Rapport général n° 138 (2020-2021) de MM. Hervé MAUREY et Stéphane SAUTAREL , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 novembre 2020

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N° 138

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2020

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 11b

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

(Programmes 203 « Infrastructures et services de transports », 205 « Affaires maritimes » et 355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État »)

Rapporteurs spéciaux : MM. Hervé MAUREY et Stéphane SAUTAREL

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean Bizet, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 3360 , 3398 , 3399 , 3400 , 3403 , 3404 , 3459 , 3465 , 3488 et T.A. 500

Sénat : 137 et 138 à 144 (2020-2021)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Sur le programme 203 « Infrastructures et services de transport »

1) La crise sanitaire provoquée par la pandémie de Covid-19 a des effets économiques très sévères sur le secteur des transports, avec par exemple 4,9 milliards d'euros de pertes de chiffre d'affaires à la fin de l'été 2020 pour le groupe SNCF, 2 milliards d'euros de pertes pour les sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA) ou bien encore 2,6 milliards d'euros de moindres recettes pour Île-de-France Mobilités (IDFM) à l'issue du premier confinement.

2) Ce contexte exceptionnel ne doit nullement remettre en cause , bien au contraire, la programmation financière fixée par la loi d'orientation des mobilités (LOM) , laquelle prévoit que l'Agence de financement des infrastructures des transports de France (AFITF) est dotée de 13,4 milliards d'euros sur la période 2018-2022 pour investir dans les infrastructures de transport.

3) Les recettes de l'AFITF ont été très sévèrement touchées par les effets de la crise sanitaire, avec en particulier des recettes d' « écocontribution » du transport aérien réduites à néant , mais le montant de ses dépenses devrait atteindre malgré tout 2,9 milliards d'euros grâce à une subvention de 250 millions d'euros et une plus grande mobilisation du produit des amendes radar décidées à l'occasion des collectifs budgétaires pour 2020.

4) Le peu d'éléments transmis à ce stade aux rapporteurs spéciaux, malgré leurs demandes répétées, au sujet du budget de l'AFITF pour 2021 laissent à penser que le Gouvernement a bien l'intention de respecter la trajectoire fixée par la LOM avec 2 782 millions d'euros de dépenses .

5) Toutefois, il paraît déjà clair que les recettes prévues pour les financer , lesquelles prévoient par exemple toujours 230 millions d'euros d'« écocontribution » du transport aérien , ne sont pas crédibles compte tenu de la poursuite de la crise sanitaire.

6) C'est pourquoi vos rapporteurs spéciaux proposeront au Sénat d'adopter un amendement à l'article 24 du projet de loi de finances visant à relever de 1 285 millions d'euros à 1 685 millions d'euros , soit 400 millions d'euros supplémentaires , le plafond de TICPE affecté à l'AFITF en 2021.

7) À périmètre constant, les crédits du programme 203 augmenteront fortement en 2021 de 18,8 % en autorisations d'engagement (AE) et de 7,9 % en crédits de paiement (CP) à 3 722,8 millions d'euros . La subvention à SNCF Réseau augmentera de 80 millions d'euros et 170 millions d'euros pérennes sont prévus pour relancer durablement le fret ferroviaire .

8) Les crédits de l'ancien compte d'affectation spéciale (CAS) « Services nationaux de transports conventionnés de voyageurs » destiné au financement des lignes ferroviaires d'aménagement du territoire (TET) sont rebudgétisés au sein du programme 203 à compter du présent projet de loi de finances pour 2021. Leur montant diminue de - 6,3 % à 293 millions d'euros .

9) Le plan de relance prévoit une mobilisation financière sans précédent en faveur des infrastructures et mobilités vertes , avec notamment, sur la période 2021-2022, 650 millions d'euros pour le ferroviaire (petites lignes, train de nuit, infrastructures multimodales de fret), 900 millions d'euros pour les mobilités alternatives à la voiture (vélo, transports en commun), 550 millions d'euros pour compléter les crédits de l'AFITF en faveur des infrastructures, 250 millions d'euros pour la modernisation du réseau routier national, 100 millions d'euros pour les ponts ou bien encore 175 millions d'euros pour le verdissement des ports.

10) Le groupe SNCF, considérablement fragilisé par la crise sanitaire provoquée par la Covid-19, va bénéficier d'une recapitalisation de 4,05 milliards d'euros d'ici la fin de l'année 2020, dont le montant sera immédiatement transféré à SNCF Réseau . Sur cette somme, 2,3 milliards d'euros devraient être directement dévolus au rétablissement de l'investissement annuel de régénération des voies et 1,5 milliard d'euro s correspondent aux investissements relatifs à la fin de l'utilisation du glyphosate sur les voies , la sécurisation des ponts et les investissements de sécurité nécessaires .

11) Les rapporteurs spéciaux seront très attentifs à ce que SNCF Réseau reçoive bien tous les financements dont l'entreprise a besoin pour poursuivre la modernisation du réseau structurant . Il s'agit là en effet d'une des principales priorités décidées par le Parlement dans le cadre de la LOM.

12) La Société du Grand Paris , chargée de construire pour 35,6 milliards d'euros le Grand Paris Express, a vu ses chantiers ralentis par la crise sanitaire , si bien que compte tenu des retards préexistants , il paraît désormais impossible de mettre en service le système complet composé des tronçons des deux lignes 16 et 17 pour les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2024 , contrairement à l'objectif qui lui avait été fixé par le Premier ministre le 22 février 2018.

13) Ainsi que l'ont récemment monté nos collègues membres du groupe de travail de la commission des finances sur les coûts et le financement du Grand Paris Express , les entreprises franciliennes , elles aussi durement touchées par la crise économique, expriment aujourd'hui un véritable « ras-le-bol fiscal » , à la suite des diverses hausses de taxes affectées à la SGP en 2019 et en 2020. Dans ce contexte, l'objectif prioritaire de l'opérateur doit être de sécuriser ses financements de long terme en souscrivant des Green bonds sur les marchés pour bénéficier des taux exceptionnellement bas .

14) Par ailleurs, la poursuite de la hausse des effectifs de la SGP , qui passeront de 585 ETPT en 2020 à 875 ETPT en 2021, va incontestablement dans le bon sens, compte tenu de l'ampleur des enjeux techniques et financiers à maîtriser .

15) Voies navigables de France continue à consentir d'importants efforts de réduction de ses personnels , avec 99 ETPT en moins en 2021, ce qui suscite des inquiétudes. Grâce aux crédits du plan de relance et de l'AFITF, VNF va pouvoir investir massivement pour remettre à niveau le réseau dont il a la charge et qui en a grand besoin .

Sur le programme 355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État »

1) L'État a repris en 2020 25 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau afin d'améliorer la situation financière de l'entreprise. 1,7 milliard d'euros de principal devrait avoir été amorti d'ici la fin de l'année 2020.

2) En 2021, l'État devrait amortir 1,3 milliard d'euros de principal et s'acquitter de 692 millions d'euros de charge d'intérêt , cette dernière somme étant retracée par le programme 355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État ». 10 milliards d'euros de dette supplémentaire de SNCF Réseau seront transférés à l'État en 2022.

Sur le programme 205 « Affaires maritimes »

1) Le programme 205 « Affaires maritimes » joue un rôle économique et social important et porte des fonctions régaliennes essentielles , la France disposant du deuxième domaine maritime le plus vaste du monde , avec plus de 5 000 kilomètres de côtes et 10 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive (ZEE) , dont 97 % outre-mer . La création d'un ministère spécifiquement chargé de la mer tend à montrer que l'État entend consacrer davantage d'attention à ce domaine stratégique pour l'avenir de notre pays.

2) La dotation du programme en 2021 s'établit à 155,2 millions d'euros en AE et 159,4 millions d'euros en CP, en baisse de - 2,9 % en AE et de - 1,0 % en CP .

3) Toutefois, la sécurité et la sûreté maritimes bénéficieront de crédits importants dans le plan de relance puisque 25 millions d'euros sur deux ans sont prévus pour renouveler la flotte de baliseurs ainsi que 25 millions d'euros pour moderniser les infrastructures des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) .

Au 10 octobre 2020, date limite fixée par la LOLF, 85 % des réponses au questionnaire budgétaire étaient parvenues aux rapporteurs spéciaux .

PROGRAMME 203
« INFRASTRUCTURES ET SERVICES DE TRANSPORTS »

Le budget que consacrera l'État en 2021 aux transports terrestres , fluviaux et maritimes est exceptionnel à bien des égards.

Ce secteur est en effet l'un de ceux qui a été le plus sévèrement affecté par la crise sanitaire et économique provoquée par la pandémie de Covid-19 , en particulier lors du confinement du printemps 2020 qui a entraîné une chute jamais vue des déplacements sur le territoire .

L'impact financier sur les opérateurs de transport a été particulièrement brutal et nécessite une intervention massive de l'État , qui a débuté dans le cadre des projets de loi de finances rectificatives pour 2020 et se poursuit dans le présent projet de loi de finances pour 2021.

Cette crise sans précédent est intervenue quelque mois à peine après la promulgation de la loi d'orientation des mobilités (LOM) , laquelle prévoyait pour la première fois une programmation financière pluriannuelle des infrastructures de transports portant sur la période 2018-2027 .

Cette programmation permettait à notre pays de disposer enfin d'une feuille de route validée par le Parlement dans un domaine stratégique pour notre avenir .

Au coeur de celle-ci figurait la nécessité absolue de régénérer et de moderniser nos grands réseaux structurants (routier, ferré, fluvial), indispensables aux transports du quotidien et depuis trop longtemps victimes d'un sous-investissement chronique .

Les rapporteurs spéciaux ont la conviction que la crise sanitaire et économique actuelle ne doit surtout pas conduire à renoncer à cette feuille de route mais au contraire à la renforcer et à l'accélérer .

Si le plan de relance prévoit des crédits très significatifs en faveur des infrastructures et mobilités vertes , le Parlement devra donc veiller à ce que ces derniers viennent bien s'ajouter et non pas se substituer aux montants déjà prévus par la LOM .

I. MAINTENIR LES MONTANTS PRÉVUS PAR LOI D'ORIENTATION DES MOBILITÉS (LOM) EN FAVEUR DES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT MALGRÉ LA CRISE SANITAIRE : UNE NÉCESSITÉ

A. UN SECTEUR DES TRANSPORTS TERRESTRES BOULEVERSÉ PAR LA CRISE ÉCONOMIQUE ET SANITAIRE PROVOQUÉE PAR LA COVID-19

Si la crise sanitaire provoquée par la pandémie de Covid-19 a eu des effets économiques très sévères sur de nombreux secteurs de l'économie, elle a particulièrement affecté le secteur des transports terrestres , en raison des restrictions de circulation imposées pour lutter contre la propagation du virus .

À la fin août 2020, le groupe SNCF , déjà fragilisé par les grèves contre la réforme des retraites et qui avait été contraint pendant la période du premier confinement de drastiquement réduire la circulation des trains sur ses lignes , enregistrait ainsi des pertes de chiffre d'affaires abyssales de 4,9 milliards d'euros et des pertes de 4,0 milliards d'euros en termes de marges opérationnelles . Alors que seuls 30 % des TGV sont aujourd'hui en circulation pendant la période du deuxième confinement, nul doute que ces pertes vont encore s'aggraver .

Toujours au printemps 2020, le trafic autoroutier a brutalement chuté de - 80 % , un chiffre jamais observé , qui devrait entraîner une baisse de 2 milliards d'euros du chiffre d'affaires des sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA), soit 20 % du chiffre d'affaires de 2019.

Pour les transports en commun d'Île-de-France , les pertes d'exploitation s'élevaient à 2 ,6 milliards d'euros à l'issue du premier confinement.

Ces quelques exemples particulièrement emblématiques permettent d'illustrer l'ampleur de la catastrophe économique et financière qui s'est abattue sur les différents modes de transports terrestres et les opérateurs chargés de les construire comme de les exploiter en 2020.

Cette situation a naturellement des répercussions massives sur le budget de l'État , dans la mesure où un certain nombre de taxes assises sur les services de transport ont vu leur rendement s'effondrer (en particulier l'« éconcontribution » du transport aérien et la taxe d'aménagement du territoire-TAT ).

Surtout, l'État doit mettre en place des plans de soutien pour éponger les pertes des différents acteurs et investir à moyen et long terme s, via l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) et le plan de relance , pour maintenir les projets qui avaient été identifiés lors de l'examen de la loi d'orientation des mobilités (LOM) et pour développer des mobilités plus respectueuses de l'environnement .

B. LA CRISE ACTUELLE NE DOIT NULLEMENT REMETTRE EN CAUSE LES 13,4 MILLIARDS D'EUROS PRÉVUS PAR LA LOM POUR LES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT SUR LA PÉRIODE 2018-2022

La programmation financière pluriannuelle annexée au projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) a fixé pour la première fois la trajectoire des investissements en matière d'infrastructures de transport pour les 10 ans à venir .

Cette programmation prévoit que l'AFITF doit être dotée de 13,4 milliards d'euros sur la période 2018-2022 pour investir dans les infrastructures de transport, soit un peu moins de 2,7 milliards d'euros par an , puis de 14,3 milliards d'euros sur la période 2023-2027, soit un peu moins de 2,9 milliards d'euros par an .

Les montants prévus par la LOM sont nettement supérieurs à ceux dont avait effectivement bénéficié l'AFITF sur la période 2013-2017, à savoir 9,5 milliards d'euros . Pour mémoire, sur la période 2008-2012, l'AFITF avait dépensé 10,6 milliards d'euros .

Les 13,4 milliards d'euros pour la période 2018-2022 correspondent de fait à un effort financier très significatif de la part de l'État , puisqu'ils représentent une hausse de 40 % des crédits qu'il consacrera aux infrastructures de transport .

Sur cette somme, 3,4 milliards d'euros doivent venir financer de grands projets déjà engagés, voire même déjà mis en service (c'est le cas des quatre LGV mises en service en 2016 et en 2017). 3,1 milliards d'euros sont destinés à la régénération des réseaux existants , 4,0 milliards d'euros au financement des contrats de projet État-Régions (CPER) et 1,7 milliard d'euros au renouvellement du matériel roulant des trains d'équilibre du territoire (TET).

En ce qui concerne la répartition de ces crédits par modes de transport, 51 % des 13,4 milliards d'euros sont consacrés au rail , 38 % au routier , 6 % au fluvial et au portuaire et 5 % aux autres formes de mobilité .

Les cinq priorités prévues par le projet de loi d'orientation des mobilités

Le rapport annexé au projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) prévoit que les investissements portés par l'AFITF, mais également par le budget du programme 203 et par les opérateurs publics tels que Voies navigables de France (VNF) ou SNCF Réseau, se concentreront au cours des vingt années à venir sur cinq grandes priorités .

La première d'entre elles consiste à mieux entretenir et à moderniser les réseaux routiers, ferroviaires et fluviaux existants , dont l'état s'était considérablement dégradé .

Le réseau routier national non concédé devrait ainsi bénéficier de 31 % de moyens supplémentaires sur la décennie 2018-2027 par rapport à la décennie précédente. 3,6 milliards d'euros par an devraient être investis par SNCF Réseau sur le réseau ferroviaire existant au cours des dix prochaines années, ce qui représente une hausse de + 50 % par rapport à la décennie précédente . L'AFITF verserait 30 millions d'euros supplémentaires par an à Voies navigables de France (VNF) jusqu'en 2022 puis 60 millions d'euros supplémentaires par an à compter de 2023 en faveur du réseau fluvial.

La deuxième priorité consiste à désaturer les grands noeuds ferroviaire , ce qui permet à la fois d'améliorer le fonctionnement des services ferroviaires du quotidien (RER, TER) mais également de rendre plus crédible la perspective d'une réalisation de certaines grandes lignes LGV , en particulier la liaison Bordeaux-Toulouse.

Il est prévu que 2,6 milliards d'euros pourraient être consacrés à cette priorité dans les dix ans à venir par l'État, SNCF Réseau et les collectivités territoriales, la part de l'État s'élevant à 1,3 milliard d'euros via l'AFITF.

La troisième priorité est le désenclavement routier des villes moyennes et des territoires ruraux . Cette priorité se matérialiserait notamment par la réalisation d'une vingtaine d'opérations de désenclavement routier au sein des contrats de plan État-Région (CPER), pour un montant de 1 milliard d'euros sur dix ans .

Le développement des mobilités propres (transports en commun, vélo, marche à pied, etc.) constitue la quatrième priorité portée par la LOM. Il est notamment prévu de lancer plusieurs appels à projets qui pourraient représenter environ 1,2 milliard d'euros sur dix ans.

Enfin, la dernière priorité annoncée est celle du rééquilibrage du transport de marchandise de la route vers le train et le transport fluvial , qui s'accompagne nécessairement d 'un meilleur aménagement des ports et de leur hinterland . Les crédits consacrés à cette politique par l'État représenteraient 1 milliard d'euros au cours du quinquennat et 2,3 milliards d'euros sur 10 ans.

Source : commission des finances, d'après le rapport annexé au projet de loi d'orientation des mobilités (LOM)

Si la crise actuelle a un impact financier majeur sur les transports terrestres, et par voie de conséquence sur les recettes de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), elle ne doit en aucun cas remettre en cause cette trajectoire , adoptée par le Parlement quelques mois seulement avant son déclenchement, et décidée après plusieurs années d'une vaste réflexion collective démarrée à l'automne 2017 dans le cadre des Assises de la Mobilité .

C'est la raison pour laquelle les rapporteurs spéciaux se montreront très attentifs à son respect et veilleront tout particulièrement au respect du niveau des crédits prévus pour le budget de l'AFITF.

C. EN RAISON DE LA BAISSE MASSIVE DU PRODUIT DE CERTAINES DE SES TAXES AFFECTÉES, LE SOUTIEN BUDGÉTAIRE DE L'ÉTAT EST NÉCESSAIRE POUR PERMETTRE À L'AFITF DE RESPECTER LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE PRÉVUE PAR LA LOM

Le financement par l'État des infrastructures de transports repose largement sur une agence , l'AFITF , celui des services de transports étant pour sa part porté par le programme 203 « Infrastructures et services de transport » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Adopter une programmation financière pluriannuelle des infrastructures de transports crédible consiste donc avant tout à déterminer le montant du budget de l'AFITF pour les années à venir et à identifier les recettes qui lui permettront de le financer.

L'Agence de financement des infrastructures de transport de France
(AFITF)

L'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) est un établissement public administratif de l'État créé en 2004 1 ( * ) dont la tutelle est assurée par la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) .

Elle est administrée par un conseil d'administration composé de douze membres comprenant six représentants de l'État, un député, un sénateur, trois élus locaux et une personnalité qualifiée. Elle est présidée depuis avril 2018 par le maire d'Angers Christophe Béchu.

Mais elle dépend entièrement pour son fonctionnement de la DGITM . Ainsi que le reconnaît elle-même l'AFITF, elle est « un opérateur transparent » 2 ( * ) , une simple caisse de financement dont les décisions engagent directement l'État .

Comme le rappelle le projet annuel de performances pour 2019, « à partir de 2006, notamment à la suite de l'extension de son domaine d'intervention au financement des contrats de projets État-régions , l'AFITF est devenue l'acteur privilégié du financement de l'ensemble des infrastructures de transport (hors domaine aérien). Son champ d'intervention ne se limite donc pas aux grands projets d'infrastructures d'intérêt national , mais inclut les dépenses de modernisation , de gros entretien et de régénération des réseaux , et, pour les transports collectifs de personnes, les projets portés par les communautés d'agglomération ».

Pour assurer son financement, l'AFITF bénéficie de taxes qui lui sont affectées par l'État ( cf. infra ), à qui elle reverse ensuite les deux tiers de son budget sous forme de fonds de concours, en ayant préalablement « fléché » les sommes ainsi reversées vers des projets précis (routes, ferroviaires, fluvial, etc.). Elle favorise ainsi le report modal , en contribuant avant tout au financement d'infrastructures ferroviaires et fluviales grâce à des ressources provenant du secteur routier .

Source : commission des finances du Sénat

1. La crise sanitaire et économique provoquée par la Covid-19 a touché de plein fouet l'AFITF en 2020

Les recettes de l'AFITF sont constituées par différentes taxes affectées , dont plusieurs ont été très sévèrement affectées par la crise sanitaire et économique provoquée par la pandémie de Covid-19 .

C'est la raison pour laquelle le Parlement avait prévu à l'article 60 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 que « le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1 er octobre 2020, un rapport présentant l'impact prévisionnel de la crise du covid-19 et de la période de confinement sur les ressources de l'Agence de financement des infrastructures de transports de France et ses conséquences sur l'exécution de la stratégie de mise en oeuvre des orientations de la politique d'investissement de l'État en matière de transports et de mobilités définies à l'article 1 er de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités ».

L'article 60 précité précisait en outre que « ce rapport comprend des propositions visant , d'une part, à compenser ces pertes et, d'autre part, à garantir la pérennité des ressources de l'Agence de financement des infrastructures de transports de France à l'horizon de la programmation financière et opérationnelle des investissements de l'État dans les systèmes de transports pour la période 2019-2037 ».

Les rapporteurs spéciaux regrettent vivement que ce rapport n'ait toujours pas été remis au Parlement à l'heure où ils écrivent ces lignes, en dépit de multiples demandes tant auprès de l'AFITF que de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) . Ils déplorent que les décisions qui entourent l'AFITF soient prises dans l'opacité la plus totale et de manière irrespectueuse à l'égard du Parlement .

Faute de ce document, les rapporteurs spéciaux ont cherché à établir eux-mêmes la situation financière de l'Agence à partir des informations dont ils disposaient.

Comme c'est le cas depuis 2015, il était prévu en loi de finances initiale pour 2020 que le budget de l'AFITF serait avant tout financé en 2020 par le produit de la TICPE , pour un montant fixé à 1 587 millions d'euros en 2020 . Malgré la baisse du rendement de cette taxe pour le budget général de l'État, les responsables de l'agence, entendus par les rapporteurs spéciaux, ont confirmé que les montants prévus pour l'AFITF lui avaient bien été versés .

La redevance domaniale 3 ( * ) versée par les sociétés concessionnaires d'autoroutes, dont le produit était attendu à 357 millions d'euros en 2020, devrait curieusement rapporter 365 millions d'euros, soit 8 millions d'euros de plus qu'attendu.

Les autres recettes de l'AFITF, en revanche, ont connu une baisse significative , voire un véritable effondrement , qui a conduit l'État à venir en aide à l'agence dans le cadre des projets de loi de finances rectificative pour 2020.

Les recettes de la taxe d'aménagement du territoire (TAT) 4 ( * ) acquittée par les concessionnaires d'autoroute, à raison du nombre de kilomètres parcourus par les usagers, ont été sévèrement amputées lors du premier confinement du printemps. Alors que son produit affecté à l'AFITF était censé atteindre 557 millions d'euros en 2020, il devrait finalement s'élever à 467 millions d'euros environ, soit une diminution de 90 millions d'euros .

La quatrième recette majeure de l'AFITF, à savoir une partie du produit des amendes des radars automatiques du réseau routier national, a également été très sévèrement affectée par les effets du confinement du printemps.

Alors que le Gouvernement avait prévu que l'AFITF percevrait à ce titre 226 millions d'euros en 2020, la baisse des recettes collectées aurait, compte tenu du mécanisme de répartition qui fait habituellement de l'AFITF le dernier bénéficiaire du produit des amendes radar, conduit l'agence à ne bénéficier que de 26 millions d'euros, soit une perte de recettes de 200 millions d'euros .

Le Gouvernement a toutefois proposé dans le cadre du quatrième projet de loi de finances rectificative pour 2020 une évolution ponctuelle du mécanisme de répartition du produit des amendes radar qui permettra à l'AFITF de récupérer 155 millions d'euros , soit un total perçu de 181 millions d'euros au titre des amendes radar en 2020.

La dernière ressource majeure de l'AFITF est l' « écocontribution » sur le transport aérien adoptée dans le cadre de la loi de finances pour 2020. Conçue comme une majoration de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TS) , elle devait rapporter 230 millions d'euros à l'agence en 2020.

L'effondrement du trafic aérien provoqué par la pandémie de Covid-19 a totalement annihilé le rendement de cette « écocontribution » , qui ne rapportera rien à l'AFITF en 2020 .

