III. LES DISPOSITIONS DU TRAITÉ : OUVRIR UN LARGE CHAMP DE COOPÉRATION CIVILE ET MILITAIRE, SÉCURISER NOTRE PRÉSENCE

Côté français, le projet de loi de ratification qui nous est soumis, examiné en Conseil des ministres mercredi 11 juillet, a été déposé en premier lieu au Sénat. Il sera débattu au Sénat le 18 juillet en séance publique, et le 25 juillet à l'Assemblée nationale, pour y être adopté définitivement.

Marquant sa volonté politique d'adopter rapidement ce texte, votre commission a souscrit au délai d'examen particulièrement serré que lui proposait le Gouvernement.

Côté afghan, le projet de ratification du traité d'amitié et de coopération est actuellement au Taqnin (Commission des lois) de la Chambre basse afghane. Dès la nouvelle session parlementaire, le 21 juillet, le texte sera successivement présenté à chacune des 18 commissions . Le plan de travail de la nouvelle session n'est pas encore établi à ce jour. Une fois que le texte sera passé devant toutes les commissions, il sera examiné en assemblée plénière. Après la navette avec la Meshrano Jirga (Sénat), le traité sera ensuite promulgué par un décret présidentiel. Il n'est pas possible, à cette date, d'avancer une date prévisionnelle de ratification du traité d'amitié par le parlement afghan.

A. UNE AMBITION LARGE, UNE PERSPECTIVE DE LONG TERME, MAIS DES MOYENS CONTRAINTS

1. Premier traité de coopération signé hors de la région, il engage la France dans le long terme aux côtés du peuple afghan

Le traité d'amitié et de coopération avec l'Afghanistan est un événement historique dans les relations franco-afghanes : c'est le premier traité conclu par les deux pays depuis qu'ils ont établi des relations diplomatiques en 1922. Il inscrit nos relations dans la durée , puisqu'il est conclu pour 20 ans et prévoit, entre autres, des emphytéoses de 99 ans pour deux de nos établissements culturels (Institut culturel et délégation archéologique).

Au moment où la France réduit, en coordination avec ses alliés, sa présence militaire et passe la main aux autorités afghanes, le traité et le programme de coopération très précis qui l'accompagne prévoient la montée en puissance de notre coopération bilatérale en matière de sécurité, mais surtout en matière civile.

Le traité marque l'évolution du soutien français à l'Afghanistan, d'une dominante militaire à une dominante civile. Il englobe les différents projets de notre coopération bilatérale actuelle et future, et les réorganise autour d'axes clairs, dans un souci de meilleure lisibilité, et de garanties renforcées, en termes notamment de sécurité.

Le programme à cinq ans, dont le budget devra cependant être confirmé chaque année par le Parlement dans le cadre de la loi de finances, prévoit un certain nombre de projets emblématiques, comme par exemple :

. Dans le domaine de la sécurité :

- l'appui à la création d'une École de Guerre afghane ;

- l'appui à la création d'une gendarmerie afghane ;

Dans les autres domaines :

- la réalisation d'une deuxième, puis d'une troisième phase (CHU) de l'hôpital français pour la mère et l'enfant   ;

- l'appui à la création d'un réseau de lycées techniques agricoles ;

- un partenariat entre le bureau de recherches géologiques et minières, le BRGM et le Service géologique afghan ainsi que la formation d'ingénieurs des mines et de géologues ;

- la contribution à des projets d'infrastructures (adduction d'eau, rail) ;

- la poursuite de projets de coopération, au-delà de 2014, en Kapisa et Surobi.

Le traité comporte des engagements de la part de la partie afghane :

- un engagement à coopérer en matière de lutte contre la drogue et le terrorisme ;

- l'octroi, attendu depuis longtemps, de facilités nécessaires aux personnels et institutions qui concourent à la relation bilatérale (exemptions fiscales et douanières pour l'Agence française de développement et nos ONG, emphytéoses de 99 ans pour l'Institut français et la Délégation archéologique) ;

- la promotion de la langue française à tous les niveaux d'enseignement. Dans le programme à 5 ans, le Français devient langue vivante officielle ;

- la pérennisation de nos instituts culturels.

L'Afghanistan a conclu d'autres partenariats bilatéraux avec plusieurs États de la coalition ou de la région : États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, Australie, Inde, Chine.

Les autres accords de partenariat signés par l'Afghanistan :

- États-Unis : Intitulé « Enduring strategic partnership agreement », l'accord de partenariat stratégique conclu entre les États-Unis et l'Afghanistan en marge du Sommet de Chicago comprend un volet coopération civile formulé de manière très générale (mention simple de quelques grands secteurs : éducation, agriculture, santé, infrastructures...). Ratifié en mai par le Parlement afghan, cet accord est un « executive agreement » juridiquement contraignant mais qui n'exige pas la ratification du Congrès américain.

- Royaume-Uni : le 28 janvier 2012, le président Karzaï a signé à Londres avec David Cameron, un partenariat stratégique ( UK Afghanistan Enduring Strategic Partnership ) portant sur le dialogue politique et la coopération en matière de sécurité, de gouvernance, de développement et de liens culturels. Ce document qui n'a pas de valeur juridiquement contraignante pose dans leurs grandes lignes les bases de la coopération entre gouvernements britannique et afghan pour dix ans (à l'issue desquelles le partenariat fera l'objet d'une revue stratégique).

Outre l'affirmation d'un soutien britannique aux efforts de réconciliation du gouvernement afghan avec les talibans et aux réformes en cours (système électoral, réforme de l'administration publique, lutte contre la corruption par exemple), ce « document » comprend un volet important en matière de formation des ANSF, avec l'annonce de la création en Afghanistan d'une académie militaire (sur le modèle de l'académie militaire royale de Sandhurst) et l'accueil d'officiers afghans dans les écoles britanniques de formation des cadres . Dans le domaine économique, le partenariat lancé le 28 janvier dernier annonce la volonté des deux gouvernements de conclure des accords de protection des investissements et de non-double imposition en vue de favoriser le développement des relations économiques et commerciales.

