MISSION « AGRICULTURE, ALIMENTATION,
FORÊT ET AFFAIRES RURALES »
ET COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL »

mm. alain houpert et yannick botrel, rapporteurs spéciaux

SOMMAIRE

Pages

I. UNE EXÉCUTION 2019 MARQUÉE PAR LA SAISIE D'OPPORTUNITÉS ET UN PARI AVENTUREUX SUR LEUR REPRODUCTIBILITÉ 89

A. UNE RÉDUCTION DE LA DÉPENSE ET UNE CONTRIBUTION AU BOUCLAGE FINANCIER DU BUDGET EN FIN D'EXERCICE 91

1. Une exécution en ligne avec les crédits ouverts par la loi de finances de l'année... 91

2. Le respect de la loi de programmation des finances publiques 2018-2022 mais... 93

3. Une forte réduction des dépenses par rapport à l'exercice précédent 96

B. UNE RÉDUCTION DES DÉPENSES FAVORISÉE PAR DES FACTEURS EXOGÈNES, SYMPTÔME DES DIFFICULTÉS DE MISE EN OEUVRE DE LA POLITIQUE AGRICOLE 100

1. Des facteurs exogènes 100

2. Des reports de charges : les restes à payer et les charges reportées 106

3. Une exécution qui paraît déjà grever la programmation budgétaire pour 2020 112

II. UNE STAGNATION DE L'AMBITION AGRICOLE DE LA FRANCE 113

A. LA MISSION AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES (AAFAR), UN VECTEUR BUDGÉTAIRE PERFECTIBLE 113

1. Une mission aux limites de la lisibilité et de la conformité avec la loi organique sur les lois de finances 113

2. Une information insatisfaisante sur les concours publics à l'agriculture 115

B. MALGRÉ UN IMPACT PLUS MODÉRÉ EN 2019 LES DIFFICULTÉS RÉCURRENTES D'ADMINISTRATION MÉRITENT UNE ATTENTION SOUTENUE 121

1. La charge des refus d'apurement a été considérablement allégée par rapport aux exercices précédents, mais de nouvelles déconvenues ne sont pas à exclure 122

2. Un coût d'administration élevé des interventions agricoles de la PAC 125

3. Un retour au calendrier normal de versements des aides ? 128

4. Que vont devenir les crédits d'engagement ayant fait l'objet d'un retrait ? 131

C. UN NIVEAU DE SUBVENTIONS RIGIDE DANS UN CONTEXTE MARQUÉ PAR DES CONTRAINTES ÉCONOMIQUES FORTES 132

1. La contribution des subventions aux résultats économiques des exploitations est vitale pour de nombreuses exploitations et pleinement justifiée par les caractéristiques particulières de l'agriculture française... 133

2. ... mais les interventions stagnent 135

D. DES OPÉRATEURS EN DIFFICULTÉ 139

1. La politique forestière et l'ONF 139

2. L'ASP et la modernisation de ses outils 143

3. L'ANSES, une forte augmentation des dépenses de fonctionnement ; un financement reposant de plus en plus sur une activité d'autorisation de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques au modèle problématique ; une vocation scientifique à défendre résolument 144

4. L'INAO confronté aux charges de sécuriser la différenciation qualitative des produits, une mission très compromise en 2019 147

E. LA SÉCURITÉ SANITAIRE DE L'ALIMENTATION, UNE POLITIQUE PUBLIQUE À CONSOLIDER 148

1. Une programme fréquemment affecté par des difficultés de programmation budgétaire qui en a connu un nouvel épisode en 2019 150

2. Une exécution budgétaire qui matérialise certains déséquilibres de l'action publique de sécurité sanitaire des aliments 152

3. Les moyens de la politique de sécurité sanitaire de l'alimentation sont illisibles et la nomenclature budgétaire ne respecte pas la loi organique relative aux lois de finances 157

III. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL » 160

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2019 160

1. Le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural », deux programmes aux destinataires propres 160

2. Après des déconvenues récurrentes par rapport aux prévisions de recettes du compte, une meilleure anticipation, mais une charge non négligeable pour les exploitants 162

3. Un taux de consommation des crédits peu satisfaisant 166

B. AMÉLIORER LES INFORMATIONS SUR LES PERFORMANCES ATTEINTES ET RECOURIR DAVANTAGE AUX APPELS À PROJETS POUR CONTRER LA LOGIQUE D'ABONNEMENT AUX AIDES 167

I. UNE EXÉCUTION 2019 MARQUÉE PAR LA SAISIE D'OPPORTUNITÉS ET UN PARI AVENTUREUX SUR LEUR REPRODUCTIBILITÉ

La mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » (AAFAR) comprend trois programmes budgétaires distincts :

- le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l'aquaculture » (1 767,7 millions d'euros de dépenses en 2019) correspond principalement à la composante nationale des interventions en faveur du développement rural portées au niveau européen par le FEADER mais aussi aux interventions en faveur de la pêche et de la forêt ;

- le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » (550,6 millions d'euros de dépenses en 2019) couvre pour l'essentiel, en dépit de son intitulé, des interventions visant à assurer l'intégrité des animaux et végétaux, ne réservant qu'une partie de ses interventions à la sécurité sanitaire des aliments elle-même ;

- le programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » (625,5 millions d'euros de dépenses en 2019) est le programme support du ministère de l'agriculture et réunit la plupart des moyens nécessaires à couvrir les coûts de gestion des missions du ministère (hors éducation).

Par ailleurs, la mission concourt au financement d'un grand nombre d'opérateurs, principalement à partir du programme 149, sans compter un nombre difficile à déterminer de partenaires auxquels se trouvent déléguées des missions du ministère et qui sont financés par ce dernier ou directement par les exploitants agricoles.

La mission AAFAR n'est qu'un financeur second de l'agriculture française et des autres activités dans lesquelles il intervient qui bénéficient de transferts publics, mal circonscrits, mais frôlant sans doute les 21 milliards d'euros par an.

Ces dernières années, la programmation budgétaire avait été marquée par une forme d'insincérité budgétaire consistant à ne pas inscrire en loi de finances initiale les crédits nécessaires à des dépenses certaines et obligatoires et aboutissant à des bilans d'exécution très éloignés des prévisions.

De ce point de vue, les opérations relatives au budget 2018 prêtaient moins le flanc à la critique; il en va de même pour l'exercice 2019.

Ces derniers constats doivent être formulés avec toute la prudence nécessaire.

D'une part, ils reposent sur des constats affectés d'un certain « nominalisme » budgétaire national que la confrontation avec la programmation financière européenne ne conduit pas à considérer comme le dernier mot de l'exécution budgétaire. L'état de la consommation de l'enveloppe française au titre du budget européen traduit des situations de tension.

D'autre part, compte tenu de la réalité d'une base productive agricole nationale en très grande difficulté, la question de la capacité du budget agricole à seconder les grands objectifs de la politique agricole doit être posée.

De fait, ni les objectifs de revenu des exploitants, ni les objectifs de qualité des productions ne sont atteints.

La question de la qualité de la dépense agricole ne peut être éludée.

Des dépenses considérables avaient dû être supportées par la mission sans profit pour l'économie agricole, du fait de dysfonctionnements dans l'administration des interventions européennes, qui, de surcroît, avaient gravement perturbé le cours normal des paiements des aides à l'agriculture. Après avoir navigué sur les sommets d'une vague largement subie, la mission AAFAR est redescendue en 2018 vers des eaux apparemment plus tranquilles. L'exercice 2019 bénéficie, à cet égard, comme son prédécesseur d'une forme de normalisation. Son ampleur demeure sujette à caution tandis que ses ressorts sont pour certains loin d'être satisfaisants.

Plus économiquement, l'exercice budgétaire 2019, qui a été marqué par une série de valses hésitations, peut être vu comme un exercice d'affadissement de la politique agricole incarnée dans le budget ministériel, motif principal du rejet des crédits de la mission par le Sénat.

