EXAMEN DES ARTICLES
CHAPITRE IER - MESURES D'ACTUALISATION DE LA PROGRAMMATION MILITAIRE POUR LES ANNÉES 2015 A 2019 (ARTICLES 1ER A 4)

Article 1 - Approbation des modifications apportées au rapport annexé

Cet article a pour objet d'approuver les modifications que le présent projet de loi, en annexe, introduit dans le rapport annexé à la LPM du 18 décembre 2013 , qui décrit les orientations relatives à la politique de défense et aux moyens qui lui sont consacrés au cours de la période 2014-2019 et précise les orientations en matière d'équipement des armées à l'horizon 2020.

Ces modifications, prenant en compte les changements du contexte stratégique et des besoins de sécurité de notre pays intervenus depuis décembre 2013, traduisent les ajustements de notre outil de défense que tend en conséquence à apporter l'actualisation portée le présent projet de loi, principalement en termes de ressources financières, d'effectifs et de capacités militaires. Il convient cependant de souligner que l'actualisation ne bouleverse pas les équilibres fondamentaux définis par la LPM à la suite du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale 44 ( * ) . L'objectif du modèle d'armée retenu en 2013 dans le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale puis dans la LPM reste donc inchangé.

L'Assemblée nationale a adopté divers amendements au rapport annexé à la LPM ainsi modifié par le présent projet de loi.

En premier lieu, la commission de la défense nationale et des forces armées , outre plusieurs modifications d'ordre rédactionnel, a introduit des amendements visant à :

- encourager nos partenaires européens à travailler à la création d'une académie européenne du renseignement ;

- encourager les programmes industriels européens dits « Pooling and Sharing » (partage et mise en commun) ;

- préciser, d'une part, que l'augmentation des effectifs de la force opérationnelle terrestre (FOT) doit permettre de conserver un haut niveau de préparation opérationnelle et, d'autre part, que doit être maintenue la cohérence entre nos capacités terrestres d'engagement protégé avec le nouveau format de la FOT ;

- favoriser l'emploi de réservistes issus de la fonction publique de l'État et de la fonction publique territoriale par des durées de service plus longues ;

- favoriser l'engagement des étudiants dans la réserve en encourageant la conclusion de partenariats avec les établissements d'enseignement supérieur ;

- clarifier les conditions d'attribution de l'insigne des blessés ;

- prévoir que les associations professionnelles nationales de militaires (APNM) auront vocation à être représentées aux conseils d'administration des établissements publics dont l'activité a trait à la condition militaire ;

- favoriser la participation des jeunes à différentes activités liées aux commémorations nationales ;

- enfin, permettre au service industriel de l'aéronautique d'augmenter ses effectifs si nécessaire, mais sans que le reste du ministère de la défense soit obligé de réduire les siens à due concurrence.

En second lieu, avec plusieurs de nos collègues députés co-signataires de leurs initiatives :

- notre collègue député Jean-Jacques Candelier est à l'origine, d'une part, de la précision que le terrorisme international d'inspiration djihadiste prospère pour part grâce à la complicité de « certaines entités » et, d'autre part, de la mention selon laquelle la France doit se conformer aux critères de la position commune n° 2008/944/PESC du Conseil de l'Union européenne du 8 décembre 2008 définissant des règles communes régissant le contrôle des exportations de technologie et d'équipements militaires ;

- notre collègue député Philippe Folliot est à l'origine, d'une part, de l'expression du souhait d'un débat sur le mécanisme « Athéna » de financement des opérations militaires de sécurité et de défense de l'Union européenne, dans la perspective de mettre en place un budget européen de la politique de sécurité et de défense commune et, d'autre part, de la prévision qu'un débat soit engagé avec nos partenaires européens sur la possibilité de créer un pôle de défense européenne à Strasbourg, ainsi qu'un quartier général militaire européen au Mont Valérien, dans le but de regrouper et d'intégrer la formation de militaires des États membres ;

- enfin, notre collègue député François de Rugy est à l'origine, d'une part, d'un encouragement donné, de façon générale, à la construction d'une Europe de la défense et, d'autre part, à la mise en avant de la nécessité de mutualiser les forces européennes dans certains domaines clés de l'intervention extérieure (transport, logistique, mobilité), ainsi que de soutenir l'instauration de mécanismes de décision collectifs, envisagés comme de premiers pas vers un état-major permanent de planification des opérations ou d'une agence européenne d'armement.

Votre commission , à son tour, a souhaité préciser un certain nombre de points dans le rapport annexé à la LPM modifié par le présent projet de loi :

- par un amendement COM-23, présenté par votre rapporteur et les rapporteurs des programmes 178 et 146, la nécessité d'une association du Parlement, sous la forme d'un débat en séance, à partir d'un rapport du Gouvernement, à la définition de la doctrine d'emploi et du cadre juridique des missions intérieures des forces armées ;

- par un amendement COM-24, présenté par votre rapporteur et par MM. Bockel et Lorgeoux, auteurs du rapport d'information sur l'Afrique, la nécessité, compte tenu du contexte géostratégique, de préserver deux composantes (air et terre) à Djibouti.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié .

Article 2 - Programmation des ressources financières

Cet article actualise la trajectoire financière de la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 . Son I modifie à cet effet l'article 3 de la LPM du 18 décembre 2013.

Par rapport à la prévision inscrite dans ce dernier texte, la modification est double.

D'une part, les ressources de la défense sont augmentées de 3,8 milliards d'euros, au total, entre 2016 et 2019 , à raison d'abondements à hauteur de 600 millions d'euros en 2016, 700 millions en 2017, 1 milliard en 2018 et 1,5 milliard en 2019. L'effort en faveur de la défense s'élèvera ainsi, au total, à 162,41 milliards d'euros courants sur la période 2015-2019, contre 158,61 milliards selon les prévisions initiales inscrites dans la LPM.

D'autre part, l'essentiel de ces ressources est « re-budgétisé » dès 2015, donc sécurisé , les recettes exceptionnelles (REX) de la défense, de nature non-budgétaire, se trouvant désormais limitées aux produits de cessions de biens immobiliers et de matériels militaires, pour un total de 930 millions d'euros sur la période 2015-2019 (soit 0,6 % du total du budget de la défense pour cette période, contre 3,5 % dans la programmation initiale pour la période 2014-2019).