- Australie : le 20 mai 2012, en marge du Sommet de l'OTAN à Chicago, un accord de partenariat a été signé avec l'Afghanistan prévoyant de maintenir un niveau substantiel d'aide publique au développement (190,3 millions auD sur deux ans, de mi 2012 à mi 2014). Ce partenariat d'ensemble et à long terme (" Comprehensive Long-term Partnership ") mentionne notamment la lutte contre les menaces transversales comme le terrorisme, les narcotrafics et la traite d'êtres humains. Il encourage également les relations économiques et les investissements. Le Partenariat précise que l'Australie soutiendra la demande d'accession de l'Afghanistan à l'OMC, et qu'elle va appliquer d'ores et déjà le régime douanier qu'elle propose aux pays les moins avancés (accès des biens originaires d'Afghanistan, libres de droits et de quotas, pour autant qu'ils répondent aux normes australiennes).

- Inde : L'Inde cherche à consolider sa présence et assurer la défense de ses intérêts, dans la perspective du retrait de la communauté internationale. A cette fin, le Premier ministre indien a annoncé en mai 2011 la mise en place d'un partenariat stratégique bilatéral, confirmé le 4 octobre 2011 par la signature d'un document cadre à Delhi, incluant : un volet politique et de sécurité : établissement d'un dialogue stratégique ; formation, en Inde, des forces de sécurité afghanes - principalement en Inde- ; possibles livraisons d'équipements et programmes de renforcement des capacités des ANSF ; un volet de coopération, mettant l'accent sur l'éducation, la gouvernance et les micro- projets ( Small Development projects ) ; un volet d'échanges humains ; un volet économique : secteur minier, énergie, transports et infrastructures.

- Allemagne : A l'occasion de la visite à Berlin du président Karzaï, l'Allemagne a signé le 16 mai 2012 un accord de coopération avec l'Afghanistan, texte très général qui définit simplement le cadre de la coopération bilatérale. Dans le domaine de la coopération civile, l'accord ne comprend aucun engagement chiffré mais laisse ouvert un champ d'action très large en incluant: les thématiques premières de la coopération allemande aujourd'hui (soutien au développement économique durable, formation, approvisionnement énergétique, secteur de l'eau et bonne gouvernance) ; plusieurs sujets plus récents tel le développement de l'aviation civile afghane (avec pour objectif l'établissement du cadre institutionnel et réglementaire nécessaire dans ce domaine); la coopération dans le domaine de l'exploitation minière (sur la base de la déclaration d'intention du 20 juin 2011 signée entre le ministre afghan des Mines et le ministre allemand de l'Economie). Pour le suivi et la mise en oeuvre de cet accord, un groupe de travail piloté par les ministères des affaires étrangères est mis en place.

- Italie : L'Italie et l'Afghanistan ont signé, à l'occasion de la visite officielle du Président Karzaï à Rome les 25 et 26 janvier dernier, un « accord de partenariat et de coopération bilatérale de long terme » similaire à celui signé ensuite à Paris et à Londres. Cet accord, juridiquement contraignant, ne comporte pas d'engagements financiers directs mais doit malgré tout être ratifié par le Parlement italien au titre de l'art.80 de la Constitution. Il vise à confirmer la poursuite de l'engagement italien aux côtés de l'Afghanistan après 2014 et comporte des dispositions générales sur la coopération politique, l'aide au développement, la sécurité, la lutte contre la criminalité et le trafic de drogue, les coopérations économique et culturelle. Trois grands domaines prioritaires sont identifiés pour l'aide au développement future : développement économique et rural ; gouvernance et Etat de droit (Rome insiste régulièrement sur la protection des femmes et des enfants) ; infrastructures et ressources naturelles.

- Union européenne : L'Union européenne et l'Afghanistan ont engagé en mars 2012 la négociation d'un « accord de coopération en matière de partenariat et de développement ». Cet accord comprend :

- des clauses politiques contraignantes sous-tendant l'ensemble des relations entre l'UE et les pays tiers : respect des droits de l'Homme, démocratie, État de droit ; non-prolifération des armes de destructions massives ; lutte contre le terrorisme ;

- des dispositions relatives à la coopération en matière de développement (engagement en matière d'éradication de la pauvreté) ;

- des dispositions portant sur le commerce et les investissements dans le but de favoriser un accroissement des échanges entre l'UE et l'Afghanistan ainsi qu'une adaptation de la réglementation afghane aux normes internationales (la libéralisation tarifaire, les subventions agricoles et les questions d'accès préférentiels aux marchés n'entrent pas dans le champ de l'accord proposé) ;

- des dispositions relatives à une coopération dans les secteurs suivants : justice et sécurité, administration publique, énergie, transport, éducation, culture, santé, agriculture, coopération régionale, environnement.

Tout récemment, le 7 juillet dernier, en visite à Kaboul, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a déclaré que l'Afghanistan devenait le 15 e « allié majeur non membre de l'OTAN » des Etats-Unis. Cette première mise en oeuvre de l'accord bilatéral de partenariat stratégique entre les deux pays garantit l'engagement américain dans la durée en matière notamment de formation et de financement dans les domaines de la sécurité et de la défense.

2. Un très large champ ouvert pour la coopération institutionnelle, économique et sociale
a) La coopération en matière de sécurité et de défense

L'article 3 du Traité est relatif à la coopération de sécurité et de défense. Le traité ne prévoit aucune clause d'assistance ou d'engagement automatiques en matière de défense.

Il prévoit en revanche une coopération en matière de sécurité et de défense, dont l'étude d'impact précise qu'elle sera « adaptée à l'évolution de la situation sécuritaire en Afghanistan » . Cette coopération prendra notamment la forme d'actions de formation et de conseil conduites par la partie française, qui apportera également son soutien à la création d'une gendarmerie nationale afghane. Cette coopération du ministère de la Défense s'effectuera dans le cadre multilatéral de la coalition à travers la participation de la France à la « NATO Training Mission Afghanistan (NTMA)-Army » (par distinction avec la composante NTMA- Police).

