentes routes

Voies principalement aériennes :

- Voie aérienne directe Afghanistan-France : 33 à 58 000€

- Voie multimodale par les Émirats arabes unis : 21 à 30 000€

- Voie multimodale par le Kazakhstan : 11 à 16 000€

Voies principalement terrestres :

- Par le Nord : la voie Kazakhe : (aérienne puis ferrée) 11 à 16 000 € ; la voie Ouzbèke : 7 À 8 000 €

- Par le Sud : voie routière jusqu'à Karachi (Pakistan) puis voie maritime : 5 000 €.

(2) Le maintien de capacités de soutien et de formation

En 2001, l'armée afghane n'existait pas. La coalition a soutenu les ministères afghans de la défense et de l'intérieur pour la mise sur pied des forces de sécurité afghanes. L'objectif est d'atteindre 352 000 hommes fin 2012 avec 195 000 soldats (ANA) et 157 000 policiers (ANP).

La France est engagée depuis 2002 dans la montée en puissance des forces de sécurité afghanes :

- en école , plus de 150 militaires participent à la mission EPIDOTE pour former des militaires afghans dans les écoles de formation des officiers, et les écoles de formations spécialisées (blindés, renseignement, logistique...). Plus de 25 000 militaires afghans ont été formés par les militaires français depuis 2002.

- sur le terrain , environ 170 militaires français arment des équipes de conseillers, (OMLT), qui sont insérées dans les bataillons ( kandaks ) de la 3 e brigade du 201 e corps de l'armée afghane, partenaire de la brigade française La Fayette en Kapisa et Surobi.

Les équipes de conseillers militaires français, au terme de leur engagement fin 2012, auront conduit 2 brigades afghanes à l'autonomie : la 1 re brigade du 201 e corps qui a été conseillée par les militaires français de 2006 à 2009, et celle conseillée aujourd'hui.

D'après les récentes annonces gouvernementales, la France gardera, après le retrait de ses forces combattantes, la responsabilité de l'hôpital militaire de Kaboul, qui fait un travail exceptionnel. Le travail de formation, y compris de cadres militaires (gendarmerie, école...) sera poursuivi jusqu'à fin 2014. Et la France va assurer à partir du 1 er octobre 2012 la responsabilité de l'aéroport international de Kaboul .

b) Retour sur 11 ans d'engagement de nos forces armées
(1) Une double mission : lutter contre le terrorisme, promouvoir le développement

Comme l'a rappelé récemment le Président François Hollande, l'engagement des forces françaises en Afghanistan a répondu à une double finalité : lutter contre le terrorisme et promouvoir le développement.

« Notre armée s'est engagée sur le sol afghan il y a onze ans, en 2001, au lendemain des attentats qui ont cruellement frappé les Etats-Unis d'Amérique. Au nom de ces valeurs et dans le cadre de la légalité internationale, elle a combattu et contenu le terrorisme ; elle a évité que l'Afghanistan n'en devienne le sanctuaire.

« Grâce aux femmes et aux hommes qui la servent, grâce à leur patience, à leur persévérance, grâce à leur performance, notre armée a permis, associée aux forces de la coalition internationale, à l'Afghanistan de se relever et de se remettre en marche. »

(2) Un engagement opérationnel intense aux résultats reconnus, dans le cadre de la coalition

Le dispositif militaire français engagé dans le cadre des opérations en Afghanistan opérait sur le territoire afghan, mais aussi depuis Douchanbé (avions de transport) et la mer d'Oman (ravitaillement).

Opérationnelle depuis le 1 er novembre 2009, la task force La Fayette constituait l'une des cinq brigades ( Brigade Combat Team ) du Commandement régional Est de la FIAS. Elle avait pour zone d'opération le district de Surobi et la province de Kapisa à l'est et au nord-est de Kaboul.

Déployée principalement sur quatre bases ou postes avancés , elle conduisait des missions de sécurisation et de contrôle de zone, des opérations au profit de la population, ainsi que des opérations conjointes avec les forces de sécurité afghanes conseillées par des militaires français.

Comme vient de le déclarer récemment 5 ( * ) le ministre de la défense, M. Jean-Yves le Drian, « Les Français peuvent être fiers du travail réalisé pendant onze ans par notre armée . Les objectifs que s'était fixés la coalition sont atteints. L'Afghanistan n'est plus un État terroriste. Al-Qaïda a vu son pouvoir profondément affaibli, et ses chefs et ses infrastructures, comme Ben Laden, éliminés. C'est un État avec un président et une armée constituée. Qu'il y ait encore des problèmes internes de pacification, c'est évident, mais nous ne sommes plus dans la même logique. ».

