CHAPITRE IV - DISPOSITIONS RELATIVES AU CADRE DE L'ACTION EXTÉRIEURE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Articles 13, 13 bis, 14 et 15 (art. L. 4433-4-5-1, L. 4433-4-5-3 [nouveau], L. 7153-10 et L. 7253-10 du code général des collectivités territoriales) - Modification du régime applicable aux agents territoriaux des collectivités territoriales relevant de l'article 73 de la Constitution dans le cadre de leur mission dans un État étranger

Les articles 13, 14 et 15 visent à modifier le régime applicable aux agents territoriaux des régions d'outre-mer, du département de Mayotte et des collectivités territoriales de Guyane et de Martinique, nommés dans le réseau diplomatique français.

Les articles L. 4433-4-5-1, L. 7153-10 et L. 7253-10 du code général des collectivités territoriales autorisent actuellement les régions d'outre-mer et les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique à désigner des agents de leur collectivité pour les représenter dans une mission diplomatique de la France dans un État étranger. Leur statut fait l'objet d'une convention entre l'État accréditaire, c'est-à-dire d'accueil, et la collectivité.

Ces agents participent au travail diplomatique de la France dans l'État d'accueil. À ce titre, ils sont notamment chargés de la conduite stratégique et partenariale des relations internationales dans les zones de voisinage prioritaire des collectivités ultramarines, de l'engagement d'un dialogue avec les ambassadeurs représentant les pays avec lesquels des coopérations régionales sont envisagées, de favoriser des relations avec les chefs de délégation lors de négociations internationales qui concernent leur collectivité. Ils représentent aussi plus largement les collectivités ultramarines dans les ambassades françaises ou dans les organisations internationales. C'est pourquoi ils sont souvent qualifiés de « représentants diplomatiques ultramarins ».

Toutefois, ces agents, qui relèvent de la fonction publique territoriale et non du corps diplomatique, ne disposent pas des mêmes droits, en particulier en matière de régimes indemnitaires, de facilités de résidence, de remboursements de frais ni de la même protection que les agents relevant du ministère des affaires étrangères et du développement international, ou de départements ministériels compétents en matière d'actions internationales.

Pour répondre à cette difficulté, les articles 13, 14 et 15 complètent respectivement les articles L. 4433-4-5-1, L. 7153-10 et L. 7253-10 du code général des collectivités territoriales afin de permettre aux régions d'outre-mer et aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique d'assurer à leurs « représentants diplomatiques » un régime indemnitaire, des facilités de résidence et des remboursements de frais qui tiennent compte des conditions d'exercice de leurs fonctions. Les conditions d'application de ces trois articles seraient renvoyées à un décret en Conseil d'État.

Ces trois articles ont chacun fait l'objet d'un amendement de précision du rapporteur adopté par la commission des lois.

L'article 13 bis , issu d'un amendement du rapporteur adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale, vise à appliquer ces dispositions au Département de Mayotte qui, de fait, exerce les compétences d'une région d'outre-mer. Ainsi, l'article 13 bis propose l'insertion d'un nouvel article L. 4433-4-5-3 dans le code général des collectivités territoriales reprenant les dispositions déjà existantes des articles L. 4433-4-5-1, L. 7153-10 et L. 7253-10 du même code, et y intégrant les modifications proposées par les articles 13, 14 et 15 de la proposition de loi.

Les modifications proposées apportent une protection nécessaire aux agents représentant leurs collectivités ultramarines dans les missions diplomatiques françaises, en leur offrant un véritable statut. En effet, la différence de traitement apparaît à votre commission comme étant peu équitable, alors même que ces agents fournissent un travail indispensable pour la reconnaissance et la promotion des intérêts des collectivités ultramarines qu'ils représentent et, au-delà, de par leur connaissance des intérêts stratégiques de la région, des intérêts de la France.

Pour autant, ces dispositions induiront un coût pour les collectivités concernées, puisqu'elles seraient tenues de mettre en place un tel statut. La direction générale des collectivités locales a d'ailleurs émis des réserves sur ces articles au regard du principe de la libre administration des collectivités territoriales posé par l'article 72 de la Constitution. Votre rapporteur n'est pas convaincu par ces arguments : la libre administration ne s'exerce que dans les conditions prévues par la loi et l'objectif de cette disposition est de donner un statut protecteur à des agents de la fonction publique territoriale exerçant des missions dans des ambassades auprès d'agents bénéficiant des stipulations de la Convention de Vienne de 1961.

Votre commission a adopté les articles 13, 13 bis , 14 et 15 sans modification .

Article 16 - Possibilité pour les agents représentant leur collectivité territoriale dans des missions diplomatiques françaises de bénéficier des privilèges et immunités du corps diplomatique de l'État

Le présent article tend à prévoir la faculté, pour l'État français, de proposer les agents territoriaux nommés dans une ambassade de France, pour y représenter leur collectivité territoriale, aux autorités de l'État accréditaire aux fins d'obtention des privilèges et immunités reconnus par la Convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques.

Le préambule de cette convention stipule que les privilèges et immunités sont accordés aux membres des missions diplomatiques, afin que ces derniers puissent « assurer l'accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques en tant que représentant des États ». En d'autres termes, il s'agit de protéger ces agents contre toute ingérence ou pression.

Les privilèges consistent en des facilités diverses, parmi lesquelles des exemptions des droits de sécurité sociale et des droits de douane, des facilités de déplacement et de séjour.

