CHAPITRE IV - DISPOSITIONS RELATIVES AU DROIT DE LA PREUVE

Article 4 (art. L. 332-1, L. 332-1-1 [nouveau], L. 332-4, L. 343-1, L. 343-1-1 [nouveau], L. 521-4, L. 521-4-1 [nouveau], L. 615-5, L. 615-5-1-1 [nouveau], L. 623-27-1, L. 623-27-1-1 [nouveau], L. 716-7, L. 716-7-1 A [nouveau], L. 722-4 et L. 722-4-1 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle) - Harmonisation de la procédure de saisie-contrefaçon et des procédures connexes pour tous les droits de propriété intellectuelle

L'article 4 de la proposition de loi vise à harmoniser la procédure de saisie-contrefaçon, qui consiste à collecter des preuves de contrefaçon sous forme de saisie descriptive ou de saisie réelle, pour l'ensemble des droits de propriété intellectuelle, en conformité avec le droit communautaire. À cette fin, il aligne la procédure de saisie-contrefaçon en matière de propriété littéraire et artistique 7 ( * ) sur celle suivie pour les autres droits de propriété intellectuelle et il précise que la saisie-contrefaçon des matériels utilisés pour contrefaire peut être une saisie descriptive plutôt qu'une saisie réelle. En outre, il crée une procédure connexe permettant au juge d'ordonner toutes mesures d'instruction visant à collecter des preuves, même en l'absence de saisie-contrefaçon.

Cet article reprend sans modification les articles 17 A à 29 du texte adopté par votre commission le 12 juillet 2011 sur la précédente proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon, à l'exception de son article 17 bis ., repris à l'article 5 de la présente proposition de loi.

La procédure de saisie-contrefaçon a été saluée par les personnes entendues par votre rapporteur en raison de son efficacité comme mode de preuve, au point d'avoir été reprise par le droit communautaire.

Le code de la propriété intellectuelle prévoit que « la contrefaçon peut être prouvée par tous moyens ». La procédure de saisie-contrefaçon consiste à saisir le juge civil statuant en référé afin qu'il autorise, par ordonnance, un huissier, le cas échéant assisté d'experts 8 ( * ) , à procéder « soit à la description détaillée, avec ou sans prélèvement d'échantillons, soit à la saisie réelle des objets prétendus contrefaisants ainsi que de tout document s'y rapportant ».

Ainsi, la saisie-contrefaçon comporte soit une saisie descriptive, le cas échéant avec prélèvement d'échantillons de marchandises, soit une saisie réelle de l'ensemble des marchandises. En pratique, la saisie-contrefaçon est le plus souvent une saisie descriptive. Il s'agit ainsi d'un mode de preuve très efficace, reposant sur l'intervention des huissiers de justice.

Entendue par votre rapporteur, la chambre nationale des huissiers de justice a fait état de jurisprudences divergentes entre cours d'appel sur le fait de savoir s'il était possible de procéder à une saisie-contrefaçon portant sur des documents se rapportant à des objets prétendus contrefaisants en l'absence de tels objets. Cette pratique des huissiers auparavant admise, utile dans la perspective d'une action en contrefaçon, semblerait remise en cause. Votre rapporteur souhaite approfondir cette question avant l'examen de la présente proposition de loi en séance publique, étant entendu que la Cour de cassation n'a jamais eu l'occasion de se prononcer.

La possibilité de procéder à une saisie descriptive, au lieu d'une saisie réelle, des matériels et instruments utilisés pour produire ou distribuer des biens de contrefaçon correspond à une des recommandations formulées dans le rapport d'information précité de 2011. Il en est de même pour la faculté, pour le juge, d'ordonner la production d'éléments de preuve détenus par les parties indépendamment de la saisie-contrefaçon.

Sur ce second point toutefois, votre rapporteur relève que la faculté pour le juge d'ordonner toutes mesures d'instruction même lorsque n'a pas été ordonnée une saisie-contrefaçon s'exerce d'office mais pas à la demande de la partie intéressée. Aussi, sur la proposition de son rapporteur, votre commission a-t-elle adopté un amendement prévoyant que ces mesures de nature à collecter des éléments de preuve, autres que la saisie-contrefaçon, puissent aussi être demandées par toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon, dans un souci là encore d'efficacité des procédures.

Votre commission a adopté l'article 4 ainsi modifié .

Article 5 (art. L. 332-3, L. 521-4, L. 615-5, L. 623-27-1, L. 716-7 et L. 722-4 du code de la propriété intellectuelle) - Remplacement de l'annulation de la saisie-contrefaçon par la mainlevée en l'absence d'action civile ou pénale du saisissant

L'article 5 de la proposition de loi vise à modifier les conséquences sur la saisie-contrefaçon de l'absence d'action civile ou pénale introduite par le demandeur de cette saisie dans un certain délai fixé par décret 9 ( * ) , tout en harmonisant les dispositions relatives à la propriété littéraire et artistiques avec celles relatives à la propriété industrielle.

Cet article reprend sans modification l'article 17 bis du texte adopté par votre commission le 12 juillet 2011 sur la précédente proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon.

Actuellement, en matière de propriété industrielle, à défaut pour le demandeur de s'être pourvu au fond, par la voie civile ou pénale, dans le délai indiqué plus haut, l'intégralité de la saisie, y compris la description, est annulée à la demande du saisi, qui n'a pas à motiver la demande. En matière de propriété littéraire et artistique, l'annulation n'est qu'une faculté.

Aussi le présent article vise-t-il à harmoniser les deux régimes, tout en limitant les effets de l'absence d'action du demandeur à la seule saisie réelle, en remplaçant l'annulation de saisie-contrefaçon par une mainlevée. De la sorte, la saisie descriptive réalisée par l'huissier demeure valide et peut être utilement produite, le cas échéant, à l'occasion d'une autre action, ce qui peut rendre plus efficaces les actions ultérieurement engagées en matière de contrefaçon. La saisie descriptive peut être accompagnée d'échantillons, qui semblent devoir échapper également à la mainlevée.

La rédaction retenue par la présente proposition de loi a cependant suscité de la part de diverses personnes entendues par votre rapporteur des difficultés d'interprétation, s'agissant des effets de la mainlevée sur la saisie descriptive. À l'évidence, la mainlevée ne peut concerner que des biens et donc la saisie réelle. À l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement destiné à préciser les effets réels de la mainlevée, tout en approuvant cette disposition utile pour les entreprises victimes de contrefaçon qui s'engagent dans des actions civiles.

Votre commission a adopté l'article 5 ainsi modifié .


* 7 Une des spécificités de la saisie-contrefaçon en matière de propriété littéraire et artistique, appelée également « saisie-commissaire », réside dans le fait qu'elle ne fait pas intervenir le juge, ce qui peut constituer une fragilité constitutionnelle et plaide pour son alignement sur le droit commun.

* 8 Il est généralement fait appel à des conseils en propriété industrielle en matière d'atteinte à un droit de propriété industrielle.

* 9 Ce délai est de 20 jours ouvrables ou 31 jours civils, le plus long des deux délais étant retenu.

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