TITRE III
ÉLECTION DES SÉNATEURS REPRÉSENTANT
LES FRANÇAIS ÉTABLIS HORS DE FRANCE

CHAPITRE IER
ÉLECTION DES DÉLÉGUÉS CONSULAIRES

Article 30 Modalités d'élection des délégués consulaires

L'article 30 du projet de loi institue des délégués consulaires élus en même temps que les conseillers consulaires sur les mêmes listes et chargés de concourir, avec les députés élus par les Français établis hors de France et les conseillers consulaires institués par le projet de loi, à l'élection des sénateurs représentant les Français établis hors de France. Il s'agit de tenir compte du poids démographique des différentes circonscriptions des conseils consulaires pour composer un collège électoral sénatorial plus respectueux du critère démographique.

L'article 30 fixe les modalités d'élection des délégués consulaires. Il prévoit que les délégués consulaires sont élus en même temps que les conseillers consulaires, à raison d'un délégué pour 10 000 inscrits au registre des Français de l'étranger au-delà de 10 000. Ainsi, dans les circonscriptions électorales ayant moins de 10 000 inscrits, il n'y aurait pas de délégués consulaires. La liste des candidats pour l'élection des conseillers consulaires doit comporter des candidats à la fonction de délégué, de sorte que chaque liste devrait comporter autant de candidats que de sièges de conseillers et de délégués, augmentés de deux 51 ( * ) . Un arrêté du ministre des affaires étrangères fixe le nombre de délégués consulaires en fonction de la population inscrite au registre au 1 er janvier de l'année de l'élection. Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, seules 19 circonscriptions sur 130 devraient élire au moins un délégué consulaire et seules trois devraient en élire au moins dix 52 ( * ) .

Ainsi, les délégués consulaires ne sont institués par le projet de loi que pour participer au collège électoral des sénateurs représentant les Français établis hors de France, de sorte qu'ils ne sont élus que pour exercer la fonction d'électeur sénatorial. Or, en dépit de cette fonction exclusive, le projet de loi prévoit pourtant pour le délégué consulaire un régime s'approchant celui d'un titulaire de mandat électif. En effet, l'article 31 établit un régime d'éligibilités, d'inéligibilités et d'incompatibilités qui est identique à celui des conseillers consulaires. En réalité, la confusion peut résulter du fait que les délégués consulaires seront aussi, là où ils seront élus, des suivants de liste, susceptibles de devenir des conseillers consulaires en cas de vacance.

Aussi votre rapporteur s'était-il interrogé sur la possibilité d'aller plus loin dans l'analogie apparente que le projet de loi opère entre les délégués consulaires et les délégués des conseils municipaux, désignés par les conseils pour concourir à l'élection des sénateurs. Un mécanisme de désignation de délégués sénatoriaux par les conseils consulaires, en leur sein puis, lorsque le nombre de délégués à élire est supérieur au nombre de conseillers consulaires, parmi les électeurs inscrits sur les listes de la circonscription électorale du conseil consulaire, a toutefois semblé trop complexe à mettre en oeuvre, sans apporter de nette amélioration au dispositif envisagé par le projet de loi, compte tenu du nombre très restreint de circonscriptions concernées.

En tout état de cause, ce dispositif permet l'élection au suffrage direct de tous les membres du collège électoral élisant les sénateurs représentant les Français établis hors de France, c'est-à-dire, outre les députés élus par les Français établis hors de France, les conseillers et délégués consulaires. Ceci constitue une garantie démocratique équivalente à celle qui existe aujourd'hui, puisque l'AFE qui constitue, avec les députés, le collège électoral est aussi élue au suffrage direct.