Les immunités , quant à elles, ont vocation à protéger les membres de la mission diplomatique et leur famille de toute mesure de contrainte qui pourrait s'exercer sur leurs personnes ou leurs biens. Ils peuvent ainsi bénéficier :

- d'une inviolabilité personnelle, c'est-à-dire qu'ils ne peuvent être ni arrêtés, ni être mis en détention sur le territoire de l'État accréditaire ;

- d'une immunité juridictionnelle : les agents sont exonérés de toute poursuite pénale, civile ou administrative devant les tribunaux de l'État accréditaire ainsi que de toute voie d'exécution, à quelques exceptions strictement délimitées ;

- d'exemptions fiscales et de franchises douanières : un agent diplomatique ne peut être contribuable de l'État accréditaire afin d'éviter une dépendance incompatible avec sa fonction.

Ces immunités et privilèges varient considérablement selon le statut des personnels et les fonctions qu'ils sont amenés à remplir : ils sont étendus pour les membres du corps diplomatique et sont, en revanche, plus restreints pour les personnels administratifs et les personnels de service.

L'application de ces privilèges et immunités aux agents des collectivités ultramarines présents dans les ambassades françaises vise à faciliter l'exercice de leurs missions. Seuls les ambassadeurs, les ministres plénipotentiaires et les chargés d'affaires sont accrédités auprès de l'État d'accueil au sens de la Convention de Vienne de 1961. En revanche, pour les personnels diplomatiques et assimilés n'ayant pas le rang de chefs de mission, l'ambassade de France dans un État étranger saisit le service du protocole du pays étranger pour que ces personnels soient inscrits sur la « liste diplomatique » leur permettant le bénéfice des privilèges et immunités. L'État étranger est libre d'accéder ou non à cette demande. Le ministère des affaires étrangères a signalé à votre rapporteur des cas
- certes limités - où des États étrangers ont refusé d'accréditer certains agents, soit par mesure de rétorsion, soit car ils considéraient la liste présentée trop importante.

Par ailleurs, si la disposition proposée n'impose pas à l'État accréditaire d'obligations particulières - ce qui serait dérogatoire aux règles et pratiques applicables en matière de relations diplomatiques - c'est l'ambassadeur de France qui engage la démarche d'accréditation d'un agent auprès de cet État, non l'agent lui-même. Par conséquent, l'accréditation d'un agent territorial relève à la fois de l'ambassadeur de France et des autorités de l'État accréditaire.

Selon les éléments recueillis auprès de la délégation pour l'action extérieure des collectivités territoriales, quatre agents des collectivités ultramarines seraient concernés par cette disposition. À terme, le ministère des affaires étrangères évalue à une dizaine le nombre d'agents potentiellement concernés.

Outre le nombre limité d'agents potentiellement concernés, le fait qu'ils soient nommés en accord avec et auprès de nos postes diplomatiques, est de nature à éviter une application trop extensive de ce dispositif. Enfin, le présent article apparaît nécessaire dans la mesure où une disposition législative doit prévoir expressément la faculté pour l'État de présenter des agents ne relevant pas du corps diplomatique aux fins d'obtention des privilèges et immunités. En outre, les dispositions proposées complètent utilement celles des articles 13, 13 bis , 14 et 15 en offrant à la fois aux agents concernés un statut et une protection nécessaires pour l'exercice de leurs missions de représentation.

Dans sa rédaction initiale, le présent article proposait que les agents des collectivités territoriales d'outre-mer qu'ils représentent auprès des missions diplomatiques - c'est-à-dire ceux nommés par les collectivités territoriales - puissent bénéficier des mêmes privilèges et immunités que ceux accordés aux agents de l'État français auprès des États accréditaires.

Or il s'est avéré que la catégorie d'agents qui en auraient bénéficié était plus large que celle des seuls agents nommés - par voie de détachement ou de mise à disposition - par les collectivités territoriales. Par ailleurs, le bénéfice des privilèges et immunités est accordé, non par la collectivité territoriale ni par les autorités françaises, mais par l'État accréditaire à la demande de l'État français. C'est pourquoi la commission des lois de l'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur, a limité le champ initial de cette disposition aux seuls agents territoriaux nommés par les collectivités territoriales ultramarins dans les missions diplomatiques françaises, en application des articles L. 4433-4-5-1, L. 4433-4-5-3, L. 7153-10 et L. 7253-10 du code général des collectivités territoriales, dans leur rédaction issue de la présente proposition de loi.

C'est pourquoi, votre commission a adopté l'article 16 sans modification .

Article 17 (suppression maintenue) - Gage financier

Le présent article constituait le gage financier de la présente proposition de loi, destiné à gager les éventuelles augmentations de charges résultant, pour les collectivités territoriales concernées, de l'application des dispositions de la présente proposition de loi.

Comme tout gage financier, il proposait une majoration de la dotation globale de fonctionnement dont bénéficient les collectivités territoriales et, corrélativement, la création d'une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Cet article a été supprimé par la commission des lois de l'Assemblée nationale, à l'initiative du Gouvernement, avec l'avis favorable du rapporteur

Votre commission a maintenu la suppression de l'article 17.

Intitulé de la proposition de loi

L'intitulé de la proposition de loi a fait l'objet d'un amendement rédactionnel du Gouvernement, adopté par l'Assemblée nationale en séance publique, avec l'avis favorable de la commission des lois.

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Votre commission a adopté la proposition de loi sans modification .

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