Pour compenser cette perte de recettes, le Parlement a voté une subvention en faveur de l'AFITF d'un montant de 250 millions d'euros dans le cadre de la troisième loi de finances rectificative pour 2020.

Enfin, à la suite du protocole d'accord conclu le 9 avril 2015, l'AFITF perçoit également depuis 2015 une contribution volontaire exceptionnelle des sociétés concessionnaires d'autoroutes pour un montant total de 1,2 milliard d'euros courants sur la durée des concessions autoroutières répartis en fonction du trafic de chaque concession. Ainsi, 100 millions d'euros ont été versées chaque année à l'AFITF de 2015 à 2017. Le reliquat est désormais versé progressivement jusqu'en 2030 . La somme prévue en 2020 était de 60 millions d'euros , mais l'AFITF n'a finalement perçu que 57,5 millions d'euros .

Des recettes de l'AFITF en 2020 bouleversées par la crise

(en millions d'euros)

2016

2017

2018

2019

LFI 2020

Quatrième PLFR 2020

Variation

Taxe d'aménagement du territoire

512

516

472

523

557

467

- 90

Redevance domaniale

331

351

347

357

357

365

+ 8

Amendes radars

352

409

248

228

226

181

- 45

TICPE

763

1 124

1 028

1 206

1 587

1 587

-

Ecocontribution billets d'avion

-

-

-

-

230

-

- 230

Plan de relance autoroutier

100

0

100

60

60

57,5

- 2,5

Produits exceptionnels

-

-

35

89

-

-

-

Subvention de l'État

-

-

-

-

-

250

+ 250

Total

2 058

2 400

2 231

2 462

2 982

2 907,5

- 74,5

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Au total, le montant des recettes affectées à l'AFITF en 2020 devrait atteindre 2 907,5 millions d'euros , soit 75,5 millions d'euros de moins que ce qui était prévu en loi de finances initiale pour 2020.

Alors que le rendement spontané de ses recettes aurait conduit, sous l'effet de la crise sanitaire, à une très forte diminution de celles-ci de 514,5 millions d'euros par rapport aux prévisions, les mesures votées dans le cadre de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 puis du quatrième projet de loi de finances rectificative pour 2020 ont permis de maintenir l'agence à flot et de faire en sorte qu'elle puisse réaliser la très grande majorité de ses investissements prévus en 2020 (voir infra ).

2. Les recettes de l'AFITF pour 2021 demeurant beaucoup trop sujettes à caution, compte tenu de la poursuite de la crise sanitaire, une hausse du produit de TICPE qui lui est affecté est d'ores-et-déjà nécessaire

Les rapporteurs spéciaux n'ayant une nouvelle fois pas été en mesure de bénéficier d'informations précises sur le budget 2021 de l'AFITF (voir encadré infra ), ils n'ont pu reconstituer les recettes prévues pour l'agence l'an prochain qu'à partir de données très parcellaires présentes à l'article 24 du présent projet de loi de finances pour 2021 qui fixe le plafond des taxes affectées ou recueillies au cours de leurs auditions.

Le contrôle que le Parlement est en mesure d'effectuer sur le budget
de l'AFITF demeure toujours aussi insatisfaisant

Pour assurer son financement, l'AFITF bénéficie de taxes qui lui sont affectées par l'État, à qui elle reverse ensuite les deux tiers de son budget sous forme de fonds de concours qui viennent compléter les crédits du programme n° 203 « Infrastructures et services de transport » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Mais ces fonds de concours ne sont qu'évaluatifs, si bien que le Parlement a impérativement besoin de connaître le budget initial prévisionnel de l'AFITF au moment où il se prononce sur les crédits du programme n° 203.

En effet, sans ce document, le circuit budgétaire du financement des infrastructures et la multiplicité des organismes concernés (SNCF Réseau, Voies navigables de France, grands ports, collectivités territoriales, etc.), rendent très difficile - voire impossible - de savoir quel est le montant effectivement consacré aux infrastructures de transport en France.

Les années précédentes, Fabienne Keller puis Christine Lavarde, successivement rapporteur spécial du présent budget, avaient réclamé que le budget prévisionnel de l'AFITF soit systématiquement transmis au Parlement avant l'examen de la loi de finances, afin que députés et sénateurs puissent enfin opérer un contrôle complet des crédits destinés par l'État au financement des infrastructures de transport.

De fait, même si ledit budget n'est adopté qu'en décembre par son conseil d'administration, il est déjà largement finalisé au moment où le Parlement examine le projet de loi de finances, puisqu'il est nécessairement établi parallèlement à celui du programme 203 dont il constitue le complément.

Une fois de plus, ce budget n'a pas été transmis aux rapporteurs spéciaux et les quelques informations relatives à l'AFITF qu'ils ont obtenues l'ont été au moyen des questionnaires qu'ils ont envoyés et des auditions qu'ils ont menées.

Ils ne peuvent donc que déplorer le fait que l'utilisation des crédits de l'AFITF demeure beaucoup trop soustraite à un contrôle effectif du Parlement.

Source : commission des finances du Sénat

Il ressort de ces différentes informations que l'AFITF restera avant tout financée en 2021 par le produit de la TICPE , pour un montant fixé à 1 285 millions d'euros , soit 302 millions d'euros de moins qu'en 2020 . Pour les raisons indiquées supra , ce montant n'est pas dépendant, contrairement à plusieurs autres recettes de l'AFITF, de la bonne santé de tel ou tel secteur des transports, et ce chiffre paraît donc fiable .

Le montant prévu au titre de la redevance domaniale est évalué à 362 millions d'euros , ce qui paraît crédible compte tenu de la bonne résistance de cette ressource en 2020 malgré la crise.

Le produit de taxe d'aménagement du territoire (TAT) affecté à l'AFITF est évalué à 567 millions d'euros , soit 10 millions d'euros de plus que le montant initialement prévu pour 2020.

Si la disparition du compte d'affectation spéciale « Service conventionnés de voyageurs » qui devait percevoir 17 millions d'euros de TAT en 2020, permettra à l'AFITF de devenir l'unique affectataire de cette taxe en 2021 , le rendement attendu par le Gouvernement paraît bien ambitieux , même avec la mise en place d'un nouveau confinement dont les effets sur le trafic autoroutier sont nettement moins négatifs que ceux du confinement du printemps 2020.

Le produit des amendes radars dont pourrait bénéficier l'AFITF en 2021 est évalué par le Gouvernement à 278 millions d'euros .

Or, dans la mesure où le mécanisme prévu dans le quatrième projet de loi de finances rectificative pour 2020 est exceptionnel et a vocation à le rester, l'AFIFT redeviendra en 2021 le troisième affectataire de cette ressource , situation qui l'aurait conduit, en l'absence d'adoption de la mesure correctrice décrite supra , à ne percevoir que 26 millions d'euros en 2020 au titre des amendes radar. Cette estimation de 278 millions d'euros semble donc pour le moins utopique .

Mais la principale incertitude relative aux recettes de l'AFITF en 2021 porte sur l' « écocontribution » sur le transport aérien , compte tenu des difficultés exceptionnelles qu'affronte ce secteur, de nouveau en proie à un ralentissement très sévère en fin d'année 2020 après avoir connu une quasi-mise à l'arrêt au printemps . Or, le Gouvernement prévoit malgré tout que l'AFITF devrait percevoir 230 millions d'euros à ce titre en 2021.

Compte tenu du fait que l'AFITF est le deuxième affectataire de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TS) derrière le fonds de solidarité pour le développement (FSD, qui perçoit avant elle 210 millions d'euros au titre de cette taxe, il y a fort à parier que l'AFIFT recevra une somme bien inférieure à 230 millions d'euros en 2021, voire de nouveau une recette nulle .

Des recettes pour l'AFITF en 2021 peu vraisemblables

(en millions d'euros)

LFI 2021

LFI 2021 après amendement proposé

Taxe d'aménagement du territoire

567

567

Redevance domaniale

362

362

Amendes radars

278

108

TICPE

1 285

1 685

Écocontribution billets d'avion

230

-

Plan de relance autoroutier

60

60

Subvention de l'État

-

-

Total

2 782

2 782

Source : réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

Ce rapide état des lieux conduit les rapporteurs spéciaux à insister sur le fait que le budget de l'AFITF pour 2021, évalué par le Gouvernement à 2 782 millions d'euros , demeure pour l'heure incomplet .

C'est pourquoi vos rapporteurs spéciaux proposeront au Sénat d'adopter un amendement à l'article 24 du présent projet de loi de finances pour 2021 visant à relever de 1 285 millions d'euros à 1 685 millions d'euros , soit 400 millions d'euros supplémentaires , le plafond de TICPE affecté à l'AFITF en 2021.

La TICPE est en effet une recette fiable sur laquelle l'agence pourra compter à coup sûr .

Si la situation devait être plus favorable que ce que vos rapporteurs spéciaux craignent et que les recettes de l'AFITF qui paraissent aujourd'hui le plus sujettes à cautions devaient être perçues en tout ou partie , il sera toujours possible de réajuster à un niveau plus bas ce plafond de TICPE dans le collectif budgétaire de fin de gestion 2021.

3. Sous réserve qu'elle perçoive bien le montant des recettes prévues pour 2021, l'AFITF devrait être dotée en 2021 de près de 2,8 milliards d'euros comme prévu par la LOM

Ainsi qu'il a été rappelé supra , la programmation pluriannuelle des investissements dans les infrastructures de transport inscrite à l'article 2 de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM) prévoit 13,4 milliards d'euros de crédits de paiement pour l'AFITF pour la période 2018-2022, répartis de la façon suivante :

La trajectoire des dépenses de l'AFITF prévue
par la loi d'orientation des mobilités (LOM)

Année

2019

2020

2021

2022

Dépenses
de l'AFITF
(en millions d'euros courants)

2 683 (prévu initialement)

2 464,9 (réalisés)

2 982 (prévu initialement)

2 907,5
(montant désormais prévu)

2 687

2 580

Source : article 2 de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM)

Ainsi que l'avait souligné notre collègue Christine Lavarde dans son rapport de l'an dernier, les promesses formulées par le Gouvernement avaient été écornées en 2019, puisque le budget de l'AFIFT n'avait pas été de 2 684 millions d'euros mais de 2 464,9 millions d'euros , soit 218 millions d'euros de moins en raison de recettes des amendes radar beaucoup moins importantes que prévu.

Comme les rapporteurs spéciaux l'ont indiqué supra , le budget de l'AFITF devrait atteindre en 2020, en dépit de l'impact massif de la crise sanitaire sur ses recettes , quelque 2 907,5 millions d'euros , soit 74,5 millions d'euros de moins que ce qui était prévu en loi de finances initiale pour 2020 et par la trajectoire LOM, mais 442,6 millions d'euros de plus que le montant exécuté en 2019.

Selon les réponses au questionnaire des rapporteurs spéciaux, cette réduction limitée du budget de l'AFITF ( -74,5 millions d'euros ) par rapport à la prévision initiale correspond aux retards d'opérations dont les travaux ont été freinés par le premier confinement .

En 2021, toujours selon les réponses au questionnaire des rapporteurs spéciaux, le budget de l'AFITF est censé atteindre 2 782 millions d'euros en crédits de paiement (CP) , ce qui correspondrait aux 2 687 millions d'euros prévus par la trajectoire LOM auxquels viendraient s'ajouter 95 millions d'euros pour couvrir les besoins spécifiques du Canal Seine-Nord-Europe , hors trajectoire LOM.

Si ce chiffre bien incertain, compte tenu des risques très élevés qui pèsent sur les recettes actuellement prévues pour l'AFITF, devait se vérifier, il permettrait de confirmer la montée en puissance sans précédent du budget de l'AFITF par rapport à la période antérieure et le relatif respect de la trajectoire LOM malgré la crise.

Évolution du budget de l'AFITF entre 2016 et 2023

(en millions d'euros courants)

Source : AFITF

Il convient en outre de signaler que l'AFITF devrait jouer un rôle important pour répartir les crédits destinés aux infrastructures de transport prévus par le plan de relance et présentés plus en détail et de façon exhaustive infra .

Sont notamment prévus en 2021 :

- 173 millions d'euros en CP pour le secteur ferroviaire (régénération des petites lignes ferroviaires, trains de nuit, infrastructures multimodales de fret ferroviaire) ;

- 91 millions d'euros en CP pour les mobilités du quotidien alternatives à la voiture (vélo, transports en commun) ;

- 205 millions d'euros en CP pour divers projets d'infrastructures de transport (dont des projets de Voies navigables de France (VNF), le projet Lyon-Turin, etc.).

4. Le montant des restes à payer de l'AFITF devrait diminuer en 2020 et sa dette vis-à-vis de SNCF Réseau être définitivement soldée

Le financement des infrastructures de transport se caractérise par sa pluri-annualité . Qu'il s'agisse de l'État ou de l'AFITF, les projets engagés une année font l'objet de décaissements réguliers les années suivantes tout au long de leur réalisation.

D'après les documents transmis à aux rapporteurs spéciaux, l'AFITF devrait avoir engagé au 31 décembre 2020 45,9 milliards d'euros depuis sa création et les mandatements s'élèveraient à 33,4 milliards d'euros .

L'AFITF doit donc faire face à ses engagements passés pour des montants très substantiels .

Fin 2020, une somme d'environ 12,5 milliards d'euros restait ainsi à mandater , soit un montant légèrement inférieur à quatre exercices au regard du budget 2020 de l'AFITF. Ce montant est en baisse par rapport à la fin d'année 2019, puisque les restes à payer s'élevaient alors à 12,9 milliards d'euros .

Si l'AFITF était depuis longtemps endettée vis-à-vis de SNCF Réseau, sa dette s'était rapidement réduite pour atteindre 143 millions d'euros à la fin de l'année 2019. Cette somme, due au gestionnaire de l'infrastructure ferroviaire au titre de la ligne à grande vitesse (LGV) Sud Europe Atlantique, devrait être intégralement remboursée d'ici la fin de l'année 2020.

II. PRINCIPALEMENT DÉDIÉ AUX SERVICES DE TRANSPORT LE PROGRAMME 203 ÉVOLUE SIGNIFICATIVEMENT EN 2021

A. EN 2021, HORS MESURES DE PÉRIMÈTRE, LES CRÉDITS DU PROGRAMME 203 AUGMENTERONT FORTEMENT DE 18,8 % EN AUTORISATIONS D'ENGAGEMENT ET DE 7,9 % EN CRÉDITS DE PAIEMENT SOUS L'EFFET DE LA CRISE SANITAIRE

Le programme 203 « Infrastructures et services de transports » est doté pour 2021 de 3 944,8 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 3 722,8 millions d'euros en crédits de paiement (CP) contre 3 143,0 millions d'euros en AE et 3 167,7 millions d'euros en CP en 2020.

Il enregistre donc en 2021 une très forte hausse de 25,5 % de ses crédits en AE , avec 801,8 millions d'euros en plus, et de 17,5 % de ses crédits en CP , avec 555,1 millions d'euros supplémentaires.

Cette augmentation exceptionnelle s'explique en premier lieu par une mesure de périmètre : la budgétisation des crédits que portait le compte d'affectation spéciale (CAS) « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » , dont la suppression est proposée par l'article 29 du présent projet de loi de finances pour 2021.

Cette disparition du CAS dévolu aux trains d'équilibre du territoire (TET) se traduit par le transfert sur le programme 203 de 293 millions d'euros retracés par la sous-action 44-06 « Financement du déficit d'exploitation des trains d'équilibre du territoire » de l'action 44 « Transports collectifs ».

Autre mesure de périmètre : la budgétisation de la subvention pour charges de service public (SCSP) de l'établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF) , pour un montant de 13,2 millions d'euros . Cette SCSP était jusqu'ici financée par des taxes affectées.

En excluant ces deux mesures de périmètre , on constate que les crédits du programme 203 augmenteront malgré tout de 495,6 millions d'euros en AE ( + 15,8 % ) et de 248,9 millions d'euros en CP ( + 7,9 % ) par rapport aux montants de 2020.

En autorisations d'engagement (AE) et/ou en crédits de paiement (CP), connaîtront une hausse significative de leurs crédits :

- les concours à SNCF-Réseau pour la gestion de l'infrastructure , avec 80,9 millions d'euros en AE (+ 3,4 %) et 78,2 millions d'euros en CP (+ 3,3 %) de plus qu'en 2020 ;

- les transports collectifs , avec une hausse exceptionnelle de 199,9 millions d'euros en AE qui revient à multiplier par plus de 9 l'enveloppe de l'année précédente ;

- le transport combiné , avec une hausse de 243 millions d'euros en AE (soit une multiplication par plus de 6 des crédits de l'année précédente) et de 170 millions d'euros en CP (une multiplication par plus de 5 des crédits de l'année précédente) ;

- les lignes aériennes d'aménagement du territoire , avec 27,9 millions d'euros en AE (+ 78,6 %) et 4,5 millions d'euros en CP (+ 12,2 %) de plus qu'en 2020.

Répartition des crédits de paiement
du programme 203 en 2020 et en 2021

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après le projet annuel de performance pour 2021

Comme l'illustre le graphique ci-dessus et comme le montre le tableau ci-après, la subvention à SNCF Réseau continuera en 2021 à représenter 62,5 % des crédits du programme 203 avec 2 467,2 millions d'euros en AE et 2 466,0 millions d'euros en CP (pour plus de détails, voir l'analyse de la situation financière de SNCF Réseau infra dans la partie consacrée aux opérateurs rattachés au programme 203).

Suivent ensuite l'entretien du réseau routier , avec 297,6 millions d'euros en AE et 303,8 millions d'euros en CP, le financement du déficit d'exploitation des trains d'équilibre du territoire désormais porté par le programme 203 avec 293 millions d'euros en AE=CP et la subvention pour charges de service public de l'établissement public Voies navigables de France (VNF) avec 248,3 millions d'euros en AE=CP (pour plus de détails, voir l'analyse de la situation financière de VNF infra dans la partie consacrée aux opérateurs rattachés au programme 203).

Dans le cadre de l'élaboration du premier « budget vert » , le Gouvernement a proposé une cotation des dépenses de l'État . La majorité des dépenses du programme 203 « Infrastructures et services de transports » sont ainsi considérées comme des dépenses dites « mixtes » , c'est-à-dire présentant des effets ambivalents au regard des différents objectifs environnementaux poursuivis .

C'est par exemple le cas des dépenses en faveur de nouvelles infrastructures de transport , essentiellement ferroviaire , qui permettent de réduire à moyen terme l'impact carbone des mobilités et du transport mais dont la réalisation génère, à court terme, des déblais et un impact négatif sur la biodiversité via la consommation d'espaces naturels .

Évolution des crédits du programme 203
entre 2020 et 2021

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Programme 203

LFI 2020

PLF 2021

Écart

LFI 2020

PLF 2021

Écart

01-Routes-développement

-

-

-

-

-

-

04-Routes-entretien

286,7

297,6

+3,8 %

303,5

303,8

-

41-Ferroviaire

2 386,4

2 467,3

+3,4 %

2 387,8

2 466,0

+3,3 %

42-Voies navigables

250,5

248,3

-0,8 %

250,5

248,3

-0,8 %

43-Ports

100,1

99,9

-0,1 %

100,1

99,9

-0,1 %

44-Transports collectifs

21,7

514,6

+2271,3 %

21,6

314,6

+1356,4 %

45-Transports combinés

27,1

207,1

+664,2 %

32,1

202,1

+529,6 %

47-Fonctions support

29,4

41,1

+39,8 %

29,4

41,1

+39,8 %

50-Transport routier

5,6

5,6

-

5,6

5,6

-

51-Sécurité ferroviaire

-

-

-

-

0,2

+100 %

52-Transport aérien

35,5

63,4

+78,6 %

36,9

41,4

+12,2 %

53- Dotation exceptionnelle à l'AFITF

-

-

-

-

-

-

TOTAL

3 143,0

3 944,8

+25,5 %

3 167,7

3 722,8

+17,5 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2021

Un taux de mise en réserve de 3 % (contre 4 % en 2020) pour les crédits hors dépenses de personnel (titre 2) arrêté par le Gouvernement pour le projet de loi de finances 2021 s'appliquera aux crédits du programme 203 .

Une modulation de la mise en réserve étant toutefois autorisée pour les subventions pour charges de service public, celle de VNF pourra être concernée, tout comme celles de l'Autorité de régulation des transports (ART) et de l'établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF) .

Au total, la mise en réserve du programme 203 est estimée par la DGITM à 100 millions d'euros en AE et en CP, contre 97,2 millions d'euros en AE et 92,0 millions d'euros en CP estimés dans la loi de finances initiale pour 2020.

Comme évoqué supra , l'une des principales caractéristiques du programme 203 réside dans le poids des fonds de concours , principalement en provenance de l'AFITF , mais également des collectivités territoriales , qui viennent abonder ses crédits, ainsi que le montre le tableau ci-après.

Évaluation des fonds de concours du programme 203 pour 2021

(en millions d'euros)

Programme 203

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

01- Routes - développement

708,2

721,3

04- Routes - entretien

558,1

573,1

41- Ferroviaire

436,7

449,0

42- Voies navigables

2,8

2,8

43- Ports

43,7

42,8

44- Transports collectifs

309,8

314,0

45- Transports combinés

-

-

47- Fonctions support

1,9

1,9

50- Transport routier

0,6

0,9

51- Sécurité ferroviaire

45,0

45,0

52- Transport aérien

-

-

53- Dotation exceptionnelle à l'AFITF

TOTAL

2 106,8

2 150,7

Source : projet annuel de performances pour 2021

Le montant des fonds de concours prévus pour 2021 s'élève à 2 106,8 millions d'euros en AE et 2 150,7 millions d'euros en CP, alors qu'ils représentaient respectivement 2 338,0 millions d'euros en AE et 2 548,7 millions d'euros en CP en 2020. La diminution attendue de ces crédits entre 2020 et 2021 est donc de 231,2 millions d'euros en AE, soit une nette diminution de -11,0 % et de 398,0 millions d'euros en CP, soit une forte baisse de -15,6 % .

Au total, pour 2021, le montant complet des AE inscrites sur le programme 203 s'élèvera donc à 6 051,6 millions d'euros , contre 5 481,0 millions d'euros en 2020, soit une hausse de 633,6 millions d'euros , qui peut être ramenée à 327,4 millions d'euros ( + 6,0 % ) après retraitement des mesures de périmètre.

Celui des CP atteindra pour sa part la somme de 5 873,5 millions d'euros , contre 5 716,4 millions d'euros en 2020, soit une hausse de 157,1 millions d'euros qui dissimule une baisse de 149,1 millions d'euros ( - 2,6 % ) après retraitement des mesures de périmètre.

Les fonds de concours représentent 34,8 % des AE et 36,6 % des CP du programme 203 en 2021, alors que cette proportion était de 42,5 % en AE et de 44,5 % en CP en 2020.

Cette évolution traduit à la fois les changements de maquette budgétaire au profit du programme 203 mais également la nette hausse de certaines lignes de crédits , en particulier celles consacrées aux transports collectifs et au transport combiné .

B. LES PRINCIPAUX FAITS SAILLANTS DU PROGRAMME 203, HORS SUBVENTIONS À SNCF RÉSEAU ET À VOIES NAVIGABLES DE FRANCE

Il est procédé à l'analyse des crédits des actions 41 « Ferroviaire » et 42 « Voies navigables » , lesquelles rassemblent à elles seules 68,8 % des crédits du programme 203 , dans la partie consacrée aux opérateurs rattachés au programme 203.

Les autres actions du programme 203 concernent principalement les routes (développement mais surtout entretien et modernisation), le ferroviaire (subventions aux trains d'aménagement du territoire, soutien au fret ferroviaire), les ports et le soutien à certaines lignes aériennes (en particulier les lignes d'aménagement du territoire-LAT).

1. La modernisation et le développement des infrastructures routières resteront exclusivement financés par des fonds de concours en 2021

L'action 01 « Routes-développement » a pour objet la modernisation et le développement du réseau routier national , concédé comme non concédé, afin de le rendre plus sûr, de réduire les points de congestion chronique, d'améliorer l'accessibilité des territoires et de réduire son impact environnemental.