La nouvelle trajectoire financière de la programmation militaire pour 2015-2019

(CP, en milliards d'euros)

Source : ministère de la défense

I. La majoration des ressources de la défense

L'actualisation du volet financier de la LPM à laquelle procède le I du présent article, en augmentant de 3,8 milliards d'euros les ressources de la défense prévues entre 2016 et 2019 - portant ainsi ces ressources à un total de 162,41 milliards d'euros sur la période restant à courir jusqu'à 2019, contre 158,61 milliards selon les prévisions de la LPM de 2013 -, marque une hausse globale de 2,4 % par rapport au budget prévisionnel initial. Dans le contexte stratégique et sécuritaire actuel, tel qu'il résulte des évolutions observées depuis le vote de la LPM 45 ( * ) , et compte tenu notamment de la décision de limiter les réductions d'effectifs qu'a prise le Président de la République à l'issue du conseil de défense du 29 avril dernier, cette mesure apparaît comme une nécessité .

Les plus fortes hausses annuelles, en volume mais aussi en proportion, sont toutefois concentrées sur des deux dernières années de la programmation (+ 3,1 % en 2018 et + 4,6 % en 2019).

Actualisation de la programmation du budget de la défense pour 2015-2019

(CP, en milliards d'euros courants)

2015

2016

2017

2018

2019

Total

2015-2019

LPM initiale

31,38

31,38

31,56

31,77

32,52

158,61

Actualisation

31,38

32,26

32,26

32,77

34,02

162,41

Variation

en volume

0

+ 0,6

+ 0,7

+ 1,0

+ 1,5

+ 3,8

en proportion

0

+ 1,9 %

+ 2,2 %

+ 3,1 %

+ 4,6 %

+ 2,4 %

Source : LPM 2014-2019 et présent projet de loi

Cette augmentation des ressources de la défense, d'après l'étude d'impact du présent projet de loi, sera financée au moyen de redéploiements sur les autres dépenses de l'Etat , c'est-à-dire à enveloppe budgétaire globale des missions de l'État inchangée par rapport aux prévisions de la loi du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour 2014-2019, telle qu'elles ont été actualisées dans le programme de stabilité pour 2015-2018 transmis par le Gouvernement à la Commission européenne en avril 2015.

Comme le précisent, à la fois, le rapport annexé à la LPM dans sa rédaction modifiée par le présent projet de loi et l'étude d'impact de ce dernier, les moyens supplémentaires ainsi ouverts sont destinés à financer, entre 2016 et 2019 :

- en premier lieu, à hauteur de 2,8 milliards d'euros (soit près des trois quarts de l'augmentation des ressources de la défense), la masse salariale (2,4 milliards d'euros) et les dépenses de fonctionnement (400 millions) impliquées, pour l'essentiel, par le maintien d'effectifs prévu par le présent projet de loi ;

- en second lieu, pour le montant global d' un milliard d'euros , un double effort en matière d'équipement des forces, visant l' entretien programmé des matériels (EPM) et les opérations d'armement , qui bénéficieront l'un et l'autre d'un abondement de 500 millions d'euros.

Affectation des ressources supplémentaires de la défense pour 2015-2019

(CP, en milliards d'euros)

Montant

Part du total

Effectifs

masse salariale (titre 2)

2,4

63,2 %

73,6 %

fonctionnement (hors-titre 2)

0,4

10,4 %

Équipement

Entretien programmé des matériels

0,5

13,2 %

26,4 %

Opérations d'armement

0,5

13,2%

Total

3,8

100,0 %

Source : présent projet de loi

Actualisation de la programmation du budget de la défense par agrégat

Source : ministère de la défense

A. Le financement des effectifs

Les 2,8 milliards d'euros supplémentaires, par rapport aux prévisions de la LPM initiale, pris en compte par le présent article au titre des effectifs - dont 2,4 milliards d'euros pour la masse salariale et 400 millions pour le fonctionnement afférent - visent à permettre de couvrir, principalement, les dépenses induites par la moindre déflation d'effectifs que retient l'article 3 du présent projet de loi. Il s'agit ainsi de financer le nouveau contrat de « protection » des armées , c'est-à-dire la capacité des forces terrestres à déployer sur le territoire national 7 000 hommes dans la durée et jusqu'à 10 000 hommes pendant un mois.

L'augmentation intègre également les besoins de financement de deux dispositifs :

- d'une part, la montée en puissance de la réserve opérationnelle promue par l' article 13 du présent projet de loi. En ce domaine, l'objectif de progression de l'effectif (40 000 hommes à terme, contre 27 700 en 2014) et de l'activité (30 jours par an en moyenne, contre 24 actuellement) requiert une majoration des crédits de solde à hauteur de 75 millions d'euros sur la période 2016-2019 ;

- d'autre part, l' expérimentation du service militaire volontaire (SMV) introduit par les articles 17 et 18 du projet de loi, pour une durée de deux ans à compter du 1 er septembre 2015. La mesure fait l'objet d'une prévision de dépenses à hauteur de 35 millions d'euros sur la période.

B. Le financement de l'équipement

Le milliard d'euros supplémentaire affecté par le présent article à l'équipement des forces recouvre d'abord une enveloppe de 500 millions d'euros au profit de l' entretien programmé des matériels (EPM). Cet abondement tend à permettre la régénération de matériels soumis à de fortes pressions lors de leur utilisation en opérations extérieures.

Les autres 500 millions d'euros nouveaux seront employés au financement d' opérations d'armement . Mais celles-ci bénéficieront également de l' affectation de l'économie réalisée par le ministère de la défense du fait de l'évolution favorable des indices économiques - prix du pétrole, prix de certains marchés de fourniture, cours de la monnaie - constatée depuis l'adoption de la LPM du 18 décembre 2013, à hauteur d' un milliard d'euros 46 ( * ) ; de sorte que la hausse du budget des programmes d'équipement par rapport aux prévisions initiales représentera, au total, 1,5 milliard d'euros :

- 500 millions d'euros de crédits nouveaux introduits dans la programmation, comme indiqué ci-dessus, par le présent article ;

- un milliard d'euros dégagés par réaffectation des crédits économisés grâce au faible niveau d'inflation constaté depuis décembre 2013.