Or, l'agriculture française ne peut durablement s'accommoder d'un calme plat budgétaire que ni sa situation économique ni les transitions auxquelles elle est appelée ne justifient, transitions auxquelles il convient aujourd'hui d'ajouter l'impératif d'une plus forte souveraineté agricole et alimentaire nationale.

L'exécution des crédits de la mission avait révélé en 2018 un reflux considérable des dépenses par rapport au sommet atteint en 2017.

En 2019, le reflux se poursuit.

On doit se féliciter que les dysfonctionnements de la chaîne des paiements agricoles qui avaient lourdement pesé sur les charges de la mission aient atténué leur emprise, offrant l'aubaine d'une exécution budgétaire apparemment plus sereine.

Toutefois, la réduction des dépenses de la mission, même si elle est partiellement le résultat de modifications structurelles touchant les allègements de cotisations sociales ne peut pas être accueillie sans considération de l'impact d'une langueur des « investissements » publics dans l'agriculture française.

A. UNE RÉDUCTION DE LA DÉPENSE ET UNE CONTRIBUTION AU BOUCLAGE FINANCIER DU BUDGET EN FIN D'EXERCICE

Si globalement l'exécution des crédits a été en 2019 conforme aux ouvertures de crédits de la loi de finances initiale, la gestion de fin d'exercice a interdit la reproductibilité des conditions de cette conformité, gestion d'autant plus risquée que les crédits inscrits en loi de finances pour 2020 ne laissent que très peu de marges.

1. Une exécution en ligne avec les crédits ouverts par la loi de finances de l'année...

Les dépenses de la mission ont été en ligne avec les crédits ouverts en loi de finances initiale.

Cependant, un léger excédent de dépenses doit être constaté. Il a atteint 22,3 millions d'euros (0,8 % des ouvertures de la loi de finances) moyennant la décomposition suivante :

- 6,4 millions d'euros sur le programme 149 (+ 0,4 %) ;

- 15,8 millions d'euros sur le programme 206 (3 %) ;

- 0,1 million d'euros sur le programme 215.

Dans ces conditions, les mouvements de crédits ont été globalement modestes. Se soldant par des ouvertures nettes (60,9 millions d'euros), elles ont excédé les dépenses en surcroît par rapport aux autorisations initiales, de l'ordre de 38,6 millions d'euros.

Mouvements infra-annuels de crédits sur les différents programmes
de la mission en 2019

(en millions d'euros)

Source : Cour des comptes

Les reports de l'exercice précédent ont atteint un niveau significatif (65,6 millions d'euros hors reports de fonds de concours) avec une concentration sur le programme 149 (+ 61 millions d'euros hors reports de fonds de concours), les opérations de fin de gestion 2018 étant plus largement considérées par la Cour des comptes comme ayant facilité le bouclage des besoins apparus en 2019 (dispositif d'allègements de cotisations sociales, dotation de 50 millions d'euros au fonds national de gestion des risques en agriculture).

Des fonds de concours ont été rattachés pour 23,1 millions d'euros (contre 16,6 millions d'euros en 2018).

La loi de finances rectificative de fin d'exercice qui a procédé à l'annulation nette de 36,6 millions d'euros (en autorisations d'engagement) et de 42,6 millions d'euros (en crédits de paiement) a, ainsi, réduit le disponible reportable sur 2020.

Cette décision doit être mise en regard de la budgétisation initiale pour 2020. Cette dernière est marquée par une modeste progression des crédits ouverts, qui avec 2 958 millions d'euros impliquent une hausse des crédits de 1,24 %, très modérée au regard des défis que doivent relever les différentes politiques publiques financées par la mission.

2. Le respect de la loi de programmation des finances publiques 2018-2022 mais...

La loi de programmation pluriannuelle des finances publiques pour la période 2018-2022 inscrit les crédits de la mission sur une trajectoire fortement baissière avec des crédits ouverts en 2020 inférieurs de 340 millions d'euros par rapport au disponible de début de période.