L'opération « Epidote » est composée de plusieurs détachements d'instruction opérationnelle travaillant chacun au profit d'une école militaire afghane dans un domaine précis. Le nombre de personnels actuellement en Afghanistan sous mandat Epidote est de 126. Ce volume est appelé à décroître progressivement jusqu'à 50 à l'horizon 2014, la pérennité de cette structure au-delà de 2014 sera abordée ultérieurement entre alliés de la FIAS. Pour les 3 dernières années, le nombre de stagiaires ayant bénéficié de formations conduites par le dispositif Epidote s'élève à  1459 en 2009, 4.621 en 2010 et 3.657 en 2011.

En complément de la pérennité de ces actions de formation, les unités qui ont été formées par la France pourront bénéficier d'un soutien ponctuel au moyen de détachements d'instruction opérationnelle à la requête de la partie afghane lors des réunions d'états-majors annuelles. A ces deux éléments peuvent s'ajouter :

- les 88 militaires déployés au sein de l'hôpital militaire de KAIA, majoritairement au profit des Afghans (en 2011, 50 % des consultations et 88 % des actes chirurgicaux),

- les 8 experts démineurs insérés dans le laboratoire de contre IED de l'Union européenne,

- les actions complémentaires d'Epidote en matière d'enseignement de la langue française.

Enfin, en matière de coopération pour la sécurité intérieure, l'effort sera renforcé par l'ouverture d'un poste de coopérant gendarme qui deviendra conseiller en chef de la Police nationale afghane. Il s'ajoutera à l'expert technique international en place depuis 2009 qui est en charge de la composante « police » du Fonds de solidarité prioritaire (FSP) « Appui à la Réforme du système de sécurité (RSS) » en Afghanistan et qui offre des missions :

- d'appui à la police judiciaire (lutte contre les stupéfiants ; laboratoire de police scientifique ; brigades des mineurs) ;

- de création d'un service de protection des personnalités ;

- de lutte contre la fraude documentaire ;

-de protection civile.

b) La coopération en matière agricole

L'article 4 du Traité porte sur la coopération dans les domaines de l'agriculture et du développement rural. La France apporte son expertise pour développer la productivité agricole, notamment en matière d'irrigation, d'amélioration des semences et de conservation des produits, d'élevage, de soutien vétérinaire et phytosanitaire, d'extension du système coopératif et d'enseignement technique agricole.

Les volumes financés par la France dans le secteur de l'agriculture restent modestes comparés à ceux d'autres bailleurs de fonds, mais nos interventions sont visibles et appréciées des Afghans.

Premier poste de dépense de l'aide civile française à l'Afghanistan (40 % en moyenne au cours des dernières années), la coopération en matière d'agriculture et de développement rural a débuté dès 2002 par l'envoi de 19 000 tonnes de farine et de semences sélectionnées qui, mises sur le marché local, ont permis d'alimenter un fonds de contrepartie permettant de financer nos premières opérations, notamment l'installation de notre assistant technique dans les locaux mêmes du ministère afghan de l'agriculture, le MAIL.

Sur la période 2004-2007, c'est un total de 15 millions d'euros qui a été consacré à l'agriculture. L'intervention de l'AFD, à partir de 2006, a permis de donner davantage de consistance à cette coopération en consolidant notre « plate-forme agricole » placée auprès du Ministère de l'Agriculture, ( FCO-MAIL ). Depuis lors, nos opérations ont emprunté plusieurs canaux (financement transitant par le budget afghan - « core buget »- ou via l'AFD - « off buget ») et visé différents objectifs, avec des résultats contrastés.

1/. Les opérations transitant par le budget afghan : 36,4 millions d'euros d'engagements :

- contribution au NSP ( National Solidarity Program ) pour le développement communautaire en Kapisa et Surobi (8 millions d'euros). Destinée à financer des petits projets d'infrastructures municipales approuvés par les assemblées villageoises préalablement élues et réalisés par des partenaires techniques ( UN-Habitat en Kapisa, Action Aid en Surobi), sous la supervision du ministère afghan du développement rural, cette contribution, entièrement versée en juillet 2009, n'était consommée qu'à hauteur de 10 % sur le terrain en septembre 2010. Afin d'accélérer les versements, il a donc été décidé, en juillet 2010, d'étendre la zone d'application de cette contribution à des projets situés dans les districts périphériques de la province de Kapisa et du district de Surobi. A l'automne 2011, le taux de décaissement est désormais de 90 %.

- développement agricole des régions nord et nord-est (5,2 millions d'euros) : ce projet est destiné à favoriser le développement de la culture du coton et des céréales par l'accroissement des rendements et l'amélioration de la productivité des coopératives agricoles. Il s'inscrit directement dans le cadre de la lutte contre l'opium pour lequel il représente une substitution. Les décaissements ont commencé début 2012.

- relance de l'apiculture en Afghanistan (3 millions d'euros). Ce programme aura pour objectif l'augmentation de la production de miel grâce à l'amélioration des rendements des vergers suite à une meilleure pollinisation. La convention financière a été signée le 12 octobre 2011.

- appui à la filière élevage en Afghanistan (2,5 millions d'euros). Le premier volet de ce projet concerne le renforcement du centre piscicole de Qarhga (dans la banlieue de Kaboul) pour assurer un approvisionnement en alevins et la formation des pisciculteurs à l'élevage des truites en eaux froides. Le second volet porte sur un appui au centre d'insémination artificielle de Guzarga (également dans la banlieue de Kaboul), afin d'améliorer la génétique du cheptel bovin et développer la filière laitière. La convention financière a été signée le 12 octobre 2011.

2/. Les opérations ne passant pas par le budget afghan (33millions d'euros)

- opérations en Kapisa/Surobi en appui à nos forces, sous la responsabilité du Pôle de Stabilité : projets de développement agricole (13,2 millions d'euros sur les programmations 2009-2010). Ces projets, dont la finalité est de favoriser la stabilisation de ces zones d'engagement des troupes françaises, en améliorant les conditions de vie de la population, comprennent essentiellement trois volets :

- distribution aux agriculteurs de semences , d'engrais et de petit matériel (ruches et poulaillers) et formations correspondantes ;

- aménagement de bassins versants et réalisation des petits travaux d'irrigation (ONG Afrane ) ;

- formation de maçons spécialisés dans la construction de près de  200 celliers agricoles traditionnels (ONG GERES ).

c) La coopération en matière de santé

L'article 5 du traité porte sur la coopération en matière de santé.

