II. CETTE PROPOSITION DE LOI VISE À COMBLER LES LACUNES DU DROIT ACTUEL AFIN DE GARANTIR L'ÉQUITÉ ENTRE TOUTES LES GÉNÉRATIONS DU FEU

A. ETENDRE LA RECONNAISSANCE DE LA NATION À L'ENSEMBLE DE LA TROISIÈME GÉNÉRATION DU FEU

La carte du combattant n'est aujourd'hui attribuée qu'aux personnels militaires ou civils assimilés (principalement des forces de maintien de l'ordre comme les CRS) dont le séjour en Algérie s'est achevé au plus tard le 2 juillet 1962, date de l'indépendance du pays qui fut retenue comme borne temporelle par la loi du 9 décembre 1974. Ces dispositions ne permettent toutefois pas de prendre en compte l'ensemble des soldats, appelés comme militaires de carrière, qui ont servi en Algérie et ont été exposés au danger.

En effet, 305 000 hommes se trouvaient encore en Algérie à la date de l'indépendance. Les accords d'Evian prévoyaient le maintien sur place, pour une durée de deux ans, d'un important contingent : encore 131 000 hommes en janvier 1963 et 50 000 un an plus tard, avant un retrait qui eut lieu en juillet 1964. Des troupes françaises étaient encore présentes en Algérie après cette date mais dans un autre cadre et n'entrent donc pas dans le champ de cette proposition de loi. Ainsi, le centre saharien d'expérimentations militaires et le centre d'expérimentations militaires des Oasis, situés dans le Sahara et où eurent lieu les premiers essais nucléaires français (quatre essais atmosphériques et treize essais souterrains), ne furent évacués qu'en 1967. La base navale de Mers el-Kébir, concédée pour 15 ans par les accords d'Evian, fut finalement abandonnée le 1 er février 1968.

Durant cette période, plusieurs dizaines de soldats français sont décédés et ont été reconnus morts pour la France. Selon les bilans mensuels de l'état-major interarmées, qui ne concernent que l'armée de terre et la gendarmerie, vingt-huit décès consécutifs à des combats ou à des attentats eurent lieu entre juillet 1962 et avril 1964 24 ( * ) . Leurs compagnons d'armes ne peuvent pas aujourd'hui bénéficier de la carte du combattant. Ils peuvent uniquement prétendre depuis 2001 25 ( * ) au TRN, distinction qui n'ouvre pas les mêmes droits et n'a pas la même portée symbolique.

C'est la raison pour laquelle l'article 1 er de la proposition de loi étend jusqu'au 2 juillet 1964 la période de calcul des 120 jours de présence rendant éligible à la carte du combattant.

Le Gouvernement propose, dans le projet de loi de finances pour 2014 (article 62), une mesure intermédiaire : la carte « à cheval », soit l'attribution de la carte du combattant aux personnes dont le déploiement en Algérie a commencé avant le 2 juillet 1962 mais s'est achevé après cette date. Aux yeux de votre rapporteur, si elle satisfait une partie des demandes légitimes du monde combattant sur ce point, elle ne les prend pas en compte dans leur intégralité comme le fait l'article 1 er de cette proposition de loi.

Il ne s'agit pas d'une demande inédite, mais plutôt d'un souhait récurrent formulé par des parlementaires de toutes les sensibilités politiques. Dans notre assemblée, au moins quatre propositions de loi ont été déposées ces dernières années pour permettre l'attribution de la carte du combattant aux anciens combattants ayant servi en Algérie jusqu'au 1 er juillet 1964, dont une cosignée par l'ensemble des membres du groupe socialiste :

- la proposition de loi n° 223 (2007-2008) de notre ancien collègue Claude Biwer visant à permettre l'attribution de la carte du combattant aux anciens combattants ayant quatre mois de présence en Algérie avant le 1 er juillet 1964, déposée le 29 février 2008 ;

- la proposition de loi n° 282 (2007-2008) de Marcel-Pierre Cléach et plusieurs de ses collègues, pour l'attribution de la carte du combattant aux anciens combattants de l'armée française ayant au moins quatre mois de présence en Algérie avant le 1 er juillet 1964, déposée le 15 avril 2008 ;

- la proposition de loi n° 294 (2007-2008) de Jean-Pierre Masseret et les membres du groupe socialiste, visant à attribuer la carte du combattant aux soldats engagés en Algérie après les accords d'Évian du 2 juillet 1962 jusqu'au 1 er juillet 1964, déposée le 17 avril 2008 ;

- la proposition de loi n° 755 (2011-2012) de Jean Louis Masson, visant à élargir les conditions d'attribution de la carte du combattant aux anciens combattants d'Algérie ou des opérations extérieures, déposée le 10 septembre 2012.

A l'Assemblée nationale, notre collègue député Christophe Guillloteau, rapporteur en février 2013 d'une proposition de loi identique à celle soumise à notre commission 26 ( * ) quoique plus récente, puisqu'enregistrée à la présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2012, avait recensé à cette date neuf autres propositions de loi ayant le même objet déposées depuis le début de la XIV e législature 27 ( * ) .


* 24 Source : Réponse à la question écrite n° 128527 (AN, XIII ème législature) publiée au JO le 24 avril 2012, p. 3166.

* 25 Et le décret n° 2001-362 du 25 avril 2001 modifiant l'article D. 266-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre.

* 26 Qui fut enregistrée à la présidence du Sénat le 16 juillet 2012.

* 27 Source : Christophe Guilloteau, rapport fait au nom de la commission de la défense et des forces armées sur la proposition de loi (n° 267) visant à élargir les conditions d'attribution de la carte du combattant aux anciens combattants de l'armée française totalisant au moins quatre mois de présence en Algérie avant le 1 er juillet 1964 ou en opérations extérieures, n° 714, XIV e législature, 12 février 2013, p. 14-15.

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