III. FACILITER LE RELOGEMENT DES FEMMES VICTIMES DE VIOLENCE

La proposition de loi comporte un chapitre III relatif à « l'hébergement d'urgence », qui a en réalité pour objet principal de favoriser l'accès des femmes victimes de violences à un logement social.

A. UN ENJEU IMPORTANT POUR LES FEMMES VICTIMES

Il convient de rappeler, en préambule, que les femmes victimes de violences au sein du couple ont vocation à demeurer au sein du domicile conjugal ou commun.

1. L'éviction du conjoint violent est la règle de principe

Dans le cadre d'une procédure pénale, l'éviction du conjoint violent peut être ordonnée par le procureur de la République, par le juge d'instruction ou le JLD ou par la juridiction de jugement ; elle peut également être ordonnée par le JAF dans le cadre d'une ordonnance de protection. Sauf circonstances particulières, la victime a le droit de rester dans son logement si elle le sollicite. Sans être automatique, l'éviction du conjoint violent est donc bien la règle de principe .

Les personnes entendues par votre rapporteur ont souligné que ce principe est maintenant bien intégré par les acteurs du monde judiciaire et que l'éviction du conjoint violent est fréquemment décidée par les juridictions.

Dans l'attente d'une décision judiciaire, il faut cependant gérer l'urgence, lorsqu'une femme fuit le domicile conjugal, parfois accompagnée de ses enfants, pour échapper aux coups de son conjoint.

La victime peut être accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence, par exemple un centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), un foyer de jeunes travailleurs (FJT) ou une chambre d'hôtel. Pour augmenter l'offre d'hébergement, le Gouvernement a annoncé, à l'occasion du Grenelle des violences conjugales, son intention d'ouvrir 1 000 places supplémentaires d'hébergement d'urgence ou de logement temporaire.

Votre rapporteur a entendu des représentantes de l'association Halte aide aux femmes battues, créée à Paris en 1983, qui gère un CHRS. Elles ont insisté sur l'importance des besoins d'hébergement et de logement ainsi que d'un accompagnement social pour aider les femmes en situation de détresse et les soutenir dans leurs démarches.

2. Le relogement de la victime est pourtant parfois nécessaire

Passée l'urgence, il est parfois nécessaire d'envisager un relogement plus durable, notamment lorsque la victime ne veut pas regagner le domicile conjugal parce qu'il est associé à des souvenirs traumatiques ou lorsqu'elle juge plus prudent de déménager, afin de ne pas pouvoir être retrouvée par le conjoint violent et de se sentir ainsi plus en sécurité.

Le relogement est plus difficile, surtout dans les grandes villes, pour les femmes qui ne disposent que de peu de ressources, ce qui justifie de prendre des mesures pour faciliter leur accès au parc social. Les auditions auxquelles a procédé votre rapporteur ont montré que les acteurs du logement social sont sensibilisés depuis longtemps aux difficultés particulières de ce public vulnérable.

L'Union sociale de l'habitat (USH) a par exemple noué un partenariat avec la Fédération nationale Solidarité Femmes (FNSF) et a engagé un programme de formation de ses salariés de proximité pour leur apprendre à repérer et gérer les situations de violence au sein du couple. Le Fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL), qui verse des aides aux personnes qui rencontrent des difficultés d'accès au logement en raison de difficultés financières ou d'insertion sociale, prévoit de consacrer 15 millions d'euros au financement de logements accompagnés pour les femmes victimes et pour les jeunes sortant de l'aide sociale à l'enfance (ASE).

Action Logement, l'organisme qui gère les ressources issues de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC), est également impliqué : il a lui aussi passé une convention avec la FNSF et a pris l'engagement, en 2018, de mettre à la disposition du conseil régional d'Ile-de-France 500 logements destinés aux femmes victimes de violences quotidiennes.

La loi fait déjà des femmes victimes de violences au sein du couple un public prioritaire pour l'accès au logement social. Récemment, la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi ELAN, a apporté une protection supplémentaire aux femmes victimes en introduisant une exception au principe de solidarité qui régit habituellement le paiement du loyer entre personnes mariées ou partenaires de PACS : si la victime informe le bailleur, par lettre recommandée avec avis de réception, qu'elle bénéficie d'une ordonnance de protection ou que son conjoint ou partenaire a fait l'objet d'une condamnation pénale pour des faits de violences conjugales, elle n'est alors plus tenue de continuer à payer le loyer.

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