TITRE V BIS

MIEUX PILOTER LA POLITIQUE
DE PROTECTION DE L'ENFANCE

Article 13
Regroupement des instances nationales de protection de l'enfance

Cet article propose de regrouper les instances nationales oeuvrant dans le champ de la protection de l'enfance au sein d'un seul groupement d'intérêt public. Il prévoit en outre de confier aux observatoires départementaux de la protection de l'enfance la mission d'animation d'une gouvernance territoriale renforcée entre le département et les services de l'État.

La commission a adopté les dispositions relatives au regroupement des instances nationales et a supprimé la mission d'animation de la gouvernance territoriale confiée aux observatoires départementaux, considérant qu'une telle mission ne relevait pas d'un observatoire.

I - Le dispositif proposé

A. La nécessité de regrouper de multiples instances nationales oeuvrant dans le champ de la protection de l'enfance

Les difficultés et les insuffisances du pilotage national de la politique de protection de l'enfance sont soulignées depuis plusieurs années. Elles sont principalement liées à la multiplicité des acteurs publics intervenant au niveau départemental et local et à leur manque de coordination. Si la compétence de la protection des enfants est confiée au président du département, le rôle de l'État est prépondérant à travers l'action de la justice, des acteurs de la santé et de l'éducation nationale. Sans contester le rôle du département , qui bénéficie d'un rôle de chef de file pour cette politique publique décentralisée, la protection de l'enfance peut être considérée comme une compétence partagée entre l'État et les collectivités . Elle nécessite ainsi une coordination des acteurs, aujourd'hui insuffisante.

En effet, dans son rapport public thématique relatif à la protection de l'enfance publié en novembre 2020, la Cour des comptes constate les difficultés du pilotage national : « le pilotage national de la protection de l'enfance se caractérise par une multiplicité d'instances aux missions enchevêtrées aux moyens limités, dont la coordination est chronophage. Cette situation est d'autant plus regrettable que l'implication des acteurs concernés est réelle. »

Aux côtés des ministères compétents dans le champ de la protection de l'enfance , principalement ceux chargés des solidarités et de la justice, interviennent de nombreuses structures nationales : conseil national de la protection de l'enfance (CNPE), groupement d'intérêt public pour l'enfance en danger (Giped), qui regroupe lui-même le service national d'appel téléphonique pour l'enfance en danger (Snated) et l'Observatoire national pour la protection de l'enfance (ONPE), l'agence française de l'adoption (AFA) et le conseil national d'accès aux origines personnelles (Cnaop).

La stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance (2019-2022), présentée par le Gouvernement en octobre 2019 a pour objectif de réformer la gouvernance nationale de la protection de l'enfance . Cette stratégie prévoit ainsi que « au niveau national, les organismes existants (CNPE, Giped, AFA) doivent pouvoir être rapprochés, comme le projet existe depuis de nombreuses années, afin de permettre un renforcement de leur capacité d'action et répondre aux besoins : diffusion des bonnes pratiques, appui aux départements, recherche, recueil et analyse de données ».

À cette fin, le Gouvernement a demandé à l'inspection générale des affaires sociales de constituer une mission de préfiguration pour la création d'un organisme national dans le champ de la protection de l'enfance . Le rapport de l'IGAS , remis en novembre 2020, propose ainsi de créer un groupement d'intérêt public , financé à parts égales par les conseils départementaux et l'État, qui absorberait les missions actuellement confiées au Giped, à l'AFA et au Cnaop . Il propose que les missions du CNPE soient maintenues en étant rattachées au HCFEA 99 ( * ) ou au nouvel organisme au sein d'un conseil autonome.

Le présent article entend traduire ces recommandations en proposant :

- d'affirmer dans la loi le rôle de l'État comme coordinateur national de la politique de protection de l'enfance ;

- de rapprocher au sein d'un GIP , selon des niveaux d'intégration variables, le CNPE, Le Giped, l'AFA, le Cnaop et le Conseil supérieur de l'adoption ;

- de confier à ce nouveau GIP des missions de promotion de la recherche et de l'évaluation et d'élaboration de référentiels .

