B. LES RECETTES EXCEPTIONNELLES EN PROVENANCE DES PRODUCTEURS D'ÉNERGIE RENOUVELABLE DEVRAIENT FINANCER UNE PART DES MESURES DE SOUTIEN AUX CONSOMMATEURS

Crédits inscrits au programme 345 « Service public de l'énergie »
en 2023 et en 2024 (CP)

(en millions d'euros)

 


2023
(LFI)

2024
(LFI)

Variation 2023-2024

09- Soutien aux énergies renouvelables électriques en métropole continentale

-

-

-

10- Soutien à l'injection de biométhane

34,3

875,5

+ 2 452,5 %

11- Solidarité avec les zones non interconnectées au réseau métropolitain

2 478,1

2 236,4

-9,8 %

12- Soutien à la cogénération au gaz naturel et autres moyens thermiques

376,7

100,5

-73,3 %

13- Soutien aux effacements de consommation

72,0

63,0

- 12,5 %

14- Dispositions sociales pour les consommateurs en situation de précarité énergétique

43,9

44,9

+ 2,3 %

15- Frais divers

73,3

0,422(*)

-99,5 %

17-Mesures exceptionnelles de protection des consommateurs

17 921,6

2 154,3

-88,0 %

18-Soutien hydrogène

-

25,0

+ 100,0 %

Total programme

21 000,0

5 500,0

-73,8 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2024

Le périmètre du programme 345 avait été bouleversé en 2023 par la création de la nouvelle action 17 « Mesures exceptionnelles de protection des consommateurs » destinée à porter les crédits nécessaires pour compenser les charges de service public de l'énergie (CSPE) assumées par les fournisseurs au titre des mesures dites de « bouclier tarifaire » et autres « amortisseurs ».

Essentiellement en raison de la diminution de 16 milliards d'euros du coût prévisionnel des mesures de soutien aux consommateurs que le Gouvernement entend prolonger en 2024, le montant total des crédits de paiement inscrits sur le programme 345 « Service public de l'énergie » se rétracte de 15,5 milliards d'euros par rapport à la LFI pour 2023 pour passer de 21,0 milliards d'euros à 5,5 milliards d'euros.

En 2024, l'allure du programme 345 demeure fortement empreinte des répercussions de la crise des prix de l'énergie :

- comme en 2023, les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables électriques en métropole continentale, qui, avant la crise coûtaient de 5 à 6 milliards d'euros par an à l'État ne font pas l'objet d'une inscription de crédits dans la mesure où le maintien des prix de l'électricité à un niveau élevé devrait encore amener les producteurs à devoir verser des primes négatives en 2024 au titre de ces mécanismes ;

- en revanche, du fait de la forte baisse des prix du gaz, le soutien à l'injection de biométhane, devrait quant à lui redevenir une charge conséquente pour l'État en 2024, 875,5 millions d'euros de crédits étant prévus par le présent PLF contre seulement 34,3 millions d'euros en 2023 ;

- sans que la moindre précision ne vienne étayer la méthode de calcul et les hypothèses qui expliquent le montant inscrit dans le projet annuel de performances, 2,1 milliards d'euros sont prévus par le Gouvernement au titre des dispositifs de soutien aux consommateurs qui pourraient fonctionner en 2024.

1. Des recettes exceptionnelles en provenance des producteurs d'énergies renouvelables fragilisées par une décision du Conseil constitutionnel du 26 octobre 2023
a) Les prix de gros de l'électricité demeurant à des niveaux élevés, aucune dépense n'est inscrite en 2024 au titre des mécanismes de soutien à la production d'énergies renouvelables électriques

Les dépenses de soutien aux énergies renouvelables (EnR) électriques continentales portées par l'action 09 « Soutien aux énergies renouvelables électriques en métropole continentale » du programme 345 consistent, habituellement, à compenser les fournisseurs d'électricité des surcoûts engendrés par les contrats d'obligation d'achat et de complément de rémunération qu'ils sont tenus de conclure avec les producteurs d'énergies renouvelables.

Les dispositifs de soutien public à la production d'EnR ont vocation à donner de la visibilité aux producteurs afin d'assurer la rentabilité de leurs projets et de déclencher la décision d'investir. En période « normale », avant la hausse des prix de l'énergie, les revenus garantis par les contrats d'obligation d'achat ou de complément de rémunération étaient inférieurs aux prix de marché et les compensations versées par l'État au titre des charges de service public de l'énergie pour soutenir la production d'EnR en métropole évoluaient chaque année entre 5 et 6 milliards d'euros.

