Rapport n° 18 (2021-2022) de Mme Corinne IMBERT , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 6 octobre 2021

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N° 18

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 6 octobre 2021

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur la proposition de loi tendant à créer un droit de visite pour les malades , les personnes âgées et handicapées qui séjournent en établissements ,

Par Mme Corinne IMBERT,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Deroche , présidente ; Mme Élisabeth Doineau , rapporteure générale ; M. Philippe Mouiller, Mme Chantal Deseyne, MM. Alain Milon, Bernard Jomier, Mme Monique Lubin, MM. Olivier Henno, Martin Lévrier, Mmes Laurence Cohen, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge , vice-présidents ; Mmes Florence Lassarade, Frédérique Puissat, M. Jean Sol, Mmes Corinne Féret, Jocelyne Guidez , secrétaires ; Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Stéphane Artano, Mme Christine Bonfanti-Dossat, MM. Bernard Bonne, Laurent Burgoa, Jean-Noël Cardoux, Mmes Catherine Conconne, Annie Delmont-Koropoulis, Brigitte Devésa, MM. Alain Duffourg, Jean-Luc Fichet, Mmes Laurence Garnier, Frédérique Gerbaud, Pascale Gruny, M. Xavier Iacovelli, Mmes Corinne Imbert, Annick Jacquemet, Victoire Jasmin, Annie Le Houerou, M. Olivier Léonhardt, Mmes Viviane Malet, Colette Mélot, Michelle Meunier, Brigitte Micouleau, Annick Petrus, Émilienne Poumirol, Catherine Procaccia, Marie-Pierre Richer, Laurence Rossignol, M. René-Paul Savary, Mme Nadia Sollogoub, MM. Dominique Théophile, Jean-Marie Vanlerenberghe .

Voir les numéros :

Sénat :

543 (2020-2021) et 19 (2021-2022)

L'ESSENTIEL

Réunie le mercredi 6 octobre 2021 sous la présidence de Mme  Catherine Deroche, la commission des affaires sociales a adopté la proposition de loi tendant à créer un droit de visite pour les malades, les personnes âgées et handicapées qui séjournent en établissements, dans la rédaction issue des amendements de la rapporteure.

Les amendements adoptés préservent l'esprit du texte mais en précisent la lettre : en codifiant ses dispositions, en précisant les motifs justifiant un refus de visite, en imposant un formalisme minimal à de telles décisions de refus, en élargissant le dispositif de droit de visite inconditionnel des personnes en fin de vie ou dont l'état requiert des soins palliatifs, ou encore en soumettant aussi au comité consultatif national d'éthique les mesures réglementaires faisant obstacle au droit de visite qui seraient prises sous le régime de l'état d'urgence sanitaire.

I. L'ORGANISATION DU DROIT DE VISITE EN ÉTABLISSEMENT : UN PROBLÈME COMPLEXE RÉVÉLÉ PAR L'ÉPIDÉMIE DE COVID-19

A. LE DROIT DE VISITE EN ÉTABLISSEMENT : UNE PRATIQUE PEU CONTESTÉE JUSQU'AU PRINTEMPS 2020

a) Le droit de visite en établissement : une composante du droit à la vie privée

Si le droit des personnes hospitalisées ou accueillies en établissement médico-social de recevoir des visites ne figure pas tel quel dans notre corpus législatif, il est par tous considéré comme une composante du droit à la vie privée consacré par la loi et par nos engagements internationaux, puis déclinés au niveau de la gestion quotidienne des établissements, dans la Charte du patient hospitalisé ou, pour les établissements médico-sociaux le livret d'accueil de l'établissement ou la charte des droits et libertés de la personne accueillie. Ce droit reçoit même des applications plus précises pour certaines catégories de patients , tels les enfants, les personnes hospitalisées en psychiatrie ou celles prises en charge en unité de soins de longue durée.

L'accès des tiers aux locaux d'un établissement n'est toutefois pas de droit : il doit être justifié par un motif recevable , donnant lieu aux vérifications appropriées. C'est ainsi qu'une demande de visite peut être refusée pour des motifs tant sanitaires que d'ordre public ou purement matériels - tenant au respect des règles de visite imposées par l'établissement, par exemple.

b) Un droit à l'application largement déconcentrée

C'est en toute hypothèse aux directions des établissements qu'il revient d'exercer un tel pouvoir de police , lequel est placé, pour les établissements publics de santé, sous le contrôle du juge administratif. Celui-ci vérifie le caractère proportionné de la mesure, qui ne doit pas être générale et absolue mais proportionnée et limitée dans le temps. Dans les établissements de santé privés, la décision de restreindre ou d'interdire les visites peut être sanctionnée par la résolution du contrat ou la mise en jeu de la responsabilité contractuelle.

Les limites de ce droit s'appréhendent différemment selon les secteurs : dans le secteur sanitaire, où le séjour des patients est en général bref, où les chambres sont souvent partagées et où doit primer l'administration des soins, la restriction des visites se justifie plus aisément qu'en Ehpad, où les résidents ont souvent élu domicile.

B. UN CADRE JURIDIQUE DONT LA FRAGILITÉ A ÉTÉ RÉVÉLÉ PAR LA CRISE SANITAIRE

a) Un problème d'organisation, révélant un cadre juridique trop imprécis

Au printemps 2020, le caractère décentralisé de la mise en oeuvre de ce droit s'est heurté à la gestion naturellement centralisée de la lutte contre l'épidémie. L'exercice par les directeurs d'établissements de leur pouvoir de police s'est trouvé accusé d'être disproportionné , puisque les règles de suspension des visites se sont appliquées sans tenir compte de la carte de propagation du virus, mais aussi inégalitaire en raison de la variabilité des initiatives locales, et surtout arbitraire, l'interdiction totale des visites ayant pu être regardée à bon droit par certaines directions d'établissements comme un moyen de se protéger d'éventuelles mises en cause ultérieures de leur responsabilité.

Il ne s'agit pas ici de pointer les responsabilités, les directeurs d'établissements ayant le plus souvent tout fait pour protéger leurs résidents en fonction du matériel disponible et des directives nationales, dont la clarté et la cohérence ont varié. Ils ont également déployé des efforts remarquables pour pallier les effets du confinement, notamment par le recours massif aux outils numériques.

Dans son rapport de mai 2021 sur les droits fondamentaux des personnes accueillies en Ehpad, la Défenseure des droits a relevé cependant de nombreux manquements aux droits fondamentaux des résidents, et préconisé la précision du cadre législatif. La Défenseure relève qu'en octobre 2021 encore, certaines restrictions de visites excessives ont été maintenues , sans justification recevable.

b) Un problème de société, pour ne pas dire de civilisation

Ce qu'il aurait fallu faire au printemps 2020, nul ne saurait humblement l'affirmer. Mais ce n'est pas même nécessairement remettre en cause les décisions prises alors que de dire que la restriction sans précédent de la vie sociale des personnes prises en charge en établissement de santé ou accueillies dans un établissement médico-social a été une véritable catastrophe sur le plan de la psychologie individuelle, mais aussi collective .

Les conséquences en ont certes été terribles d'abord pour les patients et les résidents eux-mêmes : sentiment d'emprisonnement, réticence à faire appel aux secours par crainte d'une hospitalisation dans la solitude, syndrome de glissement et abandon à la mort, rites funéraires impossibles, impossibilité d'avoir accès aux derniers sacrements. Les conséquences des restrictions de visites ont aussi été traumatisantes pour leurs proches : défiance à l'égard du corps médical, de l'institution hospitalière ou des établissements médico-sociaux, sentiments d'angoisse et de culpabilité, voire deuil traumatique, car entravé par l'impossibilité d'un accompagnement décent et digne.

L'interdiction des toilettes mortuaires par le décret du 1 er avril 2020, a été particulièrement mal vécue, et son application a perduré sur le terrain malgré son assouplissement par un second décret le 30 avril.

Un tel refus de considérer les défunts, voire la mort elle-même, nous pose collectivement de dérangeantes questions, voire constitue ce qu'il faut bien appeler un « recul de civilisation sans précédent », comme l'ont souligné Stéphanie Bataille et Laurent Frémont, fondateurs du collectif « Tenir ta main », auprès de la rapporteure.

II. UN PRINCIPE GÉNÉRAL À EXPLICITER, UNE APPLICATION DÉCONCENTRÉE À MIEUX ACCOMPAGNER

A. UN PRINCIPE GÉNÉRAL À MIEUX AFFIRMER

a) Dans des circonstances ordinaires

Dans sa rédaction issue des travaux de la commission, l'article 1er crée un droit de visite quotidien pour les patients pris en charge dans les établissements de santé , droit qui ne peut être subordonné à une information préalable de l'établissement.

L'article précise en outre les motifs justifiant un refus de visite : celui-ci ne peut être opposé au visiteur que si le médecin chef de service où se trouve le patient ou, sur sa délégation, un autre professionnel de santé, estime qu'elle présente un risque sanitaire ou d'ordre public à l'intérieur ou aux abords de l'établissement. Une telle décision doit en outre être motivée et notifiée sans délai aux intéressés.

