Rapport général n° 138 (2020-2021) de M. Vincent CAPO-CANELLAS , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 novembre 2020

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N° 138

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2020

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 11c

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

(Programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie »)

BUDGET ANNEXE : CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS

Rapporteur spécial : M. Vincent CAPO-CANELLAS

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean Bizet, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 3360 , 3398 , 3399 , 3400 , 3403 , 3404 , 3459 , 3465 , 3488 et T.A. 500

Sénat : 137 et 138 à 144 (2020-2021)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

Sur le programme 159
« Expertise, information géographique et météorologie »

1) Le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » porte depuis 2017 les subventions pour charges de service public du Centre d'études et d'expertise pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Céréma) , de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et de Météo France .

2) Les trois opérateurs du programme se sont vus signifier par le Gouvernement des trajectoires financières difficiles mais claires d'ici 2022, qui ont le mérite de rompre avec le manque de visibilité pluriannuelle dont ils souffraient jusqu'ici.

3) La subvention pour charges de service public de Météo France va diminuer en 2021 à 185,1 millions d'euros . Dans le même temps, ses effectifs baisseront de 95 équivalents temps plein travaillé (ETPT) , mouvement qui devrait se poursuivre en 2022 .

4) Pour rester un opérateur météorologique de rang mondial , Météo France est en train de se procurer un nouveau supercalculateur qui permettra de multiplier par 5,45 sa capacité de calcul . Ce nouveau matériel nécessitera un investissement total de 144 millions d'euros sur la période 2019-2025 dans le cadre du projet « Calcul 2020 ». L'État versera à ce titre 8,3 millions d'euros à l'opérateur en 2021.

5) L'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) verra pour sa part sa subvention pour charges de service public augmenter légèrement en 2021 à 89,2 millions d'euros et ses effectifs perdre 36 ETPT . Alors que les recettes commerciales de l'IGN sont sévèrement fragilisées par l'avènement de l' open data, la réflexion sur les relais de croissance dont celui-ci pourrait bénéficier doit se poursuivre.

6) Le Céréma , pour sa part, cherche à se réinventer dans un contexte où ses moyens diminueront fortement jusqu'en 2022 , au rythme d'une réduction annuelle de 5 millions d'euros de sa subvention pour charges de service public (qui atteindra 191,1 millions d'euros en 2021) et de 87 ETPT de ses effectifs (le plafond d'emplois de l'opérateur est de 2 507 ETPT en 2021). S'il est clair que l'avenir de cet opérateur passe par une collaboration beaucoup plus intense avec les collectivités territoriales ainsi qu'avec l'Agence nationale de cohésion des territoires , l'exécutif devra veiller à lui allouer des moyens suffisants pour investir, car ses équipements scientifiques et techniques sont de plus en plus vétustes .

Sur le budget annexe
« Contrôle et exploitation aériens »

1) Le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) porte les 2,3 milliards d'euros de crédits de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) . Il est exclusivement financé par le secteur du transport aérien . En conséquence, l'effondrement du trafic aérien provoqué à partir de mars 2020 par la pandémie de Covid-19 a bouleversé son équilibre financier .

2 ) La crise sanitaire a en effet provoqué une quasi-mise à l'arrêt du trafic aérien en Europe au printemps 2020. En dépit d'une légère reprise pendant l'été , la situation s'est rapidement dégradée à l'automne , avant de r edevenir catastrophique avec la mise en place de nouveaux confinements en fin d'année. Au total, la DGAC anticipait un recul du trafic de - 65 % par rapport à 2019 , mais les chiffres finaux devraient être encore plus négatifs . Le retour du trafic à son niveau d'avant-crise est désormais attendu pour 2024 au mieux , certaines hypothèses évoquant même la date de 2029 .

3) Les compagnies aériennes françaises , déjà fragiles avant la crise, pourraient enregistrer 4 milliards d'euros de pertes en 2020 . Après avoir apporté une aide massive à Air France de 7 milliards d'euros au printemps , l'État va probablement devoir intervenir de nouveau en fin d'année , l'hypothèse d'une recapitalisation étant désormais largement évoquée pour sauver la compagnie nationale .

4) Dans cette conjoncture exceptionnellement difficile, les recettes de la DGAC devraient s'effondrer de - 80 % en 2020 . Pour construire son budget 2021, la direction s'est basée sur un trafic inférieur de - 30 % à celui de 2019 , mais cette prévision paraît déjà caduque et les 1 509,7 millions d'euros espérées hors de portée. Les diverses taxes perçues par la DGAC pour comptes de tiers (taxe de solidarité, taxe d'aéroport, taxe sur les nuisances sonores aériennes) ont également vu leurs recettes drastiquement diminuer .

5) Les performances de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA) , encadrées par le droit européen dans le cadre du plan de performance RP2, restent insuffisantes , alors que va débuter, dans un contexte profondément altéré par la pandémie de Covid-19, la nouvelle période RP3.

6) Si le taux de la redevance de route est compétitif , les retards dus au contrôle aérien demeuraient trop élevés en 2019 en raison de l'obsolescence de ses équipements et de l'inadéquation de l'organisation du travail des contrôleurs aériens aux nouvelles caractéristiques du trafic. Pour mobiliser les équipes de la DSNA autour d'un projet ambitieux , il pourrait être utile de prévoir la conclusion d'une forme de contrat , analogue aux contrats d'objectifs et de performance (COP) des établissements publics, qui viendrait formaliser des objectifs précis et chiffrés pour que la direction soit à même de pleinement accompagner le trafic le jour où il repartira.

7) Comme en 2020, le schéma d'emplois 2021 de la DGAC ne prévoit aucune suppression d'emplois . Sa masse salariale diminuera légèrement de 6,2 millions d'euros pour atteindre 932,6 millions d'euros . Compte-tenu du contexte économique, les négociations du protocole 2020-2024 ont été suspendues, si bien que 1,6 million d'euros sont prévus au titre des mesures catégorielles.

8) Pour accélérer la réalisation de ses grands programmes de modernisation des outils de la navigation aérienne dont elle a profondément revu la gouvernance cette année, la DGAC augmentera de nouveau en 2020 son effort d'investissement pour le porter à 317,0 millions d'euros . Sur cette somme, 140,6 millions d'euros sont consacrés aux grands programmes de modernisation précédemment cités , dont le coût total , régulièrement revu à la hausse, représente quelque 2 140,9 millions d'euros . Les faire enfin aboutir doit constituer une priorité pour la DSNA , car, avant la crise, elle manquait chaque année un peu plus de capacités pour faire passer le trafic.

9) Compte tenu de l'effondrement de ses recettes , l'endettement de la DGAC serait susceptible de progresser de 1,4 milliard d'euros en 2020 pour atteindre l'encours sans précédent de 2,1 milliards d'euros (contre un maximum historique de 1,3 milliard d'euros atteint en 2014).

10) A ce stade, la DGAC estime qu'elle devra emprunter 761 millions d'euros supplémentaires en 2021 et 463 millions d'euros de plus en 2022. Sur la base de ces hypothèses, le niveau de dette pourrait atteindre un pic à 2,8 milliards d'euros au 31 décembre 2022.

11) Si le rapporteur spécial ne peut que saluer cette volonté de la DGAC de désendetter le plus rapidement possible le BACEA , il ne saurait cacher son scepticisme quant à sa réalisation effective, tant la soutenabilité du BACEA lui paraît désormais menacée . Ses recettes étant entièrement indexées sur le trafic aérien , la crise sans précédent de ce secteur, susceptible de se poursuivre pendant de longues années , pourrait durablement bouleverser le modèle économique sur lequel était fondé le financement de la DGAC.

12) C'est pourquoi il lui apparaît indispensable de réfléchir dès à présent aux solutions qui pourraient être envisagées pour éviter que ne s'installe une situation problématique qui verrait un budget annexe porter une dette toujours plus importante qu'il deviendrait incapable de rembourser grâce aux recettes d'un secteur du transport aérien trop durablement affaibli .

Au 10 octobre 2020, date limite fixée par la LOLF, 92 % des réponses au questionnaire budgétaire étaient parvenues au rapporteur spécial .

PROGRAMME 159
« EXPERTISE, INFORMATION GÉOGRAPHIQUE
ET MÉTÉOROLOGIE »

Le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » regroupe depuis le projet de loi de finances pour 2017 les subventions pour charges de service public du Centre d'études et d'expertises pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Céréma) , de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et de Météo France 1 ( * ) .

De 2018 à 2020, les crédits dédiés au financement du soutien à l'économie sociale et solidaire (ESS) avaient également été placés dans ce programme, mais ils sont transférés à compter de 2021 vers le programme 305 « Stratégie économique et fiscale » de la mission « Économie » , dans la mesure où l'économie sociale et solidaire relève dorénavant du champ d'attribution du ministère de l'économie, des finances et de la relance.

I. EN DÉPIT DE LA CRISE SANITAIRE, MÉTÉO FRANCE INVESTIT ET CHERCHE À DÉVELOPPER SES RECETTES COMMERCIALES POUR CONFIRMER SA PLACE D'ACTEUR MÉTÉOROLOGIQUE DE RANG MONDIAL

Météo France, établissement public administratif de l'État, réalise des prévisions météorologiques et des travaux de recherche relatifs au changement climatique à destination des administrations publiques, des entreprises et du grand public.

Son rôle est particulièrement décisif en matière de sécurité météorologique des personnes et des biens , alors que les phénomènes météorologiques extrêmes (tempêtes, ouragans, cyclones, précipitations diluviennes, etc.) qui frappent le territoire français, en métropole comme en outre-mer, tendent à se multiplier , dans le contexte du réchauffement climatique.

1. Comme les années précédentes, la subvention pour charges de service public de Météo France diminuera en 2021, mais celle-ci comprendra bien une dotation dédiée au financement de son supercalculateur

La dotation de l'État versée à Météo France au titre du programme 159 , qui représente un peu moins de la moitié de ses recettes prévues en 2021, correspond à la compensation des missions de service public qui incombent à l'établissement :

- la fourniture d'informations permettant d'assurer la sécurité météorologique des personnes et des biens en avertissant les populations le plus en amont possible, dans un contexte où le territoire national est régulièrement frappé par des évènements climatiques extrêmes ;

- la conduite de travaux de recherches visant à améliorer les capacités de prévision et à mieux appréhender le changement climatique sur le long terme, afin de permettre à la société de mieux s'y adapter ;

- le soutien opérationnel aux forces armées et aux administrations de l'État en cas de crise.

Comme les années précédentes, la subvention pour charges de service public de Météo France diminuera significativement en 2021 de 4,7 millions d'euros à 185,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, contre 189,8 millions d'euros perçus en 2020.

Au sein de cette subvention, Météo France bénéficie d'une dotation dont le montant est fixé à 8,3 millions d'euros en 2021. Celle-ci est dédiée au financement des surcoûts liés à la mise en service d'un nouveau supercalculateur .

À noter que la subvention pour charges de service public de l'opérateur devrait de nouveau baisser en 2022, puisque le Gouvernement a prévu qu'elle devra avoir diminué au total de 20 millions d'euros en 2022 par rapport à 2017.

Selon le projet annuel de performances pour 2021, « 70 % du montant de la subvention de l'État est consacré aux dépenses de personnel et 30 % aux autres dépenses de fonctionnement et d'investissement ».

Le programme comprend deux sous-actions .

La première, « Observation et prévision météorologiques », regroupe 86,8 % des crédits de paiement de la subvention, soit 164,7 millions d'euros (AE=CP) , un montant inférieur de 4,2 millions d'euros aux 168,9 millions d'euros de 2020.

La seconde, « Recherche dans le domaine météorologique », rassemble 20,4 millions d'euros de crédits de paiement (AE=CP), soit 13,2 % des crédits, une somme inférieure de 500 000 euros à celle qui était prévue pour 2020.

En plus des dotations portées par le programme 159, Météo France bénéficiera également en 2021 de 3,9 millions d'euros versés par la direction générale de la prévention des risques à partir des crédits du programme 181 « Prévention des risques » pour participer à l'entretien du réseau d'observation hydro-météorologique (stations automatiques d'observation au sol, radars).

C'est également par le budget de l'opérateur que transite la subvention accordée par le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation au titre du programme 193 « Recherche spatiale » et correspondant à la part principale de la contribution de la France à l'organisme européen EUMETSAT. Cette subvention augmentera significativement en 2021 conformément aux échéanciers prévus au niveau européen, puisqu'elle passera de 51,1 millions d'euros en 2020 à 69,0 millions d'euros l'an prochain.

2. Les efforts de Météo France pour redresser ses recettes commerciales se poursuivent en dépit des difficultés provoquées par la pandémie de Covid-19

Face à la diminution tendancielle de la dotation de l'État, Météo France doit consolider ses ressources propres , à savoir la redevance de prestataire de services à la navigation aérienne et, surtout, ses ressources commerciales, dont le niveau reste perfectible en dépit de nets progrès récents.

Dans le cadre du Ciel unique européen (CUE), Météo France est le prestataire exclusif de l'assistance météorologique pour la navigation dans l'espace aérien sous juridiction française 2 ( * ) . Les 85,5 millions d'euros versés chaque année par la DGAC à Météo France sont indispensables à son budget .

Il convient du reste de noter qu'en dépit de la crise sans précédent que traverse depuis mars 2020 le transport aérien en raison de la pandémie de Covid-19, les services de Météo-France en faveur de la navigation aérienne , qui ne sont pas directement corrélés à l'intensité du trafic, ne doivent pas être remis en question .

Si l'opérateur devrait pouvoir compter sur cette recette en 2021 et dans les années suivantes, celle-ci n'aura en revanche pas vocation à augmenter et il doit donc s'en procurer de nouvelles.

Recettes commerciales de Météo France
de 2015 à 2020

(en millions d'euros)

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Recettes kiosque

6,1

5,4

4,1

3,4

2,3

1,7

Recettes publicitaires

4,7

4,6

4,9

7,0

7,3

8,0

Recettes professionnelles

19,1

19,1

20,7

21,3

22,0

23,0

Total chiffre d'affaires

29,9

29,2

29,7

31,8

31,6

29,5

Source : Météo France

Si le nombre d'utilisateurs des services téléphoniques (numéro 3250) va poursuivre son inexorable déclin dans les années à venir ( moins de 1,7 millions d'euros de recettes attendues en 2019 contre 13 millions d'euros en 2012, soit une baisse de - 86,9 % ), Météo France doit absolument relever deux grands défis .

Alors que ses recettes publicitaires avaient diminué jusqu'à représenter environ 4,5 millions d'euros par an entre 2013 et 2017, l'opérateur a mis en place une stratégie destinée à reconquérir des parts de marché dans le secteur des services au grand public en prenant pleinement en compte l'évolution des usages (sites internet mobile, applications mobiles, applications tablettes, objets connectés, etc.), dans un contexte de forte croissance du marché publicitaire sur les supports mobiles 3 ( * ) .

Des progrès ont été réalisés en matière de monétisation des supports digitaux et la régie publicitaire , qui n'était pas compétitive en interne, a été externalisée . Les résultats enregistrés en 2018 et en 2019 étaient très positifs, si bien que Météo France espérait réaliser 8 million d'euros de recettes publicitaires en 2020. Le coup d'arrêt provoqué par la crise sanitaire devrait entraîner une perte de 3 millions d'euros au minimum, avec une révision des objectifs 2020 à 5 millions d'euros désormais espérés .

Second axe de travail, accroître le volume des prestations météorologiques aux professionnels . Selon Météo France, 40 % des entreprises seraient en effet « météo-sensibles » (secteurs de l'agriculture, du BTP, de l'énergie, des transports ou bien encore du sport) et sont à la recherche d'informations météorologiques toujours plus précises et de services réactifs et innovants.

En dépit de la crise sanitaire, Météo France a poursuivi sa dynamique des années précédentes, puisque ses recettes professionnelles devraient représenter 23,0 millions d'euros en 2020, soit 1 million d'euros de plus qu'en 2019 , avec une part de marché estimée à 50 % sur le secteur des services météorologiques. L'établissement a notamment signé plusieurs contrats pluriannuels avec Orange, RTE, TF1 ou bien encore la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), ce dernier contrat devant rapporter quelque 8,6 millions d'euros à Météo France sur la période 2019-2022.

La progression des recettes professionnelles en 2021, désormais attendues à 26,0 millions d'euros, devrait donc permettre à l'établissement de dépasser significativement l'objectif de hausse de 2 % par an qui lui est fixé par son contrat d'objectifs et de performance pour la période 2017-2021 .

3. Les dépenses de personnel de Météo France diminueront en 2020 de 4,0 millions d'euros grâce à des réductions d'effectifs de 95 ETPT

En 2020, les charges de personnel représentaient 246,2 millions d'euros . Pour 2021, la prévision s'établit à 240,2 millions d'euros , soit une baisse de 4,0 millions d'euros .

Évolution de la masse salariale de Météo France
de 2014 à 2021

(en milliers d'euros)

Source : réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial

Entre 2014 et 2021, la masse salariale de l'établissement devrait avoir diminué de 23,8 millions d'euros, soit une baisse de - 9,0 % .

Cette baisse conséquente a été permise par la réduction continue des effectifs, qui conduit l'opérateur à ne remplacer que 20 % des départs à la retraite de ses collaborateurs.

En 2021, Météo France verra ses effectifs diminuer une nouvelle fois de 95 ETPT , soit un taux d'effort de - 3,2 % identique à celui de 2020 .

Ces dernières années, le plafond d'emplois de l'établissement public , qui a toujours fait l'objet d'une application stricte , a nettement diminué.

Plafond d'emploi de Météo France de 2014 à 2021

(en ETPT)

Source : réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial

De 2013 à 2021, le plafond d'emplois de Météo France sera donc passé de 3 337 ETPT à 2 641 ETPT , soit une forte baisse de - 20,9 % correspondant à une perte de 696 ETPT .

À noter que l'établissement a obtenu pour 2021 le relèvement de ses emplois hors plafond (+15 ETPT, dont + 5 contrats d'apprentissage) pour les porter à 90 ETPT. Ce relèvement paraissait en effet nécessaire, sauf à mettre en péril la capacité de l'établissement à s'inscrire dans de grands projets de recherche, notamment européens, qui lui permettent de faire rayonner la recherche française dans les domaines des risques, du changement climatique et de l'environnement.

4. Un réseau territorial qui continue d'être recentré sur les missions justifiant une proximité géographique, de plus en plus de tâches pouvant être effectuées à distance

Le réseau territorial, qui avait connu une très forte réorganisation au cours de la période 2012-2016, avec la fermeture de 55 implantations , évolue de nouveau fortement dans le cadre d'Action Publique 2022.

Si la direction de l'établissement prévoit de conserver ses 7 centres interrégionaux , organisés autour des missions de sécurité, ainsi que ses centres spécialisés dans la marine et la nivologie , elle prévoit en revanche de réduire de 15 à 11 le nombre de ses centres aéronautiques et de 32 à 28 ses centres dédiés à la maintenance du réseau d'observation . À noter que 4 sites de montagne dont la fermeture avait été envisagée ont finalement été maintenus à l'issue de nombreuses consultations avec les acteurs des territoires alpins et pyrénéens.

Surtout, l'établissement projette de réduire de 40 % ses effectifs présents dans ce réseau territorial et de regrouper un maximum d'activités dans la Météopole de Toulouse .

Selon les dirigeants de Météo France, cette centralisation des activités de l'opérateur est rendue possible par les évolutions scientifiques et technologiques, qui permettent désormais de conduire un certain nombre de tâches météorologiques à distance .

Météo France bénéficie d'un soutien financier de 2,9 millions d'euros du Fonds de transformation de l'action publique (FTAP) pour accompagner ces mutations. Ces crédits servent à financer des reconversions d'agents, des requalifications de postes de techniciens en ingénieurs, des réformes du temps de travail, etc.

5. L'acquisition par Météo France d'un nouveau supercalculateur se poursuit

Conformément aux objectifs de son contrat d'objectifs et de performances 2017-2021, Météo France devrait avoir investi 22,1 millions d'euros en 2020, soit une somme en recul par rapport au niveau exceptionnel de 25,8 millions d'euros d'investissements en 2019.

Ces investissements concernent principalement la modernisation des réseaux d'observation (radars, réseaux au sol, radiosondage) et des moyens de calcul intensif (renouvellement des équipements de stockage des données).

Dans une moindre mesure, ils concernent également la rénovation du patrimoine immobilier de l'opérateur , en particulier la réhabilitation du site de Toulouse.

Mais ces dépenses classiques ne sauraient suffire pour relever les défis météorologiques de la période actuelle : l'activité de prévision devient de plus en plus intensive en capital et repose sur des technologies de calcul de plus en plus puissantes .

Lors des discussions qui ont conduit à la conclusion du contrat d'objectifs et de performances (COP) 2017-2021 de l'établissement, il a été acté que pour remplir les objectifs qui lui sont assignés par l'État, Météo France devrait multiplier sa puissance de calcul par cinq , grâce à l'acquisition d'un nouveau supercalculateur , dont les bénéfices socio-économiques sont très élevés 4 ( * ) .

Le marché relatif à la fourniture de moyens de calculs intensifs pour Météo-France sur la période 2020-205 a été notifié à la société Atos le 24 juillet 2019. L'installation du premier des deux calculateurs composant ce nouveau système a démarré mi-novembre 2019 et la phase de vérification d'aptitude finalisée le 28 mai 2020, avec un léger retard dû à la période de confinement. La nouvelle configuration sera ainsi 5,45 fois plus puissante que la précédente, alors que l'objectif du COP était de 5 (voir supra ).

Ce nouveau matériel, indispensable pour permettre à Météo France de maintenir son rang, nécessite un investissement total de 144 millions d'euros sur la période 2019-2025 dans le cadre du projet « Calcul 2020 ». Sur cette somme, 65,9 millions d'euros seront consacrés à la fourniture de capacités de calcul supplémentaire .

Après les 5 millions d'euros de 2019 et les 7,7 millions d'euros de 2020 perçus à ce titre en 2019, le contrat pluriannuel signé par Météo France avec la direction du budget prévoit que l'établissement bénéficiera de financements supplémentaires à hauteur de 8,3 millions d'euros en 2021 (voir supra ) et de 6,1 millions d'euros en 2022.

Les besoins supplémentaires à couvrir seront donc de 18,8 millions d'euros en 2023 et de 9,7 millions d'euros en 2024.

Si ces sommes sont conséquentes, elles ne seront pas suffisantes , notamment pour financer la mise à niveau des locaux qui accueilleront les équipements techniques du nouveau supercalculateur 5 ( * ) .

Cette situation conduira Météo France à devoir présenter des budgets déficitaires et à puiser dans son fonds de roulement , qui devrait passer de 33 millions d'euros en 2018 à 12 millions d'euros en 2022. Il faudra ainsi veiller à ce que cet opérateur essentiel ne soit pas fragilisé .