Le but est de contribuer à réduire le taux de mortalité maternelle et infantile, d'augmenter la capacité d'accès aux soins médicaux de qualité et d'améliorer le niveau de formation des médecins et personnels médicaux.

A ce titre, la partie française apporte son soutien aux institutions de santé afghanes, en particulier l'Institut médical français pour l'enfant (IMFE) de Kaboul. La coopération est recherchée entre les établissements d'enseignement supérieur de formation médicale, pharmaceutique et d'administration hospitalière français et afghans.

L'IMFE constitue aujourd'hui la structure hospitalière afghane la plus avancée dans les techniques médicales de pointe , avec un plateau technique sans équivalent à Kaboul. Institut privé, il accueille une partie des patients afghans soignés d'ordinaire à l'étranger, sans que les patients pauvres soient écartés puisqu'un important fonds de soutien est prévu à leur attention. Par ailleurs, des enfants nécessiteux de Kapisa et de Surobi bénéficient également de ce dispositif, sur financements français. Il s'est imposé en quelques années comme un fleuron de notre coopération au bénéfice de la population afghane dans le secteur prioritaire de la santé mère-enfant, ainsi qu'un élément important de la visibilité de la France.

Le programme de coopération à cinq ans qui accompagne le traité d'amitié franco-afghan prévoit une extension importante de l'IMFE (« phase 2 »). Elle portera notamment sur la construction et l'équipement d'un bâtiment doté de services de gynéco-obstétrique et de néonatologie , la distribution de soins prénataux, d'accouchement, de soins post-nataux et néonataux de haut niveau, et le renforcement des capacités du personnel de santé. A terme («phase 3 »), l'IMFE deviendra un centre hospitalier universitaire sur le modèle de l'hôpital universitaire de l'Aga Khan à Karachi.

Enfin, dans le cadre de nos engagements du G8 de Muskoka, notamment le renforcement de la coopération transfrontalière autour de l'Afghanistan, l'IMFE constituera un pôle régional apportant son soutien aux échanges humains, à la formation et à l'utilisation des nouvelles technologies (télémédecine), entre le Pakistan, l'Afghanistan, le Kirghizstan et le Tadjikistan.

d) La coopération en matière d'éducation et d'enseignement supérieur

L'article 6 du Traité définit les grands axes de la coopération en matière d'éducation et d'enseignement supérieur.

Il s'agira en particulier de :

- développer l'enseignement de la langue française ;

- soutenir les lycées Esteqlal et Malalaï de Kaboul, établissements éducatifs fondés par la République française ;

- former des ingénieurs et chercheurs afghans à travers un partenariat entre l'Université polytechnique de Kaboul (UPK) et le Groupe des écoles des mines (GEM) et les universités françaises compétentes dans ce domaine ;

- encourager les échanges d'étudiants avec des écoles supérieures ou différentes universités françaises notamment à travers des bourses françaises délivrées par l'État et des fondations.

Depuis les années 20, la France a été présente en Afghanistan à travers les lycées Esteqlal (garçons) et plus tard Malalaï (filles). Ayant atteint son apogée dans les années 70 où un grand nombre d'enseignants français étaient détachés dans les établissements (toutes disciplines confondues) ce qui permettait aux bacheliers afghans de poursuivre leurs études en France, le dispositif français devait quitter les lycées en 1985 mais perdurait « en exil » à Peshawar (Pakistan). Après la chute du régime des talibans, les deux lycées ont été rouverts en mars 2002. S'ils conservent une réputation d'excellence et un caractère privilégié par rapport à d'autres établissements du primaire et du secondaire, force est de constater que la situation est bien différente de celle qui prévalait dans les années 70 : les effectifs ont été multiplié par trois (plus de 7.000 élèves sur les deux établissements).

Le projet ALEM (appui aux lycées Esteqlal et Malalaï ) vise à promouvoir l'enseignement de la langue française, l'enseignement des sciences en dari et en français et à appuyer la direction administrative et pédagogique et la gestion financière et matérielle des deux lycées. Il se concrétise par l'animation d'activités périscolaires et par la gestion des deux bibliothèques/médiathèques.

Face au nombre très important d'élèves et au faible niveau en français, aussi bien des professeurs afghans de français que des élèves, il a été décidé de mettre en place, dès la rentrée 2010, une classe pilote par niveau rassemblant les meilleurs élèves dans toutes les disciplines (particulièrement en français) et les meilleurs professeurs. En 10 e et en 11 e , un enseignement des mathématiques et de la physique, à raison d'une période par semaine plus une séance de travaux pratiques ou de travaux dirigés supplémentaires, a été mis en place.

En réponse à une demande du vice-ministre de l'éducation, la France apportera son appui à la construction d'un corps d'inspection au sein du ministère de l'éducation afghan .

En matière d'enseignement supérieur , notre coopération s'illustre notamment au travers du projet SEFA (Soutien à l'enseignement du français en Afghanistan).Sa première phase avait pour but de construire et d'équiper un département de français et d'en former les professeurs. La seconde phase, engagée en 2010, a pour objectif d'élargir les enseignements de français à de nouvelles institutions partenaires et de poursuivre l'appui à la pédagogie de langues nationales et de sciences au niveau universitaire. Il consiste en un appui direct (humain, logistique, matériel) aux facultés universités concernées, en des formations initiales et continues (diplômantes ou non) à l'attention de professeurs et étudiants et en une réforme administrative des services universitaires.

Au fil des années, le projet a accompagné le développement de la faculté de lettres et langues en termes de formation, de construction et d'équipement. Le département de Français de l'université de Kaboul a été complètement achevé et équipé.

