II. LA CONVENTION POSTALE UNIVERSELLE

Lors du Congrès qui s'est tenu à Genève en 2008, il a été procédé à la révision des Actes de l'Union postale universelle régissant les services postaux et notamment la Convention postale universelle. Un nouveau texte, destiné à remplacer l'ancienne convention, a été adopté, notamment pour répondre aux évolutions du secteur postal.

A. LES PRINCIPALES STIPULATIONS DE LA CONVENTION

Telle que modifiée en 2008, la Convention postale universelle se compose de 37 articles et d'un protocole final.

L' article 1 er précise certaines notions et harmonise les règles de l'Union postale universelle avec celles d'autres organisations internationales (colis, dépêches mal acheminées, envois mal dirigés, opérateur désigné, petit paquet) pour s'assurer que toutes les parties comprennent de la même manière les dispositions de l'Union postale universelle et pour garantir la validité juridique de ces termes dans un environnement postal qui évolue rapidement.

L' article 4 est relatif à la liberté de transit. Ce principe s'accompagne de l'obligation pour les Pays membres de s'assurer que leurs opérateurs désignés acheminent par les voies les plus rapides et les moyens les plus sûrs les envois qui leur sont livrés par un autre opérateur désigné y compris maintenant les envois ou les dépêches mal dirigés.

L' article 8 « Timbre-poste » énonce les principes essentiels d'émission et de mise en circulation des timbres-poste. Cet article a été remanié afin de mettre en exergue le droit souverain de chaque pays membre de décider de la façon dont les timbres- poste sont émis et administrés sur son territoire.

Les stipulations de la deuxième partie : « Règles applicables à la poste aux lettres et aux colis postaux » portent notamment sur les services offerts ( articles 12, 13 et 14 ) ainsi que sur les objets qu'il est interdit d'insérer dans des envois postaux.

Il convient de noter, à ce titre, que la France a notamment obtenu que les objets contrefaits et piratés soient ajoutés à la liste des envois non admis ( article 15 ). Cette disposition vise à réduire autant que possible la circulation de ces objets par la voie postale et à contribuer ainsi à protéger la propriété et le patrimoine intellectuels et créatifs des pays membres.

La deuxième partie porte sur la réglementation applicable aux matières radioactives et aux substances infectieuses ( article 16 ), le contrôle douanier ( article 18 ), les normes et objectifs en matière de qualité de service ( article 20 ), les règles relatives aux questions de responsabilité, et des dispositions particulières à la poste aux lettres visant à réglementer le repostage ( article 26 ) ainsi que sur les réclamations ( article 17 ). La nouvelle convention a été l'occasion de préciser que seules les réclamations concernant les colis et les envois recommandés, avec valeur déclarée et à livraison attestée, peuvent être acceptées. Cette décision se justifie par le fait qu'il n'y a pas de suivi des envois ordinaires. En outre, les réclamations doivent être transmises par les moyens les plus rapides (voie prioritaire, service postal express EMS ou moyens électroniques) pour permettre à l'opérateur postal de destination d'enquêter rapidement et pouvoir apporter une réponse au client dans les meilleurs délais.

Telle que modifiée en 2008, la Convention postale universelle distingue les expressions « pays membre » ou « opérateur désigné » selon que la disposition apparaît du ressort des gouvernements ou du ressort de leurs opérateurs en charge des questions d'exploitation.

On peut relever que la notion d'« opérateur désigné » est définie à l'article 1bis de la Constitution de l'UPU, telle qu'adoptée par le Congrès qui s'est tenu à Genève du 23 juillet au 12 août 2008. Cette définition clarifie le dispositif en identifiant l'entité en charge des obligations d'exploitation découlant des Actes de l'UPU 3 ( * ) .

Cette distinction est apparue nécessaire pour clarifier la Convention postale universelle et bien délimiter les questions d'ordre stratégique et réglementaire de celles d'exploitation. La très grande majorité des pays membres de l'UPU ont créé des entités autonomes sur le plan juridique et fonctionnel chargées de l'exploitation des services postaux. Dans certains cas, des combinaisons plus complexes ont été retenues pour prendre en compte la diversité des situations qui existent dans les pays membres.

Cette présentation n'entraîne pas de nouvelles responsabilités pour les pays membres mais permet de mieux discerner les dispositions de nature stratégique et réglementaire des dispositions traitant de questions d'exploitation.

En effet, la responsabilité de l'Etat est de veiller à ce que l'opérateur désigné remplisse bien les obligations découlant du traité, notamment en offrant tous les services obligatoires dans les conditions prescrites dans les Actes de l'Union postale universelle. En cas de défaillance de ce dernier, il serait de sa responsabilité de désigner un autre opérateur pour faire assurer la prestation. En revanche, l'opérateur désigné est responsable de tous les aspects liés au bon fonctionnement des services postaux internationaux, tant vis-à-vis de ses clients que vis-à-vis des opérateurs désignés des autres pays membres. Ceci ressort des principaux changements apportés aux articles 21, 22 et 23 . Enfin, dans l'intérêt des clients, des autres opérateurs désignés et de la qualité du service en général, le droit de faire des réserves concernant l'article 21 a été limité.