II. L'INSTITUT NATIONAL DE L'INFORMATION GÉOGRAPHIQUE ET FORESTIÈRE (IGN), UN OPÉRATEUR QUI DOIT SE RÉINVENTER POUR FAIRE FACE À LA CONCURRENCE DES GÉANTS DU NUMÉRIQUE

Établissement public administratif placé sous la double tutelle des ministres chargés de l'écologie et des forêts, le nouvel IGN est issu de la fusion entre l'Institut géographique national et l'Inventaire forestier national (IFN) intervenue le 1 er janvier 2012 6 ( * ) .

L'IGN a une triple vocation :

- assurer la connaissance continue de la surface du territoire national et de l'occupation de son sol , accessible depuis un site dédié (Geoportail) ;

- actualiser l'inventaire permanent des ressources forestières nationales qui était auparavant assuré par l'IFN ;

- concevoir et commercialiser des produits et services à partir des données recueillies dans le cadre de ses missions de service public.

Toutefois, l'établissement est actuellement remis en question par les effets de la révolution numérique , qui l'obligent à réinventer son rôle et son modèle économique.

De fait, comme le rappelle le projet annuel de performances pour 2021 du programme 159, « la donnée géographique symbolise les mutations en cours dans la société numérique et le risque de « disruption » de la puissance publique par des acteurs internationaux , tels que les majors de l'internet qui maîtrisent et exploitent d'immenses quantités de données. Il est donc plus que jamais essentiel que la puissance publique conserve la maîtrise des données géographiques qui fondent ses décisions ».

Pour faire face à ces défis dans le cadre d'Action publique 2022, le directeur général de l'IGN porte un projet d'établissement visant à faire de celui-ci l'opérateur interministériel unique en matière de données géographiques souveraines et à devenir une pièce maîtresse de l'État plateforme pour l'information géographique .

1. La subvention pour charges de service public de l'IGN va voir ses crédits légèrement augmenter de 1,1 million d'euros en 2021

L'action 12 « Information géographique et cartographique » du programme 159 porte la subvention pour charges de service public de l'IGN , pour un montant de 89,2 millions d'euros (AE=CP), en légère hausse de 1,1 million d'euros par rapport aux 88,1 millions d'euros de 2020.

Cette augmentation s'explique par un abondement exceptionnel de 2,9 millions d'euros destiné à financer une partie des surcoûts liés à la migration du Géoportail et aux dépenses d'hébergement et d'infogérance associées.

À noter que la part de la subvention pour charges de service public de l'IGN représente désormais 54 % de ses ressources , contre 59 % en 2018.

Les crédits de l'action 12 se répartissent entre deux sous-actions :

- la sous-action 12.1 « Production de l'information géographique » : dotée de 75,8 millions d'euros (AE=CP), qui représente 85 % des crédits de l'action .

Elle retrace la part de la subvention pour charges de service public de l'IGN consacrée au financement de ses activités exercées dans le cadre de sa mission de service public pour la production et la diffusion de l'information géographique et cartographique, ainsi que pour la formation.

À ces activités traditionnellement assurées par l'ancien Institut géographique national se sont ajoutées, depuis 2012, d'autres missions conduites jusqu'alors par l'ancien Inventaire forestier national , comme l'élaboration et la mise à jour , sur le territoire métropolitain, de l'inventaire permanent des ressources forestières, l'observation et la surveillance des écosystèmes forestiers, la diffusion des données d'inventaire sur les milieux forestiers , ainsi que la fourniture à l'État des éléments nécessaires à la formulation de la politique forestière nationale ;

- la sous-action 12.2 « Recherche dans le domaine géographique » : dotée de 13,4 millions d'euros , soit 15 % de l'ensemble des crédits de l'action .

Cette sous-action retrace la part de la subvention pour charges de service public de l'IGN consacrée au financement d'activités de recherche et développement .

2. Dans un contexte d'ouverture des données publiques, l'IGN doit décrocher de nouveaux partenariats pour maintenir le niveau de ses ressources propres

Pour 2020, les recettes commerciales de l'IGN devraient représenter 35,5 millions d'euros , soit une baisse de 1,8 million d'euros par rapport à 2019 due en majeure partie à l'impact de la crise sanitaire provoquée par la Covid-19.

Le marché grand public , qui concerne avant tout les cartes papier , devrait voir ses recettes diminuer de 1,5 millions d'euros par rapport à 2019 à 8,0 millions d'euros . Ce marché tend à diminuer de 7 % à 10 % par an en volume même si l'IGN s'efforce de lutter contre cette érosion structurelle en commercialisant de nouvelles cartes et atlas régionaux et en développant le portail « IGN Rando ».

Sur le marché professionnel , le chiffre d'affaires devrait baisser de 1,9 % par rapport à 2019, pour atteindre 10,3 millions d'euros (contre 13,9 millions d'euros en 2018). Selon les gestionnaires de l'opérateur, cette baisse attendue « s'explique en partie par la fin du cycle d'acquisition de données par les grands acteurs internationaux (navigation routière, grands portails, etc.) ainsi que par la gratuité progressive pour les acteurs publics ».

Sur le marché défense-espace , les recettes diminueraient légèrement , passant de 17,0 millions d'euros en 2019 à 15,8 millions d'euros en 2020. L'IGN a sécurisé cette ressource en 2016 grâce à la signature avec le ministère de la défense d'un nouvel accord-cadre de sept ans portant sur la contribution de l'opérateur à la préparation, au développement et à la mise en oeuvre de l'infrastructure des données géographiques pour l'exécution des missions des armées et des programmes du ministère des armées.

En revanche, l'IGN estime que les grands projets lui rapporteront 28,0 millions d'euros en 2020, soit une forte hausse de + 33,7 % par rapport aux 21,0 millions d'euros de 2019. Sur cette somme, 9,6 millions d'euros proviendront de la mise à jour du référentiel parcellaire graphique (RPG), 15,3 millions d'euros du projet Géopmaps et 3,1 millions d'euros pour le projet TRex, tous deux conduits en partenariat avec le ministère des armées.

Le directeur général par interim de l'IGN, entendu par le rapporteur spécial, a attiré son attention sur l'important enjeu financier que représente pour son établissement la question du développement du principe des données publiques ouvertes et gratuites open data »).

Selon lui, l'évolution des ressources propres de l'IGN dans les années à venir sera conditionnée par le maintien de redevances de mise à disposition et de réutilisation des données produites par son opérateur, permise par dérogation par la loi n° 2015-1779 du 28 décembre 2015 relative à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public 7 ( * ) .

La politique d'ouverture des données publiques a déjà conduit à une diminution des recettes de licences de l'IGN, qui représentaient auparavant 10 millions d'euros par an .

Cette diminution a contribué à la dégradation de la situation financière de l'établissement, dont le déficit d'exploitation s'est établi à 1,5 million d'euros en 2019 et devrait représenter - 0,4 million d'euros en 2020. La gratuité totale de ses données impliquerait pour l'établissement une perte de recettes supplémentaires de 6 millions d'euros par an environ.

Si cette gratuité totale n'est pas souhaitable, il n'en demeure pas moins que l'IGN doit s'adapter à la nouvelle donne de l'information géographique et poursuivre sa démarche de recherche de nouveaux contrats , tant auprès des administrations publiques que des entreprises privées , pour dégager de nouvelles recettes à moyen terme.

3. Les dépenses de personnel représenteront 69,6 % des dépenses de l'établissement en 2021

Le projet de loi de finances pour 2021 attribue à l'IGN 1 397 emplois sous plafond , soit une baisse de 36 équivalents temps plein travaillé (ETPT) par rapport à l'année 2020.

En revanche, le nombre d'équivalents temps pleins travaillé (ETPT) hors plafond devrait rester à son niveau de 2020 à 63 ETPT en 2021. Ces ETPT comprennent les emplois des agents sur contrat pour des projets de recherche, en particulier en réponse aux appels d'offre de l'Agence nationale de la recherche (ANR), ainsi que des agents sur contrats d'avenir pour la réalisation de la représentation parcellaire cadastrale unique (RPCU).

S'ajouteront également, hors schéma d'emploi, 74 nouveaux ETPT d'opérateurs recrutés en 2021 sur des contrats de courte durée (3 à 5 mois) pour participer à la réalisation du projet Référentiel parcellaire graphique (RPG) .

Ces recrutements supplémentaires, dont le coût est évalué à 2,6 millions d'euros entraîneront une hausse de 1,6 million d'euros ( + 1,5 % ) à 112,6 millions d'euros de la masse salariale de l'établissement par rapport à la prévision d'exécution pour 2020. La masse salariale représenterait ainsi 69,6 % des dépenses prévues par l'opérateur en 2021.

Par ailleurs, l'IGN prévoit en 2021 des dépenses d'investissements de 8 millions d'euros en CP, soit un montant stable par rapport à 2020, et des dépenses de fonctionnement courant en légère baisse à 23,3 millions d'euros . L'IGN doit notamment investir pour financer le développement de la Géoplateforme, le renouvellement des équipements d'acquisition d'images aériennes et procéder à des travaux immobiliers de rénovation de bâtiments de son site de Saint-Mandé.

En 2020, le fonds de roulement devrait s'établir à 14,2 millions d'euros (en diminution par rapport à 2019) et la trésorerie à 12,8 millions d'euros (elle correspondrait à 31 jours de fonctionnement courant).

III. LE CEREMA, UN OPÉRATEUR PUBLIC DE CRÉATION RÉCENTE DONT LES COMPÉTENCES DOIVENT ÊTRE MISES AU SERVICE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le Centre d'études et d'expertise pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cérema) est un établissement public administratif qui résulte de la fusion au 1 er janvier 2014 de onze services de l'État, avec un personnel composé majoritairement de fonctionnaires . L'action 11 du programme 159 porte les crédits de la subvention pour charges de service public de cet opérateur.

Les missions du Cérema

Le Centre d'études et d'expertise pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cérema) est un établissement public à caractère administratif créé le 1 er janvier 2014 8 ( * ) .

Il apporte son concours à l'élaboration, à la mise en oeuvre et à l'évaluation des politiques publiques du ministère de la transition écologique et solidaire (MTES) et du ministère de la cohésion des territoires (MCT) dans ses différents domaines de compétence, offrant une vision transversale au service du développement durable .

Ses principales missions sont de promouvoir les modes de gestion des territoires qui intègrent les facteurs environnementaux, économiques et sociaux , d'accompagner les acteurs publics et privés dans la transition vers une économie sobre en ressources et décarbonée, respectueuse de l'environnement et équitable, et d'apporter à l'État et aux acteurs territoriaux un appui d'ingénierie et d'expertise sur les projets d'aménagement nécessitant une approche pluridisciplinaire . Il a vocation à les assister dans la gestion de leur patrimoine d'infrastructures de transport et leur patrimoine bâti, et à renforcer leur capacité à faire face aux risques . En outre, il a pour mission de capitaliser et promouvoir au niveau territorial et international les savoir-faire qu'il développe.

Le Cérema accomplit ses missions essentiellement à la demande de l'État, mais son dispositif spécifique de gouvernance assure la prise en compte des attentes des collectivités , notamment grâce à la mise en place d'un conseil stratégique constitué à parts égales de représentants de l'État et d'élus représentant les collectivités territoriales . Ces dernières seront également présentes, aux côtés des services déconcentrés de l'État, au sein des comités d'orientations territoriaux, permettant d'adapter l'activité au plus près des besoins des acteurs des territoires.

Source : projet annuel de performances pour 2020

1. La réduction des moyens du Cérema va se poursuivre jusqu'en 2022, au risque de menacer la soutenabilité financière de l'établissement

Le Cérema, dont le budget total devrait représenter 242,0 millions d'euros en 2020 , a été confronté rapidement après sa création à une diminution très significative de ses moyens, comme en témoigne le tableau infra qui illustre la baisse continue du montant de sa subvention pour charges de service public et de son plafond d'emploi.

Évolution de la subvention pour charges de service public
et du plafond d'emplois du Cérema depuis sa création

Subvention
pour charges
de service public
(en millions d'euros)

Variation annuelle

Plafond d'emplois
(en ETPT)

Variation annuelle

2014

228,8

-

3 155

-

2015

226,3

- 1,1 %

3 152

-

2016

217,6

- 3,8 %

3 024

- 4,1 %

2017

210,8

- 3,1 %

2 899

- 4,1 %

2018

206,0

- 2,3 %

2 796

- 3,6 %

2019

201,4

- 2,2 %

2 695

- 3,6 %

2020

196,7

- 2,3 %

2 594

- 3,7 %

2021

191,1

- 2,8 %

2 507

- 3,3 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Dès le début du quinquennat, le Gouvernement a annoncé qu'il poursuivrait la réduction des moyens du Cérema chaque année jusqu'en 2022 :

- la baisse du plafond d'emplois représentera -100 ETPT par an pendant cinq ans , ce qui correspondra à une chute des effectifs de l'établissement de 17 % sur la période et de 25 % entre 2015 et 2022 , avec un objectif de 2 400 ETPT en 2022 ;

- la baisse de la subvention pour charges de service public (SCSP) , qui compte pour 83 % des ressources de l'établissement, représentera environ 5 millions d'euros par an.

Ces orientations continueront d'être appliquées en 2021 avec une nouvelle baisse de la SCSP de 5,6 millions d'euros et du plafond d'emploi de - 87 ETPT (ce qui se traduit par une baisse de la masse salariale de 1,1 million d'euros), ce qui rendra nécessaire la poursuite des efforts de restructuration de l'établissement.

Cette subvention en diminution de - 2,3 % financera à 83 % les dépenses de personnel de l'établissement , les autres crédits servant à couvrir ses charges d'exploitation (financement courant, entretien, maintenance, investissements courants, etc.).

Cette réduction des financements et des emplois attribués par l'État au Céréma avait provoqué une crise à l'automne 2017, avec la démission de son Président puis de son directeur général.

Incontestablement, la forte attrition des moyens de l'établissement se traduit par une fragilisation de ses compétences et une diminution de ses moyens de production , ce qui a pu susciter une déception légitime tant de la part de ses personnels que de ses dirigeants. La baisse du niveau des investissements ( 7 millions d'euros par an environ), en particulier, est préoccupante , puisqu'ils sont indispensables pour renouveler les équipements scientifiques et techniques de l'opérateur , dont beaucoup sont aujourd'hui vétustes 9 ( * ) .

Toutefois, le rapporteur spécial estime que le directeur général de l'établissement qui s'appuie depuis l'an dernier sur le projet stratégique « Cerem'Avenir » est à même de remobiliser les agents de son opérateur et en mesure de faire de la contrainte financière que subit le Céréma une opportunité de transformation .

Pour accompagner la mise en oeuvre de ce plan stratégique, le Céréma a obtenu un financement de 12,3 millions d'euros sur 4 ans du Fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP).

Le fait que les ressources propres de l'établissement soient passées de 23,8 millions d'euros à 32,3 millions d'euros entre 2015 et 2019, soit une hausse de + 35,7 % , constituait un signal encourageant qui témoigne de la mobilisation des équipes de l'opérateur.

L'objectif de ressources propres pour 2020, qui s'inscrivait dans cette dynamique, était de 35 millions d'euros mais les pertes de recettes provoquées par la crise sanitaire liée à la Covid-19 sont désormais estimées à 7 millions d'euros environ, ce qui devrait les ramener à 28 millions d'euros .

Dans ce contexte, le rapporteur spécial s'interroge sur un point qui pourrait remettre en cause la soutenabilité financière de l'établissement d'ici quelques années.

La marge de +13 millions d'euros entre la subvention pour charges de service public et la masse salariale exécutée qui existait encore en 2015 est devenue négative en 2020 et atteindra - 3 millions d'euros en 2021.

En 2022, il devrait ainsi manquer 9 millions d'euros pour que la subvention couvre les dépenses de personnel du Céréma en dépit du strict respect de l'objectif de 2 400 ETP.

Le Gouvernement devra donc être vigilant sur ce point .

2. Le Céréma doit se tourner résolument vers les collectivités territoriales et apporter son soutien à la future Agence nationale de la cohésion des territoires

Les entreprises, dont notamment les sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA) , représentent 39 % du chiffre d'affaires du Céréma.

Les collectivités territoriales, quant à elles, ne comptent que pour 31 % du chiffre d'affaires de l'établissement avec 9,4 millions d'euros en 2019, ce qui demeure très insuffisant.

Or, l'objectif n° 2 du programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » prévoit que le Céréma doit devenir un centre de ressources et d'expertises partagées entre l'État et les collectivités territoriales , en appui aux politiques publiques d'aménagement durable du territoire.

Dans cette perspective, et conformément au projet stratégique de l'établissement approuvé par son conseil d'administration en 2015, cet objectif mesure la part de l'activité du Cérema réalisée dans le cadre d'actions de partenariat et d'innovation (API) en relation avec les collectivités territoriales .

Les API ne représentaient que 2 % de l'activité du Cérema en 2015 et devraient s'élever à 8 % en 2019 , le but étant d'atteindre les 9 % en 2020.

Ces chiffres sont faibles et montrent l'ampleur du travail à réaliser pour que le Cérema parvienne à s'imposer comme un prestataire d'ingénierie pour les collectivités territoriales , auprès de qui il demeure trop peu identifié .

Conscient de cette difficulté, le nouveau directeur général de l'opérateur a engagé un plan de transformation qui doit permettre de réaliser des mutualisations , des mises en réseau et des spécialisations des compétences et des expertises .

Surtout, il a refondé le mode de programmation de son activité pour orienter plus résolument celle-ci en direction des collectivités territoriales .

Le Céréma devra également apporter son appui à l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) , avec qui un projet de convention est actuellement en discussion.

Ce travail devrait déboucher sur l'élaboration du premier contrat d'objectifs et de performance (COP) du Cérema , qui permettrait de marquer le soutien de l'État à cet opérateur en pleine mutation.

BUDGET ANNEXE
« CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS »

La direction générale de l'aviation civile (DGAC) , administration centrale de l'État, joue un triple rôle de prestataire de service , de prescripteur de règles et de régulateur du transport aérien en France :

- elle assure les services de la circulation aérienne auprès des compagnies aériennes, au moyen de ses centres de contrôle en route et de ses tours de contrôle ;

- elle veille au maintien de la sécurité et de la sûreté du transport aérien en assurant la surveillance des industriels, des opérateurs et des personnels navigants ;

- elle est le régulateur économique et social du secteur aérien (compagnies aériennes, aéroports, industries aéronautiques) ;

- elle lutte contre les nuisances , en particulier sonores et atmosphériques , générées par le transport aérien ;

- elle élabore et défend les positions de la France dans les instances internationales qui traitent de l'aviation civile ;

- elle favorise le développement de l'aviation légère.

C'est la mission « Contrôle et exploitation aériens » qui retrace, dans le cadre du présent budget annexe, dit « BACEA », les activités de production de biens et de prestation de services de la DGAC .

Cette mission et la mission « Publications officielles et information administrative » constituent les deux seuls exemples de budgets annexes du budget de l'État .

Elle est régie par les dispositions de l'article 18 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) qui prévoit que « des budgets annexes peuvent retracer , dans les conditions prévues par une loi de finances, les seules opérations des services de l'État non dotés de la personnalité morale résultant de leur activité de production de biens ou de prestation de services donnant lieu au paiement de redevances , lorsqu'elles sont effectuées à titre principal par lesdits services. [...].

I. L'EFFONDREMENT DES RECETTES DU BUDGET ANNEXE REFLÈTE LA CRISE SANS PRÉCÉDENT QUE CONNAÎT AUJOURD'HUI LE TRANSPORT AÉRIEN

Tant les recettes que les dépenses du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) dépendent étroitement du trafic aérien au départ et à l'arrivée des aéroports français mais également du trafic qui survole notre territoire .

Le BACEA est donc touché de plein fouet par la crise historique qui touche le transport aérien en raison de la pandémie de Covid-19.

A. LA PANDÉMIE DE COVID-19 A PROVOQUÉ UNE CRISE SANS PRÉCÉDENT DU TRAFIC AÉRIEN EN FRANCE ET EN EUROPE

1. Une chute brutale du trafic, des perspectives de reprise très incertaines
a) La fin d'une longue période de croissance du trafic aérien

Le trafic aérien au départ et à l'arrivée en France a connu une croissance annuelle moyenne de 3,9 % entre 2009 et 2019.

Celle-ci était surtout portée par le trafic international dont le taux de croissance annuel moyen était de + 4,4 % , tandis qu'il était de + 2 % sur le marché domestique métropolitain et de + 3,9 % sur le trafic reliant la métropole aux outre-mer .

En 2019, 201 millions de passagers avaient voyagé sur des vols internationaux et intérieurs desservant les aéroports français, ce qui avait représenté une hausse de 4,0 % du trafic passagers par rapport à 2018.

Le trafic aérien avait ainsi poursuivi sur sa lancée des années précédentes, porté par le maintien d'une conjoncture économique favorable , en dépit de nouvelles hausse du prix du carburant et d'un léger ralentissement observé en fin d'année.

La pandémie de Covid-19 a provoqué une chute sans précédent du trafic aérien , celui-ci ayant connu un quasi-arrêt en Europe de la mi-mars à la mi-mai 2020 avec la mise en place de restrictions suivies d'interdictions d'entrée aux frontières puis de confinements des populations partout sur la planète.

b) La quasi-mise à l'arrêt du trafic aérien en Europe au printemps 2020

Selon les analyses de marché publiées en juin 2020 par l'Association internationale du transport aérien (IATA), au plus fort de la crise en avril, les passagers kilomètres transportés (PKT) ont chuté de 95 % environ par rapport à avril 2019. Fin avril, les transporteurs européens ont ainsi vu le trafic diminuer de 99 % .

Si le marché européen a connu une augmentation du nombre de vols à partir du mois de mai, soutenu par un début de réouverture des frontières, le nombre de passagers devrait baisser d'environ 60 % à 65 % en 2020 par rapport à l'année 2019, ce qui représente une perte d'environ 705 millions de voyages de passagers selon les estimations publiées par IATA en août 2020.

Les perspectives de reprise du trafic en Europe sont, à l'heure où le rapporteur spécial écrit ces lignes, extrêmement incertaines alors que sévit une deuxième vague de la pandémie de Covid-19 , à l'origine de reconfinements dans de nombreux pays.

Selon les dernières estimations de IATA, et sous réserve de la disponibilité rapide de vaccins, la demande de passagers en Europe pourrait se redresser progressivement dans les années à venir mais n'atteindra pas les niveaux de 2019 avant 2024 .

Eurocontrol, pour sa part, se montre plus pessimiste, puisque l'organisation considère que les chiffres du trafic de 2019 pourraient ne pas être atteints avant 2029 .

c) Des prévisions d'évolution du trafic aérien pour la France très faibles et marquées par une profonde incertitude

De la mi-mars à la mi-mai 2020, les vols de et vers la France ont été limités aux seuls vols de rapatriement et de transport de fret . L'organisation d'un pont aérien de fret avec l'Asie a notamment permis l'acheminement de matériels sanitaires essentiels.

Un maillage aéroportuaire minimal a en outre été maintenu en métropole pour assurer en particulier les transports sanitaires .

Les vols vers les outre-mer ont été fortement réduits et l'État a, en partenariat avec les compagnies, réorganisé les liaisons ultramarines pour assurer une continuité territoriale minimale .