De ce fait, la dotation consacrée à l'équipement militaire s'élèvera à 87,7 milliards d'euros entre 2015 et 2019 , contre une prévision initiale de 85,2 milliards, soit une augmentation de près de 3 % . Pour chaque année de la programmation, cette dotation représente désormais en moyenne 17,55 milliards d'euros, contre 17,1 milliards selon la programmation initiale.

Budget de l'équipement des forces actualisé pour 2015-2019

(CP, en milliards d'euros)

2015

2016

2017

2018

2019

Total 2015-2016

Nouveaux crédits

0

0

0

0,118

0,382

0,5

Redéploiement

0

0,229

0,286

0,220

0,265

1

Total pour l'agrégat « Équipement »

16,66

16,98

17,28

17,73

19,09

87,74

Source : présent projet de loi et DGA

L'effort pourra ainsi être accentué, conformément aux prévisions du rapport annexé de la LPM modifié par le présent projet de loi, au profit du renseignement, dans le domaine des capacités aériennes - notamment des programmes d'hélicoptères et des capacités de transport aérien tactique -, ainsi qu'au bénéfice des forces terrestres, navales et spéciales 47 ( * ) .

Affectation des ressources de l'équipement des forces actualisées pour 2015-2019

(CP, en milliards d'euros)

Dissuasion nucléaire

19,7

Équipement conventionnel

- dont programmes à effet majeur

- dont programmes d'environnement et équipements d'accompagnement

41,8

29,0

12,8

Entretien programmé des matériels

18,2

Infrastructures

5,3

Études amont (y compris études relatives aux opérations de dissuasion)

3,6

Source : présent projet de loi

II. La sécurisation des ressources de la défense

A. Une « re-budgétisation » conforme aux positions prises par votre commission dès 2013

L'actualisation du volet financier de la LPM prévue par le présent article en son I , dans la mesure où elle tend à substituer des crédits budgétaires aux recettes exceptionnelles (REX) qui, jusqu'aux décisions annoncées à l'issue du conseil de défense du 29 avril dernier, étaient supposées provenir, dès 2015, de la cession de fréquences hertziennes - principalement la vente de la bande passante dite des 700 mégahertz (MHz) aux opérateurs de téléphonie mobile - constitue une importante sécurisation budgétaire , sur l'ensemble de la programmation courant jusqu'à 2019. De la sorte, en effet, le rythme d'encaissement et le niveau réel du produit attendu de cette cession ne seront plus susceptible d'affecter les ressources du budget de la défense : comme le signale l'étude d'impact du présent projet de loi, ce produit sera versé au budget général de l'État, au sein duquel il viendra compenser les ouvertures de crédits budgétaires ouverts au profit du budget de la défense.

Le rapport annexé à la LPM, dans sa rédaction modifié par le présent projet de loi, précise que « les crédits budgétaires ouverts en loi de finances initiale pour 2015 sur la mission "Défense" seront complétés dans la plus prochaine loi de finances rectificative par une ouverture de 2,14 Md € en substitution des crédits inscrits en 2015 sur le compte d'affectation spéciale "Gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l'État" ».

Cette décision constitue un motif de satisfaction pour votre commission , qui dès l'examen du projet de LPM, en 2013, avait introduit une clause de sauvegarde visant en substance à garantir que, si les REX prévues venaient à faire défaut, d'autres ressources devraient venir les compenser, et qui n'avait eu de cesse, notamment à la suite de ses contrôles « sur pièces et sur place », de mettre en garde contre la fragilité d'un budget de la défense reposant pour une part substantielle sur une prévision de recettes de cession de fréquences hertziennes dont le calendrier d'encaissement, voire le montant, s'avérait incertain.

Il convient ici de rappeler que la LPM, en 2013, avait prévu que, sur la période 2014-2019, les REX de la défense issues de la cession de cette bande des 700 MHz atteindraient 3,7 milliards d'euros, soit plus de la moitié - 56 % - du total des REX alors programmées.

Programmation initiale des REX de la défense pour 2014-2019

(programmation ajustée des conditions d'entrée, en milliards d'euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Total

Cessions immobilières

0,21

0,23

0,20

0,05

0

0

0,69

Plan d'investissements d'avenir (PIA)

2,00

0

0

0

0

0

2,00

Cessions hertziennes

0

1,55

1,02

0,82

0,23

0,09

3,71

Redevances hertziennes

0,01

0,02

0,03

0,04

0,05

0,06

0,21

Total

2,22

1,80

1,25

0,91

0,28

0,15

6,61

Source : LPM 2014-2019

Ce niveau de REX a été porté par la loi de finances initiale (LFI) pour 2015 à 2,4 milliards d'euros, dont 2,2 milliards devant provenir de la cession de la bande de fréquences des 700 MHz, contre une prévision initiale de la LPM à hauteur de 1,8 milliard de REX, dont 1,6 milliard attendu des cessions de fréquences. Cette majoration de 600 millions d'euros des ressources extra-budgétaires a été opérée en compensation d'une diminution de même montant des crédits budgétaires de la défense, comme prévu pour chacune des années du budget triennal 2015-2017 par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour 2014-2019.

Budget de la défense pour 2015-2017 avant actualisation

(hors pensions, en milliards d'euros)

2015

2016

2017

LPM

LFI

LPM

LPFP

LPM

LPFP

Crédits budgétaires

29,61

29,0

(- 0,6)

30,13

29,52

(- 0,6)

30,65

30,05

(- 0,6)

REX

1,77

2,4

(+ 0,6)

1,25

1,85

(+ 0,6)

0,91

1,51

(+ 0,6)

Total

31,4

31,37

31,56

Source : LPM 2014-2019, LFI 2015 et LPFP 2014-2019

Programmation des REX de la défense pour 2015-2017 avant actualisation

(en milliards d'euros)

2015

2016

2017

Total

Cessions immobilières

0,23

0,20

0,05

0,48

Cessions hertziennes

2,15

1,02

0,82

3,99

Redevances hertziennes

0,02

0,03

0,04

0,09

Origine non précisée

-

0,60

0,60

1,20

Total

2,40

1,85

1,51

5,76

Source : LPM 2014-2019 , LFI 2015 et LPFP 2014-2019

Pourtant, dès l'été 2014, les contrôles « sur pièces et sur place » menés par votre commission 48 ( * ) avaient établi que les recettes attendues de la cession des fréquences de la bande des 700 MHz ne seraient pas disponibles en 2015 mais, au mieux, en 2016 voire plus tard encore, compte tenu de trois séries d'éléments :

