B. DES RÉSULTATS INFÉRIEURS AUX ATTENTES

Dans le contexte actuel du suivi de la performance, les résultats obtenus apparaissent mitigés.

S'il est bien vrai que l'utilité sociale des actions financées par la mission n'est pas toujours susceptible d'être restituée par des indicateurs ponctuels, à dimension exclusivement quantitative et dont les niveaux dépendent en partie de facteurs extérieurs à l'action publique, les indicateurs suivis ne témoignent pas de l'atteinte des objectifs fixés.

1. Les indicateurs de performance du programme 307 semblent traduire les difficultés rencontrées dans l'accomplissement des missions

Des dix sous-indicateurs du programme 307, six révèlent des résultats inférieurs aux attentes .

Votre rapporteur spécial souhaite tout particulièrement que les cibles des indicateurs relatifs à la sécurité civile , qui pourraient être enrichis pour tenir compte des nouvelles menaces, soient toutes atteintes.

Par ailleurs, la détérioration des résultats obtenus dans le domaine de la délivrance des titres sécurisés, pour laquelle le dispositif de suivi de la performance reste incomplet - seules les performances de la délivrance des permis de conduire et des passeports biométriques sont publiées dans ce cadre - , témoigne des difficultés rencontrés pour atteindre les cibles prescrites aux services.

Non seulement la cible n'est pas atteinte, seuls 69,6 % des passeports biométriques et 88,3 % des cartes nationales d'identité étant délivrés en 15 jours ou moins contre des objectifs de 90 % et 95 % respectivement, mais encore les résultats observés traduisent-ils une profonde dégradation par rapport à l'année précédente. Le recul atteint près de 10 % dans les deux cas. Si le niveau d'exigences a été légèrement relevé pour la délivrance des permis de conduire, la mise en place des nouveaux circuits de délivrance des titres sécurisés dans le cadre du PPNG semble laborieuse.

Les motifs des déconvenues enregistrées, qui paraissent encore plus aigües pour certains titres (les certificats d'immatriculation des véhicules en particulier) appellent un suivi attentif et une restitution publique nettement plus transparente que celle, approximative, du rapport annuel de performances.

2. Le programme 232 a été confronté à des choix peu propices à l'optimisation de ses résultats

Le suivi de la performance du programme, on l'a indiqué, est structuré autour d'indicateurs globalement indépendants de toute influence du responsable de programme. Ainsi en va-t-il, en particulier, s'agissant du coût des élections, pour les conditions de diffusion de la propagande électorale dont la dématérialisation est régulièrement envisagée sans être jamais mise en oeuvre.

Peu de progrès ont été accomplis ces dernières années. Alors que la numérisation pénètre dans tous les domaines de la vie des Français, les économies qu'elle pourrait permettre n'ont pas été mobilisées. Cette résistance engage une responsabilité qui incombe au premier chef aux Gouvernements qui n'ont pas su convaincre du bien-fondé des nombreuses initiatives développées en ce sens ces dernières années. Des projets non concertés sont apparus sans l'indispensable phase de consultations nécessaire à toute méthode de réforme qui se veut convaincante. Moyennant un processus débarrassé de son empreinte solitaire et technocratique, le nouveau cycle électoral qui s'ouvre devrait fournir l'occasion d'expérimentations limitées mais réalistes. Elles pourraient passer par l'ouverture d'une option de réception par voie numérique des documents de propagande électorale exercée au gré des électeurs. L'échec du projet de dématérialisation de la propagande électorale a entraîné en 2017 un surcoût estimé à 168,9 millions d'euros.

Par ailleurs, quant à la mission attribuée à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, l'indicateur suivant les délais de publication des comptes des partis politiques n'est plus publié. La dernière publication de cet indicateur signalait une détérioration du délai nécessaire au traitement des comptes en 2016 avec l'ajout d'un mois supplémentaire au délai déjà important employé l'année précédente (6 mois et 20 jours au lieu de 5 mois et 7 jours en 2015).