La DGAC prévoyait - en septembre, soit avant la mise en place du nouveau confinement - que la baisse du trafic passagers de et vers la France pourrait être c omprise entre - 60 % et - 65 % en 2020 par rapport à 2019.

Après avoir connu un point bas à - 93 % en avril 2020 par rapport à 2019, le trafic aérien, mesuré en unité de services en route, a connu une éclaircie pendant l'été ( - 53 % en août), avant de redescendre à - 61 % en septembre .

Les vols domestiques évoluaient entre - 17 % (août) et - 27 % (septembre) par rapport à 2019, tandis que les vols internationaux et les survols stagnaient à - 60 % par rapport à 2019 . Ces chiffres ont considérablement diminué depuis avec la mise en place d'un couvre-feu dans les grandes métropoles puis l'instauration d'un reconfinement sur tout le territoire français.

Pour construire le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) en 2021, la DGAC s'est basée sur un trafic dont le niveau serait inférieur de - 30 % en 2021 par rapport aux chiffres de 2019.

Ces chiffres paraissent d'ores-et-déjà beaucoup trop optimistes dans la mesure où les décisions prises pour lutter contre la deuxième vague de la pandémie de Covid-19 auront immanquablement des effets sur le trafic aérien en 2021.

En outre, des vagues de contaminations supplémentaires sont redoutées tant que les populations n'auront pas été massivement vaccinées.

Tout l'enjeu à présent consiste à favoriser une reprise la plus rapide possible du trafic en mobilisant tous les outils disponibles en France comme dans les pays partenaires : mise en place des tests antigéniques dans les aéroports , création de corridors sanitaires , négociations au niveau européen sur des protocoles sanitaires harmonisés pour permettre les vols entre les pays européens et les autres pays, et ainsi éviter les restrictions de vols liées aux fermetures des frontières et aux quarantaines des voyageurs.

Néanmoins, quels que soient les efforts mis en oeuvre, il paraît déjà acquis que le présent budget 2021 de la DGAC, pour sa partie recettes tout du moins, est sans doute d'ores-et-déjà en grande partie caduque .

2. Le pavillon français, déjà fragile avant la crise sanitaire, devrait enregistrer 4 milliards d'euros de pertes en 2020

Avant même la crise sanitaire du Covid-19, les compagnies françaises, et notamment Air France, connaissaient une situation économique difficile en raison de la très forte concurrence des compagnies à bas coût ( Easy Jet , Ryanair ) sur le segment du court et du moyen-courrier en France et en Europe et des compagnies du Golfe persique ( Etihad , Qatar Airways, Emirates ) sur le long courrier, en particulier à destination de l'Asie

Face à ces acteurs très agressifs d'un point de vue commercial, les compagnies françaises souffrent, en dépit d'efforts de productivité importants consentis ces dernières années, d'un grave déficit de compétitivité , en raison d'une structure de coûts très défavorable . Cette fragilité, associée à d'autres raisons qui leur étaient propres, étaient clairement apparues lors de la liquidation judiciaire à l'automne 2019 d'Aigle Azur et de XL Airways , qui représentaient à elles deux quelque 1 700 emplois .

Les compagnies françaises ayant été très sévèrement touchées par la chute du trafic sans précédent rappelée supra, la DGAC considère dans ses réponses au questionnaire du rapporteur spécial que « sur la base d'une perte de chiffre d'affaires de 63 %, d'une reprise des échanges mondiaux à l'automne au plus tôt et d'une répartition des coûts entre 15 % de frais fixes (qui ne peuvent pas être évités), 55 % de coûts variables et 30 % de frais de personnels, qui sont tempérés par le dispositif d'activité partielle financé par l'État, les pertes des compagnies aériennes françaises peuvent être estimées entre 3,2 milliards d'euros et 3,8 milliards d'euros en 2020 ».

Cette estimation ayant été formulée avant le nouveau couvre-feu puis le reconfinement, il y a donc fort à parier que les pertes des compagnies françaises pourraient être supérieures à 4,0 milliards d'euros en 2020.

3. Une intervention massive de l'État, sous forme de prêts, voire d'une possible recapitalisation, est apparue indispensable pour sauver Air France eu égard à la violence de la crise

Comme tous les autres acteurs du secteur aérien, le groupe Air France-KLM a subi de plein fouet l'impact de la crise sanitaire dès le mois de février 2020.

Au cours du premier semestre 2020, seulement 19,3 millions de passagers ont été transportés, soit une baisse de 62 % par rapport aux 50,5 millions de passagers transportés au premier semestre 2019.

Pour préserver sa trésorerie, le groupe a eu recours à l'activité partielle d'une partie de ses effectifs en France (80 % lors de la période d'arrêt quasi-total des vols et en diminution cohérente avec le volume d'activité ensuite), et a réduit significativement ses investissements et ses dépenses non essentielles.

Malgré tout, le résultat d'exploitation s'est établi à - 2,4 milliards d'euros à la fin du premier semestre 2020, alors qu'il était de 100 millions d'euros au premier semestre 2019 (- 0,77 million d'euros pour KLM et - 1,6 milliard d'euros pour Air France).

Air France prévoit, à elle seule, une perte d'exploitation de 2,9 milliards d'euros en 2020 et estime que les conditions de marché de 2019 ne seront pas réunies au plus tôt avant 2024.

Pour couvrir les besoins de financement à court terme d'Air France et de KLM, les gouvernements français et néerlandais ont apporté leur soutien financier, à hauteur respectivement de 7 milliards d'euros et 3,4 milliards d'euros, sous la forme d'avances en compte courant d'actionnaire (respectivement de 3 milliards d'euros et 1 milliard d'euros) et de garanties à 90 % de prêts bancaires (respectivement de 4 milliards d'euros et 2,4 milliards d'euros), assortis de conditions d'amélioration de la compétitivité et d'atteinte d'objectifs environnementaux.

Au 30 juin 2020, le groupe Air France-KLM disposait ainsi de 14,2 milliards d'euros de liquidités ou de lignes de crédit pour faire face à la crise et restructurer son activité.

D'importantes contreparties pour Air France en termes de compétitivité
et d'engagements environnementaux

Les soutiens publics en faveur d'Air France-KLM étaient conditionnés au respect de contreparties , en particulier s'agissant d'Air France.

Alors que la santé économique et financière de l'entreprise était fragile depuis de nombreuses années, sa direction s'est engagée à accélérer la mise en oeuvre du plan de transformation , destiné à améliorer la compétitivité du groupe, qu'elle avait annoncé au mois de novembre 2019.

Pour mémoire, ce plan visait à doubler le bénéfice d'exploitation d'Air France-KLM d'ici à 2024 pour atteindre une marge opérationnelle de 7 % à 8 %, contre 4,8 % en 2019 (et 2,1 % seulement pour Air France). Ce plan, qui devait être réalisé en cinq ans, le serait désormais en deux ans (soit d'ici la fin 2021).

Le PDG d'Air France-KLM Ben Smith prévoit notamment de renforcer la rationalisation du réseau domestique (200 millions d'euros de pertes en 2019) ainsi que la restructuration des fonctions support non opérationnelles .

Plusieurs plans de départs volontaires dans l'entreprise sont également prévus.

Mais l'entreprise devra également consentir d' importants efforts en matière environnementale , dans le but de réduire de 50 % les émissions de CO 2 de ses vols métropolitains à la fin de l'année 2024 . Pour mémoire, la compagnie s'était déjà engagée à réduire de 50 % ses émissions de CO 2 par passager et par km entre 2005 et 2030.

Il est notamment prévu qu'Air France devrait drastiquement réduire ses vols intérieurs dès lors qu'il existe une alternative ferroviaire de moins de deux heures et demie (ce qui est le cas de Paris-Bordeaux, Paris-Lyon, Paris-Rennes ou bien encore Paris-Nantes). Seuls seraient maintenus les vols destinés à alimenter les « hubs » de Paris-Charles-de-Gaulle et de Paris-Orly.

L'entreprise va également devoir accélérer le renouvellement de sa flotte afin d'acquérir des avions moins polluants.

Sur le long courrier, les Airbus A340 vont progressivement cesser d'être utilisés alors que vont être livrés des A350 qui consomment 25 % de carburant de moins. Le retrait de l'A380, qui était envisagé pour 2022, pourrait être accéléré compte tenu des nouvelles prévisions de trafic très dégradées.

Sur le moyen-courrier, des Airbus A220 devraient venir remplacer des A318-319, ce qui permettrait de réduire la consommation de carburant et les émissions de CO 2 de 20 %.

Enfin, la compagnie s'est vue fixer l'objectif d'une utilisation de 2 % de biocarburants à l'horizon 2025.

Source : commission des finances du Sénat

À l'heure où le rapporteur spécial écrit ces lignes, la mise en place d'un nouveau confinement a éteint les derniers espoirs d'une reprise progressive du trafic à l'automne 2020 , si bien qu'une nouvelle aide à Air France-KLM , qui pourrait cette fois-ci prendre la forme d'une recapitalisation en bonne et due forme , apparaît de plus en plus inéluctable .

Selon les informations du rapporteur spécial, une nouvelle injection de 6 milliards d'euros en fonds propres et en quasi-fonds propres est envisagée, dont 3 milliards d'euros apportés par l'État français, 1 milliard d'euros par l'État néerlandais et 2 milliards d'euros levés sur les marchés.

4. L'accélération de la transition écologique du transport aérien à travers le soutien à la R&D de l'industrie aéronautique
a) L'industrie aéronautique est elle aussi gravement fragilisée par les conséquences de la crise sanitaire

Conséquence de la crise sanitaire et économique provoquée par la pandémie de Covid-19, les compagnies aériennes , qui souffrent de graves problèmes de trésorerie, sont contraintes de décaler , voire d'annuler les prises de livraison de leurs nouveaux appareils , ce qui se traduit directement par une chute drastique et durable des cadences des avionneurs .

Selon Airbus et Boeing, la baisse du besoin en nouveaux avions sur la période 2020-2024 dans le monde est ainsi évaluée entre 40 et 60 % par rapport à la production réalisée en 2018 , avec un impact plus fort et durable sur les long-courriers que les moyen-courriers.

Airbus n'anticipe pas un retour du trafic aérien aux niveaux de 2019 avant 2023 , voire 2025 dans un scénario pessimiste . L'avionneur, qui prévoyait initialement de livrer 880 appareils en 2020 , a donc pris la décision en mars 2020 de revoir nettement à la baisse ses cadences : 40 A320 par mois (contre 60 avant la crise), 5 A220 (contre 6 ), 2 A330 (contre 4 ) et 6 A350 (contre 10 ), cette dernière cadence ayant été encore diminuée en juillet ( 5 appareils ).

Tous les investissements destinés à l'augmentation des cadences de l'A320 (à l'exception de ceux dédiés à l'A321 XLR) et de l'A350 qui ont déjà été lancés ou prévus ont été repoussés , et ces cadences réduites devraient être maintenues au moins jusqu'en 2021 , selon l'évolution du trafic. Airbus a suspendu ses prévisions financières pour 2020.

b) Les mesures de soutien à l'industrie aéronautique doivent permettre d'accélérer son verdissement

Le système de soutien de l'État à la R&D de l'industrie aéronautique française repose principalement sur les aides sectorielles prévues par le programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durable » de la mission « Recherche et enseignement supérieur » et qui sont gérées par la DGAC.

En 2018 et en 2019, le montant de ces aides, qui font par ailleurs partie du Grand Plan d'investissement (GPI) , s'était élevé à 135 millions d'euros annuels .

Pour faire face à l'effondrement des commandes du secteur aéronautique provoqué par la pandémie de Covid-19 (voir supra ), le plan de relance aéronautique annoncé par le Gouvernement le 9 juin 2020 a porté ce budget de soutien à la R&D de la filière aéronautique à 1,5 milliard d'euros sur trois ans, dont 300 millions d'euros en 2020 et 600 millions d'euros en 2021 et 2022.

Cette aide, sous forme de subventions directes , soutient les projets de la filière aéronautique correspondant à la feuille de route technologique que l'État fixe avec les industriels français dans une démarche partenariale au sein du Conseil pour la recherche aéronautique civile (CORAC) .

L'ambition majeure de ce plan est de préparer la rupture environnementale de l'aviation tout en confortant et en transformant la majeure partie des capacités de toutes les composantes de la filière, pour :

- maîtriser dans moins d'une décennie l'intégration dans les aéronefs des technologies de rupture à même d'assurer la transition écologique du secteur . Il s'agit en particulier d'utiliser de nouvelles sources d'énergie vertes mais également de réduire massivement la consommation de carburant et la pollution émise par les avions . L'annonce la plus ambitieuse et emblématique faite en ce sens est le lancement par Airbus d'un programme visant à concevoir un avion utilisant exclusivement l'hydrogène à l'horizon 2035 ;

- gagner fortement en efficacité , ce qui rendra possible l'introduction de ces appareils verts à des coûts soutenables pour le marché .

Par ailleurs il est prévu de soutenir les projets destinés à produire , à l'échelle industrielle, des carburants durables (biocarburants avancés ou carburants synthétiques) destinés principalement à l'aéronautique. L'objectif est de permettre leur incorporation aux carburants aéronautiques de nature fossile à raison de 2 % en 2025 et de 5 % en 2030 . Ce soutien aux projets de production de carburants durables est estimé à 400 millions d'euros sur les années 2021 et 2022.

Le rapporteur spécial salue les ambitions de ce plan de soutien qui a pour objet à la fois d'accélérer l'indispensable transition écologique du transport aérien mais également de sauvegarder l'emploi et les compétences de notre filière aéronautique , qui est l'un des principaux fleurons de notre industrie.

Toutefois, il s'inquiète du fait que certaines modalités de gestion de pratique de ce plan de soutien ne paraissent pas encore pleinement arrêtées , ce qui paraît complexifier leur mise en oeuvre cette année et en 2021.

B. LES DÉPENSES COMME LES RECETTES DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DE L'AVIATION CIVILE (DGAC) SONT SÉVÈREMENT AFFECTÉES PAR LA CRISE SANITAIRE

1. Les dépenses du BACEA vont significativement augmenter de 6,1 % en 2021 en raison du poids de la charge de la dette contractée pour faire face à la crise

Le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) rassemble trois programmes , qui regroupent pour 2021 un montant de 2 342,2 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 2 272,2 millions d'euros en crédits de paiement (CP).

Il s'agit là de niveaux supérieurs de 201,3 millions d'euros en AE ( + 9,4 % ) et de 131,3 millions d'euros en CP ( + 6,1 % ) à ceux qui étaient prévus par la loi de finances pour 2020, lesquels s'élevaient à 2 140,9 millions d'euros en AE et en CP.

En ajoutant les 27,7 millions d'euros de fonds de concours et d'attributions de produits également prévus, le montant total des crédits de la mission devrait s'élever à 2 369,9 millions d'euros en AE et 2 299,9 millions d'euros en CP en 2021.

Évolution des crédits du BACEA en 2020 et 2021, et éxécution 2019

(en euros)

Programme

Exécution 2019

LFI 2020

PLF 2021

Variation 2021/2020

(en %)

612 « Navigation aérienne »

AE

624 968 724

595 421 800

650 754 356

+9,3 %

CP

578 348 877

595 421 800

580 754 356

-2,5 %

613 « Soutien aux prestations de l'aviation civile »

AE

1 498 912 223

1 501 062 470

1 647 000 667

+9,7 %

CP

1 498 863 911

1 501 062 470

1 647 000 667

+9,7 %

614 « Transports aériens, surveillance et certification »

AE

49 214 934

44 494 943

44 480 210

-

CP

48 631 912

44 494 943

44 480 210

-

Total

AE

2 173 095 881

2 140 979 213

2 342 235 233

+9,4 %

CP

2 125 844 700

2 140 979 213

2 272 235 233

+6,1 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Le programme 612 « Navigation aérienne » verra ses crédits augmenter de 55,4 millions d'euros en AE en 2021 pour atteindre un montant de 650,8 millions d'euros contre 595,4 millions d'euros en 2020. Le montant des crédits diminuera en revanche de 14,6 millions d'euros en CP avec 580,8 millions d'euros en 2021 contre 595,4 millions d'euros en 2020.

Ces crédits sont destinés au financement des activités de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA), chargée de rendre les services de la navigation aérienne sur le territoire national et dans les espaces aériens confiés à la France par l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) pour plus de 3,2 millions de vols par an 10 ( * ) avant la crise du Covid-19. La hausse de 9,3 % de ses crédits en AE témoigne de la montée en puissance des efforts consentis par la DSNA en matière d'investissements (voir infra ).

Le programme 613 « Soutien aux prestations de l'aviation civile », qui regroupe les crédits de l'ensemble des fonctions supports de la DGAC (finances, systèmes d'information, ressources humaines, logistique) verra ses crédits passer de 1 501,1 millions d'euros (AE=CP) en 2020 à 1 647,0 millions d'euros en 2021, soit une forte hausse de 145,9 millions d'euros ( + 9,7 % ) qui s'explique par le poids de la charge de la dette contractée pour faire face à la crise (voir infra ).

Ce programme retrace également la subvention pour charges de service public versée par la DGAC à l'école nationale de l'aviation civile (ENAC) , établissement public administratif qui a pour mission d'assurer la formation initiale et continue des cadres de l'aviation civile .

Enfin, le programme 614 « Transports aériens, surveillance et certification » porte les crédits relatifs à l'exercice des compétences de la DGAC en matière de régulation économique , de développement durable et de respect par l'ensemble des acteurs des règles qui leur sont applicables , en particulier en matière de sécurité et de sûreté, soit 44,5 millions d'euros (AE=CP) prévus pour 2021, un montant supérieur quasi identique à celui qui était prévu par la loi de finances initiale pour 2020.

2. Les recettes d'exploitation du BACEA, directement indexées sur le trafic aérien, baisseront massivement en 2021

En 2019, le BACEA avait enregistré 2 231,6 millions d'euros de recettes d'exploitation grâce à l'excellente dynamique du trafic.

La loi de finances initiale pour 2020 prévoyait également un niveau de recettes très élevées pour le BACEA à 2 065,5 millions d'euros mais la crise sanitaire provoquée par la Covid-19 devrait conduire à un niveau de recettes inférieur de 80 % à la prévision initiale .

Cette situation s'explique par la chute brutale du trafic aérien mais également par la décision de l'État de reporter le paiement des taxes et redevances spécifiques aux compagnies aériennes titulaires d'une licence d'exploitation en France exigibles entre mars et décembre 2020. Ces créances seront remboursées, dans le cadre d'un échéancier, à compter de janvier 2021 et pour une période de 24 mois, par tranches égales.

Dans le détail, sont concernées :

- la taxe de l'aviation civile (TAC) ;

- la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne en métropole (RSTCA-M) ;

- les redevances terminale et océanique dans les outre-mer ;

- la taxe de solidarité sur les billets d'avions (TS) , perçue par la DGAC pour compte de tiers.

Par ailleurs, l'organisation Eurocontrol a décidé d'un moratoire de quatre mois de la redevance de route (RR) , laquelle constitue de loin la principale ressource du BACEA .

Le présent projet de loi de finances pour 2021 s'appuie sur une prévision de trafic aérien inférieure de plus de 30 % au trafic constaté en 2019 . Force est de constater, à l'heure où votre rapporteur spécial écrit ces lignes, qu'une telle prévision paraît désormais exagérément optimiste .

Sur la base de cette hypothèse, les recettes d'exploitation du BACEA atteindraient 1 509,7 millions d'euros , un montant en baisse de 555,9 millions d'euros ( - 26,9 % ) par rapport à la prévision initiale pour 2020.

Toutes les recettes de la DGAC seraient en forte baisse , qu'il s'agisse de la redevance de route, des redevances pour services terminaux de la circulation aérienne ou bien encore de la taxe de l'aviation civile (TAC).

Évolution des recettes d'exploitation du BACEA
entre la LFI 2020 et le PLF 2021, et exécution 2019

Recettes (M€)

Exécution 2019

LFI 2020

PLF 2021

Écart

%

Redevances de navigation aériennes

1 590,1

1 551,0

1 111,0

- 440,0

- 28,4 %

Redevances de surveillance et de certification

30,6

30,4

22,5

- 7,9

- 26,0 %

Taxe d'aviation civile

482,4

472,0

367,0

- 110,2

-23,3 %

Autres recettes

128,5

12,2

14,4

+ 1,5

+ 18,0 %

Total recettes exploitation

2 231,6

2 065,5

1 509,7

- 555,9

- 26,9 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

a) La forte baisse des survols entraînera une contraction du produit des redevances de navigation aérienne

Les redevances de navigation aérienne regroupent la redevance de route (RR) , la redevance pour services terminaux de circulation aérienne métropole (RSTCA-M) et les redevances de navigation aérienne outre-mer , la redevance océanique (ROC) et la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne outre-mer (RSTCA-OM) .

L'évolution de leurs recettes est déterminée par l'évolution des tarifs des taux unitaires inscrits en RP2 et pris en application des règlements Ciel unique II , ainsi que des prévisions de trafic (voir infra ).

Le rendement global des redevances de navigation aérienne devrait être de 1 111,0 millions d'euros en 2021, contre une prévision de 1 551,0 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2020, soit une baisse de 440,0 millions d'euros ( - 28,4 % ).

Cette diminution est avant tout imputable à la forte baisse de 390,3 millions (- 30,2 %) d'euros des recettes de la redevance de route (RR) , dont le montant devrait représenter 902,7 millions d'euros en 2021 contre une prévision initiale de 1 293,0 millions d'euros en 2020.

Cette baisse des recettes de la redevance de route est directement indexée sur la chute du trafic aérien en survol provoquée par la pandémie de Covid-19.

La redevance pour services terminaux de circulation aérienne métropole (RSTCA-M) devrait également voir ses recettes diminuer de 48,7 millions d'euros par rapport à la prévision initiale pour 2020, à 165,3 millions d'euros .

Les prévisions de recettes pour 2020 des redevances de navigation aérienne outre-mer , quant à elles, demeureraient relativement stables à 43 millions d'euros contre une prévision initiale pour 2020 de 44 millions d'euros .

b) Des redevances de surveillance et de certification en recul de 26 % par rapport à la prévision initiale pour 2020

Les redevances de surveillance et de certification 11 ( * ) viennent financer en partie la surveillance des acteurs de l'aviation civile , la délivrance d'agréments et d'autorisations , de licences ou de certificats nécessaires aux opérateurs (constructeurs, ateliers d'entretien, compagnies aériennes, aéroports, personnels, organismes de sûreté, opérateurs de navigation aérienne). Ces différentes activités sont principalement prises en charge par la direction de la sécurité de l'aviation civile (DSAC) au sein de la DGAC.

Leurs recettes s'élèveraient à 22,5 millions d'euros en 2021, soit un montant inférieur de 7,9 million d'euros (- 25,9 %) aux 30,4 millions d'euros qui étaient attendus en 2020.

c) Des recettes de la taxe de l'aviation civile en forte baisse de 22,2 % par rapport à la prévision pour 2020

Le présent projet de loi de finances prévoit que le produit de la taxe de l'aviation civile s'élèvera à 367,0 millions d'euros en, soit une forte hausse de 29,3 millions d'euros (- 23,3 %) par rapport aux recettes de 472,0 millions d'euros prévues par la loi de finances initiale pour 2020.