Plus précisément, le dispositif français s'articulait autour de 3 composantes (terrestre, aérienne et formation).

- La brigade La Fayette ( Task Force La Fayette )

Créée le 1 er novembre 2009, elle regroupait les moyens français dans une zone de responsabilité composée de la province de Kapisa et du district de Surobi . De niveau brigade, elle était placée sous les ordres du commandement régional Est (1 ère division d'infanterie américaine) et comprenait : 2 bataillons interarmes, 1 bataillon d'hélicoptères, des appuis feux et renseignement.

Sa création s'inscrivait dans la dynamique engagée depuis 2008 avec en particulier la volonté de concentrer nos efforts dans une logique d'approche globale.

La TF LF coordonnait son action, depuis septembre 2010, avec celle du pôle stabilisation, installé à Nihjrab et subordonné à l'ambassade de France, et en charge l'action civile de la France en Kapisa / Surobi. L'approche globale se traduisait également par l'afghanisation : appuyer les forces de sécurité afghanes au travers d'un partenariat étroit à l'aide d'équipes de conseillers auprès des unités militaires et de la police.

- Le dispositif aérien

Il comprenait :

- une composante de transport tactique avec 2 C160 Transall sur l'aéroport de Douchanbé, au Tadjikistan ;

- une composante de ravitaillement en vol avec un C135 sur la base aérienne 104 d'Al Dhafra aux Emirats Arabes Unis.

- et une composante d'avions de chasse, qui a quitté le territoire afghan le 8 juillet dernier.

- La formation des forces de sécurité afghanes (ANSF)

La France participe à la formation des forces armées depuis 2002 par le détachement Epidote , composé de 126 militaires des trois armées. Les efforts français se focalisent sur l'enseignement militaire supérieur des officiers, la formation au renseignement et à la contre-ingérence et celle, plus spécialisée, des bataillons blindés afghans.

La France participe à la formation de la police afghane, sous mandat de la force de gendarmerie européenne, au sein de l'école du Wardak, au sud-ouest de Kaboul.

- Le soutien du dispositif français

L'ensemble du dispositif français bénéficie du soutien administratif et logistique de l'échelon national. Il dispose à cet effet d'un état-major, d'un bataillon de ravitaillement et de logistique et d'un hôpital militaire situé sur l'aéroport de Kaboul.

- Les insérés dans les états-majors de l'OTAN

La France est présente dans l'ensemble des grands états-majors déployés par la coalition en Afghanistan.

(3) Des coûts croissants

L'intervention en Afghanistan a, tout d'abord, des coûts financiers .

Élevés dès l'origine en raison de l'éloignement de ce théâtre d'opérations, ils n'ont cessé de croître du fait de l'attribution de matériels de plus en plus modernes (équipement « Félin »...) et de la nécessité du maintien en condition opérationnelle dans un environnement physique particulièrement éprouvant.

En 2009 puis en 2010, le théâtre afghan a constitué l'effort principal des forces armées françaises , tant sur le plan des effectifs que des moyens engagés. Mobilisant, en 2010, 44 % des effectifs consacrés aux opérations, il a représenté 56 % du surcoût des opérations extérieures.

En 2011, les surcoûts ont connu une nouvelle hausse pour atteindre 518 millions d'euros, sous l'effet de :

- l'augmentation du coût de transport stratégique ;

- la mise en place d'équipements individuels destinés à améliorer la protection du combattant et d'effets vestimentaires mieux adaptés aux spécificités climatiques de cette zone.

En 2012, le montant prévisionnel du surcoût OPEX lié à l'Afghanistan s'élève à 481 millions d'euros.

Notre engagement a aussi eu des coûts en termes d'opinion publique , dans la mesure où les pertes de vies humaines étaient de moins en moins acceptées, au fur et à mesure que croissait la « fatigue » des opérations .

Comme le soulignait, de retour de mission il y a tout juste un an, le précédent président de notre commission : « La question fondamentale qui se pose est de savoir si, comme nous l'avons connu en Algérie, la victoire militaire que revendique le commandement ne s'accompagne pas d'une défaite politique. En d'autres termes, un colonel de l'armée américaine, Dan Williams, résumait la guerre en Afghanistan en disant : « victoires tactiques, impasse stratégique ». La difficulté de la stratégie de contre-insurrection, (...) serait l'incapacité de trouver une autorité afghane crédible pour occuper l'espace créé par les succès tactiques de la FIAS. ».

