Rapport n° 134 (2015-2016) de Mme Colette GIUDICELLI , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 4 novembre 2015

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N° 134

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 4 novembre 2015

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, de financement de la sécurité sociale pour 2016 ,

Par Mme Colette GIUDICELLI,

Sénateur,

Rapporteur.

Tome III :

Secteur médico-social

(1) Cette commission est composée de : M. Alain Milon , président ; M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général ; M. Gérard Dériot, Mmes Colette Giudicelli, Caroline Cayeux, M. Yves Daudigny, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Pierre Godefroy, Gérard Roche, Mme Laurence Cohen, M. Gilbert Barbier, Mme Aline Archimbaud , vice-présidents ; Mme Agnès Canayer, M. René-Paul Savary, Mme Michelle Meunier, M. Jean-Louis Tourenne, Mme Élisabeth Doineau , secrétaires ; M. Michel Amiel, Mme Nicole Bricq, MM. Olivier Cadic, Jean-Pierre Caffet, Mme Claire-Lise Campion, MM. Jean-Noël Cardoux, Daniel Chasseing, Olivier Cigolotti, Mmes Karine Claireaux, Annie David, Isabelle Debré, Catherine Deroche, M. Jean Desessard, Mme Chantal Deseyne, M. Jérôme Durain, Mmes Anne Emery-Dumas, Corinne Féret, MM. Michel Forissier, François Fortassin, Jean-Marc Gabouty, Mme Françoise Gatel, M. Bruno Gilles, Mmes Pascale Gruny, Corinne Imbert, MM. Éric Jeansannetas, Georges Labazée, Jean-Baptiste Lemoyne, Mmes Hermeline Malherbe, Brigitte Micouleau, Patricia Morhet-Richaud, MM. Jean-Marie Morisset, Philippe Mouiller, Louis Pinton, Mmes Catherine Procaccia, Stéphanie Riocreux, M. Didier Robert, Mme Patricia Schillinger, MM. Michel Vergoz, Dominique Watrin, Mme Evelyne Yonnet .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) :

3106 , 3127 , 3129 et T.A. 600

Sénat :

128 , 134 tomes I à VIII et 139 (2015-2016)

LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR DU SECTEUR MÉDICO-SOCIAL

Les observations du rapporteur
du secteur médico-social

En progression de 1,9 % par rapport par rapport à 2015, l' Ondam médico-social devrait s'établir à 18,2 milliards d'euros l'année prochaine, poursuivant ainsi la décélération entamée en 2013. L' Objectif global de dépenses (OGD) verrait quant à lui son niveau porté à 19,5 milliards d'euros en 2016, en hausse de 2,1 % .

Votre rapporteur regrette qu'il soit une fois de plus fait appel aux réserves de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) pour construire l'OGD. Elle estime en effet qu'il ne peut s'agir d'un mécanisme de financement solide à partir du moment où ces ressources n'ont, par nature, pas un caractère pérenne. S'agissant de l'exécution budgétaire 2015, votre rapporteur note que, une fois de plus, le secteur médico-social aura participé très largement à la maîtrise des dépenses d'assurance maladie .

Si la progression de l'Ondam et de l'OGD doit permettre de poursuivre les différents plans de créations de places , votre rapporteur exprime son inquiétude face à la situation de milliers de familles qui, faute de trouver en France des solutions de prise en charge adaptées, sont contraintes de se tourner vers la Belgique. Tout en se satisfaisant du déblocage d'une enveloppe ponctuelle de 15 millions d'euros , annoncé par la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, elle demeure attentive à ce que des améliorations structurelles puissent être rapidement apportées à l'organisation de l'offre médico-sociale ainsi qu'au processus d'orientation des personnes handicapées.

Sans remettre en cause la pertinence du transfert du financement des dépenses de fonctionnement des établissements et services d'aide par le travail (Esat) de l'Etat vers l'assurance maladie prévu à l'article 46 du présent projet de loi, votre rapporteur s'interroge sur la façon dont seront définis, d'ici 2017, les contours financiers de la réforme. Elle juge par ailleurs qu'il conviendra de prêter une attention particulière à la façon dont évolueront, à partir de cette date, les enveloppes consacrées au fonctionnement des Esat et à l'aide au poste, désormais placées sous la responsabilité de deux financeurs différents.

Votre rapporteur reconnaît également l'intérêt de la généralisation prévue à l'article 47, selon un calendrier qui devrait s'étaler sur six années, des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (Cpom) dans les établissements et services pour personnes handicapées, lorsque ceux-ci relèvent de la tarification du directeur général de l'ARS. Elle estime nécessaire de veiller à la cohérence des mesures proposées en matière de contractualisation dans le secteur médico-social. Enfin, elle note qu'à partir du moment où la réforme proposée ne fait l'objet d'aucune mesure d'accompagnement spécifique, les marges de manoeuvre des cocontractants pour définir ensemble des objectifs d'amélioration de la qualité et de la prise en charge risquent de s'avérer limitées.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

En s'établissant à 18,2 milliards d'euros en 2016, soit une hausse de 1,9 % par rapport à l'année 2015, l'Ondam médico-social connaîtra une progression plus soutenue que celle de l'Ondam dans son ensemble. Ce constat positif traduit un effort louable en faveur du secteur médico-social qui mérite malgré tout d'être nuancé. La décélération du rythme de progression de l'Ondam médico-social se poursuit et celui-ci continue de contribuer très largement à la régulation des dépenses d'assurance maladie par le biais des gels de crédits qui sont effectués au cours de chaque exercice budgétaire.