Elle ne porte aucun crédit budgétaire et est exclusivement financée par des fonds de concours qui devraient représenter en 2021, hors crédits du plan de relance, 708,2 millions d'euros ( 608,0 millions d'euros en 2020) en autorisations d'engagement (AE) et 721,3 millions d'euros ( 671,2 millions d'euros en 2020) en crédits de paiement versés par :

- l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) pour les opérations qui concernent le réseau routier non concédé 5 ( * ) , à hauteur de 408,2 millions d'euros en AE ( 368 millions d'euros en 2020) et 461,3 millions d'euros en CP ( 421,2 millions d'euros en 2020) ;

- les collectivités territoriales, qui participent au financement de certaines opérations dans le cadre des contrats de plan État-région (CPER), à hauteur de 300 millions d'euros en AE ( 240 millions d'euros en 2020) et 260 millions d'euros en CP ( 250 millions d'euros en 2020).

De nombreux projets seront financés par les crédits des fonds de concours transitant par l'action 01 en 2021, parmi lesquels la route Centre Europe Atlantique dans la région Bourgogne ainsi que le financement du contrat de partenariat pour la construction de la seconde rocade de Marseille (L2) .

Plus généralement, ces crédits permettent également de financer l'apport de l'État aux volets routiers des CPER .

2. L'effort en faveur de l'entretien du réseau routier national non concédé, très dégradé, atteindra 876,9 millions d'euros en 2021

Les crédits de l'action 04 « Routes-entretien » couvrent les dépenses relatives à l'entretien courant et préventif du réseau routier national non concédé , à son exploitation , aux opérations de réhabilitation ou de régénération routières , aux aménagements de sécurité ainsi qu'à la gestion du trafic et à l'information routière des usagers .

Pour mémoire, le réseau national non concédé comprend 12 000 kilomètres de routes et 12 000 ponts , soit 1 % des routes françaises et 5 % des ponts . D'une valeur estimée à 135 milliards d'euros , il est le support de 18 % du trafic écoulé par la route .

Représentant 7,5 % des crédits du programme 203, l'action 04 portera en 2021 297,6 millions d'euros en AE (contre 287,6 millions d'euros en 2020) et 303,8 millions d'euros en CP ( 304,4 millions d'euros en 2020), soit une baisse de - 3,5 % en AE et une hausse de 0,2 % en CP.

Toutefois, les crédits de l'action 04 seront complétés en 2021 par des fonds de concours évalués à 558,1 millions d'euros en AE et 573,1 millions d'euros en CP ( 566,4 millions d'euros en AE=CP en 2020), dont 528 millions d'euros en AE et 543 millions d'euros en CP en provenance de l'AFITF.

Les 30 millions d'euros de fonds de concours restant (AE=CP) seront apportés par les collectivités territoriales et par des tiers privés .

Au total, 855,7 millions d'euros en AE ( 830,6 millions d'euros en 2020) et 876,9 millions d'euros en CP ( 870,8 millions d'euros en 2020) seront donc consacrés en 2021 à l'entretien et à la régénération du réseau routier national non concédé , soit des montants en hausse de 25,1 millions d'euros en AE et de 6,1 millions d'euros en CP par rapport aux sommes qui étaient prévues par la loi de finances initiale pour 2020.

Il convient en particulier de noter que l'enveloppe portée par l'AFITF représentera en 2021 un effort identique à celui de 2020 , sachant que les crédits consacrés par l'AFITF à l'entretien et à la régénération du réseau routier national non concédé avaient augmenté de 34 millions d'euros en 2019 par rapport à 2018 et de 100 millions d'euros en 2018 par rapport à 2017.

Il y a en effet urgence à moderniser notre réseau routier non concédé : l'état de la structure des chaussées du réseau se dégrade depuis 2009 et plus de la moitié d'entre elles ont besoin d'un entretien urgent .

En outre, 1 030 ponts en mauvais état nécessitent des réparations et 2 590 ont besoin d'un entretien .

Trois scénarios de financement
pour le réseau routier national non concédé

Le Gouvernement avait commandé en 2018 un audit externe de l'entretien du réseau routier national non concédé à deux bureaux d'études suisses pour préparer le projet de loi d'orientation des mobilités.

Ceux-ci ont proposé trois scénarios d'investissements pour les vingt prochaines années :

- un scénario à 670 millions d'euros par an, soit la moyenne consacrée à l'entretien et à la modernisation du réseau ces dix dernières années. Selon l'audit, ce niveau d'investissement impliquerait « une aggravation de la dégradation du réseau », « des risques inacceptables et durables pour la sécurité se réaliseraient avec notamment un nombre très important de ponts qu'il faudra fermer ou limiter à la circulation » ;

- un scénario à 800 millions d'euros par an, soit le montant consacré au réseau en 2018 , avec lequel « la dégradation du réseau serait lente et des choix possibles pour sauvegarder une partie des actifs, par exemple les ponts ou les réseaux les plus circulés. Mais une partie du réseau serait à terme affectée par des fermetures ou des limitations de circulation » ;

- un scénario à 1 milliard d'euro , qui permettrait d'enrayer véritablement la spirale de dégradation du réseau.

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Sur la base de l'audit externe commandé par le Gouvernement (voir encadré), la programmation des investissements dans les transports annexée au projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) prévoit que les crédits d'entretien, d'exploitation et de modernisation du réseau routier national non concédé doivent représenter 850 millions d'euros par an d'ici 2022 puis 930 millions d'euros sur la période suivante.

Une telle hausse représente un effort très significatif de + 25 % sur le quinquennat 2018-2022 par rapport au quinquennat précédent.

Les rapporteurs spéciaux notent que le montant de crédits de paiement prévu pour 2021 - 876,9 millions d'euros - est supérieur pour la deuxième année consécutive à l'objectif fixé par la LOM, ce qui témoigne de la prise de conscience collective de la nécessité de consentir de lourds investissements pendant une bonne vingtaine d'année pour être en mesure de sauvegarder notre patrimoine routier .

3. La rebudgétisation des contributions de l'État au financement des trains d'équilibre du territoire (TET) implique un transfert de 293 millions d'euros sur le programme 203

Connues sous le nom de « lignes Intercités », les lignes de trains d'équilibre du territoire (TET) jouent un rôle important en matière d'aménagement du territoire mais sont confrontées à des déficits d'exploitation chroniques.

Depuis le 1 er janvier 2011, l'État est l'autorité organisatrice des TET , ce qui lui donne le pouvoir de déterminer le plan de transport que doit réaliser SNCF Mobilités (fréquence des trajets par lignes, nombres d'arrêts à réaliser par gares) mais lui donne également l'obligation de financer leur déficit d'exploitation ainsi que leur matériel roulant .

C'est actuellement la convention d'exploitation des « trains d'équilibre du territoire » 2016-2020 signée le 27 février 2017 qui régit les rapports entre l'État et SNCF Mobilités. Dans l'attente de l'ouverture de ces lignes à la concurrence , prévue progressivement à partir de 2022 , cette convention devrait être prolongée par voie d'avenant pour l'année 2021.

Jusqu'au 31 décembre 2020, les dépenses de l'État en faveur des lignes TET sont portées par le compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » .

Mais la suppression de ce CAS est prévue par l'article 28 du présent projet de loi de finances pour 2021, si bien que les crédits qu'il portait précédemment sont désormais retracés par la sous action n° 44-06 « Financement du déficit d'exploitation des trains d'équilibre du territoire » de l'action n° 44 « Transports collectifs » du présent programme 203.

Les raisons de la suppression du compte d'affectation spéciale
« Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs »

Le mécanisme du compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transports conventionnés de voyageurs » reposait principalement sur un transfert de ressources des activités les plus rentables de SNCF Voyageurs (lignes TGV) vers les activités les plus déficitaires (lignes TET), transfert effectué via la TREF et la CST.

Les ressources issues de la TAT constituaient pour leur part un complément à ces recettes qui proviennent du secteur ferroviaire lui-même . Issues du secteur autoroutier, elles permettaient d'ajouter une logique de report modal au financement du CAS .

Cet effort de report modal s'était toutefois considérablement altéré ces dernières années , le produit de la TAT affecté au CAS étant passé de 141,2 millions d'euros en 2018 à 117,2 millions d'euros en 2019 puis 70,7 millions d'euros à mesure que cette ressource était de plus en plus mobilisée pour financer l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) , laquelle a vu son budget augmenter dans le cadre de la trajectoire financière prévue par la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM).

En outre, si le principe de la péréquation entre activités ferroviaires rentables et déficitaire reste pertinent , et sera désormais assuré par des crédits budgétaires portés par le programme 203 « Infrastructures et services de transport » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », le recours à un CAS est désormais inadapté dans le cadre de l'ouverture à la concurrence de ce mode de transport qui devrait voir arriver sur le marché des concurrents de la SNCF, jusque-là seule bénéficiaire du CAS.

Surtout, l'attribution en 2021 du marché pluriannuel des deux lignes d'aménagement du territoire Nantes-Lyon et Nantes-Bordeaux rendra nécessaire l'engagement de plusieurs années de compensations prévisionnelles ; or, la consommation d'autorisations d'engagement (AE) sur un CAS suppose de disposer des recettes les finançant dès l'acte d'engagement juridique de la dépense . L'article 21 de la LOLF dispose en effet qu' « en cours d'année, le total des dépenses engagées ou ordonnancées au titre d'un compte d'affectation spéciale ne peut excéder le total des recettes constatées ».

Pour signer des contrats pluriannuels , il faudrait alors prélever un surcroît de taxes en conséquence , ce qui ne serait pas soutenable financièrement .

Rebudgétiser les dépenses de compensation des déficits d'exploitation des lignes d'aménagement du territoire permettra a contrario le conventionnement ou la contractualisation pluriannuelle de l'exploitation de ces lignes .

L'État, autorité organisatrice des lignes TET, sera en mesure d'assurer le suivi des dépenses afférentes et, par une comptabilité analytique incluant le produit des taxes ferroviaires , de connaître le bilan de cette activité .

Source : commission des finances du Sénat

Les dépenses relatives au déficit d'exploitation des trains d'équilibre du territoire (TET) , qui atteindront 293 millions d'euros en 2021 contre 312,7 millions d'euros en 2020, soit une baisse de - 6,3 % comprennent :

- les contributions versées aux entreprises ferroviaires exploitant les lignes TET visant à compenser une partie du déficit d'exploitation de ces lignes (activité n° 1) ;

- les contributions versées par l'État au titre de sa participation aux coûts d'exploitation des lignes TET conventionnés par les régions à compter de 2017 et antérieurement conventionnés par l'État (activité n° 2) ;

- les dépenses relatives aux enquêtes de satisfaction sur la qualité de service et aux frais d'études et de missions de conseil juridique, financier ou technique (activité n° 3).

Crédits consacrés par l'État au financement des trains d'équilibre
du territoire (TET) en 2020 et en 2021

(en euros)

LFI 2020

PLF 2021

Écart 2021/2020

01-Contribution à l'exploitation des TET

234 500 000

220 200 000

-6,1 %

02-Contribution versée aux régions au titre de l'exploitation des TET antérieurement conventionnées

76 700 000

71 800 000

-6,4 %

03-Frais d'enquêtes et d'études

1 500 000

1 000 000

-33,3 %

Total financement des TET

312 700 000

293 000 000

-6,3 %

Source : projet annuel de performances pour 2021

La diminution de 19,7 millions d'euros par rapport à 2020 des crédits consacrés aux TET s'explique par :

- la réduction programmée de 4,9 millions d'euros de la contribution à verser à la région Centre-Val de Loire, conformément à la convention conclue avec cette région ;

- la diminution du montant prévisionnel de la compensation à verser à SNCF Voyageurs pour l'exploitation des TET de 14,3 millions d'euros ;

- la baisse de 0,5 million d'euros des dépenses prévisionnelles d'études de l'autorité organisatrice des TET.

Les transferts de lignes TET par l'État aux régions

La réforme de grande ampleur des lignes d'équilibre du territoire en cours depuis 2015 s'est traduite par la fermeture de six lignes de nuit très déficitaires mais également par la décision de transférer d'ici 2020 aux régions de nombreuses lignes TET d'intérêt local dont l'offre était souvent imbriquée avec l'offre TER et qui font désormais partie du périmètre des treize grandes régions métropolitaines .

En contrepartie, l'État s'est engagé à renouveler, via l'AFITF 6 ( * ) , une partie du matériel roulant de ces lignes et à prendre à sa charge une partie de leur déficit d'exploitation , selon des modalités propres à chaque région et résultant de négociations menées avec chacune d'entre elles.

À ce jour, six accords de reprises de ligne TET ont été conclus entre l'État et les régions Normandie, Centre-Val de Loire, Nouvelle Aquitaine, Hauts-de-France, Grand-Est et Occitanie. Chacune de ces régions se sont vues associées à la gestion de ces lignes dès la signature de ces accords.

Source : commission des finances du Sénat

4. 170 millions d'euros d'aide pour le fret ferroviaire, fragilisé par la pandémie de Covid-19

Le programme 203 consacrera en 2021 207,1 millions d'euros en AE et 202,1 millions d'euros en CP au développement de modes et de services de transports alternatifs à la route dans le cadre du transport combiné .

Il s'agit là d'une très forte hausse de 180 millions d'euros en AE et de 170 millions d'euros en CP, puisque seuls 27,1 millions d'euros en AE et 32,1 millions d'euros en CP étaient prévus pour le transport combiné en 2020.

Les crédits inscrits dans le cadre du présent projet de loi de finances comprennent, outre les soutiens reconduits ( 27 millions d'euros d'aide à l'exploitation des services de transport combiné et 5 millions d'euros d'aide au service transitoire d'autoroute ferroviaire alpine), une enveloppe supplémentaire de 170 millions d'euros d'aides à l'exploitation des services de fret ferroviaire afin de soutenir des opérateurs fortement impactés par les crises provoquées par les mouvements de grève contre la réforme des retraites à l'hiver 2019-2020 puis par la crise sanitaire et économique provoquée par la pandémie de Covid-19 , mais qui ont su démontrer leur pertinence et leur utilité sociale , en particulier pendant le premier confinement.

Ces 170 millions d'euros porteront sur plusieurs dispositifs, la répartition définitive des montants entre ceux-ci n'étant pas encore définitivement arrêtée :

- complément aux 110 millions d'euros déjà prévus au titre de l'action 41 « Ferroviaire » (voir infra ) à la prise en charge complémentaire par l'État d'une partie des péages dus par les opérateurs à SNCF Réseau pour faire baisser les péages ;

- augmentation du soutien à l'aide au transport combiné , y compris de nouveaux services ;

- aide au wagon isolé .

Ces 170 millions d'euros n'ont pas été inscrits dans le plan de relance mais sur le programme 203 car ils ont vocation à être pérennes , seul un soutien au fret ferroviaire dans la durée étant susceptible de renforcer véritablement sa part modale dans le transport de marchandises.

5. Les lignes aériennes d'aménagement du territoire continueront en 2021 à bénéficier d'un soutien important de la part de l'État

L'action n° 52 « Transport aérien » verra elle aussi ses crédits fortement augmenter en 2021 avec 63,4 millions d'euros en AE et 41,4 millions d'euros en CP, soit 27,8 millions d'euros de plus en AE (+ 78,0 %) et 4,5 millions d'euros de plus en CP (+ 12,2 %).

Ces crédits serviront notamment à financer le soutien aux lignes aériennes d'aménagement du territoire (LAT), pour 18,8 millions d'euros en AE et 20,8 millions d'euros en CP.

La forte hausse des crédits de cette action en autorisations d'engagement (AE) s'explique avant tout par le renouvellement de la LAT Brive-Paris pour 6 millions d'euros et par le soutien de l'accessibilité aérienne internationale de Strasbourg dans le cadre du contrat triennal « Strasbourg Capitale européenne » pour 12,8 millions d'euros , particulièrement important pour soutenir Strasbourg alors que la crise sanitaire provoquée par la Covid-19 tend à fragiliser le statut de la ville par rapport à Bruxelles.

6. Le maintien à un niveau élevé des crédits consacrés au dragage des ports

En 2021, l'action 43 « Ports » sera dotée de 99,9 millions d'euros (AE=CP), soit une stabilisation à un niveau élevé quasiment identique à celui de 2020 après les fortes hausses intervenues ces dernières années . Sur ce montant, 92,7 millions d'euros seront consacrés à l'entretien des accès et des ouvrages d'accès des grands ports maritimes (GPM) , c'est-à-dire à leur dragage , qui constitue une priorité pour l'État depuis le comité interministériel de la mer (CIMer) de 2016.

Pour mémoire, le budget consacré au dragage des ports avait augmenté en 2019 de près de 29 millions d'euros par rapport à 2018, sachant que ces crédits avaient déjà été rehaussés en cours de gestion de 26 millions d'euros en 2017, puis avaient bénéficié d'une hausse de 19 millions d'euros dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2018.

Selon les réponses au questionnaire budgétaire, les crédits disponibles permettent désormais de couvrir en quasi-totalité les charges des ports français , de mettre en oeuvre les dispositions de l'article R. 5313-69 du code des transports 7 ( * ) et, surtout, de les faire bénéficier du même niveau de remboursement que les autres principaux ports en Europe .

À noter que les grands ports maritimes (GPM) vont bénéficier en 2021 et 2022 de 175 millions d'euros de crédits retracés par l'action 06 « Mer » du programme 362 « Écologie » de la mission « Plan de relance » pour accélérer leur verdissement et leur modernisation .

7. Le budget de l'Autorité de régulation des transports (ART) devra impérativement être revu à la hausse dès 2022

Depuis 2020, les crédits de l'action 47 « Fonctions supports » du programme 203 portent notamment la subvention pour charges de service publique de l'Autorité de régulation des transports (ART) 8 ( * ) , qui était auparavant financée par des taxes affectées.

Alors que l'ART s'est vu confier ces dernières années des missions nouvelles qui lui ont été attribuées par la loi Pacte 9 ( * ) et par la loi d'orientation des mobilités (LOM) 10 ( * ) , elle ne s'est vue attribuer que 7 ETP supplémentaires en 2021 alors qu'elle en réclamait, à juste titre, le double.

Surtout, le montant de sa subvention pour 2021 - 11,4 millions d'euros - apparaît désormais clairement insuffisant, puisqu'elle est quasiment identique depuis deux ans alors que l'ART compte 18 collaborateurs supplémentaires (elle avait reçu 11 ETP supplémentaires en 2020).

Le Président de l'Autorité, entendu par les rapporteurs spéciaux les as alertés sur le fait que la situation deviendrait critique à compter de 2022 , dès lors que l'ART aurait entièrement consommé son fonds de réserve , lequel s'élevait encore à 20 millions d'euros fin 2019 et aura été réduit de moitié d'ici fin 2021 .

Ce point est d'autant plus important que l'ART, en tant qu'autorité publique indépendante (API), est son propre assureur , et pourrait un jour avoir à payer des indemnisations si elle devait perdre un litige.

C. DANS LA MESURE OÙ LES CONTRATS ÉTAT-RÉGIONS 2015-2020 NE DEVRAIENT ÊTRE RÉALISÉS QU'À 60 % EN 2020, IL SERA NÉCESSAIRE DE LES PROLONGER JUSQU'EN 2022

L'ensemble des opérations prévues par les contrats État-régions (CPER) pour la période 2015-2020 représente une somme totale de 24,2 milliards d'euros . Plus de 75 % de ces crédits concernent des modes de transport alternatifs à la route , dont 7,6 milliards d'euros pour les transports collectifs en Île-de-France .

Sur ces 24 milliards d'euros , 7,2 milliards correspondent aux financements apportés par l'État (auxquels s'ajoutent 277,9 millions d'euros de VNF ), qui se répartissent de la façon suivante :

Fer

2 098,6 millions d'euros

Routes

3 332,3 millions d'euros

Fluvial

2,4 millions d'euros
+ 277,9 millions d'euros VNF

Ports

359,8 millions d'euros

Transports collectifs en Île-de-France

1 412,1 millions d'euros

Circulations douces

14,6 millions d'euros

Le taux d'avancement au 31 décembre 2019 au niveau national était de 49 % pour le volet ferroviaire des CPER et de 46 % pour leur volet routier , soit des niveaux relativement faibles , qui signifient que les CPER 2015-2020 continuent de prendre du retard . Le taux d'exécution du volet portuaire était de 56 % et celui des transports collectifs en Île-de-France de 72 % du fait d'une forte mobilisation autour du projet du Grand Paris et des projets de transport collectif associés

Selon la DGITM, l'État, via l'AFITF, prévoit de leur consacrer 748 millions d'euros par an environ de 2020 à 2022, soit un peu plus de 10 % par an de l'enveloppe totale de 7,2 milliards d'euros à laquelle il s'est engagé. Eu égard à ce rythme peu rapide, le taux prévisionnel d'avancement des CPER en 2020 serait de 60 % .

Il est d'ores-et-déjà acté que ces CPER feront l'objet d'un report à 2022 , tout en sachant que le taux de réalisation des projets pour une génération de CPER n'est que de 80 % environ . L'élaboration de la nouvelle génération de contractualisation États-régions sera réalisée avec les nouveaux exécutifs régionaux élus en 2021.

III. UN PLAN DE RELANCE AMBITIEUX POUR LES INFRASTRUCTURES ET MOBILITÉS VERTES, UNE MISE EN oeUVRE RAPIDE QUI S'ANNONCE COMPLEXE

Le plan de relance de l'économie proposé par le Gouvernement en réponse à la crise économique provoquée par la pandémie de Covid-19 prévoit des montants de crédits importants - 2,65 milliards d'euros d'autorisations d'engagement (AE) et 593,4 millions d'euros de crédits de paiement (CP) en 2021 - en faveur des infrastructures et des services de transport qui viendront abonder les crédits de l'AFITF et/ou des programmes 203 « Infrastructures et services de transports » et 205 « Affaires maritimes » .

Ces crédits transiteront soit par les actions 06 « Mer » et 07 « Infrastructures et mobilité vertes » du programme 362 « Écologie », soit par l'action 07 « Cohésion territoriale » du programme 364 « Cohésion » de la mission « Plan de relance ».

Les crédits du plan de relance consacrés aux transports terrestres
et maritimes en 2021

AE

CP

Verdissement des ports et de la flotte des affaires maritimes

200

36,4

Soutien au secteur ferroviaire

650

173

Mobilités du quotidien

900

91

Accélération des travaux d'infrastructures de transports

550

205

Développement et modernisation du réseau routier national et renforcement des ponts

350

88

Total

2 650

593,4

Source : commission des finances

Ces sommes sont considérables : encore faudra-t-il qu'elles puissent effectivement être dépensées en 2021 et 2022 pour avoir un véritable effet contra-cyclique et que les effectifs des opérateurs chargés des travaux soient suffisants .

En outre, vos rapporteurs spéciaux seront très attentifs à ce que ces crédits du plan de relance viennent bien s'ajouter et non pas se substituer aux montants déjà prévus par la loi d'orientation des mobilités (LOM).

A. L'ACTION 06 « MER » DU PROGRAMME 362 « ÉCOLOGIE »

Le plan de relance prévoit une enveloppe de 200 millions d'euros en AE et de 36,4 millions d'euros en CP pour l e verdissement des ports et de la flotte des affaires maritimes .

1. 175 millions d'euros sont prévus par le plan de relance pour le verdissement des ports

Les crédits du plan de relance ont vocation à financer à hauteur de 175 millions d'euros en 2021 et en 2022 des investissements en faveur de la transition écologique des ports maritimes français . Ces crédits interviendront en cofinancement avec les ports, les collectivités territoriales et l'Union européenne.

L'impact économique du système portuaire français

Le système portuaire français génère 372 millions de tonnes de trafic et 300 000 emplois directs. Les trois principales portes d'entrée du commerce extérieur de la France que sont les ports de Dunkerque, d'HAROPA (Le Havre, Rouen, Paris) et de Marseille produisent une valeur ajoutée de 13 milliards d'euros et génèrent 130 000 emplois directs. D'un point de vue économique, 1 000 conteneurs manutentionnés par les ports français créent 1 emploi portuaire, 6 emplois pour le dispatching de la marchandise et 3 à 4 emplois dans le secteur des transports.

