Rapport général n° 138 (2020-2021) de MM. Vincent DELAHAYE et Rémi FÉRAUD , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 novembre 2020

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N° 138

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2020

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 1

ACTION EXTÉRIEURE DE L'ÉTAT

Rapporteurs spéciaux : MM. Vincent DELAHAYE et Rémi FÉRAUD

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean Bizet, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 3360 , 3398 , 3399 , 3400 , 3403 , 3404 , 3459 , 3465 , 3488 et T.A. 500

Sénat : 137 et 138 à 144 (2020-2021)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. En 2021, les crédits de la mission Action Extérieure de l'État augmenteraient
de + 2,31 % (66,4 millions d'euros)
en crédits de paiement pour s'établir
à 2 934,7 millions d'euros.

2. L'essentiel de cette hausse résulte de dépenses supplémentaires prévues en matière immobilière (+ 25 millions d'euros), d'informatique (+ 8 millions d'euros) et de sécurité (+ 7,4 millions d'euros) toutes retracées sur le
programme 105 - Action de la France en Europe et dans le monde .

3. Les dépenses de personnels progresseraient également en 2021 (+ 14,2 millions d'euros) sous l'effet d'un glissement vieillesse-technicité positif, d'une enveloppe de mesures catégorielles dynamique et de la reconduction d'une disposition de provision de crédits pour couvrir le risque change-prix sur la rémunération des agents à l'étranger.

4. En ce qui concerne la masse salariale, l'année 2021 se caractériserait par l'abandon de l'objectif de réduction des effectifs prévus dans le cadre d'Action  Publique 2022. Dans ces conditions, le ministère manquerait sa cible de réduction des effectifs d'au moins 50 emplois, dans l'attente des résultats d'exécution définitifs pour 2020.

5. Les crédits dédiés à la diplomatie culturelle et aux affaires consulaires retracés par les programmes 185 et 151 demeureraient globalement stables en 2021, nonobstant des évolutions notables en leur sein. Les variations les plus importantes concernent, par exemple, la réduction de 6 millions d'euros des crédits pour les bourses en faveur d'étudiants ou de chercheurs étrangers.

6. Les crédits de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger seraient augmentés de 9 millions d'euros en 2021 afin de réaliser plusieurs dépenses en matière immobilière.

Il faut rappeler que cet opérateur a bénéficié d'importantes ouvertures de crédits à l'occasion de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 (+ 100 millions d'euros le concernant) qui ont permis de financer des dispositifs d'aides et de bourses en faveur des établissements et des familles.

7. Les subventions accordées aux divers opérateurs restent stables à l'exception de celle en faveur d'Atout France qui diminue, terminant ainsi son plan d'économies de 4 milliards d'euros engagé en 2019.

PREMIÈRE PARTIE
PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES CRÉDITS ET SUIVI DES CONTRÔLES BUDGÉTAIRES

I. LES CRÉDITS DE LA MISSION PROGRESSENT DE 66,4 MILLIONS D'EUROS EN CRÉDITS DE PAIEMENT

En 2021, les crédits de la mission Action extérieure de l'État progresseraient de +2,31 % par rapport à ceux ouverts en loi de finances pour 2020.

Il convient de rappeler, toutefois, que la mission a bénéficié d'une ouverture de crédits de 150 millions d'euros à l'occasion de la troisième loi de finances rectificative (LFR3) pour 2020.

Ces crédits ont été affectés au financement :

- des aides versées au profit des français à l'étranger (programme 151) ;

- des bourses scolaires qui bénéficient aux élèves français scolarisés dans le réseau de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) ;

- d'aides complémentaires en faveur des établissements de l'AEFE et des familles étrangères qui y scolarisent un enfant.

Il peut, également, être rappelé que l'AEFE a bénéficié de l'institution d'un mécanisme d'avances remboursables à hauteur de 50 millions d'euros.

Évolution des crédits de la mission
Action extérieure de l'État

LFI pour
2020

PLF
2021

Évolution

AE

CP

AE

CP

AE

CP

(montant)

(%)

(montant)

(%)

T2

982,8 M€

982,8 M€

997,0 M€

997,0 M€

14,2 M€

+ 1,44 %

14,2 M€

+ 1,44 %

HT2

1 890,6 M€

1 885,5 M€

1 935,9 M€

1 937,7 M€

45,3 M€

+ 2,39 %

52,2 M€

+ 2,77 %

Total

2 873,5 M€

2 868,4 M€

2 932,9 M€

2 934,7 M€

59,4 M€

+ 2,07 %

66,4 M€

+ 2,31 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Le rapporteur spécial Vincent Delahaye rappelle que le ministère de l'Europe des affaires étrangères a fourni de très importants efforts de maitrise des effectifs et de ses dépenses dans les années
précédentes
. Ainsi, entre 2008 et 2018, les effectifs du ministère sont passés de 13 048 emplois équivalent temps plein à 11 827 emplois.

Dans le cadre d'Action Publique 2022, une cible réaliste et nécessaire de baisse des effectifs et de la masse salariale avait été
définie
. Or , cet engagement ne sera pas tenu , ce qui est regrettable et peu justifiable même en tenant compte de la crise sanitaire.

Par ailleurs, il relève que des incertitudes pèsent sur l'état et les réels besoins du patrimoine immobilier du ministère alors que cette année une hausse des crédits de l'ordre de 25 millions d'euros est prévue pour ce poste au profit du ministère.

Alerté sur ce point, il a demandé la transmission d'éléments au ministère mais estime que des évaluations plus approfondies devront être conduites.

Le rapporteur spécial Rémi Féraud s'étonne d'un budget finalement très stable dans un monde pourtant instable.

Les crédits progressent pour des postes qui sont certes essentiels - comme la sécurisation des emprises immobilières ou le numérique - mais il est difficile de discerner comment ce budget tire les conséquences de la crise et prépare à celle qui pourrait venir.

En tout état de cause, si une telle crise devait malheureusement survenir il semble que le Gouvernement devrait revenir devant le Parlement pour demander des ouvertures de crédits supplémentaires.

Il est sensible aux efforts consentis en 2020 par les personnels du ministère et de ses opérateurs. Il considère, également, que les aides instituées et versées aux français à l'étranger, aux établissements et aux familles ont constitué un témoignage bienvenu et nécessaire de la solidarité nationale.

II. LE SUIVI DES CONTRÔLES BUDGÉTAIRES RÉCENTS

A l'occasion de leurs travaux d'évaluation des crédits de la mission Action extérieure de l'État, les rapporteurs spéciaux ont souhaité procéder à un rapide suivi des préconisations qu'ils ont présentées lors de leurs récents contrôles budgétaires.

1. La réforme des indemnités de résidence à l'étranger

Dans leur rapport d'information de septembre 2019 portant sur la masse salariale du ministère de l'Europe et des affaires étrangères 1 ( * ) , les rapporteurs spéciaux avaient mis à jour le rôle des indemnités de résidence à l'étranger (IRE) dans la dynamique des dépenses de personnel du ministère.

En effet, celles-ci représentent en général 40 % d'une masse salariale qui, en 2018, s'élevait à 954 millions d'euros.

L'IRE leur est apparue comme un dispositif source d'inéquité entre les agents en poste en France et à l'étranger et appelant plusieurs mesures de simplification .

Les observations portées par le rapport ont donné lieu, après publication , à un échange de vues important et riche entre les rapporteurs, le ministère et les représentants des personnels.

À ce jour, le ministère s'est engagé dans une réforme partielle du dispositif notamment en :

-  procédant à un reclassement 2 ( * ) par arrêté des IRE ;

- supprimant progressivement le mécanisme dit de « sur-vocation » qui correspond à une bonification de rémunération au profit de certains agents de catégories A et B.

Cette seconde décision a permis de générer des économies de l'ordre de 670 000 euros en 2020 et, ainsi, de financer une mesure de revalorisation en faveur de certains agents de catégorie C.

Le rapporteur spécial, Vincent Delahaye, considère que ces évolutions demeurent insuffisantes . En effet, le ministère ne semble toujours pas avoir engagé des travaux permettant de régler la question du différentiel constaté entre l'IRE réelle et théorique . De plus, il estime que ces indemnités devraient, progressivement, être imposées .

2. Les ambassadeurs thématiques

A l'occasion d'un travail récent, les rapporteurs spéciaux ont cherché à mettre à jour le coût et les conditions de nomination et de suivi des ambassadeurs thématiques du ministère des affaires étrangères.

Tout en estimant que le coût pour les contribuables impliqué par le recours à de tels ambassadeurs demeurait modeste , ils ont invité le ministère à prendre par voie réglementaire des dispositions permettant :

- de consacrer juridiquement la catégorie d'ambassadeurs thématiques ;

- de préciser le périmètre et la nature des missions qu'ils peuvent exercer ;

- d'instaurer l'obligation de fournir à un ambassadeur thématique une lettre de mission ;

- qu'ils rendent compte annuellement et à l'issue de leur fonction du bilan de leurs activités.

À ce jour, aucune mesure en ce sens n'a été prise .

Afin d'appeler le ministère à présenter ses intentions, les rapporteurs spéciaux présenteront un amendement II-5 minorant les crédits de l'action Réseau diplomatique du programme Action de la France en Europe et dans le monde de 2,8 millions d'euros c'est-à-dire du coût que représentaient les ambassadeurs thématiques en 2019 - année pour laquelle des données définitives et consolidées étaient disponibles.

DEUXIÈME PARTIE
LES CRÉDITS DU PROGRAMME 105
ET LA POSITION DU RAPPORTEUR SPÉCIAL
VINCENT DELAHAYE

I. LES CRÉDITS DU PROGRAMME « ACTION DE LA FRANCE EN EUROPE ET DANS LE MONDE » AUGMENTENT DE 65 MILLIONS D'EUROS EN 2021

En 2021, les crédits du programme 105 - Action de la France en Europe et dans le monde progressent de +3,3 % en autorisations d'engagements (AE) et de + 3,6 % en crédits de paiement (CP) , ce qui représente une hausse de dépenses de l'ordre de 60 millions d'euros.

