SECONDE PARTIE - ANALYSE PAR PROGRAMME

I. LE PROGRAMME 105 « ACTION DE LA FRANCE EN EUROPE ET DANS LE MONDE »

1. Le programme en quelques chiffres

Les crédits demandés pour le programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde » dans le cadre du présent projet de loi de finances s'élèvent à 1 925,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 1 928,9 millions d'euros en crédits de paiement.

Le programme est composé de six actions , qui ne connaissent pas de mesures de transfert significatives par rapport à la loi de finances pour 2016 :

- la coordination de l'action diplomatique, qui rassemble notamment les crédits destinés à l'accueil de personnalités étrangères, aux déplacements ministériels à l'étranger, au centre de crise, à la communication ;

- l'action européenne, qui regroupe notamment les contributions aux institutions européennes hors Union européenne (Conseil de l'Europe en particulier) ;

- les contributions internationales, qui rassemblent les contributions aux organisations internationales, en particulier celles liées à l'Organisation des Nations Unies (ONU), ainsi que le financement des opérations de maintien de la paix ;

- la coopération de sécurité et de défense, qui retrace les crédits de fonctionnement et de personnel de la direction de la coopération de sécurité et de défense du MAEDI, ainsi que les dépenses d'intervention de cette dernière (notamment de formation et d'entraînement) ;

- le soutien, qui correspond aux dépenses de personnel et de fonctionnement de l'administration centrale ;

- le réseau diplomatique, qui rassemble les crédits de personnel et de fonctionnement du réseau à l'étranger.

Le tableau suivant retrace la répartition par action de ces crédits, qui sont essentiellement destinés au financement des contributions internationales de la France et des dépenses de personnel et de fonctionnement du réseau diplomatique.

Répartition par action des crédits demandés

Autorisations d'engagement

Action

Exécution 2015

LFI 2016

PLF 2017

Évolution 2016/2017

Coordination de l'action diplomatique

82,1

92,1

86

-7 %

Action européenne

46,1

49,2

51,3

4 %

Contributions internationales

800,1

895,6

795,2

-11 %

Coopération de sécurité et de défense

86,3

87,8

105,4

20 %

Soutien

225

229,5

233,1

2 %

Réseau diplomatique

597

616,4

654,2

6 %

Total

1 836,6

1 970,7

1 925,2

-2,3 %

Crédits de paiement

Action

Exécution 2015

LFI 2016

PLF 2017

Évolution 2016/2017

Coordination de l'action diplomatique

82,1

92,1

86

-7 %

Action européenne

46,1

49,2

51,3

4 %

Contributions internationales

800,1

895,6

795,2

-11 %

Coopération de sécurité et de défense

86,8

87,8

105,4

20 %

Soutien

232,7

232,9

238,2

2 %

Réseau diplomatique

599,2

604,2

652,8

8 %

Total

1 846,9

1 961,9

1 928,9

-1,7 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2017 et rapports annuels de performance

2. Les objectifs et la performance

La partie performance du programme 105 évolue légèrement dans le cadre du présent projet de loi de finances.

Le premier objectif, « Construire l'Europe », et son indicateur exposant la « présence des Français et usage du français dans l'Union Européenne » sont supprimés. La dimension européenne est ajoutée à l'objectif « Promouvoir le multilatéralisme », qui devient « Promouvoir le multilatéralisme et construire l'Europe ». Cet objectif ne garde donc qu'un seul indicateur, « optimiser l'effort français en faveur du maintien de la paix ».

Le programme compte ainsi trois objectifs, dont la présentation s'accompagne de longs développements littéraires permettant au MAEDI d'exposer la stratégie de relations internationales qu'il met en place, mais dont l'atteinte peut difficilement se mesurer par des chiffres.

Le premier objectif, intitulé « Renforcer la sécurité internationale et la sécurité des Français », est de nouveau particulièrement sensible en cette année 2016, marquée par l'attentat du 14 juillet à Nice et par le renforcement de la menace de l'Organisation État islamique (OEI ou Daesh) au Moyen-Orient. Cette mission est difficile à mesurer par des indicateurs de performance, qui se limitent donc au taux de hauts responsables en activité formés par la France, ainsi qu'au taux d'actualisation des fiches « Conseils aux voyageurs ».

