EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Au 1 er janvier 2017, la France comptait 1 266 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre contre 2 062 un an auparavant, soit une diminution de 39 %.

Cette réduction du nombre des intercommunalités résulte de la révision des schémas départementaux de coopération intercommunale prescrite par la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi « NOTRe », en conséquence du relèvement, opéré par le même texte, du seuil minimal de constitution des communautés de 5 000 à 15 000 habitants.

Le « grossissement » des EPCI à fiscalité propre constitue le corollaire de cette réforme : leur population moyenne s'établit aujourd'hui à 52 300 habitants alors qu'elle n'était que de 31 800 habitants précédemment ; les plus importants par le nombre des communes qu'ils regroupent se multiplient, les EPCI de 50 communes et plus triplant, de 53 en 2016 à 157 au 1 er janvier 2017.

Cet état, qui découle mécaniquement de la réforme adoptée en 2015, a été appréhendé avant même la mise en place des nouvelles intercommunalités en raison des difficultés qu'il soulève pour la démocratie de proximité et de la nécessité de rechercher les voies de préserver le fonctionnement quotidien des intercommunalités au plus près du terrain.

C'est dans ce cadre que s'inscrit la proposition de loi déposée par notre collègue Philippe Bas qui prévoit un dispositif permettant de territorialiser l'exercice des compétences intercommunales dans les grands ensembles.

I. L'INSTITUTIONNALISATION, PAR LA PROPOSITION DE LOI, DE LA TERRITORIALISATION DES COMPÉTENCES

Le dispositif proposé vise à maintenir au sein des intercommunalités les plus importantes par le nombre de communes qu'elles regroupent, et en conséquence par leur superficie d'autant plus vaste que leur densité démographique est faible, une gestion de proximité des compétences qui leur ont été transférées par les communes.

A. LA DILUTION DU TISSU INTERCOMMUNAL

La proposition de loi soumise à l'examen de votre commission des lois est fondée sur plusieurs constats formulés à la lecture des cartes intercommunales révisées :

- la constitution de très grandes intercommunalités rurales puisqu'en divers points du territoire, les moins peuplés en particulier, le respect du seuil de 15 000 habitants n'a pu être atteint que par la fusion de plusieurs communautés de communes ;

- le regroupement de plusieurs bassins de vie au sein d'une même communauté ;

- la nécessité d'offrir à ces vastes groupements « les moyens de fonctionner correctement pour qu'elles trouvent leur équilibre » 1 ( * ) .

Les rapporteurs de la mission de contrôle et d'information de la commission des lois sur la mise en oeuvre des dernières lois de réforme territoriale, nos collègues Mathieu Darnaud, René Vandierendonck, Pierre-Yves Collombat et Michel Mercier, avaient déjà, dans leur deuxième rapport d'étape, établi un diagnostic analogue. Ils invitaient à une réflexion sur la mise en oeuvre des compétences dans le cadre de l'élargissement des périmètres intercommunaux : « La diversité et la superficie de leur circonscription d'exercice, mêlant agglomérations et communes rurales, appellent des modes de gestion différenciée. C'est une des conditions du maintien du niveau de service aux administrés, d'un développement équilibré du territoire intercommunal et donc de la réussite de la réforme des SDCI » 2 ( * ) .

Quelques exemples tirés des cartes intercommunales mises en place au 1 er janvier dernier illustrent parfaitement ces difficultés.

Il en va ainsi de la communauté urbaine du Grand Reims issue de la fusion-extension de la communauté d'agglomération Reims Métropole avec sept communautés de communes - Beine-Bourgogne ; Champagne Vesle ; Fismes, Ardre et Vesle ; Nord Champenois ; Vallée de la Suippe ; Rives de la Suippe ; Vesle et Coteaux de la Montagne de Reims-  et 18 communes de la communauté de communes Ardre et Châtillonnais. Le nouvel ensemble regroupe 144 communes dont 111 de moins de 1 000 habitants autour d'une ville-centre de 185 000 habitants.

La communauté d'agglomération du Cotentin résulte d'une fusion multiple, celle de dix communautés de communes (La Hague dont les 19 communes se sont regroupées au 1 er janvier 2017 au sein d'une commune nouvelle ; Douve et Divette ; Les Pieux ; la Côte des Isles ; la Vallée de l'Ouve ; Coeur du Cotentin ; Canton de Montebourg ; Val de Saire ; Canton de Saint-Pierre Église ; la Saire) avec l'ancienne communauté urbaine de Cherbourg transformée, le 1 er janvier 2016, en une commune nouvelle peuplée de 83 971 habitants. L'EPCI nouvellement créé comprend 132 communes regroupant 180 060 habitants sur une superficie de 1 419,98 km 2 . Son conseil communautaire est composé de 221 élus.

Outre le maintien d'un fonctionnement démocratique, la gestion de ces périmètres soulève diverses questions dont celle du maintien de la proximité sur des territoires vastes et hétérogènes mêlant zones rurales, péri urbaines et rurales.

C'est à ces difficultés que tente de remédier la proposition de loi déposée par notre collègue Philippe Bas.


* 1 Cf. exposé des motifs de la proposition de loi n° 758 (2015-2016) permettant un exercice territorialisé de compétences au sein des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de cinquante communes au moins. Cette proposition de loi est consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/leg/ppl15-758.html.

* 2 Cf. rapport d'information n° 730 (2015-2016) fait au nom de la commission des lois, Quand la réforme rencontre les territoires - Deuxième rapport d'étape de la mission de contrôle et de suivi de la mise en oeuvre des lois de réforme territoriale . Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : https://www.senat.fr/rap/r15-730/r15-730.html.

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