L'article 3 consacre le même droit pour les résidents des établissements médico-sociaux . La décision de refus de visite ne peut être justifiée que par le risque de menace pour l'ordre public à l'intérieur ou aux abords de l'établissement ou si le médecin coordonnateur ou, à défaut, tout autre professionnel de santé consulté par le directeur - car les Ehpad ne sont pas seuls concernés, et tous les Ehpad n'ont d'ailleurs pas de médecin coordonnateur - estime que la visite constituerait une menace d'ordre sanitaire. La décision devra être motivée et notifiée sans délai aux intéressés.

b) Dans des circonstances exceptionnelles

L'article 4 rend inconditionnel le droit de visite , pour les personnes en fin de vie ou dont l'état requiert des soins palliatifs, par certains de ses proches. Ceux-ci sont limitativement énumérés mais leur périmètre est largement défini, par analogie, avec le périmètre de ceux pouvant justifier la prise d'un congé de proche aidant.

L'article 5 tâche de préserver les mesures qui précèdent de la menace que pourrait faire peser sur elles l'état d'urgence sanitaire : il soumet les mesures réglementaires prises sous ce régime à l'avis motivé du conseil scientifique réuni au déclenchement d'une telle situation et du comité consultatif national d'éthique. Ces mesures ne sauraient quoi qu'il arrive faire obstacle au droit de visite inconditionnel prévu à l'article 4.

B. MIEUX ENCOURAGER SON APPLICATION DÉCONCENTRÉE

L'article 3 précise en outre que le règlement de fonctionnement de l'établissement, établi après consultation du conseil de la vie sociale, fixe les modalités de respect du droit de visite.

Plus largement, la proposition de loi devra s'accompagner, de la part du pouvoir réglementaire, d'un encouragement du dialogue , au sein des établissements, entre les directions et les représentants d'usagers, par la mobilisation plus importante des commissions des usagers dans les établissements de santé, et des conseils de la vie sociale dans les établissements médico-sociaux, afin de faciliter l'organisation des visites.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier
Du droit de visite des patients hospitalisés et des résidents d'établissements médico-sociaux

Cet article inscrit dans la loi le droit de visite des patients hospitalisés et des résidents d'établissements médico-sociaux.

La commission a adopté cet article avec modification, en en proposant une nouvelle rédaction.

I - L'inscription dans la loi du droit de visite des patients et résidents d'ESMS : un levier opportun pour mieux assurer son respect

A. Un droit certes reconnu, mais dont l'application largement déconcentrée ne va pas sans risques

1. Un droit certes non dépourvu de fondement juridique

a) Au niveau conventionnel et constitutionnel

Les patients pris en charge à l'hôpital et en établissement médico-social peuvent se prévaloir de leur droit à la vie privée. Celui-ci est reconnu par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dont l'article 8 stipule que « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ». Une telle notion est regardée par la Cour européenne des droits de l'homme comme un « droit pour l'individu de nouer et développer des relations avec ses semblables » 1 ( * ) , et sa jurisprudence confirme, bien qu'on ne puisse qu'extrapoler à partir des décisions portant sur le cas de visites en établissement pénitentiaire, qu'elle protège la possibilité pour les personnes privées de liberté en établissement de recevoir la visite de leurs proches 2 ( * ) .

La jurisprudence ultérieure de la Cour EDH tend à dilater sa signification pour la rendre protectrice du « développement, sans ingérences extérieures, de la personnalité de chaque individu dans les relations avec ses semblables » 3 ( * ) , coïncidant ainsi avec la protection de la personnalité, c'est-à-dire un élément de l'intégrité psychique de l'individu, laquelle justifie une protection particulière des liens affectifs et familiaux.

Le droit au respect de la vie, garanti par l'article 2 de la convention européenne des droits de l'homme, et le droit à la protection de la santé, assuré notamment par l'alinéa 11 du préambule de la Constitution de 1946 et donc à valeur constitutionnelle, seraient encore invocables par des résidents d'Ehpad menacés de glissement au sens que la gériatrie donne à ce terme, c'est-à-dire d'abandon à la mort par désespoir causé par l'isolement contraint. Le Conseil consultatif national d'éthique a ainsi alerté dans son avis du 30 mars 2020 sur le risque que la privation brutale de visites ne provoque chez ces personnes une « sérieuse altération de leur état de santé de façon irrémédiable » voire enlève « à certains le désir de vivre » 4 ( * ) .

b) Au niveau infra-législatif

La loi n'est pour l'heure guère explicite sur le droit de visite des patients et résidents. Écartons d'emblée la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire 5 ( * ) . Elle autorise le pouvoir réglementaire à prendre des dispositions restreignant les visites et précise que les personnes accompagnant ou rendant visite aux personnes accueillies dans les services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux disposant d'un passe sanitaire valide - ou non, en cas d'urgence - ne peuvent « se voir imposer d'autres restrictions d'accès liées à l'épidémie de covid-19 pour rendre visite à une personne accueillie et ne [peuvent] se voir refuser l'accès à ces services et établissements que pour des motifs tirés des règles de fonctionnement et de sécurité de l'établissement ou du service, y compris de sécurité sanitaire ». De telles dispositions ne portent effet que temporairement - à ce stade, jusqu'au 15 novembre 2021.

Écartons également l'article 9 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 17 juillet 1970, lequel est parfois cité à l'appui de l'idée que la législation actuelle suffit. Contrairement à l'acception large consacrée par la convention européenne, le droit au respect de la vie privée du code civil renvoie au jardin secret qui préserve l'intimité de la personne. Comme le disait le doyen Carbonnier, « le respect de la vie privée se traduit essentiellement par un devoir d'abstention : laissez-moi tranquille » 6 ( * ) .

Le code de la santé publique n'est pas muet sur la question mais il procède par renvoi. Son article L. 1112-2 dispose que « chaque établissement remet aux patients, lors de leur admission, un livret d'accueil auquel est annexée la charte du patient hospitalisé ».

Cette charte, annexée à la circulaire du 2 mars 2006 relative aux droits des personnes hospitalisées 7 ( * ) reconnaît en effet que « la personne hospitalisée peut recevoir dans sa chambre les visites de son choix en respectant l'intimité et le repos des autres personnes hospitalisées. Elle a le droit à la confidentialité de son courrier, de ses communications téléphoniques, de ses entretiens avec des visiteurs et avec les professionnels de santé », mais aussi qu' « une personne hospitalisée peut refuser toute visite ».

Un régime particulier est prévu pour les enfants. La charte précitée ajoute que « tout enfant hospitalisé dans un service de pédiatrie doit pouvoir bénéficier de la visite de son père, de sa mère ou de toute autre personne s'occupant habituellement de lui, quelle que soit l'heure, y compris la nuit, pour autant que la présence du visiteur n'expose ni lui-même, ni l'enfant à un risque sanitaire, en particulier à des maladies contagieuses » .

Les résidents d'établissements médico-sociaux peuvent quant à eux invoquer l'article L. 311-3 du code de l'action sociale et des familles, qui dispose que « l'exercice des droits et libertés individuels est garanti à toute personne prise en charge par des établissements et services sociaux et médico-sociaux », parmi lesquels sont cités en premier lieu « le respect de sa dignité, de son intégrité, de sa vie privée, de son intimité, de sa sécurité et de son droit à aller et venir librement ». L'article L. 311-4 procède comme le code de la santé publique en disposant qu'au livret d'accueil remis à tout résident est annexé la charte des droits et libertés de la personne accueillie 8 ( * ) , dont l'article 8 prévoit qu'« il est garanti à la personne la possibilité de circuler librement. À cet égard, les relations avec la société, les visites dans l'institution, à l'extérieur de celle-ci, sont favorisées ».

Ces dispositions, qui traitent allusivement du droit de visite, en renvoient donc la fixation des modalités au niveau des règlements des établissements.

À l'hôpital, le règlement intérieur « peut » préciser les modalités d'application de la section réglementaire du code consacrée aux modalités d'admission et de visite, laquelle section ne s'étend toutefois que sur les devoirs des visiteurs, et « peut » comporter également les mentions énoncées dans l'arrêté portant charte du patient hospitalisé 9 ( * ) . En pratique, d'après la DGOS, les règlements intérieurs le font effectivement, après concertation en directoire, lequel a été opportunément élargi aux usagers par le législateur en 2016 10 ( * ) .

En établissement médico-social, l'article L. 311-7 du code de l'action sociale et des familles impose que le règlement de fonctionnement définisse « les droits de la personne accueillie et les obligations et devoirs nécessaires au respect des règles de vie collective au sein de l'établissement ou du service », ses dispositions minimales étant fixées un décret de 2003 qui se borne à préciser, pour ce qui nous intéresse, que le règlement « indique les principales modalités concrètes d'exercice des droits énoncés » dans la partie législative du code 11 ( * ) .