Là encore, cette diminution est liée à la forte diminution du trafic provoquée par la pandémie de Covid-19.

Sont incluses dans les recettes de la TAC pour la quatrième année consécutive celles de la « taxe Bâle-Mulhouse » dont doivent désormais s'acquitter les passagers et le fret à l'arrivée et au départ de l'aéroport franco-suisse de Bâle-Mulhouse et destinées à couvrir le coût des missions d'intérêt général assurées sur la plateforme par la DGAC . Le montant de ces recettes est estimé à 6 millions d'euros pour 2020.

d) Les taxes perçues par la DGAC pour le compte de tiers sont également très sévèrement impactées par les effets de la crise sanitaire

La DGAC est chargée de l'établissement de l'assiette, du recouvrement et du contrôle de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TS) 12 ( * ) , de la taxe d'aéroport (TA) 13 ( * ) et de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) 14 ( * ) , dont le produit est reversé à des tiers, présentés en détail infra.

En 2021, le BACEA devrait recevoir 4,8 millions d'euros pour les frais de gestion des sommes recouvrées au titre de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TS) , de la taxe d'aéroport (TA) et de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) , soit un niveau analogue à celui qui est prévu pour 2019. Le prélèvement pour frais de gestion de la TS, de la TA et de la TNSA correspond à 0,5 % des produits de ces trois taxes depuis le 1 er janvier 2013.

À noter que le BACEA percevra par ailleurs 4,4 millions d'euros de recettes diverses.

(1) Le produit de la taxe de solidarité se limiterait à 73,5 millions d'euros en 2020, contre une prévision initiale de 440 millions d'euros

Depuis sa création, le produit de la taxe de solidarité sur les billets d'avions (TS) participe au financement de l'aide au développement dans le domaine de la santé en abondant le fonds de solidarité pour le développement (FSD) géré par l'Agence française pour le développement (AFD).

Ses tarifs avaient été majorés dans le cadre de l' « écocontribution » prévue à l'article 72 du projet de loi de finances pour 2020, si bien qu'elle était censée rapporter 210 millions d'euros au FSD et 230 millions d'euros à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) en 2020.

Or, compte tenu de la crise sanitaire, les prévisions de recettes de la TS s'établissent désormais respectivement à 73,5 millions d'euros en 2020 et à 291 millions d'euros en 2021.

En conséquence, en 2020, le plafond de reversement au FSD ne sera pas atteint et aucune recette ne pourra être versée à l'AFITF. En 2021, le plafond de 210 millions d'euros de reversement au FSD devrait être atteint et des recettes, estimées, sous toutes réserves, à 81 millions d'euros, mais en tout état de cause d'un montant nettement inférieur au plafond de 230 millions d'euros, pourraient être versées à l'AFITF.

(2) L'effondrement des recettes de la taxe d'aéroport (TA) devrait creuser le déficit cumulé des aéroports à - 370 millions d'euros en 2021

Le produit de la taxe d'aéroport (TA) est transféré aux aéroports pour financer leurs mesures régaliennes, à savoir les services de sécurité-incendie-sauvetage, de lutte contre le péril animal, de sûreté et des mesures effectuées dans le cadre des contrôles environnementaux.

La crise sanitaire a mis brutalement un terme à une période durant laquelle les effets conjugués de la croissance régulière du trafic aérien et d'une maîtrise renforcée des coûts avaient permis le retour à un quasi équilibre de ce système de financement. De fait, à la fin de 2019, le déficit cumulé des aéroports, toutes classes confondues, s'établissait à 16,5 millions d'euros seulement, l'objectif étant de le ramener à environ 9 millions d'euros à la fin de l'année 2020.

Cet objectif sera très loin d'être atteint puisque le déficit cumulé des aéroports de classe 1 à 3 devrait atteindre le niveau sans précédent de 410 millions d'euros fin 2020. Ce chiffre, qui s'explique par l'impact de la crise de la Covid-19 sur le trafic aérien et sur l'activité des aéroports est la résultante de deux dynamiques :

- la baisse des recettes de la TA, qui devraient atteindre un montant de 255 millions d'euros environ, péréquation comprise, contre plus d'un milliard d'euros en 2019 ;

- des coûts pour les aéroports réduits à 770 millions d'euros, contre un milliard d'euros en 2019.

Afin de permettre aux aéroports de préserver leur capacité à assurer le préfinancement de leurs investissements, une avance de 300 millions d'euros a été votée par le Parlement lors de la troisième loi de finances rectificative pour 2020.

Cette avance devrait être versée fin 2020. Les premières échéances de remboursement interviendront à partir de 2024 et son remboursement intégral pourra intervenir jusqu'en 2030. Ces modalités permettront ainsi d'alléger les contraintes financières des exploitants d'aéroport et de limiter la hausse des tarifs de la taxe.

Autre mesure bienvenue : la prolongation d'un an des délais imposés aux exploitants pour la mise en conformité des équipements de détection d'explosif de leurs systèmes de tri bagages, la date butoir, initialement fixée au 31 août 2020 pour certains exploitants étant désormais fixée au 31 août 2021.

L'avance de 300 millions d'euros mentionnée supra, si elle était indispensable, devrait toutefois laisser aux aéroports un déficit résiduel de 110 millions d'euros à la fin 2020.

Pour 2021, avec une baisse du trafic estimée à 31% par rapport à 2019, le déficit des aéroports pourrait encore s'aggraver de 260 millions d'euros et atteindre 370 millions d'euros.

Selon la DGAC, et compte tenu de l'ampleur du montant de déficit attendu à la fin de 2021, il pourrait s'avérer nécessaire de prévoir en cours d'année un versement additionnel en faveur des aéroports de l'ordre de 350 millions d'euros.

(3) Le cumul des pertes de recettes de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) en 2020 et en 2021 devrait correspondre à une année de son rendement habituel

Le produit de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA), payée par les compagnies aériennes, est reversé aux exploitants d'aéroports en vue du financement des aides accordées aux riverains pour l'atténuation des nuisances sonores ou au remboursement à des personnes publiques des avances consenties pour financer des travaux de réduction des nuisances sonores.

Les recettes de cette taxe sont elles aussi très affectées par la crise sanitaire puisque elles sont désormais estimées en 2020 à moins de 20 millions d'euros contre 54,3 millions d'euros initialement prévus (soit une baisse de - 65 %), 37,6 millions d'euros en 2021 contre 54,6 millions d'euros initialement prévus (soit une baisse de - 31 %) et 43,6 millions d'euros en 2022 contre 55 millions d'euros initialement prévus (soit une baisse de - 20 %).

Sur la seule période 2020-2021 la perte de financement pour le dispositif d'aide à l'insonorisation des riverains est ainsi estimé à l'équivalent d'une année de recettes de la TNSA : 35 millions d'euros devraient faire défaut pour mener à bien la politique d'insonorisation prévue pour l'année 2020 et 17 millions d'euros devraient manquer en 2021.

3. Un budget annexe dont les tarifs de redevance et les objectifs de performance sont étroitement encadrés par le droit européen, dans le cadre de la construction du ciel unique européen
a) La France, acteur central de la construction du Ciel unique européen au sein du FABEC

Depuis 2004, la France participe à la construction du Ciel unique européen , dont l'objectif est d'assurer par les services de la navigation aérienne une gestion de l'espace aérien européen plus intégrée , de sorte que les frontières nationales cessent de constituer des contraintes pour les acteurs du transport aérien.

Dans un contexte de forte croissance du trafic aérien à moyen et long terme , l'enjeu pour l'Union européenne est d'améliorer la sécurité , les capacités et l'efficacité économique des vols en Europe tout en réduisant leur empreinte environnementale .

Pour optimiser le trafic international, les pays européens sont regroupés au sein de huit blocs fonctionnels d'espace aérien (FABs) intégrés qui rassemblent les espaces supérieurs de pays mitoyens .

Depuis la signature le 2 décembre 2010 à Bruxelles du traité créant le FABEC (ce traité a été ratifié en 2012), la France fait partie du bloc fonctionnel d'espace aérien « Europe centrale » (FABEC) avec l'Allemagne, la Belgique, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Suisse. Le FABEC représente à lui seul 50 % du trafic aérien européen .

Le Ciel unique européen s'appuie également sur un important volet technologique et de R&D baptisé SESAR (Single european sky ATM research ) , qui doit permettre aux États européens de bénéficier d'une nouvelle génération de système de gestion du trafic pour pouvoir faire face aux futurs besoins en matière de capacité et de sécurité du trafic aérien à l'horizon 2020 .

C'est dans le cadre de SESAR que la DGAC, et, en son sein, la direction des services de la navigation aérienne (DNSA), a cherché ces dernières années à moderniser ses outils de contrôle de la navigation aérienne , après avoir accumulé un important retard en la matière (voir infra ).

b) Un prestataire de la navigation aérienne placé sous le contrôle étroit de la Commission européenne dans le cadre du plan de performance RP2 du FABEC

Le règlement européen n° 1070/2009 « Ciel unique 2 » a mis en place un système européen de régulation de la performance des services de navigation aérienne , piloté par la Commission européenne, qui fixe à chaque pays membre des objectifs ambitieux en termes de sécurité , de capacité (réduction des retards) et d'efficacité économique (coût unitaire des services) et environnementale (réduction des distances parcourues) des vols.

C'est au regard de ces objectifs qu'il convient d'analyser les performances pour le moins contrastées de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA) de la DGAC, comme le rapporteur spécial a cherché à le faire dans son rapport d'information « Retards du contrôle aérien : la France décroche en Europe » publié le 13 juin 2018 15 ( * ) .

(1) Un taux unitaire de redevance de route qui va se stabiliser en 2021 à un niveau bas et compétitif

Dans ce cadre, les taux unitaires des redevances aéronautiques des États européens sont construits sur des hypothèses de coûts et de trafics fixées pour plusieurs années .

2019 était la cinquième et dernière année de mise en oeuvre de la deuxième période de référence (RP2) de la régulation européenne des services de navigation aérienne 16 ( * ) , qui prévoyait pour la France un coût unitaire en 2019 17 ( * ) inférieur de - 11,5 % à la valeur inscrite pour 2014 dans le plan de performance 2012-2014. Un nouveau cadre de régulation devait entrer en vigueur en 2020 mais a été repoussé en raison de la crise sanitaire .

La France apparaît plutôt compétitive pour le tarif de sa redevance de route , qui s'élevait à 60,81 euros par unité de services (UDS) en 2019 contre 80,11 euros en Italie , 67,18 euros au Royaume-Uni , 69,67 euros en Espagne , 67,20 euros en Allemagne et 67,79 euros en Belgique et au Luxembourg , le record étant détenu par la Suisse avec 98,7 euros de redevance de route .

Le tarif de la redevance de route française a encore diminué en 2020 pour atteindre 58,69 euros , afin de rendre aux compagnies aériennes les recettes excédentaires perçues en 2018 , année pour laquelle le trafic aérien avait été sous-estimé.

Compte-tenu de la crise sanitaire et des difficultés actuellement rencontrées par les compagnies aériennes, ce tarif devrait être maintenu à l'identique en 2021 .

Taux unitaire de la redevance de route en France de 2015 à 2021

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

70,00€

67,54€

67,00€

63,48€

60,81€

58,69€

58,69€

Source : direction générale de l'aviation civile (DGAC)

(2) Des retards qui restent problématiques, en raison d'outils obsolètes et d'une organisation du travail perfectible, même si la crise sanitaire va les rendre moins visibles

L'indicateur de performance numéro un des services de la navigation aérienne du monde entier , auquel est naturellement très sensible la Commission européenne dans le contexte de RP2, est celui des minutes de retards générées par les régulations de trafic attribuables aux centres en route . L'objectif fixé par le plan de performance pour la France est de 0,42 minute par vol en 2018 et de 0,43 minute par vol pour 2019.

Alors qu'ils avaient beaucoup augmenté en 2018 pour atteindre près de 2 minutes par vol contrôlé , les retards de la DSNA ont diminué en 2019 pour atteindre 1,33 minute par vol .

Le nombre total de minutes de retard généré a ainsi atteint 4 370 551 minutes , soit environ un tiers de moins qu'en 2018 ( 6 253 135 minutes de retard en 2018, soit presque deux fois plus qu'en 2017).

Ce résultat, supérieur au 1,12 minute de retard moyen enregistré en 2017, demeure toutefois très insuffisant au regard des objectifs fixés à la direction des services de la navigation aérienne (DSNA) par la Commission européenne dans le cadre de la régulation prévue par le Ciel unique européen, à savoir un retard de 0,5 minute par vol .

Les retards de la DSNA sont imputables pour 18 % au défaut de capacité , 36 % à l'organisation du service , 19 % à la météo (épisodes neigeux en février et mars, forte activité orageuse en mai-juin) et 18 % aux mouvements sociaux (en particulier les grèves nationales de décembre liées à la réforme des retraites).

Répartition des causes de retards liés aux régulations
du trafic aérien

Source : direction des services de la navigation aérienne (DSNA)

Pour mémoire, la France demeure responsable de 33 % des retards dus au contrôle aérien en Europe , alors qu'elle ne contrôle que 20 % du trafic du continent.

Ces résultats insuffisants s'expliquent essentiellement par trois causes auxquelles il est urgent de remédier :

- les effets délétères d'un nombre de mouvements sociaux excessif, puisqu'ils sont responsables à eux seuls de 25 % des minutes perdues en survol de notre pays selon Eurocontrol ;

- le déficit de capacités de la DSNA dû aux retards pris par ses programmes de modernisation ;

- la productivité insuffisante des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA) , qui doit être améliorée grâce à des adaptations de leurs horaires de travail.

Incontestablement, la baisse spectaculaire du trafic aérien constatée depuis mars 2020 en raison de la pandémie de Covid-19, et dont les effets devraient se faire sentir au minimum jusqu'en 2024 mais probablement bien au-delà, va considérablement alléger la pression qui pesait sur la DSNA pour faire passer un trafic toujours plus dense et saisonnier . Il est par conséquent probable que les retards baisseront très nettement dans les années à venir .

Loin de se féliciter de cette amélioration en trompe l'oeil , il faudra mettre cette période exceptionnelle à profit pour poursuivre activement la modernisation des systèmes de la navigation aérienne mis à la disposition des contrôleurs aériens ainsi que l'adaptation de leurs tours de services , de sorte que la DSNA puisse enfin redevenir pleinement compétitive le jour où le trafic aérien retrouvera ses niveaux d'avant crise.

Pour y parvenir et mobiliser les équipes de la DSNA autour d'un projet ambitieux , il pourrait être utile de prévoir la conclusion d'une forme de contrat , analogue aux contrats d'objectifs et de performance (COP) des établissements publics, qui viendrait formaliser des objectifs précis .

En tout état de cause, la DSNA devra se conformer à ceux qui seront déterminés dans le cadre de la troisième période de référence (RP3) 2020-2024 de la régulation européenne des services de navigation aérienne actuellement en cours de discussion.

Si ces objectifs devraient nécessairement tenir compte de la crise sans précédent que connaît le transport aérien, nul doute que la Commission européenne cherchera - à juste titre - à mettre sous tension le contrôle aérien français afin d'améliorer ses résultats trop décevants ces dernières années.

II. LA VOLONTÉ DE POURSUIVRE L'EFFORT DE MODERNISATION DE LA NAVIGATION AÉRIENNE EN DÉPIT DE L'EXPLOSION DE L'ENDETTEMENT DU BACEA

A. UNE LÉGÈRE DIMINUTION DE LA MASSE SALARIALE DE LA DGAC EN 2021 EN RAISON DE LA SUSPENSION DES NÉGOCIATIONS DU PROTOCOLE SOCIAL 2020-2024 CONSÉCUTIVE À LA CRISE

1. Le schéma d'emplois 2021 de la DGAC compensera la création de postes de contrôleurs aériens par des suppressions de postes dans les autres corps

Le projet de loi de finances pour 2021 prévoit que le plafond d'emploi de la DGAC 18 ( * ) l'an prochain sera fixé à 10 544 ETPT et celui de l'école nationale de l'aviation civile (ENAC) à 930 ETPT , soit des chiffres rigoureusement identiques à ceux prévus par le projet de loi de finances pour 2020.

Plus de 70 % des agents de la DGAC appartiennent à la filière technique et opérationnelle : ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA) , ingénieurs électroniciens des systèmes de la sécurité aérienne (IESSA) et techniciens des études et d'exploitation de l'aviation civile (TSEEAC) .

Mais la DGAC comprend également, entre autres, des adjoints d'administration , des ouvriers d'État ou bien encore des ingénieurs des études et d'exploitation de l'aviation civile (IEEAC) .

Répartition des agents de la DGAC par corps et par sexe

Source : DGAC

Comme en 2017, 2018, 2019 et 2020, le schéma d'emplois 2021 de la DGAC prévoit, pour la cinquième année consécutive, une absence totale de suppression d'emplois en 2021 , tant pour la DGAC que pour l'ENAC .

Pour que ce schéma d'emplois soit stabilisé à 0 , la hausse de 41 ETP prévue pour le corps des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA) sera compensée par un schéma d'emploi négatif à due concurrence pour les autres catégories de personnels.

Schéma d'emplois 2021 de la DGAC

Départ

dont retraites

Arrivées

dont primo-recrutements

Schéma d'emploi

Administratifs/cadres

77

67

62

43

- 15

ICNA

23

20

64

62

+41

IESSA-TSEAC

116

96

101

98

- 15

Ouvriers

13

10

2

1

- 11

Total

229

193

229

204

0

Source : réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial

Ces recrutements d'ICNA visent à compenser les nombreux départs à la retraite prévus au sein de ce corps dans les années à venir. Ils devraient permettre à la DGAC de disposer d'un effectif qualifié suffisant dans cinq ans , lorsque le trafic aura repris.

Dans son rapport d'information précité, le rapporteur spécial avait considéré qu'il serait souhaitable, dans les années à venir, d'augmenter avec mesure le nombre de recrutements d'élèves contrôleurs aériens à l'École nationale de l'aviation civile (ENAC) pour faire face au déficit de capacités des services de la navigation aérienne.

Si ledit déficit de capacité n'existe plus pour le moment compte tenu de la crise sanitaire, il faut en effet tenir compte du délai de cinq ans nécessaire pour former un contrôleur aérien .

Il importe donc de maintenir des effectifs d'ICNA suffisants pour que ceux-ci puissent accompagner la reprise du trafic lorsque celle-ci interviendra.

2. La masse salariale de la DGAC va légèrement diminuer en 2021 en raison de la suspension des négociations du protocole social 2020-2024 entraînée par la crise du transport aérien

En 2021, la masse salariale de la DGAC , qui constitue de loin le principal poste de dépenses du budget annexe, représentera 932,6 millions d'euros , un montant en légère diminution de 6,2 millions d'euros par rapport aux 938,8 millions d'euros qui étaient prévus en loi de finances initiale pour 2020 et qui comprenaient 10 millions d'euros provisionnés pour le futur protocole social 2020-2024.

Lorsque l'on prend un peu de recul, on constate néanmoins que la masse salariale de la DGAC a augmenté de 52,9 millions d'euros (+ 6,0 %) par rapport au montant de la masse salariale de 2016 , qui était de 879,7 millions d'euros . Cette différence correspond très largement aux différentes mesures catégorielles prévues par le protocole social 2016-2019 .

Les dépenses de personnel représentent au total, une fois incluses les cotisations sociales employeurs ( 281,2 millions d'euros de contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions »), les prestations sociales et l'action sociale, un montant de 1 213,9 millions d'euros , en légère baisse de 3,6 millions d'euros par rapport à 2020 ( 1 217,5 millions d'euros ).

Lors des années précédentes, le rapporteur spécial avait suivi de près l'application par la DGAC du protocole social 2016-2019 signé le 19 juillet 2016 19 ( * ) , et dont l'un des principaux enjeux était d'organiser une plus grande flexibilité des horaires des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA) pour une meilleure adaptation des tours de services à un trafic de plus en plus concentré sur des périodes de pointe , en particulier l'été.

En contrepartie des efforts demandés aux agents de la DGAC, 55 millions d'euros avaient été prévus pour financer des mesures catégorielles significatives sur la période 2016-2019 (y compris les mesures générales favorables à l'ensemble des agents de la fonction publique 20 ( * ) ), dont 15 millions d'euros réservés aux expérimentations de nouvelles organisations du temps de travail des contrôleurs aériens.

Le coût global de ce protocole pour la période 2016-2019 devrait finalement être de 52 millions d'euros , un montant toutefois très élevé lorsqu'on le compare à celui des mesures sociales du protocole social 2013-2015, qui était de 27,4 millions d'euros .

Ainsi qu'il a été indiqué supra , la masse salariale 2020 du BACEA intégrait une provision de 10 millions d'euros dans la perspective du futur protocole social 2020-2024 de la DGAC, dont 1,0 million d'euros de mesures statutaires et 9,0 millions d'euros de mesures indemnitaires.

La crise du transport aérien provoquée par la pandémie de Covid-19 a conduit la DGAC à suspendre les négociations de ce protocole social 2020-2024 et donc les mesures protocolaires qui auraient eu vocation à l'accompagner.

En conséquence, pour 2021, les seules mesures catégorielles programmées concerneront :

- la mise en oeuvre du dernier volet Parcours professionnel, carrière et rémunération (PPCR) pour 0,6 million d'euros ;

- l'accompagnement des réformes des fonctions support qui seront conduites en 2021 pour 1 million d'euros .

B. MALGRÉ LA CRISE, LES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT DE LA DGAC RESTERONT À UN NIVEAU ÉLEVÉ EN 2021 POUR TENTER D'ACCÉLÉRER LA RÉALISATION DES GRANDS PROGRAMMES DE MODERNISATION DE LA NAVIGATION AÉRIENNE, DONT LA RÉUSSITE N'EST TOUJOURS PAS ACQUISE

Entre 2008 et 2013, la DGAC, confrontée à la chute de ses recettes provoquée par la crise du transport aérien, avait décidé de sacrifier ses investissements et de s'endetter pour éviter d'augmenter ses redevances , ce qui aurait encore davantage mis en difficulté les compagnies aériennes.

C'est ce qui explique que ses investissements aient atteint un niveau plancher de 150 millions d'euros en 2010, notoirement insuffisant pour préparer l'avenir , avant de lentement remonter dans les trois années qui ont suivi .

Le transport aérien bénéficiant d'une conjoncture plus favorable, la DGAC a cherché à rattraper le temps perdu en investissant 205,9 millions d'euros en 2017 et 230,8 millions d'euros en 2018.

La poursuite des grands programmes de modernisation de la navigation aérienne a conduit la DGAC à augmenter très significativement le montant de ses investissements en loi de finances initiale pour 2019 et pour 2020, puisque les crédits prévus à ce titre ont atteint respectivement 297,5 millions d'euros et 315,6 millions d'euros .

En dépit de la crise du transport aérien provoquée par la pandémie de Covid-19, la DGAC maintiendra ses investissements à 315,8 millions d'euros en 2021, soit un niveau quasiment identique à celui de 2020.