Comme chaque année, l'Ondam médico-social sur lequel va se prononcer le Parlement sera abondé, notamment par une partie de ressources propres de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), pour former l'Objectif global de dépenses. Celui-ci s'établirait à 19,5 milliards d'euros l'année prochaine, en augmentation de 2,1 % par rapport à 2015. Une fois de plus, il est prévu de mettre à contribution les réserves de la CNSA pour former l'OGD, mécanisme qui ne peut constituer une solution pérenne de financement.

Au total, 405 millions d'euros de crédits supplémentaires seront consacrés au renforcement des moyens existants dans les établissements et services médico-sociaux, aux créations de places ainsi qu'à la poursuite du processus de médicalisation et de réouverture du tarif global dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Une enveloppe spécifique, d'un montant de 15 millions d'euros, devrait permettre de débloquer la situation de familles qui, faute de solutions d'accueil adaptées, sont aujourd'hui contraintes de se tourner vers la Belgique. Particulièrement sensible à cette question, votre rapporteur insiste sur la nécessité de mieux adapter l'offre d'établissements et services ainsi que le processus d'orientation par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), dans le but d'éviter les ruptures de parcours.

Sans remettre en cause l'intérêt du transfert vers l'assurance maladie du financement des dépenses de fonctionnement des établissements et services d'aide par le travail (Esat) tel qu'il est prévu à l'article 46, votre rapporteur regrette que le Parlement ait à se prononcer dès l'automne 2015 sur le principe d'une réforme dont les modalités financières ne seront définies qu'à l'horizon 2017, date de mise en oeuvre du transfert. Elle insiste sur la nécessité d'abonder l'Ondam médico-social à un niveau suffisant pour que le coût du transfert ne soit pas porté, in fine , par les ressources propres de la CNSA à travers l'OGD. Elle juge également nécessaire de veiller à ce que les enveloppes consacrées respectivement aux dépenses de fonctionnement et à l'aide au poste, désormais placées sous la responsabilité de deux financeurs différents - l'assurance maladie et l'Etat - évoluent à l'avenir dans des proportions équivalentes.

Enfin, votre rapporteur reconnaît l'intérêt de l'article 47 qui généralise, sur une période de six ans, l'utilisation des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (Cpom) dans les établissements et services pour personnes handicapées, lorsque ces derniers sont tarifés par le directeur général de l'ARS. Si cette réforme permettra d'assurer un financement plus souple et modernisé des structures concernées, votre rapporteur souligne que les Cpom doivent également être conçus comme des outils d'amélioration de la qualité et de réorganisation de l'offre. Or, en l'absence d'un accompagnement financier dédié, il est possible que les ambitions des cocontractants en la matière se trouvent nécessairement réduites.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LA PROGRESSION DES CRÉDITS ALLOUÉS AU SECTEUR MÉDICO-SOCIAL : UN EFFORT DE PLUS EN PLUS CONTRAINT

A. LA POURSUITE DE LA DÉCÉLÉRATION DE L'ONDAM MÉDICO-SOCIAL ET DE L'OBJECTIF GLOBAL DE DÉPENSES

1. L'exécution de l'Ondam médico-social au cours de l'exercice 2015

Le Parlement se prononce chaque année en loi de financement de la sécurité sociale sur le niveau des crédits d'assurance maladie consacrés au financement des établissements et services médico-sociaux. Ces crédits sont regroupés au sein de deux des sous-objectifs de l'Objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam). Il s'agit, d'une part, de la contribution de l'assurance maladie aux dépenses des établissements et services pour personnes âgées, d'autre part de la contribution d'assurance maladie destinée aux établissements et services pour personnes handicapées. Ces deux sous-objectifs forment ce qui est communément appelé l' Ondam médico-social.

Retracé comptablement au sein de la section I du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), l'Ondam médico-social est complété chaque année par une partie des ressources propres de la CNSA correspondant traditionnellement à une fraction du produit de la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA). Cet ensemble forme l' Objectif global de dépenses (OGD), dont le niveau est fixé par voie réglementaire une fois la loi de financement publiée.

L'Ondam médico-social se différencie des autres composantes de l'Ondam par le fait qu'il s'agit d'une enveloppe fermée et non d'une prévision de dépenses. Cette spécificité conduit d'ailleurs le Sénat à regretter chaque année la contribution de l'Ondam médico-social à la maîtrise des dépenses d'assurance maladie par le biais des gels de crédits qui sont effectués systématiquement en début d'exercice. Contraire au principe de fongibilité asymétrique, cette contribution est, en outre, toujours largement supérieure à la part de l'Ondam médico-social dans le total des dépenses d'assurance maladie.

Ainsi, en 2015, comme les années précédentes, l'Ondam médico-social aura très largement participé à la régulation des dépenses d'assurance maladie. Selon les données fournies par la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), 185 millions d'euros de crédits auront été mis en réserve sur l'ensemble du champ médico-social. Sur ces 185 millions d'euros, 85 millions sont effectivement annulés à l'article 6 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016. Le plan d'aide à l'investissement (PAI) et les réserves de la CNSA ont supporté le reste des mises en réserve.