Source : dossier de presse France relance, septembre 2020

Parmi les projets qui bénéficieront de ces crédits sont déjà identifiés :

- la construction d'usines de fabrications de pales éoliennes et de nacelles au port du Havre d'ici 2022 ;

- la mise en place de bornes électriques à quai pour les navires de croisière maritimes et fluviaux sur les quais de l'ensemble portuaire HAROPA à partir de 2020, pour les navires à passagers et les porte-conteneurs sur les quais du port de Marseille d'ici fin 2022, pour les navires porte-conteneurs sur le quai de la Pointe des Grives du port de la Martinique d'ici fin 2022 ;

- une amélioration des accès ferroviaires des ports de Dunkerque et de Marseille dès 2020 ;

- des travaux visant à optimiser la consommation d'énergie liée au trafic de conteneurs réfrigérés sur le port de la Guadeloupe d'ici 2021 ;

- la mise en place de solutions de production d'énergie à partir de panneaux photovoltaïques au port de La Martinique d'ici 2022 et la réalisation d'un projet innovant de stockages mutualisés d'électricité entre les productions photovoltaïques du port et les besoins du réseau électrique.

Selon le Gouvernement, ces différents travaux pourraient générer environ 1800 emplois à temps plein, dont 1 000 emplois directs.

L'électrification des quais pourrait permettre de réduire considérablement la pollution atmosphérique dans les ports ainsi que les émissions de CO 2 . De fait, selon la Commission européenne, le branchement d'un navire à une borne électrique à quai permet une réduction des émissions de CO 2 de l'ordre de 86 %. La consommation d'électricité à quai en 2019 était de 10 400 Mwh.

Une telle consommation de fioul lourd aurait généré 4,472 tonnes d'émissions soufrées, 135,2 tonnes d'émissions azotées et 5,919 tonnes de particules fines (PM 2,5). En termes d'émissions de gaz à effet de serre, une consommation équivalente de fioul lourd aurait émis 3 370 tonnes de CO 2 .

2. 25 millions d'euros pour le verdissement de la flotte des affaires maritimes

25 millions d'euros en AE sur deux ans sont prévus dans le cadre du plan de relance pour le verdissement de la flotte de la direction des affaires maritimes.

Celle-ci prévoit la réalisation de navires innovants, en particulier un baliseur océanique, afin d'encourager les chantiers navals et équipementiers français les plus innovants dans le domaine des navires de service (Océa, Socarenam, Piriou, X-Blue, Delavergne).

L'objectif poursuivi vise à se rapprocher de « zéro émission » pour les navires commandés, en particulier par un dessin de carène innovant pour une plus grande efficience, par le recours au GNL ou grâce à une propulsion électrique en zéro émission par hydrogène.

Vos rapporteurs spéciaux ne cachent pas un certain scepticisme quant à la capacité de réaliser un bateau aussi innovant dans les deux ans à venir, ce qui doit précisément être l'objet du plan de relance.

B. L'ACTION 07 « INFRASTRUCTURES ET MOBILITÉ VERTES » DU PROGRAMME 362 « ÉCOLOGIE »

Si les crédits portés par l'action 07 « Infrastructures et mobilité vertes » du programme 362 « Écologie » comprennent 2,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE), seuls 469 millions d'euros en crédits de paiement (CP) sont prévus pour 2021.

1. Un soutien au secteur ferroviaire pour 173 millions d'euros en 2021

Le soutien au secteur ferroviaire prendra en premier lieu la forme d'une recapitalisation du groupe SNCF au bénéfice de SNCF Réseau pour un montant de 4,05 milliards d'euros (voir infra ). Cette opération est toutefois extérieure à la mission « Plan de relance » proprement dite.

Sur celle-ci, 650 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 173 millions d'euros en crédits de paiement (CP) sont prévus en 2021 pour le mode ferroviaire.

Cette enveloppe a vocation à financer :

- la régénération des petites lignes ferroviaires (en cofinancement notamment avec les régions dans le cadre des CPER) pour 300 millions d'euros , lesquels devraient transiter par l'AFITF.

Deux protocoles ont d'ores-et-déjà été signés avec les régions Grand Est et Centre-Val-de-Loire et des discussions sont en cours avec l'ensemble des autres régions. À titre d'exemples, les lignes Bourges-Montluçon en Centre-Val-de-Loire et Nancy-Saint-Dié en Grand Est devraient bénéficier des crédits du plan de relance :

- le développement d'une nouvelle offre de train de nuit , pour 100 millions d'euros (également via l'AFITF). L'effort de l'État vise notamment à permettre la réouverture d'une ou deux lignes ;

- le développement des infrastructures multimodales de fret ferroviaire (là encore dans le cadre des CPER) pour 250 millions d'euros (toujours via l'AFITF).

Il s'agit notamment de soutenir les investissements dans les lignes fret dites « capillaires » qui permettent d'accéder à des lieux de production (usines, silos à céréales) mais également de permettre à SNCF Réseau de mieux prendre en compte la compétitivité du fret dans la programmation des travaux.

2. 91 millions d'euros seront consacrés au développement du vélo et des transports en commun en 2021, sur un budget total de 900 millions d'euros sur deux ans

Le plan de relance prévoit de consacrer 900 millions d'euros en AE et 91 millions d'euros en CP en 2021 aux mobilités du quotidien alternatives à la voiture .

En Île-de-France, devraient être soutenues des lignes régionales ferroviaires structurantes telles que le projet Éole de prolongement du RER E à l'ouest, la modernisation du tronçon central des RER B et D , mais également la poursuite du déploiement des tramways T3 et T1 ainsi que des bus comme le TZen en 2 et 3 notamment.

En toute logique, ce soutien devrait prendre la forme de subventions à Île-de-France Mobilités (IDFM), l'établissement public régional qui porte ces différents projets, par l'AFITF, dans le cadre du contrat de plan État-Région (CPER).

La même enveloppe devrait également financer, en complément des montants prévus par les collectivités, des projets de développement de transports en commun en régions .

Enfin, 100 millions d'euros en AE sur les 900 millions d'euros mentionnés supra viendraient abonder le fonds vélo pour encourager une accélération des travaux d'aménagement de réseaux cyclables.

3. L'accélération des travaux d'infrastructures de transport bénéficiera de 205 millions d'euros de crédits en 2021 et de 345 millions d'euros en 2022

550 millions d'euros en AE et 205 millions d'euros en CP sont prévues sur l'action 07 « Infrastructures et mobilité vertes » pour financer une accélération des travaux d'infrastructures de transport.

Selon le projet annuel de performances de la mission « Plan de relance », ces crédits devraient bénéficier :

- au déploiement de bornes de recharge pour les véhicules électriques sur le réseau routier national, pour 100 millions d'euro s ;

- à la mise en place, toujours sur le réseau routier national, de voies réservées aux modes partagés (transports en commun, covoiturage) pour lutter contre l'autosolisme 11 ( * ) , avec un budget de 50 millions d'euros financé par l'AFITF ;

- à la régénération et modernisation du réseau fluvial (notamment des écluses et des barrages) gérées par Voies navigables de France (VNF) (voir plus en détail infra ) et au développement de la ligne ferroviaire Lyon-Turin pour 375 millions d'euros , crédits qui seront gérés par l'AFITF ;

- aux infrastructures des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS), qui relèvent du programme 205 « Affaires maritimes », pour 25 millions d'euros (voir infra ).

C. L'ACTION 07 « COHÉSION TERRITORIALE » DU PROGRAMME 364 « COHÉSION »

Les crédits de l'action 07 « Cohésion territoriale du programme 364 « Cohésion » consacrent 350 millions d'euros en AE et 88 millions d'euros en CP en 2021 au développement et à la modernisation du réseau routier national et au renforcement des ponts .

1. Le développement et la modernisation du réseau routier national bénéficieront de 250 millions d'euros répartis sur 2021 et 2022

D'après le projet annuel de performances de la mission « Plan de relance », 250 millions d'euros en AE devraient être consacrés en 2021 au développement et à la modernisation du réseau routier national . Selon la DGITM, la gestion de ces crédits devrait être assurée par l'AFITF.

2. 100 millions d'euros sur deux ans pour le renforcement des ponts

100 millions d'euros sont prévus par le plan de relance pour l'entretien des ouvrages d'art, dont 60 millions d'euros pour ceux des collectivités territoriales et 40 millions d'euros pour ceux du réseau routier national.

Les crédits destinés aux collectivités territoriales devraient être gérés par la direction générale des collectivités locales (DGCL) et ceux destinés aux routes nationales par l'AFITF .

Selon le projet annuel de performances, « les crédits dédiés à la rénovation des ponts gérés par les collectivités permettront de soutenir les plus petites collectivités dans le recensement, les diagnostics , les études et expérimentations permettant de réduire les coûts de surveillance et d'entretien . Ils pourront aussi permettre le développement du concept de « ponts connectés » permettant par le biais de capteurs d'optimiser les coûts d'inspection et d'entretien, et d'alerter en cas d'anomalie ».

En ce qui concerne les ponts relevant du réseau routier national , le ministère des transports avait, dans un communiqué rendu public à l'issue d'un audit réalisé en 2018, indiqué s'agissant de l'état des 12 000 ponts gérés par l'État que « dans 7 % des cas , les dommages sont plus sérieux, présentant à terme un risque d'effondrement et donc la forte probabilité de fermer préventivement ces ponts à la circulation des poids lourds ou de tous les véhicules ».

De fait, les budgets alloués à l'entretien des ouvrages d'art sont très en-deçà des valeurs de références : l'OCDE recommande de consacrer annuellement 1,5 % de la valeur à neuf des ouvrages en maintenance . Des études plus récentes estiment que cette part devrait se situer entre 0,5 % et 0,8 % . Or, en moyenne, l es budgets consacrés aux ouvrages du réseau routier national ont représenté entre 0,15 et 0,2 % de la valeur à neuf des ouvrages .

Par ailleurs, le Cerema a montré qu'il était nécessaire de consacrer entre 110 et 120 millions d'euros par an à l'entretien des ouvrages d'art du réseau routier national pour arrêter leur dégradation et atteindre une situation satisfaisante dans un délai de dix ans .

Les crédits du programme 203 consacrés aux ponts devraient atteindre 80 millions d'euros en 2021, auxquels s'ajouteront les 40 millions d'euros du plan de relance , à répartir en 2021 et 2022, soit 100 millions d'euros par an .

S'il s'agit d'un progrès , les rapporteurs spéciaux considèrent, conformément aux préconisations du rapport d'information de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable « Sécurité des ponts : éviter un drame » 12 ( * ) , qu'il serait nécessaire de porter le montant dédié à l'entretien des ouvrages d'art du réseau routier national à 120 millions d'euros par an , soit 20 millions d'euros supplémentaires .

IV. DE NOUVEAUX DÉFIS FINANCIERS POUR LES TROIS GRANDS OPÉRATEURS DU PROGRAMME 203 CONFRONTÉS À LA CRISE ÉCONOMIQUE ET SANITAIRE PROVOQUÉE PAR LA COVID-19

Les trois grands opérateurs rattachés au programme 203 ont tous, à des degrés divers, été sévèrement touchés par les conséquences de la pandémie de Covid-19 et participeront de la relance mise en place pour dynamiser l'économie .

A. EN DÉPIT DE L'IMPACT MASSIF DE LA CRISE SANITAIRE SUR SES COMPTES, SNCF RÉSEAU DEVRAIT POUVOIR POURSUIVRE LE GRAND PLAN DE MODERNISATION DU RÉSEAU STRUCTURANT GRÂCE À UNE RECAPITALISATION DE 4,1 MILLIARDS D'EUROS

La loi n° 2018-515 pour un nouveau pacte ferroviaire , si elle portait principalement sur l'ouverture à la concurrence du marché domestique de voyageurs et sur la réforme du cadre social des personnels de la SNCF , a également prévu la réorganisation et la transformation en sociétés nationales à capitaux publics de SCNF Mobilités et de SNCF Réseau .

Elle prévoyait également que SNCF Réseau :

- devrait poursuivre , et même accélérer grâce aux crédits prévus par la loi d'orientation des mobilités (LOM), le grand plan de modernisation du réseau ;

- devrait réaliser des efforts de productivité supplémentaires de l'ordre de 380 millions d'euros en 2026, portant ainsi le gain de productivité à mettre en oeuvre à plus de 1,6 milliard d'euros en 2026 ;

- bénéficierait d'une reprise de dette de 25 milliards d'euros en deux temps (voir infra ).

Cette trajectoire vertueuse a malheureusement été balayée par les conséquences catastrophiques pour le système ferroviaire de la crise sanitaire , si bien que seule une intervention financière massive de l'État permettra de maintenir les grands équilibres imaginés il y a deux ans.

1. Un grand plan de modernisation du réseau qui ne pourra être maintenu qu'avec une aide exceptionnelle de l'État, compte tenu des effets de la crise économique et sanitaire provoquée par la Covid-19

L'audit du réseau ferré français réalisé en 2005 par l'école polytechnique fédérale de Lausanne, actualisé en 2012, a démontré que le réseau ferré structurant le plus circulé s'était considérablement dégradé en France ces trente dernières années en raison d'investissements d'entretien et de modernisation longtemps très insuffisants 13 ( * ) .

Cette situation pose des problèmes en termes de sécurité mais également d'efficacité, en raison de la multiplication des ralentissements de la circulation des trains sur quelque 5 300 kilomètres du réseau .

Pour y remédier, SNCF Réseau a conçu en 2013 un grand plan de modernisation du réseau qui vise à régénérer notre patrimoine ferroviaire en péril .

Les engagements pris dans le cadre du contrat de performance conclu entre l'État et SNCF Réseau le 20 avril 2017 prévoyaient des investissements de 2,5 milliards d'euros par an en 2018 et en 2019 puis de 3 milliards d'euros par an à compter de 2020 en faveur du réseau .

Comme le Gouvernement l'avait annoncé au moment de la discussion du projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire, la programmation des investissements dans les transports annexée à la loi d'orientation des mobilités (LOM) prévoit désormais que SNCF Réseau investira 3,6 milliards d'euros par an dans le réseau existant .

Les pertes sans précédent encaissées par le groupe SNCF en raison de la crise sanitaire provoquée par la pandémie de Covid-19 - 4,9 milliards d'euros de pertes de chiffre d'affaires et des pertes de 4,0 milliards d'euros en termes de marges opérationnelles à la fin août 2020 - ont suscité beaucoup d'inquiétudes quant à la capacité de SNCF Réseau de financer son plan de modernisation du réseau , pourtant indispensable.

Le Gouvernement a toutefois annoncé qu'il allait procéder, dans le cadre du plan de relance, à une recapitalisation exceptionnelle du groupe SNCF d'ici la fin de l'année 2020 à hauteur de 4,05 milliards d'euros .

Sur cette somme, 2,3 milliards d'euros devraient être directement dévolus au rétablissement de l'investissement annuel de régénération des voies et 1,5 milliard d'euro s correspondent aux investissements relatifs à la fin de l'utilisation du glyphosate sur les voies , la sécurisation des ponts et les investissements de sécurité nécessaires et 300 millions d'euros devraient être dédiés aux petites lignes .

Par ailleurs, SNCF Réseau recevra 192 millions d'euros en 2021 correspondant aux dividendes que l'État a renoncé à percevoir de la part du groupe SNCF . Cette dotation sera intégralement consacrée à la régénération du réseau ferroviaire .

Les rapporteurs spéciaux seront très attentifs à ce que SNCF Réseau reçoive bien tous les financements dont l'entreprise a besoin pour poursuivre l'indispensable modernisation du réseau structurant . Il s'agit là en effet d'une des principales priorités décidées par le Parlement dans le cadre de la LOM.

2. Les crédits d'intervention du programme 203 à destination de SNCF Réseau augmenteront de 80 millions d'euros en 2021

Les liens financiers entre SNCF Réseau et le programme 203 « Infrastructures et services de transport » sont très importants puisque l'action 41 « Ferroviaire » , qui représente 62,5 % des crédits dudit programme , porte pour 2021 2 467,3 millions d'euros en AE et 2 466,0 millions d'euros en CP de crédits d'intervention en faveur de SNCF Réseau , soit 80,9 millions d'euros en AE (+ 3,4 %) et 78,2 millions d'euros en CP (+ 3,3 %) de plus qu'en 2020.

Ces crédits visent à financer l e coût de l'utilisation du réseau ferré national par les trains régionaux de voyageurs (TER) , les trains d'équilibre du territoire (trains Intercités) et les trains de fret , que les péages que perçoit par ailleurs SNCF Réseau ne parviennent pas à couvrir .

En vertu de ce mécanisme, SNCF Réseau percevra ainsi en 2021 :

- 2 094,0 millions d'euros (AE=CP) pour le financement de l'utilisation du réseau ferré national par les TER . Ce montant correspond à la redevance d'accès facturée par SNCF Réseau pour l'utilisation par les TER du réseau ferré national hors Île-de-France ;

- 260,0 millions d'euros pour le paiement par l'État de la redevance d'accès facturée par SNCF Réseau pour l'utilisation du réseau ferré national hors Île-de-France par les trains d'équilibre du territoire (TET), dont l'État est l'autorité organisatrice (voir infra );

- 110,0 millions d'euros pour le financement de l'utilisation du réseau ferré national par les trains de fret , y compris le financement du complément de prix visant à contribuer au financement du coût marginal du fret pour SNCF Réseau .

Si ces crédits sont récurrents pour SNCF Réseau, ils seront plus que jamais nécessaires en 2021 pour que l'entreprise puisse faire face à ses engagements .

B. LA CONSTRUCTION DU GRAND PARIS EXPRESS FAIT PESER UNE CHARGE FISCALE DE PLUS EN PLUS LOURDE SUR LES ENTREPRISES FRANCILIENNES

La loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris, dont l'article 1 er dispose que « le Grand Paris est un projet urbain, social et économique basé sur la construction d'un nouveau réseau de transport public », a créé la Société du Grand Paris (SGP) , établissement public de l'État à caractère industriel et commercial (EPIC) dont « la mission principale est de concevoir et d'élaborer le schéma d'ensemble et les projets d'infrastructures composant le réseau de transport public du Grand Paris et d'en assurer la réalisation ».

Le réseau du Grand Paris Express

Baptisé Grand Paris Express, le réseau de transport public porté par la SGP est constitué de 72 gares (que la SGP a pour mission de construire et d'aménager) et de 200 kilomètres de lignes nouvelles interconnectées au réseau existant (métro, RER et transilien) :

- la ligne 15 reliant Noisy-Champs, Champigny, La Défense, Saint-Denis-Pleyel, Rosny-Bois-Perrier ;

- la ligne 16 de Noisy-Champs à Pleyel via Clichy-Montfermeil et Aulnay-sous-Bois ;

- la ligne 17 de Pleyel au Mesnil Amelot en passant par Le Bourget ;

- la ligne 18 d'Orly à Versailles en passant par le plateau de Saclay.

À ces quatre lignes nouvelles viennent s'ajouter les prolongements de la ligne 14 au nord, entre Saint-Lazare et Pleyel, et au sud, entre Olympiades et Orly ainsi que le prolongement de la ligne 11 entre Rosny-Bois-Perrier et Noisy-Champs.

Source : Société du Grand Paris (SGP)

1. Le coût du Grand Paris Express est désormais estimé à 35,6 milliards d'euros

Depuis la réévaluation intervenue à l'automne 2017 , le coût du Grand Paris Express était évalué à 35,1 milliards d'euros aux conditions économiques de 2012, le coût moyen au kilomètre s'élevant à 150 millions d'euros .

Le rapport du groupe de travail de la commission des finances du Sénat « Grand Paris Express : des coûts à maîtriser, un financement à consolider » les a depuis réévalués à 35,6 milliards d'euros à l'automne 2020, soit 500 millions d'euros supplémentaires .

S'ajoutent à cette somme 3,4 milliards d'euros de contributions de la SGP à plusieurs projets d'infrastructures de transports en Île-de-France :

- 798 millions d'euros au titre de la participation de 55 % de la SGP au prolongement de la ligne 14 jusqu'à Mairie de Saint-Ouen ;

- 450 millions d'euros pour la réalisation des interconnexions avec le réseau existant ;

- 1,6 milliard d'euros pour la participation de la SGP au plan de mobilisation de la région (Éole, ligne 11, schéma directeur des RER).

À la suite de la réévaluation du coût du Grand Paris Express , le Gouvernement a confirmé le 22 février 2018 la réalisation de l'ensemble du réseau mais a substantiellement modifié les dates de mise en service de certaines lignes.

Il a également demandé à l'équipe dirigeante de la SGP de réduire le coût du projet de 10 % en procédant à un vaste travail d'optimisation .

Mais à ce jour, 600 millions d'euros seulement d'économies ont été identifiées, ce qui paraît très peu à l'échelle du projet.

Les travaux sont en cours sur les lignes 14, 15 sud, et le tronc commun des lignes 16 et 17, avec quelque 130 chantiers actifs . Pour les lignes 15 Est et Ouest, le choix a été fait en 2019 d'avoir recours à des marchés de conception-réalisation.

Comme l'a mis en lumière le rapport du groupe de travail cité supra , la pandémie de Covid-19 va avoir un impact sur les coûts du projet , l'arrêt des chantiers pendant le premier confinement étant d'ores-et-déjà estimé à 20 millions d'euros , tandis que d'autres surcoûts restent à évaluer .

Surtout, si les lignes 15 sud, 14 nord et 14 sud ne devraient pas voir leur calendrier trop bouleversé, la Société du Grand Paris (SGP) considère en revanche qu'il lui sera impossible de mettre en service le système complet composé des tronçons des deux lignes 16 et 17 pour les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2024 , contrairement à l'objectif qui lui avait été fixé par le Premier ministre le 22 février 2018.

Selon les dirigeants de la SGP entendus par les rapporteurs spéciaux, ces deux lignes avaient déjà accumulé un retard important que l'établissement avait cherché à combler depuis deux ans, mais que la crise sanitaire a rendu désormais trop important pour qu'il puisse être résorbé à temps .

En lien avec son conseil de surveillance, la SGP a missionné une expertise indépendante qui examine ce constat et proposera éventuellement des scénarios dégradés ou alternatifs d'ici la fin de l'année 2020.

Si le budget pour 2021 de la Société du Grand Paris (SGP) n'est pas encore précisément connu, il pourrait atteindre 4,5 milliards d'euros selon les projections transmises aux rapporteurs spéciaux dans le cadre des réponses au questionnaire budgétaire, soit une hausse de 871 millions d'euros environ par rapport à 2020.

Le budget de la Société du Grand Paris de 2016 à 2022
(projections à partir de 2020)

(en millions d'euros)

En M€

2016

2017

2018

2019

2020

(projection)

2021

(projection)

2022

(projection)

Dépenses totales (A)

909

1782

2654

2994

3660

4531

4523

GPE

629

1314

2119

2508

3201

4269

4351

Contributions (Ligne 14 entre Saint-Lazare et Mairie de Saint-Ouen, Plan de mobilisation et réseaux existants)

281

468

535

486

459

262

172

Recettes totales (B)

515

536

600

702

776

778

782

Taxes affectées

508

532

566

662

776

778

782

TSBCS (et TASS à partir de 2019)

326

349

382

470

554

556

560

TSE

117

117

117

117

117

117

117

IFER

65

66

67

74

75

75

75

Taxe de séjour

n.a.

n.a.

n.a.

1,5

30

30

30

Ressources propres et autres

7

4

34

40

-

-

-

Emprunts

0

700

2365

3255

Jusqu'à 12 000*

0*

Source : réponses au questionnaire budgétaire
2. Un plan de financement qui repose sur la fiscalité affectée à la SGP et un recours massif à l'endettement
a) Des hausses de recettes qui pèsent désormais de façon excessive sur les entreprises franciliennes

Le modèle de financement de la Société du Grand Paris (SGP) est celui d'une caisse d'amortissement (voir infra ).

Ainsi, l'établissement a vocation à s'endetter dans la phase de réalisation des travaux avant de rembourser progressivement la dette contractée .

À cette fin, le législateur - sur les recommandations d'un premier rapport du député Gilles Carrez de 2009 - a décidé d'affecter à la SGP des recettes fiscales qui présentent, pour l'essentiel, une nature économique et qui sont présentées dans le tableau ci-après.