2. Une précision législative toutefois opportune

a) Car il revient naturellement à la loi de préciser le régime des droits et libertés

Le droit des patients et résidents de recevoir des visites est donc soutenu, si l'on peut dire, par les deux extrémités de la hiérarchie des normes : il est protégé en dernière instance par nos principes constitutionnels et nos engagements internationaux, et précisé dans son application dans les règles de fonctionnement des établissements dont l'esprit est déterminé par des textes infra-législatifs. Ces deux niveaux présentent chacun leurs avantages propres.

La protection au plus haut niveau ne peut donner que ce qu'elle a, à savoir un caractère définitif au sens procédural du terme. Il ne fait aucun doute qu'elle garantit le droit des personnes de recevoir des visites, mais cette garantie, par hypothèse, n'est apportée qu' a posteriori . Pour que les usagers dont les droits sont menacés en recouvrent la jouissance, encore faut-il qu'un juge soit saisi. Or, quand bien même on ferait toute confiance au juge pour assurer une juste conciliation des droits avec les impératifs qui les bornent, il semble qu'on doive collectivement souhaiter que nul n'ait jamais à demander au juge l'autorisation de rendre visite à un proche.

Quant aux textes infra-législatifs, ils relèvent du droit souple 12 ( * ) . Ils contribuent à améliorer la lisibilité de l'information portée à l'attention des usagers et des professionnels, mais ils ne font que cela puisqu'ils n'emportent pas d'effet juridique. La charte du patient hospitalisé est ainsi une grande référence pour les professionnels de santé et les usagers, mais elle est regardée par le juge comme l'émanation d'une instruction administrative, dépourvue donc de valeur réglementaire, et par conséquent impropre à fonder le moindre recours 13 ( * ) .

Le législateur est donc parfaitement fondé à détailler le régime du droit de visite en établissement . D'autres composantes ou principes connexes au droit à la vie privée ont d'ailleurs été précisées dans le code de la santé publique ou le code de l'action sociale et des familles : le premier est par exemple plus précis sur la protection du secret des informations concernant le patient 14 ( * ) , le second sur la liberté d'aller et venir des résidents 15 ( * ) .

b) Pour prévenir toute déformation des pratiques à l'issue de la pandémie

Que la première vague d'épidémie de covid-19 ait conduit à limiter drastiquement la vie sociale des patients et résidents, il est à peine besoin d'y revenir , sans qu'un tel constat emporte d'ailleurs la moindre appréciation sur l'opportunité des décisions prises. Qu'il soit permis de renvoyer sur ce point aux divers rapports d'évaluation de la gestion de la crise 16 ( * ) ou au rapport de la Défenseure des droits sur les personnes résidents en Ehpad 17 ( * ) .

Or la gestion de la première crise sanitaire marque à l'évidence un tournant majeur dans l'appréciation de l'organisation des visites .

D'une part car il se peut qu'aient ainsi été révélées des pratiques trop restrictives des visites, prises par mauvaise habitude ou manque de personnel pour les encadrer, et jamais remises en cause à ce jour.

D'autre part car il est douteux que le retour à une situation sanitaire plus ordinaire dissuade totalement les directeurs d'établissements de faire preuve d'une prudence excessive. La Défenseure des droits a étayé cette crainte dans l'avis rendu sur le présent texte à la demande de la rapporteure 18 ( * ) , dont il y a lieu de mettre sous les yeux du lecteur des passages complets  : « depuis la pandémie, nombreux sont les Ehpad, par exemple, objets de réclamations, dans lesquels les visites n'ont été rendues possibles qu'à une faible fréquence : visites hebdomadaires, parfois moins, bimensuelles, voire mensuelles ; limitées à 30 ou 45 minutes ; sur des plages horaires pouvant être imposées ; et, en tout état de cause, systématiquement limitées à un ou deux visiteurs. Les aidants familiaux, se rendant habituellement quotidiennement dans les Ehpad pour aider leur proche, notamment à s'alimenter, n'ont guère obtenu de dérogations à ces limitations de visites (fréquence et durée).

Des situations parfois ubuesques ont été rapportées à la Défenseure des droits. Les résidents et leurs proches ont rapidement constaté que le rapport entre le nombre de créneaux de visites et le nombre de résidents limitait de fait les possibilités de visites, notamment en raison de l'insuffisance de personnel des établissements mobilisés pour organiser et surveiller le bon respect des gestes barrières. Pour les personnes d'ordinaire fortement entourées (famille nombreuse notamment), cela conduisait à étaler les visites sur plusieurs mois.

La crise sanitaire a ainsi accentué les difficultés d'ordre organisationnel préexistantes mais aussi mis en lumière la difficile conciliation de l'impératif de protection des patients et résidents et celui du droit de visite. Or le droit à la protection de la santé ne peut se réduire à la simple appréciation de la santé somatique, sans tenir compte de la santé psychique des patients, qui est intimement liée au maintien d'une vie privée et familiale. La possibilité d'un droit de visite quotidien, y compris pendant les weekends, et dans des plages horaires rendant effectif ce droit, est indispensable. »

Les statistiques ci-dessous témoignent que l'ampleur du problème des visites en établissement ne suit pas homothétiquement l'évolution de la gravité de l'épidémie.

Saisines de la Défenseure des droits sur le motif du droit de visite
en établissement de santé et médico-social

Du 17 mars 2020
au 19 mai 2021

De mai 2021
au 30 septembre 2021

Résident en structure médicale

160

75

Patient en établissement de santé

22

4

Source : Défenseur des droits.

B. Le dispositif proposé

Cet article inscrit dans la loi le droit qu'ont les patients pris en charge à l'hôpital et les personnes accueillies en établissement médico-social de recevoir des visites et en fixe les premiers contours.

Ce droit n'est en réalité affirmé qu'au détour de l'identification de ceux à qui est confiée la charge de son respect, puisque l'article dispose que les établissements « assurent l'effectivité du droit des personnes qu'ils accueillent à recevoir chaque jour tout visiteur que ces personnes consentent à recevoir » (alinéa 1 er ).

Sont visés les « établissements de santé » et les « établissements mentionnés aux 6° et 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles », à savoir, respectivement :

- les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ;

- les établissements et les services, y compris les foyers d'accueil médicalisé, qui accueillent des personnes handicapées, quel que soit leur degré de handicap ou leur âge, ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ou bien qui leur assurent un accompagnement médico-social en milieu ouvert.

L'article apporte encore deux précisions :

- les plages horaires des visites sont fixées par le règlement intérieur de l'établissement et sont « journalières » (alinéa 2) ;

- aucune visite ne peut être subordonnée à une information préalable de l'établissement (alinéa 3).

II - La position de la commission : une réécriture de l'article pour codifier le droit des patients hospitalisés de recevoir des visites et en préciser les contours

La rapporteure estime légitime la précision dans la loi des contours du droit de visite en établissement. Par souci de lisibilité, elle préconise de codifier ces dispositions nouvelles et de consacrer deux articles distincts aux secteurs sanitaire et médico-social, qui appellent des traitements différents.

C'est pourquoi l'amendement n° 1 réécrit l'article 1 er pour le consacrer au droit de visite dans les seuls établissements de santé, qu'il inscrit dans un article nouveau placé immédiatement après l'article L. 1112-2 du code de la santé publique. Son premier alinéa reprend la substance du texte initial en disposant que « Les établissements de santé garantissent le droit des personnes qu'ils accueillent de recevoir chaque jour tout visiteur qu'elles consentent à recevoir ». Le renvoi au règlement de l'établissement pour préciser des « plages horaires » de visite est toutefois supprimé, pour ne pas rigidifier l'organisation des visites. L'impossibilité de subordonner une visite à l'information préalable de l'établissement est conservée.

Un deuxième alinéa fixe les motifs par lesquels une visite peut être légalement refusée par le directeur de l'établissement. Ils reprennent les motifs dégagés par la pratique et la jurisprudence, à savoir l'existence d'une menace pour l'ordre public ou celle d'un risque sanitaire. Une telle décision devra encore être un minimum formalisée par sa motivation et sa notification sans délai aux intéressés 19 ( * ) .

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 2
Droit de visite des patients pris en charge en établissement de santé

Cet article encadre le droit de visite des patients pris en charge en établissement de santé.

La commission a supprimé cet article.

I - Le dispositif proposé : tracer les contours du droit de visite des patients en établissements de santé

A. L'exercice actuel du pouvoir de police des visites en établissement de santé

Le droit de visite dont les fondements ont été détaillés plus haut ne saurait, non plus qu'aucun autre droit, s'exercer de manière absolue . Il doit se concilier avec les autres impératifs dont les gestionnaires d'établissements portent la responsabilité, au premier rang desquels la protection des autres résidents. La liberté étant, en la matière également, la règle et la restriction l'exception, c'est par la finesse de la délimitation des exceptions que s'apprécie la réalité du droit accordé aux individus.