Figure n° 1 : Contribution du secteur médico-social à la régulation de l'Ondam sur la période 2011-2015

Gel

Surgel

Contribution du champ médico-social aux mises en réserve

2011

Objectif global de dépenses

28,7

19 %

Plan d'aide à l'investissement

71,3

Réserves de la CNSA

TOTAL

100

2012

Objectif global de dépenses

37

18 %

Plan d'aide à l'investissement

63

Réserves de la CNSA

TOTAL

100

2013

Objectif global de dépenses

52

18 %

Plan d'aide à l'investissement

48

Réserves de la CNSA

TOTAL

100

2014

Objectif global de dépenses

51

42

11 %

Plan d'aide à l'investissement

49

Réserves de la CNSA

TOTAL

100

42

2015

Objectif global de dépenses

65

20

23 %

Plan d'aide à l'investissement

25

Réserves de la CNSA

75

TOTAL

90

95

(en millions d'euros)

Source : Réponses aux questionnaires budgétaires

Au final, l'Ondam médico-social devrait s'établir, après annulation des crédits mis en réserve, à 17,8 milliards d'euros en 2015 , soit une progression de 1,7 % par rapport à 2014, et non de 2,2 %, comme prévu initialement par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

2. Une enveloppe de financement qui progresse de façon moins dynamique en 2016

En 2016, l'Ondam médico-social devrait s'élever à 18,2 milliards d'euros , soit environ 10 % de l'Ondam dans son ensemble, qui s'établirait à 185,2 milliards d'euros.

8,9 milliards d'euros seront consacrés au financement des établissements et services pour personnes âgées et 9,3 milliards d'euros à celui des établissements et services pour personnes handicapées.

Traditionnellement, l'Ondam médico-social progresse de façon plus dynamique que l'Ondam dans son ensemble. Ce rythme d'augmentation relativement soutenu traduit les efforts qui ont été réalisés au cours des dernières années pour renforcer l'encadrement en soins dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et pour créer des places nouvelles.

Il n'en demeure pas moins qu'en s'établissant à 1,9 % l'année prochaine, le taux d'augmentation de l'Ondam médico-social va, comme les années précédentes, continuer à ralentir et à se rapprocher de celui de l'Ondam dans son ensemble. Si une telle évolution est compréhensible dans le contexte actuel des finances publiques, elle conduit à déconnecter progressivement les financements des besoins effectivement constatés dans le secteur.

2011

2012

2013

Montant
(en Mds €)

Progression

Montant
(en Mds €)

Progression

Montant
(en Mds €)

Progression

Ondam médico-social voté en LFSS

15,8

3,80 %

16,5

4,20 %

17,1

4,00 %

Ondam voté
en LFSS

167,1

2,90 %

171,7

2,80 %

175,4

2,70 %

2014

2015

2016

Montant
(en Mds €)

Progression
(en %)

Montant
(en Mds €)

Progression
(en %)

Montant
(en Mds €)

Progression
(en %)

Ondam médico-social voté en LFSS

17,6

3,00 %

17,9

2,20 %

18,2

1,90 %

Ondam voté
en LFSS

179,2

2,40 %

182,3

2,10 %

185,2

1,75 %

Figure n° 2 : La décélération progressive de l'Ondam médico-social sur la période 2010-2016

Source : Commission des affaires sociales, à partir des documents budgétaires fournis au moment de l'examen de chaque LFSS - les pourcentages d'évolution sont ceux calculés une fois les dépenses rebasées à la fin de chaque exercice

En 2016, l'Ondam médico-social devrait être complété à hauteur de 1,2 milliard d'euros par une fraction du produit de la CSA, de 113 millions d'euros de droits sur les tabacs et de 110 millions d'euros par un prélèvement sur les réserves de la CNSA.

L'OGD s'établirait donc à 19,5 milliards d'euros, en hausse de 2,1 % par rapport à 2014.

Votre rapporteur note que, comme l'année dernière, les réserves de la CNSA sont mises à contribution pour abonder l'enveloppe destinée au financement des dépenses des établissements et services médico-sociaux. Un tel mécanisme ne saurait constituer un outil pérenne pour le financement du secteur.

Au total, ce sont 405 millions d'euros de moyens supplémentaires qui seraient alloués aux établissements et services pour personnes âgées et handicapées en 2016, avec pour objectif de permettre :

- une revalorisation de 0,8 % des moyens de fonctionnement dans les structures existantes ;

- le soutien à la création de places : 45 millions d'euros pour la mise en oeuvre des plans de création de places pour les établissements et services pour personnes handicapées, 60,4 millions d'euros pour le déploiement du plan autisme 2013-2017, 40 millions d'euros au titre des plans solidarité grand âge et Alzheimer et, enfin, 8,1 millions d'euros pour le plan maladies neuro-dégénératives ;

- la poursuite du processus de médicalisation des Ehpad pour 100 millions d'euros et celle de la réouverture du tarif global pour 10 millions d'euros.

B. L'ÉVOLUTION DU BUDGET DE LA CAISSE NATIONALE DE SOLIDARITÉ POUR L'AUTONOMIE

1. L'exécution budgétaire sur les exercices 2014 et 2015
a) Un résultat légèrement excédentaire à la fin de l'exercice 2014

A la fin de l'année 2014, le budget de la CNSA s'établissait à 21,657 milliards d'euros , traduisant un résultat excédentaire de 25,4 millions d'euros alors que le troisième budget modificatif adopté lors du conseil du 18 novembre 2014 prévoyait un résultat déficitaire de 160,5 millions d'euros. La sous-consommation de l'OGD (78,6 millions d'euros), le gel du PAI (48,5 millions d'euros), l'abandon ou la diminution de certaines dépenses en titre de PAI antérieurs (9 millions d'euros) ainsi que la sous-consommation des crédits des sections IV (38,1 millions d'euros) et V hors PAI (3,7 millions d'euros) expliquent cette évolution. Le niveau des réserves de la CNSA s'établit dès lors à 443,8 millions d'euros.

Le Sénat s'est longtemps ému de la sous-consommation de l'OGD. Votre rapporteur note que, si l'OGD demeure en partie sous-consommé, les améliorations apportées dans le pilotage des enveloppes allouées aux établissements et services permettent de réduire progressivement cette sous-consommation, ce dont il convient de se féliciter.