- d'abord, l'avenir de cette bande des 700 MHz, aujourd'hui attribuée aux chaînes de télévision, fera l'objet de la conférence mondiale des radiocommunications prévue en novembre 2015. Il s'avère donc difficile d'envisager une cession des fréquences avant cette réunion, l'opération étant nécessairement liée aux décisions qui seront alors arrêtées ;

- ensuite, une fois la date d'attribution possible à la téléphonie mobile déterminée par la conférence mondiale, le choix de chaque État concerné, y compris celui de la France, restera contraint par le choix des pays frontaliers, compte tenu de possibles effets de brouillage tant que les fréquences concernées seront utilisées, dans ces pays, pour la télévision. Le calendrier des cessions semble donc voué à se distendre d'autant plus que les décisions nationales en la matière seront hétérogènes, comme il est vraisemblable ;

- enfin, dans la conjoncture économique actuelle du secteur, en cours de consolidation, il est généralement estimé que les opérateurs de téléphonie, à court terme, n'ont ni l'appétence, ni les moyens d'investir dans de nouvelles fréquences.

Par surcroît, compte-tenu de l'accroissement de la part relative des REX dans le budget de la défense auquel il a été procédé comme rappelé ci-dessus, pour le budget triennal 2015-2017, il apparaissait douteux que la seule cession de la bande de fréquences des 700 MHz permette de couvrir le besoin, qui s'élevait à 5,2 milliards d'euros au total (montant de REX attendues entre 2015 et 2017 hors cessions immobilières - 480 millions d'euros - et redevances hertziennes - 90 millions).

Certes, dès le mois d'octobre 2014, à l'occasion de l'examen par le Parlement du projet de loi de finances (PLF) pour 2015, le Gouvernement avait annoncé la mise en place de « sociétés de projet » - ou special purpose vehicles (SPV) - destinées à pallier le défaut anticipé des REX devant provenir de la cession de la bande de fréquences des 700 MHz. Ces sociétés de projet, dont la capitalisation devait être assurée au moyen du produit de cessions de participations financières de l'État, auraient racheté à celui-ci ou, le cas échéant, auraient acheté directement auprès de l'industrie des équipements militaires, puis les auraient loués au ministère de la défense.

Au printemps dernier, la constitution de deux SPV avait été annoncée par le Gouvernement, pour l'acquisition et la location, s'agissant du premier véhicule, de trois frégates multi-missions (FREMM) et, s'agissant du second, de quatre avions A400 M. Afin de lever les obstacles que le droit existant aurait présenté pour ce dispositif, le Gouvernement, par voie d'amendement à l'Assemblée nationale, avait introduit dans le projet de loi, actuellement soumis à l'examen du Parlement, « pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques », l'article 50 A. Celui-ci visait, d'une part, à permettre la cession par l'État, aux futures sociétés de projet, d'équipements militaires restant employés par les armées ; d'autre part, à autoriser ces sociétés à procéder à des opérations de location d'équipement militaire ; enfin, à leur étendre les principes de la continuité du service public de la défense et de l'insaisissabilité des équipements militaires.

Pour les armées, une condition impérative du dispositif était qu'elles puissent conserver la parfaite disponibilité des équipements qui auraient ainsi été mis en location. Malgré les précisions et les assurances données par le Gouvernement, demeurait un certain nombre d'incertitudes ; elles ont conduit la commission spéciale du Sénat chargée de l'examen du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques à supprimer l'article 50 A susmentionné.

C'est dans ce contexte, et alors qu'un nouveau contrôle « sur pièces et sur place » de votre commission avait fait le point sur le dispositif des sociétés de projet envisagé et, à nouveau, mis en exergue les difficultés tenant aux REX prévues pour le budget triennal 2015-2017 de la défense 49 ( * ) , qu'ont été prises les décisions d'ajustement budgétaire de la LPM que traduit le présent article, en particulier la substitution de crédits budgétaires aux REX attendues de la cession de fréquences hertziennes. Par suite, le projet des SPV a été abandonné par le Gouvernement.

Votre commission approuve ce choix, qui est à la fois celui de la lisibilité - en renonçant à un dispositif complexe d'« agences » - et de la sécurité - en mettant fin aux aléas que représentait, pour le budget de la défense, les incertitudes attachées au calendrier prévisionnel d'encaissement et au niveau élevé des produits de cessions de fréquences hertziennes initialement programmés au titre de REX. Il convient en outre de souligner que cette révision de la composition des ressources financières de la programmation militaire se trouve opérée conformément à la clause de sauvegarde introduite par votre commission en 2013 , à l'article 3 de la LPM, déjà mentionnée - aux termes de laquelle « dans l'hypothèse où le montant [des] recettes exceptionnelles ou le calendrier selon lequel les crédits correspondants sont affectés au budget de la défense ne seraient pas réalisés conformément à la [...] programmation, ces ressources seraient intégralement compensées par d'autres recettes exceptionnelles ou par des crédits budgétaires sur la base d'un financement interministériel ».

Sur la période de la programmation militaire restant à courir jusqu'en 2019, et dès 2015, les ressources de nature non-budgétaire seront ainsi limitées aux produits de cessions de biens immobiliers et de matériels militaires . Ces cessions devraient rapporter, respectivement, 730 millions d'euros entre 2015 et 2019 et 50 millions par an de 2016 à 2019 - soit un total de 930 millions d'euros , représentant 0,6 % du total du budget de la défense pour 2015-2019 , contre 3,5 % dans la programmation initiale pour la période 2014-2019.

Néanmoins, par rapport à la prévision de recettes de cessions immobilières inscrite dans la LPM de 2013 - soit 480 millions entre 2015 et 2017 -, le présent article procède à un quasi doublement de ces REX subsistantes, cessions immobilières et cessions de matériel confondues. En effet, d'une part, il majore la prévision initiale de cessions de 50 millions d'euros en 2016 et de 100 millions en 2017 ; d'autre part, il introduit une prévision de cession nouvelle, à hauteur de 150 millions d'euros, pour chacune des deux dernières années couverte par la programmation.