Évolution des crédits
du programme 105

LFI 2020

PLF 2021

Variation

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action européenne

57,0 M€

57,0 M€

57,0 M€

57,0 M€

- 0,1 %

- 0,1 %

Contributions internationales

669,4 M€

671,4 M€

670,9 M€

672,9 M€

+ 0,2 %

+ 0,2 %

Coopération de sécurité et de défense

103,6 M€

103,6 M€

105,4 M€

105,4 M€

+ 1,7%

+ 1,7%

Coordination de l'action diplomatique

92,1 M€

92,1 M€

93,2 M€

93,2 M€

+ 1,2%

+ 1,2%

Réseau diplomatique

635,6 M€

621,6 M€

669,7 M€

670,6 M€

+ 5,4%

+ 7,9%

Soutien

226,2 M€

233,1 M€

246,1 M€

244,7 M€

+ 8,8%

+ 5,0%

Action de la France en Europe et dans le monde

1 784,0 M€

1 778,9 M€

1 842,3 M€

1 843,8 M€

+ 3,3 %

+ 3,6%

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Cette augmentation des crédits du programme en CP s'explique, notamment, par une hausse :

- de 49 millions d'euros des dépenses en faveur du réseau diplomatique ;

- de 11,6 millions d'euros des dépenses de soutien destinées au financement de l'administration générale, à la gestion des ressources humaines et à l'informatique .

Par ailleurs, les contributions internationales de la France aux opérations de maintien de la paix (OMP) et aux organisations internationales progresseraient de 1,5 million d'euros.

A. LE RÉSEAU DIPLOMATIQUE BÉNÉFICIERA DE 49 MILLIONS D'EUROS DE CRÉDITS SUPPLÉMENTAIRES

Dotée de 670,6 millions d'euros (en CP) en 2021, l'action Réseau diplomatique constitue la seconde par ordre d'importance en termes de crédits du programme 105 et de la mission, après celle regroupant les contributions de la France aux organismes internationaux.

En 2021, les crédits de cette action augmenteraient de 34,2 millions d'euros en AE et de 49 millions d'euros en CP . Hors dépenses de personnel (416,1 millions d'euros), ces crédits connaitraient une croissance de + 16,7 % par rapport à 2020.

Hors dépenses de personnel toujours, et pour 44 %, cette action retrace les crédits dédiés au fonctionnement des ambassades. Ceux-ci évolueraient faiblement (+ 0,5 %) en 2021.

Il convient toutefois de relever que cette sous-action est marquée par une augmentation de près de 2 millions d'euros (en CP) de l'enveloppe dédiée aux voyages et missions statutaires .

Ce mouvement proviendrait, pour partie, de l'anticipation par le ministère d'une hausse des coûts du transport aérien dans le contexte de la crise sanitaire.

Pour un tiers d'entre eux, les crédits hors dépenses de personnel de l'action sont consacrés au financement des dépenses d'immobilier à l'étranger sur lesquelles les rapporteurs spéciaux apporteront des éléments d'analyse infra .

Ces dépenses augmenteraient de 25,8 millions d'euros en 2021.

Enfin, les dépenses de sécurité à l'étranger seraient également en hausse de 7,4 millions d'euros afin de renforcer les moyens en matière de gardiennage (+ 2 millions d'euros), de véhicules blindés (+ 2 millions d'euros) et de sécurité passive des postes (+ 3,4 millions).

B. LES DÉPENSES D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES AUGMENTENT

L'action Soutien du programme 105 dotée d'environ 245 millions d'euros en AE et en CP, regroupe les crédits dédiés au financement de l'administration générale, des dépenses de gestion des ressources humaines et des systèmes d'information.

En AE, les crédits augmenteraient de 8,8 % en 2021 et de + 5 % en CP, soit 11,6 millions d'euros.

Hors dépenses de personnel (125,6 millions d'euros), les crédits progresseraient de 10,7 % en CP en 2021.

L'augmentation la plus significative concerne les dépenses d'informatique (21,5 % soit + 8,7 millions d'euros) alors qu'elles représentent déjà la part principale (41,5 %) des crédits, hors dépenses de personnel.

Ce dynamisme s'expliquerait par la nécessité de moderniser les outils et les infrastructures informatiques compte tenu des besoins que la crise sanitaire - qualifiée de « stress-test » - a révélé.

Ainsi, un plan de modernisation des postes de travail d'un montant de 5,2 millions d'euros serait mis en oeuvre tandis que 2,7 millions d'euros seraient consacrés au renforcement des solutions de transport de données .

C. LES CONTRIBUTIONS INTERNATIONALES

L'action Contributions internationales regroupe les crédits d'intervention finançant les contributions en euros ou en devises de la France à plusieurs organisations internationales (56,2 % des crédits de l'action) ou opérations de maintien de la paix.

Dotée de 672,9 millions d'euros en CP, elle constitue la principale action du programme 105 et de la mission Action extérieure de l'État. En 2021, les crédits de cette action augmenteraient de 1,5 million en CP.

Au plan général, on constate que l'évolution des crédits de l'action se caractérise par la baisse des contributions aux opérations de maintien de la paix (OMP) à hauteur de - 8,6 millions d'euros plus que compensée, toutefois, par une hausse de celles en faveur des organisations internationales (+ 9,9 millions d'euros), en particulier l'ONU.

Décomposition des contributions
internationales de la France en 2021

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Pour mémoire, le montant des contributions françaises au système onusien et aux opérations de maintien de la paix est déterminé par la quote-part applicable à la France.

Pour la période 2019-2021, cette quote-part, rapportée à l'ensemble des ressources appelées, est égale à :

- 4,427 % pour la contribution aux organisations internationales relevant du système onusien ;

- 5,6124 % pour les contributions aux opérations de maintien de la paix.

Le niveau de cette quote-part devrait être révisé au 1 er janvier 2022.

Il peut être relevé que le montant en valeur des contributions françaises aux opérations de maintien de la paix, libellé en dollar, devrait augmenter à la suite de la décision de l'Assemblée générale de juillet 2020 d'accroitre le budget de ces opérations.

Toutefois, cela ne s'est pas traduit par une augmentation en euro des contributions françaises compte tenu des évolutions de taux de change défavorable au dollar en 2020.

Dans le détail, sur les 119 contributions recensées, vingt représentent à elles seules plus de 80 % du total des crédits.

Synthèse des contributions internationales
représentant 80 % des crédits totaux

Contribution

Montant prévu pour 2021

Évolution du montant prévu pour 2021 par rapport à 2020 (%)

Organisation des Nations unies - Sommet climat

107,7 M€

- 6,8 %

Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali

56,4 M€

- 1,3 %

Mission des Nations unies au Soudan du Sud

55,5 M€

- 10,5 %

Mission des Nations unies en république Démocratique du Congo

51,1 M€

0,0%

Mission Internationale de soutien à la Centre Afrique

43,1 M€

- 16,5 %

Organisation du Traité de l'Atlantique Nord

26,8 M€

+ 2,1%

Force intérimaire des Nations unies au Liban

25,5 M€

+ 2,8 %

Mission de l'Union africaine en Somalie

22,9 M€

- 22,9 %

Organisation de coopération et de développement économiques

21,4 M€

Stable

Organisation mondiale de la santé

18,7 M€

+ 1,7 %

Bureau international du travail

16,9 M€

+ 5,4 %

Agence internationale de l'énergie atomique

16,7 M€

+ 2,3 %

Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe - Budget ordinaire

14,4 M€

+ 1,2 %

Organisation des Nations unies pour l'Éducation, la science et la culture

13,1 M€

+ 1,9 %

Force intérimaire des Nations unies à Abyei

12,5 M€

- 13,4 %

Institut du monde arabe

12,4 M€

Stable

Cour Pénale Internationale

11,8 M€

- 6,3 %

Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture

10,3 M€

- 11,6 %

Mission des Nations unies au Darfour

8,9 M€

+ 32,3 %

Affaires Stratégiques et Désarmement (ONU)

8,8 M€

+775,0 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Parmi les contributions déjà financées l'année précédente, dix connaissent une hausse des crédits, entre 2020 et 2021, supérieure à 400 000 euros.

Synthèse des dix contributions internationales de la France présentant
la plus importante hausse en 2021

Contribution

Montant prévu en 2021

Évolution du montant par rapport à 2020

Affaires Stratégiques et Désarmement (ONU)

8,8 M€

+ 7,8 M€

Jeunes experts associés

7,4 M€

+ 2,4 M€

Mission des Nations unies au Darfour

8,9 M€

+ 2,2 M€

Bureau international du travail

16,9 M€

+ 0,9 M€

Mission d'administration intérimaire des NU au Kosovo

2,5 M€

+ 0,8 M€

Force des Nations unies chargée du maintien de la paix à Chypre

2,2 M€

+ 0,7 M€

Force intérimaire des Nations unies au Liban

25,5 M€

+ 0,7 M€

Organisation du Traité de l'Atlantique Nord

26,8 M€

+ 0,6 M€

Haut-Commissariat aux Réfugiés - Cour nationale du droit d'asile

1,1 M€

+ 0,5 M€

Agence internationale de l'énergie atomique

16,7 M€

+ 0,4 M€

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

A l'inverse, dix connaissent une contraction du montant des crédits alloués supérieure à 700 000 euros.

Synthèse des dix contributions internationales de la France présentant
la plus importante baisse en 2021

Contribution

Montant prévu en 2021

Évolution du montant par rapport à 2020

Mission Internationale de soutien à la Centrafrique

43,1 M€

- 8,5 M€

Organisation des Nations unies - Sommet climat

107,7 M€

- 7,9 M€

Mission de l'Union africaine en Somalie

22,9 M€

- 6,8 M€

Mission des Nations unies au Soudan du Sud

55,5 M€

- 6,5 M€

Force intérimaire des Nations unies à Abyei

12,5 M€

- 1,9 M€

Force des Nations unies chargée d'observer le dégagement (Israël/Syrie)

1,9 M€

- 1,7 M€

Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture

10,3 M€

- 1,3 M€

Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture

8,3 M€

- 0,8 M€

Cour Pénale Internationale

11,8 M€

- 0,8 M€

Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali

56,4 M€

- 0,7 M€

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Enfin, cinq nouvelles contributions sont ouvertes en 2021 pour un montant de crédit total égal à 17,5 millions d'euros.

Synthèse des dix nouvelles contributions
internationales de la France en 2021

Contributions

Montant prévu en 2021

Provision pour la Facilité européenne de paix (FEP)

8,5 M€

ONU Départements des opérations de paix

7,5 M€

Direction juridique

1,0 M€

Commission de l'Océan indien

0,5 M€

Comité de la Croix-Rouge Balkans

0,1 M€

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

II. LA POSITION DU RAPPORTEUR SPÉCIAL VINCENT DELAHAYE

A. LA MASSE SALARIALE CONTINUE DE PROGRESSER ALORS QUE LES OBJECTIFS DE MAITRISE DES EFFECTIFS SERONT ABANDONNÉS EN 2021

1. Les objectifs d'Action Publique 2022 ne seront pas atteints

Dans le cadre d'Action Publique 2022, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères s'est engagé sur une trajectoire de réduction de ses effectifs (- 416 emplois équivalent temps plein) et sur une cible d'économie en masse salariale (- 45 millions d'euros, hors opérateurs).