Les dépenses d'investissement de la DGAC depuis 2013
(en millions d'euros)

Source : réponses au questionnaire du rapporteur spécial

1. La DSNA, qui a revu le pilotage de ses grands programmes de modernisation du contrôle de la navigation aérienne doit rapidement les mener à bien sans nouveaux surcoûts

Le programme 612 « Navigation aérienne » du budget annexe porte à lui seul 85,8 % de la dotation d'investissement du BACEA, avec 341 millions d'euros en AE et 271 millions d'euros en CP en 2021.

Si la présence d'une programmation en autorisations d'engagement (AE) constitue une nouveauté de nature à sécuriser les investissements de la navigation aérienne qui s'inscrivent dans une logique pluriannuelle , il convient toutefois de noter que les crédits prévus en CP pour 2021 sont en baisse de 12,6 millions d'euros ( -4,6 % ) par rapport aux 283,6 millions d'euros qui avaient étaient prévus en loi de finances initiale pour 2020.

À cette somme viendront s'ajouter 11,0 millions d'euros de fonds de concours et attributions de produits, ce qui permettra ce consacrer 282,0 millions d'euros aux investissements en faveur du contrôle aérien.

En augmentant son effort d'investissement, la direction des services de la navigation aérienne (DSNA) souhaite remettre à niveau ses équipements afin de pouvoir absorber les fortes hausses du trafic aérien prévues dans les prochaines années.

Ce faisant, il s'agit d'apporter rapidement des réponses aux problèmes relevés par le rapporteur spécial dans son rapport d'information du 13 juin 2018 « Retards du contrôle aérien : la France décroche en Europe », à savoir :

- l'augmentation des retards provoquée par le manque de capacités du contrôle aérien français, qui coûtait, avant la pandémie de Covid-19, 300 millions d'euros par an aux compagnies aériennes;

- l'obsolescence des systèmes de la DSNA, qui tend à faire d'eux un « facteur bloquant » pour la modernisation technologique du ciel unique européen prévue dans le cadre du programme européen de R&D SESAR .

Le programme de R&D SESAR
(Single european sky ATM research)

Fondé par la Commission européenne et Eurocontrol, il a pour objet de développer pour les 30 prochaines années une nouvelle génération du système de gestion du trafic aérien européen sûre et performante, moins coûteuse et respectant les conditions d'un développement durable.

SESAR est un enjeu majeur car il constitue le cadre européen où seront développés et validés les futurs concepts opérationnels et techniques pour la navigation aérienne et permettra de synchroniser les mises en service opérationnelles de systèmes techniques ou de procédures.

À l'issue d'une première phase de travaux de R&D et démonstrations menées entre 2008 et 2014, le déploiement des fonctionnalités validées se fera progressivement entre 2015 et 2025. En parallèle, les travaux de R&D se poursuivront dans le cadre de SESAR 2020 depuis 2016 ; des démonstrations à grande échelle seront organisées pour préparer le déploiement opérationnel. La DGAC y participera afin de profiter des financements et des synergies européennes.

Source : réponses au questionnaire du rapporteur spécial

a) Des grands programmes dont le coût représente plus de 2,1 milliards d'euros pour les finances publiques

Pour répondre à cette double urgence, la DSNA porte actuellement plusieurs grands programmes techniques destinés à modifier en profondeur le travail des contrôleurs aériens , tant dans les centres en-route que dans les centres d'approche et dans les tours de contrôle des aérodromes.

Le coût de ces programmes techniques est considérable - un peu plus de 2 100 millions d'euros au total, la moitié ayant déjà été dépensée effectivement -, tout comme la durée de conception de la plupart d'entre eux, souvent largement supérieure à dix ans .

Coût des programmes techniques de modernisation
du contrôle de la navigation aérienne

(en millions d'euros)

Programme

Durée du programme

Coût total fin 2019

Coût 2020

Coût total programme après 2020

Coût total programme

4-Flight

2011-2027

545,1

51,2

253,7

850,0

Coflight

2003-2027

292,4

15,0

95,7

403,1

Sysat

2012-2032

50,4

29,5

350,1

430,0

Data Link

2006-2022

29,7

1,3

2,4

33,4

Erato

2002-2015

127,2

-

-

127,2

Autres programmes

-

98,5

30,6

168,1

297,2

Total

-

1 143,3

127,6

870,0

2 140,9

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial, actualisation septembre 2019

Alors qu'un seul d'entre eux a pour l'heure été livré (le programme Erato), ces programmes, dont certains ont été lancés au début des années 2000, ont pris un retard considérable , qui tend à devenir réellement problématique .

Ainsi, 4-Flight, nouveau système de contrôle complet conçu par l'industriel Thalès et principal programme porté par la DSNA, était censé être livré en 2015 . Or, au moment de la parution du rapport sénatorial précité, la DSNA n'envisageait plus de le mettre en service qu'à l'hiver 2021-2022 , soit 6 à 7 ans après l'échéance initialement prévue .

Ces programmes ont également généré d'importants surcoûts . Le coût estimé de 4-Flight est ainsi passé en quelques années de 583,0 millions d'euros à 850 millions d'euros .

b) Une réforme de la gouvernance des programmes pour lutter contre une dérive des coûts et des délais de mise en service

Le rapporteur spécial s'était vivement inquiété de ces retards et de ces surcoûts dans son rapport précité. Il s'était également interrogé sur la qualité de la programmation financière de la DSNA et sur la conduite globale de la modernisation de ses systèmes , menée par sa direction de la technique et de l'innovation (DTI).

Son analyse ayant été confortée par un rapport d'inspection commandé par la ministre en charge des transports au Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) , la DSNA a entrepris de réformer en profondeur la gestion de ses grands programmes.

Elle a tout d'abord décidé de renforcer la gouvernance de ce programme sensible en mettant en place des revues générales techniques périodiques placées sous la supervision d'un Comité de surveillance externe constitué de deux membres du CGEDD, d'une ingénieure générale de l'armement de la direction générale de l'armement (DGA) et du directeur exécutif du SESAR Deployment manager , en charge des innovations technologiques en matière de navigation aérienne au niveau de l'Union européenne.

Autre signe du caractère prioritaire accordé désormais à la modernisation des systèmes, la création d'une fonction de délégué aux grands programmes , chargé de leur supervision et de leur pilotage, placée directement auprès du directeur de la DSNA et confiée à son adjoint.

Enfin, un nouveau directeur a été nommé au mois de mars 2019 à la tête de la direction de la technique et de l'innovation (DTI) après un recrutement interministériel, alors qu'il était habituellement choisi en interne.

c) Les difficultés de 4-Fligt persistent, si bien qu'un nouveau retard du programme, en partie imputé à la crise sanitaire, est désormais acté

À la suite de la parution du rapport sénatorial, la DSNA avait finalisé en novembre 2018 pour un coût de 121 millions d'euros TTC la signature d'un avenant avec Thalès sur 4-Flight portant sur le complément de développement, le partage des surcoûts et les premières mises en services opérationnelles. Cet avenant était supposé enfin garantir l'achèvement du projet dans les délais prévus.

Toutefois, selon la DSNA, Thalès lui a reporté à la fin du mois de janvier 2020 qu'une revue approfondie du programme avait mis en évidence des difficultés importantes en termes d'assurance logicielle .

Toujours selon la DSNA, un groupe de travail commun a été mis en place en février et mars 2020 pour résoudre lesdits problèmes mais, comme le précise le projet annuel de performances du programme 212 « l'émergence de la crise Covid-19 a conduit à prendre des dispositions d'organisation qui ont très sensiblement retardé les activités en cours sur le programme tant à la DSNA que chez Thalès ».

Sans grande surprise, « les travaux d'analyse menés ont conduit la DSNA à prendre acte du fait que la mise en oeuvre du plan de récupération de Thalès cumulé aux effets de la crise Covid-19 affectait les objectifs calendaires de la feuille de route du programme découlant de novembre 2018 ».

En conséquence, la mise en service du système est désormais prévue au deuxième trimestre 2022 seulement dans le centre de contrôle en-route de Reims, au troisième trimestre 2022 dans celui d'Aix-en-Provence et avant la fin 2023 dans celui d'Athis-Mons, alors que la DSNA s'était précédemment engagée sur une mise en service à l'hiver 2021-2022

d) Une plus grande transparence sur les coûts et les délais des programmes de modernisation de la navigation aérienne à l'attention du Parlement

En ce qui concerne les données fournies au Parlement sur ces programmes, le rapporteur spécial constate que le projet annuel de performance du budget annexe « Contrôle et exploitation aérien » met pour la deuxième fois en oeuvre la recommandation n° 5 de son rapport précité, laquelle préconisait de « fournir au législateur des informations beaucoup plus détaillées sur les programmes de modernisation de la navigation aérienne dans le cadre des projets de loi de finances ».

Sont ainsi présentés un tableau synthétique des coûts de ces programmes et, pour chacun d'entre eux, les fonctionnalités et bénéfices attendus , les coûts détaillés du projet par année , un point d'avancement au 1 er septembre 2020 ainsi qu'une évaluation de l'évolution du coût et de la durée du projet entre son lancement et aujourd'hui.

Pour les trois principaux programmes de modernisation, ces informations peuvent être synthétisées dans le tableau ci-dessous.

Coût et durée des trois principaux programmes de la DSNA

Programme

Au lancement

Actualisation

Écarts

4-Flight

Coût total (en million d'euros)

582,90

850,0

+ 45,8 %

Durée totale (en mois)

180

216

+ 20,0 %

Cofligt

Coût total (en million d'euros)

175,1

403,1

+ 130,2 %

Durée totale (en mois)

156

276

+ 76,9

Sysat

Coût total (en million d'euros)

500,0

430,0

- 14,0 %

Durée totale (en mois)

228

202

- 11,4 %

Source : projet annuel de performances pour 2021

Le rapporteur spécial note toutefois que l'allongement de la durée de réalisation de 4-Flight , pourtant explicitement évoqué dans les extraits du projet annuel de performance précité, n'a pas été indiqué dans ce tableau .

Le coût de Coflight, système de traitement automatique des plans de vol s'appuyant sur une modélisation des vols en quatre dimensions, réalisé par un consortium franco-italien Thalès-Leonardo, qui avait été réévalué à 403,1 millions d'euros l'an passé, n'a pas été revu cette année.

Si le coût de Sysat, qui oeuvre à la modernisation des systèmes des tours de contrôle et centres d'approche, a été revu à la baisse par rapport aux chiffres annoncés en 2018, la raison en est la remise à plat en cours du programme pour les 70 aéroports du groupe 2 (c'est-à-dire l'ensemble des aéroports français hors aéroports parisiens).

La réflexion sur ce sujet n'étant pas encore aboutie, le chiffre de 430,0 millions d'euros annoncé par la DSNA pour le coût complet du programme doit être accueilli avec circonspection à ce stade.

2. Les autres investissements de la DGAC bénéficieront en 2021 d'un niveau de crédits en nette hausse par rapport à 2020

Les dépenses d'investissement des programmes 613 et 614 bénéficieront en 2021 de montants de crédits en hausse par rapport à ceux de 2020 avec respectivement 30,0 millions d'euros et 14,8 millions d'euros, contre 18,0 millions d'euros et 14,0 millions d'euros l'année précédente.

Les investissements du programme 614 porteront sur les domaines de la sûreté et de la sécurité de l'aviation civile , avec le développement du laboratoire de détection des explosifs artisanaux liquides sur le site du service technique de l'aviation civile à Biscarosse (opérationnel depuis 2018), les évolutions de l'application de gestion des habilitations et titres d'accès aux zones réservées des aéroports baptisée « STITCH » mise en service en 2019 et la mise en oeuvre du Passenger name record (données des dossiers passagers - PNR) en partenariat avec d'autres ministères 21 ( * ) .

Les investissements du programme 613, pour leur part, concernent le soutien général à l'aviation civile : investissements informatiques, avec notamment le développement de nouveaux systèmes d'information financière et des ressources humaines, maintien en conditions opérationnelles des systèmes actuels et investissements immobiliers, la DGAC étant implantée sur plus de trente sites en métropole et en outre-mer.

C. L'EFFONDREMENT DES RECETTES DU BACEA ENTRAÎNE UN RECOURS MASSIF À L'EMPRUNT EN 2020 ET EN 2021

1. La crise du transport aérien provoquée par la pandémie de Covid-19 a provoqué une explosion de l'endettement du BACEA qui atteindrait 2,1 milliards d'euros fin 2020

La dette du BACEA avait connu une forte augmentation dans les années qui avaient suivi la crise du transport aérien de 2009 pour atteindre un pic à 1,28 milliard d'euros au 31 décembre 2014 .

La DGAC avait par la suite entrepris de se désendetter année après année, si bien que l'encours de sa dette avait été ramené à 667,4 millions d'euros au 31 décembre 2019, en baisse de 47,9 % sur cinq ans .

Le rapporteur spécial avait systématiquement soutenu cette politique de désendettement du BACEA , laquelle lui apparaissait indispensable pour restaurer la soutenabilité de ce budget annexe mais également pour dégager des marges de manoeuvre si la croissance du transport aérien, très dynamique ces dernières années, venait à ralentir.

La crise économique d'une exceptionnelle gravité que connaît aujourd'hui le secteur en raison de la pandémie du Covid-19 est malheureusement venue démontrer à quel point ce désendettement était nécessaire puisque le BACEA est désormais obligé de se rendetter dans des proportions sans précédent dans son histoire pour jouer un rôle d' « amortisseur de crise » .

La chute brutale du trafic aérien et la mise en place d'un moratoire sur les redevances et les taxes payées par les compagnies aériennes vont provoquer en 2020 un effondrement de - 80 % des recettes du BACEA par rapport au niveau qui était prévu en loi de finances pour 2020.

À l'issue des deux premiers projets de loi de finances rectificatives pour 2020, la DGAC a été autorisée à emprunter cette année 1 250 millions d'euros .

Au regard de ses prévisions actuelles de dépenses et de recettes, la DGAC estime que le droit de recours à l'emprunt devra encore être majoré, et porté à environ 1 550 millions d'euros , soit 300 millions d'euros supplémentaires 22 ( * ) .

Ce droit au recours à l'emprunt de 1 550 millions d'euros aurait pour but, selon la DGAC, de conserver à la fin de l'année un seuil prudentiel de trésorerie minimal de 300 millions d'euros .

Au total, l'endettement de la DGAC serait susceptible de progresser de 1,4 milliard d'euros en 2020 pour atteindre l'encours sans précédent de 2,1 milliards d'euros (contre un maximum historique de 1,3 milliard d'euros atteint en 2014).

2. La hausse de l'endettement du BACEA va se poursuivre en 2021 et 2022, au point de durablement remettre en cause la soutenabilité de ce budget annexe

Au vu des prévisions de reprise progressive du trafic sur les prochaines années, et d'un retour à un niveau normal de trafic qui ne devrait pas advenir avant 2024 dans les hypothèses les plus optimistes ( la date de 2029 est désormais avancée par Eurocontrol), le niveau d'emprunt devrait rester exceptionnellement important sur les exercices 2021 et 2022.

A ce stade, la DGAC estime en effet qu'elle devra emprunter 761 millions d'euros supplémentaires en 2021 et 463 millions d'euros de plus en 2022. Sur la base de ces hypothèses, le niveau de dette pourrait atteindre 2,6 milliards d'euros au 31 décembre 2021 puis un pic à 2,8 milliards d'euros au 31 décembre 2022.

Évolution de l'endettement du budget annexe de 2008 à 2021

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Selon les réponses au questionnaire du rapporteur spécial, la DGAC estime que « la stratégie financière du BACEA repose sur une augmentation substantielle de l'endettement , mais limitée dans le temps , avec un objectif de désendettement dès 2023 ».

Toujours selon la DGAC, « à cet horizon, les remboursements d'emprunt (estimés à 510 millions d'euros ) devraient redevenir excédentaires par rapport aux nouveaux emprunts contractés (estimés à 378 millions d'euros ), permettant un désendettement sur l'exercice 2023 évalué à 1 32 millions d'euros ».

Si le rapporteur spécial ne peut que saluer cette volonté de la DGAC de désendetter le plus rapidement possible le BACEA , il ne saurait cacher son scepticisme quant à sa réalisation effective, tant la soutenabilité du BACEA lui paraît désormais menacée .

Ses recettes étant entièrement indexées sur le trafic aérien , la crise sans précédent de ce secteur, susceptible de se poursuivre pendant de longues années , pourrait durablement bouleverser le modèle économique sur lequel était fondé le financement de la DGAC.

C'est pourquoi il lui apparaît indispensable de réfléchir dès à présent aux solutions qui pourraient être envisagées pour éviter que ne s'installe une situation problématique qui verrait un budget annexe porter une dette toujours plus importante qu'il deviendrait incapable de rembourser grâce aux recettes d'un secteur du transport aérien trop durablement affaibli .

Dans cette hypothèse, pourrait notamment être envisagée un transfert de la dette du BACEA au budget général ou le versement de subventions au BACEA .

LES MODIFICATIONS APPORTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première délibération, l'Assemblée nationale a minoré , à l'initiative de Zivka Park (La République en Marche, Val d'Oise) et de Laurent Saint-Martin, rapporteur général de la commission des finances, les crédits du programme 159 « Expertise, information géographique et économie » de 121 000 euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) pour majorer d'autant les crédits du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » afin de financer 1 ETPT supplémentaire pour l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) , ce qui permettra à cette autorité administrative indépendante (AAI) de disposer de 12 ETPT pour mener à bien ses missions en 2021 et non de 11 ETPT comme le prévoyait initialement le projet de loi de finances pour 2021.

Elle a également tire les conséquences, sur le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », des décisions annoncées lors du rendez-vous salarial 2019 concernant la revalorisation du barème de remboursement des frais de repas pour les agents publics en formation ou en mission , avec un rehaussement de la prise en charge de 15,25 euros par repas à 17,50 euros . À cette fin, elle a majoré de :

- 13 269 euros (AE=CP) les crédits du programme « Soutien aux prestations de l'aviation civile » ;

- 65 808 euros (AE=CP) les crédits du programme « Navigation aérienne » ;

- 42 825 euros (AE=CP) les crédits du programme « Transports aériens, surveillance et certification ».

Pour les mêmes raisons, elle a également majoré de 1 660 euros (AE=CP) les crédits du programme 159 « Expertise, information géographique et économie ».

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

ARTICLE 54 septies (nouveau)

Remise d'un rapport au Parlement sur la baisse des recettes de la taxe sur les nuisances sonores aériennes induite par la crise liée à l'épidémie de Covid-19

Le présent article prévoit la remise d'un rapport au Parlement sur la baisse des recettes de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) induite par la crise liée à l'épidémie de Covid-19.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LA TAXE SUR LES NUISANCES SONORES AÉRIENNES (TNSA), DONT LE PRODUIT DÉPEND DU TRAFIC AÉRIEN, PERMET DE FINANCER L'INSONORISATION DES LOGEMENTS DES RIVERAINS DES AÉROPORTS

A. LES EXPLOITANTS D'AÉRODROMES CONTRIBUENT AU FINANCEMENT DES DÉPENSES D'ATTÉNUATION DES DÉPENSES SONORES

L'article L. 571-14 du code de l'environnement prévoit que les exploitants des onze plus grands aérodromes français contribuent aux dépenses engagées par les riverains de ces aérodromes pour la mise en oeuvre des dispositions nécessaires à l'atténuation des nuisances sonores.

Sont concernés les riverains des aéroports de Bâle-Mulhouse, Beauvais-Tillé, Bordeaux-Mérignac, Lyon-Saint-Exupéry, Marseille-Provence, Nantes-Atlantique, Nice-Côte d'Azur, Paris-Charles de Gaulle, Paris-Orly, Paris-Le Bourget et Toulouse Blagnac, qui répondent à l'une des deux qualifications prévues par l'article 1609 quatervicies A du code général des impôts.

Les aéroports tenus d'aider leurs riverains à insonoriser leurs logements

L'article 1609 quatervicies du code général des impôts prévoit que deux catégories d'exploitants d'aérodromes doivent aider leurs riverains à insonoriser leurs logements.

La première catégorie correspond aux personnes publiques ou privées exploitant des aérodromes pour lesquels le nombre annuel des mouvements d'aéronefs de masse maximale au décollage supérieure ou égale à 20 tonnes a dépassé vingt mille lors de l'une des cinq années civiles précédentes.

La seconde catégorie correspond aux personnes publiques ou privées exploitant un aérodrome pour lequel le nombre annuel des mouvements d'aéronefs de masse maximale au décollage supérieure ou égale à 2 tonnes a dépassé cinquante mille lors de l'une des cinq années civiles précédentes, si les plans d'exposition au bruit ou de gêne sonore de cet aérodrome possèdent un domaine d'intersection avec les plans d'exposition au bruit ou de gêne sonore d'un aérodrome de la première catégorie.

Source : article 1609 quatervicies A du code général des impôts

L'aide à l'insonorisation sert au financement des opérations d'insonorisation de logements, d'établissements d'enseignement ou de locaux sanitaires et sociaux.

La gestion des dossiers d'aide à l'insonorisation est confiée directement aux gestionnaires d'aéroports, qui se sont dotés de services dédiés. Aéroports de Paris dispose ainsi d'un site internet d'information sur les aides ( www.entrevoisins.fr ) et d'un service en ligne d'aide à l'insonorisation (https://www.aideinsono.fr/).

Les aides visant à insonoriser les logements des riverains financent :

- les études et opérations préalables à la réalisation des travaux de renforcement de l'isolation acoustique;

- les travaux de renforcement de l'isolation acoustique et ventilation induits;

- les honoraires des syndics (dans la limite de 2 % du montant des travaux).

L'aide est destinée à l'insonorisation des seuls bâtiments répondant à la double condition suivante :

- situés en tout ou partie dans le plan de gêne sonore (PGS) prévu à l'article L. 571-15 du code de l'environnement et existants ou autorisés à la date de publication de ce dernier ;

- situés en dehors du plan d'exposition au bruit (PEB) en vigueur à la date de la délivrance de l'autorisation de construire.

Cette aide ne peut s'appliquer qu'à un montant de travaux limité à une valeur forfaitaire déterminée en fonction du nombre de pièces du logement et de la zone du PGS ou ce dernier est situé.

En outre, elle ne peut dépasser un certain pourcentage du montant des prestations réellement exécutées (80 % en règle générale, pouvant être portés à 90 % ou 100 % sous conditions de ressources, et 95 % en cas d'opérations groupées).

Les aides versées par les exploitants d'aérodromes aux riverains pour insonoriser leurs logements sont elles-mêmes financées par la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA).

B. LES CONTRIBUTIONS DES AÉRODROMES SONT ELLES-MÊMES FINANCÉES PAR LA TAXE SUR LES NUISANCES SONORES AÉRIENNES (TNSA)

La taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) prévue à l'article 1609 quatervicies A du code général des impôts est perçue par les onze principaux aéroports français cités supra .

Son produit - 49 millions d'euros en 2019 - est affecté au financement des aides versées aux riverains pour l'insonorisation des bâtiments et, le cas échéant, dans la limite des deux tiers du produit annuel de la taxe, au remboursement à des personnes publiques des annuités des emprunts qu'elles ont contractés ou des avances qu'elles ont consenties pour financer des travaux de réduction des nuisances sonores prévus par des conventions passées avec l'exploitant de l'aérodrome.