Prévision actualisée des recettes de cessions affectées au budget de la défense pour 2015-2019

(CP, en milliards d'euros courants)

2015

2016

2017

2018

2019

Total

2015-2019

LPM initiale

0,23

0,20

0,05

0

0

0,48

Actualisation

Total

0,23

0,25

0,15

0,15

0,15

0,93

immobilier

0,23

0,20

0,10

0,10

0,10

0,73

matériels

0

0,05

0,05

0,05

0,05

0,20

Variation

en volume

0

+ 0,05

+ 0,10

+ 0,15

+ 0,15

+ 0,45

en proportion

0

+ 25 %

+ 67 %

n.p.

n.p.

+ 94 %

Source : LPM 2014-2019, présent projet de loi et état-major des armées

B. Les dispositions de sauvegarde introduites par l'Assemblée nationale et par votre commission afin de mieux sécuriser les ressources financières de la défense

En vue de renforcer la sécurisation de la trajectoire financière à laquelle procède le présent article, l'Assemblée nationale a introduit dans le présent article trois mesures de sauvegarde.

Le II du présent article, adopté par l'Assemblée nationale sur la proposition de notre collègue député Olivier Audibert Troin avec plusieurs autres de nos collègues députés - en inscrivant dans le texte du présent article une prévision qui figurait, dans la rédaction initiale du présent projet de loi, au sein du rapport annexé à la LPM tel que ce projet de loi tend à le modifier -, vise l' hypothèse de la hausse du prix des carburants opérationnels . Dans un tel cas, il est prévu qu'afin de couvrir les volumes de carburant nécessaires à la préparation et à l'activité opérationnelle des forces, « la mission "Défense" bénéficie de mesures financières de gestion et, si la hausse est durable, des crédits supplémentaires sont ouverts en construction budgétaire ».

Le III du présent article, introduit à l'initiative de notre collègue député Jean-François Lamour avec plusieurs autres de nos collègues députés, concerne l'hypothèse plus générale d'une évolution défavorable des prix . Il a ainsi été prévu que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 31 décembre 2015 , « un rapport sur l'opportunité d'introduire dans la [LPM] une clause de sauvegarde destinée à assurer la soutenabilité financière de la trajectoire des opérations d'investissement , dans l'hypothèse où l'évolution des indices économiques ne permettrait pas de dégager les ressources financières nécessaires ».

Sur la proposition du rapporteur et des rapporteurs pour avis des programmes 146, 178, 212 et 144 de la mission « Défense », rejoints par le rapporteur de la commission des finances, votre commission a préféré introduire directement cette clause de sauvegarde dans le présent article, afin que la trajectoire des opérations d'investissement de la défense soit maintenue en corrigeant en tant que de besoin l'évolution des prix constatée. Il a ainsi été précisé clairement que « dans l'hypothèse où l'évolution des indices économiques ne permettrait pas de dégager les ressources financières permettant d'assurer la soutenabilité financière de la trajectoire d'équipement des forces fixée par la [...] loi de programmation, la compensation nécessaire au respect de celle-ci serait assurée au moyen de crédits budgétaires » ( amendements COM-6 et COM-1 rect. ).

Ce principe apparaît en effet indispensable au plein respect de la LPM , dans sa version actualisée par le présent projet de loi, pour ce qui concerne la poursuite des programmes d'équipement de nos forces dans les conditions prévues, en termes tant de volume des commandes que de calendrier des livraisons. La garantie qu'il constitue s'avère d'autant plus importante que, non seulement l'orientation actuellement favorable des indices économiques - prix du pétrole, prix de certains marchés de fourniture, cours de la monnaie - pourrait, à moyen terme, s'inverser, mais en outre se trouve encore en cours le travail de chiffrage fin du gain de pouvoir d'achat réalisé par le budget de la défense - pris en compte a priori , par le présent projet de loi, à hauteur d'un milliard d'euros - du fait d'un niveau d'inflation réelle, depuis décembre 2013, moins élevé que l'hypothèse retenue en la matière pour la construction de la LPM 50 ( * ) .

Enfin, le IV du présent article, introduit comme le III à l'initiative de notre collègue député Jean-François Lamour avec plusieurs autres de nos collègues députés, concerne l' hypothèse de la non-réalisation des recettes de cession de biens immobiliers et de matériels militaires escomptées - soit, pour mémoire, selon les prévisions actualisées par le présent article, 930 millions d'euros, représentant 0,6 % du total du budget de la défense, pour la période 2015-2019. À cet égard, il est prévu que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 31 décembre 2015 , « un rapport sur l'opportunité d'introduire dans la [LPM] une clause de sauvegarde destinée à assurer la soutenabilité financière de la trajectoire des opérations d'investissement en compensant les ressources de cessions non réalisées par des crédits budgétaires , sur la base d'un financement interministériel ».

En ce domaine encore, sur la proposition du rapporteur avec les rapporteurs pour avis précités, votre commission a souhaité aller plus loin , en considérant qu'un aléa pèse, par définition, sur des ressources attendues de cessions. Elle a rétabli en les renforçant les dispositions de sauvegarde financière précitées qu'elle avait introduit, en 2013 , à l'article 3 de la LPM, et que la rédaction du présent article aurait fait disparaître, afin de garantir que « dans l'hypothèse où le montant des ressources issues de cessions ou le calendrier selon lequel les crédits correspondants sont affectés au budget de la défense ne seraient pas réalisés conformément à la [...] programmation, ces ressources seraient intégralement compensées par des crédits budgétaires sur la base d'un financement interministériel » ( amendement COM-7 ).

Alors que, d'une part, la vente de l'îlot dit « Saint-Germain », dans le VII e arrondissement de la capitale, à côté de l'emprise de l'hôtel de Brienne, reste à conclure, et le potentiel de cessions de biens immobiliers du domaine militaire situés en province à confirmer, et que, d'autre part, le présent article, comme votre rapporteur l'a souligné plus haut, majore sensiblement le montant des cessions - ventes immobilières et ventes de matériel - prévues au titre de ressources extrabudgétaires de la défense d'ici à 2019, par rapport à la prévision de recettes de cessions immobilières inscrite dans la LPM de 2013, il convient en effet de sécuriser ce financement, certes résiduel, mais non négligeable, de notre outil de défense.