B. Une intégration à géométrie variable des différentes instances au sein d'un GIP

1. L'affirmation du rôle de l'État comme coordinateur national de la politique de protection de l'enfance.

Le du I rétablit l'article L. 121-10 au sein du code de l'action sociale et des familles afin de prévoir que l'État assure la coordination de ses missions et de celles exercées par les collectivités territoriales, notamment par les départements, en matière de protection de l'enfance , et veille à leur cohérence avec les autres politiques publiques, notamment en matière de santé, d'éducation et de famille. Il précise que l'État doit promouvoir la coopération entre l'ensemble des administrations et des organismes qui participent à la protection de l'enfance.

La modification proposée pose donc le principe d'une gouvernance partagée entre les différents acteurs de la protection de l'enfance, confiant à l'État un rôle de coordination au niveau national, rôle qu'il assume dans la plupart des politiques publiques.

2. La création d'un nouveau groupement d'intérêt public regroupant les instances de protection de l'enfance

a) Les missions actuelles des instances concernées : CNPE, Giped, AFA, Cnaop et Conseil supérieur de l'adoption

? Le CNPE

Aux termes de l'article L. 112-3 du code de l'action sociale et des familles, le CNPE est institué auprès du Premier ministre et chargé de proposer au Gouvernement les orientations nationales de la politique de protection de l'enfance, de formuler des avis sur toute question s'y rattachant et d'en évaluer la mise en oeuvre . Ce conseil promeut la convergence des politiques menées au niveau local, dans le respect de la libre administration des collectivités territoriales.

Composé de 82 membres, le CNPE est présidé par le ministre chargé des familles et de l'enfance. Un vice-président, nommé sur proposition du président, assure la présidence du conseil lorsque le ministre est absent. Il dispose également d'un secrétaire général, nommé par le président du conseil pour assurer le fonctionnement de la structure et placé sous l'autorité fonctionnelle du directeur général de la cohésion sociale 100 ( * ) .

? Le Giped

Aux termes de l'article L. 226-6 du code de l'action sociale et des familles, le Giped est un groupement constitué par l'État, les départements et des personnes morales de droit public pour gérer un service d'accueil téléphonique gratuit ainsi qu'un Observatoire national de la protection de l'enfance afin d'exercer, à l'échelon national, les missions d'observation, d'analyse et de prévention des mauvais traitements et de protection des mineurs en danger prévues au présent chapitre.

- Le service d'accueil téléphonique (numéro 119) répond, à tout moment, aux demandes d'information ou de conseil concernant les situations de mineurs en danger ou présumés l'être. Il transmet immédiatement au président du conseil départemental, par l'intermédiaire des CRIP, les informations qu'il recueille et les appréciations qu'il formule à propos de ces mineurs.

- L'Observatoire national de la protection de l'enfance (ONPE) contribue au recueil et à l'analyse des données et des études concernant la protection de l'enfance, en provenance de l'État, des collectivités territoriales, des établissements publics, des fondations et des associations oeuvrant en ce domaine. Il contribue à la mise en cohérence des différentes données et informations, à l'amélioration de la connaissance des phénomènes de mise en danger des mineurs et recense les pratiques de prévention ainsi que de dépistage et de prise en charge médico-sociale et judiciaire des mineurs en danger, dont les résultats évalués ont été jugés concluants, afin d'en assurer la promotion auprès de l'État, des collectivités territoriales, des établissements publics, des fondations et des associations oeuvrant dans ce domaine. Il présente au Gouvernement et au Parlement un rapport annuel rendu public.

Financé à parité par l'État et les départements, le Giped dispose d'un budget d'environ 5 millions d'euros et emploie 56,8 équivalents temps plein. Ses bureaux sont situés à Paris 101 ( * ) .

? L'AFA

L'Agence française de l'adoption est un GIP constitué entre l'État, les départements et la fédération des organismes autorisés pour l'adoption. Aux termes de l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles, elle a pour mission d'informer, de conseiller, d'orienter, de préparer et d'accompagner les personnes agréées dans leur projet d'adoption , au regard des exigences des pays d'origine et du profil des enfants adoptables. Elle a également pour mission de servir d'intermédiaire pour l'adoption de mineurs étrangers de quinze ans.