Le deuxième objectif « Promouvoir le multilatéralisme et construire l'Europe », a trait à l'action de la France au sein des Nations Unies et aux travaux de la direction de l'Union Européenne ; les suites du référendum britannique constituent à ce titre l'enjeu majeur de l'année en cours.

Enfin, le troisième et dernier objectif « Assurer un service diplomatique efficient et de qualité » est le seul objectif de gestion du programme, avec une vocation de suivi de la performance des crédits engagés. Cinq indicateurs mesurent ainsi l'engagement du MAEDI à poursuivre l'optimisation du réseau diplomatique et consulaire. Le suivi de l' efficience figure au premier plan de ces indicateurs, qu'il s'agisse de l'efficience de la gestion immobilière, de la fonction support ou encore de la fonction achat. Par exemple, le potentiel d'économies sur les achats est évalué pour 2017 à 3 millions d'euros, grâce à des économies sur les opérations immobilières déjà programmées, et à la mise en oeuvre d'une démarche de mutualisation renforcée au niveau interministériel.

3. Des crédits tirés vers le bas par l'évolution favorable des dépenses obligatoires hors dépenses de personnel

Les crédits du programme présentent une baisse de près de 2 % par rapport à 2016, qui atteint même 5,3 % des crédits de paiement hors dépenses de personnel.

La diminution des crédits consacrés aux contributions internationales et aux opérations de maintien de la paix (CI-OMP) , exclusivement des dépenses d'intervention, explique cette tendance : les crédits prévus pour cette ligne doivent enregistrer en 2017 une baisse de près de 100 millions d'euros , soit une baisse de 11 % entre la loi de finances initiale pour 2016 et le projet de loi de finances pour 2017.

Deux facteurs principaux expliquent cette prévision :

- d'une part, la baisse du budget adopté par l'Assemblée Générale des Nations Unies pour les OMP, résultant d' économies tirées de missions en décroissance (MINUL, MINUAD, MINUSTAH, MINUK, ONUCI).

- d'autre part, la révision du barème des quotes-parts aux budgets des Nations Unies , qui s'exerce de façon progressive sur le budget triennal 2016-2018 (voir le graphique ci-dessous).

Évolution de la quote-part française aux budgets des Nations Unies
entre 2015 et 2018

(en %)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Ainsi, la seule contribution aux OMP enregistre en 2017 une baisse de 19 %, passant de 506 millions d'euros en 2016 à 410 millions d'euros pour 2017. Les contributions internationales en devises diminuent quant à elles de 20 millions d'euros entre 2016 et 2017.

Le taux de change euro/dollar, stable en 2016, ne provoque pas d'évolution des crédits, contrairement à la loi de finances de l'an passé.

Conclusions du rapport du Gouvernement sur la couverture du risque de change 1 ( * )

Le Gouvernement a réalisé un bilan de l'utilisation du mécanisme de couverture financière du risque de change des contributions aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix (CI-OMP), crée par la loi de finances pour 2006 et mis en oeuvre sur la base d'une convention entre l'Agence France Trésor (AFT) et le MAEDI.

Le rapport rappelle qu'avec 895 millions d'euros d'engagements en devises en 2015, soit près de 20 % de ses dépenses totales, le MAEDI est le ministère le plus exposé au risque de change 2 ( * ) . Or, le mécanisme de couverture du risque de change, qui autorise l'AFT à négocier des contrats d'achat à terme 3 ( * ) de devises, connaît plusieurs limites, par exemple :

- le dispositif actuel ne peut être activé que si le taux de change est égal ou supérieur au « taux de budgétisation », afin de ne pas provoquer de perte budgétaire non couverte. Lorsque le MAEDI n'active pas le mécanisme, cela fait peser un risque majeur en cas de chute non anticipée du cours de l'euro, comme ce fut le cas à la fin de l'année 2014 et au début de l'année 2015 ;

- la convention laisse aux responsables de programme la responsabilité de la date et des modalités techniques des opérations d'achat de devises à terme, tâche éloignée de leur métier, d'où une gestion non-professionnalisée des couvertures financières du risque de change.

Ainsi, le Gouvernement souhaite améliorer la couverture du risque de change et propose la création d'un groupe de travail qui examinera au cours de l'année 2017 les recommandations faites par la mission relative à la couverture du risque de change du MAEDI 4 ( * ) .