Votre rapporteur s'inquiète en revanche du fait que le PAI continue de constituer une variable d'ajustement commode pour rééquilibrer le budget de la CNSA. Une telle pratique est en totale contradiction avec les besoins de soutien à l'investissement dans le secteur médico-social.

b) Un exercice 2015 en partie consacré à la mise en oeuvre, par anticipation, des premières mesures prévues par le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement

Le budget primitif adopté par le Conseil de la CNSA le 18 novembre 2015 s'établissait à 22,667 milliards d'euros .

Outre les dépenses traditionnelles relatives à la mise en oeuvre des plans de créations de places, à la poursuite de la médicalisation des Ehpad, à la réouverture du tarif global ainsi qu'à la poursuite de la convergence tarifaire, l'exercice 2015 aura également été consacré au financement anticipé de certaines des dépenses prévues dans le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement.

En application de l'article 74 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 1 ( * ) , 20 millions d'euros, issus du produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa), ont été versés à l' Agence nationale de l'habitat (Anah) pour l'adaptation de logements privés à la perte d'autonomie. 15 000 logements devaient pouvoir être adaptés en 2015.

D'autres mesures, qui s'inscrivent elles aussi dans le cadre du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement, ont été financées à partir des réserves de la CNSA :

- un PAI destiné aux logements-foyers , à hauteur de 2,9 millions d'euros ;

- une contribution de 5 millions d'euros au fonds de compensation du handicap ;

- 4 millions d'euros destinés aux aidants et à la préfiguration des conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie ;

- 0,45 million d'euros pour financer une plateforme téléphonique consacrée à l'information et à l'orientation des personnes âgées.

L'adoption définitive du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement permettra de donner une base légale à l'ensemble de ces dépenses qui ne seront plus financées par les réserves de la CNSA mais bien par le produit de la Casa.

Il en est de même s'agissant de l'abondement à hauteur de 25,65 millions d'euros du concours relatif à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), prévu à l'article 63 bis de ce projet de loi, et qui doit permettre de compenser l'augmentation du point d'indice dans la branche de l'aide à domicile .

100 millions d'euros issus des réserves de la CNSA doivent également venir alimenter le PAI , conformément à l'engagement gouvernemental d'y consacrer 300 millions d'euros sur la période 2015-2017. Le conseil de la CNSA du 14 avril 2015 a décidé d'utiliser 10 % de l'enveloppe pour répondre à des situations spécifiques et de répartir le solde entre les secteurs personnes âgées (70 % du solde) et personnes handicapées (30 %).

Le produit de la Casa non consommé en 2015 doit venir abonder les réserves de la CNSA.

Deux budgets modificatifs ont été adoptés les 14 avril et 7 juillet 2015. Un troisième le sera le 17 novembre prochain. Il devrait acter une nouvelle actualisation des prévisions de recettes ainsi qu'une annulation à hauteur de 85 millions d'euros des crédits alloués à la section I. Le résultat de l'exercice 2015 s'établirait à - 238,1 millions d'euros. Cette prévision ne tient pas compte de la sous-consommation probable de certains crédits, notamment de l'OGD, ni d'annulations supplémentaires de dépenses.

Le budget 2015 de la CNSA

Le budget primitif 2015 a été présenté et voté lors du conseil de la CNSA du 18 novembre 2014. Il s'établissait à 22,667 milliards d'euros, soit une croissance de 4,4 % par rapport au troisième budget modificatif de 2014 (21,717 milliards d'euros). Il présentait un résultat négatif de - 116,6 millions d'euros, du fait d'une contribution sur réserves de 107,3 millions d'euros à la construction de l'OGD et d'un versement complémentaire de 10 millions d'euros aux MDPH, lui aussi financé sur réserves.

Un premier budget modificatif 2015 a été approuvé par le conseil du 14 avril 2015 afin :

- d'intégrer un PAI de 100 millions d'euros ;

- d'anticiper un certain nombre de dépenses dans l'attente de l'adoption définitive du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement pour un montant de 12,4 millions d'euros financés sur réserves ;

- de préciser les dépenses relevant de la section V bis pour le financement de l'Anah à hauteur 20 millions d'euros.

Le déficit prévisionnel pour 2015 avait ainsi été porté à 235,3 millions d'euros.

Un deuxième budget modificatif 2015 a été approuvé par le conseil du 7 juillet 2015. Il prenait notamment en compte :

- l'actualisation de nouvelles prévisions de recettes de la direction de la Sécurité sociale (DSS) en date du 29 mai 2015 ;

- l'inscription d'un poste « emplois d'avenir 2015 » pour un montant de 7,351 millions d'euros, financé par les fonds propres de la Caisse.

Le déficit prévisionnel pour 2015 avait été très légèrement réduit à 233,7 millions d'euros.

Un troisième budget modificatif 2015, qui porte sur des éléments intervenus depuis, va être soumis à l'approbation du conseil du 17 novembre 2015.

Il prendra principalement en compte :

- une nouvelle actualisation des prévisions de recettes de la DSS ;

- une annulation de crédits de 85 millions d'euros en section I.

Le résultat négatif du budget 2015 passerait de - 233,7 millions d'euros à - 238,1 millions d'euros, tenant compte en particulier d'une nouvelle contribution à la construction de l'OGD ainsi que d'un nouveau versement de 10 millions d'euros consacré au financement des MDPH.

Source : Réponses aux questionnaires budgétaires

2. Les perspectives pour l'exercice 2016

L'exercice 2016 doit normalement correspondre à la première année de mise en oeuvre du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement . Le produit de la Casa sera entièrement utilisé au financement de la réforme. Cette recette dynamique devrait s'établir à 711 millions d'euros en 2015.

