II. LES AUTRES PROGRAMMES DE LA MISSION

A. LE PROGRAMME 114 « APPELS EN GARANTIE DE L'ÉTAT »

208,4 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) sont demandés, pour 2014, au titre du programme 114 « Appels en garantie de l'Etat », soit une hausse de 0,5 million d'euros (0,2 %) par rapport à la LFI 2013. Le programme retrace la dépense budgétaire associée à l'ensemble des dispositifs pour lesquels l'Etat a octroyé sa garantie , qui se concentre à près de 70 % sur les dispositifs de garantie mis en oeuvre par la Compagnie française pour le commerce extérieur ou COFACE .

Les crédits du programme sont évaluatifs , dans la mesure où la survenue des dépenses dépend de la réalisation - par nature imprévisible - du risque couvert par la garantie .

1. Une augmentation du coût de la procédure d'assurance-prospection

Les crédits de l'action 4 « Développement international de l'économie française » augmentent de 0,6 % (+ 0,8 million d'euros à 138,4 millions d'euros). Ils permettent de couvrir les appels émis au titre des procédures de garantie à l'export gérées par la COFACE (assurance-crédit, assurance-prospection, garantie de change, garantie du risque économique, garanties de taux d'intérêts et garanties du risque exportateur), ainsi que le dispositif de stabilisation des taux d'intérêt géré par Natixis.

Cette stabilité traduit principalement les évolutions suivantes :

- une baisse des crédits de la procédure de garantie du risque exportateur 8 ( * ) , essentiellement destinée aux PME, qui passent de 30 millions d'euros en LFI 2013 à 20 millions d'euros dans le PLF 2014, correspondant à l'anticipation d'une diminution du nombre de sinistres qui pourraient se réaliser au cours de l'exercice ;

- une augmentation du coût de la procédure d'assurance-prospection , estimé à 110 millions d'euros en 2014 contre 99 millions d'euros en LFI 2013, sous l'effet de la mise en place en 2012, pour la première fois en année pleine, de « l'assurance prospection premiers pas », dont l'impact budgétaire sera ainsi répercuté en 2014. La hausse des crédits traduit aussi une hausse du nombre de bénéficiaires (9 993 fin juin 2013 contre 7 500 fin 2011 et 9 225 fin 2012), et le niveau élevé des reversements des entreprises constaté depuis plusieurs exercices, reflétant le succès des prospections à l'étranger des exportateurs, qui pourrait être affecté par la conjoncture économique.

Les garanties d' assurance-crédit ne sont pas dotées, compte tenu des primes et des récupérations qui sont encore supérieures aux sinistres qui devraient survenir en 2013. Il en va de même des garanties de taux d'intérêt Natixis , les couvertures mises en place sur les marchés financiers devant être, sous les hypothèses actuelles de taux d'intérêt, bénéficiaires.

2. Une stabilité globale des autres crédits d'appel en garantie

Moins fortement dotées, les autres actions du programme affichent des dotations globalement stables .

1,5 million d'euros sont prévus en 2014 au titre de l'action 1 « Agriculture et environnement » , soit un niveau identique à celui de la LFI 2013. En pratique, ces crédits correspondent aux appels en garantie au titre de la procédure de désendettement des agriculteurs installés en Corse ainsi qu'au soutien à la filière bois , suite à la tempête Klaus survenue en 2009.

Les crédits de l'action 2 « Soutien au domaine social, logement, santé » progressent nettement , de 7,2 millions d'euros en 2013 à 8,5 millions en 2014 (+ 18 %). Ils concernent différents dispositifs, comme les prêts à l'accession sociale à la propriété, les prêts à taux zéro et les prêts complémentaires consentis aux fonctionnaires consentis par le Crédit Foncier de France et le Comptoir des entrepreneurs. La prévision du PLF 2014 prend en compte, d'une part, la montée en puissance de la sinistralité constatée depuis 2010, du fait des incertitudes sur l'évolution des prix de l'immobilier, et d'autre part l'impact de l'automatisation de la gestion des sinistres.