Dans les établissements de santé publics , la mise en oeuvre de telles restrictions est soumise au contrôle du juge administratif. Ce contentieux est parallèle de celui portant sur le droit de visite au sein des établissements pénitentiaires. Depuis 2010, la décision du directeur relative à l'organisation des visites ne constitue plus une mesure d'ordre intérieur insusceptible de recours mais bien un acte faisant grief pouvant faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Elle doit être motivée, proportionnée à la situation et aux buts recherchés ; elle ne doit pas revêtir un caractère général ou absolu ; elle doit être limitée dans le temps.

Au sein d'un établissement de santé privé , les dispositions relatives au droit de visite figurent en principe dans le contrat hospitalier. Les règles d'accès à l'établissement sont par ailleurs opposables aux tiers souhaitant visiter un patient. La décision de l'établissement de restreindre ou d'interdire les visites peut être sanctionnée par la résolution du contrat ou la mise en jeu de la responsabilité contractuelle. Le patient ne dispose là d'aucun recours comparable au recours pour excès de pouvoir.

L'organisation des visites, donc l'appréciation des motifs de refus, relève du pouvoir de police générale dans l'établissement, appelé à s'exercer plus particulièrement dans le cas où l'exercice du droit de visite perturberait le bon fonctionnement du service, l'ordre public, la sécurité des patients ou celle du personnel. Le directeur en dispose, sous réserve d'une concertation préalable avec le directoire et de la consultation des instances de l'établissement 20 ( * ) .

En l'état actuel de la pratique et de la jurisprudence, le refus de visite peut résulter :

- d'un motif médical, sur le fondement du « repos des malades » 21 ( * ) , du fait que l'état de santé du patient ou du résident ne la permet pas ; le cas échéant, le refus peut porter sur le nombre de visiteurs autorisés ;

- du comportement du visiteur, jugé incompatible avec le bon fonctionnement du service, notamment en cas d'attitude injurieuse ou violente ou de gêne caractérisée pour les autres patients ; il présente alors un caractère quasi-disciplinaire, quoiqu'il sanctionne non pas l'usager mais son proche ;

- de motifs matériels, tels que la non-conformité de la demande aux règles relatives aux horaires, précautions de non contagion dans un contexte épidémique, suspension du droit de visite d'un mineur faisant l'objet d'une mesure de placement, etc .

B. Le dispositif proposé

Cet article fixe le cadre dans lequel un établissement de santé peut légalement s'opposer à une visite.

Les motifs sont au nombre de deux : l'existence d'une « menace pour l'ordre public à l'intérieur ou aux abords de l'établissement », ou celle d'une « menace pour la santé de celui-ci, notamment en fonction de la gravité de sa pathologie, ou pour celle des visiteurs, des autres patients du service ou de ceux qui y travaillent ».

La procédure est succinctement décrite : le refus de visite est émis par l' « établissement », lequel apprécie simplement l'existence d'une menace pour l'ordre public ; quant au second motif, il exige que « le médecin chef du service dont dépend le patient estime » qu'il est effectivement rempli.

II - La position de la commission : suppression de l'article

La rapporteure estime que l'essentiel des motifs justifiant légalement un refus de visite peut être subsumé sous les catégories prévues par la rédaction initiale du texte. La question s'est posée de savoir s'il convenait de légaliser toutes les caractéristiques que la jurisprudence exige, à peine d'illégalité, de telles décisions : limitation de durée, possibilité éventuelle de reconduction, caractère strictement nécessaire et proportionné. L'impératif de concision a été privilégié.

La substance de cet article ayant été transférée et son dispositif légèrement réécrit dans l'article 1 er , l'amendement n° 2 de la rapporteure proposait de supprimer cet article.

La commission a supprimé cet article.

Article 3
Droit de visite des personnes accueillies en établissement médico-social

Cet article précise les contours du droit de visite des personnes accueillies en établissement médico-social.

La commission a adopté cet article avec modifications, en en proposant une nouvelle rédaction.

I - Le dispositif proposé : tracer les contours du droit de visite des personnes accueillies en établissement médico-social

Cet article fixe le cadre d'exercice du droit de visite dans les établissements médico-sociaux visés aux 6° et 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles.

Le premier alinéa fixe les motifs possibles de refus, qui sont au nombre de deux : il peut s'agir soit d'une « menace pour l'ordre public à l'intérieur ou aux abords de l'établissement », soit d'une menace « pour la santé des visiteurs, des patients ou de ceux qui y travaillent ».

Les alinéas 4 et 5 précisent les conditions nécessaires à réunir pour invoquer ce second motif sanitaire :

- il n'est « valable qu'avec l'accord du médecin référent de l'établissement », lequel serait le médecin coordonnateur ou, à défaut, un médecin désigné par le directeur de l'établissement ;

- ce motif sanitaire ne peut par ailleurs être invoqué par l'établissement « que s'il est établi qu'il ne peut être obvié à cette menace par des comportements, des gestes, le port d'équipements ou l'organisation de la visite dans un lieu adapté à la protection de la santé ».

Les alinéas 2 et 3 précisent la procédure à suivre. La décision de refus est émise par le « directeur de l'établissement », lequel doit « expressément en informer la personne interdite de visite et le résident ». Cette décision individuelle « doit être motivée à la vue des circonstances et sa durée d'application ne peut excéder sept jours » , durée toutefois « renouvelable sous les mêmes conditions ». Lorsque le visiteur ou le résident informe l'établissement d'une visite au moins 24 heures avant l'heure prévue, le directeur dispose de ce laps de temps pour s'y opposer.

II - La position de la commission : codification, allègement et précision du dispositif

La rapporteure n'ignore pas que les ministres de la justice, de la santé, de l'autonomie et chargée des personnes handicapées ont mandaté le 2 juin 2021 un groupe de travail interministériel réunissant la direction des affaires civiles et du sceau et la direction générale de la cohésion sociale afin d'identifier les principales mesures restrictives de la liberté d'aller et venir dans les établissements médico-sociaux, et de proposer un cadre juridique adapté, dont les propositions sont attendues pour la fin du 1 er trimestre 2022.

Il lui semble néanmoins que, pour les raisons évoquées ci-dessus, il importe d'encadrer immédiatement l'exercice du droit de visite par la loi en tâchant de mieux protéger la vie sociale des personnes fragiles sans pour autant alourdir la responsabilité pesant sur les directions d'établissements chargés de la mettre en oeuvre.

L'amendement n° 3 de la rapporteure procède comme précédemment à la codification du dispositif et à sa réécriture dans un souci de concision, afin de limiter les risques procéduraux auxquels seraient confrontés les responsables d'établissement.

Les contours du droit de visite sont codifiés dans un nouvel article suivant immédiatement l'article L. 311-5-1 du code de l'action sociale et des familles, où est transposée la rédaction du droit de visite prévu dans les établissements de santé.

Un second alinéa reprend les motifs par lesquels un directeur d'établissement peut légalement s'opposer au droit de visite : une menace à l'ordre public ou un risque sanitaire. Ce dernier serait apprécié par le médecin coordonnateur de l'établissement ou, à défaut, plus simplement, tout professionnel de santé consulté par le directeur.

Un formalisme minimal est là encore imposé : une décision de refus devrait enfin être motivée et notifiée sans délai aux intéressés.

L'amendement prévoit enfin d'associer les conseils de la vie sociale (CVS) à la détermination des modalités d'exercice du droit de visite, en disposant que celles-ci sont fixées par le règlement de fonctionnement de l'établissement, dont l'élaboration requiert déjà la consultation du CVS 22 ( * ) .

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 4
Droit de visite inconditionnel pour les personnes en fin de vie

Cet article rend le droit de visite en établissement inconditionnel pour les personnes en fin de vie.

La commission a adopté cet article avec modifications, en en proposant une nouvelle rédaction.

I - Le dispositif proposé : rendre inconditionnel le droit de visite de leurs proches pour les personnes en phase terminale d'une maladie incurable

L'article 4 crée un droit de visite inconditionnel pour les personnes « en phase terminale d'une affection mortelle incurable » et fait obligation aux établissements de santé et médico-sociaux d'organiser « les conditions qui permettent d'assurer ces visites ».

Les proches que ces personnes seraient inconditionnellement autorisées à recevoir sont limitativement énumérés : il s'agit du « descendant, ascendant, conjoint ou membre de la fratrie » ou de la personne de confiance désignée en application de l'article L. 1111-6 du code de la santé publique.

II - La position de la commission : rendre le dispositif plus généreux

La rapporteure estime que la création d'un droit de visite inconditionnel pour les personnes en fin de vie est très opportune, car de nature à empêcher que se reproduise les drames humains nés de la gestion de la première épidémie de covid-19, au printemps 2020.

Le droit des résidents malades de voir leurs proches avant leur décès se rattache d'ailleurs possiblement moins au droit à la vie privée qu'au respect de la dignité de la personne humaine, ainsi que le laissent penser les décisions du juge des référés du Conseil d'État d'avril 2020 23 ( * ) , ainsi que l'analyse la doctrine : « le droit pour la personne âgée de (re)voir ses proches avant son décès se rattache à un impératif de sauvegarde de la dignité du mourant qui exige l'apaisement des souffrances physiques comme psychiques » 24 ( * ) .