Cet engagement ne sera pas tenu comme l'illustre le graphique infra . En effet, si en 2018 et en 2019 les objectifs ont été respectés, voire dépassés en 2020 (- 81 ETP prévus pour - 116 réalisés) en 2021 le ministère ne réduira pas ses effectifs 3 ( * ) .

Au bilan, en 2021 l'effort de diminution des emplois du ministère devrait s'écarter de la cible de 50 ETP.

Réalisation des objectifs d'Action Publique 2022
par le ministère des affaires étrangères
depuis 2018 (en emploi temps plein)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

À noter que la contraction des effectifs aura pesé pour 31 % sur les fonctionnaires titulaires et pour 40 % sur les agents contractuels.

Répartition de l'effort de contraction
des effectifs en 2018 et 2020

Catégorie d'emploi

Évolution des effectifs (ETP) entre 2018 et 2020 hors mesures de transfert

Titulaires

- 113

Contractuels

- 149

Volontaires internationaux et contractuels recrutés sur place

+ 23

Militaires

- 6

Agents de droit local

- 121

Total

- 366

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

En conséquence de la plus faible diminution des emplois que prévu, l'objectif d'économie de masse salariale (45,1 millions d'euros) ne sera pas réalisé et le résultat des efforts consentis s'écartera de 8,7 millions d'euros par rapport à la cible.

Réalisation des objectifs d'Action Publique 2022
par le ministère des affaires étrangères
depuis 2018 (en masse salariale)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Les effectifs et les dépenses des cabinets

Sur la période 2017-2020, la dépense totale des cabinets et des actions de communication s'élevait à 19 millions d'euros par an, dont 8 millions pour les dépenses de personnel.

Les effectifs s'établissaient autour de 143 personnels dont 11 en cabinet
et 132 pour les fonctions supports (protection du ministre, assistants etc.).

Les rapporteurs spéciaux ont été informés que le nombre de conseillers ministériels et d'emplois supports avait augmenté de façon importante au cours de l'année 2020 : + 35 emplois équivalent temps plein.

Ce phénomène résulte, à la fois, d'une augmentation du plafond du nombre de membres des cabinets ministériels, de l'effet d'entrainement que génère le recrutement d'un nouveau collaborateur (mise à disposition d'assistants) et de l'augmentation du nombre de secrétaires d'État rattachés au ministre des affaires étrangères.

Les résultats sont préoccupants puisqu'ils vont contribuer à dégrader - par rapport à la prévision - l'effort de maitrise des effectifs constaté en 2020 prévu au titre d'Action Publique 2022.

Source : commission des finances du Sénat, à partir des réponses au questionnaire budgétaire

2. La masse salariale continue de progresser à champ courant

Les dépenses de personnel demeureraient dynamiques en 2021 pour s'établir à près d'un milliard d'euros. Il s'agit, ainsi, d'une augmentation de près de 43 millions d'euros (+4,5 %) par rapport 2018.

Évolution des dépenses de personnel
de la mission (y.c CAS « Pensions »)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Le rapporteur spécial observe que ces évolutions ont concerné l'ensemble du périmètre ministériel et que le principe d'une stabilisation prévue en loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 n'a été respecté.

Évolution des dépenses de personnel
du ministère (hors CAS « Pensions »)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Au titre de l'année 2021, trois facteurs contribueraient particulièrement à l'augmentation des dépenses de personnel :

- les « autres variations de dépenses de personnel » (+ 5,6 millions d'euros) qui désigne, en réalité la provision sur l'effet change-prix sur les IRE et l'effet prix sur les rémunérations des ADL ;

- les mesures catégorielles (+ 3,9 millions d'euros) ;

- le glissement vieillesse-technicité (+ 3,7 millions d'euros).

Décomposition des facteurs de croissance
de la masse salariale en 2021

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

a) L'effet change-prix

Du fait même des activités qu'il conduit et des personnels qu'il déploie ou recrute à l'étranger, le ministère est exposé aux risques de change et de prix.

Du point de vue de la masse salariale, ceux-ci pèsent à la fois sur la rémunération des personnels qui perçoivent une indemnité de résidence à l'étranger (IRE) - qui tient compte de l'évolution du taux de change et des prix - que sur celle des agents de droit locaux libellée en devise du pays concerné et actualisée à l'inflation dans certains postes diplomatiques .

Jusqu'en 2020, ces risques ne faisaient l'objet d'aucune mesure prévisionnelle ce qui conduisait à procéder à des ouvertures de crédits en fin de gestion.

S'agissant des IRE, ces ouvertures ont parfois représenté une fraction substantielle du coût budgétaire final du dispositif.

À titre d'exemple, en 2016, l'effet change-prix avait conduit à une ouverture de crédits en collectif de fin de gestion équivalente à 11 % du montant final des IRE versées au cours de cet exercice.

Part de l'effet change-prix dans le montant final des
indemnités de résidence à l'étranger

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

La loi de finances pour 2020 a introduit un mécanisme de provision pour mieux anticiper le risque d'effet prix au plan budgétaire .

Il consiste à provisionner des crédits budgétaires compte tenu des niveaux anticipés d'inflation pour l'année suivante et du coût déjà connu de l'effet change pour l'année à venir.

En 2021, cette provision devrait s'élever à 5,6 millions d'euros sur le périmètre de la mission et à 7,7 millions d'euros pour l'ensemble du ministère.

Les éléments fournis aux rapporteurs spéciaux montrent que ce dispositif fonctionne utilement. Ainsi, les besoins identifiés en cours d'année en raison de l'effet prix (10,5 millions d'euros) ont été couverts par la provision décidée en loi de finances pour 2020 (11 millions d'euros).

Par ailleurs, la lettre-plafond de la mission pour 2020 a prévu un dispositif expérimental afin de couvrir spécifiquement le risque d'effet change. Il permettait au ministère de gager d'éventuelles pertes au change par des ouvertures de crédits en collectif de fin de gestion.

Considéré comme « flou » et insusceptible d'offrir une véritable plus-value en terme de budgétisation, ce dispositif expérimental ne sera pas reconduit pour 2021.

b) L'évolution du glissement vieillesse-technicité

L'un des facteurs permettant d'expliquer l'accroissement tendanciel de la masse salariale réside dans l'augmentation continue depuis 2015 du glissement vieillesse-technicité (GVT).

Pour mémoire, le GVT se décompose en deux effets. Le premier- le GVT positif - correspond à l'augmentation de la masse salariale qui s'explique par l'avancement des agents au plan indiciaire. Le second- le GVT négatif - correspond à la réduction de la masse salariale qui s'explique par le remplacement d'agents d'indice élevé par des agents, plus jeunes, dont l'indice est moindre.

Entre 2013 et 2015, l'effet du GVT sur les dépenses de personnel de la mission s'était révélé faiblement positif. Or tel n'est plus le cas depuis 2015 comme l'indique le graphique infra .

Évolution du glissement vieillesse-technicité
de la mission Action extérieure de l'État

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

D'après les données transmises aux rapporteurs, cette évolution du GVT serait principalement liée à la situation des agents de droit local (ADL).

En effet, dans le cadre de la réforme des réseaux de l'État à l'étranger, il aurait été fait le choix de recruter des ADL présentant des niveaux de qualification de plus en plus élevés . En conséquence, le coût d'entrée d'un nouvel ADL dans les effectifs se révèle supérieur au gain généré par la sortie d'un ancien ADL.

Sur l'ensemble du périmètre ministériel - c'est-à-dire en incluant la mission « Aide publique au développement » - l'effet du GVT estimé pour 2020 en excluant les agents de droit local serait légèrement négatif (- 0,7 million d'euros).

Le ministère indique que ce phénomène de hausse du niveau de qualification des ADL serait également observé parmi les personnels militaires. L'impact sur le GVT serait, toutefois, bien plus mesuré (+ 0,5 million d'euros) compte tenu de la moindre part des effectifs qu'ils représentent.

c) Les mesures catégorielles

En 2021, le coût des mesures catégorielles s'établirait à 3,9 millions d'euros, soit 600 000 euros de moins que le montant demandé au projet de loi de finances pour 2020.

Pour les deux tiers, cette charge s'explique par la mise en oeuvre de deux dispositifs :

- la revalorisation des agents de droit local pour 1,5 million d'euros ;

- le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) qui regroupe l'essentielle des primes versées aux agents.

Décomposition des mesures catégorielles
de la mission Action extérieure de l'État en 2021

Note : le terme CIA désigne le complément indemnitaire annuel qui peut s'ajouter au RIFSEEP pour reconnaitre spécifiquement l'engagement professionnel et la manière de servir des agents.

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

3. À périmètre courant, une hausse des effectifs et des plafonds d'emploi

Si la mise en oeuvre des engagements pris dans le cadre d'Action Publique 2022 s'est traduite par la suppression de certains postes, le niveau global des effectifs et des plafonds d'emploi augmente.

En effet, dans le cadre de la réforme des réseaux de l'État à l'étranger, plusieurs emplois qui relevaient d'autres ministères ont été transférés au ministère de l'Europe et des affaires étrangères et rattachés à la mission, notamment :

- 139 emplois équivalents temps plein travaillé (ETPT) en loi de finances pour 2019 ;

- 19 ETPT en loi de finances pour 2020 ;

- 8 ETPT aux termes du présent projet de loi de finances.

Dans ce contexte, les effectifs totaux du ministère ont progressé sur la période 2018/2020 de + 1,1 % (+ 147 ETP) malgré une contraction notable du nombre d'agents contractuels (- 270 ETP).

Décomposition des effectifs du ministère

Catégorie de personnel

Emplois (ETP) en. déc. 2018

Emplois (ETP) en. déc. 2019

Emplois (ETP)
prévu en LFI pour 2020 (prévision )

Variation

(%)

(en valeur)

Fonctionnaires titulaire

et CDI en centrale

2 845

2 813

2 972

+ 4,5%

+ 127

Fonctionnaires titulaires

et CDI à l'étranger

2 752

2 743

2 718

- 1,2%

- 34

Agents contractuels à durée

déterminée (CDD)

2 478

2 479

2 208

- 10,9%

- 270

Militaires hors budget

633

639

634

+ 0,2%

+ 1

Agents de droit local à l'étranger

4 668

4 939

4 991

+ 6,9%

+ 323

TOTAL

13 376

13 612

13 523

+ 1,1%

+ 147

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Ces mesures de transferts ont également impliqué une réévaluation des plafonds d'emploi de la mission. Ainsi, après avoir tendanciellement diminué entre 2013 et 2018, le nombre des emplois consommés, autorisés ou demandés (en ETPT) au titre de la mission avait fortement augmenté en 2019. Il est, depuis, globalement stabilisé.

