B. LE PROCESSUS DE CONCERTATION

1. Les enjeux de la concertation

Lancée en octobre 2013, la concertation sur l'accessibilité a dû répondre à un triple défi.

Le premier d'entre eux est un défi de crédibilité . Si l'objectif du « tout accessible » en 2015 a constitué un formidable levier pour enclencher une nouvelle dynamique, il est rapidement apparu comme peu réaliste, car ne tenant compte ni des capacités financières des acteurs, ni de la durée d'amortissement du matériel existant, ni du degré de mobilisation de certains secteurs. Tout devait être accessible au même moment, quels que soient la fréquentation, l'opportunité, la faisabilité, le coût, les contraintes techniques, naturelles ou de protection du patrimoine. Face à cette absence de hiérarchie et de gradation dans le processus, une partie des opérateurs s'est mobilisée tardivement, à l'approche de l'échéance de 2015, quelques-uns spéculant même sur un report de la date limite. Au final, l'accumulation des retards donne un sentiment de désintérêt, d'absence de volonté d'inclusion sociale, de recherche de gain de temps et ce, alors que des efforts tangibles ont été accomplis.

Pour l'avenir, il est donc indispensable de mettre en place une autre méthode , qui soit crédible tant aux yeux du monde associatif qu'à ceux des opérateurs qui devront être convaincus de sa faisabilité. Celle-ci doit reposer sur la hiérarchisation et la programmation des travaux, sur leur évaluation à échéance régulière, sur l'obligation de résultats assortie de sanctions financières .

Le deuxième défi est celui de la mobilisation . L'ampleur du chantier de l'accessibilité universelle nécessite en effet une implication accrue de l'ensemble des acteurs, qu'ils soient publics ou privés. Elle suppose également une plus grande sensibilisation des citoyens aux enjeux de l'accessibilité, notamment au regard du vieillissement de la population.

Le troisième défi est celui de la performance . Face à la complexité du sujet, il convient de mettre en place des outils réalistes et pragmatiques qui permettent aux opérateurs de rattraper leur retard, au besoin de manière progressive. Ainsi, si les objectifs les plus prégnants devront être atteints à l'issue d'une période relativement courte, ceux de moindre importance pourront être réalisés en fin de processus. Le défi de la performance suppose aussi de simplifier et d'actualiser certaines normes et dispositions réglementaires afin de tenir compte de l'ensemble des formes de handicap et de faire primer la qualité d'usage sur la seule conformité formelle aux règles.

Au regard de ces nouveaux défis et conformément aux préconisations du rapport « Réussir 2015 », la concertation a porté sur deux thématiques :

- la mise en place des agendas d'accessibilité programmée ou Ad'AP ;

- l'évolution des normes relatives à l'accessibilité .

2. Une démarche inédite

La méthode retenue a été celle préconisée par le CIH du 25 septembre 2013, c'est-à-dire une série de réunions de concertation avec l'ensemble des acteurs concernés par le dossier de l'accessibilité .

Présidée par votre rapporteure et animée par la déléguée ministérielle à l'accessibilité, cette concertation inédite, qualifiée par tous de « moment historique », a permis de faire travailler ensemble toutes les parties prenantes au dossier de l'accessibilité : les associations de personnes handicapées membres de l'Observatoire interministériel de l'accessibilité et de la conception universelle (Obiaçu), les représentants du commerce, de l'hôtellerie-restauration et des professions libérales, les responsables du secteur des transports, les associations d'élus locaux, les maîtres d'oeuvre et d'ouvrage, les techniciens et les experts.

S'agissant du volet « Ad'AP », les 18 réunions, qui se sont échelonnées entre octobre et décembre 2013, ont donné lieu à près de 60 heures de concertation . Chacune d'entre elles a eu pour objectif d'examiner les différentes étapes de la procédure des Ad'AP tant en ce qui concerne le contenu de ce nouvel outil, son mode d'élaboration, que de la programmation financière, des délais et des sanctions.

Votre rapporteure tient à souligner la constante et forte participation de l'ensemble des acteurs , témoignant de leur intérêt pour cet instrument qui se veut cohérent, pragmatique et facilement mobilisable. La richesse des échanges a progressivement permis de dégager des points de consensus, mais aussi des sujets de divergence. Les conclusions de cette concertation ont donné lieu à un rapport , qui figure en annexe de celui-ci.