La TNSA est due par les exploitant d'aéronefs ou, à défaut, par leurs propriétaires. En sont exonérés les aéronefs de masse maximale au décollage inférieure à 2 tonnes et les aéronefs d'État ou participant à des missions de protection civile ou de lutte contre l'incendie.

Le fait générateur de la TNSA est constitué par les décollages d'aéronefs sur les onze aérodromes précités. La taxe est exigible à la date du fait générateur.

La TNSA est assise sur le logarithme décimal de la masse maximale au décollage des aéronefs, exprimée en tonnes. Des coefficients de modulation prennent en compte, dans un rapport de 0,5 à 120, l'heure de décollage et les caractéristiques acoustiques de l'appareil.

Cette taxe répond en effet au principe du pollueur-payeur, de sorte que les avions les plus bruyants aux heures qui gênent le plus les riverains sont les plus taxés.

Le tarif de la taxe applicable sur chaque aérodrome est compris entre la valeur inférieure et la valeur supérieure du groupe dont il relève. Il est fonction du besoin de financement sur chaque aérodrome, tel qu'il résulte notamment des aides à accorder en application de la réglementation en vigueur, de l'évolution prévisible des plans de gêne sonore et de celle des coûts d'insonorisation.

Les trois groupes sont les suivants :

- les aérodromes de Paris-Charles-de-Gaulle, Paris-Orly et de Paris-Le Bourget, pour lesquels les tarifs de la TNSA sont compris entre 20 et 40 euros;

- les aérodromes de Nantes-Atlantique et de Toulouse-Blagnac, pour lesquels les tarifs de la TNSA sont compris entre 10 et 20 euros ;

- les autres aérodromes pour lesquels la TNSA est due à un tarif inférieur à 10 euros.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : LA REMISE D'UN RAPPORT AU PARLEMENT SUR LES PERTES DE RECETTES DE LA TNSA ET LES DIFFICULTÉS DE FINANCEMENT DE L'INSONORISATION DES LOGEMENTS

Le présent article 54 septies est issu d'un amendement présenté par Zivka Park (La République en Marche, Val d'Oise). Il a reçu deux avis favorables de la commission des finances de l'Assemblée nationale et du Gouvernement.

Il prévoit que le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de quatre mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur la baisse des recettes de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) induite par la crise liée à l'épidémie de Covid-19 ainsi que sur ses conséquences sur le financement des aides à l'insonorisation des bâtiments situés à proximité de chaque aéroport concerné.

Ce rapport propose des solutions permettant de combler les retards constatés en 2020 et 2021. Il étudie notamment la possibilité d'une compensation partielle ou totale ainsi que l'opportunité d'utiliser les recettes de la TNSA pour rembourser les avances qui seraient consenties par les exploitants d'aéroport pour l'accélération des travaux d'insonorisation.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : LA NÉCESSITÉ DE TROUVER UNE SOLUTION RAPIDEMENT POUR FINANCER L'INSONORISATION DES LOGEMENTS DES RIVERAINS DES AÉROPORTS

Ainsi qu'il a été rappelé supra , le produit de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA), payée par les compagnies aériennes, est reversé aux exploitants d'aéroports en vue du financement des aides accordées aux riverains pour l'atténuation des nuisances sonores ou au remboursement à des personnes publiques des avances consenties pour financer des travaux de réduction des nuisances sonores.

Les recettes de cette taxe sont très affectées par la crise sanitaire provoquée par la Covid-19 puisque elles sont désormais estimées en 2020 à moins de 20 millions d'euros seulement contre 54,3 millions d'euros initialement prévus (soit une baisse de - 65 % ), 37,6 millions d'euros en 2021 contre 54,6 millions d'euros initialement prévus (soit une baisse de - 31 % ) et 43,6 millions d'euros en 2022 contre 55 millions d'euros initialement prévus (soit une baisse de - 20 %) .

Sur la seule période 2020-2021 la perte de financement pour le dispositif d'aide à l'insonorisation des riverains est ainsi estimé à l'équivalent d'une année de recettes de la TNSA : en conséquence, 35 millions d'euros devraient faire défaut pour mener à bien la politique d'insonorisation prévue pour l'année 2020 et 17 millions d'euros devraient manquer en 2021.

Le rapport prévu par le présent article 54 septies , qui sera remis quatre mois après la promulgation du présent projet de loi de finances pour 2021, doit permettre de faire le point sur les difficultés engendrées par cette baisse sans précédent des recettes de la TNSA sur l'insonorisation des logements des riverains des aéroports et proposer des solutions directement opérationnelles .

Il est en effet essentiel de combler le plus rapidement possible les retards pris dans la politique d'insonorisation des logements , dans la mesure où les aides financées par la TNSA permettent chaque année d'améliorer les conditions de vie de milliers de personnes qui souffrent du bruit des avions qui décollent ou atterrissent près de chez eux.

Décision de la commission des finances : la commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 18 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a procédé à l'examen des rapports de Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial, sur les programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie » et « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et le compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) », de MM. Hervé Maurey et Stéphane Sautarel, rapporteurs spéciaux, sur les programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », et de M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial, sur le programme « Expertise, information géographique et météorologie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

M. Claude Raynal , président . - Je vous propose d'entendre d'abord les rapporteurs présenter les trois rapports spéciaux que nous devons examiner. Nous aurons ainsi une vision globale pour entamer notre discussion. Nous commençons par l'examen de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Mme Christine Lavarde , rapporteur spécial sur les programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie » et « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables », de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et le compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) » . - Je ne pourrai malheureusement pas aborder le rapport dans le détail et je me concentrerai sur ses points saillants, afin de susciter le débat et d'éventuelles questions.

Tout d'abord, il me semble important de souligner que, si les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » sont en hausse, celle-ci s'opère en trompe-l'oeil, sous l'effet de plusieurs changements de périmètre. Les crédits augmentent de 7,08 milliards d'euros, ce qui est significatif, notamment en raison de la budgétisation des charges de service public de l'énergie, auparavant retracées sur le compte d'affectation spéciale « Transition énergétique », ce qui apporte 6,6 milliards d'euros aux crédits de la mission. Par ailleurs, la budgétisation sur le programme 181 de l'ancien fonds « Barnier » augmente les crédits de 205 millions d'euros. Je vois plutôt d'un oeil positif cette budgétisation puisque, d'une part, cela donnera au Parlement les moyens de se prononcer sur les dépenses et plus seulement sur les recettes et, d'autre part, la dépense ne sera plus limitée, car il sera toujours possible de procéder à des ajustements en cours d'année. Enfin, la bascule du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) vers la prime de rénovation énergétique pour les ménages aux revenus intermédiaires financée par le programme 174, rapporte 350 millions d'euros à la mission. Une fois traités ces effets de périmètre, on constate que les crédits de paiement, hors transports, diminuent de 6 %, soit de 500 millions d'euros.

Ils diminuent notamment de 290 millions d'euros sur le programme 174, à la suite d'un durcissement des dispositifs de prime à la conversion et de bonus électrique. On observe aussi une baisse de 30 millions d'euros des prestations versées pour la suite de l'après-mines. Par ailleurs, les crédits diminuent au niveau du chèque énergie pour tenir compte d'une absence d'encaissement des chèques émis l'an dernier, alors que la précarité énergétique n'a sans doute pas diminué dans la période que nous venons de vivre. Les crédits du programme 345 sont aussi en baisse, au titre de la révision des conditions d'achat des contrats photovoltaïques, une question sur laquelle nous reviendrons, car un article a été ajouté à l'Assemblée nationale. Enfin, on observe une diminution de 37 millions d'euros sur le programme 181, avec une baisse de la subvention versée à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), ce qui interroge, notamment sur la question des ressources humaines.

En effet, les ressources humaines du ministère sont en diminution, ce qui pourrait entraîner des difficultés, notamment dans le cadre de la mise en oeuvre du plan de relance. Plusieurs opérateurs - dont l'Ademe et l'Office français de la biodiversité (OFB) - nous ont signalé qu'il leur serait difficile de mettre en oeuvre les appels d'offres et de dépenser les crédits.

Je note que le programme « Paysages, eau et biodiversité » est le seul dont les crédits augmentent.

Je tiens à souligner que le Parlement a peu de prise sur la politique de l'énergie et je déplore notamment le fait que la programmation pluriannuelle de l'énergie, validée par un décret publié en avril 2020, n'ait toujours pas fait l'objet d'un débat devant le Parlement, comme cela est prévu par le code de l'énergie. Concernant cette politique, je souhaite attirer votre attention sur plusieurs points qui pourraient créer des difficultés dans les années à venir.

Tout d'abord, je tiens à signaler l'apparition d'une sorte de bulle sur la filière biométhane, dont les charges évoluent de manière très significative puisqu'elles ont été multipliées par cinq entre 2019 et 2021, par deux entre 2020 et 2021. Par ailleurs, je note que les charges du photovoltaïque représentent 50 % des charges des énergies renouvelables (EnR) en 2021. Enfin, d'importants moyens sont consacrés au développement de l'hydrogène. En effet, en plus des 7 milliards d'euros prévus par le plan de relance, des dispositifs soutiennent le développement des filières EnR. En 2018, 100 millions d'euros seulement étaient consacrés à l'hydrogène et, dans la presse, certains se demandent s'il s'agit vraiment de l'Eldorado de demain. Il ne faudrait pas mettre trop de moyens et créer encore une nouvelle bulle, sur laquelle nous aurions à revenir dans quelques années.

Au sujet du soutien à la décarbonation de l'économie, je tiens à rappeler qu'il est perfectible. Certes, le chèque énergie est un bien meilleur dispositif que les anciens tarifs de première nécessité pour l'électricité et tarif spécial solidarité gaz, mais nous devons faire davantage. En effet, si l'on envoie des chèques et que le taux d'encaissement n'est toujours pas de 100 %, cela démontre un déficit certain de communication.

Sur la disparition du CITE qui interviendra au 31 décembre 2020, mon avis est partagé puisque cela entraîne à la fois une baisse des niveaux des aides et une dotation supplémentaire dans le cadre du plan de relance pour l'élargissement des bénéficiaires de la prime.

Enfin, concernant l'acquisition des véhicules propres, deux dispositifs sont en place dans le cadre du programme 174 : le bonus et la prime à la conversion, pour lesquels 507 millions d'euros sont prévus et auxquels viendront s'ajouter 732 millions d'euros du plan de relance. Si les critères du bonus se sont assouplis, ceux de la prime à la conversion restent trop restrictifs. Ainsi, les ménages les plus modestes, même en cumulant les dispositifs à leurs taux maximum, auront un reste à charge représentant une année de revenu fiscal de référence par part. Cela n'encouragera pas au verdissement du parc automobile, et je plaide pour une plus grande souplesse des dispositifs.

Sur cette mission, l'articulation sera complexe avec le plan de relance qui prévoit 33 milliards d'euros pour l'écologie. L'Ademe sera chargée d'une partie de la mise en oeuvre, avec des effectifs en diminution. Elle devra donc recruter des contractuels, qui ne resteront que dix-huit mois, quand le plan de relance s'étend sur deux ans. Il y aura donc un moment où l'on aura de l'argent, mais personne pour suivre les dossiers.

M. Claude Raynal , président . - Nous passons à présent à l'examen des programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État », présentés par Hervé Maurey et Stéphane Sautarel.

M. Hervé Maurey , rapporteur spécial sur les programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » . - Le budget que l'État consacrera aux transports terrestres en 2021 est exceptionnel à bien des égards. En effet, ce secteur a été parmi les plus sévèrement affectés par la crise sanitaire et économique provoquée par la covid, en particulier lors du confinement du printemps 2020, qui a entraîné une chute inédite des déplacements sur le territoire.

Les effets économiques sur les opérateurs sont très sévères. Ainsi, le groupe SNCF a accusé une perte de chiffre d'affaires de 4,9 milliards d'euros à la fin de l'été 2020, les sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA) affichent 2 milliards d'euros de pertes, et Île-de-France Mobilités (IDFM) déplore 2,6 milliards d'euros de moindres recettes à l'issue du premier confinement.

Cette crise sans précédent est intervenue quelques mois à peine après la promulgation de la loi d'orientation des mobilités (LOM), laquelle prévoyait pour la première fois une programmation financière pluriannuelle pour les infrastructures de transport, portant sur la période 2018-2027. Cette programmation nous permettait enfin de disposer d'une feuille de route validée par le Parlement dans un domaine stratégique pour notre avenir.

Au coeur de cette programmation figurait la nécessité absolue de régénérer et de moderniser nos grands réseaux structurants - routier, ferré et fluvial -, indispensables aux transports du quotidien et depuis trop longtemps victimes de sous-investissement chronique.

La LOM prévoit en effet que l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), par laquelle transite la majeure partie des crédits destinés aux infrastructures de transport dans notre pays, soit dotée de 13,4 milliards d'euros sur la période 2018-2022, pour investir dans les infrastructures de transport.

Nous avons la conviction que la crise sanitaire et économique actuelle ne doit surtout pas conduire à renoncer à cette feuille de route, mais au contraire en accélérer la mise en oeuvre. Nous comptons à cet égard sur le plan de relance pour permettre la réalisation effective des objectifs de la LOM.

Les recettes de l'Afitf ont été très sévèrement touchées par les effets de la crise sanitaire, les recettes d'écocontribution du transport aérien ayant notamment été réduites à néant. Cependant, ses dépenses devraient atteindre 2,9 milliards d'euros en 2020, soit un montant quasi conforme à ce que prévoit la LOM, grâce à une subvention de 250 millions d'euros votée lors du troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2020, ainsi qu'à une plus grande mobilisation du produit des amendes radar prévue dans le quatrième PLFR pour 2020.

M. Stéphane Sautarel , rapporteur spécial sur les programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » . - Nous devions recevoir, au plus tard le 1 er octobre, un rapport sur les recettes de l'Afitf en 2020, prévu par l'article 60 de la troisième loi de finances rectificative (LFR3) pour 2020. Ce rapport nous aurait permis de faire un point exhaustif sur la situation de cet opérateur, mais il ne nous a toujours pas été transmis, bien que nous l'ayons demandé à plusieurs reprises à la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM). Nous tenons à dire ici que cette situation n'est pas admissible et qu'elle nuit gravement à la qualité du contrôle que nous sommes en mesure d'exercer sur cette agence.

Malheureusement, et pour les mêmes raisons, le budget de l'Afitf pour 2021 nous est également largement inconnu. Les éléments très parcellaires qui nous ont été transmis à ce stade laissent à penser que le Gouvernement a bien l'intention de respecter la trajectoire fixée par la LOM, avec 2 782 millions d'euros de dépenses. Nous avons bien noté que le ministre chargé des transports, Jean-Baptiste Djebbari, s'y est engagé la semaine dernière lors de son audition par la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Toutefois, il paraît déjà clair que les recettes destinées à financer ces dépenses - elles prévoient toujours, par exemple, 230 millions d'euros d'éco-contribution du transport aérien - ne sont pas crédibles, compte tenu de la poursuite de la crise sanitaire.

C'est la raison pour laquelle nous proposerons au Sénat d'adopter un amendement à l'article 24 du projet de loi de finances, visant à relever de 1 285 millions d'euros à 1 685 millions d'euros, soit 400 millions d'euros supplémentaires, le plafond de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) affecté à l'Afitf en 2021.

La TICPE est, en effet, une recette fiable sur laquelle l'Agence pourra compter de façon certaine. Si la situation est meilleure que ce que nous craignons, et que les autres recettes de l'Afitf sont perçues en tout ou partie, il sera toujours possible de réajuster à un niveau plus bas le plafond de la TICPE dans le collectif budgétaire de fin de gestion 2021.

À périmètre constant, les crédits du programme 203, qui financent principalement les services de transport, augmenteront fortement en 2021, de 18,8 % en autorisations d'engagement (AE), et de 7,9 % en crédits de paiement (CP), pour atteindre 3 722,8 millions d'euros. La subvention allouée à SNCF Réseau augmentera de 80 millions d'euros, et 170 millions d'euros pérennes sont prévus pour relancer durablement le fret ferroviaire.

M. Hervé Maurey , rapporteur spécial . - Les crédits de l'ancien compte d'affectation spéciale (CAS) « Services nationaux de transports conventionnés de voyageurs », destinés au financement des trains d'équilibre du territoire (TET), sont rebudgétisés au sein du programme 203, à compter du présent projet de loi de finances pour 2021. Leur montant diminue de 6,3 %, pour s'établir à 293 millions d'euros, ce qui s'explique en partie par le transfert de certaines de ces lignes aux régions.

Le plan de relance prévoit une mobilisation financière sans précédent en faveur des infrastructures et mobilités vertes, avec notamment 650 millions d'euros pour le ferroviaire - petites lignes, trains de nuit, infrastructures multimodales de fret -, 900 millions d'euros pour les mobilités alternatives à la voiture - vélos, transports en commun -, 550 millions d'euros pour compléter les crédits de l'Afitf en faveur des infrastructures, 250 millions d'euros pour la modernisation du réseau routier national (RRN), 100 millions d'euros pour les ponts ou encore 175 millions d'euros pour le verdissement des ports.

Ces sommes sont considérables, encore faudra-t-il qu'elles puissent effectivement être dépensées en 2021 et 2022 pour avoir un véritable effet contracyclique et que les effectifs des opérateurs chargés des travaux soient suffisants.

En outre, nous serons très attentifs à ce que ces crédits du plan de relance viennent bien s'ajouter et non pas se substituer aux montants déjà prévus par la LOM.

Quelques mots précisément sur les trois grands opérateurs qui relèvent du programme 203 : SNCF Réseau, la Société du Grand Paris (SGP) et Voies navigables de France (VNF).

Le groupe SNCF, considérablement fragilisé par la crise sanitaire, devrait bénéficier d'une recapitalisation de 4,05 milliards d'euros d'ici à la fin de l'année 2020 ou début 2021, dont le montant sera immédiatement transféré à SNCF Réseau. Sur cette somme, 2,3 milliards d'euros devraient être directement dévolus au rétablissement de l'investissement annuel de régénération des voies, 1,5 milliard d'euros correspondent aux investissements relatifs à la fin de l'utilisation du glyphosate sur les voies, la sécurisation des ponts et les investissements de sécurité nécessaires et 300 millions d'euros devraient être dédiés aux petites lignes.

M. Stéphane Sautarel , rapporteur spécial . - Nous serons très attentifs à ce que SNCF Réseau reçoive bien tous les financements dont l'entreprise a besoin pour poursuivre la modernisation du réseau structurant. Il s'agit là, en effet, d'une des principales priorités décidées par le Parlement dans le cadre de la LOM.

En ce qui concerne la dette de l'opérateur, l'État a repris, en 2020, 25 milliards d'euros de dette de SNCF Réseau, afin d'améliorer la situation financière de l'entreprise, et 1,7 milliard d'euros de principal devrait avoir été amorti d'ici à la fin de l'année 2020.

En 2021, l'État devrait amortir 1,3 milliard d'euros de principal et s'acquitter de 692 millions d'euros de charge d'intérêt, cette dernière somme étant retracée par le programme 355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État ». De plus, 10 milliards d'euros de dette supplémentaire de SNCF Réseau seront transférés à l'État en 2022.

La Société du Grand Paris, chargée de construire pour 35,6 milliards d'euros le Grand Paris Express, a vu ses chantiers ralentis par la crise sanitaire, si bien que, compte tenu des retards préexistants, il paraît désormais impossible de mettre en service le système complet composé des tronçons des deux lignes 16 et 17 pour les jeux Olympiques (JO) et les jeux Paralympiques (JOP) de 2024, contrairement à l'objectif fixé par le Premier ministre, le 22 février 2018.

Une expertise indépendante doit venir confirmer dans le détail ce qui pourra ou non être réalisé à cette date. Nous serons très attentifs à ce que la SGP réalise dans les temps tout ce qui pourra l'être, sans dérives de coûts supplémentaires.

Comme l'ont montré nos collègues, membres du groupe de travail sur les coûts et le financement du Grand Paris Express, dans leur communication du 14 octobre dernier, les entreprises franciliennes, elles aussi durement touchées par la crise économique, expriment aujourd'hui un véritable ras-le-bol fiscal, à la suite des diverses hausses de taxes affectées à la SGP en 2019 et en 2020.

Dans ce contexte, l'objectif prioritaire de l'opérateur doit être de sécuriser ses financements de long terme en souscrivant des Green bonds sur les marchés pour bénéficier des taux exceptionnellement bas. Il y là, selon le président du directoire que nous avons entendu, des gisements d'économie potentiels très significatifs pour le projet.

Par ailleurs, la poursuite de la hausse des effectifs de la SGP, qui passeront de 585 équivalents temps plein travaillé (ETPT), en 2020, à 875 ETPT en 2021, va incontestablement dans le bon sens, compte tenu de l'ampleur des enjeux techniques et financiers à maîtriser.

L'établissement Voies navigables de France (VNF) continue à consentir d'importants efforts de réduction de ses personnels, avec 99 ETPT en moins en 2021, ce qui suscite des inquiétudes, de nombreuses installations nécessitant des interventions humaines.

Grâce aux crédits du plan de relance et de l'Afitf, VNF va pouvoir investir massivement pour remettre à niveau le réseau dont il a la charge. Selon nos informations, 160 projets ont déjà été identifiés. Tout l'enjeu va résider dans la capacité de l'établissement à les mener de front sur les seules années 2021 et 2022.

M. Hervé Maurey , rapporteur spécial . - Nous en venons enfin au programme 205 « Affaires maritimes » qui joue un rôle économique et social important et porte des fonctions régaliennes essentielles, la France disposant du deuxième domaine maritime le plus vaste du monde, avec plus de 5 000 kilomètres de côtes et 10 millions de kilomètres carrés de zones économiques exclusives (ZEE), dont 97 % en outre-mer.

La création d'un ministère spécifiquement chargé de la mer vise à montrer que l'État entend enfin consacrer davantage d'attention à ce domaine stratégique pour l'avenir de notre pays.

La dotation du programme, en 2021, s'établit à 155,2 millions d'euros en AE et 159,4 millions d'euros en CP, en baisse de 2,9 % en AE et de 1 % en CP. Comme les années précédentes, le poste budgétaire essentiel de ce programme concerne les exonérations de cotisations sociales patronales pour la marine marchande, vitales pour le pavillon français dans un contexte de concurrence mondiale exacerbée.

Toutefois, la sécurité et la sûreté maritime bénéficieront de crédits importants dans le plan de relance, puisque 25 millions d'euros sont prévus pour moderniser les infrastructures des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (Cross), ainsi que 25 millions d'euros pour renouveler la flotte de baliseurs, avec un projet de navire à hydrogène qui nous laisse, pour le coup, un peu sceptiques quant à sa rapide réalisation.