Évolution des plafonds d'emplois consommés
et autorisés de la mission

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

B. UNE HAUSSE DES DÉPENSES POUR LA SÉCURISATION DES EMPRISES IMMOBILIÈRES

1. L'évolution des crédits budgétaires pour l'immobilier

Le budget de l'immobilier de la mission, hors opérateur, progresserait de + 33,5 % (+ 26,9 millions d'euros) en crédits de paiement et + 18,3 % (+16 millions d'euros) en autorisations d'engagement.

Les crédits pour l'immobilier

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

La part des dépenses consacrée à l'immobilier en France augmente de + 27 % (+ 5 millions d'euros) en AE et de + 4,3 % (+ 1 million d'euros) en CP.

Au niveau des AE, l'augmentation des crédits s'explique principalement par une hausse des dépenses envisagées au titre :

- des charges d'énergie et de fluides (électricité et gaz) des locaux du ministère situés en Île-de-France (+ 3,4 millions d'euros) ;

- de l'entretien lourd (+ 1,5 million d'euros) afin de financer, notamment, des opérations sur les sites nantais du ministère.

Au niveau des CP, la hausse des crédits est portée par le coût des dépenses d'entretien lourd (+1,5 million d'euros).

Au niveau de la mission, l'essentiel des dépenses d'immobilier concerne des biens situés à l'étranger. En 2021, ces dépenses augmenteront de près de 26 millions d'euros en CP.

Cette évolution est principalement liée à la hausse des dépenses d'entretien lourd (+24,2 millions d'euros) qui permettra de financer plusieurs opérations pluriannuelles importantes telle que la rénovation des ambassades en Italie et en Grèce ou, encore, la rénovation des systèmes de climatisation de Ryad et Djeddah.

Évolution des dépenses d'immobilier

(en millions d'euros - en crédits de paiement)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Il est à noter que ces dépenses d'immobilier à l'étranger doivent être complétées d'une augmentation de 9 millions d'euros au titre du programme 185 et dédié à l'agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE).

2. Le financement du plan de sécurisation des emprises immobilières

Le ministère conduit un plan de sécurisation des emprises à l'étranger qui concerne, à la fois, les ambassades ou consulats et les établissements relevant de l'agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE).

Ce plan est financé par des crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » (CAS 723) au travers d'un système d'avances remboursables, par l'affectation de produit de cession, entre 2021 et 2027.

S'agissant des crédits mobilisés pour les emprises du ministère, 67,8 millions d'euros aurait été tirés du CAS 723 tandis que pour celles relevant de l'AEFE, les crédits engagés s'élèveraient à 3 millions d'euros.

Le recours au CAS 723 pose actuellement deux difficultés.

La première concerne le remboursement par le ministère des sommes tirées sur le CAS . En effet, les produits de cessions annuels ont tendanciellement diminué puisqu'ils sont passés de 335 millions d'euros en 2015 à 10 millions d'euros envisagés à la fin de l'année 2020.

Toutefois, le ministère demeure propriétaire d'un nombre important d'emprises à l'étranger et son potentiel de cessions demeure fort.

La seconde difficulté a trait à l'inadaptation du recours au CAS 723 pour financer le plan de sécurisation des emprises de l'AEFE.

En effet, les dispositions de l'article 47 de la loi n°2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 précisent que le recours au CAS n'est permis que pour financer des opérations sur des « biens dont l'État est propriétaire ou, lorsqu'il n'en a pas la propriété, sur des biens immobiliers figurant à l'actif de son bilan ». De même, la charte de gestion du CAS précise que les financements concernent prioritairement les « immeubles à usage de bureau et les immeubles à usage de logement ».

Compte tenu de ces différentes contraintes, les dépenses du plan de sécurisation de l'AEFE effectivement éligibles au CAS se sont révélées réduites : 8,6 millions d'euros sur 27 millions d'euros programmés.

Ces éléments ont conduit le ministère a proposé de re-budgétiser à hauteur de 9 millions d'euros les besoins du plan de sécurisation de l'AEFE.

Ces crédits, évoqués infra , figurent au programme 185 de la mission Action extérieure de l'État.

3. Les incertitudes quant à la bonne connaissance du parc immobilier et de ses besoins

Les éléments transmis au rapporteur spécial Vincent Delahaye le conduisent à s'inquiéter de la bonne connaissance du ministère du parc immobilier dont il dispose et des besoins de celui-ci.

Il apparait, par exemple, que les biens ne seraient pas tous correctement recensés ou que leur valeur n'aurait pas été actualisée depuis longtemps. Ce sujet constitue un sujet de préoccupation pour les rapporteurs spéciaux.

Il prend note, toutefois, de la désignation récente d'une personnalité experte qui aurait, selon le ministère, entamé un travail de renforcement du pilotage de la politique immobilière du ministère.

TROISIÈME PARTIE
LES CRÉDITS DES PROGRAMMES 151 ET 185
ET LA POSITION DU RAPPORTEUR SPÉCIAL
RÉMI FÉRAUD

I. DES CRÉDITS GLOBALEMENT STABLES EN 2021 PAR RAPPORT À LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2020

En 2021 , les crédits des programmes 185 - Diplomatie culturelle et d'influence et 151 - Français à l'étranger et affaires consulaires augmentent faiblement par rapport à la loi de finances initiale pour 2020.

Ainsi, les crédits du programme 185 augmenteraient de + 0,2 % soit environ deux millions d'euros.

Il convient de rappeler qu'en 2020 ce programme a connu une ouverture de crédits de 50 millions d'euros à l'occasion de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 (LFR3).

Ceux-ci ont été mis à disposition de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) afin de soutenir les établissements et d'octroyer des aides au profit des familles d'élèves étrangers.

Évolution des crédits du programme 185

LFI 2020

PLF 2021

Variation

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Agence pour l'enseignement français à l'étranger

408,6 M€

408,6 M€

417,6 M€

417,6 M€

+ 2,2 %

+ 2,2 %

Appui au réseau

38,9 M€

38,9 M€

37,7 M€

37,7 M€

- 3,1 %

- 3,1 %

Coopération culturelle et promotion du français

63,5 M€

63,5 M€

67,1 M€

67,1 M€

+ 5,7 %

+ 5,7 %

Dépenses de personnel concourant au programme "Diplomatie culturelle et d'influence"

74,9 M€

74,9 M€

73,0 M€

73,0 M€

- 2,5 %

- 2,5 %

Diplomatie économique et développement du tourisme

34,2 M€

34,2 M€

30,9 M€

30,9 M€

- 9,7 %

- 9,7 %

Enseignement supérieur et recherche

93,5 M€

93,5 M€

88,6 M€

88,6 M€

- 5,3 %

- 5,3 %

Objectifs de développement durable

3,3 M€

3,3 M€

3,2 M€

3,2 M€

- 4,2 %

- 4,2 %

Programme 185 - Diplomatie culturelle et d'influence

716,9 M€

716,9 M€

718,1 M€

718,1 M€

+ 0,2 %

+ 0,2 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Les crédits du programme 151 évoluent, également, faiblement (+ 0,1 % soit moins 500 000 euros) par rapport à la loi de finances initiale pour 2020.

Là encore, il est nécessaire de mentionner que 100 millions d'euros de crédits supplémentaires ont été ouverts à l'occasion de la LFR3 pour 2020.

Ils ont contribué à renforcer le niveau des aides octroyées aux Français résidant à l'étranger (retracées au titre de l'action Offre d'un service public de qualité aux Français à l'étranger du programme 151) et des bourses scolaires attribuées aux élèves français étudiants dans un établissement relevant de l'AEFE.

Évolution des crédits du programme 151

LFI 2020

PLF 2021

Variation

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Accès des élèves français au réseau AEFE

105,3 M€

105,3 M€

105,3 M€

105,3 M€

Stable

Stable

Instruction des demandes de visa

55,0 M€

55,0 M€

55,5 M€

55,5 M€

+ 1,0 %

+ 1,0 %

Offre d'un service public de qualité aux Français à l'étranger

212,2 M€

212,2 M€

211,7 M€

212,0 M€

- 0,2 %

- 0,1 %

Programme 151- Français à l'étranger et affaires consulaires

372,5 M€

372,5 M€

372,6 M€

372,9 M€

+ 0,0 %

+ 0,1 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

II. UN RÉSEAU CONSULAIRE RÉACTIF ET AU SERVICE DES FRANÇAIS « DE » ET  « À » L'ÉTRANGER

A. UN RÉSEAU QUI A CONNU DES TRANSFORMATIONS ET A ÉTÉ MOBILISÉ DANS LA CRISE

Depuis 2010, le réseau de représentation à l'étranger connait des évolutions qui demeurent finalement circonscrites.

Souhaitant préserver son universalité, le ministère n'a pas réduit le nombre d'ambassades (123) ou de représentations permanentes (16).

Les efforts - modérés - ont essentiellement portés sur les consulats dont le nombre s'est réduit de 92 en 2010 à 88 aujourd'hui.

Ce réseau constitue un atout important pour porter les intérêts de la France et pour protéger les Français à l'étranger.

À cet égard, le rapporteur spécial rappelle que le réseau consulaire a bénéficié d'une ouverture de crédits de 50 millions d'euros à l'occasion de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 afin de soutenir nos compatriotes en difficulté.

En outre, le rapporteur spécial salue les efforts entrepris par le réseau afin d'assurer le rapatriement de 370 000 français qui étaient en voyage à l'étranger dans le contexte de la crise sanitaire.

B. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS DÉDIÉS AUX AFFAIRES CONSULAIRES EN 2021

1. Une légère diminution des crédits consulaires en 2021 mais une augmentation des aides sociales

En 2021, le montant des crédits de Offre d'un service public de qualité aux Français à l'étranger du programme 151 diminuerait d'environ 200 000 euros par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2020, ce qui est faible au regard des crédits totaux (212 millions d'euros).

Bien sûr, une telle comparaison doit tenir compte de l'ouverture de crédits de 50 millions d'euros à l'occasion de la LFR3 pour 2020 et destinée au financement des aides sociales.

Les montants effectivement consommés sont plutôt limités (5 millions d'euros ) mais ces crédits devraient faire l'objet d'une mesure de report en 2021.