La rapporteure a cependant proposé la réécriture de l'article par l'amendement n° 4.

Cet amendement précise d'abord la qualité des personnes dont l'état exige qu'aucun obstacle ne puisse être fait à la visite de leurs proches. Il lui semble en effet que les personnes en phase terminale d'une affection mortelle incurable - à supposer encore que l'on puisse correctement identifier toutes celles qui le sont réellement - ne devraient pas être seules à bénéficier d'un tel droit. Les personnes atteintes du covid-19, dont l'évolution, même chez les personnes présentant des comorbidités, n'est guère prévisible, ne remplissaient d'ailleurs pas ce critère. Cibler les personnes « en fin de vie ou dont l'état requiert des soins palliatifs », que le code de la santé publique définit déjà à son article L. 1110-10 est donc plus précis, mais aussi un peu plus large, car l'état requérant des soins palliatifs n'est pas nécessairement celui des personnes mourantes 25 ( * ) .

Il élargit ensuite le périmètre des proches inclus dans ce droit de visite inconditionnel . Car en effet, pourquoi autoriser les personnes en fin de vie de dire adieu à leur conjoint, mais non à leurs amis ? Il faut cependant bien borner l'énumération, quitte à créer un inévitable effet de seuil. Par analogie avec l'énumération, dans le code du travail, des proches pouvant justifier la prise d'un congé de proche aidant, l'amendement propose de faire entrer dans le dispositif : le conjoint de la personne prise en charge, son concubin, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, un ascendant, un descendant, un collatéral jusqu'au quatrième degré, l'enfant dont il assume la charge au sens de l'article L. 512-1 du code de la sécurité sociale, un ascendant, un descendant ou un collatéral jusqu'au quatrième degré de son conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité, une personne avec laquelle il réside ou avec laquelle il entretient des liens étroits et stables.

Des raisons formelles et légistiques justifiaient enfin la réécriture de l'article. L'amendement reformule ainsi le dispositif pour tenir compte du fait que le droit de visite est attaché à la personne prise en charge elle-même et non au visiteur, ainsi que pour codifier l'ensemble dans le code de la santé publique, à l'article L. 1112-4 du code de la santé publique, consacré à la prise en charge par les établissements de santé et médico-sociaux des personnes dont l'état requiert des soins palliatifs.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 5
Encadrement des atteintes portées au droit de visite en établissement
sous le régime de l'état d'urgence sanitaire

Cet article vise à prévenir les atteintes portées au droit de visite par des mesures réglementaires prises sous le régime de l'état d'urgence sanitaire

La commission a adopté cet article avec modifications, en en proposant une nouvelle rédaction.

I - Le dispositif proposé : limiter les possibilités de remise en cause du droit de visite sous le régime de l'état d'urgence sanitaire

L'article tâche de préserver le droit de visite en établissement des atteintes que pourraient lui porter les mesures réglementaires prises sous le régime de l'état d'urgence sanitaire.

Un premier niveau de protection consiste à soumettre les mesures ayant pour objet ou effet d' « empêcher d'exercer pendant une journée » le droit de visite à l'avis conforme motivé du comité de scientifique dont la loi du 23 mars 2020 26 ( * ) a imposé la mise sur pied en cas de déclaration de l'état d'urgence sanitaire, et de soumettre leur prolongation au-delà de 96 heures à l'autorisation du législateur.

Un niveau de protection plus élevé concerne l'hypothèse envisagée à l'article 4, à savoir le droit de visite inconditionnel dont jouiraient les personnes en fin de vie ou dont l'état requiert des soins palliatifs : à ces dispositions, les mesures réglementaires prises sous le régime de l'état d'urgence sanitaire ne pourraient porter atteinte.

II - La position de la commission : la réécriture de l'article

Le mécanisme proposé par cet article est opportun, car il pose une digue à la volonté que pourrait manifester tel gouvernement confronté à une crise sanitaire justifiant la déclaration de l'état d'urgence de porter une atteinte excessive à la vie sociale des personnes prises en charge en établissement.

Cette digue ne saurait certes être infranchissable, ne serait-ce que parce qu'une loi peut défaire ce qu'une loi précédente a fait : le gouvernement qui estimerait que la situation sanitaire justifie la suspension totale des visites pendant une longue durée trouverait sans doute une majorité pour le suivre en soumettant au Parlement la demande de prolongation de l'état d'urgence qu'exige de lui l'article L. 3131-13 du code de la santé publique.

Il n'est toutefois pas inutile de solliciter préalablement l'avis d'instances indépendantes telles que le comité de scientifiques compétent pour évaluer l'état de la situation sanitaire. L'amendement n° 5 proposé par la rapporteure, et adopté par la commission, y ajoute le Conseil consultatif national d'éthique afin d'éclairer la décision publique d'une lumière, précisément, plus éthique que scientifique.

L'amendement supprime toutefois la mention du caractère conforme de l'avis rendu, où le Conseil constitutionnel ne manquerait pas de voir une atteinte à l'exercice, par le Premier ministre, de son pouvoir réglementaire incompatible avec l'article 21 de la Constitution 27 ( * ) .

L'amendement n° 5 propose encore de supprimer les dispositions soumettant à autorisation législative les mesures réglementaires qui aurait pour objet ou effet de porter atteinte au droit de visite pendant plus de 96 heures, car de telles précisions semblent peu opérantes : exigera-t-on que le gouvernement, dans une situation d'urgence et d'incertitude sanitaire, annonce simultanément la fermeture des établissements pour une durée inférieure à 96 heures et son intention de déposer un projet de loi pour demander à prolonger cette durée ? Ou bien, qu'ayant décidé la fin des visites jusqu'à nouvel ordre, il s'avise la veille de l'expiration d'un délai de 96 heures de solliciter l'autorisation du Parlement ? Il a semblé plus équilibré de s'en tenir, sur ce point, à la demande d'avis d'organes d'aide à la décision compétents, l'essentiel étant sauvegardé par l'impossibilité pour lesdites mesures réglementaires de porter atteinte au droit de visite des personnes en fin de vie.

L'amendement n° 5 procède enfin à des modifications formelles, en tenant compte des codifications opérées aux précédents articles.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 6
Caractère d'ordre public des dispositions de la présente loi

Cet article dispose que la présente loi est d'ordre public.

La commission a adopté cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

Cet article dispose que « la présente loi est d'ordre public ».

II - La position de la commission

Une telle précision vise à prévenir toute application contraire aux dispositions qui précède d'engagements contractuels. Autrement dit, ne pourrait ni contredire ni compléter ces dispositions les stipulations dont seraient convenus deux cocontractants - tels les établissements de santé privés et leurs patients dans un contrat de séjour, par exemple.

Jugeant une telle précision opportune, la commission a adopté cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

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Réunie le mercredi 6 octobre 2021 sous la présidence de Mme  Catherine Deroche, présidente, la commission des affaires sociales a examiné la proposition de loi tendant à créer un droit de visite pour les malades, les personnes âgées et handicapées qui séjournent en établissements, dans la rédaction issue des amendements de la rapporteure.

Mme Corinne Imbert , rapporteure . - Avant tout, il me revient de vous proposer un périmètre pour l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution.

Je considère que ce périmètre comprend toutes dispositions relatives aux conditions d'exercice du droit de visite dans les établissements sanitaires et médico-sociaux.

En revanche, j'estime que ne présenteraient pas de lien, même indirect, avec le texte déposé, tous amendements ayant, plus largement, pour objet l'exercice des autres composantes du droit à la vie privée en établissement de santé ou en établissement médico-social, ou les conditions générales de prise en charge des patients en établissement de santé ou d'accueil des personnes en établissement médico-social.

Cette proposition de loi a été cosignée par le président et plus d'une centaine de sénateurs du groupe Les Républicains, mais je ne crois pas que cette circonstance importe beaucoup, car le contenu de ce texte me semble de nature à nous rassembler très largement.

Son objet est aussi simple que son titre : il s'agit, premièrement, de mieux préciser les modalités d'application du droit qu'ont les personnes prises en charge à l'hôpital ou accueillies en établissement médico-social de recevoir la visite de leurs proches et, deuxièmement, de rendre ce droit inconditionnel pour les personnes en fin de vie.

Vous devinez quels événements récents ont motivé sa rédaction. Ces milliers de résidents mis à l'isolement dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), ces milliers de patients privés de visite à l'hôpital, ces milliers de personnes décédées et mises en sac - je pèse mes mots - sans avoir vu leurs proches ni même reçu les derniers soins que l'humanité doit aux défunts, nous les avons encore tous douloureusement présents à l'esprit.