Son siège est à Paris et elle dispose de représentations en Russie, au Vietnam, à Madagascar, au Burkina Faso, en Haïti, en Colombie et au Pérou. Le budget initial de l'AFA en 2021 est de l'ordre de 2,7 millions d'euros, financé à 90 % par l'État. Son personnel est composé de 45 agents dont 14 à l'étranger. Par ailleurs, l'AFA bénéficie de personnel mis à disposition sans contrepartie financière par le ministère de la Justice ainsi que de correspondants mis à sa disposition par les départements. Cette contribution des départements fait l'objet d'une valorisation financière, intégrée au budget de l'agence et estimée à 1 million d'euros 102 ( * ) .

? Le Cnaop

Les missions et activités du Cnaop sont définies aux articles L. 147-1 et suivants du code de l'action sociale et des familles. Il a pour mission de faciliter, en lien avec les départements, l'accès aux origines personnelles des personnes adoptées et des pupilles de l'État nées dans le secret de l'identité de leurs mères de naissance. Il est aussi compétent pour faciliter les accouchements dans le secret de l'identité des mères de naissance tout en organisant le recueil d'information sur les origines personnelles de l'enfant né dans le secret.

Le Cnaop n'a pas de personnalité juridique et ne dispose pas d'un budget propre ; il est intégré dans le ministère des solidarités et de la santé. Il est composé d'un conseil de seize personnes, placé auprès du ministre chargé des affaires sociales, et d'un secrétariat général qui regroupe 8 agents mis à sa disposition par le ministère des solidarités et de la santé 103 ( * ) .

? Le Conseil supérieur de l'adoption

Régi par l'article L. 148-1 du code de l'action sociale et des familles, le Conseil supérieur de l'adoption a pour mission d'émettre des avis et de formuler toutes propositions utiles relatives à l'adoption, y compris l'adoption internationale. Il est consulté sur les mesures législatives et réglementaires prises en ce domaine.

Ce conseil ne s'est pas réuni depuis 2016 car ses dispositions réglementaires ont été remplacées par les dispositions réglementaires encadrant le CNPE, qui ont créé une commission permanente relative à l'adoption au sein du CNPE.

b) L'institution d'un nouveau groupement d'intérêt public pour la protection de l'enfance, l'adoption et l'accès aux origines personnelles

Le e du du I du présent article crée une nouvelle section 4 au sein du chapitre VII du titre IV du livre I er du code de l'action sociale et des familles, intitulée « groupement d'intérêt public pour la protection de l'enfance, l'adoption et l'accès aux origines personnelles » et comprenant trois nouveaux articles L. 147-14, L. 147-15 et L. 147-16

L'article L. 147-14 prévoit qu'un GIP exercera au niveau national des missions d'appui aux pouvoirs publics dans la mise en oeuvre de la politique publique de protection de l'enfance, d'adoption nationale et internationale, d'accès aux origines personnelles . Il contribuera à l'animation, à la coordination et à la cohérence des pratiques sur l'ensemble du territoire.

Cet article L. 147-14 énumère ensuite (d'un 1° à un 6°) les missions de ce nouveau GIP qui absorbera les activités du Giped et de l'AFA mais qui n'assurera que le secrétariat des autres structures. Ces missions sont résumées dans le schéma ci-après.

Organisation et mission du nouveau groupement d'intérêt public

Source : Commission des affaires sociales

L'article L. 147-15 précise que l'État et les départements seront membres de droit du GIP, auquel pourront adhérer d'autres personnes morales. Il sera financé conjointement par l'État et les départements et la participation financière des collectivités sera fixée par voie réglementaire en fonction de l'importance de la population. Le GIP pourra conclure des conventions particulières avec certains de ses membres pour financer et mettre en oeuvre des projets d'intérêt partagé.

L'article L. 147-15 prévoit que le régime juridique du personnel du GIP sera fixé par un décret en Conseil d'État et que ce personnel sera soumis au secret professionnel.