Cette relative stabilité du montant des crédits entre la loi de finances initiale pour 2020 et le présent projet de loi de finances masque des évolutions différenciées entre les dépenses de fonctionnement et d'intervention.

En effet, et d'une part, les dépenses de fonctionnement des services consulaires diminueraient de 2,6 millions d'euros notamment en raison de la baisse de 2 millions d'euros des crédits dédiés aux élections.

Pour mémoire, ce montant devait permettre d'assumer les charges résultant de l'organisation des élections consulaires en 2020. Ces dernières, tout comme ces crédits, ont fait l'objet d'un report en 2021.

Les dépenses de fonctionnement diminuent, également, d'une contraction des crédits dédiés au service central d'état-civil dans le contexte de l'avancement du projet de dématérialisation des actes (- 520 000 euros) et à la direction des affaires consulaires (-272 000 euros).

D'autre part, les dépenses d'intervention- qui sont constituées pour 80 % des aides sociales en faveur des Français à l'étranger - augmenteraient de 2,2 millions d'euros justement sous l'effet d'une hausse de la dotation en faveur des aides sociales.

Le rapporteur spécial observe, toutefois, une baisse de 455 000 euros des aides en faveur de l'adoption internationale. Cette situation pourrait s'expliquer par l'anticipation d'un moindre nombre d'adoption internationale dans un contexte de restriction des déplacements.

2. Les perspectives de transformation du réseau

Le réseau devrait continuer sa réorganisation en 2021 . Ainsi, plusieurs mouvements sont prévus tel que :

- la réouverture de la section consulaire d'Andorre ;

- la transformation de plusieurs consulats en consulats généraux (Haïfa, Ouagadougou) ou en consulat d'influence (Boston).

Enfin, dans le cadre d'Action Publique 2022, le ministère restait jusqu'à cette année engagé dans un plan d'évolution de ses effectifs à l'étranger devant satisfaire le double objectif de maîtriser l'évolution de sa masse salariale et d'adapter son réseau aux objectifs de politique étrangère.

Ainsi, le rapporteur spécial rappelle que sur la période 2018-2022, les évolutions programmées d'effectifs tendent à privilégier la présence française en Asie et dans l'Océan Indien.

Cette progression est conforme aux orientations formulées par le Président de la République en août 2019 lorsqu'il indiquait que « notre rôle de puissance d'équilibre doit s'exercer en Asie [...] la France est une puissance indopacifique » .

Projection d'évolution des effectifs à
l'étranger entre 2018 et 2022

Zone géographique

Variation prévue

en ETP

Amériques

-7,15%

ANMO

-4,09%

Asie et Océanie

1,70%

Afrique et Océan Indien

-4,30%

Union européenne

-7,30%

Europe continentale

-6,10%

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

III. L'ENSEIGNEMENT FRANÇAIS À L'ÉTRANGER BÉNÉFICIE D'UNE LEGÈRE AUGMENTATION DE CRÉDITS

A. L'AGENCE POUR L'ENSEIGNEMENT FRANÇAIS À L'ÉTRANGER VOIT SA SUBVENTION AUGMENTER DANS UN CONTEXTE PARTICULIER

1. La subvention de l'AEFE progresse de 9 millions d'euros

L'agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) est un établissement public national administratif créé en 1990 chargé, notamment, d'assurer la mission du service public de l'éducation à destination des enfants français à l'étranger.

Les moyens dédiés à l'AEFE sont portés par le programme 185 - Diplomatie culturelle et d'influence tandis que certaines dépenses d'intervention en faveur des familles le sont au titre du programme 151 - Français à l'étranger et affaires consulaires .

Le réseau de l'AEFE est constitué de 523 établissements parmi lesquels :

- 71 sont en gestion directe ;

- 157 sont conventionnés ;

- 295 constituent des établissements partenaires.

En tenant compte des nouveaux effectifs d'élèves apportés par les établissements homologués cette année, l'AEFE assurera, en 2021, la scolarisation de 366 000 élèves, soit 2 600 de moins que l'année passée.

En effet, la crise sanitaire a conduit plusieurs familles expatriées à revenir en France tandis que d'autres qui devaient s'installer à l'étranger en 2020 y ont renoncé.

Dans ce contexte, le ministère estime pourtant que l'objectif présenté par le Président de la République en mars 2018 de doubler d'ici 2030 le nombre d'élèves scolarisés au sein du réseau demeure atteignable.

En 2021, l'opérateur devrait bénéficier, comme en 2020, d'un budget d'environ un milliard d'euros sur lesquels 417,1 millions d'euros proviendront de la subvention pour charges de service public portée par le programme 185.

La subvention augmente, ainsi, de 9 millions d'euros en 2021 afin - comme cela a été évoqué supra - de financer le plan de sécurisation des emprises immobilières de l'opérateur.

Il peut être rappelé qu'à l'occasion de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 ont été adoptés des dispositifs de soutien à l'AEFE et des familles à l'étranger , en particulier :

- une aide de 50 millions d'euros sous forme de crédits budgétaires pour les bourses scolaires rattachées au programme 151 ;

- une aide au réseau de l'AEFE de 50 millions d'euros sous forme de crédits budgétaires rattachés au programme 185 ;

- un mécanisme d'avances remboursables à hauteur de 50 millions d'euros au profit de l'AEFE.

Ces crédits - notamment ceux prévus pour les bourses et le soutien aux établissements - font l'objet d'une analyse spécifique infra ..

2. Un retour utile au niveau de subvention de 2017 mais des incertitudes

Pour mémoire , la loi de finances initiale pour 2020 avait déjà décidé d'une augmentation de la subvention versée à l'opérateur de 24,6 millions d'euros par rapport à 2019. Toutefois, cette dernière intervenait après une contraction de la subvention de 33 millions d'euros en 2017.

Dans ces conditions, le niveau des crédits demandés pour 2021 constitue plutôt un retour souhaitable à la situation antérieure.

En effet, comme le rapporteur spécial l'avait mentionné lors de l'examen des crédits pour 2020, cette contraction avait demandé d'importants efforts à la communauté scolaire.

Dans un contexte marqué par les fortes ambitions exprimées par le Président de la République en mars 2018 rappelées supra , la première étape du rétablissement de la subvention devait permettre, notamment :

- d'accroitre l'investissement effectué par les établissements ;

- d'envisager des diminutions de frais de scolarité ;

- de lancer un plan de formation des enseignants de 5 millions d'euros ;

- de renforcer les outils numériques par une dépense de 2,5 millions d'euros ;

- de renforcer les outils de pilotage du réseau et, en particulier, les moyens d'homologation des établissements.

3. Une masse salariale qui augmente sans ressources en face

Depuis 2017, l'AEFE poursuit un schéma d'emploi de - 512 emplois équivalent temps plein (ETPT) à horizon 2021 . D'après les prévisions de budget pour 2020, cet objectif a été partiellement atteint puisque le nombre des ETPT sous plafond a diminué de 431 emplois entre 2017 et 2020.

Toutefois, sur la même période le nombre des ETPT hors plafonds a augmenté de + 546 emplois dans le contexte d'un recours accru aux agents de droit local.

Il en découle que loin d'avoir diminué, la masse salariale a progressé de 7 millions d'euros essentiellement entre 2019 et 2020.

Évolution des emplois de l'AEFE (en ETPT)

Exécution

2016

Exécution

2017

Exécution

2018

Exécution

2019

Budget initial

2020

Budget rectificatif initial

2020

Emplois sous plafond

6 083

5 991

5 898

5 708

5 583

5 560

Emplois hors plafond

4 582

4 597

4 650

4 732

4 953

4 951

Total

10 625

10 588

10 548

10 440

10 537

10 511

Masse salariale

761 M€

776 M€

775 M€

774 M€

784 M€

783 M€

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Si cette augmentation demeure modérée , la situation parait devoir alerter tant l'opérateur que sa tutelle sur la nécessité d'ajuster à terme l'évolution des dépenses et des ressources disponibles.

B. LES AIDES ET LES BOURSES EN FAVEUR DES FAMILLES ET DES ÉTABLISSEMENTS RESTENT À LEUR NIVEAU D'AVANT CRISE

Pour 2021, le programme 151 retrace les crédits dédiés au soutien financier en faveur des familles d'élèves scolarisés à l'étranger , notamment :

- 105 millions d'euros de bourses scolaires ;

- 310 000 euros d'aide à la scolarisation des élèves en situation de handicap à propos de laquelle votre rapporteur regrette qu'elle ne concerne que les seuls élèves boursiers.

D'après les éléments fournis au rapporteur spécial, plus de la moitié des élèves scolarisés au sein du réseau de l'AEFE bénéficierait d'une bourse.

Si le montant de ces aides reste stable par rapport à la loi de finances pour 2020, il convient de rappeler que la LFR3 pour 2020 a ouvert 100 millions d'euros de crédits supplémentaire pour accompagner les familles et les établissements.

S'agissant des bourses scolaires, 10 millions d'euros supplémentaires ont été mis à disposition en 2020 au titre des recours gracieux à l'encontre des décisions défavorables d'octroi au troisième trimestre . Les 40 millions d'euros restant devraient être engagés au cours de l'année 2021.

Les critères d'octroi des bourses ont été assouplis de sorte à tenir compte de la dégradation des revenus qu'ont pu subir les familles en raison de la crise sanitaire.

Le rapporteur s'étonne toutefois que sur les 10 millions d'euros mis à disposition, seuls 5 millions d'euros aient été effectivement engagés . Les échanges avec les représentants d'élèves conduisent à penser que, quoique simplifiées, les conditions d'octroi se seraient révélées encore trop restrictives.

Par exemple, il aurait été nécessaire de fournir des attestations de perte de revenus, ce qui -tout en paraissant légitime à première vue - a pu conduire les personnes qui ne pouvaient pas produire de tels documents à ne pas pouvoir bénéficier d'une aide pourtant nécessaire.

La seconde ouverture de crédits - équivalente à 50 millions d'euros - a permis aux établissements d'accorder directement un soutien financier aux familles étrangères dont les enfants sont scolarisés dans le réseau de l'AEFE. D'après les données transmises, 6,4 millions d'euros d'aides auraient été accordés.

Les crédits ont, par ailleurs, permis de soutenir les établissements scolaires eux-mêmes à hauteur de 25 millions d'euros.

Enfin, le rapporteur spécial constate que sur ces 25 millions
d'euros, 17 ont été consacrés à des établissements situés au Liban
à la suite de l'explosion meurtrière de Beyrouth.

Ainsi, l'essentiel de ce levier budgétaire a, en réalité participé au soutien apporté par la France au Liban en 2020.