Plafonds de crédits de paiement de la loi de programmation
des finances publiques 2018-2022


(en milliards d'euros)

Loi de finances initiale 2017

Loi de finances initiale 2017 au format 2018

2018

2019

2020

3,15

2,79

3,18

2,88

2,84

Source : loi de programmation pluriannuelle des finances publiques 2018-2022

Le Gouvernement avait expliqué que cette programmation serait à mettre au compte de la réorganisation des compensations de cotisations sociales passant par la substitution d'allègements de cotisations sociales accordés aux employeurs de travailleurs saisonniers aux actuelles compensations sur crédits (soit la mise en oeuvre d'une énième niche fiscalo-sociale en lieu et place des dépenses publiques basées sur les crédits du programme 149).

Les charges correspondantes s'étaient élevées en 2018 à 482,6 millions d'euros de sorte qu'à périmètre constant, en supposant devoir totalement disparaître les crédits de compensation d'allègements des cotisations sociales, cette opération laisserait disponible pour financer les autres charges de la mission une dotation de 142,6 millions d'euros en excédent des crédits ouverts en 2018, ouvrant à la perspective d'une progression de 2,5 % par an des dépenses de la mission.

L'exercice 2019 oblige à reconsidérer ces perspectives. Le Gouvernement ayant été contraint d'abandonner, au moins provisoirement, son projet de réduire les transferts aux exploitations agricoles employant des travailleurs saisonniers à l'occasion de la substitution exposée ci-dessus et engagée en 2019, une somme de 177 millions d'euros a dû être mobilisée pour faire face à des engagements (au demeurant insuffisamment budgétés - voir infra ).

Même si le principe d'une banalisation du régime des TO-DE a été consacré, avec pour horizon l'exercice 2021, principe auquel les rapporteurs spéciaux s'opposent d'autant plus fermement que les événements catastrophiques de ce printemps 2020 ont mis pleinement en évidence l'impérieuse obligation de pouvoir mobiliser une main d'oeuvre saisonnière (sans compter les nécessités du projet agro-écologique français), il va de soi que, sauf à renoncer à toute ambition agricole, la programmation pluriannuelle doit être substantiellement modifiée.

Cette conclusion illustre l'observation faite par les rapporteurs spéciaux l'an dernier pour faire valoir que la programmation pluriannuelle des crédits d'une mission aussi sensible à des aléas de gestion comme de conditions économiques des destinataires des dépenses devrait être considérée plus comme une norme régulatrice que comme une norme contraignante.

Que telle ne soit pas la lettre de la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques ne conduit pas à discréditer les moyens dégagés pour asseoir l'ambition agricole de la France mais plutôt le cadre posé pour « discipliner » les finances publiques nationales (qui, par ailleurs, ne manquent pas de devoir l'être).

Au-delà de la question ponctuelle ici exposée, il conviendrait encore de tenir compte des restes à engager et à payer pour que la France puisse respecter une autre programmation financière, celle d'un poids autrement important, que loge le budget européen.

À cet égard, la documentation budgétaire présente de très notables insuffisances.

Le rapport annuel de performances fait état d'une réduction des restes à payer qui pourrait apparaître satisfaisante n'en étaient les motifs et le caractère d'affichage.

En ce qui concerne les restes à payer sur engagements 26 ( * ) à fin 2018, ils s'élevaient encore à 1,3 milliard d'euros, malgré la mise en oeuvre d'une procédure de désengagement ayant réduit les engagements du programme 149 de 507,5 millions d'euros en 2018.