En conclusion, et en dépit des critiques que nous avons émises sur l'opacité de l'Afitf et sur les incertitudes qui pèsent sur ses recettes, nous sommes favorables aux crédits des programmes 203, 205 et 355 que nous vous avons présentés, et nous appelons par conséquent à adopter les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

M. Claude Raynal , président . - Vincent Capo-Canellas va nous présenter le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » et le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

M. Vincent Capo-Canellas , rapporteur spécial . - Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, comme vient de le préciser le président, je vous présenterai pour ma part le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie », ainsi que le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

Le programme 159 regroupe, depuis 2017, les subventions pour charges de service public du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et de Météo-France.

Si les trois opérateurs du programme se sont vu signifier, par le Gouvernement, des trajectoires financières très exigeantes d'ici à 2022, elles ont le mérite de rompre avec le manque de visibilité pluriannuelle dont ils souffraient jusqu'ici. Elles sont cependant difficiles à tenir.

Concernant Météo-France, qui joue un rôle essentiel pour la sécurité des personnes et des biens face à la multiplication des événements climatiques extrêmes, comme nous l'avons encore vu récemment avec les inondations de la vallée de la Roya, la subvention pour charges de service public portée par le programme 159 va diminuer, en 2021, pour s'établir à 185,1 millions d'euros. Dans le même temps, ses effectifs baisseront de 95 ETPT, un mouvement qui se poursuivra l'année prochaine.

Le réseau territorial évolue fortement dans le cadre du programme Action publique 2022. Ses effectifs vont diminuer de 40 %, de nombreuses activités étant regroupées dans la Métropole de Toulouse. Cette centralisation est rendue possible par les évolutions scientifiques et technologiques, qui permettent désormais de conduire un certain nombre de tâches météorologiques à distance. Une centralisation diversement vécue dans les territoires.

Pour rester un opérateur météorologique de rang mondial, Météo-France se procure actuellement un nouveau supercalculateur qui permettra de multiplier par 5,45 sa capacité de calcul. Un investissement important, qu'il conviendra de renouveler régulièrement. Ce nouveau matériel nécessite un investissement total de 144 millions d'euros sur la période 2019-2025. L'État versera, à ce titre, 8,3 millions d'euros de subvention à l'opérateur en 2021.

Si l'IGN voit sa subvention pour charges de service public augmenter légèrement en 2021, passant à 89,2 millions d'euros, ses effectifs seront en baisse, avec une suppression de 36 ETPT. Alors que son modèle économique est sévèrement fragilisé par l'avènement de l' open data , l'objectif de cet établissement, dans le cadre du programme Action publique 2022, est de devenir l'opérateur interministériel unique en matière de données géographiques souveraines.

Le Cerema, pour sa part, cherche à se réinventer dans un contexte où ses moyens diminuent fortement depuis sa création en 2014 et diminueront encore jusqu'en 2022, au rythme d'une réduction annuelle de 5 millions d'euros de sa subvention pour charges de service public - qui atteindra 195,1 millions d'euros en 2021 - et de 87 ETPT, le plafond d'emplois de l'opérateur sera de 2 507 ETPT en 2021.

Le principal enjeu pour cet opérateur consiste à mettre en oeuvre une collaboration beaucoup plus étroite avec les collectivités territoriales, ainsi qu'avec l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) en cours de création. Le projet stratégique que porte son directeur général devrait lui permettre d'y parvenir, si nous veillons à lui laisser les marges de manoeuvre financières dont il aura besoin en 2022 pour ne pas être confronté à de sévères difficultés.

J'en viens à présent au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (Bacea), qui porte les 2,3 milliards d'euros de crédits de la direction générale de l'aviation civile (DGAC). Il est exclusivement financé par le secteur du transport aérien. En conséquence, l'effondrement du trafic aérien provoqué, à partir de mars 2020, par la pandémie de la covid-19, a bouleversé son équilibre financier.

La crise sanitaire a en effet entraîné une quasi mise à l'arrêt du trafic aérien en Europe au printemps 2020. En dépit d'une légère reprise pendant l'été, la situation s'est rapidement dégradée à l'automne, avant de redevenir catastrophique avec l'instauration de nouveaux confinements, en fin d'année. Au total, la DGAC anticipait un recul du trafic de 65 % par rapport à 2019, mais les chiffres finaux devraient être encore plus négatifs ; au mois de novembre, les estimations évoquent 15 % de trafic. Le retour du trafic à son niveau d'avant-crise est désormais attendu pour 2024, au mieux, certaines hypothèses évoquant même la date de 2029. Les variables étant l'évolution de la pandémie et la création d'un vaccin.

La mise en place de tests a commencé. Mais ils doivent être validés par les pays de départ et d'arrivée, et permettre l'entrée sur les territoires - cela existe déjà avec les États-Unis. Une possibilité que les aéroports ont tenté de promouvoir avec les compagnies, dont la mise en place suppose des corridors sanitaires. Ces tentatives doivent être soutenues, même si elles n'auront que très peu d'impact sur le trafic.

Les compagnies aériennes françaises, déjà fragiles avant la crise, pourraient enregistrer 4 milliards d'euros de pertes en 2020. Après avoir apporté une aide massive à Air France-KLM de 7 milliards d'euros au printemps, l'État va probablement devoir intervenir d'ici à la fin de l'année, l'hypothèse d'une recapitalisation étant désormais largement évoquée pour sauver la compagnie nationale. Ce chiffre de 7 milliards d'euros se décompose comme suit : un prêt bancaire garanti par l'État, à hauteur de 90 %, pour 4 milliards d'euros et un prêt d'actionnaires réalisé par l'État, pour 3 milliards d'euros. La presse d'hier, notamment Le Monde , a diffusé d'autres informations, qui ne sont pas toujours communiquées spontanément.

Dans cette conjoncture exceptionnellement difficile, les recettes de la DGAC devraient s'effondrer de 80 %, en 2020. Pour construire son budget 2021, la direction s'est fondée sur un trafic inférieur de moins 30 % à celui de 2019, mais cette prévision paraît déjà caduque, et les 1 509,7 millions d'euros espérés hors de portée. Les recettes des diverses taxes perçues par la DGAC pour le compte de tiers - taxe de solidarité, taxe d'aéroport, taxe sur les nuisances sonores aériennes - ont également drastiquement diminué.

Si nous analysons le rebond du trafic en Asie, nous pouvons avoir quelques lueurs d'espoir, même si les prévisions restent aléatoires. Bien malin, celui qui peut parier sur l'ampleur du rebond attendu en matière de recettes. La prudence s'impose donc.

Les performances de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA), encadrées par le droit européen dans le cadre du plan de performance RP2, restent insuffisantes, alors que va débuter, dans un contexte profondément altéré par la pandémie de la covid-19, la nouvelle période RP3.

Si le taux de la redevance de route est compétitif, les retards dus au contrôle aérien demeuraient trop élevés en 2019, en raison de l'obsolescence des équipements et de l'inadéquation de l'organisation du travail des contrôleurs aériens aux nouvelles caractéristiques du trafic. Cette année, bien évidemment, le retard sera considérablement réduit.

Pour mobiliser les équipes de la DSNA autour d'un projet ambitieux, il pourrait être utile de prévoir la conclusion d'une forme de contrat, analogue aux contrats d'objectifs et de performance (COP) des établissements publics, qui viendrait formaliser des objectifs précis et chiffrés pour que la direction soit à même de pleinement accompagner le trafic le jour où il repartira.

Comme en 2020, le schéma d'emplois 2021 de la DGAC ne prévoit aucune suppression d'emploi, ce qui est logique, sachant que le nombre de contrôleurs est insuffisant et qu'il faut cinq ans pour les former. Sa masse salariale diminuera légèrement de 6,2 millions d'euros, pour atteindre 932,6 millions d'euros. Compte tenu du contexte économique, les négociations du protocole 2020-2024 ont été suspendues, si bien que 1,6 million d'euros est prévu au titre des mesures catégorielles.

Pour accélérer la réalisation de ses grands programmes de modernisation des outils de la navigation aérienne, dont elle a profondément revu la gouvernance cette année, suite à la publication de mon rapport, la DGAC augmentera de nouveau, en 2020, son effort d'investissement pour le porter à 317 millions d'euros. Sur cette somme, 140,6 millions d'euros sont consacrés aux grands programmes de modernisation précédemment cités, dont le coût total, régulièrement revu à la hausse, représente 2 140,9 millions d'euros. L'échéance est comme l'horizon, toujours plus lointaine.

Faire enfin aboutir ces programmes doit constituer une priorité pour la DSNA, car, avant la crise, elle manquait chaque année un peu plus de capacités pour faire passer le trafic.

Compte tenu de l'effondrement de ses recettes, l'endettement de la DGAC serait susceptible de progresser de 1,4 milliard d'euros en 2020, pour atteindre l'encours sans précédent de 2,1 milliards d'euros, contre un maximum historique de 1,3 milliard d'euros atteint en 2014.

À ce stade, la DGAC estime qu'elle devra emprunter 761 millions d'euros supplémentaires en 2021, et 463 millions d'euros en 2022. Sur la base de ces hypothèses, le niveau de dette pourrait atteindre un pic à 2,8 milliards d'euros, au 31 décembre 2022.

Si je ne peux que saluer la volonté de la DGAC de désendetter le plus rapidement possible le Bacea, je suis très sceptique quant à sa réalisation effective, tant la soutenabilité de ce budget me paraît désormais menacée.

Ses recettes étant entièrement indexées sur le trafic aérien, la crise sans précédent de ce secteur - mais aussi l'instauration du travail à distance -, susceptible de se poursuivre pendant de longues années, pourraient durablement bouleverser le modèle économique sur lequel était fondé le financement de la DGAC. Par ailleurs, le bashing de la France sur le secteur aérien risque de lui coûter cher. Et lorsqu'un État ne soutient plus une industrie, celle-ci part s'installer à l'étranger.

C'est la raison pour laquelle il m'apparaît indispensable de réfléchir dès à présent aux solutions qui pourraient être envisagées pour éviter que ne s'installe une situation problématique qui verrait un budget annexe porter une dette toujours plus importante, qu'il deviendrait incapable de rembourser grâce aux recettes d'un secteur du transport aérien trop durablement affaibli.

En dépit de ces inquiétudes pour l'avenir, et de la quasi-certitude qu'il faudra autoriser à nouveau le Bacea à souscrire des emprunts complémentaires en 2021, à l'occasion de collectifs budgétaires, je souhaite que la commission propose au Sénat d'adopter les crédits du budget annexe.

Les opérateurs du programme 159 font l'objet de baisses de leurs subventions pour charges de service public et d'effectifs exigeantes, mais j'ai le sentiment que les stratégies mises en place par leurs directions respectives sont robustes.

Je suis donc favorable à l'adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Je conclurai en évoquant l'article 54 septies rattaché au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », qu'il me revient de vous présenter et que je vous propose d'adopter.

D'abord, j'insisterai sur l'importance qu'il y a soutenir les aéroports, qui vont avoir besoin de mesures financières complémentaires.

Ensuite, cet article prévoit que le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la baisse des recettes de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) induite par la crise liée à l'épidémie, ainsi que sur ses conséquences sur le financement des aides à l'insonorisation des bâtiments situés à proximité de chaque aéroport concerné.

Les recettes de cette taxe sont en effet très affectées par la crise sanitaire provoquée par la covid-19, puisqu'elles sont estimées, en 2020, à moins de 20 millions d'euros seulement, contre 54,3 millions d'euros initialement prévus - soit une baisse de 65 % - , à 37,6 millions d'euros en 2021, contre 54,6 millions d'euros initialement prévus - soit une baisse de 31 %.

Sur la seule période 2020-2021, la perte de financement pour le dispositif d'aide à l'insonorisation des riverains est ainsi estimée à l'équivalent d'une année de recettes de la TNSA. En conséquence, 35 millions d'euros devraient faire défaut pour mener à bien la politique d'insonorisation prévue pour l'année 2020 et 17 millions d'euros devraient manquer en 2021.

Le rapport prévu par l'article 54 septies , qui sera remis quatre mois après la promulgation du présent projet de loi de finances pour 2021, doit permettre de faire le point sur les difficultés engendrées par cette baisse sans précédent des recettes de la TNSA sur l'insonorisation des logements des riverains des aéroports et proposer des solutions directement opérationnelles.

Ce n'est pas la mesure idéale, mais ne pouvant nier qu'il existe bien un sujet, l'Assemblée nationale a trouvé cette formule afin de le maintenir en discussion. Nous devrons ensuite nous interroger sur les suites que nous pourrons proposer demain.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Je saluerai tout d'abord les interventions des rapporteurs spéciaux, qui nous permettent de mesurer les enjeux de la mission, et le travail qu'ils ont d'ores et déjà accompli.

Christine Lavarde, comment interprétez-vous la baisse des crédits de la mission, à périmètre constant ? Je m'inquiète de voir ces crédits diminués, dans un domaine pour lequel le Gouvernement affiche de grandes ambitions.

Par ailleurs, s'agissant de VNF, le retard pris dans la modernisation du réseau est considérable. J'ai bien entendu la volonté du Gouvernement de développer, notamment dans le cadre du plan de relance, les voies navigables et d'élaborer un grand projet structurant.

Vous avez par ailleurs indiqué que 160 projets avaient été identifiés. L'ambition de les conduire dans un temps court vous paraît-elle à portée de budget et donc susceptible d'être réalisée ?

Enfin, concernant le Cerema - un outil souvent méconnu, alors que très utile dans l'aide à la décision, notamment des collectivités locales -, où en sommes-nous, par rapport au schéma d'emplois, quant à sa capacité de continuer à produire avec efficacité rapports et études ? Comment se passe l'articulation, par exemple, avec l'ANCT ?

M. Antoine Lefèvre . - Je voudrais également remercier nos rapporteurs spéciaux pour leur travail.

Je suis inquiet du constat établi par Vincent Capo-Canellas concernant notamment l'obsolescence des équipements de la navigation aérienne ; nous parlons là de la sécurité aérienne. Pouvons-nous évaluer à partir de quelle date, ou de quel niveau de sous-équipement ou non-renouvellement d'équipements, les problèmes de sécurité deviendront inquiétants ?

Compte tenu des perspectives financières indiquées dans le rapport, si un plan d'urgence sur la sécurité aérienne n'est pas mis en place, nous pourrons être sérieusement inquiets quant aux respects des règles de sécurité.

S'agissant de l'urgence qu'il y a à moderniser notre réseau routier non concédé - pour beaucoup l'utiliser, je sais à quel point il est fortement dégradé -, une application, dont je ne citerai pas le nom, nous permet de signaler les dégradations de voiries. D'après l'une de leurs études, nous connaissons aujourd'hui l'état du réseau national, qui est assez édifiant, de sorte que nous pouvons également nous inquiéter des problèmes de sécurité que posent ces dégradations, notamment lorsque nous connaissons les sommes prévues en matière d'investissement.

Enfin, concernant le projet du Grand Paris Express, j'ai bien entendu que les objectifs de mises en service ne seront pas atteints pour les Jeux Olympiques et paralympiques de 2024. Cependant, une partie de ces liaisons seront-t-elles finalisées pour 2024 ? Je rappelle qu'il s'agissait d'un élément essentiel dans le dossier présenté par la France.

M. Sébastien Meurant . - Je regrette une fois encore la difficulté que nous avons, notamment en tant que rapporteurs spéciaux, à obtenir des informations que le Gouvernement et l'administration sont pourtant tenus de nous livrer.

Concernant le canal Seine-Nord Europe, un chantier à plusieurs milliards d'euros, qu'il a fallu défendre devant la Cour des comptes européenne, avez-vous de nouvelles informations à nous livrer ?

Enfin, qu'en est-il, concernant le fret ferroviaire, de cette fameuse ligne qui devrait relier Perpignan à Rungis en train de nuit ?

M. Jean-François Rapin . - Ma question concerne l'article 54 sexies résultant d'un amendement du Gouvernement relatif au photovoltaïque. N'y a-t-il pas là un sujet particulier, de fond, qui n'est pas forcément financier ?

Que l'État puisse revenir sur des contrats signés il y a une vingtaine d'années n'est pas, selon moi, un message sympathique et incitatif envoyé à tous ceux qui pourraient, dans le futur, vouloir investir dans les énergies renouvelables. C'est aussi choquant que la possibilité qui existerait, pour une société d'assurance ou une banque, de revenir sur un contrat d'assurance ou un prêt bancaire. Lorsque ces contrats ont été établis, des études ont été réalisées et nous savions tous que le prix serait élevé. Mais il s'agissait d'une volonté de rendre ces engagements incitatifs.

Le rapport précise que les petits contrats, les contrats précaires, ne sont pas concernés ; mais pourquoi ne le seraient-ils pas demain, une fois cette jurisprudence appliquée aux contrats plus importants ?

M. Claude Raynal , président . - Il s'agit en effet d'une question importante, et nous avons été nombreux à être sollicités. Il s'agit d'un vrai enjeu de confiance dans la signature de l'État.

M. Marc Laménie . - Je remercie nos rapporteurs spéciaux pour leur travail, il est vrai que nous pourrions consacrer deux ou trois jours à l'ensemble de ces rapports.

Concernant les agences de l'eau, quelles sont leurs perspectives ? De nombreux projets sont identifiés au niveau des communes en termes d'amélioration du réseau d'eau potable et d'assainissement - les stations d'épuration, notamment. Or nous constatons un désengagement financier de la part des agences ; qu'en est-il ?

L'État a repris, en 2020, 25 milliards d'euros de la dette de SNCF Réseau. Le programme 355 précise les taux d'intérêt ; l'un d'eux est de 3,17 %. Je suis surpris, car les taux ont largement baissé depuis quelque temps. Ces emprunts sont-ils anciens ?

Toujours concernant la SNCF, la suppression du compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transports conventionnés » entraînera-t-elle des économies ou un soutien actif, toutes les collectivités territoriales étant sollicitées pour financer les infrastructures ferroviaires, notamment les petites lignes ? Et quid des lignes capillaires du fret ?

S'agissant de VNF, je note une baisse permanente des effectifs, alors que le rapport précise bien que beaucoup d'installations sont tributaires des moyens humains.

M. Éric Bocquet . - L'Afitf est en partie financée par la taxe d'aménagement du territoire versée par les sociétés concessionnaires d'autoroutes, qui versent également une redevance domaniale ainsi qu'une contribution dite « volontaire ». Entre 2010 et 2019, leurs résultats ont augmenté, passant de 2,1 milliards d'euros à 2,6 milliards d'euros - avec des baisses certaines années, que je ne m'explique pas.

Avez-vous déjà une estimation de leurs résultats en 2020, le trafic autoroutier s'étant effondré depuis le premier confinement ? Les concessionnaires vous ont-ils informés du montant de leur participation financière au budget de l'Afitf ?

Je conclurai sur une citation du philosophe Alain : « Le pessimisme est d'humeur ; l'optimisme est de volonté. »

M. Michel Canevet . - Mes questions s'adressent à Christine Lavarde.

À la lecture de son rapport, j'ai eu le sentiment qu'elle remettait en cause les baisses d'effectifs dans les agences - Agence de l'eau, Ademe, OFB. Des agences souvent décriées, notamment pour leur manque d'opérationnalité. Mais finalement, ne pensez-vous pas qu'elles ne font que s'adapter à la politique de réduction de la dépense publique ?

Le rapport évoque également la question des zones non interconnectées (ZNI), en précisant qu'il va être procédé à une évaluation de la rentabilité des capitaux investis dans les actifs productifs. Cela veut-il dire que tout ce qui concerne la production d'énergie renouvelable sera analysé ? De fait, ces territoires ne seraient plus des espaces d'expérimentation du développement d'énergies renouvelables ? Si tel est le cas, est-ce à dire que les inquiétudes sont focalisées sur les nouvelles installations de production d'énergies renouvelables ?

Concernant la SNCF, des investissements importants sont prévus dans le plan de relance. Est-elle est en capacité de mettre en oeuvre rapidement les actions prévues dans ce plan - la réouverture d'un certain nombre de lignes, des remises aux normes, l'amélioration du système de signalisation, etc. ?

S'agissant des questions maritimes, j'ai le sentiment que, dans les budgets qui nous sont proposés, l'effort sur la formation des marins, qu'ils soient destinés à la marine marchande ou à la pêche, est insuffisant, les crédits n'augmentant pas. Ai-je la bonne analyse ?

Ce manque de formation est préjudiciable pour le grand pays maritime qu'est la France, d'autant que ce secteur recèle des potentiels de développement importants. En ce qui concerne les ressources halieutiques, il est clair que si nous importons plus de la moitié des poissons que nous consommons, c'est bien parce que nous ne disposons plus de marins-pêcheurs.

Concernant le trafic transmanche, je n'ai pas le sentiment qu'il y ait, dans les budgets, de visibilité à long terme. Or aujourd'hui, le premier employeur de marins français est Brittany Ferries. Une compagnie importante pour les Hauts-de-France, la Normandie, la Bretagne, pour le désenclavement de la France, en général.

Cependant, comme dans le secteur aérien, les compagnies maritimes sont confrontées à la pandémie. Pouvons-nous entrevoir, dans les perspectives de crédits, des dispositifs qui leur permettraient de surmonter la crise ? Elles ont notamment contracté des prêts garantis par l'État (PGE) qu'elles devront rembourser.

Avec la création de l'ANCT, l'organisation actuelle du Cerema est-elle la bonne ou aurait-il fallu regrouper sous l'autorité de l'Agence un certain nombre de services d'État dont la mission est d'accompagner les collectivités dans l'ingénierie ?

Enfin, concernant le contrôle aérien, dont les difficultés ont été précisées, la DGAC profite-t-elle de l'atonie du trafic actuel pour engager les réformes qui sont indispensables et que nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer à travers les différents rapports de Vincent Capo-Canellas , au fil des ans ?

Mme Isabelle Briquet . - Concernant la budgétisation du fonds Barnier, dont il convient de saluer la hausse des moyens, n'existe-t-il pas un risque que ce dispositif devienne plus opaque, puisqu'il ne serait plus qu'une petite ligne dans une mission pesant plusieurs milliards d'euros ?

Quand bien même les crédits seraient stables, nous constatons, année après année, un affaiblissement des divers opérateurs, avec la poursuite des diminutions drastiques des effectifs du ministère de l'écologie. De sorte que nous imaginons mal comment mener une politique ambitieuse et efficace, pourtant clairement affichée.

M. Arnaud Bazin . - Je reviendrai sur la question de la régulation du transport aérien, puisque notre collègue Vincent Capo-Canellas nous a présenté un rapport, il y a quelques mois, indiquant que d'importants investissements avaient été réalisés dans l'outil informatique, mais que la production n'était pas à la hauteur, puisqu'aucun nouvel outil efficace n'est actuellement en service.

Quels sont les montants des crédits prévus pour 2021 pour poursuivre ces projets de modernisation des outils du contrôle aérien ?

Par ailleurs, des perspectives plus favorables pour aboutir à des outils réellement efficaces, lesquelles viendraient enfin couronner des années de travail et des centaines de millions d'euros investis, se dessinent-elles ?

M. Jean-Michel Arnaud . - Je remercierai tout d'abord les rapporteurs spéciaux pour le travail important qu'ils ont réalisé.