IV. UN PROGRAMME QUI PORTE PLUSIEURS POLITIQUES D'ATTRACTIVITÉ DE LA FRANCE ET DE PROMOTION DE LA CULTURE

A. UNE BAISSE DES CRÉDITS D'ATOUT FRANCE

1. Un opérateur qui a respecté son objectif d'économie de 4 millions d'euros

Créé par la loi n°2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, Atout France est l'opérateur national pour le développement du tourisme en France.

Doté d'un budget de 70,3 millions d'euros en 2020, l'opérateur bénéficiait d'une subvention pour charges de service public (SCSP) de 30,9 millions d'euros sur lesquels une réserve de précaution de 2,6 millions d'euros avait été appliquée.

L'opérateur est engagé depuis 2019 dans un plan d'économies de 4 milliards d'euros étalé sur deux ans. Ainsi après une contraction de 1,8 million d'euros de sa SCSP, cette dernière diminuerait à nouveau de 2,2 millions d'euros pour atteindre 28,7 millions d'euros en 2021.

Atout France estime qu'il aura réalisé 4,5 millions d'euros d'économies d'ici à la fin de l'année 2020 , notamment :

- 0,2 million d'euros en dépenses de fonctionnement ;

- 1,9 million d'euros de dépenses d'immobilier ;

- 2,4 millions d'euros de dépenses de personnel.

2. Un opérateur aux perspectives de recettes et aux missions incertaines dans le contexte de la crise

Au surplus de la SCSP qu'il perçoit, Atout France bénéficie du reversement de 2,25 % du montant des droits de visa de l'année précédente .

Alors que cette recette s'élevait à 5,7 millions d'euros en 2020, elle pourrait se réduire fortement en 2021 puisque sur la seule période courant de janvier à mars, le nombre de visas octroyés a chuté de 27 %.

Par ailleurs, l'opérateur a cherché à accroitre ces dernières années le montant de ses recettes partenariales . Ainsi, de 34,6 millions d'euros en 2017, elles s'étaient élevées à 39,7 millions d'euros en 2019.

Là-encore, la crise sanitaire a contribué à une contraction importante de cette ressource puisque le montant des recettes de partenariats pourrait être de 22,2 millions d'euros en 2020 soit une chute de 44 %.

De manière générale, la crise sanitaire et économique qui se traduit par une baisse a priori durable du nombre de touristes venant en France interroge sur les perspectives de l'opérateur .

En 2020, il avait renouvelé ses missions en promouvant la France auprès du public domestique en animant, par exemple, la campagne « cet été, je visite la France ».

Enfin, et au-delà des conséquences à tirer de la crise sanitaire et économique, il convient de rappeler qu'une réflexion avait déjà été ouverte sur l'opportunité d'un rapprochement entre Business France et Atout France.

En effet, les missions, les besoins et les réseaux de ces deux opérateurs présentent une certaine proximité laissant penser que des synergies pourraient être recherchées.

B. UNE CONTRACTION DES CRÉDITS POUR L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR MALGRÉ UNE STABILITÉ DE LA SUBVENTION AU PROFIT DE CAMPUS FRANCE

L'action Enseignement supérieur et recherche (ESR) du programme 185 retrace les dépenses de la mission consacrées au soutien à l'attractivité et au rayonnement de l'enseignement supérieur et de la recherche français vis-à-vis du reste du monde .

En pratique, l'action regroupe principalement les crédits dédiés à l'opérateur Campus France (3,8 millions d'euros en 2021), aux instituts français de recherche à l'étranger (10,1 millions d'euros) et au financement des bourses en faveur d'étudiants étrangers (52,6 millions d'euros en 2021).

Les crédits demandés pour 2021 sont marqués par une contraction de 5 millions d'euros (- 5,3 %) par rapport à 2020.

Cette baisse concerne essentiellement le financement des bourses (- 5,9 millions d'euros en 2021 par rapport à 2020), tandis que les crédits en faveur des instituts français de recherche à l'étranger et à Campus France augmenteraient d'environ 0,5 million d'euros.

La diminution du montant des bourses s'expliquerait par le décalage d'un an de nombreux projets de mobilité qui auraient dû commencer en 2020 et se prolonger en 2021 et qui, pour certains, ont été annulés.

En outre, elle résulterait d'un effort de sincérisation puisque les crédits destinés au financement des bourses auraient régulièrement été sous-exécutés.

De fait, sur 64 millions d'euros de crédits ouverts en loi de finances initiales pour 2019 au titre des bourses, seuls 54,3 millions d'euros avaient été exécutés.

C. L'INSTITUT FRANÇAIS VOIT SA SUBVENTION STABILISÉE ALORS QUE SON ACTIVITÉ DEVRA S'ADAPTER AU CONTEXTE DE LA CRISE SANITAIRE

L'Institut français est un établissement public industriel et commercial (EPIC) contribuant à l'action culturelle extérieure de la France créé en 2010. Il s'appuie, pour l'exercice de ses missions, sur un réseau d'antennes à l'étranger.

En mars 2018, le Président de la République a indiqué son souhait d'un rapprochement entre l'Institut et la Fondation Alliance française afin de favoriser les synergies et les mutualisations, en particulier au sein des réseaux internationaux.

Cette dernière a été mise en oeuvre nonobstant 4 ( * ) le fait que, pour le moment, la réunion des deux organismes au sein d'un même site n'a pas été réalisée. L'installation de l'Institut dans les locaux historiques de l'Alliance situés boulevard Raspail semble difficile à envisager pour des questions de superficie.

Ce blocage engendre une incertitude au plan budgétaire car le changement de localisation de l'Institut devrait permettre de générer des économies.

En effet, selon les recommandations de la direction de l'immobilier de l'État, le loyer acquitté par l'Institut ne devrait pas excéder 400 euros par mètre carré or l'actuel s'élève à 611,5 euros par mètre carré.

Au plan des ressources, la subvention pour charges de service public constitue une part importante des moyens financiers de l'Institut français .

En 2020, elle s'élevait à 28 millions d'euros pour un budget initial de 42,4 millions d'euros. En 2021, le montant de la SCSP resterait stable .

Dans la période récente, l'opérateur a cherché à diversifier ses ressources en privilégiant deux axes :

- le développement du mécénat ;

- la recherche de financement auprès d'organisations comme la commission européenne, l'Agence française de développement ou, encore, certaines collectivités locales.

Cette stratégie a plutôt fonctionné puisqu'en 2020, ces ressources devaient s'élever à 14,4 millions d'euros et qu'il était attendu qu'elles progressent.

La crise sanitaire remet en cause cette perspective alors que, par ailleurs, les activités de l'opérateur sont fortement bousculées par le contexte sanitaire.

Ainsi, les saisons culturelles prévues (Africa 2020, France-Japon, France-Portugal) ont été décalées en 2020 tandis que des incertitudes demeurent sur les modalités de mises en oeuvre des opérations prévues en 2021.

S'agissant des établissements à l'étranger relevant de l'Institut français, le rapporteur spécial salue la grande réactivité dont ils ont fait preuve en adaptant leur offre.

Il alerte, toutefois, sur le fait que pour traverser cette période particulière, les Instituts français à l'étranger ont dû faire appel aux réserves dont ils disposaient.

En cas de crise nouvelle, il n'est pas certain que ces dernières suffiront ce qui appellera de la part des postes à l'étranger et du ministère la nécessité d'organiser un soutien en leur faveur.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À noter que par un amendement déposé par notre collègue député Frédéric Petit en sa qualité de rapporteur pour avis des crédits de la
mission Action extérieure de l'État au nom de la commission des affaires étrangères, l'Assemblée nationale a adopté un amendement majorant
de 30 000 euros les crédits du programme 185.

Gagé sur une diminution des crédits du programme 105, cet amendement entend permettre à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) de financer la mise en place d'un système de contrôle qualité au sein de son réseau.

La commission des finances et le gouvernement se sont chacun rangés à la sagesse de l'Assemblée nationale tout en soulignant l'intérêt pour l'AEFE de mettre en place un tel contrôle.

S'il estime que les besoins de l'AEFE pour opérer ce contrôle qualité devraient sans doute être évalués préalablement, le rapporteur spécial, Rémi Féraud considère que cet amendement va dans le bon sens

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

Article 53 A (nouveau)

Demande de remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement

Commentaire : le présent article prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur les financements accordés par la France au Comité international de la Croix-Rouge.

I. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À l'initiative de notre collègue député Vincent Ledoux, rapporteur spécial des crédits de la mission Action extérieure de l'État, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture l'article 53 A avec un avis favorable du Gouvernement.

Cet article prévoit que le Gouvernement remette un rapport sur les financements accordés par la France au Comité international de la Croix-Rouge permettant d'apprécier leur adéquation aux besoins croissants de l'aide humanitaire dans les zones de conflit.

Il devra distinguer les contributions affectées et non affectées à des projets déterminés et présenter la stratégie mise en oeuvre pour améliorer la visibilité pluriannuelle et la flexibilité d'emploi de ces contributions.

II. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES

Les rapporteurs spéciaux estiment que les informations demandées peuvent être utiles au débat et permettront d'apprécier le niveau des contributions de la France au Comité international de la Croix-Rouge.

Décision de la commission : la commission des finances vous propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 10 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a examiné le rapport de MM. Vincent Delahaye et Rémi Féraud, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Action extérieure de l'État » (et article 53 A).

M. Vincent Delahaye , rapporteur spécial . - Les crédits de la mission « Action extérieure de l'État » s'élèveront à 2,9 milliards d'euros en 2021, soit une hausse de 66,4 millions d'euros, de l'ordre de 2,31 %, par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale (LFI) pour 2020. Cette augmentation s'explique par les importantes ouvertures de crédits survenues en loi de finances rectificative (LFR), avec 150 millions d'euros d'aides en faveur des Français de l'étranger, des établissements scolaires et des familles d'élèves scolarisés à l'étranger ; Rémi Féraud y reviendra un peu plus tard.

Les principaux motifs d'augmentation concernent les dépenses en immobilier, en sécurité matérielle et moyens informatiques, et en personnel. Dans le détail, les crédits immobiliers augmentent de 27 millions d'euros, dont 26 millions consacrés aux biens à l'étranger. Il s'agira principalement d'opérations lourdes, comme la rénovation des systèmes de climatisation à Ryad ou Djeddah et la sécurisation de nos emprises. J'ai, par ailleurs, été alerté sur le fait que le ministère connaîtrait mal son parc immobilier et que la valeur de certains biens n'aurait pas été actualisée depuis l'entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). J'ai demandé et obtenu des éléments exhaustifs de la part du ministère, mais le sujet mérite une investigation plus approfondie et pourrait faire l'objet d'un contrôle.