État des restes à payer

(en millions d'euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Évolution
2019/2018

Prog 149

1 616,5

1 717,6

1 866,5

1 837,5

1 179,7

1 021,0

- 13 %

Prog 206

42,7

44,5

50,3

59,0

57,6

55,0

- 5 %

Prog 215

64,6

57,0

54,2

53,8

47,3

39,8

- 16 %

Total mission
hors CAS

1 723,8

1 819,2

1 970,9

1 950,3

1 284,4

1 115,8

- 13 %

Source : ministère de l'agriculture et de l'alimentation

Pour l'exercice sous revue, il s'est soldé par une nouvelle réduction des restes à payer qui sont évalués selon la structure suivante :

Programme 149 : 1 021 millions d'euros, soit une réduction de 158,7 millions d'euros ;

Programme 206 : 55 millions d'euros, soit une réduction de 2,6 millions d'euros ;

Programme 215 : 39,8 millions d'euros, soit une réduction de 7,5 millions d'euros.

Au total, les restes à payer ont ainsi diminué de 168,8 millions d'euros (- 13 %). Le repli est moins accusé que l'an dernier (- 34 %) et peut être partiellement expliqué par les retraits d'engagements dormants effectués encore une fois cette année. Le programme 149 a été particulièrement concerné avec des désengagements juridiques pour 80 millions d'euros (plus de la moitié de la baisse des restes à payer). La récurrence des « nettoyages » comptables des engagements appelle une justification permettant d'en saisir finement les tenants et aboutissants. Il faut encore tenir compte des difficultés de consommation des autorisations d'engagement ouvertes en 2019. Le taux de consommation des autorisations d'engagement systématiquement inférieur à l'unité réduit mécaniquement les restes à payer (plus de 92 millions d'euros d'autorisations d'engagement ouvertes sur le programme 149 sont restées sans affectation ni engagement en 2019).

Ces motifs ne sont pas faits pour rassurer. Outre qu'ils illustrent une gestion embarrassée des interventions financées par la mission (et sans doute aussi les difficultés rencontrées par la base de production agricole nationale), ils conduisent à s'interroger sur la capacité de la France à saisir les opportunités de la politique agricole commune et de la pêche.

3. Une forte réduction des dépenses par rapport à l'exercice précédent

Les ouvertures de crédits de la loi de finances de l'année ont été nettement inférieures à celles de l'exercice précédent tout comme les dépenses de la mission qui ont baissé d'environ 15 % par rapport à l'an dernier.

Avec un niveau de dépenses de 2,943 milliards d'euros en crédits de paiement et une consommation des autorisations d'engagement de 2,776 milliards d'euros, les dépenses de la mission AAFAR sur crédits de paiement ont été inférieures en 2019 par rapport au niveau atteint l'an dernier de 498,3 millions d'euros. Cependant, les dépenses sur crédits de paiement, si elles se sont inscrites en retrait par rapport au disponible ont excédé les ouvertures prévues en loi de finances initiale.

Quant aux consommations d'autorisations d'engagement, elles ont légèrement augmenté (+ 20,1 millions d'euros) tout en étant inférieures de 56,7 millions d'euros par rapport à la programmation budgétaire.

Données relatives à l'exécution des crédits de la mission en 2019

(en millions d'euros)

Programmes

Exécution 2018

Crédits ouverts en LFI 2019

Total des crédits ouverts en 2019

Exécution 2019

Variation 2019/2018

Écart exécution 2019/
LFI 2019

149 « Économie et développement durable de l'agriculture, de la pêche et des territoires »

AE

1 565,4

1 679,1

1 701,7

1 609,2

43,8

- 69,9

CP

2 244,1

1 761,3

1 782,7

1 767,7

- 476,4

6,4

206 « Sécurité et qualité
sanitaires de l'alimentation »

AE

550,8

535,9

563,1

548,5

- 2,3

12,6

CP

552,4

535,0

560,3

550,6

- 1,8

15,6

215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture »

AE

639,6

617,7

633,3

618,3

- 21,3

0,6

CP

645,8

625,5

639,7

625,5

- 20,3

0,0

Total Mission

AE

2 755,8

2 832,7

2 898,1

2 776,0

20,2

- 56,7

CP

3 442,3

2 921,8

2 982,7

2 943,8

- 498,5

22,0

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du RAP 2019


La variation des dépenses a été très contrastée selon les programmes concernés , le programme 149 en concentrant la majeure partie avec une baisse de 476,4 millions d'euros ( soit un abattement de plus d'un quart par rapport à 2018).