C'est aux mêmes fins qu'à l'initiative du rapporteur et de la commission des finances, votre commission a adopté les amendements COM-2 et COM-5 (identiques) excluant les cessions d'immeubles domaniaux mis à la disposition de la défense de la décote de la loi du 18 janvier 2013

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié .

Article 2 bis (nouveau) - Soustraction de la mission « Défense » au financement interministériel du surcoût des OPEX

Cet article additionnel a été adopté par votre commission ( amendements COM-3 et COM-9), sur la proposition identique du rapporteur et de la commission des finances . Il vise à soustraire le ministère de la défense au financement du surcoût des opérations extérieures (OPEX) selon la répartition interministérielle prévue par la LPM du 18 décembre 2013 dès lors que se trouve dépassée la provision de 450 millions d'euros inscrite par chaque loi de finances dans la mission « Défense », au titre de ces OPEX, conformément aux dispositions de la LPM.

Il convient en effet de rappeler que l'article 4 de la LPM, introduit en 2013 par votre commission, dispose en son premier alinéa que « la dotation annuelle au titre des opérations extérieures est fixée à 450 millions d'euros. En gestion, les surcoûts nets, hors titre 5 et nets des remboursements des organisations internationales, non couverts par cette dotation qui viendraient à être constatés sur le périmètre des opérations extérieures font l'objet d'un financement interministériel . »

Or l'application de ces dispositions conduit en pratique à ponctionner deux fois, chaque année, le budget de la défense, au titre du surcoût des OPEX :

- la première, sur la base de la loi de finances initiale de l'année n , à hauteur de la provision susmentionnée de 450 millions d'euros ;

- la seconde, à l'occasion de la répartition interministérielle du dépassement du surcoût des OPEX par rapport à cette provision, à l'occasion de la loi de finances rectificative de la fin de l'année n .

Cette situation s'avère d'autant plus regrettable que, la seconde contribution précitée de la mission « Défense » devant en principe intervenir au prorata du poids relatif de celle-ci (hors charge de la dette) au sein du budget général de l'État, elle s'avère, dans les faits, arbitrée au-delà de cette part théorique.

C'est ainsi qu'en 2014, le coût total des OPEX ayant atteint 1,12 milliard d'euros, près du cinquième des 635 millions d'euros de surcoût (compte tenu des remboursements prévus en provenance d'organisation internationales) par rapport à la dotation initiale de 450 millions d'euros a été supporté, en sus de ces 450 millions, par la mission « Défense ».

Sans la modification que le présent article tend à introduire dans le droit existant, le même scénario a toutes chances de se reproduire en 2015 puisque, comme l'a relevé la Cour des comptes 51 ( * ) , « les dépenses d'OPEX devraient rester stables au niveau élevé atteint en 2013 et 2014. La sous-budgétisation devrait donc à nouveau atteindre environ un demi-milliard d'euros en 2015 ».

Or ce scénario joue naturellement un rôle d'éviction des autres dépenses que doit assumer le ministère de la défense, dont le paiement différé tend à alimenter le report de charges de son budget sur l'exercice suivant. Le présent article tend à mettre fin à cette forme de « cercle vicieux ».

Votre commission a adopté l'article 2 bis (nouveau) ainsi rédigé .

Article 2 ter (nouveau) - Financement interministériel des missions intérieures

Cet article additionnel a été adopté par votre commission ( amendement COM-8 ), à l' initiative du rapporteur , afin de garantir que les missions intérieures (MISSINT) - opérations militaires menées sur le territoire national, à l'instar de l'opération « Sentinelle » déployée à la suite des attentats des 7 et 9 janvier 2015 - fassent l'objet d'un financement interministériel qui ne pèse donc pas exclusivement, hors opérations d'investissement, sur le ministère de la défense. Ce schéma de financement est inspiré de celui qui a été retenu à l'article 4 de la LPM du 18 décembre 2013, à l'initiative de votre commission, afin de couvrir le surcoût des opérations extérieures (OPEX).

Les missions intérieures, en effet, en application du contrat opérationnel de protection associé à la LPM tel qu'il apparaît dans le rapport annexé à celle-ci, mobilisent les forces armées afin de venir au soutien ou en relai des forces de sécurité intérieure et de sécurité civile. Il est donc logique que d'autres ministères que le ministère de la défense contribuent à soutenir la charge qu'elles représentent.

Or cette charge peut être importante : après avoir mobilisé jusqu'à 10 500 soldats en janvier dernier, l'opération « Sentinelle » s'inscrit désormais dans la durée, avec un déploiement pérennisé à hauteur de 7 000 hommes 52 ( * ) ; son coût est estimé par la Cour des comptes 53 ( * ) à hauteur d'environ 1 million d'euros par jour en 2015.

Par ailleurs, le présent article prévoit qu' un bilan politique, opérationnel et financier des MISSINT en cours sera communiqué par le Gouvernement aux commissions chargées de la défense de l'Assemblée nationale et du Sénat, en même temps que le bilan de même nature que la LPM exige, en vue d'un débat au Parlement, en ce qui concerne les OPEX.

Votre commission a adopté l'article 2 ter (nouveau) ainsi rédigé .

Article 3 - (article 5 de la loi n° 1168-2013 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019) - Effectifs du ministère de la défense

Cet article vise à actualiser la trajectoire des réductions d'effectifs du ministère de la défense (missions « défense » et « anciens combattants ») définie à l'article 5 de la LPM de 2013.

? Celle-ci prévoyait une diminution nette de 33 675 équivalents temps pleins (ETP) sur la durée de la programmation (2014-2019), recouvrant 10 175 suppressions de postes déjà décidées au titre de la précédente loi de programmation et 23 500 nouvelles suppressions, qui devaient s'effectuer selon le calendrier suivant :

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Total

-7 881

-7 500

-7 397

-7 397

-3 500

0

-33 675

Au terme de cette évolution, les effectifs du ministère de la défense devaient représenter 242 279 agents équivalents temps pleins.

Cet ajustement à la baisse, destiné à permettre une diminution de la masse salariale, supposait une contraction du format des armées et la rationalisation des structures.