Source : commission des finances, d'après le rapport du Gouvernement sur la couverture du risque de change

À ce titre, le mécanisme de couverture des risques de change a été déclenché en août 2016 par le MAEDI dans le cadre de sa convention avec l'Agence France Trésor , afin de limiter le risque de variation du taux de change par rapport aux hypothèses retenues dans le projet de loi de finances. L'Agence France Trésor a ainsi procédé à l'achat de 500 millions de dollars américains et de 39 millions de francs suisses , soit un taux de couverture de plus de 75 % des contributions en devises pour 2017. Ces achats à terme sécurisent en effet les décaissements en dollars et en francs suisses aux taux de change sur lesquels sont fondées les prévisions budgétaires. Notons que pour la première fois, les contributions internationales en francs suisses font l'objet d'une couverture.

Enfin, les dépenses contraintes, recouvrant les dépenses de personnel, les dépenses liées aux CI-OMP et les loyers budgétaires, représentent 80,5 % de l'enveloppe du présent programme pour 2017 , contre 82 % en 2016, augmentant de fait la part des dépenses pilotables et la marge de manoeuvre les concernant.

4. Une augmentation des dépenses liées au contexte sécuritaire

Après plusieurs années de diminution, le budget de la direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) augmente de 9,5 millions d'euros en 2017 par rapport à 2016 dans le cadre du plan de lutte anti-terroriste, et s'élève à 34,3 millions d'euros, retracés sur l'action 05 « Coopération de sécurité et de défense ».

Il s'agit d'une part, pour 85 %, de crédits d'intervention, eux-mêmes en hausse de 47 % par rapport à 2016 ; ceux-ci concernent à titre principal les actions de formation des élites et des cadres militaires, ainsi que les actions consacrées à l'ingénierie de sécurité et de défense, comme le renforcement de la capacité opérationnelle et d'entrainement des armées.

Il s'agit d'autre part, pour 15 %, de crédits de fonctionnement, dédiés principalement au soutien quotidien apporté aux coopérants militaires et techniques.

Le centre de crise et de soutien (CDCS) voit sa dotation budgétaire augmenter de 70 % en 2017 par rapport à 2016 , afin de renforcer les capacités de prise en charge locales des ressortissants blessés à l'étranger.

Dans le cadre du « Plan de renforcement des moyens de lutte anti-terroriste et de protection des communautés et intérêts français à l'étranger », les dépenses de sécurité des postes diplomatiques font l'objet d'une augmentation importante, de l'ordre de 22 millions d'euros en 2017 par rapport à 2016, et s'élèvent à 78 millions d'euros. Cet effort budgétaire découle tant de la dégradation du contexte sécuritaire à l'étranger que de la nécessité de renforcer les dispositifs de sécurité des postes. L'augmentation des crédits alloués à la sécurité passive des postes découle ainsi de l'obligation de remettre à niveau la sécurité des postes, par la mise en place de moyens techniques moderne de surveillance.

Évolution de la répartition des crédits alloués à la sécurité à l'étranger
entre 2016 et 2017

(en millions d'euros)

Sécurité à l'étranger

PLF 2017

Évolution 2017/2016

Contrats de gardiennage

16,6

+ 5

Sécurité passive des postes

48

+ 16,5

Missions de renfort et d'audit de sécurité

5,1

-

Frais de déménagement des gendarmes

3,3

+ 0,5

Achat de véhicules blindés

5

-

Total

78

+ 22

Source : projet annuel de performance pour 2017

5. Des économies enregistrées sur les autres dépenses pilotables de l'administration centrale

Les dépenses pilotables du programme font l'objet d'une maîtrise notable.

Hors dépenses de personnel, les dépenses de l'action 01 « Coordination de l'action diplomatique » diminuent de près de 10 millions d'euros en 2017 , en particulier s'agissant :

- des dépenses de protocole (- 65 %), grâce à une année de fonctionnement sans la tenue du sommet de la francophonie et de sommet ad hoc ; cette baisse fait suite à une dotation exceptionnelle de 18,5 millions d'euros en 2016, comprenant l'enveloppe destinée à la participation de la France à deux sommets 5 ( * ) ;

- des dépenses de fonctionnement de l'Hôtel du ministre (- 110 000 euros) ;

Les dépenses de fonctionnement des postes à l'étranger connaissent une diminution : le budget total de fonctionnement des ambassades s'élève à 83,3 millions d'euros en 2017, ce qui représente une baisse de 4,6 % par rapport à 2016 , notamment grâce à la diminution :

- des dépenses de fonctionnement courant, qui découle de la poursuite de la restructuration du réseau et au rajeunissement du parc automobile 6 ( * ) ;

- des dépenses relatives aux voyages et missions statutaires (- 1 million d'euros).