Les départements d'espagnol, d'archéologie, d'architecture, les facultés de droit et sciences politiques, de pharmacie et l'université médicale de Kaboul proposent le français en langue vivante 1 aux étudiants en 1 re et 2 e années (années pendant lesquelles une langue vivante est obligatoirement étudiée). En province, à la demande du chancelier de l'Institut Pédagogique de Parwan, la coopération a été reprise en 2011 avec l'ouverture d'une classe en 1 re année. Les diplômés de l'Université de Kaboul et l'Institut Pédagogique de Parwan ont permis d'identifier une nouvelle génération d'enseignants. Ils bénéficient désormais d'une formation continue afin qu'ils soient prêts à intervenir au sein de toutes les institutions en Afghanistan où le français est enseigné.

Des travaux d'aménagement ont été entrepris, pour la construction de laboratoires, à l'Institut de formation des Maîtres de Kaboul et à celui de Hérat ; des actions de recherche et publication (bilingue) ainsi que le financement de stages pratiques pour les étudiants en 5 e et dernière année avec l'Institut médical français pour l'enfant (IMFE) sont également mis en place et soutenus par le projet.

Toutes les nouvelles actions envisagées s'inscrivent dans la perspective du traité d'amitié et le programme de coopération à 5 ans, dont le principal objectif est d'aider à la titularisation de 25 professeurs par an .

Plusieurs actions sont envisagées :

- orienter la licence de français vers la formation de futurs professeurs compétents (excellence linguistique et compétences didactiques opérationnelles) ;

- participer à l'élaboration d'un processus national de titularisation et permettre la titularisation d'un maximum de professeurs dans les années à venir ;

- identifier un partenaire universitaire français, pour mettre en place un échange d'étudiants (ou en tout cas l'accueil des étudiants afghans ou sein de l'université) ;

- effectuer un transfert de compétences envers l'équipe afghane (en matière de coordination et d'administration) afin qu'à terme, elle puisse auto-gérer le département ;

- revaloriser le statut du professeur de français, notamment titulaire, c'est-à-dire, fonctionnaire de l'administration afghane, et créer un vivier de nouveaux professeurs en faisant évoluer le processus de recrutement .

e) La coopération en matière archéologique

L'article 7 du Traité est relatif aux échanges culturels et à la protection du patrimoine archéologique afghan.

Il s'agira de renforcer l'enseignement et la recherche universitaires historiques et archéologiques et de mettre en valeur les oeuvres d'art et les éléments patrimoniaux.

Les parties s'engagent à faciliter les activités de l'Institut français d'Afghanistan (IFA) et de la Délégation archéologique française en Afghanistan (DAFA). Elles assurent la pérennité de ces établissements par la conclusion d'une emphytéose (bail de très longue durée) au profit de l'IFA, sur son site historique, et de la DAFA sur le site de l'Institut national d'archéologie, qui doit être bientôt reconstruit.

La coopération patrimoniale franco-afghane entamée en 1922, à la demande du Roi Amanullah est à l'origine de la création de la Délégation archéologique française en Afghanistan (DAFA). Elle est aujourd'hui la seule délégation archéologique permanente. A ce titre, elle entretient une relation de travail, marquée par une très grande relation de confiance, avec l'Institut national d'archéologie afghan et appuie l'intervention des autres missions archéologiques françaises ou étrangères lors de leur séjour en Afghanistan. Le champ disciplinaire de la DAFA touche tous les domaines concernés par le patrimoine culturel hérité du passé, patrimoine mobilier, patrimoine archéologique et monumental. Quatre orientations définissent ses activités : recherche, conservation et préservation, formation et information, mise en valeur du patrimoine. Les programmes scientifiques en cours sont :

- l'étude de l'occupation ancienne de l'oasis de Bactres et de son arrière-pays (fouilles archéologiques de Bactres, de Cheshme, prospections archéologiques et cartographie des sites anciens), l'étude du cadre physique et naturel du peuplement ancien (géomorphologie et hydrologie du delta de Balkh Ab)

- le programme d'archéologie urbaine à Hérat (mise en place d'une veille archéologique sur les zones de la ville en cours d'aménagement, étude du parcellaire urbain et du réseau des rues)

- l'étude de l'environnement ancien de Bamiyan

- l'étude de la mosquée de Noh Gonbad « Hâji Piâda » du IX e siècle.

Dans le cadre du traité à 5 ans, sont prévus la construction d'un nouveau bâtiment pour la DAFA, la création d'un service de répression du trafic des oeuvres d'art et l'octroi de bourses en archéologie (accueil en France de 5 étudiants).

f) La coopération pour la consolidation des institutions

L'article 8 traite des questions de gouvernance démocratique. La partie française s'engage à apporter son appui au renforcement de l'État de droit et à l'efficacité des institutions afghanes et à contribuer à la formation des cadres de l'administration centrale et territoriale et de la magistrature ainsi qu'à celle des cadres administratifs des deux assemblées parlementaires.

La France s'engage également à participer à la formation des professeurs de droit des universités afghanes. Une attention particulière est portée à la protection des droits des femmes et leur accès à la justice.

(1) Le Parlement français : un engagement précoce (2004) en faveur du renforcement de l'expertise parlementaire

Les deux chambres du Parlement français ont d'ores et déjà engagé un important volet de coopération technique avec leurs homologues afghanes, qui sera poursuivi dans le cadre du présent traité.

Dès après le vote, par la grande assemblée Loya jirga , de la Constitution du 3 janvier 2004, l'idée d'une contribution de la France au rétablissement d'institutions parlementaires en Afghanistan avait été évoquée par l'ambassade de France à Kaboul auprès du comité des États donateurs.

Du 13 au 17 décembre 2004, deux fonctionnaires du service des Relations internationales du Sénat ont effectué une mission d'évaluation à Kaboul. Cette mission consistait d'une part, à rencontrer la totalité des membres de la communauté internationale impliqués dans le programme de mise en place des assemblées parlementaires afghanes et, d'autre part, à élaborer le programme de formation des futurs fonctionnaires du Parlement afghan.

En décembre 2004, en accord avec la Commission afghane de la fonction publique, une première formation fut délivrée, à Paris, à huit futurs directeurs de service récemment recrutés, par l'Assemblée nationale française en coopération avec l'ENA. Ces stagiaires furent accueillis au Sénat français, au Palais du Luxembourg.

