AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Votre commission spéciale est saisie, en nouvelle lecture, de la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées, adoptée en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale le 3 février 2016.

À l'issue de la deuxième lecture au Sénat, le 14 octobre 2015, neuf articles demeuraient en discussion. Réunie le 18 novembre 2015 sous la présidence de M. Guy Geoffroy, la commission mixte paritaire n'a pas établi de texte.

En nouvelle lecture, les députés ont retenu plusieurs des apports du Sénat en première ou en deuxième lecture, notamment s'agissant de l'amélioration du dispositif dont pourront bénéficier les victimes de la traite des êtres humains et du proxénétisme dont le témoignage est utile à la manifestation de la vérité ou encore de l'élargissement du champ des associations qui pourront bénéficier de l'agrément pour la mise en oeuvre du parcours de sortie de la prostitution.

Au terme du long parcours législatif de ce texte, commencé le 10 octobre 2013 avec le dépôt de la proposition de loi initiale, le Sénat en aura donc amélioré les dispositions sociales et conforté le volet de lutte contre la traite des êtres humains.

En revanche, les deux assemblées continuent de s'opposer sur la question de la création d'une infraction de recours à l'achat d'actes sexuels, comme en témoigne la décision de l'Assemblée nationale de rétablir cette mesure en nouvelle lecture puis celle de votre commission spéciale de la supprimer à nouveau.

I. LE TEXTE ADOPTÉ PAR LE SÉNAT EN DEUXIÈME LECTURE

En deuxième lecture, le Sénat a adopté conformes six des articles encore en discussion :

- l'article 1 er bis , qui vise à améliorer la formation des professionnels et des personnels engagés dans la prévention de la prostitution et l'identification des situations de prostitution, de proxénétisme et de traite des êtres humains ;

- l'article 8 , qui ouvre le bénéfice de l'allocation de logement temporaire (ALT) aux associations agréées pour l'accompagnement des personnes engagées dans un parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle ;

- l'article 11 , qui permet aux associations dont l'objet statutaire est la lutte contre la traite des êtres humains et le proxénétisme ou l'action sociale en faveur des personnes prostituées d'exercer les droits reconnus à la partie civile à l'occasion d'un procès pénal ;

- l'article 13 , qui abroge les dispositions relatives au délit de racolage public, et l'article 14 , qui effectue, dans le code pénal et le code de procédure pénale, plusieurs coordinations liées à cette abrogation ;

- l'article 15 , qui ajoute à la section du code de l'éducation consacrée à l'éducation à la santé et à la sexualité un article dédié à l'information aux « réalités de la prostitution » et aux « dangers de la marchandisation du corps ».

En revanche, le Sénat a complété l'article 1 er , relatif à la lutte contre les réseaux d'exploitation sexuelle sur Internet, en rétablissant la possibilité pour l'administration de demander aux fournisseurs d'accès le blocage de l'accès à un site (amendement de Mme Chantal Jouanno et plusieurs de ses collègues).

Par ailleurs, la commission spéciale a adopté un amendement de votre rapporteure réécrivant en partie l'article 1 er ter , qui accorde une protection aux personnes prostituées victimes de la traite des êtres humains ou du proxénétisme, en prévoyant que seules bénéficient de cette protection les personnes ayant contribué par leur témoignage à la manifestation de la vérité et dont la vie ou l'intégrité physique est gravement mise en danger sur le territoire national. Il s'agissait ainsi d'inciter davantage les personnes prostituées à contribuer à l'enquête et de mieux cibler le dispositif sur les personnes qui en ont le plus besoin afin d'en assurer l'effectivité.

La commission spéciale a également apporté une modification à l'article 3 en adoptant un amendement de MM. Godefroy et Boulard qui précise que les associations susceptibles de participer à l'élaboration et à la mise en oeuvre du parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle seront les associations qui aident et accompagnent toutes les personnes « en difficulté » et non les seules personnes « prostituées », de manière à ouvrir cette possibilité à davantage d'associations.

À l'article 6 , destiné à faciliter l'admission au séjour des personnes étrangères victimes de la traite des êtres humains ou du proxénétisme, le Sénat a adopté en séance publique un amendement de Mme Benbassa posant comme condition nécessaire, pour l'obtention de l'autorisation provisoire de séjour délivrée aux personnes prostituées engagées dans le parcours de sortie, le fait d'être « engagé dans un processus de cessation de son activité de prostitution » , alors que les députés avaient adopté une rédaction plus stricte exigeant la cessation pure et simple de l'activité de prostitution.

En outre, la commission spéciale a adopté un amendement de M. Godefroy supprimant à nouveau l'article 9 bis ayant pour objet de créer dans le code pénal une nouvelle circonstance aggravante tenant au fait de porter atteinte à une personne prostituée.

Enfin, comme en première lecture, la commission spéciale a supprimé les articles 16 et 17 , qui avaient respectivement pour objet de créer une infraction de recours à l'achat d'actes sexuels punie d'une amende contraventionnelle de cinquième classe (1 500 euros) et, en cas de récidive, d'une amende délictuelle (3 750 euros), et d'instaurer une peine complémentaire de stage de sensibilisation à la lutte contre l'achat d'actes sexuels.

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