CHAPITRE VI - Dispositions électorales applicables à l'étranger

Article 8 A (art. 2, 6 et 20 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 relative aux listes électorales consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République) - Actualisation des dispositions applicables à l'élaboration des listes électorales consulaires et aux opérations de vote à l'étranger

Introduit par votre commission, suivant l'avis favorable de son rapporteur, l'article 8 A résulte de l'adoption d'un amendement COM-17 de nos collègues Christophe-André Frassa et Jean-Yves Leconte. Il reprend l'article 1 er d'une proposition de loi organique déposée en novembre 2015 par nos collègues 15 ( * ) .

Le présent article modifie ou supprime des dispositions devenues inutiles ou obsolètes au sein de la loi n° 76-97 du 31 janvier 1976. Ainsi, il supprime, à son article 2, une référence à l'article L. 7 du code électoral abrogé par la décision du Conseil constitutionnel du 11 juin 2010 16 ( * ) . De même, à son article 6, il supprime des mentions obsolètes - comme le renvoi à la Communauté européenne - ou devenues inutiles ou incorrectes à la suite de l'adoption de la loi n° 2013-659 du 22 juillet 2013 relative à la représentation des Français établis hors de France.

Votre commission a adopté l'article 8 A ainsi rédigé .

Article 8 (art. 9 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 relative aux listes électorales consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République) - Inscription des Français de l'étranger sur les listes électorales

L'article 8 modifie les règles régissant l'inscription des Français établis hors de France sur les listes électorales. Un électeur français domicilié à l'étranger conserve son droit de vote. Il peut être inscrit sur les listes électorales consulaires ainsi que sur les listes électorales des communes françaises.

Article L. 12 du code électoral

Les Français et les Françaises inscrits au registre des Français établis hors de France de la circonscription consulaire dans laquelle ils ont leur résidence peuvent, sur leur demande, être inscrits sur la liste électorale de l'une des communes suivantes :

Commune de naissance ;

Commune de leur dernier domicile ;

Commune de leur dernière résidence, à condition que cette résidence ait été de six mois au moins ;

Commune où est né, est inscrit ou a été inscrit sur la liste électorale un de leurs ascendants ;

Commune sur la liste électorale de laquelle est inscrit ou a été inscrit un de leurs parents jusqu'au quatrième degré.

Pour les scrutins nationaux, un électeur français résidant à l'étranger peut donc voter auprès de son ambassade ou de son poste consulaire, s'il est inscrit sur la liste électorale consulaire, ou auprès de sa commune de rattachement en France. Dans ce cas, l'électeur doit choisir entre exercer son droit de vote à l'étranger ou en France. Ce choix vaut pour tous les scrutins nationaux (élection du Président de la République, du député, des représentants au Parlement européen, référendum national) et durant toute l'année. Chaque année, jusqu'au dernier jour ouvrable du mois de décembre, l'électeur peut donc modifier son choix. À défaut d'option, « il est réputé vouloir exercer son droit de vote à l'étranger », conformément à l'article 1 er du décret n° 2005-1613 du 22 décembre 2005.

Si l'électeur exerce son droit de vote pour les élections nationales à l'étranger, son inscription sur une liste électorale en France ne lui ouvre le droit de vote que pour les élections locales. Afin d'éviter la possibilité d'un double vote, notamment par procuration, la mention que l'électeur a opté pour exercer son droit de vote à l'étranger est portée sur la liste électorale de la commune de rattachement en France.

Au 23 novembre 2015, 475 712 électeurs étaient inscrits à la fois sur une liste électorale consulaire et sur une liste électorale en France, soit près de 40 % des personnes inscrites sur les listes électorales consulaires. A la même date, 418 677 électeurs doublement inscrits, soit 88 % d'entre eux, avaient opté pour exercer leur droit de vote pour les scrutins nationaux en France.

Cette possible double inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France a suscité des difficultés lors des élections de 2007 et de 2012. Le Conseil constitutionnel s'en est encore fait l'écho lors de ses observations sur le scrutin de 2012, invitant à une modification législative sur ce point.