? Le présent projet de loi d'actualisation procède à une réduction du nombre de déflations, qui représenteront 6 918 ETP sur la période 2015-2018, contre 25 668 initialement prévus 54 ( * ) , soit 18 750 « moindres déflations ».

Cette réduction des déflations d'effectifs vise à répondre aux besoins opérationnels nouveaux liés au niveau d'engagement des forces et à la menace sur le territoire national : maintien dans la durée du dispositif de protection, renforcement des compétences en matière de renseignement et de cyberdéfense, nouveau format de la force opérationnelle terrestre, protection des sites sensibles, soutien...

Néanmoins, il convient de relever qu'une partie de cette réévaluation des objectifs de déflation correspond aussi, pour un volume de l'ordre de 3 500 ETP, à des déflations qui n'étaient pas réalisables

En tenant compte des déflations effectivement réalisées sur l'année 2014 (8007 postes), c'est un total de 14 925 déflations qui est prévu sur la période 2014-2019 ) alors que la LPM en prévoyait initialement 33 675 .

Ces évolutions d'effectifs seront réalisées selon le calendrier suivant :

2015

2016

2017

2018

2019

Total

0

+2 300

-2 600

-2 800

-3 818

-6 918

Les effectifs du ministère de la défense atteindront 261 161 ETP en 2019.

Une disposition de l'article indique que les augmentations d'effectifs de volontaires nécessaires à l'expérimentation du service militaire volontaire s'ajouteront à ces évolutions.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel et un amendement précisant que les augmentations d'effectifs éventuelles du service industriel de l'aéronautique s'ajouteront également à ces évolutions.

La commission a adopté cet article sans modification .

Article 4 - Rapport d'évaluation et actualisation de la programmation

Cet article constitue une nouvelle « clause de revoyure » de la programmation militaire : il prévoit qu' un rapport d'évaluation des dispositions de la LPM - actualisées par le présent projet de loi - relatives aux ressources financières et aux effectifs du ministère de la défense 55 ( * ) sera remis au Parlement en 2017, par le Gouvernement, expressément en vue, le cas échéant, d'une nouvelle actualisation de cette programmation. Il convient de noter que cette rédaction, retenue par le Gouvernement conformément à l'avis du Conseil d'État, vise à éviter une rédaction qui, en prévoyant plus directement le dépôt d'un nouveau projet de loi d'actualisation en 2017, aurait constitué une injonction au Gouvernement de nature inconstitutionnelle.

La Représentation nationale pourra ainsi apprécier en 2017, au vu du document que lui présentera l'Exécutif, si de nouveaux ajustements de notre outil de défense s'avèrent nécessaires. L'évaluation devra naturellement s'effectuer à la lumière tant de l'évolution du contexte international et des besoins de sécurité sur le territoire national que du début de la mise en oeuvre des mesures portées par le présent projet de loi, en termes de majoration du budget de la défense - en particulier au profit de la trajectoire d'équipement des forces - et de moindre réduction des effectifs.

Par cohérence avec ce dispositif, l'article 24 du présent projet de loi abroge l'article 58 de la LPM du 18 décembre 2013, qui prévoit actuellement une révision de cette loi de programmation « au plus tard quatre ans après sa promulgation », c'est-à-dire en décembre 2017.

Néanmoins, compte tenu des échéances électorales devant intervenir au printemps 2017, votre commission, à l'initiative du rapporteur, a souhaité préciser que le rapport d'évaluation prévu par le présent article devra être transmis au Parlement, au plus tard, à la fin du premier trimestre 2017 , soit le 31 mars ( amendement COM-10 ).

Il importe de relever que ce nouveau régime d'actualisation de la programmation militaire fondé sur un rapport d'évaluation du Gouvernement laissera subsister les dispositions en vigueur de la LPM touchant à l'évaluation de sa mise en oeuvre, toutes introduites en 2013 par votre commission :

- l' article 6 prévoyant, d'une façon générale, que la programmation militaire fait l'objet d' actualisations destinées à permettre « de vérifier, avec la représentation nationale, la bonne adéquation entre les objectifs fixés dans la [LPM] et les réalisations ». L'article précise les enjeux de ces actualisations : « Elles seront l'occasion d'affiner certaines des prévisions [...] inscrites [dans la LPM] , notamment dans le domaine de l'activité des forces et des capacités opérationnelles, de l'acquisition des équipements majeurs, du rythme de réalisation de la diminution des effectifs et des conséquences de l'engagement des réformes au sein du ministère de la défense. Ces actualisations devront également tenir compte de l'éventuelle amélioration de la situation économique et de celle des finances publiques afin de permettre le nécessaire redressement de l'effort de la Nation en faveur de la défense et tendre vers l'objectif d'un budget de la défense représentant 2 % du produit intérieur brut. Elles seront l'occasion d'examiner le report de charges du ministère de la défense, afin de le réduire dans l'objectif de le solder et de procéder au réexamen en priorité de certaines capacités critiques [...] » ;

- l' article 7 relatif aux pouvoirs de contrôle « sur pièces et sur place » désormais reconnus aux commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées de la défense afin de suivre et contrôler l'application de la programmation militaire 56 ( * ) ;

- l' article 8 prescrivant que, « chaque semestre, le ministre de la défense présente aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat un bilan détaillé de l'exécution des crédits de la mission "Défense" de la loi de finances et de la loi de programmation militaire » ;

- enfin, l' article 10 prévoyant que « le Gouvernement présente chaque année au Parlement, préalablement au débat d'orientation budgétaire, un rapport sur l'exécution de la loi de programmation militaire ». L'article précise que « ce rapport fait l'objet d'un débat » et doit comprendre la description de la stratégie définie par le Gouvernement en matière d'acquisition des équipements de défense ; de la mise en oeuvre des dispositifs budgétaires, financiers, fiscaux et sociaux instaurés pour l'accompagnement économique des territoires affectés par les conséquences des mesures de restructuration de la défense ; et de la ventilation, en dépenses, des ressources issues des recettes exceptionnelles. L'Assemblée nationale, en introduisant l'article 4 bis du présent projet de loi, a enrichi ces éléments attendus du rapport d'un volet consacré à la politique de gestion des ressources humaines du ministère de la défense 57 ( * ) .