J'ai cependant souhaité entendre à nouveau ces témoignages. J'ai donc auditionné, outre l'administration, les représentants d'établissements, des juristes, la vice-présidente du Comité consultatif national d'éthique (CCNE), la Défenseure des droits et un certain nombre de représentants d'usagers. Parmi eux figuraient les fondateurs du collectif « Tenir ta main », qui rassemble patiemment les milliers d'histoires de ceux qui n'ont pu dire adieu à leurs proches prisonniers - c'est le mot - de la gestion de crise. À présent, ces personnes tentent de vivre malgré l'angoisse et la culpabilité ; elles travaillent à faire un deuil difficile, voire impossible.

Si je les rappelle d'un mot, c'est parce que, réunis, ces cas particuliers finissent par circonscrire le problème précis que ce texte peut tenter de résoudre, c'est-à-dire les situations dans lesquelles la balance entre la protection du droit à recevoir des visites et la nécessité de protéger le plus grand nombre s'est trouvée trop gravement déséquilibrée en défaveur du premier.

Soyons clairs : il ne s'agit pas de pointer quiconque du doigt ni de refaire la commission d'enquête sur la gestion de la crise. Les directeurs d'établissement ont tout fait pour protéger leurs patients ou leurs résidents, avec les moyens dont ils disposaient à chaque instant ; et encore ne faisaient-ils le plus souvent qu'appliquer des directives nationales ou suivre les éléments de la communication officielle qu'une navigation sans visibilité ne pouvait que rendre fluctuants et erratiques, pour ne pas dire contradictoires.

Autrement dit, si ce texte peut donner le sentiment de vouloir remettre les pendules à l'heure, c'est uniquement parce qu'il entre plus naturellement dans la mission du législateur de rectifier ce qui dysfonctionne que de distribuer des encouragements.

Ce texte introduit donc dans la loi le droit des patients et résidents qui le souhaitent de recevoir des visites quotidiennes. Il en précise également les limites, car il va de soi qu'un tel droit ne saurait être absolu.

L'administration et un certain nombre de juristes objectent que ce droit est déjà garanti au plus haut niveau de la hiérarchie des normes et qu'il est décliné dans de nombreux documents de rang inférieur à la loi, tels la charte de la personne hospitalisée ou le livret d'accueil du résident en Ehpad. Tout cela est presque vrai, et le serait-ce totalement que ce serait encore insuffisant pour démontrer qu'il est inutile de légiférer.

C'est presque vrai, car le droit de visite est en réalité considéré comme une composante du droit à la vie privée. Du moins est-ce ainsi que le juge l'entend lorsqu'un contentieux est porté à sa connaissance, et encore faudrait-il distinguer entre la vie privée au sens du code civil et la vie privée au sens de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), définitions qui ne se recoupent pas totalement. Quoi qu'il en soit, ces dispositions ne sont pas de nature à rassurer : on peut souhaiter ne jamais en arriver à devoir demander au juge l'autorisation de voir son père ou sa mère à l'hôpital.

Les grands principes sont donc en réalité lointains et imprécis. Quant à leur traduction dans les documents de gestion quotidienne des établissements, elle est en effet répandue, mais il faut craindre que le retour à la normale post-covid ne parvienne à éteindre totalement les incompréhensions qu'elle suscite chez les usagers et leurs familles, soit parce que, le pic épidémique passé, les directeurs d'établissement font toujours preuve d'une prudence excessive, soit parce que l'on se rend compte à présent que les plages horaires de visites avaient jadis été trop étroitement délimitées, par mauvaise habitude ou par contrainte de personnel. Cette crainte, la Défenseure des droits l'a étayée devant moi sur la base des signalements reçus ces derniers mois.

La loi semble donc un véhicule approprié pour clarifier un principe important de gestion des établissements prenant en charge un public fragile. D'ailleurs, la loi mentionne le droit à la vie privée. Elle s'autorise même à être plus explicite sur d'autres de ses composantes : à l'hôpital, elle s'attarde sur les contours du droit au secret médical et, en établissement médico-social, sur le respect de l'intimité et de la dignité. Dès lors, y accoler, par souci de précision, le droit de recevoir des visites et en préciser le régime n'aurait rien d'aberrant.

On a parfois cru me rassurer en me disant que la seule manière efficace de procéder serait l'incitation au dialogue de proximité dans les établissements, et que le fait d'inscrire ce droit dans la loi serait au mieux un acte symbolique.

Or, jusqu'à preuve du contraire, la loi présente un caractère obligatoire et devra emporter l'harmonisation des pratiques pour assurer son respect. Inscrire dans la loi ce qui passe pour un usage plus ou moins répandu est donc bien plus que symbolique. Sinon, nous vous aurions invités la semaine dernière à supprimer tous les articles du code de la santé publique relatifs aux soins palliatifs au motif qu'« écarter les souffrances » a toujours fait partie du code de conduite médicale depuis qu'Hippocrate a rédigé De l'art , au V e siècle avant Jésus-Christ.

Tout dépend, me direz-vous, des dispositions précises que l'on inscrit dans la loi. J'en viens donc au contenu de ce texte.

L'article 1 er crée un droit de visite quotidien pour les patients des établissements de santé et les résidents des établissements médico-sociaux, lequel ne peut être subordonné à une information préalable de l'établissement, et l'article 2 précise les motifs pouvant fonder un refus de visite dans un établissement de santé.

Je vous proposerai de supprimer l'article 2 pour transférer son contenu dans un article 1 er un peu remanié et consacré aux seuls établissements de santé. Le droit de visite y serait codifié au sein du code de la santé publique, sa rédaction légèrement raccourcie pour ne pas imposer la fixation de « plages horaires de visites », et les motifs de refus de visite légèrement toilettés. D'une part, il s'agit de laisser le médecin chef de service ou, sur sa délégation, un autre professionnel de santé, apprécier la qualification du motif de refus de visite fondé sur un risque sanitaire ou d'ordre public, mais sans les détailler excessivement pour ne pas alourdir les procédures. D'autre part, il s'agit de formaliser un minimum une telle décision, en imposant sa motivation et sa notification sans délai.

L'article 3 procède de même pour les établissements médico-sociaux. Je vous proposerai de le codifier dans le code de l'action sociale et des familles. Je vous suggérerai également d'en alléger et d'en préciser légèrement la rédaction : en disposant que l'avis sur le risque sanitaire pouvant fonder un refus de visite peut être rendu par tout professionnel de santé désigné par le directeur en l'absence de médecin coordonnateur - en effet, les Ehpad ne sont pas seuls concernés et tous les Ehpad n'ont d'ailleurs pas de médecin coordonnateur ; en poussant à la formalisation de la décision de refus, qui devra être motivée et notifiée sans délai aux intéressés ; en précisant enfin que le règlement de fonctionnement de l'établissement, établi après consultation du conseil de la vie sociale (CVS), fixe les modalités de respect du droit de visite.

L'article 4 rend le droit de visite des personnes « en phase terminale d'une affection mortelle incurable » inconditionnel pour certains de leurs proches : descendants, ascendants, conjoints, membres de la fratrie ou personnes de confiance.

Là encore, je propose de codifier le dispositif dans le code de la santé publique, mais aussi de l'élargir, car, si l'idée est de rendre possibles les visites des êtres chers aux personnes dont la vie touche à sa fin, il faut être plus généreux : je propose de faire référence aux personnes « en fin de vie ou dont l'état requiert des soins palliatifs », notion que le code de la santé publique connaît déjà, et d'élargir le cercle des proches pouvant bénéficier d'un droit de visite : à ce titre, j'emprunte au code du travail la catégorie des personnes pouvant justifier la prise d'un congé de proche aidant.

L'article 5 tente de préserver les mesures qui précèdent de la menace que pourrait faire peser sur elles l'état d'urgence sanitaire. Il soumet les mesures réglementaires prises sous ce régime qui restreindraient le droit de visite pendant une seule journée à l'avis conforme motivé du conseil scientifique réuni au déclenchement d'une telle situation, inscrit dans le code de la santé publique par la loi du 23 mars 2020. En outre, il impose que l'application de telles mesures restrictives au-delà de 96 heures soit soumise à l'autorisation du législateur ; et il précise que ces mesures ne sauraient quoi qu'il arrive faire obstacle au droit de visite inconditionnel prévu à l'article 4.

C'est un mécanisme intéressant, que je propose de modifier légistiquement, mais aussi sur plusieurs points importants : en supprimant la mention d'un avis conforme, qui serait inconstitutionnelle, en ajoutant au comité scientifique le CCNE, qui m'a dit approuver cette précision, et en renonçant à préciser la durée d'application des mesures exceptionnelles nécessitant l'intervention du législateur, ce qui semble difficile à mettre en oeuvre sur le plan pratique.

L'article 6 dispose que le texte est d'ordre public, ce qui empêchera les stipulations contractuelles de contredire ces dispositions : c'est opportun.