Extraits des observations du Conseil constitutionnel
sur l'élection présidentielle des 22 avril et 6 mai 2012

En 2007, le Conseil constitutionnel avait eu l'occasion d'appeler l'attention sur les dysfonctionnements qui avaient perturbé la participation au vote des Français établis hors de France. De nombreux électeurs avaient eu à faire face à des difficultés n'ayant pas été radiés de leur liste consulaire alors qu'ils étaient récemment revenus de l'étranger ou, quoique résidant à l'étranger, ayant fait connaître leur choix de voter en France dans leur commune de rattachement. Pour pallier ces difficultés, le Conseil constitutionnel avait été conduit à admettre un dispositif d'urgence, au premier comme au second tours de l'élection, conçu comme suit.

Les personnes affirmant être indûment inscrites comme « votant à l'étranger » sur la liste d'émargement de leur commune de rattachement attestaient sur l'honneur :

- ne pas voter à l'étranger à l'élection présidentielle de 2007 et ne pas avoir établi de procuration ;

- ne pas être inscrites sur une liste électorale consulaire, ou ne pas avoir demandé à y être inscrites, ou avoir demandé à en être radiées, ou, étant inscrites sur cette liste, avoir demandé à voter en France ;

- être informées des sanctions prévues par le code électoral en cas de double vote, à savoir deux ans d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende en vertu des articles L. 92 et L. 93 du code électoral.

Le constat des difficultés établi en 2007 a été renouvelé en 2012. La répétition du même dispositif d'urgence, qui souligne l'acuité des difficultés rencontrées, ne saurait constituer une solution pérenne.

C'est pourquoi le Conseil constitutionnel invite les pouvoirs publics à une réflexion globale sur le dispositif retenu qui autorise l'inscription simultanée d'un même électeur sur deux listes électorales, municipale en France et consulaire à l'étranger. Cette réflexion revêt d'autant plus d'importance que les règles concernant l'élection présidentielle s'étendent désormais à d'autres élections se déroulant simultanément à l'étranger et en France.

L'application des règles en vigueur et les modalités de contrôle du dispositif mériteraient d'être revues, en particulier sur les points suivants :

- l'inscription d'office sur une liste électorale consulaire d'une personne immatriculée au consulat ;

- le traitement non automatique de la procédure inverse, à savoir le maintien sur une liste électorale consulaire d'une personne n'étant plus immatriculée dont la radiation de la liste n'interviendrait qu'après une demande en ce sens ;

- la pertinence d'un décalage entre les deux calendriers d'établissement et de révision des listes électorales, notamment des procédures contentieuses, dont les étapes ont pourtant été déjà en grande partie harmonisées en 2005.

Initialement, le présent article prévoyait de mettre fin à la possibilité de double inscription pour ces électeurs, à compter du 1 er janvier 2017. Or, la commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de notre collègue députée Élisabeth Pochon, avec l'avis favorable de son rapporteur, pour supprimer cette modification. Le rapporteur de l'Assemblée nationale fait valoir qu'« une telle suppression sera plus facile à mettre en oeuvre dans le cadre de la réforme d'ensemble de la gestion des listes électorales, qui fait l'objet de trois propositions de loi (deux organiques et une ordinaire) déposées par Mme Élisabeth Pochon et M. Jean-Luc Warsmann le 10 décembre 2015 ».

La commission des lois de l'Assemblée nationale a prévu, dans l'attente de cette réforme d'ampleur, un dispositif permettant de faciliter le droit de vote des Français expatriés qui seraient rentrés s'installer dans leur commune de rattachement. Actuellement, l'électeur qui quitte sa résidence à l'étranger pour s'installer en France doit solliciter, de manière distincte, sa radiation du registre des Français établis hors de France et de la liste électorale consulaire, alors que les deux sont tenus par l'administration consulaire. À l'inverse, l'article 4 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 prévoit que l'inscription sur la liste électorale consulaire, sous réserve de satisfaire aux conditions pour être électeur, découle de droit de l'inscription au registre des Français établis hors de France de la circonscription consulaire, sauf en cas d'opposition exprimée par l'électeur.