Le présent article crée, à la suite, une section 5 intitulée « dispositions communes » et comprenant un article L. 147-17 qui prévoit que le Cnaop, le Conseil national de l'adoption et le CNPE se réuniront au moins une fois par an sur des sujets d'intérêt commun, dans des conditions définies par décret.

3. Les modifications apportées aux différentes instances pour tirer les conséquences de cette nouvelle organisation

a) Dispositions relatives au CNPE

Le e du du I du présent article crée une nouvelle section 3 au sein du chapitre VII du titre IV du livre I er du code de l'action sociale et des familles, intitulée « conseil national de la protection de l'enfance » et comprenant un article L. 147-13.

Ce nouvel article régira désormais le CNPE. Il prévoit que ce conseil sera composé de deux députés, deux sénateurs, de représentants de l'État, de magistrats, de représentants des conseils départementaux, de professionnels, des associations gestionnaires d'établissements et services, d'associations oeuvrant dans le champ de la protection des enfants, d'associations de personnes accompagnées et de personnalités qualifiées.

Il prévoit que le CNPE émettra des avis et formulera toutes propositions utiles relatives à la protection de l'enfance. Un décret devra préciser la composition du CNPE et ses modalités d'organisation.

En conséquence, le du I supprime le dernier alinéa de l'article L. 112-3 qui régit actuellement le CNPE.

b) Dispositions relatives au Cnaop et au Conseil supérieur de l'adoption

Les a à d du et le du I du présent article procèdent à la réorganisation des dispositions législatives du code de l'action sociale et des familles relatives au Cnaop et au Conseil supérieur de l'adoption, en créant deux nouvelles sections (1 et 2) propres à ces deux structures au sein du chapitre VII du titre IV livre I er du code. Le Conseil supérieur de l'adoption est ainsi renommé « conseil national de l'adoption ».

c) Dispositions relatives à l'AFA

Les a et b du du I du présent article modifient les articles L. 225-15 et L. 225-16 du code de l'action sociale et des familles qui régissent l'AFA. Il est précisé à l'article L. 225-15 que l'AFA est créée au sein du nouveau GIP et les dispositions prévoyant que l'AFA est constituée en tant que GIP sont supprimées.

d) Dispositions relatives au Giped et à la collecte de données en protection de l'enfance

Les c à i du du I du présent article procèdent aux modifications des articles du code de l'action sociale et des familles régissant le Giped.

? Compte tenu de la mission assignée au nouveau GIP de constituer un centre de ressources , les c et d modifient les articles L. 226-3-1 et L. 226-3-3 qui prévoit les échanges d'informations entre les ODPE et l'ONPE.

En effet, suivant les recommandations de la Cour des comptes et de l'IGAS dans leurs rapports susmentionnés, le présent article entend confier au GIP une mission de centre de ressources afin d'améliorer la connaissance et l'évaluation de la politique de protection de l'enfance.

Il est ainsi prévu que les données relatives à la protection de l'enfance, qu'ils s'agissent des informations issues des CRIP, des mesures d'assistance éducative ordonnées par le juge ou des mesures d'aide sociale à l'enfance du département, soient transmises aux ODPE et au service statistique du ministère chargé de la famille, en l'espèce la Drees 104 ( * ) , et non plus directement à l'ONPE. La transmission de ces données sera effectuée sous forme pseudonymisée. L'intervention de la Drees permettra ainsi, au regard de ses compétences, de produire des statistiques et des évaluations dans le champ de la protection de l'enfance.

En modifiant l'article L. 226-6, le e prévoit que l'ONPE aura ainsi pour mission de mettre en cohérence les différentes données et informations et d'améliorer la connaissance des phénomènes de mise en danger des mineurs.

? Les e , f , g , h et i tirent les conséquences de la suppression du Giped et de l'intégration du Snated et de l'ONPE au sein du nouveau GIP, en modifiant les articles L. 226-6 et L. 226-9 et en abrogeant les articles L. 226-7, L. 226-10 et L. 226-13.

4. Les dispositions transitoires pour la constitution du nouveau groupement d'intérêt public

Afin d'assurer la transition entre le fonctionnement des instances actuelles et la constitution effective du nouveau GIP, les II , III et IV du présent article prévoient les modalités de constitution, de transfert et de transition pour les différentes structures concernées.