Rappelons en outre que l' article 4 de la LPM prévoit l'intervention d'un débat annuel au Parlement sur les opérations extérieures (OPEX) en cours, et exige que « le Gouvernement communique, préalablement à ce débat, aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat un bilan politique, opérationnel et financier » de ces opérations . Par ailleurs, conformément à l' article 11 de la LPM, le rapport annuel sur les exportations d'armement de la France, autre vecteur de contrôle concernant le contexte d'application de la programmation militaire, est désormais adressé au Parlement, au plus tard, le 1 er juin de chaque année.

L'ensemble de ces dispositions, et en particulier les prérogatives du contrôle « sur pièces et sur place », permettront à la Représentation nationale, dès avant le rendez-vous de 2017 fixé par le présent article, de mener toutes les investigations et, le cas échéant, les interpellations du Gouvernement nécessaires au bon suivi de l'exécution de la loi.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié .

Article 4 bis - (article 10 de la loi n° 1168-2013 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019) - Rapport annuel sur l'exécution de la loi de programmation militaire

Cet article additionnel, inséré par l'Assemblée nationale, vise à compléter le contenu du rapport annuel sur l'exécution de la loi de programmation militaire par un volet consacré à la politique de gestion des ressources humaines du ministère de la défense.

L'article 10 de la LPM 2014-2019 prévoit que le gouvernement remet chaque année au Parlement, préalablement au débat d'orientation budgétaire, un rapport sur l'exécution de cette loi , qui donne lieu à un débat.

Ce rapport décrit la stratégie définie par le Gouvernement en matière d'acquisition des équipements de défense , laquelle définit les grandes orientations retenues en matière de systèmes d'armes et précise les technologies recherchées.

Ce rapport décrit également la mise en oeuvre des dispositifs budgétaires, financiers, fiscaux et sociaux instaurés pour l'accompagnement économique des territoires affectés par les conséquences des mesures de restructuration de la défense .

Ce rapport décrit, enfin, la ventilation, en dépenses, des ressources issues des recettes exceptionnelles , détaillée entre actions et sous-actions des programmes concernés.

L'amendement adopté par l'Assemblée nationale tend à prévoir que ce rapport décrit également la politique de gestion des ressources humaines du ministère de la défense . Il présente, à ce titre, les effectifs du ministère et leur répartition par armée, direction et service, ainsi que par catégorie ou par grade. Il justifie l'évolution de ces effectifs et cette répartition pour chaque année de la période 2014-2019. Il comporte une analyse de l'évolution de la masse salariale du ministère.

Votre commission a adopté un amendement COM-11 tendant à prévoir que ce volet « RH » comporte également un bilan de l'utilisation des mesures d'incitation au départ .

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 4 ter (nouveau) - Doctrine d'emploi des forces sur le territoire national

A la suite des attentats de janvier 2015, le Président de la République a décidé, conformément aux missions de protection dévolues aux armées par la LPM adoptée en 2013, de déployer massivement des militaires pour protéger la population et certains sites sur le territoire national.

Les diverses implications de l'opération Sentinelle, exceptionnelle dans son ampleur et dans sa durée, doivent être évaluées précisément car le nouveau contrat stratégique du présent projet de loi prévoit la capacité de déployer 7 000 hommes dans la durée sur le territoire.

Les conséquences de ce nouveau contrat stratégique doivent être tirées sur le rôle de l'armée par rapport aux forces de sécurité intérieure et de sécurité civile, sur la chaine de commandement, sur le cadre juridique de l'intervention des militaires, sur la doctrine d'emploi, sur la préparation opérationnelle et la formation ou encore sur le type de sites à protéger et les modalités de cette protection.

Le Président de la République a demandé au Premier ministre de préparer un rapport sur cette question. Il est indispensable que la représentation nationale ait connaissance des résultats de ce travail en cours.

C'est pourquoi la commission a adopté un amendement (COM-12) prévoyant que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 31 décembre 2015, un rapport sur les conditions d'emploi des forces armées sur le territoire national dans sa fonction de protection et que ce rapport fasse l'objet d'un débat.

En complément de cet amendement, la commission a également adopté un amendement de coordination dans le rapport annexé au projet de loi. Cet amendement COM-23 rappelle que l'opération Sentinelle doit être évaluée et que le Président de la République a demandé au Gouvernement d'engager une réflexion sur la doctrine d'emploi des forces sur le territoire national.

La commission a adopté l'article 4 ter (nouveau) ainsi rédigé.


* 44 Cf. l'exposé général du présent rapport.

* 45 Cf. l'exposé général du présent rapport, I.

* 46 Sous réserve de la confirmation de ce montant, le chiffrage précis de l'économie réalisée sur le coût des facteurs étant encore en cours par l'Inspection générale des finances et le Contrôle général des armées. Cf. l'exposé général du présent rapport (III, B, 1).

* 47 Cf. l'exposé général du présent rapport (II).

* 48 Contrôles sur les REX de la défense effectués auprès du secrétariat d'État au budget et de la direction générale de l'armement (DGA) sur le fondement de l'article 7 de la LPM du 18 décembre 2013 ; cf. la communication à la commission du 8 juillet 2014.

* 49 Contrôle sur la mise en place des SPV du ministère de la défense ou, le cas échéant, de solutions alternatives effectué auprès des ministères chargés des finances et de l'économie sur le fondement de l'article 7 de la LPM du 18 décembre 2013 ; cf. la communication à la commission du 1 er avril 2015.

* 50 Cf. l'exposé général du présent rapport (III, B, 1).

* 51 Note d'analyse de l'exécution budgétaire 2014, mission « Défense ».

* 52 Sur l'opération « Sentinelle », voir l'exposé général du présent rapport.

* 53 Note d'analyse de l'exécution budgétaire 2014, mission « Défense ».

* 54 En 2014, le nombre de déflations réalisées atteint 8007, soit 126 de plus que la cible initialement fixée. En conséquence, sur la période 2015-2019, il restait 25 668déflations à réaliser.

* 55 Respectivement, les articles 3 et 5 de la LPM du 18 décembre 2013, dans leur rédaction résultant des articles 2 et 3 du présent projet de loi.

* 56 Un premier bilan de la mise en oeuvre de ces dispositions est présenté au sein de l'exposé général du présent rapport (III, A).

* 57 Cf. ci-après le commentaire de l'article 4 bis du présent projet de loi.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page