Les dépenses en moyens informatiques augmentent de 8,7 millions d'euros, soit une hausse de 21,5 %. La crise sanitaire et le confinement ont révélé des besoins importants en matière de postes informatiques et de transmission sécurisée des données. Les dépenses en sécurité augmentent, quant à elles, de 7,4 millions d'euros, afin, par exemple, de renforcer le nombre de véhicules blindés ou la sécurité passive des postes.

Concernant enfin les dépenses en personnel, en dépit des efforts réalisés les années précédentes, le ministère ne respectera pas ses engagements en matière de réduction de la masse salariale et des effectifs. J'estime que l'abandon de ces objectifs n'est pas justifiable. Le ministère évoque « une prise de conscience » lors de la crise sanitaire, avec le besoin de maintenir des postes. Je constate pourtant que l'un des principaux motifs de non-réalisation de l'objectif cette année est l'augmentation du nombre de conseillers et de personnels supports en cabinet : nous sommes passés de 23 à 42 postes ouverts.

Au-delà de cet aspect, la masse salariale de la mission progresse de 15 millions d'euros sous trois effets principalement : l'impact du glissement vieillesse-technicité (GVT), notamment en raison du recrutement d'agents de droit local plus expérimentés et donc plus chers ; une provision visant à couvrir le risque de change sur les rémunérations à l'étranger ; et enfin, une enveloppe de mesures portée par la revalorisation des agents de droit local.

Les crédits de la mission progressent plus vite que l'inflation. À mon sens, des efforts de cet ordre devraient être réservés à des actions prioritaires. Par ailleurs, j'insiste sur le fait que l'abandon des objectifs de baisse de la masse salariale et des effectifs ne me semble pas justifié, même au regard de la crise sanitaire. Les besoins en immobiliers sont également particulièrement mal identifiés. On nous dit que le ministère a besoin de 25 millions d'euros ; sans justification de ce montant, comment s'assurer que cela soit suffisant ou nécessaire ? Dans ce contexte, à titre personnel, je m'abstiendrai sur le vote des crédits.

Avec Rémi Féraud, nous avons souhaité présenter un suivi de l'application des préconisations formulées à l'occasion de nos missions de contrôle. De mon côté, je souhaite revenir sur les indemnités de résidence à l'étranger (IRE), qui représentent 42 % des rémunérations du personnel. Je constate que le Gouvernement a donné suite à deux de nos observations : le reclassement des IRE en tenant compte de paramètres plus objectifs quant à la dangerosité des pays et au coût de la vie ; et la fin progressive du mécanisme de « sur-vocation », qui conduisait à surclasser certains agents de catégorie B et A.

À l'inverse, certains sujets n'avancent pas. J'en citerai deux : la différence de 25 % entre l'IRE théorique et réelle, en faveur de cette dernière, pour laquelle nous n'avons toujours pas reçu d'explication ; et le fait qu'il ne soit toujours pas envisagé d'imposer les IRE, alors que tous les revenus devraient être imposables.

M. Rémi Féraud , rapporteur spécial . - Les crédits présentés par Vincent Delahaye représentent à peu près les deux tiers du budget de la mission ; les deux programmes concernant les affaires consulaires et la diplomatie culturelle et d'influence représentent le dernier tiers, c'est-à-dire environ 1,1 milliard d'euros. Des crédits très importants ouverts en LFR ne sont pas reconduits en 2021 mais une partie devrait faire l'objet de mesures de report. Pour rappel, ces ouvertures s'élevaient à 150 millions d'euros : 50 millions pour les aides sociales aux Français de l'étranger ; 50 millions pour les aides aux établissements scolaires à l'étranger ; et enfin, 50 millions pour les bourses des élèves français à l'étranger. À cela s'ajoutent les 50 millions d'euros non portés par la présente mission, qui constituent des avances remboursables aux établissements de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE).

Dans ce projet de loi de finances (PLF) 2021, nous observons une évolution à la hausse des moyens du réseau consulaire, notamment ceux qui sont consacrés à l'aide sociale pour les Français à l'étranger qui se retrouvent en difficulté. Nous constatons également un renforcement des moyens de l'AEFE et, plus généralement, des incertitudes très fortes sur certaines politiques publiques ; je pense à des opérateurs dans le domaine de la diplomatie culturelle ou de l'enseignement, et encore plus au développement du tourisme, sur lequel je reviendrai.

Le réseau consulaire évolue peu, avec un recentrage léger sur la zone indopacifique, comme s'y était engagé le Président de la République. Et nous observons un abandon des objectifs du programme « Action publique 2022 », qui devait initialement permettre au ministère de réduire les effectifs de manière notable. Il est vrai que cette année - et cela risque de se poursuivre en 2021 -, les réseaux consulaires ont été mis fortement à contribution pour aider les Français à l'étranger.

En 2021, les crédits, s'ils apparaissent stables, témoignent en réalité de certaines évolutions, avec notamment une baisse de 2 millions des crédits prévus l'année dernière pour les élections consulaires, finalement reportées en 2021, et une augmentation équivalente pour les aides sociales des Français de l'étranger. S'agissant de ces crédits en faveur de l'aide sociale, ouverts en LFR3, seuls 5 millions sur les 50 millions d'euros ont été consommés. Cette consommation très faible laisse à penser que la difficulté se situe moins dans les inscriptions budgétaires que dans les critères utilisés ensuite pour mettre en oeuvre les crédits.

Pour ce qui concerne les moyens consacrés à l'enseignement français à l'étranger, le Gouvernement ne renonce pas à son objectif de doublement du nombre d'élèves à l'horizon de 2030. Naturellement, cet objectif ne pourra pas être tenu si la crise sanitaire se prolongeait trop longtemps. Nous constatons une légère baisse du nombre d'élèves en 2020 ; nous verrons si elle sera compensée en 2021.

Le budget de l'AEFE s'élève à 1 milliard d'euros, dont 417 millions d'euros de subventions inscrites dans la mission. Le montant des subventions augmente de 9 millions d'euros, afin notamment de sécuriser les emprises immobilières ; au vu de l'intensité de la menace terroriste, cela se comprend. Cette augmentation montre également que, pour beaucoup d'établissements dont les bâtiments eux-mêmes ne sont pas la propriété de l'État, le recours au compte d'affectation spéciale « Gestion immobilière de l'État » n'est pas adapté.

En ce qui concerne les bourses, sur les 50 millions d'euros de crédits ouverts en LFR3, 10 millions ont été dépensés et 40 millions pourraient faire l'objet d'un report, ce qui laisse des marges de manoeuvre pour répondre aux besoins. Par ailleurs, les critères d'octroi des bourses ont été assouplis dans leurs modalités d'attribution. Sur les 50 millions d'euros de crédits ouverts en faveur des établissements, la moitié environ a été consommée, l'essentiel étant mobilisé pour les établissements au Liban à la suite de l'explosion de Beyrouth. D'autres crédits ont également été dégagés pour aider les familles étrangères en difficultés sociales à payer leurs frais de scolarité.

S'agissant de l'enseignement supérieur français, si les crédits accordés à l'opérateur lui-même, Campus France, restent stables, le montant des bourses offertes à des étudiants et des chercheurs étrangers diminue de 6 millions d'euros, sous l'effet des restrictions de déplacements internationaux. Nous verrons, dans les budgets suivants, si cette orientation est conjoncturelle ou si elle marque une baisse d'ambition.

Dans un contexte évidemment très particulier, l'opérateur dédié au tourisme, Atout France, a soutenu une campagne - « Cet été, je visite la France » - destinée à promouvoir le tourisme domestique. Dans le cadre d'un plan d'économies initié en 2019, sa dotation diminue de 2,8 millions d'euros, après que l'opérateur a lui-même réalisé 4,5 millions d'euros d'économies. Par ailleurs, comme il est en grande partie financé par les droits de visa de l'année précédente, et que ce nombre de visas octroyés a chuté de 27 % dans les premiers mois de l'année 2020, ses crédits pourraient baisser d'autant pour l'année 2021.

Enfin, l'Institut français, opérateur de notre politique culturelle, voit sa dotation stabilisée, mais reste confronté à des défis importants, avec le report de plusieurs grandes campagnes qui n'ont pas pu se tenir en 2020. Il devrait voir ses recettes partenariales diminuer en 2021. En outre, le réseau des instituts à l'étranger a beaucoup consommé ses réserves financières pour traverser la crise ; il s'agit là, à mon avis, du point le plus faible du budget proposé.

Nous pouvons remarquer que ce budget, dans un contexte international extrêmement instable, est lui-même très stable. Cela dit, il bénéficie de reports de crédits inscrits dans la LFR pour 2020. Nous pouvons estimer que le Gouvernement saura mettre en oeuvre des mesures exceptionnelles si elles s'avéraient nécessaires. Je préconise donc un avis favorable aux crédits inscrits dans le budget.

Pour conclure, je vous propose un amendement d'appel concernant les ambassadeurs thématiques. Au début de l'année, nous avons présenté un rapport de contrôle budgétaire démontrant qu'il n'y avait pas de graves dérives dans la conception de ces missions d'ambassadeurs thématiques, mais que le cadre juridique se révélait très insuffisant. Pour inciter le Gouvernement à mettre en oeuvre les recommandations préconisées dans notre rapport, nous proposons un amendement d'appel qui vise à diminuer de 2,8 millions d'euros les crédits de la mission.

M. Claude Kern , rapporteur pour avis de la commission de la culture . - Je suis présent aujourd'hui en tant qu'observateur. Notre commission n'a pas encore eu l'occasion de procéder aux auditions ; elles sont programmées la semaine prochaine. Personnellement, je partage assez l'avis émis par Rémi Féraud concernant la partie concernant notre commission.

M. Éric Bocquet . - Une question de pure forme, mais qui m'interpelle. Dans les principales observations des rapporteurs spéciaux, le conditionnel est employé à plusieurs reprises, alors que nous sommes censés nous prononcer sur des chiffres établis. Qu'est-ce qui justifie l'emploi de ce conditionnel ? Le mode de la supposition ? De l'irréel ? De l'imaginaire ? Je suis un peu surpris...