De ce point de vue, l'action française en Surobi et Kapisa constituerait plutôt un contre-exemple , puisque des autorités locales, police, justice, ont pu être implantées, et les axes sécurisés, tandis que des actions de développement (électrification, eau...) étaient entreprises grâce à l'action combinée de trois acteurs : le pôle de stabilité français, les actions civilo-militaires (CIMIC) et les projets mis en oeuvre par la Provincial reconstruction team (PRT) américaine.

87 militaires français ont été tués en Afghanistan, et 700 ont été blessés depuis le début de l'intervention occidentale en 2001 , dont 9 au premier semestre 2012, parmi les plus de 2.700 morts de la force internationale. Ils ont payé de leur vie la défense, sur le territoire afghan, de nos valeurs. La France se place au 4 e rang par les pertes subies en Afghanistan.

Votre commission s'associe à l'hommage solennel que la Nation tout entière leur a rendu , par la voix du Président François Hollande, à l'Hôtel National des Invalides le 14 juin dernier :

« Le métier des armes n'est pas un métier comme les autres. Il est fait du sens du devoir, de l'amour de la Patrie, de l'esprit de sacrifice. Il appelle de la discipline et du courage. Il comporte l'acceptation du risque.

« La France doit à son armée une part éminente de sa grandeur, de son indépendance, de son rayonnement dans le monde aussi.

« Elle lui doit d'être restée la France, une Nation libre, et de pouvoir défendre l'idée qu'elle se fait de la dignité de l'Homme.

« Elle lui doit de pouvoir veiller sur son idéal.

« Tel était l'engagement de ces hommes.

« Ils sont morts pour des valeurs justes et hautes.

« Celle de la paix.

« Celle de la liberté.

« Celle de la démocratie.

« Celle de la souveraineté des peuples.

« Celles de la France. »

c) Le calendrier du retrait des forces de l'OTAN
(1) Le principe d'un transfert de responsabilité aux Afghans

L'alliance atlantique a adopté au Sommet de Bucarest (2-4 avril 2008) une stratégie qui reflète la commune détermination des alliés à rester engagés dans la durée, en inscrivant l'effort militaire dans le cadre d'une politique globale d'aide à la reconstruction , avec la perspective claire d'un transfert progressif des responsabilités aux Afghans.

Dans le prolongement des conférences de Londres (28 janvier 2010) et de Kaboul (20 juillet 2010), le Sommet de l'OTAN, à Lisbonne les 19 et 20 novembre 2010, a annoncé le lancement, au premier semestre 2011, du processus de transition vers un plein exercice des responsabilités par les autorités afghanes. L'objectif est de transférer progressivement à ces dernières, en cinq tranches, le commandement des opérations de sécurité dans tout le pays d'ici la fin 2014. Deux tranches de transfert ont déjà été engagées ; elles couvrent des villes, districts et provinces représentant la moitié de la population afghane. Avec la mise en oeuvre de la troisième tranche annoncée le 13 mai 2012, les trois-quarts de la population seront couverts par le processus de transition.

Rappel du calendrier de retrait des forces de l'OTAN :

Tranche 1 - lancée en février 2011 - 21 % de la population

Tranche 2 - lancée en novembre 2011 - 27 % de la population (total 48 %)

Tranche 3 - lancée en mai 2012 - 28 % de la population (total 76 %)

Tranche 4 - planifiée en novembre 2012.

Tranche 5 - planifiée en mai 2013 - T4+T5 24 % de la population. (total 100 %)

Le sommet de l'OTAN de Chicago (20 et 21 mai 2012) a arrêté les principales orientations relatives au rôle de l'OTAN en Afghanistan après 2014. La présence de l'OTAN après la transition ne consistera plus dans une mission de combat, mais dans un dispositif de formation des forces afghanes de sécurité.

(2) La question du financement des forces de sécurité afghanes après le retrait

En 2001, l'armée afghane n'existait pas. La coalition a soutenu les ministères afghans de la défense et de l'intérieur pour la mise sur pied des forces de sécurité afghanes. L'objectif est fixé à 352 000 hommes fin 2012 avec 195 000 soldats (objectif réalisé) et 157 000 forces de police.

La communauté internationale s'est engagée lors de la Conférence de Bonn en décembre 2011 à contribuer au financement de l'armée et de la police afghanes. Ce financement sera assuré majoritairement par les États-Unis, qui devraient y contribuer à hauteur de plus de la moitié , et l'État afghan pour 500 millions d'euros , le reste étant à répartir entre les autres pays contributeurs.

