3. Un dispositif encadré

Ambitieux dans son champ d'application, le dispositif proposé reste toutefois fermement encadré. Si le texte initial posait trois gardes fous permettant d'assurer que ce déblocage exceptionnel de l'épargne salariale ne déséquilibre ni le financement des entreprises ni l'épargne longue destinée au financement des retraites, l'Assemblée nationale a parachevé le dispositif en « fléchant » les sommes débloqués vers la consommation.

a) Un déblocage conditionné par la signature d'un accord collectif

Le premier garde-fou proposé par le texte vise à éviter de déstabiliser les fonds propres des entreprises et leurs investissements en encadrant le déblocage des sommes :

- affectées à l'acquisition de titres de l'entreprise ou d'une entreprise qui lui est liée dans le cadre de la mise en place d'une participation ou d'un intéressement au sein d'un groupe d'entreprise ;

- affectées à l'acquisition de parts de FCPE d'actionnariat salarié d'une part, ou d'actions de société d'investissement à capital variable d'actionnariat salarié (SICAVAS) d'autre part ;

- placées dans un fonds que l'entreprise consacre à des investissements.

L'accord collectif pourra, dans ce cas, limiter le versement ou la délivrance de certaines catégories de droits aux salariés à une partie seulement des avoirs en cause.

b) L'exclusion des sommes affectées aux PERCO

La deuxième limite posée par la proposition de loi tend à préserver l'épargne retraite en excluant du dispositif les sommes de la participation ou de l'intéressement versées dans un plan d'épargne pour la retraite collectif (PERCO).

Un tel choix est d'autant plus judicieux que, selon l'Association française de la gestion financière, près de la moitié des sommes affectées aux PERCO (48 % plus précisément) proviendraient de la participation et de l'intéressement.

ORIGINE DES SOMMES AFFECTÉES AUX PERCO AU 30 / 01 / 2012

Origine des sommes

(%)

Abondement de l'entreprise

37 %

Participation

28 %

Intéressement

20 %

Versements volontaires des salariés

15 %

Une telle exclusion permet ainsi de « sanctuariser » l'encours d'un outil de préparation à la retraite très apprécié des entreprises et de leurs salariés, dont le nombre de bénéficiaires a augmenté de 35 % entre juin 2011 et juin 2012 en dépit d'une conjoncture difficile.

c) L'exclusion des sommes investies dans des « fonds solidaires »

Le dernier garde-fou prévu par le texte initial de la proposition de loi vise à protéger le financement des entreprises développant des activités à forte utilité sociale ou environnementale en excluant du régime de déblocage les sommes placées dans des « fonds solidaires ».

Il convient de rappeler que l'intérêt pour ces fonds, investis à hauteur de 5 à 10 % dans des organismes contribuant à créer des emplois pour des chômeurs de longue durée, à construire des logements pour les plus pauvres, à favoriser des activités respectueuses de l'environnement ou des projets de solidarité internationale 11 ( * ) , a connu une spectaculaire progression depuis l'adoption de la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008.

En obligeant les entreprises proposant un plan d'épargne d'entreprises (PEE) à offrir aux salariés un fonds solidaire 12 ( * ) parmi les supports de placement proposés, ce texte a entrainé une multiplication par quatre d'un encours qui représente aujourd'hui plus de 2,6 milliards d'euros.

d) Le « fléchage » des sommes débloquées vers la consommation de biens et de services

Les précautions prévues par le texte initial ont été considérablement renforcées par nos collègues députés à l'occasion de l'examen de la proposition de loi par l'Assemblée nationale.

À l'initiative du rapporteur de la commission des affaires sociales, M. Richard Ferrand, l'Assemblée a en effet décidé de conditionner expressément le déblocage des sommes issues de la participation et de l'intéressement à l'achat d'un ou plusieurs biens ou à la fourniture d'une ou plusieurs prestations de services.

Ce dispositif novateur devrait dissuader les salariés de redéposer les sommes débloquées sur d'autres supports d'épargne. Selon l'INSEE, 70 % des sommes débloquées en 2004 auraient ainsi été immédiatement transférées vers des supports plus liquides ou plus rémunérateurs, réduisant drastiquement l'effet de la mesure sur le niveau de consommation des ménages.

Afin de garantir l'effectivité de ce dispositif, l'Assemblée a par ailleurs définit une procédure de contrôle allégée imposant au salarié de tenir à la disposition de l'administration les pièces justificatives attestant de l'usage des sommes débloquées.

À la fois simple et dissuasif, ce mécanisme devrait garantir l'efficacité de la mesure.


* 11 Les principaux bénéficiaires de l'épargne dégagée par ces fonds sont des organismes tels qu'Habitat et Humanisme (logement très social), Adie (microcrédit) ou France active (insertion par l'emploi).

* 12 Jusqu'à l'adoption de la loi du 4 aout 2008, seul le plan d'épargne retraite collectif (PERCO) devait proposer un fonds solidaire.

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