Mme Christine Lavarde . - Les rapporteurs ne seront pas étonnés que je les interroge sur le sujet des aides versées aux écoles au Proche-Orient. J'ai bien entendu que la moitié de l'enveloppe avait été consommée et qu'une partie des fonds avait été fléchée en direction des écoles situées au Liban. Ce que vous ne dites pas, c'est qu'une partie seulement des écoles ont été aidées, à savoir les écoles sous l'égide de l'AEFE ou de la mission laïque française. Les rapporteurs ont-ils des informations sur la mise en oeuvre d'une préconisation d'un rapport remis en octobre 2018 par Charles Personnaz au Président de la République ? Le rapport disait ceci : « Constituer un fonds pour la formation, l'environnement francophone et la convivialité en faveur des écoles chrétiennes du Moyen-Orient. » Ce fonds, qui aurait dû être abondé par l'État et d'autres partenaires pouvant être des mécènes, des collectivités ou autres, est-il ouvert ? Va-t-on trouver des moyens pour venir en aide à ces écoles - au Liban, mais aussi en Égypte, en Jordanie, dans toute cette zone où la présence francophone est importante pour la stabilité géopolitique - qui n'appartiennent pas au réseau de l'AEFE ?

M. Arnaud Bazin . - J'étais surpris d'entendre que, sur les trois lignes de 50 millions d'euros, engagées sans doute au vu du contexte sanitaire et des difficultés que rencontrent nos compatriotes et les établissements d'enseignement à l'étranger, il y avait une sous-consommation assez forte pour des mesures dont la vocation est précisément de répondre à l'urgence ; je souhaiterais entendre Rémi Féraud sur les causes de cette sous-consommation. Avait-on surestimé les besoins ? Avait-on établi des critères qui rendaient difficile l'accès à ces aides, dans ce qui relèverait alors davantage d'un effet de communication que d'un réel soutien à nos compatriotes ? Ou bien y a-t-il d'autres raisons encore, même si j'ai bien noté que ces crédits étaient reportés sur l'année prochaine.

M. Michel Canevet . - Je remercie les rapporteurs spéciaux d'avoir mis l'accent sur la question des ambassadeurs thématiques, sachant que des errements furent médiatisés à un moment. Heureusement, vous formulez des propositions afin que ces ambassadeurs puissent travailler de la manière la plus sérieuse.

Par ailleurs, je poserai deux questions. La première concerne le réseau de nos ambassades. J'ai noté des réductions de postes, le plus souvent remplacés par des agents de droit local. La diminution des moyens en personnel nous permet-elle de maintenir un tissu suffisamment important et une bonne représentation de notre pays à l'extérieur ? Les crédits dédiés à l'immobilier en particulier permettent-ils d'assurer cette bonne représentation ?

J'ai noté également que les crédits destinés à l'opérateur Atout France allaient diminuer. Le contexte actuel de l'économie touristique internationale n'est pas favorable, plus particulièrement encore pour Paris et la France. Un effort de promotion de la France dans le monde est-il prévu pour que les touristes reviennent chez nous ?

Mme Sylvie Vermeillet . - Vincent Delahaye a évoqué les IRE et le poids qu'elles représentent. Vous avez parlé d'une attribution assez opaque de ces indemnités. J'ai lu que l'on comptait plus de 240 grilles d'attribution, ce qui paraît en effet assez peu lisible. Avez-vous des propositions à nous faire dans le sens d'une attribution plus claire et sans doute plus juste ?

M. Albéric de Montgolfier . - Dans le rapport, il est fait état d'un rapprochement entre l'Alliance française et l'Institut français. Est-ce une fusion ? Une mutualisation des moyens immobiliers ? Par ailleurs, on a beaucoup parlé de la situation des établissements français à l'étranger ; malgré les dispositifs d'aides, en reste-t-il en grande difficulté ?

M. Vincent Delahaye , rapporteur spécial . - Concernant le réseau d'ambassades, pour répondre à Michel Canevet, la France a le souhait et l'ambition de maintenir un réseau universel. Peut-être, ici ou là, un effort de rationalisation est-il envisageable. Les réductions de postes ne sont pas excessives ; cette année, je le redis, l'effort de réduction a été plutôt abandonné.

Pour répondre ensuite à Sylvie Vermeillet, les IRE, c'est vrai, concernent une grosse partie des rémunérations : 240 grilles, c'est très complexe, et il y a une différence d'appréciation avec le ministère. En fin d'année dernière, à la suite de nos travaux, des corrections ont été apportées. Nous devons encore travailler sur le sujet pour affiner nos propositions. C'est vrai pour cette mission comme pour d'autres : nous avons tout intérêt à effectuer un suivi de nos travaux de contrôle pour gagner en efficacité.

M. Rémi Féraud , rapporteur spécial . - Sur la mise en oeuvre qui pourrait apparaître comme déficiente des bourses et des aides sociales, j'ai eu le même étonnement. Je n'ai pas eu beaucoup de retours de nos collègues représentant les Français de l'étranger pour m'informer de graves problèmes. Cela est dû, je pense, aux effets de la crise sanitaire qui induisent des retards dans l'appréciation de la situation sociale, ou peut-être aux modalités de prises en compte des baisses de revenus. Au cours de l'année 2021, il faudra vérifier que ces crédits sont bien utilisés pour faire face à des situations sociales dégradées.

Vous nous interrogez sur la mise en oeuvre du rapport Personnaz. À ma connaissance, le fonds a été créé, mais il ne relève pas de la mission « Action extérieure de l'État ». Le soutien apporté à l'enseignement français au Liban est extérieur au rapport Personnaz, même si celui-ci a permis d'éviter que le système d'enseignement français au Liban ne s'effondre et, aussi, d'apporter un soutien à la société libanaise sans passer par les autorités gouvernementales.

Pour répondre à Albéric de Montgolfier, le rapprochement de l'Alliance française et de l'Institut français se poursuit, afin que les deux organismes ne se retrouvent pas sur des missions redondantes. Le rapprochement immobilier, qui devait se faire dans les prochains mois, est, quant à lui, remis en cause ; c'est un enjeu budgétaire pour l'avenir, l'Institut français devant trouver des locaux moins onéreux que son siège actuel à Paris.

S'agissant des crédits destinés à Atout France, ils doivent permettre à l'opérateur de survivre tout en réduisant les frais en termes de campagne de promotion du tourisme dans notre pays. Cette décision correspond à une logique, au vu de la situation sanitaire et des difficultés à voyager. Par ailleurs, un processus de rapprochement avec Business France est également en cours. Cette année, nous sommes un peu en attente, il y a trop d'incertitudes pour lancer de grandes campagnes. Le projet de loi de finances pour 2022 sera déterminant pour fixer une nouvelle politique de l'attractivité touristique de la France.

Enfin, sur l'utilisation du conditionnel, il s'agit d'une simple figure de style, puisque le budget n'a pas encore été adopté par le Parlement.

Article 33

M. Claude Raynal , président . - Nous allons d'abord procéder au vote de l'amendement II-5 déposé sur l'article 33, dans lequel vous vous attaquez au financement des ambassadeurs thématiques ! On a compris qu'il s'agissait d'un amendement d'appel, cela les rassurera...

L'amendement II-5 est adopté.

M. Claude Raynal , président . - Pouvez-vous nous rappeler votre proposition quant au vote des crédits de la mission ?

M. Vincent Delahaye , rapporteur spécial. - Pour ma part, je souhaite m'abstenir. J'aurais eu envie de voter contre, mais je m'abstiens au vu des efforts consentis par le ministère ces dernières années. Toutefois, j'observe cette année un relâchement qui n'est pas justifié par la crise sanitaire.

M. Rémi Féraud , rapporteur spécial . - Je n'ai pas le même prisme que Vincent Delahaye. On trouve, à la fois dans le PLFR et le PLF 2021, les moyens d'éviter toute cessation de paiement des établissements français à l'étranger, et cela mérite d'être salué. Donc, pour ma part, avis favorable sur les crédits de la mission.

La commission décide de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission «Action extérieure de l'État », sous réserve de l'adoption de son amendement.

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

Article 53 A

M. Claude Raynal , président . - Nous passons maintenant à l'examen de l'article 53 A demandant un rapport sur les contributions de la France au Comité international de la Croix-Rouge.

M. Rémi Féraud , rapporteur spécial . - Ce rapport a été demandé à la suite d'une discussion à l'Assemblée nationale.

M. Albéric de Montgolfier . - Je suis assez réticent concernant les rapports ; d'abord, parce que nous ne les avons pas ; et ensuite, parce qu'ils sont parfois indigents.

M. Claude Raynal , président . - Cette fois, c'est l'Assemblée nationale qui l'a demandé...

La commission décide de proposer au Sénat d'adopter l'article 53 A sans modification.

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Action extérieure de l'État » tels que modifiés par son amendement. Elle a proposé l'adoption, sans modification, de l'article 53 A.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères

Cabinet du ministre

- M. Emmanuel PUISAIS-JAUVIN, directeur général adjoint de cabinet ;

- M. Baptiste PRUDHOMME, conseiller politique et parlementaire ;

- M. Joachim BOKOBZA, conseiller politique commerciale - commerce extérieur - tourisme - Français de l'étranger.

Direction générale de la mondialisation, de la culture, de l'enseignement et du développement international

- M. Matthieu PEYRAUD, directeur de la culture, de l'enseignement, de la recherche et du réseau ;

- M. Bertrand POUS, délégué programmes et opérateurs.

Direction des Français à l'étranger et de l'administration consulaire

- M. Sylvain RIQUIER, adjoint de la directrice.

Ministère des Comptes publics

Direction du Budget

- M. Morgan LARHANT, sous-directeur en charge des affaires étrangères (7e sous-direction).

Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE)

- M. Olivier BROCHET, directeur ;

- M. Tristan CAZES, directeur des affaires financières et du contrôle de gestion ;

- Mme Raphaëlle DUTERTRE, responsable des relations avec les élus.

Fédération des associations de parents d'élèves des établissements d'enseignement français à l'étranger (FAPEE)

- M. François NORMANT, président ;

- Mme Catherine TERRAZ, secrétaire générale.


* 1 Rapport d'information de MM. Vincent DELAHAYE et Rémi FÉRAUD, fait au nom de la commission des finances sur la masse salariale du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, 18 septembre 2019

* 2 Le reclassement consiste à modifier les montants de l'IRE en fonction des conditions de vie, du coût de la vie et du coût du logement dans chaque pays.

* 3 Dans les réponses fournies aux rapporteurs spéciaux, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères observe qu'après « plus de dix années de réduction constante de ses moyens [il n'est plus] en mesure de réaliser de nouvelles coupes dans ses effectifs » .

* 4 En particulier, une convention tripartite a été signée entre l'Institut Français, la Fondation Alliance française et le ministère des affaires étrangères en 2019.

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