L'action 3 « Financement des entreprises et des industries » est dotée de 10 millions d'euros en 2014, comme en 2013. Ces crédits correspondent aux procédures suivantes :

- dans le cadre du plan de relance , la garantie des prêts accordés aux entreprises signataires d'un contrat de partenariat sur les projets dont la réalisation est jugées prioritaire 9 ( * ) ;

- la couverture des derniers sinistres (en l'occurrence des défauts de paiement) couverts par la procédure d'assurance-crédit CAP+ , mise en oeuvre dans le cadre du plan de relance gérée par le Fonds de sécurisation du crédit interentreprises (FSCIE) ;

- les garanties de la Société de financement de l'économie française (SFEF) pour ses émissions de titres de créances en euros et en devises, d'une maturité maximale de cinq ans, pour financer des prêts aux établissements de crédit agréés en France ;

- la garantie d'emprunts émis ou contractés par les établissements et entreprises qui contribuent à la réalisation du Plan de modernisation et d'équipement , ce dispositif étant en voie d'extinction ;

- la garantie des prêts consentis par la Banque européenne d'investissement à une entreprise, un établissement public ou à une collectivité, pour des projets à réaliser sur le territoire de la République française.

Des crédits à hauteur de 50,2 millions d'euros sont enfin inscrits à l'action 5 « Autres garanties » , soit 1,4 million d'euros de moins qu'en 2013. Les principaux bénéficiaires de ces garanties sont l'Agence française de développement, la Banque de France et la Banque européenne d'investissement. Il est prévu par ailleurs une indemnisation des tiers suite à des dommages causés dans le cadre d'une opération spatiale autorisée sur certains territoires français. S'agissant de la description de cette action dans le projet annuel de performances, il manque toujours les éléments financiers détaillés par garantie, y compris pour apprécier l'évolution des crédits proposée dans le PLF 2014 .

3. La nécessité d'améliorer le recensement et l'évaluation des engagements hors bilan de l'Etat
a) L'enjeu d'une meilleure comptabilisation et d'un suivi accru des engagements hors bilan, notamment pour les garanties de l'Etat

Depuis l'entrée en vigueur en 2006 de l'ensemble des dispositions de la LOLF, les documents budgétaires présentent non seulement les engagements inscrits au bilan de l'Etat, tant en actif qu'au passif, mais aussi les engagements hors bilan , c'est-à-dire les obligations qui, sans réunir les critères d'inscription au bilan de l'Etat, sont susceptibles d'avoir un impact significatif sur la soutenabilité de sa situation financière et son appréciation par les agences de notation : ils traduisent des aléas financiers auxquels est exposé l'Etat du fait de ses obligations à l'égard de tiers qui ne sont pas sous son contrôle direct.

Il s'agit, par exemple, des engagements de retraite de l'Etat au titre des droits à pensions futures des actifs et des inactifs, des garanties de dette ou de passifs, ou encore des engagements de l'Etat au titre de sa mission de régulateur économique et social, comme les aides au logement ou le financement de l'audiovisuel public.

Selon le compte général de l'Etat annexé au projet de loi de règlement pour 2012 , l'agrégat des encours des engagements hors bilan de l'Etat s'élevait fin 2012 à 3 091 milliards d'euros , soit 152 % du PIB et près de deux fois plus que le passif total de l'Etat (soit 1 859 milliards d'euros). Plus de la moitié du total (soit 54 %), des engagements de retraite portés par l'Etat (1 679 milliards d'euros).

Votre commission des finances a formulé de longue date des observations récurrentes sur le recensement, le suivi et l'évaluation des engagements hors bilan de l'Etat.

Lors de l'examen du projet de loi de règlement pour 2011 , le rapporteur général de votre commission des finances avait présenté un amendement tendant à ce que le compte général de l'Etat annexé au projet de loi de règlement comporte, chaque année, une annexe détaillant l'ensemble des garanties accordées par l'Etat et, pour chacune d'entre elles, les limites dans lesquelles elle a été accordée. Cet amendement avait été retiré en séance publique, suite à un engagement du Gouvernement de recenser de manière plus fiable et plus exhaustive les engagements hors bilan de l'Etat au titre des garanties qu'il accorde. Toutefois, si le compte général de l'Etat 2012 énumère les principales garanties en termes d'encours, cette liste reste incomplète.

Au regard des enjeux et des progrès à réaliser, en application de l'article 58-2° de la LOLF la Cour des comptes a réalisé une enquête, à la demande de votre commission des finances, sur les engagements hors bilan de l'Etat . Sur cette base, la commission a procédé à une audition le 15 mai 2013, en présence des magistrats instructeurs de la Cour des comptes et des représentants du ministère de l'économie et des finances. Ces travaux ont été publiés dans un rapport d'information de votre rapporteur spécial 10 ( * ) .