La troisième partie relative à la rémunération ( article 27 et suivants) est très importante pour les opérateurs désignés car elle régit leurs relations financières. Les frais terminaux sont la rémunération que la poste expéditrice paie à la poste de destination pour la distribution de son courrier.

Compte tenu de l'extrême diversité des cent quatre-vingt-onze pays membres de l'Union postale universelle, le système actuel, même s'il est amélioré au fil des congrès, n'est pas totalement basé sur les coûts, car il résulte d'un compromis négocié entre opérateurs et validé par les Etats. Pour l'application du système des frais terminaux, les pays membres sont maintenant classés en cinq groupes. Les pays membres sont assujettis selon qu'ils sont placés dans l'un ou l'autre de ces groupes du système dit « système cible » ou du « système transitoire ». Le premier devrait être applicable à tous les pays membres à une échéance qui reste à déterminer, il repose sur les coûts de traitement des envois et sur la qualité de service. Le second consiste en une rémunération forfaitaire au kilogramme. Ce système transitoire devrait disparaître au profit du système cible qui devrait être le système appliqué par tous les pays membres. Ces modalités nouvelles ont permis de faire entrer dans le système cible un plus grand nombre de pays, notamment les pays émergents.

Avec les nouvelles modalités fixées par la convention, la rémunération des opérateurs notamment des pays membres industrialisés qui génèrent la grande majorité des flux devrait être améliorée.

B. LES EFFETS LIMITÉS EN DROIT FRANÇAIS

Au regard du code des postes et des communications électroniques et de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom, les stipulations de la Convention postale universelle, telle qu'adoptée lors du Congrès de 2008, ne soulèvent pas d'incompatibilité juridique.

Le code des postes et des communications électroniques, dans sa partie « postes » est issu de la transposition de la directive postale 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 modifiée concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité de service, modifiée par la directive du 10 juin 2002 qui traite uniquement du service universel postal au sens du droit communautaire.

Ainsi, le code fixe notamment les principes et règles du service universel qui concerne : les envois de correspondance nationale et transfrontière jusqu'à 2 kg, les colis nationaux et transfrontières jusqu'à 20 kg, les envois recommandés et les envois à valeur déclarée. De même, le code fixe les obligations de La Poste, en tant que prestataire de ce service universel, les règles concernant la régulation des activités postales et le régime de responsabilité applicable aux prestataires de services postaux vis-à-vis des utilisateurs dans le champ du service universel.

En revanche, le code ne traite pas des modalités d'exploitation des services postaux, ni des modalités d'échanges entre prestataires postaux pour les envois internationaux, qui sont du ressort du « Traité ». Sur ces sujets, la Convention postale universelle est complémentaire aux dispositions du code des postes et des communications électroniques. Lorsqu'il s'agit des modalités relatives au traitement des réclamations et de la responsabilité vis-à-vis des utilisateurs, les dispositions de la Convention postale universelle fixent un cadre qui laisse toute souplesse aux Pays membres pour compléter ce dispositif au regard de leur propre législation.

Au regard de la loi du 2 juillet 1990, l'article 8 de la Convention postale universelle relative au timbre-poste ne soulève pas de difficulté puisque l'article 16 de cette loi du 2 juillet confère à La Poste le monopole d'émission des timbres-poste qui doivent porter la mention « France » 4 ( * ) .

Il en va de même concernant les dispositions de la loi n° 2010-123 du 9 février 2010 relative à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales, qui a transposé en droit français la troisième directive postale 5 ( * ) , et qui a modifié le statut de La Poste en société anonyme, dont le capital est détenu par l'Etat ou par d'autres personnes morales publiques.

Les règles relatives au service postal international telles que fixées par la Convention postale universelle ne s'appliquent actuellement qu'aux opérateurs désignés par les pays membres pour remplir les obligations découlant du Traité relatif à la création d'une Union générale des postes du 9 octobre 1874.

Pour la France, La Poste est l'opérateur désigné. A ce titre, La Poste « met en oeuvre, pour ce qui la concerne, les engagements internationaux pris par l'Etat, dans le cadre de l'Union Postale Universelle. » 6 ( * ) .

La Convention postale universelle n'a en conséquence aucun impact sur les autres opérateurs postaux installés sur le territoire national.

La Poste continuera d'assurer le service postal international entrant et sortant en fonction des obligations de la Convention postale universelle.

Ainsi, La Poste est tenue d'offrir aux utilisateurs, entreprises et particuliers, les services de base définis à l'article 12 de la Convention postale universelle : les envois de la poste aux lettres, classifiés selon la rapidité de leur traitement (envois prioritaires et non prioritaires jusqu'à 2 kilogrammes) ou selon leur contenu (lettres, cartes postales, imprimés et petits paquets jusqu'à 2 kilogrammes, cécogrammes jusqu'à 7 kilogrammes, sacs spéciaux contenant des journaux, des écrits périodiques, des livres et des documents imprimés semblables jusqu'à 30 kilogrammes). Ces services de base sont obligatoires pour tous les pays membres de l'UPU.

