II. LES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Un investissement notable en faveur de l'Ukraine

Dans le contexte, de l'invasion russe en mars 2022, l'État a mobilisé près de 200 millions d'euros au titre de la mission Aide publique au développement, ce que les rapporteurs saluent.

Cette enveloppe a été financée pour moitié par le redéploiement de crédits. Elle inclut une utilisation notable du Fonds d'urgence humanitaire (FUH), dont les dépenses s'élèvent à 208,5 millions d'euros.

En outre, l'aide alimentaire programmée a dépassé la prévision de 18,7 %, atteignant 140,4 millions d'euros sur lesquels 3 millions d'euros ont été attribués à l'Ukraine.

Enfin, une aide économique et financière supplémentaire de 1,7 milliard d'euros a été apportée, dont 1,2 milliard d'euros sous forme de garanties à l'export.

Les rapporteurs notent que ces dernières dépenses ne sont pas comptabilisées au titre de l'aide publique au développement (APD).

2. Des aléas pour la mission et pour l'État

Les rapporteurs s'inquiètent du caractère fortement contraint de la mission Aide publique au développement en raison des engagements juridiques ou politiques pluriannuels, qui limitent sa flexibilité budgétaire et son pilotage.

Depuis 2017, la politique d'APD connait une croissance sans précédent visant à augmenter l'aide au développement à 0,55 % du revenu national brut (RNB) d'ici 2022.

Cet objectif, confirmé par la loi du 4 août 2021 relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, a été respecté. Ainsi, entre 2017 et 2022, les dépenses de la mission APD ont presque doublé (+96 % en CP), à périmètre constant.

Pour autant, plusieurs facteurs d'incertitude menacent l'exécution et la soutenabilité budgétaires de cette mission.

D'une part, les programmes 110 et 209 sont régulièrement sollicités pour financer des dépenses imprévues mais rendues nécessaires par la survenue d'une crise ou le choix de faire davantage participer la France aux fonds multilatéraux.

D'autre part, l'activité croissance de l'Agence française de développement (AFD) est source de rigidité et d'incertitude, avec une forte augmentation des crédits alloués à l'aide-projet de l'Agence, décaissés sur plusieurs années.

Ainsi, les engagements non couverts par des paiements sont croissants et s'élèvent, à la fin de 2022 à 9,7 milliards d'euros pour le programme 110 et à 3,2 milliards d'euros pour le programme 209 (+15 %, soit 1,1 année d'engagement).

Dans ce contexte, la prévision des CP à couvrir après 2024 s'élève respectivement pour ces deux programmes à 9,5 milliards d'euros (+16 % en un an) et 2,6 milliards d'euros (+8 %).

Les rapporteurs estiment que l'État devra rester vigilant à conserver des marges de manoeuvre dans la mise en oeuvre de la mission Aide publique au développement en encadrant, notamment, l'augmentation du volume des activités de l'AFD et notamment l'octroi de prêts concessionnels qui font l'objet du versement d'une bonification par l'État.