Il est à noter la relative stabilité des frais de représentation , qui absorbent pourtant la hausse du prix des fournitures. Cette stabilité découle de crédits ouverts au titre d'un fonds de concours, qui accroît les moyens de représentation des chefs de poste principalement pour la réception du 14 juillet qui, dans de nombreux pays, est désormais entièrement financée par mécénat. 2,37 millions d'euros de recettes sont ainsi attendues en 2017.

Votre rapporteur spécial Richard Yung, considérant à cet égard qu'un effort supplémentaire peut être réalisé par les postes, vous propose d'adopter un amendement visant à transférer 5 millions d'euros de cette ligne vers le financement de l'aide à la scolarité du programme 151 (cf. infra ).

6. La gestion du patrimoine immobilier à l'étranger
a) Un cadre budgétaire spécial

À titre de rappel, les produits de cessions immobilières constituent la recette principale du compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », crée par l'article 47 de la loi de finances pour 2006 7 ( * ) . Ces recettes sont destinées à contribuer à la fois au désendettement de l'État et aux opérations immobilières.

Le cadre budgétaire spécial s'appliquant au produit des cessions immobilières à l'étranger du MAEDI découle du contrat triennal de modernisation du ministère, conclu en avril 2006, comportant une clause par laquelle le MAE renonce à terme aux crédits budgétaires pour les dépenses liées à son parc à l'étranger en échange du maintien d'un retour intégral au MAEDI du produit des cessions de ses immeubles situés à l'étranger (effectif depuis 2003). L'objectif est d'inciter le ministère à une gestion optimisée et dynamique de son parc .

La réforme du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » proposée par le projet de loi de finances pour 2017

Le compte spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » constitue le principal instrument budgétaire de la politique immobilière de l'État. Il finance la modernisation du parc immobilier par le produit des cessions immobilières, et contribue au désendettement de l'État.

Le compte spécial est l'un des deux vecteurs budgétaires de la fonction de l'État propriétaire avec le programme 309 « Entretien des bâtiments de l'État » de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », qui retrace, par exemple, les dépenses d'entretien lourd relevant du propriétaire. Néanmoins, ces crédits ne représentent que 10 % des crédits de l'État consacrés à l'immobilier .

L'article 20 du projet de loi de finances pour 2017 propose une modification de la structure du compte spécial, décrite dans le tableau ci-dessous.

La suppression de la contribution au désendettement de l'État à laquelle était affectée une partie des produits de cession des biens immeubles de l'État a pour contrepartie l'extension du compte aux dépenses d'entretien lourd du propriétaire de l'ancien programme 309 .

L'affectation en recettes du produit des redevances domaniales , estimées à 85 millions d'euros, ou des loyers perçus par l'État vise à doter le compte de ressources régulières, dans un contexte de diminution tendancielle des produits de cession.

Source : commission des finances du Sénat, d'après la note de présentation des rapporteurs spéciaux Michel Bouvard et Thierry Carcenac sur le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État »

Le MAEDI bénéficie ainsi d'un mécanisme particulier de retour intégral du produit des cessions d'immeubles à l'étranger , décrit par notre ancien collègue Roland du Luart 8 ( * ) dans le compte-rendu de son contrôle budgétaire de l'utilisation du produit des cessions immobilières à l'étranger, en échange de la prise en charge par le ministère des dépenses d'entretien lourd de ces biens 9 ( * ) . Autrement dit, « le MAEDI dépend ainsi presque exclusivement des produits de cessions d'immeubles à l'étranger pour financer non seulement ses acquisitions hors de France (ce qui est normal) mais également ses dépenses d'entretien lourd de ces mêmes biens ».

