B. DES MODALITÉS PRÉCISÉES PAR LE SÉNAT

1. Le refus d'une épreuve spécifique

La proposition de loi initiale prévoyait d'instituer une épreuve supplémentaire à l'examen du permis de conduire : à l'épreuve théorique et pratique aurait été ajoutée une troisième épreuve, « sanctionnant la connaissance des notions élémentaires de premiers secours ».

À l'initiative de votre rapporteur, votre commission avait constaté que l'instauration d'une épreuve supplémentaire se serait heurtée à d'importantes difficultés.

En premier lieu, cette nouvelle épreuve aurait eu des conséquences financières non négligeables pour les candidats au permis de conduire, alors même que le coût moyen du permis de conduire est de 1 500 euros. Ce montant, qui se situe dans la moyenne des pays de l'Union européenne, est cependant assez élevé.

En outre, la nouvelle épreuve aurait conduit à allonger les délais pour pouvoir passer le permis de conduire, alors même qu'ils sont aujourd'hui élevés, puisque le délai moyen pour passer le permis de conduire était de 86 jours d'attente en 2012 et de 90 à 95 jours pour l'année 2013.

S'ajoutent à ces délais des inégalités géographiques : dans certains territoires, le délai est beaucoup plus long que trois mois.

Ainsi, dans l'étude d'impact du projet de loi pour la croissance et l'activité, actuellement en discussion, le Gouvernement constate que de « de 98 jours (trois mois en moyenne en 2013 au niveau national), l'attente peut atteindre une moyenne de 5 mois dans certains départements, notamment en Île-de-France » 7 ( * ) .

Cette étude d'impact précise par ailleurs que la moyenne de ce délai dans les autres pays européens est d'un mois et demi.

Enfin, votre rapporteur avait constaté que l'organisation pratique d'une telle épreuve aurait posé également d'importantes difficultés, notamment pour que les candidats se rendent dans les locaux de l'association qui aurait dispensé la formation aux premiers secours.

2. Une vérification des connaissances dans le cadre des deux épreuves actuelles du permis de conduire

Dans son rapport en première lecture, votre rapporteur avait présenté la mise en oeuvre de l'obligation de la manière suivante : « La formation à ces notions s'effectuerait dans le cadre des cours théoriques, et serait sanctionnée à l'examen par un nombre défini de questions, portant spécifiquement sur les gestes à effectuer. Lors de l'examen pratique, une question posée sur ce sujet, dans le cadre d'une mise en situation, pourrait être utilement incluse, sans entraîner une modification profonde du déroulement de cet examen » 8 ( * ) .

Cette approche concorderait avec celle retenue actuellement par le Gouvernement : votre rapporteur observe que l'arrêté du 13 mai 2013 relatif au référentiel pour l'éducation à une mobilité citoyenne (REMC) précise que l'une des compétences devant être maîtrisée par les conducteurs a pour objet de « prendre en compte les facteurs entraînant une dégradation du système homme-véhicule-environnement, prendre les décisions qui permettent d'y faire face, mettre en oeuvre les mesures préventives ». Dans le cadre de cette compétence, il est précisé que le candidat doit savoir « comment réagir face à un accident » et « connaître les comportements à adopter face à une victime d'accident », étant précisé que le candidat doit savoir comment protéger les victimes et comment donner l'alerte.

Votre rapporteur constate qu'un appel d'offres a été lancé le 13 février 2015, pour une date de remise des plis fixée au 9 mars, afin de remplacer les questions de l'examen théorique 9 ( * ) . L'appel d'offres porte sur la fourniture de 1 000 questions, dont 100 demandées au sein de la famille n° 5 relative à la réglementation générale, qui compte notamment les questions liées aux gestes de premiers secours.

Ainsi, alors que le système actuel rend très aléatoire la probabilité qu'une question concernant la formation aux premiers secours soit posée à l'examen théorique, cette probabilité devrait être fortement accrue à l'avenir.

Votre rapporteur insiste toutefois sur le fait qu'il est essentiel qu'au moins une question relative aux gestes de premiers secours soit systématiquement posée à l'occasion de l'examen théorique du permis de conduire : sans cela, les candidats aux permis de conduire ne s'investiront pas dans la formation aux premiers secours.

3. Le renvoi au pouvoir réglementaire pour la définition des modalités pratiques de cette obligation

La proposition de loi, dans sa rédaction initiale, précisait le contenu de la formation pratique aux premiers secours. Celle-ci aurait dû porter sur les « cinq gestes qui sauvent ».

Votre rapporteur rappelle que ces cinq gestes consistent à « alerter les secours, baliser les lieux, ventiler, comprimer et sauvegarder la vie des blessés. »

Or, si ces gestes ont longtemps fait consensus, certains d'entre eux sont aujourd'hui contestés . Ainsi, la ventilation des blessés est à la fois un geste relativement compliqué à effectuer, même lorsqu'il est bien maîtrisé par la personne, et un geste qui n'est pas recommandé dans certaines situations, justement lorsque l'arrêt cardiaque est consécutif à un accident de la route.

De plus, fixer dans la loi le contenu de la formation aux gestes de premiers secours aurait eu pour effet d'entraîner une grande rigidité du dispositif, difficilement compatible avec les évolutions éventuelles des techniques ou des méthodes.

À l'initiative de votre rapporteur, votre commission a donc renvoyé au pouvoir réglementaire le soin de définir le contenu technique de la formation aux premiers secours.


* 7 Projet de loi pour la croissance et l'activité, étude d'impact, p. 48 (http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl14-300.html).

* 8 Rapport n° 122 (2013-2014) au nom de la commission des lois sur la proposition de loi visant à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire, p. 17 (http://www.senat.fr/rap/l13-122/l13-122.html).

* 9 Référence : DSCR-ER-001-15.

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