Figure n° 3 : Perspectives d'évolution du produit de la Casa sur la période 2015-2020

(en millions d'euros)

2015

2016

2017

Montant

Progression

Montant

Progression

Montant

Progression

711

4 %

726

2 %

745

3 %

2018

2019

2020

Montant

Progression

Montant

Progression

Montant

Progression

772

4 %

800

4 %

830

4 %

Source : Réponses aux questionnaires budgétaires

Le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement prévoit de consacrer 55,9 % du produit de la Casa en 2016 puis 70,5 % au cours des exercices suivants à la réforme de l'allocation personnalisée à domicile (APA). La fraction de la Casa utilisée pour les conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie devrait s'établir, in fine , à 28 %. L'enveloppe allouée aux dépenses de formation  correspondrait à une part égale à 4 % au maximum de la fraction de Casa allouée à la conférence des financeurs. Enfin, 5 millions d'euros seraient orientés vers le fonds de compensation du handicap.

Figure n° 4 : Les dépenses financées par le produit de la Casa dans le cadre du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement

Objet

Section

de la CNSA

Enveloppe allouée aux conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie (article 4 du projet de loi)

V

Contribution au fonds de compensation du handicap (article 4)

V

Formation des aidants, des accueillants familiaux et des bénévoles intervenant dans la lutte contre l'isolement (article 8)

IV

Réforme de l'APA à domicile (article 38)

II

Source : Commission des affaires sociales

Autre fait marquant de l'exercice à venir, une nouvelle ressource propre devrait être attribuée à la CNSA en lieu et place de la part de CSG et de la contribution des régimes d'assurance vieillesse qui le sont actuellement.

Il s'agit d'une fraction égale à 1,5 % de la part de la contribution sociale sur les revenus du capital, qui est jusqu'à présent allouée à la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav). Le montant de cette fraction devrait s'élever à 1,4 milliard d'euros l'année prochaine. Ce changement, prévu à l'article 15 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, entend tirer les conséquences de l'arrêt De Ruyter de la Cour de justice de l'Union européenne, le Gouvernement ayant choisi d'affecter les prélèvements sociaux sur le capital au financement de prestations non contributives 2 ( * ) .

II. LES MUTATIONS DE L'OFFRE DANS LE SECTEUR MÉDICO-SOCIAL

A. LE SOUTIEN À L'ÉVOLUTION DE L'OFFRE MÉDICO-SOCIALE

1. La contribution de l'Objectif global de dépenses à la mise en oeuvre des plans de créations de places

L'offre d'équipements et services destinés aux personnes handicapés s'établit aujourd'hui à 152 400 lits et places pour enfants et 320 000 lits et places pour adultes. 230 000 d'entre eux sont financés par l'assurance maladie.

Figure n° 5 : La répartition de l'offre d'établissements et services sociaux
et médico-sociaux pour personnes handicapées en 2014

Source : Annexe 1 au PLFSS pour 2016, programme de qualité et d'efficience « Invalidité et dispositifs gérés par la CNSA »

Dans le secteur des personnes âgées, 760 000 places sont aujourd'hui installées dont environ 90 % bénéficient d'un financement par l'assurance maladie.

Figure n° 6 : La répartition de l'offre d'établissements et services pour personnes âgées en 2014 (hors services d'aide et d'accompagnement à domicile)

Source : Annexe 1 au PLFSS pour 2016, programme de qualité et d'efficience « Invalidité et dispositifs gérés par la CNSA »

Lors de son conseil du 7 juillet 2015, la CNSA a indiqué qu'en 2014, 11 458 places avaient été ouvertes dans le secteur personnes âgées et 4 697 dans le secteur personnes handicapées. Le plan solidarité grand âge (PSGA) et le plan pluriannuel pour un accompagnement tout au long de la vie des personnes handicapées, lancés respectivement en 2007 et 2008, se poursuivent.

Selon les données fournies par la CNSA, 28 233 places prévues dans le cadre du plan pour les personnes handicapées étaient installées à la fin de l'année 2014, dont 16 359 places pour adultes et 11 874 places pour enfants. S'agissant du PSGA, 67 434 places étaient installées à la même date, se répartissant de la façon suivante : 34 900 places en Ehpad, 6 056 places d'accueil de jour, 3 677 places en hébergement temporaire, 22 801 places de services de soins infirmiers à domicile (Ssiad).

Le processus d'achèvement de ces plans nationaux s'accompagne du lancement du plan autisme et du plan maladies neuro-dégénératives, qui succède au plan Alzheimer. 68 millions d'euros de mesures nouvelles doivent être alloués au plan maladies neuro-dégénératives sur une période de cinq ans : 28 millions d'euros sont destinés à financer la création de Maia 3 ( * ) et 40 millions d'euros au financement de places d'unités d'hébergement renforcées (UHR), d'équipes spécialisées Alzheimer (ESA) et de plates-formes de répit.

En 2016, ce sont un peu plus de 150 millions d'euros issus de l'OGD qui doivent être consacrés à l'ouverture de places dans les secteurs personnes âgées et handicapées.


Bilan des plans de créations de places au 31 décembre 2014


• Le plan solidarité grand âge (PSGA) et le plan Alzheimer

Au 31 décembre 2014, 67 434 places destinées aux personnes âgées étaient installées. Elles se répartissent de la façon suivante :

Nombre de places installées

Objectif d'installations

EHPAD

34 900

37 500

Accueil de jour

6 056

10 900

Hébergement temporaire

3 677

6 100

SSIAD

22 801

36 000

S'agissant des places dédiées à l'accompagnement des malades d'Alzheimer, elles se répartissent de la façon suivante :

Nombre de places installées

Objectif d'installations

UHR

1 250

1 600

ESA

4 304

5 000

PASA

16 112

25 000

Fin 2014, plus de 6 communes sur 10 étaient couvertes par un dispositif Maia.