Synthèse des recettes fiscales affectées à la
Société du Grand Paris en 2019 et en 2020

Ressources fiscales affectées

Base légale

Plafonds prévus en LFI pour 2019
(en millions d'euros)

Exécution en 2019

Exécution en 2020 (prévision LFI pour 2020)

Taxe sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement (TSBS)

Article 231 ter du code général des impôts

500

466

466

Taxe spéciale d'équipement (TSE)

Article 1609 G du code général des impôts

117

117

117

Imposition forfaitaire sur le matériel roulant utilisé sur les lignes de transport en commun de voyageurs (IFER)

Article 1599 quater A bis du code général des impôts

75

75

75

Taxe annuelle sur les surfaces de stationnement

Article 1599 quater C du code général des impôts

4

3

4

Taxe de séjour

Article L. 2531-17 du code général des collectivités territoriales

20

15

20

Total

716

676

682

Source : commission des finances du Sénat

Dans son rapport remis au Premier ministre en juillet 2018 sur les ressources de la société du Grand Paris 14 ( * ) , le député Gilles Carrez avait considéré que la SGP avait besoin d'une somme comprise entre 200 et 250 millions d'euros de ressources annuelles supplémentaires pour faire face à la réévaluation des coûts du projet.

Au total, le Parlement a déjà voté en lois de finances pour 2019 et pour 2020 150 millions d'euros de recettes fiscales annuelles nouvelles sur les 200 à 250 millions d'euros préconisés par Gilles Carrez, ce qui signifie que manquent encore entre 50 millions d'euros et 100 millions d'euros .

Dans leur rapport précité, nos collègues sénateurs membres du groupe de travail ont bien souligné que « taxer toujours davantage les entreprises franciliennes , a fortiori dans le contexte actuel de crise économique provoquée par le Covid-19 qui frappe durement la région capitale, ne constitue donc pas une solution acceptable et ferait à coup sûr de nouveau l'objet d'un rejet par le Sénat si une taxation nouvelle devait être proposée par le Gouvernement à l'avenir ».

Ils ont donc retenu deux pistes principales à ce sujet :

- un concours de l'État au financement des charges supplémentaires résultant de facteurs extérieurs aux décisions de la Société du Grand Paris ;

- un potentiel allongement de la maturité de la dette, dans un contexte de taux d'intérêt exceptionnellement bas.

b) Un recours de plus en plus important à l'emprunt

Le recours précoce et massif à l'endettement permet d'accélérer la livraison du projet à recettes fiscales ou budgétaires affectées équivalentes en augmentant considérablement la capacité d'investissement de l'opérateur : alors qu'une livraison sans emprunt n'aurait été possible qu'en 2075 , le recours à celui-ci rend financièrement possible une mise en service complète du GPE en 2030 .

En outre, emprunter massivement permet de bénéficier du contexte actuel des taux bas , alors qu'une stratégie d'endettement étalée sur une plus longue période exposerait le projet à un risque de remontée des taux d'intérêt .

La stratégie de financement retenue implique que la SGP continuera d'accroitre son niveau d'endettement jusqu'en 2030 avant de procéder au remboursement intégral de sa dette jusqu'en 2071 . Elle deviendra donc après 2030 une simple caisse d'amortissement .

Alors qu'elle avait jusque-là uniquement emprunté auprès de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et de la Banque européenne d'investissements (BEI), la SGP a été requalifiée à compter de l'été 2016 en organisme divers d'administration locale (ODAL) par l'Insee, ce qui lui a permis d'établir et de mettre en oeuvre une stratégie de financement en son nom sur les marchés financiers reposant, notamment, sur l'émission d'obligations. Pour ce faire, elle bénéficie d'une excellente notation, à savoir Aa2 par Moody's et AA par Fitch .

L'opérateur a ainsi procédé entre octobre 2018 et juin 2020 à la levée de 9,8 milliards d'euros sur les marchés obligataires pour un taux fixe moyen très compétitif de 1,06 % .

Il convient de relever que 97 % des montants levés aux termes de ces opérations l'ont été par l'émission d'obligations « vertes » baptisées « Green EMTN » ( Euro Medium Term Notes ) , c'est à-dire d'obligations dont l'objet est le financement de projets ayant un impact environnemental favorable .

Le 8 octobre 2020, la SGP a annoncé avoir souscrit deux nouveaux emprunts « verts » de 3 milliards d'euros chacun, portant le total de ses emprunts obligataires à 15,5 milliards d'euros . Selon le président du directoire Thierry Dallard, son établissement a désormais « sécurisé 50 % de son financement ».

c) Pour la quatrième année consécutive, les effectifs de la SGP vont augmenter puisque le nombre d'ETPT passera de 585 en 2019 à 875 en 2020

Jusqu'en 2018, le plafond d'emploi de la société du Grand Paris n'était que de 240 ETPT , un chiffre notoirement insuffisant , compte tenu de l'ampleur des risques financiers, techniques et de sécurité présentés par un chantier d'une telle ampleur.

Le Gouvernement a entendu les inquiétudes qui s'exprimaient sur le sujet puisque les effectifs de la SGP ont doublé en 2019 pour atteindre 430 ETPT . Le mouvement s'est poursuivi en 2020 puisque le plafond d'emplois de l'opérateur sera de 585 ETPT . Il continue en 2021 avec un plafond fixé à 875 ETPT .

La SGP anticipe d'atteindre son maximum d'effectifs d'ici la fin 2022 avec 1 100 ETP .

La hausse des effectifs
de la Société du Grand Paris (SGP)

Source : Société du Grand Paris (SGP)

Cette montée en puissance des effectifs de la SGP était indispensable alors que le nombre de collaborateurs extérieurs dont elle aura à coordonner l'intervention pourrait passer de 7 000 en 2020 à plus de 15 000 en 2024.

C. SI LA RÉDUCTION DE SES EFFECTIFS CONSTITUE UN SUJET DE VIGILANCE, VOIES NAVIGABLES DE FRANCE VA PERCEVOIR 175 MILLIONS D'EUROS DU PLAN DE RELANCE AFIN D'ACCÉLÉRER LA RÉNOVATION DE SON RÉSEAU

1. Des ressources réduites par la crise sanitaire et des effectifs en forte baisse

Voies navigables de France (VNF) , établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de la transition écologique et solidaire, gère le réseau de voies navigables français . Il est chargé de son exploitation , de son entretien , de sa maintenance , de son amélioration ainsi que de son extension .

La loi n° 2012-77 du 24 janvier 2012 relative à Voies navigables de France lui a transféré au 1 er janvier 2013 les services de navigation de l'État , jusqu'alors mis à sa disposition, et qui comptaient quelque 4 000 agents .

Le réseau géré par l'établissement comprend 6 700 kilomètres de voies navigables , plus de 3 000 ouvrages d'art et 40 000 hectares de domaine public en bordure de voie d'eau.

Le projet stratégique de VNF pour la période 2015-2020 vise d'abord à hiérarchiser les différents segments du réseau , avec une offre de service fret sur le réseau à grand gabarit , une offre touristique sur les voies navigables plus modestes qui s'y prêtent et une offre de gestion hydraulique pour les autres usages de l'eau (agriculture, industrie, etc.). VNF est particulièrement attentif aux enjeux écologiques , comme en atteste sa démarche de labellisation ISO 14 000 , le déploiement d'un label « développement durable » et sa coopération accrue avec les agences de l'eau .

Son contrat d'objectifs et de performance (COP) a fait l'objet d'une inscription dans la loi d'orientation des mobilités (LOM) mais se fait toujours attendre à la fin de l'année 2020 . Les rapporteurs spéciaux estiment qu'il devra rapidement être adopté en 2021 .

VNF devrait compter 4 103 ETPT en 2021, dont 4 073 sous plafond et 30 hors plafond (il s'agit d'emplois aidés). Son schéma d'emploi pour 2021 prévoit une diminution de 99 ETPT contre 112 ETP en 2020.

Dans le cadre d'Action publique 2022, il est prévu que VNF diminue ses effectifs d'une centaine d'ETPT par an , pour passer sous la barre des 4 000 ETPT d'ici la fin de la législature . 1 900 départs à la retraite sont prévus dans les dix ans à venir, soit près de 50 % des effectifs actuels , si bien que les objectifs assignés à l'opérateur apparaissent relativement réalistes.

Les rapporteurs spéciaux notent toutefois que la diminution prévue en 2021 est particulièrement forte et suscite des inquiétudes légitimes au sein de l'opérateur, car beaucoup d'installations nécessitent des interventions humaines .

La subvention pour charges de service public que reçoit l'établissement sur les crédits du programme 203 représente environ 39 % de ses ressources . Cette subvention s'établira en 2021 à 248,3 millions d'euros (AE=CP), soit un montant inférieur de 2,2 million d'euros à celui de 2020, ce qui ne lui permettra pas de couvrir intégralement ses dépenses de personnel.

Depuis le 1 er janvier 2020, la taxe hydraulique que percevait VNF a été remplacée par une redevance domaniale , créée par voie réglementaire 15 ( * ) . Son fait générateur est le même que celui de la taxe hydraulique, à savoir le prélèvement ou le rejet d'eau , quel qu'en soit le but (refroidissement d'installations industrielles, irrigation, eau potable, évacuation des eaux, etc.). Son rendement devrait être analogue à celui de la taxe hydraulique, soit 127 millions d'euros par an environ.

Les recettes propres de l'établissement, qui correspondent à ses redevances domaniales et à ses péages auraient dû représenter 46,7 millions d'euros en 2021, mais elles ne devraient atteindre que 35,8 millions d'euros en raison de la crise sanitaire et économique provoquée par la pandémie de Covid-19.

Le montant perçu au titre des redevances domaniales devrait ainsi reculer de 2,5 millions d'euros , en raison de mesures adoptées pour soutenir le tourisme fluvial , et le produit des péages diminuer de 8,4 millions d'euros en raison d'un moindre usage du réseau et de l'effet de mesures décidées par VNF pour préserver le tissu économique de la voie d'eau pendant la crise.

2. VNF va pouvoir investir massivement sur son réseau en 2021 grâce notamment aux crédits du plan de relance

Plusieurs épisodes de crues survenues ces dernières années ont mis en évidence les fragilités du vieillissant réseau de voies navigables géré par VNF, avec notamment la rupture d'une digue sur le Loing en 2016.

Un audit réalisé par le cabinet MENSIA et le bureau d'études ARCADIS a en effet montré que les investissements réalisés ces dernières années en matière de voies navigables avaient été très insuffisants .

Il fait ainsi état d'un besoin d'investissement de 245 millions d'euros par an pendant dix ans 16 ( * ) , dont 120 millions d'euros pour le réseau à grand gabarit .

La programmation des investissements dans les transports prévoit que l'État doit augmenter les crédits de l'AFITF consacrés à la régénération et à la modernisation du réseau fluvial pour atteindre en moyenne 110 millions d'euros par an entre 2019 et 2022 puis 130 millions d'euros par an entre 2023 et 2027. L'objectif visé est d'atteindre un montant d'investissement total moyen de 190 millions d'euros par an, en prenant en compte également les capacités d'investissement propres de VNF et les cofinancements des collectivités territoriales.

De fait, les subventions d'investissement de l'AFITF à VNF devraient représenter 113 millions d'euros en 2020 soit une hausse de 23 millions d'euros (+ 25,6 %) par rapport aux 90 millions d'euros de 2019. Cette forte augmentation, bienvenue, devrait permettre à l'établissement d'investir 214 millions d'euros dans son réseau , contre 174,5 millions d'euros en 2019 ce qui permettrait de progresser vers une véritable remise en état et une régénération du réseau , en dépit du ralentissement des travaux provoqués par le premier confinement..

Surtout, les rapporteurs spéciaux se félicitent que 175 millions d'euros soient prévus dans le cadre du plan de relance pour anticiper la réalisation d'environ 160 projets portés par VNF. L'établissement investirait ainsi 268 millions d'euros dès 2021, soit 54 millions d'euros de plus qu'en 2020.

Ces moyens supplémentaires bénéficieront à des travaux sur des écluses de petit gabarit (Saône, Canal de la Marne au Rhin, Marne...) mais également sur le réseau grand gabarit, notamment les écluses de Jaulnes et de Villiers-sur-Seine situées sur la Seine amont, ou encore celle d'Amfreville sur la Seine aval.

Parmi les projets destinés à moderniser le réseau, peuvent être cités la télégestion des prises d'eau et des stations de pompage sur le Rhin pour le grand gabarit, ainsi que la généralisation sur le petit gabarit de l'automatisation des écluses (Canal de la Meuse) et de la télégestion (Canal du Rhône au Rhin, Petite Saône).

VNF prévoit enfin de rénover des barrages, considérés comme vétustes et qui fragilisent ses installations face à des phénomènes climatiques extrêmes : la Saône et la Moselle sur le grand gabarit, le Canal de Bourgogne, le Canal du Centre et le Canal latéral à la Loire pour le petit gabarit.

PROGRAMME 355
« CHARGE DE LA DETTE DE SNCF RÉSEAU
REPRISE PAR L'ÉTAT »

A. LA SITUATION FINANCIÈRE DE SNCF RÉSEAU A ÉTÉ ASSAINIE GRÂCE À LA REPRISE DE 25 MILLIARDS D'EUROS DE DETTE PAR L'ÉTAT EN 2020, 10 MILLIARDS D'EUROS SUPPLÉMENTAIRES DEVANT ÊTRE REPRIS EN 2022

Au 31 décembre 2018, la dette financière nette de SNCF Réseau en valeur de remboursement hors ICNE 17 ( * ) représentait environ 48,2 milliards d'euros , soit 3 milliards d'euros de plus qu'au 31 décembre 2017.

Cette dette, dont l'État était largement responsable, générait 1,5 milliard d'euros de frais financiers annuels, grevant les comptes de l'entreprise et obérant toute perspective de redressement économique et financier.

Lors de la discussion du projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire, l'État s'était engagé à reprendre 35 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau dans le cadre de la transformation de l'opérateur en société anonyme à capitaux publics .

La première partie de cette reprise de dette est intervenue au 1 er janvier 2020 et portait sur une somme de 25 milliards d'euros .

Une seconde reprise de dette - à hauteur de 10 milliards d'euros - interviendra ensuite au 1 er janvier 2022.

Pour éviter que cette dette ne se reconstitue, il est demandé à l'établissement de réaliser des efforts de productivité supplémentaires de l'ordre de 380 millions d'euros en 2026 , portant ainsi le gain de productivité à mettre en oeuvre à plus de 1,6 milliard d'euros en 2026 .

Simultanément, la nouvelle trajectoire d'évolution des péages des activités commerciales (fret et TGV), dont les chroniques d'indexation seront ramenées au niveau de l'inflation générale des prix (IPC) , devrait permettre de faire circuler davantage de trains.

Enfin, SNCF Réseau bénéficiera du renforcement de la règle d'or 18 ( * ) prévue par la loi pour un nouveau pacte ferroviaire.

B. 692 MILLIONS D'EUROS SONT PRÉVUS EN 2021 AU TITRE DES CHARGES D'INTÉRÊT DE LA DETTE DE SNCF RÉSEAU DÉJÀ REPRISE PAR L'ETAT

Les crédits du programme 355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » correspondent aux charges d'intérêt résultant de la reprise par l'État de la première tranche de 25 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau.

Après amortissement de 1,7 milliard d'euros de principal en 2020, la structure des engagements en cours début 2021 est présentée ci-dessous, par type d'emprunt (tableau) et par année d'amortissement du principal (graphique).

Ventilation par catégorie d'emprunts de la dette de SNCF Réseau reprise
par l'État (encours résiduels en milliards d'euros début 2021)

Emprunts à taux fixes
(Md €)

21,1

90,7 %

Emprunts à taux variables (Md €)

1,2

5,1 %

Emprunts indexés sur l'inflation
(Md €)

1,0

4,2 %

Total

23,3

100 %

Source : rapport annuel de performances pour 2021

Le taux d'intérêt moyen début 2021 est de 3,17 % pour les emprunts à taux fixe et de 1,95 % pour les emprunts indexés sur l'inflation .

Ventilation par année d'échéance du principal de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État (encours début 2021)

Source : Agence France Trésor (AFT)

Pour les emprunts à taux variable et pour ceux indexés sur l'inflatio n, la prévision de dépense pour 2021 est fondée sur les mêmes hypothèses de taux d'intérêt et d'inflation que pour la dette émise par l'État .

Sur la base de ces paramètres, la prévision de dépense pour 2021 , qui correspond aux crédits retracés par le programme 355 , est présentée dans le tableau ci-dessous.

Charges d'intérêt par catégorie d'emprunt en 2021

(en millions d'euros)

Emprunts à taux fixes

672

Emprunts à taux variables

1

Emprunts indexés sur l'inflation

19

Total

692

Source : rapport annuel de performances pour 2021

Le montant des crédits évaluatifs portés par le programme 355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » en 2021 est ainsi de 692 millions d'euros , contre 408,8 millions d'euros prévus en 2020.

Le coût total pour l'État lié à la reprise de la dette de SNCF Réseau s'élèvera en 2021 à environ 2,0 milliards d'euros , dont 0,7 milliard d'euros de charge d'intérêts et 1,3 milliard d'euros de remboursement de principal .

PROGRAMME 205
« AFFAIRES MARITIMES »

La France possède le deuxième domaine maritime le plus vaste du monde, avec plus de 5 000 kilomètres de côtes et 10 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive (ZEE) , dont 97 % outre-mer .

L'économie maritime, souvent qualifiée d'« économie bleue », était à l'origine en 2016 de 289 311 emplois directs 19 ( * ) , hors tourisme littoral et emplois indirects, ce qui représente environ 1,5 % de la population active française , et 71,9 milliards d'euros de PIB .

La création d'un ministère de la mer , dont les attributions sont définies par le décret n° 2020-789 du 20 juillet 2020, apparaît comme un signal d'une plus grande prise en compte du caractère stratégique des affaires maritimes pour l'avenir de notre pays.

Le programme 205 « Affaires maritimes » porte les crédits budgétaires qui financent l'action maritime de l'État dans ses différentes dimensions : sécurité maritime, protection de l'environnement, formation des gens de mer, soutien au pavillon français, etc.

Dans cette perspective, il s'appuie sur les directions interrégionales de la mer (DIRM) et directions de la mer en outre-mer , ainsi que sur les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) .

Il finance également l'enseignement professionnel maritime : lycées professionnels maritimes, École nationale supérieure maritime (ENSM), bourses des élèves, etc.

Évolution des crédits du programme 205 entre 2020 et 2021, et exécution 2019

(en euros)

Exécution 2019

LFI 2020

PLF 2021

Variation
2021 / 2020

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

01- Sécurité et sûreté maritimes

30 508 887

30 029 235

34 525 091

33 104 392

32 096 313

32 666 582

-7,0 %

-1,3%

02- Gens de mer et enseignement maritime

25 317 247

25 119 730

26 914 150

26 918 259

26 960 041

26 658 259

+1,7%

-1,0 %

03- Flotte de commerce

82 513 865

82 513 865

81 120 000

81 120 000

79 506 372

79 506 372

-2,0 %

-2,0 %

04- Action interministérielle de la mer

19 854 293

10 793 543

11 082 196

13 727 764

9 366 105

13 196 516

-15,5 %

-3,9 %

05- Soutien au programme

9 240 442

8 873 992

6 140 891

6 141 913

7 277 160

7 370 792

+18,5 %

+20,0 %

Total programme 205

167 434 733

157 330 364

159 782 328

161 012 328

155 205 991

159 398 521

-2,9 %

-1,0 %

Source : projet annuel de performances pour 2021

La dotation du programme en 2021 s'établit à 155,2 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 159,4 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Il devrait donc connaître l'an prochain une baisse de 4,6 millions d'euros (-2,9 %) de ses AE et une diminution de 1,6 million d'euros (- 1,0 %) de ses CP .

Le programme 205 est caractérisé par un fort taux de dépenses contraintes et inéluctables , puisque 70 millions d'euro s environ correspondent au fonctionnement technique et opérationnel des services des affaires maritimes, y compris le maintien en conditions opérationnelles des équipements tandis que 79,5 millions d'euros correspondent aux exonérations de charges sociales pour les marins.

Selon le directeur des affaires maritimes, entendu par les rapporteurs spéciaux, le programme 205 devrait se voir appliquer en 2021 une réserve de précaution de 3 % de ses crédits hors titre 2 (masse salariale), soit 5,7 millions d'euros en AE et en CP, un niveau légèrement supérieur à celui de 2019 (4,5 millions d'euros en AE et 4,3 millions d'euros en CP). À noter que le programme ne bénéficie pas de mesure de dégel automatique prévue par la lettre plafond.

A. LA SÉCURITÉ ET LA SÛRETÉ MARITIME VERRONT LEURS CRÉDITS PORTÉS PAR LE PROGRAMME 205 DIMINUER EN 2021, MAIS CETTE BAISSE SERA PLUS QUE COMPENSÉE PAR L'APPORT DE CRÉDITS DU PLAN DE RELANCE

L'action 01 du programme 205 est dédiée à la sécurité et à la sûreté maritimes , qui sont des missions régaliennes par excellence.

En vertu des conventions internationales de l'Organisation maritime internationale (OMI) relatives à la sauvegarde de la vie humaine en mer et à la prévention des pollutions marines, la France est tenue d'exercer un triple rôle en matière de sécurité et de sûreté maritimes :

- elle vérifie la bonne application des normes internationales à bord des navires français en tant qu'État du pavillon ;

- elle contrôle les navires de commerce étrangers qui font escale dans les ports français en tant qu'État du port ;

- elle garantit la sécurité des routes de navigation le long des côtes françaises en tant qu'État côtier .

Regroupant 20,7 % des crédits du programme , l'action 01 est dotée de 32,1 millions d'euros d'autorisation d'engagement (AE) et de 32,7 millions d'euros de crédits de paiement (CP) pour 2021, soit une baisse de 2,4 millions d'euros (- 7,0 %) des crédits en AE et de 0,4 million d'euros (- 1,3 %) en CP . A ces crédits budgétaires devraient toutefois venir s'ajouter 3,0 millions d'euros de fonds de concours .

Une somme de 13,1 millions d'euros en AE et de 13,3 millions d'euros en CP, en baisse respectivement de 2,8 millions d'euros en AE et de 1,2 million d'euros en CP par rapport à 2020, sera consacrée à la signalisation maritime , c'est-à-dire au fonctionnement courant et technique des 6 100 phares et balises situés en métropole comme en outre-mer ainsi qu'au service de l'armement des phares et balises (APB) , service à compétence nationale (SCN) basé à Quimper.

La flotte de 35 baliseurs dont dispose l'État possède un âge moyen de 30 ans . Le plan de modernisation des affaires maritimes prévoit par conséquent de remplacer 17 unités par 9 navires polyvalents , performants tant sur le plan technique que sur le plan environnemental. Un navire a déjà été livré début 2020.

Les opérations de renouvellement de la flotte des affaires maritimes , habituellement financées par les crédits du programme 205 « Affaires maritimes » se poursuivront en 2021, mais grâce aux crédits du plan de relance .

L'action 06 « Mer » du programme « « Écologie » de la mission « Plan de relance » prévoit en effet que 25 millions d'euros sur les deux années 2021 et 2022 - une somme sans précédent - seront consacrés au renouvellement de la flotte de contrôle et de balisage de l'État (voir supra ).

6,5 millions d'euros en AE et 6,9 millions d'euros en CP sont prévus pour financer la surveillance du trafic maritime réalisée par les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) 20 ( * ) , notamment les systèmes de radiocommunications , les moyens radars ainsi que différents outils tels que Marylin (qui permet de conduire et de planifier les opérations de recherche et de sauvetage en mer ainsi que la recherche de pollutions) et Spationav (outil de surveillance du trafic maritime commun à l'ensemble des gardes côtes).

À noter que l'action 07 « Infrastructures et mobilité vertes » du programme « Écologie » prévoit 25 millions d'euros sur les deux années 2021 et 2022 en faveur des infrastructures vieillissantes des CROSS (voir supra ).