La Poste est également tenue d'assurer l'admission, le traitement, le transport et la distribution des colis postaux jusqu'à 20 kilogrammes car la France était partie à l'Arrangement concernant les colis postaux avant le 1 er janvier 2001. Le Congrès de Pékin (1999) a en effet décidé de fusionner les dispositions générales de cet Arrangement avec la Convention postale universelle et de renvoyer les dispositions de nature opérationnelle vers un Règlement des colis postaux. Ces dispositions sont entrées en vigueur au 1 er janvier 2001. Les Pays membres qui n'étaient pas parties à l'Arrangement sur les colis postaux avant cette date ne sont pas tenus de fournir ce service selon les règles de l'UPU.

La Poste est également tenue d'offrir les services supplémentaires de l'article 13 qui sont obligatoires : service de recommandation, service de retour des correspondances commerciales-réponses internationales/CCRI, échange des coupons réponses internationaux, avis de réception pour les envois arrivants.

En revanche, les services définis à l'article 14 sont facultatifs. Il s'agit des services de courrier électronique, du service postal express EMS, du service de logistique intégrée et du cachet postal de certification électronique. La Poste n'a pas d'obligations au titre de ces services facultatifs.

Les utilisateurs devraient bénéficier en fonction des dispositions de la Convention postale universelle, telle qu'adoptée en 2008, de services postaux internationaux d'une qualité de service améliorée par :

- l'obligation faite aux opérateurs désignés d'acheminer les envois reçus selon les mêmes moyens qu'ils emploient pour leurs propres envois y compris pour les envois mal dirigés et aux dépêches mal acheminées. Ces deux types d'envois sont maintenant parfaitement définis ;

- le droit renforcé donné aux utilisateurs de déposer une réclamation qui concerne aussi bien les colis que les envois recommandés, avec valeur déclarée et à livraison attestée. Le nouveau dispositif prévoit que les réclamations doivent être transmises par les moyens les plus rapides, notamment par des moyens électroniques pour permettre à l'opérateur postal de destination d'enquêter rapidement et pouvoir apporter une réponse au client dans les meilleurs délais ;

- une responsabilité des opérateurs postaux clairement définie; elle concerne les envois recommandés, les envois avec valeur déclarée et des colis ordinaires ;

- la restitution à l'expéditeur des taxes perçues en cas de renvoi d'un colis, d'un renvoi de la poste aux lettres recommandé ou à valeur déclarée.

Les stipulations de la Convention postale universelle, telle qu'adoptée en 2008, n'auront pas d'incidence sur les tarifs des services postaux internationaux proposés. Ces tarifs sont fixés par La Poste et soumis selon le cas à la procédure fixée à l'article L. 5-2- 3° du code des postes et des communications électroniques dès lors que les services postaux internationaux portent sur des envois de correspondance jusqu' à 2 kg et sur les colis jusqu' à 20 kg.

La Convention postale universelle donne aux pays membres la possibilité de refuser ou de différer l'application des modifications de la Convention postale universelle qui susciteraient des difficultés en fonction de leur droit national.

Lors du Congrès de 2008, la France, comme 29 autres pays membres, a émis une réserve uniquement sur l'article 26 de la Convention concernant le dépôt à l'étranger des envois de la poste aux lettres. En effet, cet article 26 prévoit qu'un opérateur désigné contrairement aux obligations découlant du traité de l'UPU peut refuser le traitement des envois de la poste aux lettres que des expéditeurs résidant sur le territoire du pays membre déposent à l'étranger en vue de bénéficier de conditions tarifaires plus avantageuses. Cet article fixe le droit à rémunération de l'opérateur s'il accepte cependant de traiter ces envois de la poste aux lettres. Il peut demander une rémunération calculée soit en fonction des taux appliqués dans le système cible retenu pour les pays industrialisés, soit sur la base de 80 % du tarif intérieur applicable à des envois équivalents.

Certains pays membres ne souhaitent pas appliquer ces modalités de rémunération qui peuvent être selon les cas pénalisantes pour l'opérateur du pays sur le territoire duquel les envois de la poste aux lettres ont été déposés. Aussi, ces pays membres ont précisé par le biais d'une réserve qu'ils limiteraient le paiement en exigeant une rémunération fixée comme pour les envois en nombre. La France, comme vingt-neuf autres pays membres, a indiqué clairement qu'elle appliquerait dans son intégralité l'article 26 vis-à-vis de tous les pays membres.


* 3 L'expression « opérateur désigné » est définie comme « toute entité gouvernementale ou non gouvernementale désignée officiellement par le pays membre pour assurer l'exploitation des services postaux et remplir les obligations y relatives découlant des Actes de l'Union sur son territoire »

* 4 article L.3-3 du code des postes et des communications électroniques

* 5 Directive 2008/6/CE du 20 février 2008 modifiant la directive 97/67/CE en ce qui concerne l'achèvement du marché intérieur des services postaux de la Communauté

* 6 Article R.1-1-19 du code des postes et des communications électroniques

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