Il s'agissait d'un mauvais résultat que le Gouvernement avait expliqué par un alourdissement de la charge de travail. Celle-ci n'avait pas empêché le responsable de programme de procéder à une opération de fongibilité asymétrique des crédits qui avait conduit à employer 10,5 millions d'euros prévus pour rémunérer des personnels afin de régler des prestations liées à l'externalisation et à la mise sous pli de la propagande électorale.

Cette année à nouveau, une opération de fongibilité asymétrique des crédits a été appliquée au programme 232. Elle est d'un montant encore supérieur à celui mentionné ci-dessus. Elle a atteint 15,7 millions d'euros afin de financer un surcoût des mises sous pli de la propagande électorale lié à son externalisation. Celui-ci paraît résulter d'un recours plus systématique à cette modalité de traitement de la propagande électorale.

Initialement estimés à 40,9 millions d'euros, les crédits de personnel mobilisés pour les opérations électorales n'ont été consommés qu'à hauteur de 19,4 millions d'euros (soit un taux de non-consommation considérable de plus de 52 %).

3. Le programme 216, des inquiétudes sur le contentieux, l'informatique et l'immobilier

En ce qui concerne le programme 216, l'un des enjeux majeurs est de mieux maîtriser les contentieux traités par le ministère. Les cibles fixées ne sont pas atteintes. Cette sous-performance est d'autant plus insatisfaisante que les objectifs, exprimés par un taux de réussite devant les juridictions saisies, sont, avec une cible de 80 % de réussite, très inférieurs au 100 % qu'on serait en droit d'attendre de l'État qui dispose de moyens de prévention des contentieux supérieurs aux justiciables ordinaires. Le choix d'une cible sensiblement inférieure suggère que les attentes du ministère ne sont pas systématiquement de remporter ses procès, mais d'obtenir des victoires partielles.

Quant aux systèmes informatiques, la durée d'indisponibilité de certaines applications informatiques ressort encore comme particulièrement élevée. Alors que des progrès d'ensemble avaient pu être extériorisés ces dernières années, une nouvelle dégradation intervient en 2017. Or, elle concerne des programmes particulièrement sensibles correspondant à des opérations de police (passage rapide aux frontières, fichier des personnes recherchées et des véhicules volés), à des opérations de délivrance de titres sécurisés, l'application SIV (système d'immatriculation des véhicules) notamment, ou encore à des opérations de statut constitutionnel en lien avec le contrôle de légalité (ACTES).

La portée de l'indicateur d'indisponibilité des applications reste difficile à apprécier. En premier lieu, le résultat de l'indicateur (un peu plus de 32 heures d'indisponibilité) ne peut être mis en cohérence avec les informations présentées par le RAP que sous certaines conditions de pondération non explicitées et qui viennent réduire le sens de l'indicateur. Ainsi, selon le RAP, un incident électrique survenu au mois de juillet aurait engendré à lui seul 131 heures 40 minutes d'indisponibilité pour neuf applications. C'est nettement plus que la durée d'indisponibilité relevée par l'indicateur. Il est possible qu'une pondération soit mise en oeuvre, mais alors force est de lui associer une forme de déperdition de l'information. L'indisponibilité des applications qui compte opérationnellement est, en effet, l'indisponibilité observée et non l'indisponibilité calculée. En toute hypothèse, qu'un seul incident survenu dans un unique data-center puisse paralyser les applications de sécurité de l'État au point révélé par le RAP doit conduire à des améliorations urgentes.

L'explosion des dépenses informatiques passées de 543 euros par poste en 2016 à 1 537 euros en 2017 mérite d'être mise en lumière. Elle paraît liée à des renouvellements de matériels et n'avoir pas été anticipée par la programmation initiale des crédits (mais les informations budgétaires sont sur ce point particulièrement peu satisfaisantes - voir infra ).

De la même manière, la maîtrise des opérations immobilières, dont les indicateurs varient avec une forte ampleur d'une année sur l'autre, semble perfectible au vu des dépassements de délais et de budgets dont ces indicateurs témoignent. On ne saurait oublier, par ailleurs, les interrogations sur l'état des emprises immobilières des préfectures et des sous-préfectures et leur niveau d'utilisation.

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