En 2019, la subvention du ministère à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) , association reconnue d'utilité publique qui participe au sauvetage en mer 21 ( * ) avait augmenté pour la troisième année consécutive jusqu'à atteindre 6,2 millions d'euros (AE=CP), contre 2,3 millions d'euros en 2015. La dotation de l'État avait de nouveau fortement augmenté de 73,0 % en 2020 pour atteindre 10,7 millions d'euros .

Ce montant de 10,7 millions d'euros (AE=CP) sera renouvelé en 2021 pour accompagner l'association dans le renouvellement de la flotte : il sera donc destiné exclusivement au financement de ses investissements , et non de son fonctionnement courant.

Il s'agit là d'une mesure conforme aux préconisations de la mission d'information du Sénat sur le sauvetage en mer , qui avait plaidé pour u n geste fort de l'État dans son rapport d'octobre 2019 intitulé « Sauvetage en mer : replacer les bénévoles au coeur de la décision » 22 ( * ) .

1,8 million d'euros (AE=CP) sera consacré en 2021 aux 16 centres de sécurité des navires , chargés du contrôle des navires au titre de l'État du pavillon et de l'État du port.

B. LA STABILITÉ DES CRÉDITS DE FORMATION ET DES ACTIONS EN FAVEUR DES GENS DE MER DOIT ACCOMPAGNER LES EFFORTS D'AMÉLIORATION DE LA GESTION DE L'ÉCOLE NATIONALE SUPÉRIEURE MARITIME (ENSM)

L'action 02 « Gens de mer et enseignement maritime », qui rassemble 17,4 % des crédits du programme 205, regroupe 27,0 millions d'euros en AE et 26,7 millions d'euros en CP consacrés à la formation des gens de mer (marine marchande, pêches maritimes, cultures marines, plaisance professionnelle) et au développement de l'emploi maritime . Les crédits de cette action sont quasiment stables par rapport à 2020 .

Sur cette enveloppe, la formation secondaire des gens de mer , dispensée dans les douze lycées professionnels maritimes (LPM) ainsi que dans les centres agréés en outre-mer qui préparent aux métiers de la pêche et à quelques métiers du transport maritime, bénéficie de 5,5 millions d'euros de crédits.

La formation supérieure , pour sa part, est assurée par l'École nationale supérieure maritime (ENSM) , établissement public créé en 2010, situé sur quatre sites (Le Havre, Saint-Malo, Nantes et Marseille) et qui prépare aux carrières d'officier de la marine marchande et délivre le titre d'ingénieur .

La subvention pour charges de service public versée à l'ENSM s'élève à 18,25 millions d'euros en 2021, soit une somme identique à celle de 2020 . Cette subvention finance à plus de 80 % la masse salariale de l'opérateur, qui représente 232 équivalents temps plein travaillés (ETPT) sous plafond et 16 ETPT hors plafond .

La Cour des comptes dans l'insertion de son rapport public annuel 2018 intitulée « L'École nationale supérieure maritime : un avenir à clarifier », avait estimé que la réforme ayant abouti à la création de l'ENSM avait été mal conduite , que la gouvernance de l'école n'était pas satisfaisante et que le maintien de l'école sur quatre sites était trop coûteux .

Pour répondre à ces critiques, l'ENSM s'est réorganisée sur deux sites principaux (Le Havre et Marseille), ne conservant que des antennes sur les sites de Saint-Malo et de Nantes . Les services de direction sont désormais regroupés sur le site du Havre et une profonde refonte de la gouvernance interne de l'École est en train d'être mise en oeuvre.

Parmi les autres mesures financées par l'action 02, 220 000 euros sont consacrés à la formation continue des gens de mer, afin de couvrir la rémunération d'environ 250 stagiaires et de 1 250 mois de stage de formation continue .

Les actions sociales et médicales menées par la direction des affaires maritimes en faveur des gens de mer (aides aux élèves boursiers, services de santé, etc.) sont financées à hauteur de 1,75 million d'euros par les crédits de l'action 02.

C. LES EXONÉRATIONS DE CHARGES PATRONALES EN FAVEUR DU TRANSPORT MARITIME SERONT STABLES EN 2021 POUR SOUTENIR UN SECTEUR QUI FAIT FACE À UNE TRÈS FORTE CONCURRENCE AU NIVEAU MONDIAL

Dans le contexte de la mondialisation, l'action 03 « Flotte de commerce » vise à soutenir le secteur du transport maritime français , confronté à une concurrence internationale exacerbée, en finançant des allègements de cotisations sociales patronales des entreprises d'armement maritime françaises.

Comme le montre l'objectif 2.2 du programme 205, l'objectif du Gouvernement est de parvenir à stabiliser la flotte de transport sous pavillon français , qui a connu une lente érosion ces dernières années, autour de 14 000 marins français et 300 navires .

Dans cette perspective, l'action 03 regroupe 51,2 % des crédits du programme 205 , soit 79,5 millions d'euros (AE=CP), un montant légèrement inférieur de 1,6 million d'euros à celui de 2020.

Les armateurs continueront donc à bénéficier l'an prochain de l'application de la loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l'économie bleue qui était venue élargir le périmètre des exonérations de charges sociales patronales des entreprises d'armement maritime relatives à la famille et à l'assurance chômage : elle l'avait étendu aux entreprises exploitant des navires de transport de fret et de service alors qu'elles étaient jusqu'alors réservées aux navires de transport de passagers .

Au total, les crédits de l'action 03 pour 2021 comprennent à ce stade :

- la compensation pour 43,3 millions d'euros (AE=CP), contre 41,7 millions d'euros en 2020, à l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM) de l'exonération des cotisations sociales patronales maladie, vieillesse et accidents du travail pour les marins des navires battant pavillon français soumis à titre principal à une concurrence internationale effective, en application de l'article 10 de la loi n° 2005-412 du 3 mai 2005 relative à la création du registre international français (RIF) ;

- les compensations à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et à Pôle emploi des exonérations de cotisations sociales patronales relatives à la famille et à l'assurance chômage des marins des navires à passagers bénéficiant de l'article 10 de la loi n° 2005-412 précitée, pour un montant de 28,4 millions d'euros contre 30,6 millions d'euros en 2020 ;

- le remboursement à la Compagnie générale maritime et financière (CGMF) à hauteur de 7,8 millions d'euros (AE=CP), contre 8,8 millions d'euros en 2020, des charges spécifiques de retraite et d'accident du travail des personnels sédentaires de l'ancienne Compagnie générale maritime (CGM) , privatisée en 1996. Le nombre des pensionnés relevant de ce régime en extinction baisse chaque année d'une centaine de personnes .

D. DES CRÉDITS EN FAVEUR DE L'ACTION INTERMINISTÉRIELLE DE LA MER QUI RETROUVENT LEUR NIVEAU HABITUEL APRÈS UN PIC D'INVESTISSEMENTS EN 2019

L'action 04 « Action interministérielle de la mer » regroupe 9,4 millions d'euros en AE et 13,2 millions d'euros en CP, des montants en baisse de 1,8 millions d'euros en AE (-15,5 %) et de 0,7 million d'euros en CP (- 3,9 %) par rapport à 2020.

Ces crédits, qui représentent désormais 6,2 % des crédits du programme 205 , sont consacrés à l'action civile de l'État en mer (AEM) , au dispositif POLMAR terrestre (lutte contre les pollutions maritimes accidentelles) et à la plaisance .

L'action de l'État en mer (AEM) , dotée de 7,1 millions d'euros en AE et de 11,0 millions d'euros en CP, regroupe notamment les crédits dédiés au fonctionnement technique du dispositif de contrôle et de surveillance des activités maritimes (police des pêches, de la navigation, de la sécurité des navires, des épaves, de l'environnement) et ceux relatifs à la surveillance des pêches dans les zones des terres australes et antarctiques françaises (TAAF) .

Dans le cadre de la quatrième année de mise en oeuvre du plan de modernisation, l'année 2021 verra la transformation d'un nouveau patrouilleur pour la Manche et le paiement du patrouilleur de 40 mètres pour la Méditerranée engagé en 2019.

1,4 million d'euros en AE et 1,5 millions d'euros en CP, soit un niveau légèrement supérieur à celui de 2020, sont consacrés au fonctionnement de POLMAR-Terre et à l'amélioration des outils de lutte contre la pollution (mise en place de barrages flottants, nettoyage du littoral, stockage et transport des déchets).

430 000 euros , contre 460 000 euros en 2020, sont allouées aux dépenses de plaisance (délivrance des titres de navigation, constitution d'un registre unique d'immatriculation des navires), la France comptant 5 millions de plaisanciers réguliers .

L'action 05 « Soutien au programme » regroupe 7,3 millions d'euros en AE et 7,4 millions d'euros en CP (AE=CP), contre 6,2 millions d'euros (AE=CP) en 2020, soit 4,7 % des crédits du programme 205 , qui permettent d'assurer le financement des dépenses de fonctionnement des services déconcentrés des affaires maritimes de l'administration centrale de la direction des affaires maritimes : fonctionnement courant et immobilier des sièges, formation des agents, frais de mission, etc. La légère hausse observée cette année s'explique par des dépenses en matériel ou système informatique, principalement dans les services déconcentrés.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative du Gouvernement, un amendement minorant de 4 055 922 euros les autorisations d'engagement (AE) et les crédits de paiement (CP) du programme 203 « Infrastructures et services de transports » de la mission « Écologie, développement et mobilités durables ».

Cet amendement visait à tirer les conséquences d'un autre amendement qui a accru les crédits du programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » de ce même montant de 4 055 922 euros en AE et en CP, afin de rehausser la dotation de décentralisation allouée à l'Eurométropole de Strasbourg en compensation du transfert par l'État du réseau routier national non concédé sur son territoire.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 18 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a procédé à l'examen des rapports de Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial, sur les programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie » et « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et le compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) », de MM. Hervé Maurey et Stéphane Sautarel, rapporteurs spéciaux, sur les programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », et de M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial, sur le programme « Expertise, information géographique et météorologie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

M. Claude Raynal , président . - Je vous propose d'entendre d'abord les rapporteurs présenter les trois rapports spéciaux que nous devons examiner. Nous aurons ainsi une vision globale pour entamer notre discussion. Nous commençons par l'examen de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Mme Christine Lavarde , rapporteur spécial sur les programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie » et « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables », de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et le compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) » . - Je ne pourrai malheureusement pas aborder le rapport dans le détail et je me concentrerai sur ses points saillants, afin de susciter le débat et d'éventuelles questions.

Tout d'abord, il me semble important de souligner que, si les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » sont en hausse, celle-ci s'opère en trompe-l'oeil, sous l'effet de plusieurs changements de périmètre. Les crédits augmentent de 7,08 milliards d'euros, ce qui est significatif, notamment en raison de la budgétisation des charges de service public de l'énergie, auparavant retracées sur le compte d'affectation spéciale « Transition énergétique », ce qui apporte 6,6 milliards d'euros aux crédits de la mission. Par ailleurs, la budgétisation sur le programme 181 de l'ancien fonds « Barnier » augmente les crédits de 205 millions d'euros. Je vois plutôt d'un oeil positif cette budgétisation puisque, d'une part, cela donnera au Parlement les moyens de se prononcer sur les dépenses et plus seulement sur les recettes et, d'autre part, la dépense ne sera plus limitée, car il sera toujours possible de procéder à des ajustements en cours d'année. Enfin, la bascule du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) vers la prime de rénovation énergétique pour les ménages aux revenus intermédiaires financée par le programme 174, rapporte 350 millions d'euros à la mission. Une fois traités ces effets de périmètre, on constate que les crédits de paiement, hors transports, diminuent de 6 %, soit de 500 millions d'euros.

Ils diminuent notamment de 290 millions d'euros sur le programme 174, à la suite d'un durcissement des dispositifs de prime à la conversion et de bonus électrique. On observe aussi une baisse de 30 millions d'euros des prestations versées pour la suite de l'après-mines. Par ailleurs, les crédits diminuent au niveau du chèque énergie pour tenir compte d'une absence d'encaissement des chèques émis l'an dernier, alors que la précarité énergétique n'a sans doute pas diminué dans la période que nous venons de vivre. Les crédits du programme 345 sont aussi en baisse, au titre de la révision des conditions d'achat des contrats photovoltaïques, une question sur laquelle nous reviendrons, car un article a été ajouté à l'Assemblée nationale. Enfin, on observe une diminution de 37 millions d'euros sur le programme 181, avec une baisse de la subvention versée à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), ce qui interroge, notamment sur la question des ressources humaines.

En effet, les ressources humaines du ministère sont en diminution, ce qui pourrait entraîner des difficultés, notamment dans le cadre de la mise en oeuvre du plan de relance. Plusieurs opérateurs - dont l'Ademe et l'Office français de la biodiversité (OFB) - nous ont signalé qu'il leur serait difficile de mettre en oeuvre les appels d'offres et de dépenser les crédits.

Je note que le programme « Paysages, eau et biodiversité » est le seul dont les crédits augmentent.

Je tiens à souligner que le Parlement a peu de prise sur la politique de l'énergie et je déplore notamment le fait que la programmation pluriannuelle de l'énergie, validée par un décret publié en avril 2020, n'ait toujours pas fait l'objet d'un débat devant le Parlement, comme cela est prévu par le code de l'énergie. Concernant cette politique, je souhaite attirer votre attention sur plusieurs points qui pourraient créer des difficultés dans les années à venir.

Tout d'abord, je tiens à signaler l'apparition d'une sorte de bulle sur la filière biométhane, dont les charges évoluent de manière très significative puisqu'elles ont été multipliées par cinq entre 2019 et 2021, par deux entre 2020 et 2021. Par ailleurs, je note que les charges du photovoltaïque représentent 50 % des charges des énergies renouvelables (EnR) en 2021. Enfin, d'importants moyens sont consacrés au développement de l'hydrogène. En effet, en plus des 7 milliards d'euros prévus par le plan de relance, des dispositifs soutiennent le développement des filières EnR. En 2018, 100 millions d'euros seulement étaient consacrés à l'hydrogène et, dans la presse, certains se demandent s'il s'agit vraiment de l'Eldorado de demain. Il ne faudrait pas mettre trop de moyens et créer encore une nouvelle bulle, sur laquelle nous aurions à revenir dans quelques années.

Au sujet du soutien à la décarbonation de l'économie, je tiens à rappeler qu'il est perfectible. Certes, le chèque énergie est un bien meilleur dispositif que les anciens tarifs de première nécessité pour l'électricité et tarif spécial solidarité gaz, mais nous devons faire davantage. En effet, si l'on envoie des chèques et que le taux d'encaissement n'est toujours pas de 100 %, cela démontre un déficit certain de communication.

Sur la disparition du CITE qui interviendra au 31 décembre 2020, mon avis est partagé puisque cela entraîne à la fois une baisse des niveaux des aides et une dotation supplémentaire dans le cadre du plan de relance pour l'élargissement des bénéficiaires de la prime.

Enfin, concernant l'acquisition des véhicules propres, deux dispositifs sont en place dans le cadre du programme 174 : le bonus et la prime à la conversion, pour lesquels 507 millions d'euros sont prévus et auxquels viendront s'ajouter 732 millions d'euros du plan de relance. Si les critères du bonus se sont assouplis, ceux de la prime à la conversion restent trop restrictifs. Ainsi, les ménages les plus modestes, même en cumulant les dispositifs à leurs taux maximum, auront un reste à charge représentant une année de revenu fiscal de référence par part. Cela n'encouragera pas au verdissement du parc automobile, et je plaide pour une plus grande souplesse des dispositifs.

Sur cette mission, l'articulation sera complexe avec le plan de relance qui prévoit 33 milliards d'euros pour l'écologie. L'Ademe sera chargée d'une partie de la mise en oeuvre, avec des effectifs en diminution. Elle devra donc recruter des contractuels, qui ne resteront que dix-huit mois, quand le plan de relance s'étend sur deux ans. Il y aura donc un moment où l'on aura de l'argent, mais personne pour suivre les dossiers.

M. Claude Raynal , président . - Nous passons à présent à l'examen des programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État », présentés par Hervé Maurey et Stéphane Sautarel.

M. Hervé Maurey , rapporteur spécial sur les programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » . - Le budget que l'État consacrera aux transports terrestres en 2021 est exceptionnel à bien des égards. En effet, ce secteur a été parmi les plus sévèrement affectés par la crise sanitaire et économique provoquée par la covid, en particulier lors du confinement du printemps 2020, qui a entraîné une chute inédite des déplacements sur le territoire.

Les effets économiques sur les opérateurs sont très sévères. Ainsi, le groupe SNCF a accusé une perte de chiffre d'affaires de 4,9 milliards d'euros à la fin de l'été 2020, les sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA) affichent 2 milliards d'euros de pertes, et Île-de-France Mobilités (IDFM) déplore 2,6 milliards d'euros de moindres recettes à l'issue du premier confinement.

Cette crise sans précédent est intervenue quelques mois à peine après la promulgation de la loi d'orientation des mobilités (LOM), laquelle prévoyait pour la première fois une programmation financière pluriannuelle pour les infrastructures de transport, portant sur la période 2018-2027. Cette programmation nous permettait enfin de disposer d'une feuille de route validée par le Parlement dans un domaine stratégique pour notre avenir.

Au coeur de cette programmation figurait la nécessité absolue de régénérer et de moderniser nos grands réseaux structurants - routier, ferré et fluvial -, indispensables aux transports du quotidien et depuis trop longtemps victimes de sous-investissement chronique.

La LOM prévoit en effet que l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), par laquelle transite la majeure partie des crédits destinés aux infrastructures de transport dans notre pays, soit dotée de 13,4 milliards d'euros sur la période 2018-2022, pour investir dans les infrastructures de transport.

Nous avons la conviction que la crise sanitaire et économique actuelle ne doit surtout pas conduire à renoncer à cette feuille de route, mais au contraire en accélérer la mise en oeuvre. Nous comptons à cet égard sur le plan de relance pour permettre la réalisation effective des objectifs de la LOM.

Les recettes de l'Afitf ont été très sévèrement touchées par les effets de la crise sanitaire, les recettes d'écocontribution du transport aérien ayant notamment été réduites à néant. Cependant, ses dépenses devraient atteindre 2,9 milliards d'euros en 2020, soit un montant quasi conforme à ce que prévoit la LOM, grâce à une subvention de 250 millions d'euros votée lors du troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2020, ainsi qu'à une plus grande mobilisation du produit des amendes radar prévue dans le quatrième PLFR pour 2020.

M. Stéphane Sautarel , rapporteur spécial sur les programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » . - Nous devions recevoir, au plus tard le 1 er octobre, un rapport sur les recettes de l'Afitf en 2020, prévu par l'article 60 de la troisième loi de finances rectificative (LFR3) pour 2020. Ce rapport nous aurait permis de faire un point exhaustif sur la situation de cet opérateur, mais il ne nous a toujours pas été transmis, bien que nous l'ayons demandé à plusieurs reprises à la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM). Nous tenons à dire ici que cette situation n'est pas admissible et qu'elle nuit gravement à la qualité du contrôle que nous sommes en mesure d'exercer sur cette agence.

Malheureusement, et pour les mêmes raisons, le budget de l'Afitf pour 2021 nous est également largement inconnu. Les éléments très parcellaires qui nous ont été transmis à ce stade laissent à penser que le Gouvernement a bien l'intention de respecter la trajectoire fixée par la LOM, avec 2 782 millions d'euros de dépenses. Nous avons bien noté que le ministre chargé des transports, Jean-Baptiste Djebbari, s'y est engagé la semaine dernière lors de son audition par la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Toutefois, il paraît déjà clair que les recettes destinées à financer ces dépenses - elles prévoient toujours, par exemple, 230 millions d'euros d'éco-contribution du transport aérien - ne sont pas crédibles, compte tenu de la poursuite de la crise sanitaire.

C'est la raison pour laquelle nous proposerons au Sénat d'adopter un amendement à l'article 24 du projet de loi de finances, visant à relever de 1 285 millions d'euros à 1 685 millions d'euros, soit 400 millions d'euros supplémentaires, le plafond de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) affecté à l'Afitf en 2021.

La TICPE est, en effet, une recette fiable sur laquelle l'Agence pourra compter de façon certaine. Si la situation est meilleure que ce que nous craignons, et que les autres recettes de l'Afitf sont perçues en tout ou partie, il sera toujours possible de réajuster à un niveau plus bas le plafond de la TICPE dans le collectif budgétaire de fin de gestion 2021.

À périmètre constant, les crédits du programme 203, qui financent principalement les services de transport, augmenteront fortement en 2021, de 18,8 % en autorisations d'engagement (AE), et de 7,9 % en crédits de paiement (CP), pour atteindre 3 722,8 millions d'euros. La subvention allouée à SNCF Réseau augmentera de 80 millions d'euros, et 170 millions d'euros pérennes sont prévus pour relancer durablement le fret ferroviaire.

M. Hervé Maurey , rapporteur spécial . - Les crédits de l'ancien compte d'affectation spéciale (CAS) « Services nationaux de transports conventionnés de voyageurs », destinés au financement des trains d'équilibre du territoire (TET), sont rebudgétisés au sein du programme 203, à compter du présent projet de loi de finances pour 2021. Leur montant diminue de 6,3 %, pour s'établir à 293 millions d'euros, ce qui s'explique en partie par le transfert de certaines de ces lignes aux régions.

Le plan de relance prévoit une mobilisation financière sans précédent en faveur des infrastructures et mobilités vertes, avec notamment 650 millions d'euros pour le ferroviaire - petites lignes, trains de nuit, infrastructures multimodales de fret -, 900 millions d'euros pour les mobilités alternatives à la voiture - vélos, transports en commun -, 550 millions d'euros pour compléter les crédits de l'Afitf en faveur des infrastructures, 250 millions d'euros pour la modernisation du réseau routier national (RRN), 100 millions d'euros pour les ponts ou encore 175 millions d'euros pour le verdissement des ports.

Ces sommes sont considérables, encore faudra-t-il qu'elles puissent effectivement être dépensées en 2021 et 2022 pour avoir un véritable effet contracyclique et que les effectifs des opérateurs chargés des travaux soient suffisants.

En outre, nous serons très attentifs à ce que ces crédits du plan de relance viennent bien s'ajouter et non pas se substituer aux montants déjà prévus par la LOM.

Quelques mots précisément sur les trois grands opérateurs qui relèvent du programme 203 : SNCF Réseau, la Société du Grand Paris (SGP) et Voies navigables de France (VNF).

Le groupe SNCF, considérablement fragilisé par la crise sanitaire, devrait bénéficier d'une recapitalisation de 4,05 milliards d'euros d'ici à la fin de l'année 2020 ou début 2021, dont le montant sera immédiatement transféré à SNCF Réseau. Sur cette somme, 2,3 milliards d'euros devraient être directement dévolus au rétablissement de l'investissement annuel de régénération des voies, 1,5 milliard d'euros correspondent aux investissements relatifs à la fin de l'utilisation du glyphosate sur les voies, la sécurisation des ponts et les investissements de sécurité nécessaires et 300 millions d'euros devraient être dédiés aux petites lignes.

M. Stéphane Sautarel , rapporteur spécial . - Nous serons très attentifs à ce que SNCF Réseau reçoive bien tous les financements dont l'entreprise a besoin pour poursuivre la modernisation du réseau structurant. Il s'agit là, en effet, d'une des principales priorités décidées par le Parlement dans le cadre de la LOM.

En ce qui concerne la dette de l'opérateur, l'État a repris, en 2020, 25 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau, afin d'améliorer la situation financière de l'entreprise, et 1,7 milliard d'euros de principal devrait avoir été amorti d'ici à la fin de l'année 2020.

En 2021, l'État devrait amortir 1,3 milliard d'euros de principal et s'acquitter de 692 millions d'euros de charge d'intérêt, cette dernière somme étant retracée par le programme 355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État ». De plus, 10 milliards d'euros de dette supplémentaire de SNCF Réseau seront transférés à l'État en 2022.

La Société du Grand Paris, chargée de construire pour 35,6 milliards d'euros le Grand Paris Express, a vu ses chantiers ralentis par la crise sanitaire, si bien que, compte tenu des retards préexistants, il paraît désormais impossible de mettre en service le système complet composé des tronçons des deux lignes 16 et 17 pour les jeux Olympiques (JO) et les jeux Paralympiques (JOP) de 2024, contrairement à l'objectif fixé par le Premier ministre, le 22 février 2018.