Le II remplace la référence au Giped par celle du nouveau GIP au sein de l'article 121 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, dont le chapitre II régit le statut des groupements d'intérêt public.

Le III fixe les modalités de signature et d'approbation de la convention constitutive du nouveau GIP , conformément à l'article 100 de la loi du 17 mai 2011 précitée. La convention constitutive devra être signée par les membres du GIP dans un délai de six mois. À défaut, l'État pourra en déterminer le contenu.

Il est prévu qu'à compter de l'entrée en vigueur de l'arrêté d'approbation de la convention constitutive, le nouveau GIP se substituera au Giped et à l'AFA . Ainsi, l'ensemble des biens, des personnels, des droits et des obligations du Giped et de l'AFA seront transférés de plein droit au nouveau GIP. Le personnel transféré conservera le bénéficie de son régime d'emploi antérieur pour une durée maximale de 24 mois après le transfert.

Ce III prévoit toutefois que pour une durée de 24 mois l'AFA conservera sa personnalité morale afin d'exercer la mission d'intermédiaire pour l'adoption dans les États qui n'auront pas encore délivré au nouveau GIP l'accréditation pour engager avec eux des procédures d'adoption , conformément à la convention de La Haye du 19 mai 1993 relative à la protection des enfants et à la coopération en matière d'adoption internationale.

Le IV prévoit que les dispositions de l'article L. 112-3 régissant actuellement le CNPE seront applicables jusqu'à l'installation des nouveaux membres.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

? Les députés ont adopté quatorze amendements lors de l'examen du texte en commission , dont six amendements de précision et de coordination de la rapporteure. Les huit autres amendements prévoient :

- sur proposition de M. Alain Ramadier, de préciser que la politique de la justice doit aussi faire partie des politiques publiques faisant l'objet d'une coordination par l'État au titre de la protection de l'enfance ;

- à l'initiative de la rapporteure, de M. Paul Christophe, de Mme Florence Provendier et de Mme Monique Limon que le CNPE comprendrait un collège des enfants et des jeunes protégés ou sortant des dispositifs de la protection de l'enfance ;

- sur proposition de Mme Perrine Goulet, que le CNPE formulera des propositions en matière de prévention, et pas seulement dans le champ de la protection de l'enfance ;

- à l'initiative de la rapporteure et, par la voie d'un sous-amendement de M. Raphaël Gérard, que les acteurs de l'adoption internationale feront partie des destinataires des outils et informations du centre de ressources du nouveau GIP ;

- sur proposition de la rapporteure, de confier aux observatoires départementaux de la protection de l'enfance (ODPE) une mission d'organisation d'une gouvernance territoriale renforcée .

À cette fin, ce dernier amendement modifie l'article L. 226-3-1 du code de l'action sociale et des familles qui fixe les missions des ODPE. Il prévoit que les ODPE seront chargés d'organiser une gouvernance territoriale renforcée en coordination avec les services de l'État , dont le représentant de l'État dans le département, l'agence régionale de santé, le rectorat, l'autorité judiciaire donc le procureur de la République et le président du tribunal judicaire. Cette gouvernance visera à améliorer la prévention, le repérage, à renforcer la continuité des parcours des jeunes protégés, à éviter les ruptures de prise en charge et à mettre en synergie les autres politiques publiques du territoire pour répondre aux besoins fondamentaux des mineurs et jeunes majeurs pris en charge.

? En séance publique , les députés ont adopté huit amendements dont un amendement rédactionnel de la rapporteure et sept amendements qui prévoient :

- sur proposition de M. Raphaël Gérard, d'apporter une précision permettant de bien distinguer les missions respective de l'AFA et de l'autorité centrale pour l'adoption internationale ;

- à l'initiative de Gouvernement, de préciser que l'ONPE assurera la mission de centre national de ressources au sein du nouveau GIP ;

- sur proposition de la rapporteure, de Mme Perrine Goulet et de M. Julien Borowczyk de préciser que le GIP sera financé à parts égales par l'État et les départements ;

- sur proposition du Gouvernement, de prévoir que l'ONPE sera destinataires des mêmes informations que la Drees ;