Le texte me semble ainsi reposer sur un trépied solide : l'inscription dans la loi d'un principe fondamental qui y fait défaut et laisse, en conséquence, les usagers dans l'ignorance de leurs droits et les établissements à la tentation de la surprotection ; la responsabilité toutefois laissée aux directions d'établissements de le mettre en oeuvre, sans formalisme excessif ; l'introduction enfin de garde-fous contre les situations d'inhumanité que nous avons connues au printemps 2020, en sanctuarisant le droit de visite dans les cas extrêmes. C'est cette démarche que je vous propose de suivre en adoptant ce texte.

Mme Catherine Deroche , présidente . - Merci du beau travail que vous avez accompli sur ce texte, dont l'intitulé paraissait évident, mais qui n'était pas si simple à rédiger.

M. Alain Milon . - Cette proposition de loi institue un droit de visite quotidien : le personnel soignant et le personnel administratif des établissements auront pour obligation de le garantir. Pourra-t-on étendre cette obligation aux familles, pour assurer un devoir de visite ?

Mme Annie Le Houerou . - Le premier confinement a été brutal, tout particulièrement pour les personnes âgées, du fait de leur fragilité face au covid. Les liens affectifs et intergénérationnels ont été mis à mal. Les résidents des établissements ont été isolés des aidants familiaux. Les personnes ne pouvaient plus s'embrasser ni se voir. Les deuils ont été extrêmement difficiles, voire traumatisants. Le désespoir de certains patients ou résidents a été si fort qu'ils se sont laissé glisser vers la mort.

Ce texte entend apporter une réponse à ces drames, causés par les restrictions liées à l'épidémie. En ce sens, il vise à combler un vide juridique. Le droit définit déjà un cadre protecteur sans citer expressément le droit de visite. En vertu de l'article 9 du code civil, « chacun a droit au respect de sa vie privée ». Le code de l'action sociale et des familles précise l'exercice des droits et libertés individuels et les garantit. La charte de la Fondation nationale de gérontologie encadre, quant à elle, la présence et le rôle des proches.

Le droit commun n'a pas été modifié par les mesures prises dans le cadre de l'état d'urgence ; mais des consignes et des protocoles ont restreint la liberté d'aller et venir. C'est un droit souple qui s'est imposé, le ministère de la santé s'en remettant aux directives d'établissement en reportant la décision : la Défenseure des droits a dénoncé ce flou et cette absence de garantie d'un cadre légal.

Cette proposition de loi ne pourrait-elle pas imposer la consultation du CVS, pour que ces décisions fassent l'objet d'une concertation au sein des établissements avant que de telles restrictions ne soient imposées ? Les décisions prises ont beaucoup varié d'un établissement à l'autre.

Passé l'urgence extrême, qui a pu justifier des restrictions de visite pour des raisons de sécurité, la liberté d'appréciation laissée aux directeurs d'établissement a fait prospérer des restrictions, voire des interdictions disproportionnées. C'est d'ailleurs dans la période récente que ces plaintes se révèlent les plus nombreuses.

Ce texte instaure dans notre législation un droit de visite pour les résidents des Ehpad ou des foyers. Il prévoit qu'un patient en phase terminale ne peut se voir interdire un droit de visite quotidien. En ce sens, il répond au drame vécu par nombre de nos concitoyens pendant la crise sanitaire. Toutefois, il soulève quelques questions.

Si les visites ont été interdites, c'est avant tout pour protéger les patients et limiter la propagation d'un virus encore méconnu : or le présent texte n'apporte pas de réponse à une situation d'urgence exceptionnelle, telle que nous l'avons vécue et telle qu'elle pourrait encore se produire. Il faut distinguer le droit de visite en période normale et en période de crise sanitaire, où des mesures restrictives de protection se révèlent nécessaires.

Les saisines ont afflué sur le bureau de la Défenseure des droits, surtout en dehors de la période de crise aiguë : cela plaide pour la nécessité de légiférer afin de renforcer le droit existant et, surtout, les pratiques. Mais veillons à ne pas formaliser les contraintes à l'excès : on pourrait atteindre l'inverse du but visé. Une formalisation du refus signifié au demandeur reste indispensable : les amendements proposés par Mme la rapporteure vont précisément dans ce sens.

Mme Laurence Cohen . - Je remercie Mme Corinne Imbert pour le travail précis et fouillé qu'elle a mené. Mon groupe considère que cette proposition de loi est véritablement transpartisane. Elle répond aux difficultés auxquelles nous avons pu être confrontés dans notre vie personnelle ainsi qu'à celles qui nous ont été rapportées lors des auditions, notamment en ce qui concerne les phénomènes de glissement qu'ont connus de nombreuses personnes. Le texte ne résout pas tous les problèmes rencontrés en Ehpad, ni ceux des personnes en phase terminale, mais ce n'est pas son but. Nous le voterons.

M. Daniel Chasseing . - Mme Corinne Imbert a donné un aspect très pragmatique à cette proposition de loi, en précisant qu'elle dissociait les Ehpad et les établissements de santé. Je félicite les directeurs d'établissement et les professionnels de santé qui ont dû prendre en charge des patients dans les Ehpad touchés par des contaminations. Certaines familles ont été plus compréhensives que d'autres, face à la situation. Les directeurs d'établissement, les professionnels de santé et les médecins ont tous connu l'angoisse de devoir faire face à des contaminations et au décès de personnes en mauvais état général, qui risquaient d'être atteintes de covid.

Il fallait un texte clair pour préciser les conditions de refus de visite en Ehpad et dans les établissements de santé. Nous ne sommes pas à l'abri d'une épidémie qui se reproduirait.

Le droit de visite pour les malades en fin de vie a également été précisé et encadré. Je félicite Corinne Imbert pour ce travail utile. Le texte fournit des dispositions claires sur lesquelles les médecins et les directeurs d'établissement pourront s'appuyer.

Mme Brigitte Devésa . - Je remercie Mme Imbert pour son travail remarquable. La période a montré combien il était nécessaire de venir en aide aux personnes isolées. Le groupe Union Centriste soutient cette loi essentielle pour les aidants.

M. Martin Lévrier . - Merci à Mme la rapporteure d'avoir développé cette approche très intéressante du problème. Nous avons tous été confrontés, parfois de très près, à certaines difficultés. Les établissements sont nombreux où l'on a accompli un travail remarquable et fait preuve d'une humanité extraordinaire. Il faut aussi constater cet aspect très positif de la situation.

Je ne dirai pas que cette loi est une loi d'émotion, car je n'apprécie pas forcément le terme, même si j'assume l'avoir employé à propos d'autres textes qui le justifiaient. Toutefois, il reste très délicat de légiférer aussi rapidement, alors que la pandémie n'est pas achevée. Je m'abstiendrai donc, à titre personnel.

Mme Corinne Imbert , rapporteure. - Je vous remercie pour les propos bienveillants que vous avez tenus à mon égard.

Madame Le Houerou, le droit souple est effectivement privilégié, pour l'instant, mais cela pose une question d'égalité et d'équité de traitement sur le territoire. D'où la nécessité d'établir un cadre. L'intervention du conseil de la vie sociale fait l'objet d'un amendement à l'article 3 visant à préciser que le règlement du fonctionnement de l'établissement fixe les modalités du droit de visite. En effet, ce règlement exige la consultation du conseil.

Madame Cohen, ce texte peut effectivement nous rassembler de manière transpartisane.

Je remercie M. Chasseing et Mme Devésa pour les propos qu'ils ont tenus.

Monsieur Lévrier, la vie sociale a pu être préservée dans certains établissements grâce à la mobilisation des équipes, alors qu'il n'était pas forcément très simple de le faire. Il ne s'agit pas d'émettre une valeur de jugement sur la manière dont la situation a été traitée. Dans les établissements médico-sociaux, on a eu recours à des tablettes pour recréer un lien social. Il n'en reste pas moins que la situation a été particulièrement difficile pour les personnes en fin de vie.

J'aime à dire que la météo de la veille est toujours plus facile à donner que celle du lendemain. Malgré une directive qui autorisait leur pratique au bout d'un mois, les soins mortuaires n'ont pas forcément été assurés partout. Il faut agir avec prudence. Cependant, il me semble qu'il était important de rendre le droit de visite inconditionnel pour les personnes en fin de vie ou en soins palliatifs.

À l'occasion du rapport d'information sur les soins palliatifs que nous avons réalisé avec Christine Bonfanti-Dossat et Michelle Meunier, nous avons visité la maison médicale Jeanne-Garnier, à Paris. Quinze jours après le début du premier confinement, les responsables de l'établissement avaient organisé la possibilité de visites pour les familles.

Monsieur Milon, le devoir de visite est important, mais il me semble difficile de pénaliser les familles.

M. Alain Milon . - On pénalise les établissements !

Mme Corinne Imbert , rapporteure. - Le droit de visite existe. Il faudrait effectivement s'intéresser au devoir de visite.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1 er

Mme Corinne Imbert , rapporteure. - L'amendement COM-1 vise à codifier dans le code de la santé publique le droit de visite en établissement de santé. Il reprend ce faisant le contenu de l'article 1 er et de l'article 2 de la proposition de loi, en veillant à rendre son mécanisme plus souple et plus précis.