Les travaux de la Cour des comptes ont fait apparaître plusieurs pistes d'amélioration, notamment l'instauration de procédures pour un véritable suivi et un pilotage politique effectif de l'évolution des engagements hors bilan en cours d'exercice budgétaire .

Lors de son audition par la commission des finances, le 12 juin 2013, sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2012, Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget, a indiqué, en réponse à votre rapporteur spécial, qu'il serait procédé à une information des commissions des finances du Parlement :

« Un travail est mené avec la Cour des comptes s'agissant des engagements hors bilan. Nous faisons nôtre la recommandation n° 4 11 ( * ) , qui vise à mettre en place une information des commissions lorsqu'il y a des risques d'encours. Cette recommandation est de nature à permettre une bonne information du Parlement ».

b) Les garanties octroyées par l'Etat en 2012 et 2013

A défaut d'un suivi effectif des engagements hors bilan en général et, plus particulièrement des garanties octroyées par l'Etat, votre rapporteur spécial demande un recensement des garanties accordées entre le 1 er janvier de l'année (n - 1) et l'année (n).

S'agissant de l'année 2012, les opérations les plus importantes en montant ont été :

- la garantie de l'Etat octroyée aux emprunts contractés par l'UNEDIC au cours de l'année 2012, en principal et en intérêts, dans la limite d'un plafond en principal de 7 milliards d'euros, conformément aux dispositions de l'article 85 de la loi de finances rectificative du 28 décembre 2011 ;

- la garantie accordée pour les opérations de la Caisse centrale du Crédit immobilier de France, en application des dispositions de l'article 108 de la loi de finances rectificative du 29 décembre 2012, pour un encours maximal de 12 milliards d'euros (au 30 juin 2013, l'encours atteignait 7 milliards d'euros) ;

- la garantie de l'Etat octroyée, à titre onéreux, aux titres de créance émis entre le 1 er janvier 2013 et le 31 décembre 2016 par la société Banque PSA Finance, filiale de la société Peugeot SA, en application de l'article 85 de la loi de finances rectificatives du 29 décembre 2012, pour un encours maximal de 7 milliards d'euros (au 30 juin 2013, l'encours s'élevait à 1,2 milliard d'euros).

Pour l'année 2013, conformément à l'article 80 de la loi n°2012-1510 de finances rectificative du 29 décembre 2012, la garantie de l'Etat a été octroyée aux emprunts contractés par l'UNEDIC au cours de l'année 2013, en principal et en intérêts, dans la limite d'un plafond global en principal de 5 milliards d'euros.

Par ailleurs, concernant le groupe Dexia , une garantie de financement avait été accordée en 2008 par la Belgique, le Luxembourg et la France. Les plans de sauvetage mis en place à partir de cette date ont comporté notamment une augmentation de capital à hauteur de 2,58 milliards d'euros, souscrite par la France à la fin de l'année 2012. Après acquisition par la France de la principale filiale française, l'extinction progressive du groupe Dexia « résiduel » a été engagée. Comme l'a observé la Cour des comptes 12 ( * ) , le coût direct du sinistre bancaire a atteint 6,6 milliards d'euros pour la seule partie française , réparti entre un coût net de 2,7 milliards d'euros pour l'Etat et de 3,9 milliards d'euros, du fait de la perte de valeur de leurs participations respectives.

Les engagements au titre du Fonds européen de stabilité financière (FESF) et du Mécanisme européen de stabilité (MES) sont examinés ci-après 13 ( * ) .


* 8 Cette procédure regroupe la garantie des cautions qui permet à un exportateur d'honorer un contrat à l'international en garantissant les banques lors de la mise en place des cautions bancaires et la garantie des préfinancements qui couvre un prêt consenti par une banque pour financer le lancement d'un contrat export.

* 9 En pratique, ce dispositif a été utilisé pour un seul projet : la construction de la ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique.

* 10 Jean-Claude Frécon, rapport d'information n° 579 (2012-2013) : « Recenser et évaluer les engagements hors bilan de l'État : un enjeu pour la transparence et la soutenabilité des finances publiques ».

* 11 Dans sa recommandation n° 4, la Cour des comptes propose d'alerter le Parlement - en pratique, les commissions des finances - dès lors qu'en cours d'exercice, un engagement hors bilan significatif connaît une croissance rapide de son encours ou une hausse de sa probabilité de réalisation.

* 12 Cour des comptes, « Dexia : un sinistre coûteux, des risques persistants ». Rapport publié le 18 juillet 2013.

* 13 Paragraphe II D.

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