- à l'initiative du Gouvernement, de préciser les missions de l'ONPE au sein du nouveau GIP, en matière de recensement des bonnes pratiques, de concours à l'élaboration d'outils et de référentiels et de leur diffusion ainsi que de mise en oeuvre de la base nationale des agréments des assistants familiaux.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

Le rapporteur souscrit au dispositif proposé , en ce qu'il vise à coordonner les acteurs nationaux, améliorer la connaissance et l'harmonisation des pratiques professionnelles. Le manque de coordination des acteurs au niveau national, l'absence de données précises et de travaux de recherche en protection de l'enfance nuisent à l'efficacité de cette politique publique, comme l'ont relevé plusieurs rapports ces dernières années.

Le rapporteur est toutefois plus réservé sur les modalités retenues pour le rapprochement, à géométrie variable, des différentes instances. Dans ces conditions, l'intérêt et l'efficacité de cette structure resteront à démontrer . Ces réserves rejoignent l'appréciation portée par le Conseil d'État sur ce dispositif qui a souligné, dans son avis rendu sur le projet de loi « la complexité particulière de l'architecture envisagée , inhérente au maintien de l'ensemble des instances existantes au sein ou dans le prolongement du nouveau groupement, ainsi qu'aux options retenues quant au positionnement des trois conseils. Il constate que les objectifs poursuivis ne pourront pas être pleinement atteints par cette réforme organisationnelle . »

Le schéma retenu a fait l'objet de concertations avec les représentants des instances concernées. Il ressort des auditions de l'ensemble de ces structures que le Giped et l'AFA ont préparé leur fusion depuis plusieurs mois et que l'intégration dans le nouveau GIP des secrétariats du CNPE et du Cnaop est adaptée aux missions et au fonctionnement de ces structures. Le rapporteur a toutefois constaté que les travaux engagés doivent être poursuivis pour s'assurer de la bonne articulation de l'ensemble des missions et des acteurs ainsi regroupés.

Par ailleurs la gouvernance et le financement paritaire du GIP entre l'État et les départements semblent satisfaisants . Des concertations sont engagées entre le Gouvernement et les représentants des départements afin d'arrêter les modalités précises de gouvernance du GIP, notamment pour sa présidence et sa direction, et la répartition précise des financements.

Dans ce contexte, le rapporteur considère qu'il est préférable de s'en remettre à ces concertations plutôt que de bouleverser l'équilibre atteint dans la configuration de cette gouvernance . En effet, il appartiendra aux acteurs concernés de veiller à ce que ce GIP dispose des moyens suffisants pour accomplir ses missions, en particulier celles visant à constituer un centre de ressources. Cette mission est primordiale à l'amélioration de la connaissance et à l'harmonisation des pratiques professionnelles. Au-delà du schéma retenu, seule la mobilisation des acteurs concernés garantira l'efficacité de cette nouvelle gouvernance.

Le rapporteur approuve ainsi le cadre retenu pour cette gouvernance nationale . Pour qu'il soit effectif, il appelle à la vigilance concernant les moyens qui seront alloués à ce GIP, la nécessité d'assurer le transfert du personnel dans de bonnes conditions, et la juste place qui doit revenir aux départements dans la conduite de ce GIP et dans son financement. Il convient ainsi que ces acteurs poursuivent leurs concertations pour donner rapidement au nouveau GIP une existence concrète après la promulgation de la loi.

Toutefois, le rapporteur n'est pas favorable à la mission confiée aux ODPE d'organiser une gouvernance territoriale renforcée en coordination avec l'État, ajoutée à l'Assemblée nationale. Cette mission ne peut pas être confiée à un observatoire, qui n'aura ni la capacité ni l'autorité suffisante pour réunir l'ensemble des acteurs et engager une véritable coordination des politiques locales. En outre, l'application de cette disposition serait fragilisée par le fait que les ODPE disposent de moyens très variables selon les départements. Le rapporteur considère qu' une gouvernance territoriale est nécessaire mais sous une forme différente , ainsi qu'il le propose par un amendement portant article additionnel. La commission a donc adopté l'amendement COM-69 du rapporteur tendant à supprimer ces dispositions.