La réduction des dépenses a beaucoup moins touché le programme 206 (- 1,8 million d'euros après une réduction de 73,1 millions d'euros en 2018), tandis que les dépenses de conduite et pilotage des politiques du programme 215 ont connu une réduction un peu supérieure à 20 millions d'euros (- 3,1 %).

Du point de vue des évolutions des dépenses par nature , les dépenses de fonctionnement et les dépenses d'intervention , dont le poids dans les dépenses de la mission s'allège de 5 points, passant de 71,4 % du total à 66,4 % ont connu les réductions les plus importantes, le repli des dépenses d'intervention atteignant 26,2 %.

Évolution des dépenses de la mission par titre
entre 2018 et 2019
27 ( * )

(en millions d'euros)

2018

2019

Variation 2019/2018 (en valeur)

Variation 2019/2018 (en %)

Dépenses de personnel

862,3

856,8

- 5,5

- 0,6

Autres dépenses

2 579,8

2 087

- 492,8

- 19,1

Dont :

Dépenses de fonctionnement

918,6

830,3

- 88,3

- 9,6

Dépenses d'investissement

8,3

12,9

+ 4,6

+ 55,4

Dépenses d'intervention

1 524,1

1 124,6

- 399,5

- 26,2

Dépenses d'opérations financières

128,9

119,3

- 9,6

- 7,4

Total

3 442,1

2 943,8

- 498,3

- 14,5

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du rapport annuel de performances de la mission pour 2019

Les dépenses d'opérations financières avaient enregistré l'an dernier une très forte hausse (+ 128,9 millions d'euros), notamment pour couvrir les besoins du fonds national de gestion des risques agricoles (FNGRA), pour 75 millions d'euros, et de l'Agence de services et de paiement (voir infra ) pour 45 millions d'euros.

En 2019, elles ont connu un recul de plus de 7 % (- 9,6 millions d'euros) du fait d'un repli du niveau de la dotation financière attribuée à l'ASP.

En ce qui concerne les dépenses de personnel , qui représentaient près du quart des dépenses de la mission l'an dernier, leur poids s'alourdit en 2019 (près de 30 %), la réduction des ETPT consommés, très significative (1,1 %), n'ayant pas tous ses prolongements dans une baisse des dépenses de titre 2 limitée à 0,7 %.

L'évolution des emplois s'est en effet inscrite en baisse (- 135 ETPT après - 585 ETPT l'an dernier soit un total de - 720 ETPT en deux ans) dans un contexte marqué par des recrutements exceptionnels réalisés ces dernières années et, en particulier, en 2016.

Dans ce cadre, les évolutions d'emploi ont été très différenciées selon le programme considéré.

Le programme 206 a connu une augmentation de sa consommation d'ETPT qui est passée de 4 653 ETPT en 2018 à 4 748 ETPT en 2019 (+ 95), évolution due aux recrutements effectués dans la perspective d'un Brexit, qui ne s'est pas concrétisé au cours de l'année 2019, situation qui n'empêche pas de s'interroger sur les capacités d'anticipation de cet événement (voir infra ).

En ce qui concerne le programme 215 , qui avait perdu 390 ETPT en 2017 et 587 ETPT en 2018, passant de 8 448 à 8 058 unités, il en perd à nouveau 230 (7 241 ETPT consommé en 2019), soit un repli de 1 207 emplois en trois ans. Les effectifs du programme sont ainsi passés de 8 448 emplois à 7 241 emplois entre 2016 et 2019.

Cette évolution doit certes être resituée dans une perspective marquée par le recrutement massif d'agents (845 ETPT en 2015 et 2016) pour faire face aux difficultés de gestion des aides agricoles (plan FEAGA) mais aussi à la grave crise d'influenza aviaire.

