B. L'ASSOUPLISSEMENT DES CONDITIONS DE LA COOPÉRATION INTERCOMMUNALE

Le Sénat a toujours défendu une conception de l'intercommunalité fondée sur la libre coopération des communes.

Certes, il a été nécessaire d'encourager le regroupement de communes pour qu'elles assument ensemble des compétences structurantes ou coûteuses, qui ne peuvent être exercées à une échelle trop petite. Il était également souhaitable de favoriser la solidarité financière entre des communes riches et d'autres qui le sont moins. Toutefois, force est de constater que, sur certains territoires, on est allé trop loin. Des intercommunalités « XXL » ont été constituées, regroupant cent ou deux cents communes et où, compte tenu de la topographie, il faut parfois près de deux heures pour aller d'une extrémité du territoire à l'autre. Des communautés d'agglomération ont été créées en pleine campagne, alors que ce statut avait été conçu pour favoriser le développement intégré d'une ville et de ses abords immédiats. Les communautés urbaines et les métropoles elles-mêmes s'étendent désormais jusqu'aux franges de la ruralité. Tout en poursuivant l'objectif de renforcer la solidarité financière entre les territoires du département, on a conduit des communes riches, intégrées à des métropoles, des communautés urbaines ou d'agglomération, à se retirer des syndicats qu'elles formaient avec des communes rurales restées en-dehors. Enfin, on a obligé les communes, sur tout le territoire national, à se défaire au profit des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre de compétences qu'elles exerçaient pourtant efficacement, sans tenir compte des circonstances locales 8 ( * ) .

Alors que la carte intercommunale vient d'être redessinée, les auteurs de la proposition de loi n'ont pas souhaité revoir de fond en comble le périmètre et les compétences des établissements existants. En revanche, il leur paraît indispensable d'apporter plusieurs assouplissements aux conditions actuelles de la coopération intercommunale.

En premier lieu, ils proposent l'instauration d'un outil législatif non-contraignant permettant aux EPCI de grande taille de s'organiser en territoires d'exercice d'une ou plusieurs de leurs compétences ( article 9 ).
Ces « pôles territoriaux » répondraient au besoin de proximité au sein des grands ensembles intercommunaux, le président de l'EPCI pouvant déléguer une partie de ses compétences à un conseiller communautaire élu dans le périmètre du pôle, désigné par l'organe délibérant de l'EPCI.

En deuxième lieu, l' article 10 de la proposition de loi prévoit d'autoriser un groupe de communes contiguës, membres d'un EPCI à fiscalité propre, à s'en retirer pour constituer un nouvel établissement, à condition de ne pas créer d'enclave ou de discontinuité territoriale au sein de leur ancien établissement et de respecter les seuils de population requis. La commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI) pourrait s'opposer au retrait à la majorité des deux tiers de ses membres. Comme on voit, cette nouvelle procédure ne remettrait pas en cause les principes posés par la loi « NOTRe ». Mais elle permettrait, au cas par cas, de remédier aux aberrations constatées lors de sa mise en oeuvre, et de mettre fin aux blocages qui empêchent aujourd'hui certaines intercommunalités de fonctionner.

En troisième lieu, l' article 11 prévoyait, dans sa rédaction initiale, de mettre fin à la révision sexennale des schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI). L'intention des auteurs de la proposition de loi était que dorénavant, après une phase de prétendue « rationalisation » forcée, les décisions relatives au périmètre et au statut des établissements publics de coopération intercommunale appartiennent aux élus et à eux seuls. Sur proposition de son rapporteur, votre commission a choisi de supprimer tout bonnement le schéma départemental de coopération intercommunale, qui a fait son temps et qui est d'ailleurs, en lui-même, dénué de toute valeur prescriptive. Cela n'empêchera pas les CDCI de réfléchir, à l'échelle du département et en fonction des besoins qui se feront sentir, aux évolutions souhaitables de la coopération intercommunale, sous des formes qui ne seront d'ailleurs pas nécessairement et dans tous les cas celles de l'EPCI à fiscalité propre. Des procédures existent pour cela, qui réservent au préfet un pouvoir d'initiative sans lui permettre de s'opposer à la volonté majoritaire des élus.

Inséré par votre commission à l'initiative de son rapporteur, l' article 11 bis - qui reprend les dispositions d'une récente proposition de loi de notre collègue Bruno Sido - tend à supprimer l'obligation de déclaration de candidature aux élections municipales dans les communes de moins de 1 000 habitants, qui provoque des difficultés récurrentes.


* 8 Le transfert obligatoire aux EPCI à fiscalité propre des compétences communales en matière d'eau et d'assainissement en est un parfait exemple. Voir, sur ce point, le rapport n° 421 (2017-2018) fait, au nom de la commission des lois, par notre collègue François Bonhomme sur la proposition de loi relative à la mise en oeuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes.

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