À ce jour, une somme totale de 2,3 milliards de dollars serait demandée par les États-Unis, dont environ 1,6 milliards aux pays membres de la FIAS et 750 millions aux contributeurs non membres de la FIAS.

A l'occasion du sommet de Chicago, les engagements financiers suivants ont été pris pour le soutien des forces de sécurité afghanes pour l'après 2014, notamment en matière de formation :

CONTRIBUTIONS ANNONCÉES AU SOMMET DE CHICAGO

Pays

Demandes initiales

Contributions annoncées (par an)
2015-2017

Albanie

0,5 M$

Allemagne

250M$

150 M € (195M$)

Arabie saoudite

200M$

Autriche

10M$

6M€

Australie

100M$ australien

Azerbaïdjan

1M€

Belgique

15M$

12M€ (15M$)

Bosnie

0,65 M$

Bulgarie

Contribution financière sans précision

Canada

125M$

110M$

Chine

10M$

Corée du Sud

50M$

100M$

Croatie

0,5 M$

Danemark

50M$

20 M$

EAU

100M$

Espagne

30M$

contribution non tranchée mais demande jugée raisonnable

Estonie

0,5 M$

Finlande

20M$

6M€ (8M$)

France

200M$

Contribution financière sans précision

Géorgie

Contribution financière sans précision

Hongrie

0,5 M$

Inde

2M$

Irlande

0,39 M$

Italie

200M$

120M€/148 M$

Japon

250M$

130M$

Kazakhstan

Koweït

50M$

Lettonie

0,5M$

Lituanie

0,5M$

Luxembourg

4M$

5M$

Macédoine

Contribution financière sans précision

Monténégro

0,39 M$

Norvège

75M$

25 M$

Nouvelle Zélande

Entre 5 et 2 M$

2M$

Pakistan

10M$

5M$

Pays-Bas

50M$

38 M$

Pologne

20M$

République Tchèque

1M$

Russie

10M$

200M$ (en nature)

Slovaquie

5 M € sur 10 ans

Suisse

20M$

Suède

40M$

Turkménistan

Turquie

100M$

20 M$

UE

200M$

UK

200M$

110M$

La France n'a pas fait connaître le montant de sa contribution.

2. Quel futur pour l'Afghanistan : éviter le scénario du pire

Tous ceux qui, comme votre rapporteur, se sont rendus sur le terrain auprès de nos soldats ou à Kaboul pour des entretiens avec les responsables politiques le savent : la tâche sera ardue pour installer définitivement la paix et enclencher durablement le développement.

Certains analystes redoutent que l'État afghan ne connaisse un affaiblissement de ses institutions suite au départ de la coalition. Dans les visions les plus pessimistes, celles-ci ne fonctionneraient plus que pour servir une élite, au point de ne plus contrôler que certaines villes et axes commerciaux dans le pays, tandis que toutes les zones éloignées, inintéressantes pour le pouvoir central, seraient abandonnées à des baronnies locales, au fur et à mesure que les forces de sécurité s'en retireraient par manque de moyens voire de personnels loyaux.

Il faut dire que l'insurrection est particulièrement réactive et diverse. Après l'éviction d'Al Qaïda de ses sanctuaires afghans en 2002, une image un peu simpliste d'armée de « coureurs de collines » a longtemps prévalu, face une coalition disposant d'une supériorité matérielle et quantitative incontestable. Cette vision réductrice a quasiment perduré jusqu'en 2008, où la communauté internationale et les opinions publiques ont pris la mesure du contrôle de l'insurrection sur certaines populations locales. Parallèlement était élaborée la nouvelle stratégie replaçant ces mêmes populations au coeur de l'action, avec en particulier la prise en compte du rôle de la gouvernance démocratique et du développement économique.

Le principal moteur de cette prise de conscience est la remarquable réactivité des insurgés qui s'avèrent capables d'évolutions tactiques très rapides, leurs permettant de garder le plus souvent l'initiative :


• généralisation de l'emploi des engins explosifs improvisés , dont la sophistication impose des contraintes fortes sur les déplacements des forces de la coalition ;


• recours systématique aux tirs indirects, qui déplace l'insécurité dans les zones de stationnement de la coalition ;


• augmentation considérable des actions-suicides (individuelles ou sur véhicule) qui mettent en lumière la détermination sans faille des combattants ;


• multiplication des agents ou sympathisants infiltrés dans les rangs des forces armées afghanes ;


• et depuis peu, mise en oeuvre d'attaques complexes qui combinent ces tactiques et font l'objet d'une médiatisation massive au travers de sites Internet amis.