Le programme pluriannuel de créations de places pour un accompagnement tout au long de la vie des personnes handicapées

Au 31 décembre 2014, 28 233 places étaient installées :

- 16 359 places pour adultes, dont 10 531 places en établissement et 5 828 places en milieu ordinaire ;

- 11 874 places pour enfants, dont 4 340 places en établissement et 7 535 places en milieu ordinaire.


Les perspectives pour 2015-2019

25 500 places d'établissements et services pour personnes âgées doivent être ouvertes dont plus de 18 600 places d'Ehpad.

Environ 14 000 places pour personnes handicapées doivent être ouvertes ainsi que 4 700 places pour personnes présentant des troubles autistiques.

Source : Conseil de la CNSA du 7 juillet 2015 - dossier de presse

Votre rapporteur tient à faire part de ses inquiétudes concernant la situation des familles qui, faute de trouver en France des solutions d'accueil adaptées, sont contraintes de se tourner vers la Belgique. Près de 4 500 adultes et un peu plus de 1 500 enfants sont concernés . La France continue de financer la prise en charge de ces personnes - l'Ondam y contribue à hauteur de 82 millions d'euros - sans être en mesure de leur offrir une solution d'accueil sur son territoire.

Cette situation est aux yeux de votre rapporteur révélatrice de l'inadaptation de l'offre de places en établissements et services mais également des faiblesses du dispositif actuel d'orientation. Elle se traduit par des situations douloureuses pour les familles concernées, confrontées à l'échec du système français, à l'éloignement géographique et à une offre de prise en charge en Belgique encore peu connue et dont la qualité s'avère hétérogène.

Le 1 er mars 2014, le Gouvernement a signé avec la Belgique un accord devant permettre d'assurer un meilleur suivi des Français pris en charge dans les structures belges.

L'article 21 bis , inséré à l'initiative du Gouvernement, en première lecture du projet de loi relatif à la modernisation du système de santé, vise à améliorer le processus d'orientation par les MDPH avec la mise en place d'un plan d'accompagnement global et, le cas échéant, d'un groupe opérationnel de synthèse chargé de mettre en oeuvre ce plan. Vingt-trois départements sont déjà engagés, à titre expérimental, dans ce dispositif. Votre rapporteur est particulièrement attentive à la mise en oeuvre de ces mesures ainsi qu'aux travaux actuellement en cours pour, dans la continuité des recommandations formulées par Denis Piveteau dans son rapport « Zéro sans solution », éviter les ruptures de parcours et ne plus laisser les personnes handicapées et leurs familles désoeuvrées face aux lacunes de l'offre de structures et de son organisation.

La ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, a annoncé que seraient mobilisés 15 millions d'euros pour débloquer la situation de certaines familles. Votre rapporteur salue cette annonce tout en notant le caractère ponctuel de l'aide envisagée.

2. Le soutien à l'investissement dans le secteur médico-social

En permettant de limiter le recours à l'emprunt ainsi que l'impact des dépenses d'investissements sur le reste à charge acquitté par les usagers, l'aide à l'investissement apportée par la CNSA joue un rôle essentiel pour assurer l'évolution et la modernisation de l'offre dans le secteur médico-social. Entre 2006 et 2014, la CNSA a consacré près de 2 milliards d'euros au soutien à l'investissement, une enveloppe qui correspond au cofinancement de 3 278 opérations.

Figure n° 7 : Moyens financiers consacrés par la CNSA à l'investissement dans son champ de compétence entre 2006 et 2014

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Montants notifiés

497,3

180

296,1

326,1

183,2

61,5

135,3

140

126,2

(en millions d'euros)

Source : Réponses au questionnaire budgétaire

Depuis 2014, les enveloppes consacrées au PAI sont directement allouées aux ARS qui en assurent elles-mêmes la gestion. Selon le Gouvernement, ce mécanisme de déconcentration, qui permet d'éviter un processus de validation des dossiers d'aide à l'investissement par la CNSA, contribue à une utilisation plus rapide des crédits et, ce faisant, à accélérer le soutien aux opérations engagées par les établissements et services.

Entre 2011 et 2014, le PAI a été financé à partir d'une partie du produit de la CSA, déterminée chaque année en loi de financement de la sécurité sociale. Depuis deux ans, le PAI ne fait l'objet d'aucune disposition dans la loi de financement de la sécurité sociale. Le Gouvernement s'est en effet engagé à financer le plan à hauteur de 300 millions sur la période 2015-2017, à partir du produit de la Casa qui n'aura pas été consacré à la mise en oeuvre du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement. La commission des affaires sociales défend quant à elle depuis plusieurs années l'idée de sanctuariser les crédits consacrés à l'aide à l'investissement en créant une section dédiée au sein du budget de la CNSA qui serait alimentée par une partie du produit de la CSA. Une disposition allant en ce sens a été introduite par le Sénat en première puis en deuxième lecture du projet de loi ASV 4 ( * ) .

B. LE FINANCEMENT DES ÉTABLISSEMENTS D'HÉBERGEMENT POUR PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES

1. La poursuite du processus de médicalisation et de la réouverture du tarif global

Comme les années précédentes, la poursuite du processus de médicalisation des Ehpad constituait l'une des priorités identifiées dans la circulaire du 23 avril 2015 fixant le cadre de la campagne budgétaire. 103,7 millions d'euros devaient y être consacrés dont environ 11 millions d'euros issus des économies générées par le processus de convergence tarifaire. L'année prochaine, le Gouvernement prévoit d'allouer à nouveau 100 millions d'euros à la médicalisation .

