C. LA MESURE DE LA PERFORMANCE : UN BILAN MITIGÉ

1. Une démarche de performance au coeur de la réforme des finances publiques introduite par la LOLF

Dans un rapport d'information déposé le 2 mars 2005 92 ( * ) , notre collègue Jean Arthuis, alors président de notre commission des finances, avait souligné l'apport que représentaient les objectifs et indicateurs de performances à une nouvelle gestion des finances publiques de l'Etat orientée vers les moyens et les résultats :

« Cette culture de la performance devra donc conduire à un renforcement sensible des conditions d'examen du projet de loi de règlement par le Parlement : exercice aujourd'hui essentiellement comptable, la loi de règlement doit devenir un acte majeur de la vie parlementaire en invitant chaque année à un audit des finances publiques sur la base de comptes-rendus précis de l'exécution. La réalisation de la performance prescrite par le Parlement en loi de finances initiale devra être vérifiée en loi de règlement. En d'autres termes, le contrôle parlementaire est intégré dans la procédure budgétaire et devient un « maillon » indispensable de celle-ci. Les informations issues des objectifs et indicateurs de performance sont destinées à compléter utilement celles traditionnellement données au Parlement, notamment dans les « bleus » budgétaires. La mesure de la performance complètera l'information ; elle ne remplacera pas cette dernière ».

Le travail mené avait permis une harmonisation des objectifs et indicateurs de performances associés à des programmes poursuivant des finalités comparables 93 ( * ) , tout en soulignant la nécessité de couvrir l'ensemble du champ des dépenses publiques sur la base d'informations suffisamment stables pour permettre une analyse dans la durée.

L'analyse des objectifs et indicateurs de performances, à travers le double prisme de leur pertinence et des cibles atteintes ou non, relève du champ de compétence de chaque rapporteur spécial. Huit ans après le travail initial qui avait été mené sur les objectifs et indicateurs de performances en 2005, un premier bilan peut être dressé : si les indicateurs d'activité ou de résultat ont pratiquement disparu, le lien entre les résultats atteints et l'allocation des moyens reste encore largement à construire .

2. L'analyse des objectifs et indicateurs de performances en exécution 2012

Outre les aspects méthodologiques (stabiliser les objectifs et les indicateurs, fixer des cibles reflétant des objectifs dans la durée), des pistes d'amélioration demeurent en ce qui concerne le nombre des objectifs et des indicateurs et leur sélection.

a) Justifier les suppressions d'indicateurs et toute réduction d'une cible chiffrée par rapport aux exercices antérieurs

Dans son analyse de l'exécution 2012, la Cour des comptes a renouvelé sa recommandation visant à « justifier dans les projets et les rapports annuels de performances toute suppression d'un indicateur ou toute réduction d'une cible chiffrée par rapport aux exercices antérieurs ». Ces informations permettent en effet une analyse des changements intervenant d'une année sur l'autre.

Dans ses réponses au questionnaire de votre rapporteur général, le Gouvernement a répondu que les suppressions d'objectifs et d'indicateurs devaient en principe toujours figurer dans les commentaires des projets et rapports annuels de performances (PAP, RAP). Quant à l'évolution des cibles, la maquette de présentation budgétaire sera adaptée , à compter du dépôt des PAP annexés au projet de loi de finances pour 2014 :

« Sur la justification des évolutions de cible et de prévision, la direction du budget a souhaité pour le PAP 2014 valoriser davantage les éléments d'analyse produits par chaque responsable de programme. La maquette Farandole a ainsi été modifiée en réservant sous chaque indicateur, en dehors des précisions méthodologiques présentant la source de données et le mode de calcul de l'indicateur, une zone de texte spécifiquement réservée à la « présentation des prévisions et de la cible ». Cette partie permettra de présenter de manière claire la justification des évolutions à la hausse ou à la baisse des résultats attendus ainsi que les leviers d'action mobilisés par le responsable de programme ».

b) Mieux cibler et sélectionner les objectifs et indicateurs de performances

Les 2 380 indicateurs et sous-indicateurs de performances , s'ils offrent une approche exhaustive de la performance de l'ensemble des missions et programmes, s'avèrent cependant trop nombreux pour permettre une lecture et un pilotage directs de l'action publique .

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution des indicateurs de performances figurant dans les projets annuels de performances annexés aux projets de loi de finances initiale entre 2007 et 2012 . Il fait apparaître, au cours de cette période, une diminution du nombre d'objectifs (de 634 à 490) et d'indicateurs (de 1 295 à 1 012), principalement jusqu'en 2010 : le nombre d'indicateurs supprimés a diminué de moitié entre 2010 et 2011 (de 247 à 122) puis à nouveau entre 2011 et 2012 (de 122 à 62), témoignant d'une stabilisation progressive du dispositif de performance . De même, la proportion d'indicateurs modifiés (21 % en 2007) a diminué fortement en 2011 et 2012 (respectivement, 7 % et 6 %), tandis que la proportion d'indicateurs nouveaux a également diminué en 2012 (7 %).

Evolution des indicateurs de performances figurant dans les PAP 2007 à 2012

Source : ministère du budget

La sélection d'un petit nombre d'objectifs et indicateurs de performances, particulièrement significatifs et « élevés » au niveau de la mission, a constitué un progrès.

Par exemple, pour la mission « Défense », la capacité de projection de l'armée de terre est l'une des composantes de l'indicateur « Capacité des armées à intervenir dans une situation mettant en jeu la sécurité de la France », retenu comme l'un des quatre « indicateurs principaux » de la mission « Défense ». L'abaissement de la cible de cet indicateur, consistant à pouvoir projeter 30 000 combattants pendant un an sans relève après un préavis de six mois, a fait débat et permis de mesurer la capacité de la France à intervenir sur des théâtres d'opération extérieure (OPEX). Il est donc apparu adapté à un débat sur les moyens et les finalités de la politique de défense dans un contexte d'élaboration d'un nouveau Livre blanc de la défense.

La démarche d' harmonisation des objectifs et indicateurs transversaux à l'ensemble des missions, engagée depuis plusieurs années, doit être encouragée : en comparant les structures, elle les incite à s'inspirer des meilleures pratiques pour s'aligner sur les plus performants.


* 92 Jean Arthuis, « LOLF : culte des indicateurs ou culture de la performance ? », rapport n° 220 (2004-2005), déposé au nom de la commission des finances.

* 93 Un exemple significatif était que, pour mesurer l'efficacité de la politique de lutte contre l'insécurité routière, la police nationale et la gendarmerie poursuivaient initialement des objectifs opposés quant à l'évolution du nombre de contrôles positifs des tests d'alcoolémie : dans un cas, la diminution du nombre de tests signifiait une efficacité de la prévention ; dans l'autre cas, elle traduisait un succès d'une politique davantage tournée vers la répression des infractions.

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