Aussi votre commission a-t-elle approuvé en l'état l'économie de ce dispositif. Sur la proposition de son rapporteur, elle a toutefois adopté un amendement visant, outre deux coordinations avec d'autres articles, à porter de deux à cinq le nombre de candidats supplémentaires devant figurer sur la liste en plus des candidats correspondant au nombre de sièges à pourvoir de conseillers et de délégués consulaires, de façon à éviter tout risque d'élections partielles pour désigner des délégués consulaires. En effet, puisque l'élection des électeurs sénatoriaux que seront les délégués consulaires interviendra dans certains cas trois ans avant les élections sénatoriales, le risque est important que les délégués, élus dans une population réputée mobile, aient quitté leur fonction et le pays dans lequel ils résident pendant cette période.

Votre commission insiste en tout cas sur le fait que la fonction de délégué consulaire ne concerne que l'élection des sénateurs et ne saurait, en aucun cas, constituer un mandat. Dans la pratique de la vie politique locale de nos compatriotes à l'étranger, sur le terrain, le délégué consulaire ne doit pas être considéré comme un élu, car il ne s'agit pas d'un mandat électif.

Par ailleurs, votre rapporteur s'est attaché à examiner le respect par le projet de loi du critère démographique dans le collège électoral des sénateurs représentant les Français établis hors de France. En effet, dès lors qu'il ne s'agit pas, en vertu de l'article 24 de la Constitution, d'élections sénatoriales contribuant à la représentation des collectivités territoriales, qui permettent de tempérer le critère démographique, mais d'élections destinées à représenter uniquement une population que sont les Français établis hors de France, il semble à votre commission que l'élection des sénateurs représentant les Français établis hors de France repose sur des « bases essentiellement démographiques », pour reprendre les termes de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Les bases démographiques ne sauraient être ici constituées que de la population inscrite sur les registres consulaires, quand bien même elle ne représenterait en réalité que la moitié de la population réelle résidant à l'étranger.

Dans ses décisions récentes, le Conseil constitutionnel a fait savoir qu'il tolérait, pour la répartition des sièges d'une même assemblée, des écarts de plus ou moins 20 % entre le nombre d'habitants par siège au sein de chaque circonscription et le nombre moyen d'habitants par siège pour l'ensemble de l'assemblée. Il a également indiquait qu'il pouvait admettre des écarts plus importants en raison de situations particulières, en particulier à l'étranger.

A partir des chiffres communiqués par le Gouvernement dans l'étude d'impact annexée au projet de loi, votre rapporteur a par conséquent procédé à une évaluation succincte globale des écarts démographiques dans la répartition des électeurs sénatoriaux que sont les conseillers et délégués consulaires, sans tenir compte des onze députés qui constituent une fraction numériquement marginale du collège électoral. Cette évaluation a été effectuée sur la base plus large des circonscriptions pour l'Assemblée des Français de l'étranger, dont la délimitation n'a pas été modifiée par votre commission.