La présence à Kaboul, du 15 janvier au 6 avril 2005, d'un expert parlementaire français permit notamment de mener à bien, en concertation avec les autorités parlementaires afghanes, la rédaction de deux documents :

- le programme de formation pour les fonctionnaires parlementaires afghans, dont le contenu sera présenté plus loin ;

- un avant-projet de Règlement de l'Assemblée nationale d'Afghanistan qui regroupera les deux futures chambres.

Du 29 mars au 1 er avril 2005, M. Azizullah LODIN, secrétaire général de l'Assemblée nationale d'Afghanistan, se rendait à Paris pour prendre part à une réunion d'information des pays donateurs sur la mise en place du Parlement afghan, organisée à l'initiative du ministère français des Affaires étrangères.

En février 2005, le programme « SEAL I » ( Support to the establishment of the Afghan legislature ) qui résultait d'un accord entre l'État transitoire islamique d'Afghanistan et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) était rendu public. La France y était reconnue comme « nation pilote pour le soutien parlementaire ».

Il s'agissait de construire les capacités des équipes administratives et techniques comme celles des membres du parlement pour assurer un fonctionnement efficace et maîtrisé de celui-ci.

La première phase, d'une durée de quatre semaines, a eu pour objet la formation de base et semi-théorique aux différents métiers parlementaires . Elle s'est déroulée avec succès à Kaboul, avec le concours d'administrateurs des deux assemblées parlementaires françaises, du 15 juin au 12 juillet 2005.

Une deuxième phase, destinée à permettre une approche comparée des modes d'organisation parlementaire, s'est déroulée à compter de juillet 2005 au moyen de stages dits « professionnalisants », par groupes, dans divers parlements dans le monde (Italie, Allemagne, Inde, Indonésie, Maroc, Turquie). Elle a donné lieu, en France, du 25 septembre au 5 octobre, à l'accueil d'une quinzaine de fonctionnaires du Parlement afghan dans les deux assemblées françaises. Ce stage s'est déroulé à Paris sous les meilleurs auspices.

Une mission d'ingénierie architecturale parlementaire a été effectuée, en juin 2005, par l'architecte du Sénat français, afin de déterminer les aménagements de locaux restaurés des deux assemblées afghanes et d'évaluer les circulations souhaitables.

Notre collègue Jean FRANCOIS-PONCET, ancien sénateur français (UMP - Lot-et-Garonne) et ancien ministre des Affaires étrangères, s'est rendu à Kaboul du 11 au 18 octobre 2005. Il a prononcé une importante conférence sur le thème « Fonction publique parlementaire : le point de vue d'un élu » devant les quelque deux cents fonctionnaires du futur Parlement afghan , dans le cadre du centre culturel français Esteqlal . Il s'est notamment entretenu avec M. Azizullah LODIN, secrétaire général de l'Assemblée nationale qui réunit les deux chambres du Parlement.

Les élections législatives se sont déroulées en Afghanistan le 18 septembre 2005 dans le calme. Elles ont conduit à la désignation des  249 députés à la Wolesi jirga (Chambre des députés). La formation de la Meshrano jirga (Sénat) - qui devrait compter 102 membres - est restée incomplète, celle-ci étant conditionnée, pour deux tiers, par des élections au sein des conseils de provinces et des conseils de districts. En dépit de difficultés nombreuses et de tous ordres, les assemblées afghanes se sont mises au travail et sont parvenues, à compter de l'été 2006, à commencer à effectuer un réel travail législatif (dépôt et discussion d'amendements).

Une mission effectuée, pour le compte des deux assemblées françaises, à Kaboul, du 4 au 10 septembre 2006 par le service des Relations internationales du Sénat, a permis d'évaluer les effets en 2006 et les perspectives pour 2007 du programme SEAL.

La coopération s'est poursuivie entre 2006 et 2009 sur ces bases :

- Les visites à Paris des président présidents des assemblées parlementaires afghanes (novembre 2006) ;

- La visite à Paris, en « jumelage », du président de la commission des Relations internationales de la Meshrano jirga (M. Ramazan) (15 au 20 janvier 2007) ;

- Un stage à Paris pour dix fonctionnaires (5 au 16 février 2007) ;

- Un stage à Paris pour deux fonctionnaires (17 au 22 décembre 2008) ;

- Une mission d'appui administratif au secrétaire général du Parlement (M GRAN), effectuée en novembre 2010 à Kaboul. Cette mission a comporté notamment :

- un séminaire de deux jours sur trois thèmes partant de la référence française : le rôle des commissions permanentes ; la fonction de contrôle ; et les rapports entre le Parlement et l'Exécutif ;

- une audience par le président de la Chambre des députés et des entretiens techniques avec les Secrétaires généraux des deux Assemblées afghanes.

- La visite à Paris de M. Zalmaï ZABULY, président de la commission des Plaintes de la Meshrano jirga et deux de ses collaborateurs (3 au 10 octobre 2010) ;

- un stage à Paris de quatorze fonctionnaires, issus des deux assemblées afghanes (2 au 10 novembre 2010)

- une visite d'étude pour des parlementaires et fonctionnaires parlementaires sur le thème de la « Procédure budgétaire » (4-10 avril 2011), en partenariat avec l'Assemblée nationale et l'ENA.

Au total, ce sont quelque 60 parlementaires ou fonctionnaires afghans qui ont été reçus au Sénat, outre la centaine de ceux qui avaient reçu la formation initiale à Kaboul à l'été 2005.

Une mission d'experts de l'Assemblée nationale s'est récemment rendue à Kaboul, du 8 au 13 juin 2012, pour assurer une formation de légistique pour leurs collègues fonctionnaires parlementaires des deux chambres du Parlement.

L'objet de la mission était double :

- d'une part, de former les fonctionnaires des deux chambres du Parlement afghan aux techniques de rédaction d'articles de projets ou de propositions de loi, ainsi que d'amendements, et évaluer de manière plus générale les besoins de ce Parlement ;

- d'autre part, d'exposer aux fonctionnaires parlementaires afghans les différents modes de scrutin . L'Afghanistan s'engage en effet dans une réforme électorale alors que le contexte sécuritaire du pays est tendu. Le mode de scrutin retenu aura des conséquences sur son déroulement (marqué par de nombreuses irrégularités en 2010).