L'article 195 de la loi de finances initiale pour 2009 10 ( * ) dispense les produits de cession des immeubles situés à l'étranger de contribution au désendettement de l'État jusqu'au 31 décembre 2014 . Ce dispositif a été prolongé jusqu'en 2017 par l'article 38 de la loi de finances initiale pour 2015 11 ( * ) . Néanmoins, le ministère est tenu de verser une participation forfaitaire au compte spécial « d'un montant au moins égal à 25 millions d'euros par an en 2015, 2016 et 2017 » .

Ainsi, cette contribution forfaitaire a pu être versée en 2015 et 2016, à hauteur de 25 millions d'euros en 2015 et même de 75 millions d'euros en 2016, grâce à la cession de biens d'exception (en particulier le campus diplomatique de Kuala Lumpur) dont le produit de cessions a été estimé pour 2015 à 252 millions d'euros. La contribution prévue pour 2017 s'élève à 60 millions d'euros en AE et en CP .

b) Les produits de cessions immobilières à l'étranger, une ressource appelée à se tarir

Roland du Luart soulignait déjà en 2012 12 ( * ) « le caractère irrégulier de la ressource que représentent les produits de cessions » : le produit des cessions immobilières s'était ainsi élevé à 24 millions d'euros en 2012, contre 122 millions d'euros en 2011.

Au 8 août 2016, le montant des cessions réalisées s'élève à 18 millions d'euros 13 ( * ) , soit seulement 20 % du produit total escompté pour 2016. Des cessions d'un montant de 24,4 millions d'euros viendront compléter de façon certaine ce total, ainsi que, de façon moins certaine, 25 millions d'euros résultant de cessions potentielles. Pour 2017, le produit des cessions est estimé à 71 millions d'euros par le MAEDI .

Prévision du produit des cessions immobilières à l'étranger du ministère des affaires étrangères et du développement international pour 2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les informations recueillies auprès de France Domaine

Alors que le MAEDI dispose d'un patrimoine immobilier important, en raison de sa localisation à l'étranger et de ses fonctions, vos rapporteurs spéciaux ont déjà noté, dans leur rapport budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2016, que les informations dont ils disposent « restent relativement limitées quant aux perspectives d'évolution à moyen terme du patrimoine immobilier à l'étranger (cessions, acquisitions, entretiens ou rénovations prioritaires) et des recettes et dépenses afférentes ».

Par ailleurs, alors que le retour intégral au MAEDI du produit des cessions de ses immeubles à l'étranger était destiné à dynamiser la gestion de son parc, les marges de manoeuvre dans l'optimisation de ce dernier tendent clairement à se réduire. Les « grandes opérations » se raréfient, et la ressource que représentent les produits de cession est inéluctablement amenée à se réduire. Or, des recettes aux montants irréguliers et à l'avenir incertain peuvent difficilement financer de manière durable des dépenses à caractère régulier et à planifier dans le temps comme les dépenses d'entretien lourd 14 ( * ) .

c) La réflexion sur le maintien du régime dérogatoire du MAEDI devra s'accompagner d'une plus grande professionnalisation de la programmation immobilière par le ministère

La question de la capacité à long terme du MAEDI à verser une contribution forfaitaire tout en assurant de façon satisfaisante les dépenses d'entretien lourd des biens immobiliers se posera rapidement, dès lors que l'article 38 de la loi de finances pour 2015 15 ( * ) ne prolonge la dispense des produits de cession des immeubles situés à l'étranger de contribution au désendettement de l'État que jusqu'au 31 décembre 2017. Ainsi, à compter de l'année 2018, la contribution forfaitaire que le MAEDI verse au compte spécial, ainsi que la dérogation dont il dispose, pourraient disparaître , d'autant plus que le présent projet de loi de finances propose la suppression de la contribution au désendettement de l'État à laquelle était affectée une partie des produits de cessions immobilières de droit commun.

Le tarissement du produit des cessions immobilières rendra, en tout état de cause, plus épineuse encore cette question de la pertinence de la reconduction du système dérogatoire dont bénéficie le MAEDI .

D'une part, la contribution forfaitaire au désendettement sera difficile à honorer , le produit des cessions devant atteindre environ 75 millions d'euros pour que le système soit avantageux pour le ministère (25 millions de contribution, environ 40 millions d'euros de dépenses financées par le CAS et environ 10 millions d'euros de dépenses d'entretien lourd financées par le programme 105).