Circonscriptions AFE

Population inscrite

Nombre de consulaires

Nombre de délégués consulaires

Nombre total d'électeurs sénatoriaux

Nombre d'inscrits par électeur sénatorial

Écart par rapport à la moyenne

Canada

78 647

17

4

21

3 745

18,32%

États-Unis

125 171

37

2

39

3 210

1,40%

Amérique latine

97 425

49

-

49

1 988

-37,18%

Europe du Nord

155 882

28

11

39

3 997

26,28%

Bénélux

167 064

19

13

32

5 221

64,95%

Péninsule ibérique

114 068

20

6

26

4 387

38,61%

Suisse

158 862

14

13

27

5 884

85,89%

Europe germanophone, Slovaquie et Slovénie

120 722

21

7

28

4 312

36,22%

Europe centrale et orientale

25 771

19

-

19

1 356

-57,15%

Europe du Sud et Caucase

75 871

22

2

24

3 161

-0,12%

Afrique du Nord

104 374

40

1

41

2 546

-19,57%

Afrique occidentale

54 700

26

-

26

2 104

-33,53%

Afrique centrale et orientale

81 474

38

-

38

2 144

-32,26%

Moyen-Orient et Asie centrale

55 100

23

1

24

2 296

72,54%

Israël et Territoires palestiniens

76 734

12

5

17

4 514

42,61%

Asie et Océanie

119 189

59

-

59

2 020

-36,17%

Total

1 611 054

444

65

509

3 165

0,00%

Il ressort de cette évaluation des écarts importants, souvent au-delà de la limite des 20 %, mais, compte tenu de l'élargissement significatif du collège électoral résultant du projet de loi, dans le contexte géographique particulier de l'étranger, votre commission estime que la répartition démographique des électeurs sénatoriaux prévue par le projet de loi améliore la situation actuelle, dans une proportion satisfaisante d'un point de vue constitutionnel. En tout état de cause, il sera loisible au législateur, le moment venu, d'améliorer la représentativité démographique du collège électoral des sénateurs représentant les Français établis hors de France, pour les asseoir sur des bases encore plus essentiellement démographiques.

Votre commission a adopté l'article 30 ainsi modifié .

Article 31 Conditions d'éligibilité, inéligibilités et incompatibilités des délégués consulaires

L'article 31 du projet de loi prévoit que les conditions d'éligibilité, les inéligibilités et les incompatibilités des délégués consulaires sont les mêmes que pour les conseillers consulaires.

Si les délégués supplémentaires n'ont pas vocation première à être des élus mais des électeurs sénatoriaux, ils seront cependant suivants de liste pour l'élection des conseillers consulaires et pourront être amenés à devenir conseiller consulaire dans l'éventualité où, pour pourvoir un siège vacant, le nombre de suivants de liste candidats au mandat de conseiller consulaire était insuffisant. Dans ces conditions, il est cohérent de prévoir que les délégués consulaires sont soumis aux mêmes conditions d'éligibilité, aux mêmes inéligibilités et aux mêmes incompatibilités que les conseillers consulaires. Celles-ci étaient déterminées initialement par l'article 8 du projet de loi et le sont désormais par l'article 29 quinquies .

Votre commission a adopté l'article 31 sans modification .

Article 32 Répartition des sièges de délégués consulaires

L'article 32 du projet de loi prévoit que les sièges de délégués consulaires sont répartis entre les listes de candidats une fois que tous les sièges de conseillers consulaires ont été attribués, dans les mêmes conditions et dans l'ordre de chaque liste, en commençant par le premier candidat non élu conseiller consulaire.

Si cette disposition est logique dès lors que les délégués consulaires sont élus sur les mêmes listes que les conseillers consulaires, pour lesquels ils constituent des suivants, votre rapporteur fait observer que pourraient disposer de délégués consulaires des listes n'ayant pas de conseillers consulaires, dans des circonscriptions importantes notamment, du fait du mode de répartition des sièges à la plus forte moyenne sur une même liste. Cette situation qui sera sans doute relativement rare peut apparaître paradoxale. Pour autant, elle est la conséquence nécessaire de l'élection des conseillers consulaires et délégués consulaires sur une même liste, sauf à prévoir expressément que seules participent à la répartition des délégués consulaires les listes ayant déjà des conseillers consulaires.

Votre commission a adopté un amendement de portée rédactionnelle, supprimant une mention superflue, à l'initiative de son rapporteur.

Votre commission a adopté l'article 32 ainsi modifié .

Article 33 Conditions de remplacement des délégués consulaires

L'article 33 du projet de loi prévoit, en cas de remplacement d'un conseiller consulaire par un suivant de liste ayant la qualité de délégué consulaire, que le premier suivant de liste n'ayant pas la qualité de délégué consulaire devienne délégué consulaire. S'il n'est plus possible de procéder ainsi, des élections partielles sont organisées, dans les conditions déjà prévues par le projet de loi pour les conseillers consulaires.

Votre commission a adopté un amendement de coordination, sur la proposition de son rapporteur, pour tenir compte de la restructuration du texte.

Votre commission a adopté l'article 33 ainsi modifié .


* 51 En cas d'élection des seuls conseillers consulaires par scrutin de liste, l'article 9 du projet de loi prévoit un nombre de candidats égal au nombre de sièges augmenté de deux.

* 52 Circonscriptions de Genève, Londres et Bruxelles.

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