Par parallélisme des formes, il est proposé que la radiation d'un électeur de ce registre entraîne de plein droit sa radiation de la liste électorale consulaire, sauf opposition de sa part. Cette modification, suggérée par le Conseil constitutionnel en 2012, devrait permettre à tout le moins de limiter les difficultés précédemment connues.

En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel de son rapporteur.

Dès lors que la réforme, initialement proposée et fortement débattue, a été retirée du texte, votre commission a souscrit à cette mesure de bonne administration en faveur des électeurs.

Votre commission a adopté l'article 8 sans modification .

Article 9 (art. 10 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 relative aux listes électorales consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République) - Autorisation de la propagande électorale à l'étranger dans l'ensemble des États

L'article 9 autorise, sans distinction selon les pays, la propagande électorale à l'étranger pour l'élection du Président de la République. Pour ce faire, il abroge l'article 10 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 relative aux listes électorales consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République.

S'il autorise la diffusion de la propagande électorale dans les pays membres de l'Union européenne ou partie à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH), elle est interdite, par principe, dans les autres. La loi n° 2005-822 du 20 juillet 2005 a autorisé, par exception, la mise à disposition d'emplacements pour l'affichage des candidats dans les ambassades, postes consulaires et autres locaux servant de bureau de vote.

Dans son rapport de 2012, la Commission nationale de contrôle de la campagne en vue de l'élection présidentielle a pris position en faveur de la disparition de cette restriction partielle, en soulignant que « la seule limite susceptible d'être mise au droit de faire campagne à l'étranger, à l'intention des Français qui y votent, réside pour la commission dans la législation du pays hôte qui doit en tout état de cause être respectée ».

La fin de cette distinction est d'autant plus logique qu'elle a été retenue en 2011 pour l'élection des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE) et que, depuis cette date, le législateur n'a plus introduit une telle distinction pour les élections françaises se déroulant à l'étranger qu'il a instaurées en 2011 et en 2013.

Votre commission a adopté l'article 9 sans modification .

Article 10 (art. 11 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 relative aux listes électorales consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République) - Extension aux campagnes à l'étranger de l'interdiction de certaines formes de propagande électorale

L'article 10 complète les restrictions applicables à la propagande électorale à l'étranger pour l'élection du Président de la République. En contrepartie de l'autorisation de cette propagande, pour l'ensemble des pays, prévue par l'article 10 de la présente proposition de loi, le présent article transpose les limitations actuellement prévues en France.

Sont actuellement applicables :

- l'interdiction de la distribution de bulletins, de circulaires et d'autres documents, ainsi que de la diffusion par voie électronique de messages de propagande, à partir de la veille du scrutin à zéro heure, prévue par l'article L. 49 du code électoral ;

- l'interdiction de la distribution par un agent public de bulletins de vote, professions de foi et circulaires des candidats, conformément à l'article L. 50 du même code ;

- l'interdiction de la publicité commerciale (dans la presse écrite ou par voie audiovisuelle) et des campagnes de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité dans les six mois précédant le scrutin, selon l'article L. 52-1 du même code.

Seraient également rendues applicables :

- l'interdiction, à partir de la veille du scrutin à zéro heure, de procéder à des appels téléphoniques en série afin d'inciter les électeurs à voter pour un candidat, cette pratique du « phoning » étant proscrite par l'article L. 49-1 du code électoral ;

- l'interdiction de mettre en place un numéro de téléphone gratuit à l'usage des électeurs dans les six mois précédant le mois de l'élection, conformément à l'article L. 50-1 du même code.

L'extension de ces limitations à l'élection présidentielle pour la campagne se déroulant à l'étranger apparaît d'autant plus justifiée qu'elle a été faite en 2011 pour la campagne des élections législatives à l'étranger, à travers l'article L. 330 du code électoral.

Votre commission a adopté l'article 10 sans modification .


* 15 Proposition de loi organique n° 196 (2015-2016) tendant à actualiser les dispositions applicables aux élections organisées à l'étranger de MM. Christophe-André Frassa et Jean-Yves Leconte, 15 novembre 2015.

* 16 Conseil constitutionnel, 11 juin 2010, n° 2010-6/7 QPC.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page