Au 31 décembre 2014, 91 % des Ehpad étaient tarifés au GIR moyen pondéré soins 5 ( * ) , soit sept points de plus qu'à la fin de l'année 2013. 9 % des Ehpad conservent une tarification fondée sur les dotations minimales de convergence (Dominic).

En 2016 comme en 2015 et 2014, 10 millions d'euros doivent être destinés à la poursuite de la réouverture du tarif global dans les Ehpad . Cette option tarifaire permet de financer sur l'Ondam médico-social un ensemble plus large de dépenses de soins effectuées en Ehpad tandis que le tarif partiel n'en prend en charge qu'une partie, les autres dépenses étant retracées dans le sous-objectif soins de ville 6 ( * ) . Le passage du tarif partiel vers le tarif global est soumis à l'accord du directeur général de l'ARS, en fonction des crédits dont il dispose dans le cadre de sa dotation régionale limitative (DRL) et des objectifs fixés par le projet régional de santé. Son coût moyen s'élève à 200 000 euros par établissement. Sont visés en priorité les Ehpad en tarif partiel qui disposent d'une pharmacie à usage intérieur (PUI).

2. Les perspectives ouvertes par le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement

Le rapport annexé au projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement prévoit le lancement de travaux de simplification de l'organisation et de la gestion des Ehpad. Un groupe de travail, piloté par le secrétariat d'Etat à la famille, à l'enfance, aux personnes âgées et à l'autonomie s'est réuni au cours du premier semestre 2015. Ses réflexions ont conduit à l'introduction d'un article 40 bis au sein du projet de loi qui vise à substituer aux conventions tripartites conclues par chaque établissement des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (Cpom) signés par les organismes gestionnaires. Ces contrats continueront d'être signés avec le directeur général de l'ARS et le président du conseil départemental.

En couvrant un ensemble d'établissements gérés par un même gestionnaire, ils devraient permettre une meilleure mutualisation des financements et une fluidité accrue des parcours. Les Cpom pourront d'ailleurs intégrer d'autres catégories d'établissements et services, si ces structures sont sous la responsabilité du même organisme gestionnaire.

Autre différence par rapport aux conventions tripartites, la conclusion des Cpom permet de mettre fin au caractère annuel de la procédure budgétaire. Leur mise en oeuvre doit par ailleurs s'accompagner d'un changement dans les modalités d'allocation des ressources par l'assurance maladie ainsi que de la mise en place d'un mécanisme d'abondement du forfait soins, sur sept ans, destiné à permettre le rattrapage progressif entre les dotations soins effectivement allouées aux Ehpad et leur montant théorique.

Ces dispositions viennent s'ajouter à l'article 40 du projet de loi, qui doit permettre d' encadrer le prix des prestations relatives à l'hébergement dans les Ehpad non habilités à l'aide sociale ainsi qu'à l'article 41 qui organise la remontée d'informations, notamment tarifaires, devant permettre à la CNSA de développer un portail d'informations destiné aux personnes âgées et à leurs familles.

C. LE FINANCEMENT DES ÉTABLISSEMENTS ET SERVICES POUR PERSONNES HANDICAPÉES

Le chantier de la réforme de la tarification des établissements et services pour personnes handicapées a été lancé lors d'un comité stratégique du 26 novembre 2014 présidé par la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Une équipe projet doit veiller à la mise en oeuvre de la feuille de route qui a été définie, notamment dans la perspective de la réalisation d'une étude nationale de coûts en 2016.

Le présent projet de loi de financement contient par ailleurs deux mesures qui doivent permettre de donner plus de cohérence au financement des structures pour personnes handicapées.

1. Le transfert vers l'assurance maladie du financement des dépenses de fonctionnement des établissements et services d'aide par le travail

L'article 46 du présent projet de loi prévoit le transfert du financement des établissements et services d'aide par le travail (Esat) vers l'assurance maladie. Cette mesure, qui entrera en application le 1 er janvier 2017, est présentée comme indispensable au bon pilotage par les ARS des financements alloués aux structures pour personnes handicapées. Elle devrait également garantir davantage de souplesse pour les organismes gestionnaires. Les associations et fédérations rencontrées par votre rapporteur n'ont pas contredit ces arguments. Elles estiment cohérent d'inscrire pleinement les Esat dans le champ médico-social.

Pour autant, votre rapporteur note que, si le principe du transfert est acté dès ce projet de loi, la définition de ses modalités de mise en oeuvre financière est renvoyée à 2017. D'ici là, le Gouvernement devra trouver une recette permettant d'abonder l'Ondam médico-social pour couvrir les dépenses de fonctionnement des Esat - 1,46 milliard d'euros en 2015 - ainsi que le plan d'aide à l'investissement - 1,84 million d'euros. Dans l'hypothèse où le niveau de la recette affectée ne serait pas suffisant, votre rapporteur craint que les ressources propres de la CNSA qui abondent l'OGD ne soient davantage sollicitées, ce qui risquerait de se faire au détriment de la compensation des dépenses d'APA et de PCH. En tout état de cause, elle note que le transfert est envisagé à enveloppe constante, alors même que nombre d'Esat connaissent aujourd'hui une situation financière particulièrement contrainte.

Votre rapporteur s'inquiète également de la cohérence, à terme, de la réforme proposée. L'Etat continuera de financer l'aide au poste, conçue pour garantir un niveau minimum de rémunération aux travailleurs en Esat. Or les montants alloués à l'aide au poste sont directement liés au nombre de places en Esat et, par conséquent, au niveau de leurs dépenses de fonctionnement. A partir de 2017, les deux enveloppes - dépenses de fonctionnement et aide au poste - seront placées sous la responsabilité de deux financeurs différents - assurance maladie et Etat. Une telle situation n'est en rien source de simplification et ne permet pas de garantir une évolution cohérente des moyens alloués aux Esat.