Cette grande réactivité reflète aussi la diversité des acteurs de l'insurrection :


• reliquat d'Al Qaïda , réduit à un rôle d'autorité "morale" et moins actif en Afghanistan, y compris avant l'élimination de Ben Laden ;


• le mouvement taleb , fédéré et coordonné par les Shuras de Quetta et Peshawar, disposant sans doute d'appuis pakistanais, mais dont les racines locales restent fortes. Elles engendrent des rivalités entre chefs locaux mais aussi des tactiques locales parfois très différentes ;


• le réseau Haqqani , fortement enraciné dans l'Est et dont les chefs seraient réfugiés au Pakistan, et qui a pris progressivement la place d'Al Qaïda comme principal et irréductible adversaire de la coalition et des forces armées afghanes ;


• enfin le mouvement islamique ouzbek dont le champ d'action quitte le Nord pour s'étendre vers l'Est.

Certains estiment que les insurgés gagnent du terrain et que l'insécurité va croissant sur les voies de communication, dont l'axe Kaboul-Kandahar. Sur l'axe Kaboul-Khost, une légère amélioration n'a pas permis la reprise des travaux de réhabilitation interrompus l'année dernière ; dans le Nord, la circulation, si elle s'est améliorée sur l'axe Kaboul-Kunduz, est par contre devenue difficile sur les routes interprovinciales. Enfin, la route circulaire, stratégique entre toutes, serait devenue dangereuse voire impraticable pour les convois sur certaines portions, dans le Nord-ouest, dans certains districts de l'est (Hérat) et même dans des provinces jusqu'alors peu touchées comme celle de Nimroz.

Faut-il s'attendre à ce qu'au départ des forces internationales, les zones rurales soient à nouveau contrôlées par la rébellion, tandis que le pouvoir ne contrôlerait plus que les villes ?

L'évolution de la situation politique intérieure afghane et du rapport de forces dans les années à venir est également source d'incertitudes. Qu'adviendra-t-il dans le contexte d'une insurrection de plus en plus forte et de tentations autoritaires de la part du pouvoir central, et en l'absence d'émergence d'une opposition articulée ? La transition ne risque-t-elle pas de déboucher sur la dislocation de l'État et le glissement progressif du pays vers une nouvelle guerre civile ? D'autres s'inquiètent de possibles rivalités voire affrontements interethniques à l'issue de la phase de transition.

Depuis l'annonce du retrait programmé des forces militaires, les actes de violence ont redoublé, cherchant à atteindre le chef de l'État (assassinat du frère du Président, le 12 juillet 2011), ou le processus de réconciliation nationale (assassinat du président Rabbani en septembre 2011), à décrédibiliser les forces de sécurité afghanes (attaque contre l'ambassade des États-Unis et le quartier général de l'OTAN). D'autres attentats tentent d'opposer les communautés chiites et sunnites , ce qui n'a jamais eu lieu dans l'histoire de l'Afghanistan (attentats de Kaboul et Mazar-E-Sharif le 6 décembre 2011).

Ainsi par exemple, s'exprimant dans les colonnes du journal Le Monde le 4 juillet dernier, l'ambassadeur russe à Kaboul estimait que « Tout le monde est d'accord pour dire que l'armée et la police afghanes ne sont pas, aujourd'hui, capables de remplacer les forces internationales. » Sur le plan économique, d'après lui, « des milliards de dollars ont été déversés, mais ils ont disparu dans la corruption et la chaîne des sous-traitants » et « pas un seul gros projet industriel, pas un seul gros projet agricole n'a vu le jour pendant cette décennie » .

C'est naturellement la montée en puissance des forces de sécurité afghanes qui constitue la réponse à ces interrogations.

D'ailleurs, lors de la conférence de Tokyo, le 8 juillet dernier, le ministre français des affaires étrangères Laurent Fabius déclarait, en présence du Président Karzaï : « Aujourd'hui, déjà, l'armée afghane est en mesure d'assurer la sécurité de près des trois quarts de la population ».

La seule voie possible pour démentir ce scénario du pire est celle du développement économique. Elle ne pourra émerger sans le maintien de l'aide internationale, à laquelle la France doit prendre toute sa part.

La meilleure lutte contre l'insécurité n'est-elle pas le développement économique ?

La meilleure lutte contre l'obscurantisme n'est-il pas l'alphabétisation ?

Le rempart le plus efficace contre l'embrigadement dans des milices n'est-il pas l'activité économique ?


* 5 Entretien avec le quotidien Le Parisien le 8 juillet 2012

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