L'amendement COM-1 est adopté.

L'article 1 er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 2

Mme Corinne Imbert , rapporteure. - L'amendement COM-2 vise à supprimer l'article 2, car sa substance est reprise dans l'article 1 er .

L'amendement COM-2 est adopté.

L'article 2 est supprimé.

Article 3

Mme Corinne Imbert , rapporteure. - L'amendement COM-3 vise à codifier dans le code de l'action sociale et des familles le droit reconnu au résident d'établissement médico-social de recevoir des visites, et à préciser légèrement sa rédaction. Il tend en effet à ce que l'avis sur le risque sanitaire pouvant fonder un refus de visite puisse être pris par tout professionnel de santé en l'absence de médecin coordonnateur. Il a également pour objet de formaliser la décision de refus, qui doit être motivée et notifiée sans délai aux intéressés. Enfin, il précise que le règlement de fonctionnement, établi après consultation du conseil de la vie sociale, fixe les modalités de respect du droit de visite.

L'amendement COM-3 est adopté.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 4

Mme Corinne Imbert , rapporteure. - L'amendement COM-4 vise à codifier dans le code de la santé publique le droit de visite inconditionnel des personnes en fin de vie, et à élargir doublement le dispositif. Sont ainsi concernées, plus largement que les personnes en phase terminale d'une affection mortelle incurable, les personnes en fin de vie ou dont l'état requiert des soins palliatifs, au sens que le code de la santé publique donne déjà à ce terme.

En outre, ces personnes pourront recevoir la visite d'un cercle plus étendu de proches, dont le périmètre a été emprunté, dans le code du travail, à celui des proches pouvant justifier la prise d'un congé de proche aidant.

L'amendement COM-4 est adopté.

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 5

Mme Corinne Imbert , rapporteure. - L'amendement COM-5 tend à réécrire le dispositif de l'article en tenant compte de la codification des dispositions précédentes. Il vise à ajouter au comité scientifique le Conseil national consultatif d'éthique, à retirer le caractère « conforme » de l'avis rendu par ces instances, qui serait inconstitutionnel, et à requérir l'exigence d'une autorisation législative lorsque l'atteinte au droit de visite excèdera 96 heures, ce qui serait difficile à mettre en pratique.

L'amendement COM-5 est adopté.

L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 6

L'article 6 est adopté sans modification .

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

TABLEAU DES SORTS

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 1 er
Du droit de visite des patients hospitalisés et des résidents d'établissements médico-sociaux

Mme IMBERT, rapporteure

1

Modalités d'application du droit de visite en établissement de santé

Adopté

Article 2
Droit de visite des patients pris en charge en établissement de santé

Mme IMBERT, rapporteure

2

Suppression de l'article

Adopté

Article 3
Droit de visite des personnes accueillies en établissement médico-social

Mme IMBERT, rapporteure

3

Modalités d'application du droit de visite en établissement médico-social

Adopté

Article 4
Droit de visite inconditionnel pour les personnes en fin de vie

Mme IMBERT, rapporteure

4

Droit de visite inconditionnel pour les patients ou résidents en fin de vie

Adopté

Article 5
Encadrement des atteintes portées au droit de visite en établissement
sous le régime de l'état d'urgence sanitaire

Mme IMBERT, rapporteure

5

Protection du droit de visite sous le régime de l'état d'urgence sanitaire

Adopté

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS, ALINÉA 3,
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 28 ( * ) .

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie 29 ( * ) . Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte 30 ( * ) . Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial 31 ( * ) .

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des affaires sociales a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 6 octobre 2021, le périmètre indicatif de la proposition de loi tendant à créer un droit de visite pour les malades, les personnes âgées et handicapées qui séjournent en établissements.

Elle a considéré que ce périmètre incluait des dispositions relatives :

- aux modalités d'application du droit des personnes prises en charge dans les établissements de santé ou accueillies en établissement médico-social de recevoir des visites ;

En revanche, la commission a estimé que ne présentaient pas de lien, même indirect, avec le texte déposé , des amendements relatifs :

- aux dispositions générales relatives au respect de la vie privée en établissement sanitaire ou médico-social ;

- aux dispositions générales relatives à la prise en charge en établissement sanitaire ou médico-social.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES ET DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

___________

• Bruno Retailleau , auteur de la proposition de loi

• France Assos Santé - APF France Handicap

Karine Pouchain-Grepinet , conseillère nationale Santé

Kareen Darnaud , membre du conseil d'administration de l'APF France Handicap

• Collectif « Tenir ta main »

Stéphanie Bataille , présidente

Laurent Frémont , fondateur et secrétaire général

• AP-HP

Charline Nicolas , directrice des affaires juridiques

• Comité consultatif nationale d'éthique (CCNE)

Karine Lefeuvre , vice-présidente

• Direction générale de la cohésion sociale (DGCS)

Jérôme Jumel , adjoint à la directrice générale

Sylvain Bottineau , sous-directeur de l'enfance et de la famille

• Direction générale de l'offre de soins (DGOS)

Alexandra Fourcade , cheffe de bureau à la sous-direction de la stratégie et des ressources

Anne Bellanger , adjointe à la cheffe de bureau

• Défenseur des droits

Claire Hédon , défenseure des droits

Sarah Doszla , juriste au pôle droit des malades et dépendance

Perrine Fromentin , juriste au pôle droit des malades et dépendance

France de Saint Martin , conseillère parlementaire

Contributions écrites

• Fédération de l'hospitalisation privée (FHP)

• Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (Fehap)

LA LOI EN CONSTRUCTION

___________

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl20-543.html


* 1 CEDH, 16 déc. 1992, n° 13710/88.

* 2 Voir le « Guide sur l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme », mis à jour au 31 août 2020 : https://www.echr.coe.int/Documents/Guide_Art_8_fra.pdf

* 3 CEDH, 24 févr. 1998, n° 21439/93, Botta c/ Italie. - CEDH, 14 juin 2005, n° 14991/02, Minelli c/  Suisse.

* 4 CCNE, Réponse à la saisine du ministère des solidarités et de la santé sur le renforcement des mesures de protection dans les EHPAD et les USLD, 30 mars 2020.

* 5 Loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire.

* 6 Voir Jean Carbonnier, Droit civil : les personnes, Paris, PUF, coll. Quadrige, 2004, p. 518.

* 7 Circulaire DHOS/E1/DGS/SD1C/SD4A n° 2006-90 du 2 mars 2006 relative aux droits des personnes hospitalisées et comportant une charte de la personne hospitalisée, qui actualise la charte du patient hospitalisé de 1995.

* 8 Arrêté du 8 septembre 2003 relatif à la charte des droits et libertés de la personne accueillie, mentionnée à l'article L. 311-4 du code de l'action sociale et des familles.

* 9 Article R. 1112-77 du code de la santé publique.

* 10 Loi n° 2021-502 du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification - article 31.

* 11 Décret n° 2003-1095 du 14 novembre 2003 relatif au règlement de fonctionnement institué par l'article L. 311-7 du CASF.

* 12 Conseil d'État, Le droit souple, étude annuelle, 2 octobre 2013.

* 13 CAA Bordeaux, 24 février 2005, n°00BX02751, Lebon.

* 14 Voir l'article L. 1110-4 du code de la santé publique.

* 15 Voir l'article L. 311-4-1 du code de l'action sociale et des familles.

* 16 Voir notamment le deuxième rapport d'information de la mission d'information dotée de pouvoirs d'enquête de l'Assemblée nationale sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de Coronavirus-Covid-19, décembre 2020, pp. 208 et suivantes.

* 17 Défenseur des droits, « Les droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en Ehpad », avril 2021.

* 18 Défenseur des droits, avis n° 21-14 du 4 octobre 2021.

* 19 Voir commentaire de l'article 2, ci-après.

* 20 Voir notamment Marc Dupont, « Visiter, être visité : un droit des malades et de leurs proches ?, dans RDSS, 2020, pp. 1137 et s.

* 21 Art. R. 1112-47.

* 22 Article L. 311-7 du code de l'action sociale et des familles.

* 23 CE, ord. réf., 15 avr. 2020, n° 439910 et CE, ord. réf., 15 avr. 2020, n° 440002.

* 24 « Le droit aux relations personnelles des résidents d'EHPAD dans le contexte du covid-19 », Aperçu rapide par Muriel Rebourg, professeur de droit privé et Stéphanie Renard, maître de conférences HDR en droit public, La Semaine Juridique Edition Générale n° 25, 22 Juin 2020, 749.

* 25 Sur cet aspect, voir le rapport d'information de Mmes Christine Bonfanti-Dossat, Corinne Imbert et Michelle Meunier, fait au nom de la commission des affaires sociales du Sénat, n° 866 (2020-2021) - 29 septembre 2021.

* 26 Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 - article 2.

* 27 Voir par exemple Conseil constitutionnel, décision n° 2021-2 RIP du 6 août 2021.

* 28 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 29 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 30 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 31 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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