2. La généralisation des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens dans le secteur personnes handicapées

L'article 47 prévoit la généralisation des Cpom dans les établissements et services pour personnes handicapées relevant de la compétence tarifaire de l'ARS. Ces contrats ont, jusqu'à présent, un caractère facultatif et n'ont été, de fait, signés que par une minorité de structures. Selon les données fournies par le Gouvernement en réponse au questionnaire budgétaire, 16 % des établissements et services sociaux et médico-sociaux seraient actuellement financés dans le cadre d'un Cpom.

L'objectif recherché par l'article 47 est, d'une part, de moderniser le financement des structures concernées en faisant passer celles qui font l'objet d'une tarification au prix de journée vers une dotation globale, d'autre part de permettre aux organismes gestionnaires de s'engager dans un processus d'amélioration de la qualité. La conclusion des Cpom devrait s'échelonner sur une période de six ans.

Votre rapporteur note que la réforme proposée ne fait pas l'objet d'un accompagnement financier spécifique, ce qui risque de limiter les marges de manoeuvre des cocontractants pour définir ensemble des objectifs de qualité et d'amélioration de la prise en charge.

Elle souligne également que le champ personnes handicapées n'est pas entièrement couvert par l'article 47. En particulier, les centres d'action médico-sociale précoce (Camsp), financés à 80 % par l'assurance maladie et 20 % par les départements sont exclus de la contractualisation obligatoire. Sans doute aurait-il été prématuré de les inclure au regard des difficultés financières que rencontrent actuellement nombre de départements. Pour autant, votre rapporteur considère qu'il serait cohérent d'envisager, à terme, leur inclusion, et ce d'autant plus que l'Assemblée nationale a explicitement prévu que les départements pourraient être signataires des Cpom, option qui n'était pas envisagée dans la rédaction initiale du projet de loi.

Cette question soulève celle, plus large, de la cohérence des mesures mises en oeuvre pour généraliser les Cpom dans le secteur médico-social. L'objectif est bien d'assurer, grâce à une gestion plus souple et modernisée des crédits au niveau du gestionnaire et non plus de l'établissement ou du service, davantage de continuité dans la prise en charge des personnes. Le Cpom peut constituer un élément important dans la mise en oeuvre de véritables « parcours ». Il n'est cependant en aucun cas la solution miracle qui permettra de pallier les lacunes de l'organisation de l'offre médico-sociale dont le départ de milliers d'enfants et d'adultes vers la Belgique constitue malheureusement l'illustration.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

__________

• Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA)

Geneviève Gueydan , directrice
Béatrice Guéneau-Castilla , directrice adjointe
Xavier Dupon t, directeur des établissements et services médico-sociaux
Sylvain Turgis , directeur des affaires générales et financières

• Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (Fehap)

Yves-Jean Dupuis , directeur général
Adeline Leberche , directrice du secteur social et médico-social

• Fédération hospitalière de France (FHF)

Annie Lelièvre, chargée du secteur vieillesse et handicap
Yves Gaubert, responsable du pôle finances/banque de données

• Syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées (Synerpa)

Jean-André Martini , conseiller communication et affaires publiques

Eric Fregona , conseiller technique

• Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (Uniopss)

Ronald Maire, conseiller technique organisation territoriale - politiques sanitaires et sociales
Caroline Selva, conseillère technique autonomie et citoyenneté des personnes âgées et des personnes handicapées

• Direction générale de la cohésion sociale (DGCS)

Cécile Lambert , sous-directrice des affaires financières et de la modernisation
Frédérique Chadel , cheffe de bureau de l'insertion, citoyenneté et parcours de vie des personnes handicapées
Julie Barrois , adjointe à la cheffe de bureau « Gouvernance du secteur social et médico-social »

• Union nationale des associations de parents d'enfants inadaptés (Unapei)

Thierry Nouvel , directeur général

• Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées et fragiles (Fegapei)

Muriel Vidalenc , directrice générale
Marie Aboussa , Directrice « Services aux adhérents »
Benjamin Oppert , conseiller relations institutionnelles


* 1 Article 74 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.

* 2 Plus de précisions sont fournies dans le tome VII « Examen des articles », dans le commentaire de l'article 15.

* 3 Initialement baptisées « maisons pour l'autonomie et l'intégration des malades d'Alzheimer », les Maia sont renommées à l'article 52 du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement « méthode d'action pour l'intégration des services d'aide et de soins dans le champ de l'autonomie ». Selon la CNSA, plus de 6 communes sur 10 étaient couvertes par un dispositif Maia à la fin de l'année 2014.

* 4 Article 45 ter du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement.

* 5 Le GIR moyen pondéré soins est un mode de calcul des dotations soins allouées aux établissements qui repose sur l'analyse conjuguée du degré de dépendance des résidents (le GIR moyen pondéré, mesuré à l'aide de la grille Aggir) et de leur besoin en soins (le Pathos moyen pondéré, mesuré à l'aide de l'outil Pathos). Il se substitue progressivement à un mode de tarification plus forfaitaire, la dotation minimale de convergence (Dominic).

* 6 L'article R. 314-167 du code de l'action sociale et des familles dispose que le tarif global comprend notamment les rémunérations versées aux médecins généralistes et aux auxiliaires médicaux libéraux exerçant dans l'établissement, ainsi que les examens de biologie et de radiologie et les médicaments dont les caractéristiques sont fixées par arrêté ; Le tarif partiel ne comprend pas ces charges, à l'exception de celles relatives au médecin coordonnateur et aux infirmières ou infirmiers libéraux.

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