En cohérence avec la mission confiée au GIP d'élaborer des référentiels et de diffuser des bonnes pratiques, la commission a adopté l'amendement COM-66 du rapporteur tendant à confier à ce GIP l'élaboration du référentiel relatif au projet pour l'enfant.

En concertation avec les travaux de la commission des lois sur la proposition de loi relative à l'adoption, la commission a adopté deux amendements du rapporteur et un amendement de M. Xavier Iacovelli (COM-67 et COM-15 identiques ; COM-68) tendant à rapatrier des dispositions précisant les missions de l'AFA , celles-ci trouvant davantage leur place dans cet article relatif à la gouvernance qu'au sein de la proposition de loi.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 13 bis (nouveau)
Expérimentation d'une gouvernance territoriale partagée entre l'État
et le département pour la protection de l'enfance

La commission a inséré cet article additionnel qui prévoit de créer à titre expérimental un comité départemental pour la protection de l'enfance, coprésidé par le président du département et le préfet, afin de coordonner les actions menées sur le territoire pour la protection des enfants.

Les insuffisances de coordination des acteurs de la protection de l'enfance constatées au niveau national se déclinent au niveau départemental. Or, c'est à cet échelon que sont déployées les politiques publiques pour la prise en charge des enfants en danger, qui fait intervenir les services du département et ceux de l'État.

Plusieurs rapports ont recommandé ces dernières années de renforcer la gouvernance territoriale afin de mieux coordonner l'ensemble des acteurs intervenant en protection de l'enfance.

Dans son rapport public thématique de novembre 2020 sur la protection de l'enfance, la Cour des comptes recommandait ainsi de « renforcer la gouvernance territoriale de la protection de l'enfance en désignant le préfet de département comme interlocuteur du président du conseil départemental et comme coordonnateur des services de l'État sur le territoire en matière de protection de l'enfance, en lien avec les autorités judiciaires ».

Dans son rapport de préfiguration pour la création d'un organisme national dans le champ de la protection de l'enfance publié en 2020, l'IGAS proposait de « créer des comités départementaux de la protection de l'enfance chargés d'assurer l'appui et la coordination des interventions et de reprendre les missions des ODPE, sous la co-présidence du président du conseil départemental, du préfet et du président du tribunal judiciaire ».

Pleinement convaincu par la nécessité de mieux articuler les interventions de ces acteurs au niveau départemental , afin d'engager des actions coordonnées et des réponses communes pour la protection des enfants, le rapporteur a déposé un amendement COM-70 tendant à créer à titre expérimental, dans les départements volontaires, un comité départemental pour la protection de l'enfance coprésidé par le président du département et le préfet du département . La commission a adopté cet amendement portant article additionnel.

Ce comité réunira l'ensemble des acteurs locaux oeuvrant dans le champ de la protection de l'enfance : département, État (protection judiciaire de la jeunesse, éducation nationale, agence régionale de santé), autorité judiciaire, professionnels de la protection de l'enfance, caisse d'allocations familiales.

Il se réunira au moins une fois par an afin de coordonner les actions menées pour la protection de l'enfance, de définir des orientations communes et de prendre des initiatives, notamment en matière de prévention . Cette instance pourra en outre se réunir pour traiter de situations individuelles complexes ou pour répondre de façon coordonnée à des incidents graves.

Sans remettre en cause le rôle prépondérant du département en matière de protection de l'enfance, il est essentiel de mieux articuler les acteurs intervenant auprès des enfants, afin de garantir aux mineurs protégés une prise en charge coordonnée et sans rupture de parcours. Les échanges qui se tiendront dans ce cadre permettront en outre d'harmoniser les pratiques professionnelles et de diffuser de bonnes pratiques, en lien avec les missions du GIP au niveau national.

La commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.


* 99 Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge.

* 100 Art. D. 148-1 à D. 148-3 du code de l'action sociale et des familles.

* 101 D'après les informations transmises par le Giped au rapporteur.

* 102 D'après les informations transmises par l'AFA au rapporteur.

* 103 D'après les informations transmises par le Cnaop au rapporteur.

* 104 Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques.

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