Une expertise indépendante doit venir confirmer dans le détail ce qui pourra ou non être réalisé à cette date. Nous serons très attentifs à ce que la SGP réalise dans les temps tout ce qui pourra l'être, sans dérives de coûts supplémentaires.

Comme l'ont montré nos collègues, membres du groupe de travail sur les coûts et le financement du Grand Paris Express, dans leur communication du 14 octobre dernier, les entreprises franciliennes, elles aussi durement touchées par la crise économique, expriment aujourd'hui un véritable ras-le-bol fiscal, à la suite des diverses hausses de taxes affectées à la SGP en 2019 et en 2020.

Dans ce contexte, l'objectif prioritaire de l'opérateur doit être de sécuriser ses financements de long terme en souscrivant des Green bonds sur les marchés pour bénéficier des taux exceptionnellement bas. Il y là, selon le président du directoire que nous avons entendu, des gisements d'économie potentiels très significatifs pour le projet.

Par ailleurs, la poursuite de la hausse des effectifs de la SGP, qui passeront de 585 équivalents temps plein travaillé (ETPT), en 2020, à 875 ETPT en 2021, va incontestablement dans le bon sens, compte tenu de l'ampleur des enjeux techniques et financiers à maîtriser.

L'établissement Voies navigables de France (VNF) continue à consentir d'importants efforts de réduction de ses personnels, avec 99 ETPT en moins en 2021, ce qui suscite des inquiétudes, de nombreuses installations nécessitant des interventions humaines.

Grâce aux crédits du plan de relance et de l'Afitf, VNF va pouvoir investir massivement pour remettre à niveau le réseau dont il a la charge. Selon nos informations, 160 projets ont déjà été identifiés. Tout l'enjeu va résider dans la capacité de l'établissement à les mener de front sur les seules années 2021 et 2022.

M. Hervé Maurey , rapporteur spécial . - Nous en venons enfin au programme 205 « Affaires maritimes » qui joue un rôle économique et social important et porte des fonctions régaliennes essentielles, la France disposant du deuxième domaine maritime le plus vaste du monde, avec plus de 5 000 kilomètres de côtes et 10 millions de kilomètres carrés de zones économiques exclusives (ZEE), dont 97 % en outre-mer.

La création d'un ministère spécifiquement chargé de la mer vise à montrer que l'État entend enfin consacrer davantage d'attention à ce domaine stratégique pour l'avenir de notre pays.

La dotation du programme, en 2021, s'établit à 155,2 millions d'euros en AE et 159,4 millions d'euros en CP, en baisse de 2,9 % en AE et de 1 % en CP. Comme les années précédentes, le poste budgétaire essentiel de ce programme concerne les exonérations de cotisations sociales patronales pour la marine marchande, vitales pour le pavillon français dans un contexte de concurrence mondiale exacerbée.

Toutefois, la sécurité et la sûreté maritime bénéficieront de crédits importants dans le plan de relance, puisque 25 millions d'euros sont prévus pour moderniser les infrastructures des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (Cross), ainsi que 25 millions d'euros pour renouveler la flotte de baliseurs, avec un projet de navire à hydrogène qui nous laisse, pour le coup, un peu sceptiques quant à sa rapide réalisation.

En conclusion, et en dépit des critiques que nous avons émises sur l'opacité de l'Afitf et sur les incertitudes qui pèsent sur ses recettes, nous sommes favorables aux crédits des programmes 203, 205 et 355 que nous vous avons présentés, et nous appelons par conséquent à adopter les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

M. Claude Raynal , président . - Vincent Capo-Canellas va nous présenter le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » et le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

M. Vincent Capo-Canellas , rapporteur spécial . - Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, comme vient de le préciser le président, je vous présenterai pour ma part le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie », ainsi que le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

Le programme 159 regroupe, depuis 2017, les subventions pour charges de service public du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et de Météo-France.

Si les trois opérateurs du programme se sont vu signifier, par le Gouvernement, des trajectoires financières très exigeantes d'ici à 2022, elles ont le mérite de rompre avec le manque de visibilité pluriannuelle dont ils souffraient jusqu'ici. Elles sont cependant difficiles à tenir.

Concernant Météo-France, qui joue un rôle essentiel pour la sécurité des personnes et des biens face à la multiplication des événements climatiques extrêmes, comme nous l'avons encore vu récemment avec les inondations de la vallée de la Roya, la subvention pour charges de service public portée par le programme 159 va diminuer, en 2021, pour s'établir à 185,1 millions d'euros. Dans le même temps, ses effectifs baisseront de 95 ETPT, un mouvement qui se poursuivra l'année prochaine.

Le réseau territorial évolue fortement dans le cadre du programme Action publique 2022. Ses effectifs vont diminuer de 40 %, de nombreuses activités étant regroupées dans la Métropole de Toulouse. Cette centralisation est rendue possible par les évolutions scientifiques et technologiques, qui permettent désormais de conduire un certain nombre de tâches météorologiques à distance. Une centralisation diversement vécue dans les territoires.

Pour rester un opérateur météorologique de rang mondial, Météo-France se procure actuellement un nouveau supercalculateur qui permettra de multiplier par 5,45 sa capacité de calcul. Un investissement important, qu'il conviendra de renouveler régulièrement. Ce nouveau matériel nécessite un investissement total de 144 millions d'euros sur la période 2019-2025. L'État versera, à ce titre, 8,3 millions d'euros de subvention à l'opérateur en 2021.

Si l'IGN voit sa subvention pour charges de service public augmenter légèrement en 2021, passant à 89,2 millions d'euros, ses effectifs seront en baisse, avec une suppression de 36 ETPT. Alors que son modèle économique est sévèrement fragilisé par l'avènement de l' open data , l'objectif de cet établissement, dans le cadre du programme Action publique 2022, est de devenir l'opérateur interministériel unique en matière de données géographiques souveraines.

Le Cerema, pour sa part, cherche à se réinventer dans un contexte où ses moyens diminuent fortement depuis sa création en 2014 et diminueront encore jusqu'en 2022, au rythme d'une réduction annuelle de 5 millions d'euros de sa subvention pour charges de service public - qui atteindra 195,1 millions d'euros en 2021 - et de 87 ETPT, le plafond d'emplois de l'opérateur sera de 2 507 ETPT en 2021.

Le principal enjeu pour cet opérateur consiste à mettre en oeuvre une collaboration beaucoup plus étroite avec les collectivités territoriales, ainsi qu'avec l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) en cours de création. Le projet stratégique que porte son directeur général devrait lui permettre d'y parvenir, si nous veillons à lui laisser les marges de manoeuvre financières dont il aura besoin en 2022 pour ne pas être confronté à de sévères difficultés.

J'en viens à présent au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (Bacea), qui porte les 2,3 milliards d'euros de crédits de la direction générale de l'aviation civile (DGAC). Il est exclusivement financé par le secteur du transport aérien. En conséquence, l'effondrement du trafic aérien provoqué, à partir de mars 2020, par la pandémie de la covid-19, a bouleversé son équilibre financier.

La crise sanitaire a en effet entraîné une quasi mise à l'arrêt du trafic aérien en Europe au printemps 2020. En dépit d'une légère reprise pendant l'été, la situation s'est rapidement dégradée à l'automne, avant de redevenir catastrophique avec l'instauration de nouveaux confinements, en fin d'année. Au total, la DGAC anticipait un recul du trafic de 65 % par rapport à 2019, mais les chiffres finaux devraient être encore plus négatifs ; au mois de novembre, les estimations évoquent 15 % de trafic. Le retour du trafic à son niveau d'avant-crise est désormais attendu pour 2024, au mieux, certaines hypothèses évoquant même la date de 2029. Les variables étant l'évolution de la pandémie et la création d'un vaccin.

La mise en place de tests a commencé. Mais ils doivent être validés par les pays de départ et d'arrivée, et permettre l'entrée sur les territoires - cela existe déjà avec les États-Unis. Une possibilité que les aéroports ont tenté de promouvoir avec les compagnies, dont la mise en place suppose des corridors sanitaires. Ces tentatives doivent être soutenues, même si elles n'auront que très peu d'impact sur le trafic.

Les compagnies aériennes françaises, déjà fragiles avant la crise, pourraient enregistrer 4 milliards d'euros de pertes en 2020. Après avoir apporté une aide massive à Air France-KLM de 7 milliards d'euros au printemps, l'État va probablement devoir intervenir d'ici à la fin de l'année, l'hypothèse d'une recapitalisation étant désormais largement évoquée pour sauver la compagnie nationale. Ce chiffre de 7 milliards d'euros se décompose comme suit : un prêt bancaire garanti par l'État, à hauteur de 90 %, pour 4 milliards d'euros et un prêt d'actionnaires réalisé par l'État, pour 3 milliards d'euros. La presse d'hier, notamment Le Monde , a diffusé d'autres informations, qui ne sont pas toujours communiquées spontanément.

Dans cette conjoncture exceptionnellement difficile, les recettes de la DGAC devraient s'effondrer de 80 %, en 2020. Pour construire son budget 2021, la direction s'est fondée sur un trafic inférieur de moins 30 % à celui de 2019, mais cette prévision paraît déjà caduque, et les 1 509,7 millions d'euros espérés hors de portée. Les recettes des diverses taxes perçues par la DGAC pour le compte de tiers - taxe de solidarité, taxe d'aéroport, taxe sur les nuisances sonores aériennes - ont également drastiquement diminué.

Si nous analysons le rebond du trafic en Asie, nous pouvons avoir quelques lueurs d'espoir, même si les prévisions restent aléatoires. Bien malin, celui qui peut parier sur l'ampleur du rebond attendu en matière de recettes. La prudence s'impose donc.

Les performances de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA), encadrées par le droit européen dans le cadre du plan de performance RP2, restent insuffisantes, alors que va débuter, dans un contexte profondément altéré par la pandémie de la covid-19, la nouvelle période RP3.

Si le taux de la redevance de route est compétitif, les retards dus au contrôle aérien demeuraient trop élevés en 2019, en raison de l'obsolescence des équipements et de l'inadéquation de l'organisation du travail des contrôleurs aériens aux nouvelles caractéristiques du trafic. Cette année, bien évidemment, le retard sera considérablement réduit.

Pour mobiliser les équipes de la DSNA autour d'un projet ambitieux, il pourrait être utile de prévoir la conclusion d'une forme de contrat, analogue aux contrats d'objectifs et de performance (COP) des établissements publics, qui viendrait formaliser des objectifs précis et chiffrés pour que la direction soit à même de pleinement accompagner le trafic le jour où il repartira.

Comme en 2020, le schéma d'emplois 2021 de la DGAC ne prévoit aucune suppression d'emploi, ce qui est logique, sachant que le nombre de contrôleurs est insuffisant et qu'il faut cinq ans pour les former. Sa masse salariale diminuera légèrement de 6,2 millions d'euros, pour atteindre 932,6 millions d'euros. Compte tenu du contexte économique, les négociations du protocole 2020-2024 ont été suspendues, si bien que 1,6 million d'euros est prévu au titre des mesures catégorielles.

Pour accélérer la réalisation de ses grands programmes de modernisation des outils de la navigation aérienne, dont elle a profondément revu la gouvernance cette année, suite à la publication de mon rapport, la DGAC augmentera de nouveau, en 2020, son effort d'investissement pour le porter à 317 millions d'euros. Sur cette somme, 140,6 millions d'euros sont consacrés aux grands programmes de modernisation précédemment cités, dont le coût total, régulièrement revu à la hausse, représente 2 140,9 millions d'euros. L'échéance est comme l'horizon, toujours plus lointaine.

Faire enfin aboutir ces programmes doit constituer une priorité pour la DSNA, car, avant la crise, elle manquait chaque année un peu plus de capacités pour faire passer le trafic.

Compte tenu de l'effondrement de ses recettes, l'endettement de la DGAC serait susceptible de progresser de 1,4 milliard d'euros en 2020, pour atteindre l'encours sans précédent de 2,1 milliards d'euros, contre un maximum historique de 1,3 milliard d'euros atteint en 2014.

À ce stade, la DGAC estime qu'elle devra emprunter 761 millions d'euros supplémentaires en 2021, et 463 millions d'euros en 2022. Sur la base de ces hypothèses, le niveau de dette pourrait atteindre un pic à 2,8 milliards d'euros, au 31 décembre 2022.

Si je ne peux que saluer la volonté de la DGAC de désendetter le plus rapidement possible le Bacea, je suis très sceptique quant à sa réalisation effective, tant la soutenabilité de ce budget me paraît désormais menacée.

Ses recettes étant entièrement indexées sur le trafic aérien, la crise sans précédent de ce secteur - mais aussi l'instauration du travail à distance -, susceptible de se poursuivre pendant de longues années, pourraient durablement bouleverser le modèle économique sur lequel était fondé le financement de la DGAC. Par ailleurs, le bashing de la France sur le secteur aérien risque de lui coûter cher. Et lorsqu'un État ne soutient plus une industrie, celle-ci part s'installer à l'étranger.

C'est la raison pour laquelle il m'apparaît indispensable de réfléchir dès à présent aux solutions qui pourraient être envisagées pour éviter que ne s'installe une situation problématique qui verrait un budget annexe porter une dette toujours plus importante, qu'il deviendrait incapable de rembourser grâce aux recettes d'un secteur du transport aérien trop durablement affaibli.

En dépit de ces inquiétudes pour l'avenir, et de la quasi-certitude qu'il faudra autoriser à nouveau le Bacea à souscrire des emprunts complémentaires en 2021, à l'occasion de collectifs budgétaires, je souhaite que la commission propose au Sénat d'adopter les crédits du budget annexe.

Les opérateurs du programme 159 font l'objet de baisses de leurs subventions pour charges de service public et d'effectifs exigeantes, mais j'ai le sentiment que les stratégies mises en place par leurs directions respectives sont robustes.

Je suis donc favorable à l'adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Je conclurai en évoquant l'article 54 septies rattaché au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », qu'il me revient de vous présenter et que je vous propose d'adopter.

D'abord, j'insisterai sur l'importance qu'il y a soutenir les aéroports, qui vont avoir besoin de mesures financières complémentaires.

Ensuite, cet article prévoit que le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la baisse des recettes de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) induite par la crise liée à l'épidémie, ainsi que sur ses conséquences sur le financement des aides à l'insonorisation des bâtiments situés à proximité de chaque aéroport concerné.

Les recettes de cette taxe sont en effet très affectées par la crise sanitaire provoquée par la covid-19, puisqu'elles sont estimées, en 2020, à moins de 20 millions d'euros seulement, contre 54,3 millions d'euros initialement prévus - soit une baisse de 65 % - , à 37,6 millions d'euros en 2021, contre 54,6 millions d'euros initialement prévus - soit une baisse de 31 %.

Sur la seule période 2020-2021, la perte de financement pour le dispositif d'aide à l'insonorisation des riverains est ainsi estimée à l'équivalent d'une année de recettes de la TNSA. En conséquence, 35 millions d'euros devraient faire défaut pour mener à bien la politique d'insonorisation prévue pour l'année 2020 et 17 millions d'euros devraient manquer en 2021.

Le rapport prévu par l'article 54 septies , qui sera remis quatre mois après la promulgation du présent projet de loi de finances pour 2021, doit permettre de faire le point sur les difficultés engendrées par cette baisse sans précédent des recettes de la TNSA sur l'insonorisation des logements des riverains des aéroports et proposer des solutions directement opérationnelles.

Ce n'est pas la mesure idéale, mais ne pouvant nier qu'il existe bien un sujet, l'Assemblée nationale a trouvé cette formule afin de le maintenir en discussion. Nous devrons ensuite nous interroger sur les suites que nous pourrons proposer demain.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Je saluerai tout d'abord les interventions des rapporteurs spéciaux, qui nous permettent de mesurer les enjeux de la mission, et le travail qu'ils ont d'ores et déjà accompli.

Christine Lavarde, comment interprétez-vous la baisse des crédits de la mission, à périmètre constant ? Je m'inquiète de voir ces crédits diminués, dans un domaine pour lequel le Gouvernement affiche de grandes ambitions.

Par ailleurs, s'agissant de VNF, le retard pris dans la modernisation du réseau est considérable. J'ai bien entendu la volonté du Gouvernement de développer, notamment dans le cadre du plan de relance, les voies navigables et d'élaborer un grand projet structurant.

Vous avez par ailleurs indiqué que 160 projets avaient été identifiés. L'ambition de les conduire dans un temps court vous paraît-elle à portée de budget et donc susceptible d'être réalisée ?

Enfin, concernant le Cerema - un outil souvent méconnu, alors que très utile dans l'aide à la décision, notamment des collectivités locales -, où en sommes-nous, par rapport au schéma d'emplois, quant à sa capacité de continuer à produire avec efficacité rapports et études ? Comment se passe l'articulation, par exemple, avec l'ANCT ?

M. Antoine Lefèvre . - Je voudrais également remercier nos rapporteurs spéciaux pour leur travail.

Je suis inquiet du constat établi par Vincent Capo-Canellas concernant notamment l'obsolescence des équipements de la navigation aérienne ; nous parlons là de la sécurité aérienne. Pouvons-nous évaluer à partir de quelle date, ou de quel niveau de sous-équipement ou non-renouvellement d'équipements, les problèmes de sécurité deviendront inquiétants ?

Compte tenu des perspectives financières indiquées dans le rapport, si un plan d'urgence sur la sécurité aérienne n'est pas mis en place, nous pourrons être sérieusement inquiets quant aux respects des règles de sécurité.

S'agissant de l'urgence qu'il y a à moderniser notre réseau routier non concédé - pour beaucoup l'utiliser, je sais à quel point il est fortement dégradé -, une application, dont je ne citerai pas le nom, nous permet de signaler les dégradations de voiries. D'après l'une de leurs études, nous connaissons aujourd'hui l'état du réseau national, qui est assez édifiant, de sorte que nous pouvons également nous inquiéter des problèmes de sécurité que posent ces dégradations, notamment lorsque nous connaissons les sommes prévues en matière d'investissement.

Enfin, concernant le projet du Grand Paris Express, j'ai bien entendu que les objectifs de mises en service ne seront pas atteints pour les Jeux Olympiques et paralympiques de 2024. Cependant, une partie de ces liaisons seront-t-elles finalisées pour 2024 ? Je rappelle qu'il s'agissait d'un élément essentiel dans le dossier présenté par la France.

M. Sébastien Meurant . - Je regrette une fois encore la difficulté que nous avons, notamment en tant que rapporteurs spéciaux, à obtenir des informations que le Gouvernement et l'administration sont pourtant tenus de nous livrer.

Concernant le canal Seine-Nord Europe, un chantier à plusieurs milliards d'euros, qu'il a fallu défendre devant la Cour des comptes européenne, avez-vous de nouvelles informations à nous livrer ?

Enfin, qu'en est-il, concernant le fret ferroviaire, de cette fameuse ligne qui devrait relier Perpignan à Rungis en train de nuit ?

M. Jean-François Rapin . - Ma question concerne l'article 54 sexies résultant d'un amendement du Gouvernement relatif au photovoltaïque. N'y a-t-il pas là un sujet particulier, de fond, qui n'est pas forcément financier ?

Que l'État puisse revenir sur des contrats signés il y a une vingtaine d'années n'est pas, selon moi, un message sympathique et incitatif envoyé à tous ceux qui pourraient, dans le futur, vouloir investir dans les énergies renouvelables. C'est aussi choquant que la possibilité qui existerait, pour une société d'assurance ou une banque, de revenir sur un contrat d'assurance ou un prêt bancaire. Lorsque ces contrats ont été établis, des études ont été réalisées et nous savions tous que le prix serait élevé. Mais il s'agissait d'une volonté de rendre ces engagements incitatifs.

Le rapport précise que les petits contrats, les contrats précaires, ne sont pas concernés ; mais pourquoi ne le seraient-ils pas demain, une fois cette jurisprudence appliquée aux contrats plus importants ?

M. Claude Raynal , président . - Il s'agit en effet d'une question importante, et nous avons été nombreux à être sollicités. Il s'agit d'un vrai enjeu de confiance dans la signature de l'État.

M. Marc Laménie . - Je remercie nos rapporteurs spéciaux pour leur travail, il est vrai que nous pourrions consacrer deux ou trois jours à l'ensemble de ces rapports.

Concernant les agences de l'eau, quelles sont leurs perspectives ? De nombreux projets sont identifiés au niveau des communes en termes d'amélioration du réseau d'eau potable et d'assainissement - les stations d'épuration, notamment. Or nous constatons un désengagement financier de la part des agences ; qu'en est-il ?

L'État a repris, en 2020, 25 milliards d'euros de la dette de SNCF Réseau. Le programme 355 précise les taux d'intérêt ; l'un d'eux est de 3,17 %. Je suis surpris, car les taux ont largement baissé depuis quelque temps. Ces emprunts sont-ils anciens ?

Toujours concernant la SNCF, la suppression du compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transports conventionnés » entraînera-t-elle des économies ou un soutien actif, toutes les collectivités territoriales étant sollicitées pour financer les infrastructures ferroviaires, notamment les petites lignes ? Et quid des lignes capillaires du fret ?

S'agissant de VNF, je note une baisse permanente des effectifs, alors que le rapport précise bien que beaucoup d'installations sont tributaires des moyens humains.

M. Éric Bocquet . - L'Afitf est en partie financée par la taxe d'aménagement du territoire versée par les sociétés concessionnaires d'autoroutes, qui versent également une redevance domaniale ainsi qu'une contribution dite « volontaire ». Entre 2010 et 2019, leurs résultats ont augmenté, passant de 2,1 milliards d'euros à 2,6 milliards d'euros - avec des baisses certaines années, que je ne m'explique pas.

Avez-vous déjà une estimation de leurs résultats en 2020, le trafic autoroutier s'étant effondré depuis le premier confinement ? Les concessionnaires vous ont-ils informés du montant de leur participation financière au budget de l'Afitf ?

Je conclurai sur une citation du philosophe Alain : « Le pessimisme est d'humeur ; l'optimisme est de volonté. »

M. Michel Canevet . - Mes questions s'adressent à Christine Lavarde.

À la lecture de son rapport, j'ai eu le sentiment qu'elle remettait en cause les baisses d'effectifs dans les agences - Agence de l'eau, Ademe, OFB. Des agences souvent décriées, notamment pour leur manque d'opérationnalité. Mais finalement, ne pensez-vous pas qu'elles ne font que s'adapter à la politique de réduction de la dépense publique ?

Le rapport évoque également la question des zones non interconnectées (ZNI), en précisant qu'il va être procédé à une évaluation de la rentabilité des capitaux investis dans les actifs productifs. Cela veut-il dire que tout ce qui concerne la production d'énergie renouvelable sera analysé ? De fait, ces territoires ne seraient plus des espaces d'expérimentation du développement d'énergies renouvelables ? Si tel est le cas, est-ce à dire que les inquiétudes sont focalisées sur les nouvelles installations de production d'énergies renouvelables ?

Concernant la SNCF, des investissements importants sont prévus dans le plan de relance. Est-elle est en capacité de mettre en oeuvre rapidement les actions prévues dans ce plan - la réouverture d'un certain nombre de lignes, des remises aux normes, l'amélioration du système de signalisation, etc. ?

S'agissant des questions maritimes, j'ai le sentiment que, dans les budgets qui nous sont proposés, l'effort sur la formation des marins, qu'ils soient destinés à la marine marchande ou à la pêche, est insuffisant, les crédits n'augmentant pas. Ai-je la bonne analyse ?

Ce manque de formation est préjudiciable pour le grand pays maritime qu'est la France, d'autant que ce secteur recèle des potentiels de développement importants. En ce qui concerne les ressources halieutiques, il est clair que si nous importons plus de la moitié des poissons que nous consommons, c'est bien parce que nous ne disposons plus de marins-pêcheurs.

Concernant le trafic transmanche, je n'ai pas le sentiment qu'il y ait, dans les budgets, de visibilité à long terme. Or aujourd'hui, le premier employeur de marins français est Brittany Ferries. Une compagnie importante pour les Hauts-de-France, la Normandie, la Bretagne, pour le désenclavement de la France, en général.