En vue des prochains scrutins (élection présidentielle en 2014, élections législatives en 2015), un projet de réforme de la loi électorale devrait être prochainement déposé et discuté au Parlement, en vue d'une adoption dans le courant du premier semestre 2013. L'enjeu est d'autant plus important que la loi électorale aujourd'hui en vigueur n'a pas été examinée par les chambres (elle est issue d'un décret présidentiel pris en février 2010) et que les contestations des résultats des élections législatives de septembre 2010 ont donné lieu à une importante crise institutionnelle, témoignant d'un désaccord tant sur les règles applicables que sur les recours disponibles pour les faire respecter.

Au regard des besoins constatés lors de ces différentes missions, votre commission souhaite que la coopération bilatérale entre le Parlement afghan et le Parlement français soit poursuivie.

(2) La formation des magistrats afghans et l'assistance à la rédaction des lois

L'IIPEC (Institut International Pour les Études Comparatives) assure une partie de la formation obligatoire pour les magistrats afghans dans le cadre du « stage judiciaire » organisé par la Cour Suprême. Cette coopération constitue le point d'ancrage de la coopération franco-afghane dans le milieu judiciaire afghan, qui sera diversifiée, en faisant notamment appel à l'ENM (école nationale de la magistrature), dans le cadre d'une formation de formateurs. Après plus de six ans de formation directe des juges, le moment est venu de créer les conditions permettant aux Afghans d'acquérir progressivement la maîtrise de leur formation.

L'action auprès de la Cour Suprême sera relancée, en matière de droit constitutionnel, en particulier l'interprétation de la Constitution afghane et de mise en place d'un contrôle de constitutionnalité indispensable à la mise en place d'un État de droit crédible. Un appui a également été apporté à la relance des relations entre Barreaux afghans et français. Le Bâtonnier de Kaboul a ainsi participé à la convention nationale du Conseil national des Barreaux français (Nantes, octobre 2011). Un concours de plaidoiries est également prévu

La coopération judicaire française s'inscrit dans une dimension bilatérale, avec une aide apportée au département de rédaction des lois (Taqnin) dans le cadre notamment du projet de loi de procédure pénale, et une dimension multilatérale, avec une participation du chef de projet aux travaux du Groupe de travail en matière de droit pénal, qui réunit des experts des acteurs internationaux les plus importants. En ce sens, choix a été fait de plaider en priorité pour le respect des libertés individuelles, domaine dans lequel la France et son système pénal inquisitoire fait référence. Ceci participe d'une stratégie visant à équilibrer la vision très sécuritaire habituellement défendue par une partie de la communauté internationale et qui, sans tempérament, risque d'accroître le sentiment d'injustice de la population afghane et creuser le fossé de légitimité qui la sépare de ses institutions nationales. Le Bureau du Procureur Général, du fait de moyens limités, est essentiellement associé, lorsque convergence se fait, aux actions menées avec d'autres partenaires tels que le Ministère de la Justice.

Une association poussée a également été menée avec le Pôle de stabilité présent en Kapisa-Surobi dans le domaine de l'assistance à la justice locale .

(3) La formation des 34 vice-gouverneurs de province.

La coopération pour la formation des 34 vice-gouverneurs de province vise à renforcer des capacités en matière de gouvernance locale. Elle a reçu le soutien du Ministère de la Justice et de l'ENA. Elle se fonde sur une demande afghane formalisée par le Secrétaire général de la présidence de la République afghane.

La mission française de présentation de l'opération, fournie par l'ENA et le Ministère de l'Intérieur, a consisté sur une durée d'une semaine à identifier auprès de chacun des sept vice-gouverneurs constituant la première promotion les problèmes concrets auxquels il est confronté (14-19 janvier 2012). L'Ambassade, partie prenante à ces entretiens, a recueilli des informations complètes et de première main sur les sept provinces afghanes. Cette première promotion s'est rendue en France du 12 mai au 9 juin (opération en cours) :

- pour un séjour d'une semaine à Paris afin de recevoir une formation sur le système constitutionnel et administratif français et préparer leur envoi individualisé dans une administration déconcentrée ;

- un stage pratique de deux semaines dans des préfectures de départements correspondant aux profils détectés par la mission française (Ajaccio, Annecy, Chambéry, Grenoble). Chaque binôme de vice-gouverneurs dispose son interprète de façon à ce que l'action de tutorat des préfets et secrétaires généraux puisse de dérouler de façon optimale.

- une retour d'expérience à Paris.

A leur retour à Kaboul, les vice-Gouverneurs seront réunis au sein de l'Afghan Civil Service Institute pour rendre compte de leur formation. Ce faisant, deux objectifs sont attendus de ce retour : la possibilité d'un financement par le PNUD des formations suivantes, ainsi que la mise en place d'un programme similaire pour les gouverneurs de districts, toujours avec le soutien du PNUD.

g) La coopération en matière d'infrastructures

L'article 9 du Traité vise à développer les infrastructures afghanes de télécommunications, de transport, d'irrigation, et celles liées à la production et la transformation des matières premières.

Il stipule que les parties facilitent et soutiennent l'action des établissements et entreprises français intéressés pour intervenir dans ce secteur. La Partie française apporte son appui au développement du Service géologique afghan (AGS) grâce à un partenariat avec le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) français.

(1) L'exemple de l'électrification de la Kapisa

La province de Kapisa se trouve dans une situation précaire en matière d'alimentation électrique (réseau obsolète ou détruit, générateurs diesels ou micro-centrales hydroélectriques inopérants). Actuellement, son alimentation électrique provient du nord du pays, en transitant par la province du Parwan : la ligne de distribution venant de Bagram pour desservir la capitale provinciale de Mahmoud E Raqui a été terminée en mai 2011. Le but est de parvenir à relier la province du Parwan à Mahmoud E Raqui et Naghlou, en passant par Nijrab et Tagab. Mais il est également de s'assurer que des succès tangibles seront atteints pour l'accès à l'électricité des populations rurales bénéficiaires.