S'agissant du volet « environnement normatif », les 23 réunions, qui se sont tenues entre octobre 2013 et février 2014 sur une durée totale de 80 heures, avaient pour mission de réajuster l'environnement normatif de l'accessibilité pour le rendre plus lisible, plus simple, et plus juste .

Comme pour les Ad'AP, ce réajustement s'appuie sur un dispositif concerté et équilibré entre les attentes et les contraintes de l'ensemble des acteurs concernés. Grâce là aussi à l'implication de tous les participants , des solutions consensuelles mais aussi des points de divergence ont émergé, retracés dans un rapport annexé à celui-ci.

3. Le premier volet : l'organisation des agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP)

La création des agendas d'accessibilité programmée (Ad'AP) repose sur cinq piliers :

- une stratégie patrimoniale : l'Ad'AP est un document de programmation financière des travaux d'accessibilité, qui doit permettre aux opérateurs (Etat, collectivités territoriales, établissements publics, maîtres d'ouvrage privés) n'étant pas en conformité avec les règles d'accessibilité posées par la loi de 2005 de s'engager sur un calendrier précis. Cette programmation est structurée en diverses périodes opérationnelles et adossée à un plan de financement pluriannuel ;

- une démarche volontaire : l'Ad'AP, qui concerne aussi bien les ERP (toutes catégories comprises) que les réseaux de transport, est d'application volontaire. C'est aux maîtres d'ouvrage et aux opérateurs de se saisir de ce nouvel outil pour parvenir à respecter les règles d'accessibilité ;

- un dispositif d'exception : l'engagement dans une procédure d'Ad'AP entraîne la suspension de l'application de l'article L. 152-4 du code de la construction et de l'habitation relatif aux sanctions pénales en cas de non-respect des règles d'accessibilité. En revanche, les opérateurs qui font le choix de ne pas entrer dans une telle démarche restent soumis aux dispositions prévues par la loi de 2005 ;

- une logique partenariale : l'Ad'AP est élaboré dans un cadre concerté, associant le ou les maîtres d'ouvrage et les représentants des usagers (personnes handicapées, personnes âgées...). Le partenariat peut également être d'ordre financier, notamment lorsque plusieurs entités sont amenées à contribuer au financement des travaux d'accessibilité ;

- une procédure commune à tous les secteurs : quel que soit le maître d'ouvrage, la procédure d'élaboration et de suivi d'un Ad'AP est la même et ce, afin de pas imposer au secteur public ou privé des contraintes ou des règles qui ne seraient pas également applicables à l'autre secteur. En revanche, la procédure est allégée pour les ERP de 5 e catégorie (publics ou privés) dans la mesure où ces petites structures ne disposent pas des ressources internes suffisantes pour suivre des démarches administratives complexes.

Les Ad'AP seront signés par les acteurs qui engageront leur responsabilité financière dans les travaux de mise en accessibilité .

Trois situations pourront se rencontrer :

- pour les ERP relevant d'une collectivité publique, c'est le maire, le président de l'assemblée délibérante ou le délégataire de pouvoir qui pourra signer et déposer un Ad'AP ;

- pour les ERP relevant d'une entité privée, c'est l'exploitant qui signera et déposera l'Ad'AP pour la part des travaux qui relèvera de sa responsabilité et/ou le propriétaire du local ;

- en cas de cofinancement des travaux de mise en accessibilité d'un bâtiment, d'un patrimoine ou d'un service de transport de voyageurs, l'Ad'AP sera engagé sous l'animation ou l'autorité d'un chef de file et les différents partenaires cosigneront le document au titre de leur engagement financier respectif.

4. Le second volet : l'évolution des normes relatives à l'accessibilité

La concertation sur l'évolution de l'environnement normatif est parvenue à formuler de nombreuses propositions, qui poursuivent quatre impératifs :

- rendre plus lisibles et plus efficaces certaines dispositions réglementaires , trop souvent perçues comme un frein au progrès et à l'innovation ;

- privilégier la qualité d'usage plutôt que le strict respect de la norme ;

- mieux prendre en compte toutes les formes de handicap , conformément à l'objectif d'accessibilité universelle ;

- améliorer le suivi de la mise en accessibilité de la société, qui a fait défaut à la mise en oeuvre de la loi de 2005.

L'ensemble des propositions est retracé dans le rapport figurant en annexe de celui-ci.

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