Cependant, comme dans le secteur aérien, les compagnies maritimes sont confrontées à la pandémie. Pouvons-nous entrevoir, dans les perspectives de crédits, des dispositifs qui leur permettraient de surmonter la crise ? Elles ont notamment contracté des prêts garantis par l'État (PGE) qu'elles devront rembourser.

Avec la création de l'ANCT, l'organisation actuelle du Cerema est-elle la bonne ou aurait-il fallu regrouper sous l'autorité de l'Agence un certain nombre de services d'État dont la mission est d'accompagner les collectivités dans l'ingénierie ?

Enfin, concernant le contrôle aérien, dont les difficultés ont été précisées, la DGAC profite-t-elle de l'atonie du trafic actuel pour engager les réformes qui sont indispensables et que nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer à travers les différents rapports de Vincent Capo-Canellas , au fil des ans ?

Mme Isabelle Briquet . - Concernant la budgétisation du fonds Barnier, dont il convient de saluer la hausse des moyens, n'existe-t-il pas un risque que ce dispositif devienne plus opaque, puisqu'il ne serait plus qu'une petite ligne dans une mission pesant plusieurs milliards d'euros ?

Quand bien même les crédits seraient stables, nous constatons, année après année, un affaiblissement des divers opérateurs, avec la poursuite des diminutions drastiques des effectifs du ministère de l'écologie. De sorte que nous imaginons mal comment mener une politique ambitieuse et efficace, pourtant clairement affichée.

M. Arnaud Bazin . - Je reviendrai sur la question de la régulation du transport aérien, puisque notre collègue Vincent Capo-Canellas nous a présenté un rapport, il y a quelques mois, indiquant que d'importants investissements avaient été réalisés dans l'outil informatique, mais que la production n'était pas à la hauteur, puisqu'aucun nouvel outil efficace n'est actuellement en service.

Quels sont les montants des crédits prévus pour 2021 pour poursuivre ces projets de modernisation des outils du contrôle aérien ?

Par ailleurs, des perspectives plus favorables pour aboutir à des outils réellement efficaces, lesquelles viendraient enfin couronner des années de travail et des centaines de millions d'euros investis, se dessinent-elles ?

M. Jean-Michel Arnaud . - Je remercierai tout d'abord les rapporteurs spéciaux pour le travail important qu'ils ont réalisé.

Concernant les infrastructures routières, le Premier ministre, par un décret du 14 août dernier, rend possible la privatisation de portions de routes nationales, afin notamment, dans le cadre d'accords avec des concessionnaires d'autoroutes, de réaliser des travaux que l'État n'est plus en capacité de financer.

Pouvez-vous nous donner plus d'informations sur cette question ? Avez-vous par ailleurs recueilli des éléments d'observation qui permettraient, dans les années à venir, de constater des mouvements financiers en ce sens ?

Mme Christine Lavarde , rapporteur spécial . - Le rapporteur général a raison : c'est un débat beaucoup plus philosophique. Les crédits du ministère baissent. Nous aurons certainement le débat en séance sur l'articulation entre le plan de relance et l'ensemble des missions.

Marc Laménie, concernant les agences de l'eau, si l'on observe un relèvement du plafond de recettes, c'est uniquement en raison de transferts, mais les moyens alloués restent les mêmes. Je n'ai pas entendu parler de tension. Par ailleurs, les agences se verront attribuer 300 millions d'euros dans le cadre du plan de relance, dont 250 millions d'euros en métropole, notamment pour les réseaux d'eau et la modernisation des stations d'assainissement.

Michel Canevet, sur la baisse des effectifs, les opérateurs participent déjà à l'effort. Par exemple, un onzième parc naturel a vu le jour l'année dernière sans faire l'objet d'une attribution d'effectifs ; une dotation de 1,5 million d'euros a été allouée au parc national de Forêts, créé en novembre 2019, permettant de financer ses dépenses de masse salariale (10 ETP/ETPT), de fonctionnement, d'intervention et d'investissement. Dans les agences de l'eau et au sein de l'OFB, un certain nombre de fonctionnaires exercent des missions de police - je pense aux agents de la police de l'eau, aux garde-chasses et autres. Si l'on excepte les agents de ces indispensables missions de contrôle, comme le contrôle des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), il reste les agents du ministère pour faire fonctionner les dispositifs.

J'ai également entendu certaines critiques venant du monde économique. Des entreprises, par exemple, ont avancé que la trésorerie pour les certificats d'économie d'énergie (CEE) et les remboursements effectués par le pôle CEE ont connu beaucoup de retard. Nous nous retrouvons aujourd'hui avec des opérateurs du bâtiment moins enclins à réaliser de nouvelles opérations, alors que tel est l'objet du plan de relance. Mon message est donc le suivant : on ne peut pas à la fois communiquer sur l'écologie, mettre des milliards partout, et ensuite ne pas déployer les moyens humains, avec les conséquences sur le tissu économique.

Par ailleurs, certains ministères sont très en retard par rapport au monde de l'entreprise. Quand Élisabeth Borne dit que tout le monde doit faire du télétravail, sachez que, au ministère de la transition écologique, à la fin de l'année 2019, 20 % seulement des agents disposaient d'un ordinateur portable ; en 2020, des progrès énormes ont été effectués, puisqu'ils sont désormais 75 %. Dans d'autres ministères, les agents ne peuvent pas raccorder leur imprimante personnelle à leur ordinateur. Nous voyons bien, dans ce domaine, tous les efforts qu'il reste encore à accomplir au sein de la fonction publique. Mais, dans ce rapport, mon sujet était la correspondance entre les moyens humains et les actions que nous souhaitons mettre en oeuvre.

Concernant l'outre-mer, un arrêté, publié l'année dernière, précise que le taux de rémunération des capitaux investis dans les projets spécifiques à l'outre-mer doit s'établir en fonction du lieu d'implantation et de la technologie utilisée. Jusqu'alors, le taux s'élevait à 11 %. Sauf que, dans ces projets, on trouvait des installation de natures très différentes. Par exemple, des installations de géothermie en Guadeloupe et des opérations de brûlage de déchets à La Réunion génèrent des risques très différents. Les zones d'implantation ne sont pas les mêmes non plus, avec des risques cycloniques à La Réunion, que l'on ne trouve pas à Mayotte. L'idée de cet arrêté est de permettre une rémunération plus juste.

Isabelle Briquet, sur le Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), budgeté sur la nouvelle action n° 14 du programme 181, la gestion sera, à mon sens, plus lisible pour le Parlement. Nous aurons désormais la main à la fois sur les recettes et les dépenses, alors que, auparavant, un montant de recettes était affecté, inférieur au montant collecté au titre des polices d'assurance puisqu'il était plafonné. Depuis 2016, les dépenses du fonds sont supérieures au montant de ses recettes. Sans un relèvement du niveau des recettes, le fonds n'aurait pas pu passer l'année. Une contribution entre désormais dans le budget de l'État, qu'il reverse chaque année au fonds ; cette année, le montant affecté est plus élevé. L'année prochaine, en loi de règlement, nous saurons précisément ce qui a été dépensé, nous gagnerons en lisibilité.

M. Stéphane Sautarel , rapporteur spécial . - Pour ce qui concerne Voies navigables de France (VNF) et sa capacité à réaliser les investissements, on peut en effet s'interroger sur la réalisation effective des travaux en 2021-2022. Pour rappel, après 175 millions d'euros en 2019 et 214 millions d'euros en 2020, 268 millions d'euros d'investissement sont prévus en 2021.

Un certain nombre de besoins paraissent évidents, notamment l'obsolescence de certains équipements sur des écluses ou des barrages. Des projets sont identifiés, mais la capacité à les mettre en oeuvre au cours de l'année 2021 reste encore clairement à démontrer.

Marc Laménie, la question de la baisse des effectifs de VNF s'inscrit dans le cadre d'une mutation assez profonde de cet établissement, notamment avec l'automatisation de certains dispositifs. Dans le prochain contrat d'objectifs et de performance (COP), le sujet devrait être abordé.

Antoine Lefèvre, concernant le Grand Paris Express, les lignes 16 et 17 ne seront pas livrées avant les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. En revanche, les lignes 15 Sud, 14 Nord et 14 Sud ne devraient pas voir leur calendrier bouleversé.

On recense aujourd'hui 130 chantiers actifs dans le cadre du Grand Paris Express. Les marchés de conception-réalisation ont permis, malgré les contraintes que nous connaissons, d'accélérer un certain nombre de ces travaux.

Michel Canevet, s'agissant de la formation maritime, les crédits sont stabilisés. Les lycées, notamment, conservent les mêmes moyens. Une réforme est engagée pour l'enseignement supérieur, avec un regroupement de sites et un siège basé au Havre, même si le plus important de ces établissements se situe à Marseille.

M. Hervé Maurey , rapporteur spécial . - Antoine Lefèvre évoquait son inquiétude par rapport au non-renouvellement des investissements dans le domaine aérien ; il peut étendre son inquiétude à l'ensemble de nos infrastructures, aussi bien dans les domaines ferroviaire, fluvial que routier. Concernant le domaine routier, on peut se réjouir de l'augmentation des crédits, notamment dans le cadre de la LOM, témoignant d'une volonté de régénérer les réseaux à laquelle on ne peut que souscrire. J'ajouterai aussi la question des ponts, d'autant plus en ce jour du triste anniversaire de l'effondrement du pont de Mirepoix.

Concernant le manque d'informations fournies par les services de l'État, je partage le mécontentement de Sébastien Meurant. Je souhaite insister en particulier sur l'attitude scandaleuse de l'Afitf. Lors de son audition, son secrétaire général a été incapable de répondre à nos questions. Même en remontant au niveau du ministère et du directeur général des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) nous n'avons pas obtenu davantage d'informations sur le budget de l'agence. Je le redis avec beaucoup de force et de véhémence : je suis scandalisé par ce manque de considération de l'État à l'égard du Parlement.

Marc Laménie, la suppression du compte d'affectation spéciale, quant à elle, tient à l'ouverture à la concurrence, qui ne permettait pas de conclure des contrats pluriannuels. Il s'agit donc d'une rebudgétisation et non d'une baisse des crédits conscacrés aux lignes d'aménagement du territoire.

S'agissant du taux des emprunts repris à SNCF Réseau, le dispositif est assez compliqué. Cela s'explique par le fait que, dans la dette reprise, se trouvent des emprunts historiques avec des taux élevés.

En ce qui concerne l'impact de la crise sur la fiscalité spécifique des sociétés concessionnaires d'autoroute, évoqué par Éric Bocquet, la perte s'élève à 90 millions d'euros sur les 560 millions d'euros de taxe d'aménagement du territoire. Par ailleurs, les sociétés concessionnaires d'autoroute auront à faire face à 2 milliards d'euros de recettes en moins.

Michel Canevet, concernant Brittany Ferries, l'aide de l'État est relativement modeste, de l'ordre de 30 millions d'euros, dont 15 cette année ; ce montant est complété par des garanties d'emprunts à hauteur de 117 millions d'euros. Par ailleurs, les régions Normandie et Bretagne ont apporté à Brittany Ferries un soutien complémentaire plus important que celui de l'État.

Au sujet de la privatisation des routes nationales, nous manquons d'informations. Je rappellerai ma position : je ne suis pas du tout favorable à la privatisation de voiries supplémentaires tant que les concessions seront aussi déséquilibrées. Les concessionnaires sont aujourd'hui dans une position très avantageuse, aussi bien sur le plan financier de la rentabilité que sur le plan juridique, où l'État a finalement assez peu de marges de manoeuvre - nous avons pu le constater en 2015 avec la suppression de l'augmentation des péages, dont le « rattrapage » a finalement coûté beaucoup plus cher aux automobilistes.

Un mot sur la ligne Perpignan-Rungis : le Premier ministre a annoncé une réouverture à l'été 2021.

M. Stéphane Sautarel , rapporteur spécial . - Au-delà de la question de la privatisation, nous avons senti une écoute attentive sur les offres des collectivités faisant acte de candidature pour intégrer, dans leurs réseaux, les routes nationales.

Sur l'Afitf, nous avons proposé un amendement montrant notre volonté - malgré le manque d'informations - d'équilibrer les risques de pertes de recettes qui existeront encore en 2021. Au-delà des 90 millions d'euros de la taxe d'aménagement du territoire, il y a surtout les 230 millions d'euros d'écocontribution du transport aérien perdus en 2020 et qui ne seront sans doute pas rétablis en 2021 ; d'où cet amendement, afin de proposer une augmentation de TICPE de 400 millions d'euros au profit de l'Afitf, de manière à garantir l'exécution des engagements et des travaux sur le ferroviaire ou le routier.

M. Vincent Capo-Canellas , rapporteur spécial . - S'agissant du Cerema, il est écrit dans le rapport : « La réduction des moyens du Cerema va se poursuivre au risque de menacer la soutenabilité financière de l'établissement . » Je pense que les choses sont clairement posées. Depuis 2018, la baisse du plafond d'emplois représente 100 ETPT par an pendant cinq ans, soit une chute de 17 % des effectifs sur la période et de 25 % entre 2015 et 2022.

Nous avons donc affaire à une saignée. Il y a des raisons budgétaires à cela, une volonté de rationalisation. Mais nous arrivons à l'os, c'est-à-dire au moment où l'outil lui-même est menacé. La baisse de la subvention, de l'ordre de 5 millions d'euros par an, va devenir difficile à supporter. On observe une fragilisation des compétences et une inquiétude sur l'investissement. En 2022, la subvention pour charge de service public sera inférieure de 9 millions d'euros aux charges de personnels. Il s'agit maintenant de stabiliser cette trajectoire.

Michel Canevet, concernant la relation entre le Cerema et l'ANCT, un projet de convention est actuellement en discussion. Une fusion n'est pas concevable, elle entraînerait de nouveaux traumatismes pour le Cerema qui, je le rappelle, est lui-même le résultat de la fusion de 11 entités. Un modèle économique est à construire, avec des flux financiers positifs vers le Cerema.

Au sujet de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA), s'agissant de l'obsolescence des équipements et de l'impact potentiel sur la sécurité, je veux, autant que possible, tranquilliser Antoine Lefèvre. Cette confiance se justifie par des personnels de très bon niveau et par la robustesse des matériels qui, à ce jour, n'est pas mise en cause. Cela dit, nous risquons de devenir les derniers d'Europe en termes de capacités si nous ne modernisons pas nos matériels. Des questions se posent quant à notre capacité à avoir des routes plus directes, ce qui permet de réduire la pollution. Le Gouvernement fustige le transport aérien pour son impact écologique, mais il fait peu de choses pour améliorer les trajectoires des avions, alors qu'elles dépendent de lui.

Arnaud Bazin, en 2021, sur un investissement total de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) de l'ordre 317 millions d'euros pour la DSNA, 140 millions d'euros seront consacrés aux grands programmes. Ces derniers se poursuivent, mais à un rythme trop lent, avec une garantie d'efficacité qui n'est pas apportée et une garantie de délais qui a volé en éclats depuis très longtemps. On pouvait espérer que les contrôleurs, profitant de cette période de moindre activité, seraient mobilisés pour des formations ; ce n'est pas le cas.

Un nouveau directeur général a été nommé à la DGAC ; le précédent, bible de l'aéronautique, avait dirigé cette maison pendant 12 ans. Aujourd'hui, il faut se poser la question de réformer la DGAC. Le nouveau directeur général a-t-il reçu un mandat pour le faire ? Cela reste un point d'interrogation. La réforme est difficile, car, singularité française, c'est une maison qui fait tout ; elle régule le contrôle aérien, vérifie, produit des normes, des services pour les compagnies... Est-ce le bon moment pour réformer ? Sans doute, car le trafic est moindre aujourd'hui ; en même temps, nous traversons une grave crise financière...

Article 33 (ÉTAT B)

M. Claude Raynal , président . - Nous devons nous prononcer sur un amendement de crédit qui porte sur 20 millions d'euros, au sujet des ponts.

M. Hervé Maurey , rapporteur spécial . - L'État lui-même a considéré que l'entretien des ponts nécessitait un budget de 120 millions d'euros. Avec les crédits supplémentaires du plan de relance, nous arrivons à peine à 100 millions d'euros ; d'où ce complément de 20 millions d'euros, déjà voté l'an dernier par le Sénat, sans résultat à l'Assemblée nationale. Le Gouvernement, à l'époque, considérait que nous étions à quelques dizaines de millions d'euros près ; aujourd'hui, comme nous ne semblons plus être à quelques centaines de milliards d'euros près, je suis certain que nous recevrons un avis favorable.

L'amendement n o II-3 est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sous réserve de l'adoption de son amendement.

Article 54 quinquies

Mme Christine Lavarde , rapporteur spécial . - Dans l'article 54 quinquies , l'Assemblée nationale a introduit une rationalisation de l'ensemble des dispositifs législatifs ayant trait au fonds Barnier, désormais rassemblés au sein d'un article unique du code de l'environnement. A également été introduite la possibilité de financer une expérimentation, visant le département des Alpes-Maritimes, pour laquelle un rapport est prévu dans trois ans. Ignorant si d'autres événements de ce type ne nécessiteront pas une mobilisation des crédits du fonds, je pense que l'on devrait commander un rapport d'étape plus tôt, pour le prochain PLF ; tel est le sens de cet amendement n o II-12 .

L'amendement n° II-12 est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption de l'article 54 quinquies , sous réserve de l'adoption de son amendement.

Article 54 sexies

Mme Christine Lavarde , rapporteur spécial . - L'article 54 sexies prévoit la remise en cause des contrats d'achat de l'électricité photovoltaïque signés sur la base des tarifs de 2006 et 2010 pour les installations de plus de 250 kilowatts. Il est indiqué un niveau de charge de services publics économisés de 2 milliards ; sauf qu'il s'agit d'un leurre, puisque les 2 milliards concernent l'ensemble des contrats.

Seuls 850 contrats seraient en fait visés par cette mesure : des contrats signés en métropole, entraînant des charges de services publics annuels de l'ordre de 737 millions d'euros. Quid , dès lors, des 200 contrats se trouvant en zones non interconnectées (ZNI) avec le territoire métropolitain et possédant les mêmes critères, à savoir plus de 250 kilowatts ? On croit également comprendre qu'un traitement individuel sera réservé pour chacun de ces 850 contrats, si les producteurs en font la demande. Aujourd'hui, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) prétend avoir besoin de huit équivalents temps plein (ETP) pour procéder à cet examen ; à titre personnel, je pense que deux peuvent largement suffire.

Par ailleurs, chacun pourra faire état de difficultés particulières, car, dans ce secteur économique, les contrats sont cédés aux exploitants. La personne ayant investi au moment de la signature n'est pas forcément celle qui est aujourd'hui l'exploitant. Les exploitants actuels ont acheté sur la base d'une perspective de rendement qui, sauf à imaginer une tempête qui emporterait les toits de France, était certaine ; on les pénaliserait donc aujourd'hui, alors que ceux qui ont empoché la rente ne seraient pas atteints.

Il y a donc un sujet financier - avec ces 2 milliards d'euros pour les seuls contrats signés avant 2011, qui représentent 0,5 % de la production - et aussi un problème de respect de la signature de l'État. On ne peut pas déposer un amendement à la dernière minute, de manière à éviter des sous-amendements, sans débat, sans analyse du Conseil d'État, sans étude d'impact, sur un sujet aussi important. Pour toutes ces raisons, je vous propose cet amendement n o 3 visant à supprimer l'article.

L'amendement n° II-28 est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat de supprimer l'article 54 sexies .

Article 54 septies

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption de l'article 54 septies sans modification .

La commission a décidé également de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) », ainsi que les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission tels que modifiés par son amendement. Elle a proposé d'adopter l'article 54 quinquies tel que modifié par son amendement. Elle a proposé également la suppression de l'article 54 sexies. Enfin, elle a proposé d'adopter l'article 54 septies sans modification, ainsi que les crédits du budget annexe et du compte d'affectation spéciale.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Ministère de la transition écologique et solidaire

Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM)

- M. Marc PAPINUTTI, directeur ;

- Mme Isabelle ANDRIVON, chef de service de l'administration générale et de la stratégie.

Direction des affaires maritimes (DAM)

- M. Thierry COQUIL, directeur.

Autorité de régulation des transports (ART)

- M. Bernard ROMAN, président.

Voies navigables de France (VNF)

- M. Thierry GUIMBAUD, directeur général ;

- M. Charles BELARD, directeur juridique, économique et financier ;

- Mme Muriel MOURNETAS, chargée des relations institutionnelles.

Société du Grand Paris

- M. Thierry DALLARD, président du directoire ;

- M. Frédéric BRÉDILLOT, membre du directoire.

Groupe SNCF

- M. Alain QUINET, directeur général délégué Économie Performance ;

- M. Laurent TREVISANI, directeur général délégué Stratégie Finances ;

- Mme Laurence NION, conseillère parlementaire.

Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF)

- M. Jean ABELE, Secrétaire général.


* 1 Par le décret n° 2004-1317 du 26 novembre 2004.

* 2 AFITF, Rapport d'activité 2015, octobre 2016.

* 3 La redevance domaniale est la redevance pour occupation du domaine publique prévue à l'article R. 122-48 du code de la voierie routière que les sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA) versent annuellement à l'État, pour une période comprise entre le 1 er juillet et le 30 juin.

* 4 Cette taxe est prévue à l'article 302 bis ZB du code général des impôts.

* 5 Les opérations sur le réseau routier concédé sont financées directement par l'AFITF sans transiter par le programme 203.

* 6 Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF).

* 7 Cet article dispose que « l'État supporte les frais de l'entretien et de l'exploitation des écluses d'accès, de l'entretien des chenaux d'accès maritime, de la profondeur des avant-ports et des ouvrages de protection contre la mer. Pour l'exécution de ces travaux, il supporte dans les mêmes conditions les dépenses relatives aux engins de dragage ».

* 8 Anciennement Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer).

* 9 Il s'agit de la régulation des redevances aéroportuaires, auparavant confiée à l'Autorité indépendante de supervision des redevances aéroportuaires (ASI).

* 10 Il s'agit d'une part du contrôle de l'accessibilité aux données concernant les déplacements multimodaux ainsi que des conditions de mise en oeuvre des services d'information et de billettique multimodales et, d'autre part, de la régulation des activités de gestionnaire d'infrastructure de la RATP.

* 11 La part des déplacements en voiture effectués par une personne seule est comprise entre 85 % et 90 % du trafic.

* 12 Rapport d'information n° 609 (2018-2019) de MM. Patrick CHAIZE et Michel DAGBERT, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 26 juin 2019

* 13 Dans un passé récent, l'État a clairement privilégié la construction de nouvelles lignes à grande vitesse (LGV), qui ont monopolisé les ressources financières, mais également les ressources humaines de SNCF Réseau et de ses sous-traitants.

* 14 Les ressources de la Société du Grand Paris, rapport du député Gilles Carrez, juillet 2018.

* 15 La taxe hydraulique, dont le rendement tendait à se réduire sous l'effet de la diminution du nombre de centrales thermiques et nucléaires d'EDF, principal redevable, et qui, de plus, voyait sa conformité au droit européen remise en cause dans le cadre de plusieurs contentieux, a été supprimée à compter du 1er janvier 2020 par la loi de finances pour 2019.

* 16 Parmi ces 245 millions d'euros par an, les trois cinquième correspondent à la seule gestion hydraulique du réseau, les deux cinquièmes restant correspondant aux investissements pour la navigation.

* 17 Intérêts courus non échus.

* 18 Ce dispositif prévu à l'article L.2111-10-1 du code des transports conditionne la possibilité pour SNCF Réseau de financer de nouveaux investissements ferroviaires à son niveau d'endettement apprécié au regard du ratio entre sa dette financière nette et sa marge opérationnelle.

* 19 D'après le cluster maritime français, données 2016, sur la base de chiffres 2015, 2014 et 2013.

* 20 Cinq CROSS sont situés en métropole et deux en outre-mer (Martinique et Réunion).

* 21 La SNSM dispose de 230 stations de sauvetage le long des côtes métropolitaines françaises. Elle s'appuie sur l'action de 70 salariés et 7 000 bénévoles. Sous la coordination des COSS, elle contribue à plus de la moitié des opérations de sauvetage en mer.

* 22 Rapport d'information n° 81 (2019-2020) du 22 octobre 2019 de M. Didier Mandelli, fait au nom de la mission commune d'information sur le sauvetage en mer.

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