D'autre part, le MAEDI bénéficie d'une dérogation qui lui permet de ne pas faire participer le produit de ses cessions à la mutualisation du financement des dépenses d'entretien lourd qui concerne 50 % des produits de cession des autres ministères (hors Défense). Une participation du MAEDI à la mutualisation pourrait lui être réclamée si la contribution forfaitaire au désendettement était supprimée . Pour que le MAEDI ne soit pas perdant de cette évolution, une professionnalisation accrue de sa programmation immobilière est nécessaire afin d'assurer une plus grande consommation des crédits demandés. En effet, d'après France Domaine, le taux de consommation des crédits budgétaires demandés par le MAEDI au titre de ses dépenses immobilières à l'étranger est largement perfectible : il gravite autour de 55 % ces dernières années. Le MAEDI a ainsi programmé pour 2017 35 millions d'euros en AE et 40 millions d'euros en CP au titre des dépenses immobilières à l'étranger (sans que la part relative aux dépenses d'entretien lourd ne soit identifiée dans ce total).

Rappelons que le MAEDI bénéficie d'une dérogation lui permettant de faire financer par le CAS mentionné précédemment des dépenses d'entretien lourd, malgré le fait que ce dernier est alimenté par des recettes exceptionnelles de cession. Ces dépenses sont progressivement rebudgétées au sein du programme 105 : d'après les informations recueillies dans le cadre des réponses aux questionnaires budgétaires, « à l'avenir, l'entretien lourd à l'étranger devrait être principalement financé par le programme 105, qui de 7,2 millions d'euros en 2016, devrait être porté à 12,2 millions d'euros en 2017 . Ce montant en augmentation reste cependant insuffisant au vu du patrimoine confié au MAEDI valorisé à 4,3 milliards d'euros à l'étranger. Le compte spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » continuera donc de financer l'entretien lourd de façon complémentaire en 2017 ».


* 1 Ce rapport découle de l'article 129 de la loi de finances pour 2016, aux termes duquel le Gouvernement remet au Parlement un rapport établissant un bilan de l'utilisation du mécanisme d'achat à terme de devises et du recours à la réserve de précaution pour couvrir les risques de change auxquels sont exposés les crédits de la mission « action extérieure de l'État ».

* 2 La mission « Action extérieure de l'État », et plus particulièrement le programme 105 concentre 98 % de ces dépenses.

* 3 Il s'agit de contrats par lesquels l'État s'engage à payer un montant fixé en euros contre un montant fixé en devise, à une date définie.

* 4 L'inspection générale des affaires étrangères (IGAE) et l'inspection générale des finances (IGF) ont réalisé la mission relative à la couverture du risque de change, base du rapport du Gouvernement.

* 5 Le somme de la Francophonie, qui aura lieu en novembre 2016, et le sommet Afrique-France qui se tiendra finalement en janvier 2017.

* 6 D'après les informations recueillies dans le cadre des réponses au questionnaire budgétaire.

* 7 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 8 Rapport général, n° 148 (2012-2013), Tome III, annexe 2.

* 9 On entend par entretien lourd les travaux relatifs aux clos et couvert des bâtiments, voiries et réseaux divers et aux mises aux normes techniques et réglementaires (ravalement de façade, changements de menuiseries extérieures, réfections de toitures ou d'étanchéité de terrasses, changements de chaudière et renouvellement d'équipements techniques, etc.). Les mises aux normes électriques, incendies sont également concernées. Enfin, on peut assimiler à ces travaux les gros travaux consécutifs à l'obsolescence des équipements (par exemple, en l'absence de pièces de rechange). Les crédits affectés à ces travaux de gros entretien comprennent l'ensemble des frais connexes nécessaires à leur exécution, tels que les diagnostics ou les études de maitrise d'oeuvre.

* 10 Loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

* 11 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 12 Rapport général n° 148 (2012-2013), Tome III, annexe 2.

* 13 D'après France Domaine.

* 14 Le MAEDI dispose également de droits de tirage sur le compte spécial, qui résultent des excédents du compte reportés d'un exercice d'un autre. Les droits de tirage du MAEDI s'élèveront à la fin de l'année 2016, d'après France Domaine, à 67 millions d'euros (AE) et 131 millions d'euros (CP).

* 15 Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

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