Concernant les infrastructures routières, le Premier ministre, par un décret du 14 août dernier, rend possible la privatisation de portions de routes nationales, afin notamment, dans le cadre d'accords avec des concessionnaires d'autoroutes, de réaliser des travaux que l'État n'est plus en capacité de financer.

Pouvez-vous nous donner plus d'informations sur cette question ? Avez-vous par ailleurs recueilli des éléments d'observation qui permettraient, dans les années à venir, de constater des mouvements financiers en ce sens ?

Mme Christine Lavarde , rapporteur spécial . - Le rapporteur général a raison : c'est un débat beaucoup plus philosophique. Les crédits du ministère baissent. Nous aurons certainement le débat en séance sur l'articulation entre le plan de relance et l'ensemble des missions.

Marc Laménie, concernant les agences de l'eau, si l'on observe un relèvement du plafond de recettes, c'est uniquement en raison de transferts, mais les moyens alloués restent les mêmes. Je n'ai pas entendu parler de tension. Par ailleurs, les agences se verront attribuer 300 millions d'euros dans le cadre du plan de relance, dont 250 millions d'euros en métropole, notamment pour les réseaux d'eau et la modernisation des stations d'assainissement.

Michel Canevet, sur la baisse des effectifs, les opérateurs participent déjà à l'effort. Par exemple, un onzième parc naturel a vu le jour l'année dernière sans faire l'objet d'une attribution d'effectifs ; une dotation de 1,5 million d'euros a été allouée au parc national de Forêts, créé en novembre 2019, permettant de financer ses dépenses de masse salariale (10 ETP/ETPT), de fonctionnement, d'intervention et d'investissement. Dans les agences de l'eau et au sein de l'OFB, un certain nombre de fonctionnaires exercent des missions de police - je pense aux agents de la police de l'eau, aux garde-chasses et autres. Si l'on excepte les agents de ces indispensables missions de contrôle, comme le contrôle des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), il reste les agents du ministère pour faire fonctionner les dispositifs.

J'ai également entendu certaines critiques venant du monde économique. Des entreprises, par exemple, ont avancé que la trésorerie pour les certificats d'économie d'énergie (CEE) et les remboursements effectués par le pôle CEE ont connu beaucoup de retard. Nous nous retrouvons aujourd'hui avec des opérateurs du bâtiment moins enclins à réaliser de nouvelles opérations, alors que tel est l'objet du plan de relance. Mon message est donc le suivant : on ne peut pas à la fois communiquer sur l'écologie, mettre des milliards partout, et ensuite ne pas déployer les moyens humains, avec les conséquences sur le tissu économique.

Par ailleurs, certains ministères sont très en retard par rapport au monde de l'entreprise. Quand Élisabeth Borne dit que tout le monde doit faire du télétravail, sachez que, au ministère de la transition écologique, à la fin de l'année 2019, 20 % seulement des agents disposaient d'un ordinateur portable ; en 2020, des progrès énormes ont été effectués, puisqu'ils sont désormais 75 %. Dans d'autres ministères, les agents ne peuvent pas raccorder leur imprimante personnelle à leur ordinateur. Nous voyons bien, dans ce domaine, tous les efforts qu'il reste encore à accomplir au sein de la fonction publique. Mais, dans ce rapport, mon sujet était la correspondance entre les moyens humains et les actions que nous souhaitons mettre en oeuvre.

Concernant l'outre-mer, un arrêté, publié l'année dernière, précise que le taux de rémunération des capitaux investis dans les projets spécifiques à l'outre-mer doit s'établir en fonction du lieu d'implantation et de la technologie utilisée. Jusqu'alors, le taux s'élevait à 11 %. Sauf que, dans ces projets, on trouvait des installation de natures très différentes. Par exemple, des installations de géothermie en Guadeloupe et des opérations de brûlage de déchets à La Réunion génèrent des risques très différents. Les zones d'implantation ne sont pas les mêmes non plus, avec des risques cycloniques à La Réunion, que l'on ne trouve pas à Mayotte. L'idée de cet arrêté est de permettre une rémunération plus juste.

Isabelle Briquet, sur le Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), budgeté sur la nouvelle action n° 14 du programme 181, la gestion sera, à mon sens, plus lisible pour le Parlement. Nous aurons désormais la main à la fois sur les recettes et les dépenses, alors que, auparavant, un montant de recettes était affecté, inférieur au montant collecté au titre des polices d'assurance puisqu'il était plafonné. Depuis 2016, les dépenses du fonds sont supérieures au montant de ses recettes. Sans un relèvement du niveau des recettes, le fonds n'aurait pas pu passer l'année. Une contribution entre désormais dans le budget de l'État, qu'il reverse chaque année au fonds ; cette année, le montant affecté est plus élevé. L'année prochaine, en loi de règlement, nous saurons précisément ce qui a été dépensé, nous gagnerons en lisibilité.

M. Stéphane Sautarel , rapporteur spécial . - Pour ce qui concerne Voies navigables de France (VNF) et sa capacité à réaliser les investissements, on peut en effet s'interroger sur la réalisation effective des travaux en 2021-2022. Pour rappel, après 175 millions d'euros en 2019 et 214 millions d'euros en 2020, 268 millions d'euros d'investissement sont prévus en 2021.

Un certain nombre de besoins paraissent évidents, notamment l'obsolescence de certains équipements sur des écluses ou des barrages. Des projets sont identifiés, mais la capacité à les mettre en oeuvre au cours de l'année 2021 reste encore clairement à démontrer.

Marc Laménie, la question de la baisse des effectifs de VNF s'inscrit dans le cadre d'une mutation assez profonde de cet établissement, notamment avec l'automatisation de certains dispositifs. Dans le prochain contrat d'objectifs et de performance (COP), le sujet devrait être abordé.

Antoine Lefèvre, concernant le Grand Paris Express, les lignes 16 et 17 ne seront pas livrées avant les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. En revanche, les lignes 15 Sud, 14 Nord et 14 Sud ne devraient pas voir leur calendrier bouleversé.

On recense aujourd'hui 130 chantiers actifs dans le cadre du Grand Paris Express. Les marchés de conception-réalisation ont permis, malgré les contraintes que nous connaissons, d'accélérer un certain nombre de ces travaux.

Michel Canevet, s'agissant de la formation maritime, les crédits sont stabilisés. Les lycées, notamment, conservent les mêmes moyens. Une réforme est engagée pour l'enseignement supérieur, avec un regroupement de sites et un siège basé au Havre, même si le plus important de ces établissements se situe à Marseille.

M. Hervé Maurey , rapporteur spécial . - Antoine Lefèvre évoquait son inquiétude par rapport au non-renouvellement des investissements dans le domaine aérien ; il peut étendre son inquiétude à l'ensemble de nos infrastructures, aussi bien dans les domaines ferroviaire, fluvial que routier. Concernant le domaine routier, on peut se réjouir de l'augmentation des crédits, notamment dans le cadre de la LOM, témoignant d'une volonté de régénérer les réseaux à laquelle on ne peut que souscrire. J'ajouterai aussi la question des ponts, d'autant plus en ce jour du triste anniversaire de l'effondrement du pont de Mirepoix.

Concernant le manque d'informations fournies par les services de l'État, je partage le mécontentement de Sébastien Meurant. Je souhaite insister en particulier sur l'attitude scandaleuse de l'Afitf. Lors de son audition, son secrétaire général a été incapable de répondre à nos questions. Même en remontant au niveau du ministère et du directeur général des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) nous n'avons pas obtenu davantage d'informations sur le budget de l'agence. Je le redis avec beaucoup de force et de véhémence : je suis scandalisé par ce manque de considération de l'État à l'égard du Parlement.

Marc Laménie, la suppression du compte d'affectation spéciale, quant à elle, tient à l'ouverture à la concurrence, qui ne permettait pas de conclure des contrats pluriannuels. Il s'agit donc d'une rebudgétisation et non d'une baisse des crédits conscacrés aux lignes d'aménagement du territoire.

S'agissant du taux des emprunts repris à SNCF Réseau, le dispositif est assez compliqué. Cela s'explique par le fait que, dans la dette reprise, se trouvent des emprunts historiques avec des taux élevés.

En ce qui concerne l'impact de la crise sur la fiscalité spécifique des sociétés concessionnaires d'autoroute, évoqué par Éric Bocquet, la perte s'élève à 90 millions d'euros sur les 560 millions d'euros de taxe d'aménagement du territoire. Par ailleurs, les sociétés concessionnaires d'autoroute auront à faire face à 2 milliards d'euros de recettes en moins.

Michel Canevet, concernant Brittany Ferries, l'aide de l'État est relativement modeste, de l'ordre de 30 millions d'euros, dont 15 cette année ; ce montant est complété par des garanties d'emprunts à hauteur de 117 millions d'euros. Par ailleurs, les régions Normandie et Bretagne ont apporté à Brittany Ferries un soutien complémentaire plus important que celui de l'État.

Au sujet de la privatisation des routes nationales, nous manquons d'informations. Je rappellerai ma position : je ne suis pas du tout favorable à la privatisation de voiries supplémentaires tant que les concessions seront aussi déséquilibrées. Les concessionnaires sont aujourd'hui dans une position très avantageuse, aussi bien sur le plan financier de la rentabilité que sur le plan juridique, où l'État a finalement assez peu de marges de manoeuvre - nous avons pu le constater en 2015 avec la suppression de l'augmentation des péages, dont le « rattrapage » a finalement coûté beaucoup plus cher aux automobilistes.

Un mot sur la ligne Perpignan-Rungis : le Premier ministre a annoncé une réouverture à l'été 2021.

M. Stéphane Sautarel , rapporteur spécial . - Au-delà de la question de la privatisation, nous avons senti une écoute attentive sur les offres des collectivités faisant acte de candidature pour intégrer, dans leurs réseaux, les routes nationales.

Sur l'Afitf, nous avons proposé un amendement montrant notre volonté - malgré le manque d'informations - d'équilibrer les risques de pertes de recettes qui existeront encore en 2021. Au-delà des 90 millions d'euros de la taxe d'aménagement du territoire, il y a surtout les 230 millions d'euros d'écocontribution du transport aérien perdus en 2020 et qui ne seront sans doute pas rétablis en 2021 ; d'où cet amendement, afin de proposer une augmentation de TICPE de 400 millions d'euros au profit de l'Afitf, de manière à garantir l'exécution des engagements et des travaux sur le ferroviaire ou le routier.

M. Vincent Capo-Canellas , rapporteur spécial . - S'agissant du Cerema, il est écrit dans le rapport : « La réduction des moyens du Cerema va se poursuivre au risque de menacer la soutenabilité financière de l'établissement . » Je pense que les choses sont clairement posées. Depuis 2018, la baisse du plafond d'emplois représente 100 ETPT par an pendant cinq ans, soit une chute de 17 % des effectifs sur la période et de 25 % entre 2015 et 2022.

Nous avons donc affaire à une saignée. Il y a des raisons budgétaires à cela, une volonté de rationalisation. Mais nous arrivons à l'os, c'est-à-dire au moment où l'outil lui-même est menacé. La baisse de la subvention, de l'ordre de 5 millions d'euros par an, va devenir difficile à supporter. On observe une fragilisation des compétences et une inquiétude sur l'investissement. En 2022, la subvention pour charge de service public sera inférieure de 9 millions d'euros aux charges de personnels. Il s'agit maintenant de stabiliser cette trajectoire.

Michel Canevet, concernant la relation entre le Cerema et l'ANCT, un projet de convention est actuellement en discussion. Une fusion n'est pas concevable, elle entraînerait de nouveaux traumatismes pour le Cerema qui, je le rappelle, est lui-même le résultat de la fusion de 11 entités. Un modèle économique est à construire, avec des flux financiers positifs vers le Cerema.

Au sujet de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA), s'agissant de l'obsolescence des équipements et de l'impact potentiel sur la sécurité, je veux, autant que possible, tranquilliser Antoine Lefèvre. Cette confiance se justifie par des personnels de très bon niveau et par la robustesse des matériels qui, à ce jour, n'est pas mise en cause. Cela dit, nous risquons de devenir les derniers d'Europe en termes de capacités si nous ne modernisons pas nos matériels. Des questions se posent quant à notre capacité à avoir des routes plus directes, ce qui permet de réduire la pollution. Le Gouvernement fustige le transport aérien pour son impact écologique, mais il fait peu de choses pour améliorer les trajectoires des avions, alors qu'elles dépendent de lui.

Arnaud Bazin, en 2021, sur un investissement total de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) de l'ordre 317 millions d'euros pour la DSNA, 140 millions d'euros seront consacrés aux grands programmes. Ces derniers se poursuivent, mais à un rythme trop lent, avec une garantie d'efficacité qui n'est pas apportée et une garantie de délais qui a volé en éclats depuis très longtemps. On pouvait espérer que les contrôleurs, profitant de cette période de moindre activité, seraient mobilisés pour des formations ; ce n'est pas le cas.

Un nouveau directeur général a été nommé à la DGAC ; le précédent, bible de l'aéronautique, avait dirigé cette maison pendant 12 ans. Aujourd'hui, il faut se poser la question de réformer la DGAC. Le nouveau directeur général a-t-il reçu un mandat pour le faire ? Cela reste un point d'interrogation. La réforme est difficile, car, singularité française, c'est une maison qui fait tout ; elle régule le contrôle aérien, vérifie, produit des normes, des services pour les compagnies... Est-ce le bon moment pour réformer ? Sans doute, car le trafic est moindre aujourd'hui ; en même temps, nous traversons une grave crise financière...

Article 33 (ÉTAT B)

M. Claude Raynal , président . - Nous devons nous prononcer sur un amendement de crédit qui porte sur 20 millions d'euros, au sujet des ponts.

M. Hervé Maurey , rapporteur spécial . - L'État lui-même a considéré que l'entretien des ponts nécessitait un budget de 120 millions d'euros. Avec les crédits supplémentaires du plan de relance, nous arrivons à peine à 100 millions d'euros ; d'où ce complément de 20 millions d'euros, déjà voté l'an dernier par le Sénat, sans résultat à l'Assemblée nationale. Le Gouvernement, à l'époque, considérait que nous étions à quelques dizaines de millions d'euros près ; aujourd'hui, comme nous ne semblons plus être à quelques centaines de milliards d'euros près, je suis certain que nous recevrons un avis favorable.

L'amendement n o II-3 est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sous réserve de l'adoption de son amendement.

Article 54 quinquies

Mme Christine Lavarde , rapporteur spécial . - Dans l'article 54 quinquies , l'Assemblée nationale a introduit une rationalisation de l'ensemble des dispositifs législatifs ayant trait au fonds Barnier, désormais rassemblés au sein d'un article unique du code de l'environnement. A également été introduite la possibilité de financer une expérimentation, visant le département des Alpes-Maritimes, pour laquelle un rapport est prévu dans trois ans. Ignorant si d'autres événements de ce type ne nécessiteront pas une mobilisation des crédits du fonds, je pense que l'on devrait commander un rapport d'étape plus tôt, pour le prochain PLF ; tel est le sens de cet amendement n o II-12 .

L'amendement n° II-12 est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption de l'article 54 quinquies , sous réserve de l'adoption de son amendement.

Article 54 sexies

Mme Christine Lavarde , rapporteur spécial . - L'article 54 sexies prévoit la remise en cause des contrats d'achat de l'électricité photovoltaïque signés sur la base des tarifs de 2006 et 2010 pour les installations de plus de 250 kilowatts. Il est indiqué un niveau de charge de services publics économisés de 2 milliards ; sauf qu'il s'agit d'un leurre, puisque les 2 milliards concernent l'ensemble des contrats.

Seuls 850 contrats seraient en fait visés par cette mesure : des contrats signés en métropole, entraînant des charges de services publics annuels de l'ordre de 737 millions d'euros. Quid , dès lors, des 200 contrats se trouvant en zones non interconnectées (ZNI) avec le territoire métropolitain et possédant les mêmes critères, à savoir plus de 250 kilowatts ? On croit également comprendre qu'un traitement individuel sera réservé pour chacun de ces 850 contrats, si les producteurs en font la demande. Aujourd'hui, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) prétend avoir besoin de huit équivalents temps plein (ETP) pour procéder à cet examen ; à titre personnel, je pense que deux peuvent largement suffire.

Par ailleurs, chacun pourra faire état de difficultés particulières, car, dans ce secteur économique, les contrats sont cédés aux exploitants. La personne ayant investi au moment de la signature n'est pas forcément celle qui est aujourd'hui l'exploitant. Les exploitants actuels ont acheté sur la base d'une perspective de rendement qui, sauf à imaginer une tempête qui emporterait les toits de France, était certaine ; on les pénaliserait donc aujourd'hui, alors que ceux qui ont empoché la rente ne seraient pas atteints.

Il y a donc un sujet financier - avec ces 2 milliards d'euros pour les seuls contrats signés avant 2011, qui représentent 0,5 % de la production - et aussi un problème de respect de la signature de l'État. On ne peut pas déposer un amendement à la dernière minute, de manière à éviter des sous-amendements, sans débat, sans analyse du Conseil d'État, sans étude d'impact, sur un sujet aussi important. Pour toutes ces raisons, je vous propose cet amendement n o 3 visant à supprimer l'article.

L'amendement n° II-28 est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat de supprimer l'article 54 sexies .

Article 54 septies

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption de l'article 54 septies sans modification .

La commission a décidé également de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) », ainsi que les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission tels que modifiés par son amendement. Elle a proposé d'adopter l'article 54 quinquies tel que modifié par son amendement. Elle a proposé également la suppression de l'article 54 sexies. Enfin, elle a proposé d'adopter l'article 54 septies sans modification, ainsi que les crédits du budget annexe et du compte d'affectation spéciale.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction générale de l'aviation civile (DGAC)

- M. Damien CAZÉ, directeur général ;

- M. Marc BOREL, directeur général adjoint - directeur du transport aérien ;

- M. Maurice GEORGES, directeur des services de la navigation aérienne ;

- Mme Marie-Claire DISSLER, secrétaire générale ;

- Mme Géraldine CECCONI, sous-directrice des affaires financières et du contrôle de gestion.

Groupe Aéroports de Paris (ADP)

- M. Augustin De ROMANET, président-directeur général ;

- M. Mathieu CUIP, adjoint au directeur des affaires publiques ;

- Mme Mélinda SOUEF, responsable des relations avec les institutions françaises.

Air France KLM

- Mme Anne-Marie COUDERC, présidente du conseil d'administration du groupe Air France-KLM ;

- Mme Anne-Sophie LE LAY, secrétaire générale.

Fédération nationale de l'aviation marchande (FNAM)

- M. Alain BATTISTI, président ;

- M. Georges DAHER, délégué général ;

- Mme Brigitte BARRAND, directrice des affaires publiques et de la communication.

Union des aéroports français (UAF)

- M. Thomas JUIN, président ;

- M. Nicolas PAULISSEN, délégué général.

Météo France

- Mme Virginie SCHWARZ, présidente-directrice générale ;

- M. Philippe GONZALEZ, secrétaire général.

Institut national de l'information géographique et forestière (IGN)

- M. Sylvain LATARGET, directeur général ;

- Mme Jeanne STRAUSZ, secrétaire générale.

Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA)

- M. Pascal BERTEAUD, directeur général ;

- Mme Cécile ARCADE, secrétaire générale.


* 1 En conséquence, le programme 170 « Météorologie » avait été supprimé et le Céréma ne figure plus dans le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durable ».

* 2 Les règlements communautaires du CUE, qui s'imposent directement aux États membres de l'Union européenne et aux prestataires de services de navigation aérienne autorisés à opérer dans l'espace aérien de l'Union, laissent la liberté aux États de désigner un prestataire exclusif dans leur espace aérien. Pour la France, ce prestataire est Météo France.

* 3 Le profond renouvellement du site internet en 2013 et de l'application mobile à l'été 2015 ont permis de développer l'offre commerciale en ligne, qui bénéficie d'environ un million et demi de visites quotidiennes.

* 4 La contre-expertise réalisée par le Commissariat général à l'investissement (CGI) a montré que le rapport entre l'investissement réalisé et les bénéfices socio-économiques pour la société (sécurité des personnes et des biens, adaptation au changement climatique, défense, énergie, etc.) serait de 1 à 12 au minimum.

* 5 La notification du marché d'assistance à maîtrise d'oeuvre pour les travaux à réaliser au Centre national de calcul a été réalisée le 13 août 2018. Une démarche de même nature est en préparation pour l'Espace Clément Ader.

* 6 Le décret n° 2011-1371 du 27 octobre 2011 précise les statuts et le fonctionnement de cet établissement public administratif.

* 7 En vertu de cette loi, le décret n° 2016-1036 du 28 juillet 2016 relatif au principe et aux modalités de fixation des redevances de réutilisation des informations du secteur public, autorise les organismes publics dont l'activité principale consiste en la collecte, la production, la mise à disposition ou la diffusion d'informations publiques, à établir des redevances lorsque la couverture des coûts liés à cette activité principale est assurée à moins de 75 % par des recettes fiscales, des dotations ou des subventions.

* 8 Loi n° 2013-431 du 28 mai 2013 et décret n° 2013-1273 du 27 décembre 2013.

* 9 Les équipements transférés par l'État au Céréma au moment de sa création avaient une valeur nette de 8 millions d'euros pour une valeur brute de 45 millions d'euros, ce qui témoigne de leur obsolescence. Ils étaient amortis à 95 % à la fin de l'année 2017.

* 10 La DSNA est responsable des services de contrôle « En-Route » rendus par les cinq centres En-Route de la navigation aérienne (CRNA) et des services d'approche et de contrôle d'aérodrome des 90 aéroports de métropole et d'outre-mer.

* 11 Ces redevances ont été instaurées par l'article 120 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004 codifié à l'article L. 611-5 du code de l'aviation civile.

* 12 Prévue au VI de l'article 302 bis K du code général des impôts.

* 13 Prévue à l'article 1609 quatervicies du même code.

* 14 Prévue à l'article 1609 quatervicies A du même code.

* 15 Retards du contrôle aérien, la France décroche en Europe, rapport d'information n° 568 (2017-2018) réalisé au nom de la commission des finances du Sénat par Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

* 16 Dans le cadre de la première période de régulation RP1 (2012-2014), les États ont réalisé une baisse de leurs coûts de navigation aérienne de - 7 % pour un objectif de - 10 %.

* 17 En valeur 2009.

* 18 Y compris le personnel de l'École nationale de l'aviation civile (ENAC), à laquelle sont affectés 826 agents (887 ETPT autorisés dont 809 sous plafond).

* 19 Ce protocole avait été signé par quatre organisations syndicales représentatives (UNSA-DD, SNCTA, SPAC-CFDT et FEETS-FO) représentant 72 % des personnels de la DGAC.

* 20 En particulier, celles prévues par l'accord relatif aux parcours professionnels, carrières et rémunérations des fonctionnaires (PPCR).

* 21 Il s'agit des ministères des finances et des comptes publics, de l'intérieur et de la défense.

* 22 Ce niveau a vocation à être affiné en fonction du niveau effectif des redevances et taxes perçues en 2020, qui lui-même dépendra de la capacité des entreprises du secteur à retrouver un niveau de trésorerie suffisant pour s'acquitter de leurs créances.

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