Cependant, l'ampleur des réductions de personnel dépasse désormais sensiblement les évolutions prévisibles une fois ces besoins réputés couverts.

La réduction des effectifs a exclusivement porté sur des emplois de catégorie B et C (administratifs et techniques).

Au total, le plafond d'emplois n'a pas été consommé en totalité, la sous-exécution demeurant assez marginale (autour de 0,6 %).

Une partie des explications avancées repose sur la combinaison de deux facteurs : l'ouverture tardive des possibilités budgétaires de recrutement par la loi de finances rectificative de fin d'année ; les difficultés semblant exister pour recruter des personnels chargés de conduire les contrôles prévus par les divers règlements applicables à la politique agricole commune du fait des règles européennes et nationales.

Ces deux « justifications » suscitent une certaine perplexité quant aux conditions de la programmation budgétaire qui paraît accuser un certain retard par rapport aux diagnostics opérationnels mais également relativement à l'attractivité des emplois du ministère.

Après tout, celui-ci disposait d'un vivier d'emplois après avoir mobilisé une quantité considérable d'emplois précaires pour répondre à l'urgence d'une meilleure satisfaction des obligations règlementaires entourant les paiements des aides. Il faut croire que l'expérience n'a pas été de nature à fidéliser une main d'oeuvre a priori disponible.

Au total, les ETPT mobilisés par la mission ont diminué passant de 12 124 ETPT à 11 989 ETPT, soit une baisse de 1,1 % .

Cette diminution ne se retrouve pas à due proportion dans les évolutions salariales. Les coûts salariaux ne baissent que de 0,7 %. Ils ont été stables pour le programme 206 qui, du fait de recrutements supplémentaires intervenus en gestion, a dépassé la limite de crédits prévue en loi de finances. Ce dépassement est resté très limité (+1,1 million d'euros), les recrutements complémentaires n'ayant été conclus qu'en fin d'année.

Les dépenses de personnel ont, en revanche, reculé de 1 % pour le programme 215, qui a sous-consommé les crédits ouverts pour 8,8 millions d'euros. Le repli des dépenses a été moins important que celui des ETPT rémunérés par le programme (- 3 %), ce qui traduit une hausse du coût unitaire de l'ETPT du programme.

Les ETPT « économisés » relèvent sur ce programme, pour leur quasi-totalité de catégories d'emplois et de statuts aux rémunérations peu élevées (- 271 ETPT de catégories B et C administratifs ou techniques pour le programme 215) tandis que la consommation d'ETPT administratifs de catégorie A a augmenté de 50 unités entre 2018 et 2019.

Ces modifications structurelles ne sont pas seules en cause dans la résistance des dépenses de personnel, que, d'ailleurs, vient modérer en affichage la réduction ponctuelle de certaines charges (celles liées au contentieux des vétérinaires sanitaires pour plus de 9 millions d'euros ou encore des retards de paiement liés à la mise en oeuvre de nouveaux systèmes de paie).

Le glissement-vieillesse-technicité demeure assez dynamique (+ 1,64 % pour le programme 206 ; + 1,53 % pour le programme 215), la restructuration des effectifs annonçant une accélération pour les années à venir. Quant aux mesures catégorielles de l'année (2,7 millions d'euros en année pleine), elles sont marquées par la reprise de l'application du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) et ajoutent leurs effets à la garantie de pouvoir d'achat (450 agents concernés sur le programme 215) et aux allocations de retour à l'emploi (3,8 millions d'euros versés à pas moins de 1 130 agents), quantum qui illustre l'ampleur du recours aux emplois précaires par le responsable du programme 215, dans le cadre de l'effort de normalisation des paiements agricoles.


* 26 La restitution des engagements dans les documents budgétaires paraît un peu existentielle puisqu'aussi bien il semble qu'elle inclut des consommations d'autorisations d'engagement... non engagées au sens de la comptabilité budgétaire.

* 27 Aux arrondis près.

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