La France s'est engagée à soutenir l'établissement du réseau de transmission du barrage de Naghlou jusqu'à la station fixe de transformation électrique à Nijrab (44 km). Par ailleurs, la France souhaite mettre l'accent sur le réseau de distribution électrique pour s'assurer de l'adhésion et de l'appropriation par la population de ce réseau électrique.

(2) L'accès à l'eau potable à Kaboul

En cours de formalisation, le projet d'extension du système d'adduction d'eau de la ville de Kaboul a pour objectif de développer les services d'eau potable dans la ville de Kaboul, par une augmentation des capacités de production et de stockage et une extension du réseau de distribution au centre et au nord-ouest de la capitale. La maîtrise d'ouvrage sera confiée à la compagnie des eaux afghane, la AUWSSC. Les travaux d'infrastructures prévus sont divisés en cinq lots, eux même regroupés en trois marchés, pour un coût total estimé à 75 millions d'euros.

h) Le développement d'un cadre favorable aux échanges commerciaux

L'article 10 du Traité prévoit une concertation sur les enjeux économiques, financiers et commerciaux, dans le but de développer les liens entre secteurs privés français et afghan, ainsi que le recours à l'expertise des entreprises françaises, notamment dans les domaines de l'eau, des transports, des télécommunications et celui de la production et de la transformation de matières premières, dans des conditions équitables et transparentes.

Ces dispositions doivent permettre de mettre en oeuvre des actions visant à l'accroissement des échanges commerciaux entre les deux pays et de promouvoir les investissements français en Afghanistan.

3. Des moyens contraints par un contexte budgétaire tendu

L'étude d'impact précise que la mise en oeuvre du traité se traduira par « une augmentation significative du montant de l'aide bilatérale française en faveur de l'Afghanistan » eu égard à la nature et l'ampleur des actions de coopération envisagées. Cette aide financière a fait l'objet d'un chiffrage précis, par ministère, lors d'arbitrages interministériels.

Lors de la conférence de Tokyo le 8 juillet dernier, le ministre des affaires étrangères a annoncé une augmentation de 50 % de l'aide bilatérale de la France à l'Afghanistan.

Le montant global de notre aide prévue au titre du programme de coopération quinquennal annexé au traité d'amitié, pour la période 2012-2016, s'élève à 308 millions d'euros, avec une moyenne annuelle prévue de 50 millions d'euros par an, contre 30 en moyenne auparavant.

Le contexte budgétaire actuel, très tendu, pèsera sans doute sur les engagements pris dans le cadre du plan de développement, y compris sur les premières années de programmation.

En effet, par la suite, la baisse tendancielle des crédits du pôle de stabilité permettra, le cas échéant, de dégager des crédits.

Le Sénat sera particulièrement vigilant à l'ouverture, par les lois de finances initiales, des crédits correspondant effectivement à cet engagement.

4. Les garanties pour la sécurité des personnes et des biens

L'article 12 du traité prévoit que « les experts civils et militaires français présents en Afghanistan pour la mise en oeuvre du traité, ainsi que les personnes à leur charge, bénéficient d'immunités identiques à celles accordées aux experts par l'article VI de la Convention sur les privilèges et immunités des Nations unies du 13 février 1946 » 11 ( * ) , à savoir :

- Immunité d'arrestation personnelle ou de détention et de saisie de leurs bagages personnels ;

- Immunité de toute juridiction en ce qui concerne les actes accomplis par eux au cours de leurs missions (y compris leurs paroles et écrits). Cette immunité continuera à leur être accordée même après que ces personnes auront cessé de remplir des missions pour la mise en oeuvre du traité ;

- Inviolabilité de tous papiers et documents ;

- Les mêmes immunités en ce qui concerne leurs bagages personnels que celles qui sont accordées aux agents diplomatiques.

En conséquence, les actes commis par les experts civils et militaires français et les personnes à leur charge relèveront de la compétence des juridictions afghanes, à l'exception des actes accomplis par les experts dans le cadre de leurs fonctions, pour lesquels ils relèveront de la compétence exclusive des juridictions françaises.

Toutefois, les experts français et les personnes à leur charge bénéficieront, en tout état de cause, sur le territoire afghan, de l'inviolabilité de leur personne puisqu'ils ne pourront être ni arrêtés ni détenus par les autorités afghanes, même pour un acte accompli en dehors du cadre de leurs fonctions. Cette inviolabilité implique également que, si un expert ou une personne à charge devait être condamné par les juridictions afghanes, pour un acte relevant de leur compétence, à une peine d'emprisonnement, à la peine de mort ou à toute autre peine assimilée à un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme, une telle peine ne pourrait être exécutée. En cela, l'accord assure aux experts français et aux personnes à leur charge le respect des droits fondamentaux qui leur sont constitutionnellement et conventionnellement garantis.

Il convient de noter que ce statut protecteur s'inspire directement de celui de l'accord de coopération culturelle et technique du 21 août 1966, qui sera abrogé par le présent Traité. L'article 4 de l'annexe 5 à cet accord stipule en effet que « Le gouvernement royal afghan accorde aux experts français définis à l'article 3 ci-dessus, ainsi qu'aux membres de leurs familles, le statut et les privilèges dont bénéficient les fonctionnaires et experts des Nations unies en Afghanistan ». L'article 12 du Traité en reprend les garanties juridictionnelles et en étend le bénéfice aux experts militaires. En revanche, il ne s'applique pas aux « militaires français engagés dans des opérations de combat », exclus du champ d'application du Traité par son article 3, alinéa 4, et dont le statut est défini, selon les cas, soit par l'accord militaire technique entre la Force Internationale d'Assistance à la Sécurité (FIAS) et l'administration intérimaire de l'Afghanistan, signé le 4 janvier 2002, soit par l'accord du 23 mai 2005 relatif aux conditions de déploiement et de stationnement temporaire des forces françaises participant aux opérations de lutte contre le terrorisme international sur le territoire afghan (opération " enduring freedom ").


* 11 http://basedoc.diplomatie.gouv.fr/Traites/Accords_Traites.php

Pour obtenir le texte de l'accord, cliquer sur « recherche dans la base/accords et traités » puis porter le numéro "19460040" (numéro de l'accord) dans le champ de recherche "recherche tout texte".

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