Toutefois, depuis le début de la crise de l'énergie, les prix de l'électricité sur les marchés de gros se sont durablement établis à des niveaux supérieurs aux rémunérations garanties par les dispositifs de soutien public, si bien que celles-ci se sont transformées en rémunérations plafonnées qui, pour les installations concernées par ces mécanismes, se traduisent par un prélèvement mécanique des revenus excédentaires qui auraient été perçus par les producteurs du fait de la flambée des prix de l'électricité.

Dans sa délibération du 13 juillet 2023 modifiée (transcrite sous forme de graphique ci-après), la CRE estime qu'entre 2022 et 2024, la production d'EnR électriques en métropole continentale devrait se traduire par des recettes exceptionnelles cumulées d'environ 9,2 milliards d'euros pour l'État :

- 1,9 milliard d'euros au titre de 2022 ;

- 4,6 milliard d'euros au titre de 2023 ;

- 2,7 milliard d'euros au titre de 2024.

Évolution des charges de service public de l'énergie relatives au soutien à la production d'énergies renouvelables en métropole (action 09) entre 2020 et 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les délibérations de la CRE

Ces recettes exceptionnelles proviennent majoritairement de la filière éolienne terrestre et dans une moindre mesure de la filière hydraulique ainsi que des bioénergies. En revanche, la filière photovoltaïque devrait continuer à afficher un niveau de CSPE positif, c'est-à-dire des dépenses de l'État en faveur des producteurs, à hauteur de 1,6 milliard d'euros sur la période. Cette situation s'explique par les contrats d'obligation d'achat conclus avant le moratoire de 2010 (voir infra).

Il conviendrait d'ajouter à ce montant le rendement attendu de la contribution sur la rente inframarginale de production d'électricité qui, bien que lui aussi très en-deçà des estimations réalisées à la fin de l'année 2022 dans le cadre de l'examen du PLF pour 2023 (12,3 milliards d'euros), pourrait s'élever au total à 4,3 milliards d'euros. Dans sa délibération du 13 juillet dernier, la CRE recommandait de prolonger la durée d'application de la contribution sur la rente inframarginale de production d'électricité notamment pour prélever une part des profits qui seront générés par les exploitations qui ont résilié par anticipation leurs contrats d'obligation d'achat. Issu d'un amendement déposé par M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale conservé dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, l'article 8 bis du présent PLF prévoit la prorogation de cette contribution en 2024 tout en prévoyant de relever de 10 % à 50 % l'abattement appliqué aux revenus de marchés qui dépassent le seuil forfaitaire déterminé par la loi.

La CRE met en perspective ces recettes exceptionnelles aux 43 milliards d'euros de subventions versées par l'État aux producteurs, dans le cadre de ces mêmes mécanismes de soutien, entre 2003 et 2021.

Compensations de charges de service public de l'énergie versées par l'État aux producteurs entre 2003 et 2021

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après la délibération n° 2023-200 de la CRE du 13 juillet 2023

Comme c'était déjà le cas en 2023, et du fait du maintien des prix de gros de l'électricité à un niveau élevé en comparaison de la tendance historique, au titre de la gestion budgétaire 2024, aucun crédit n'est inscrit à l'action 09 du programme 345 et les recettes attendues par l'État au titre des mécanismes de soutien public à la production d'énergies renouvelables en métropole continentale estimées par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) à 2,7 milliards d'euros en 2024 sont détaillées dans le graphique ci-après.

Répartition des charges de service public de l'énergie prévisionnelles, relatives aux dispositifs de soutien à la production d'électricité renouvelable en 2024

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après la délibération n° 2023-200 de la CRE du 13 juillet 2023 modifiée

État des lieux du solaire photovoltaïque et de l'éolien

Au 31 décembre 2022, la puissance du parc solaire photovoltaïque atteint 16,3 GW. La programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) fixe un objectif de 20,1 GW en 2023 et une fourchette comprise entre 35,1 et 44 GW en 2028.

En ce qui concerne l'éolien terrestre, le parc français atteint une puissance de 20,4 GW au 31 décembre 2022, dont 1,5 GW raccordé au cours de l'année 2022. La PPE fixe un objectif de 24,1 GW en 2023 et une fourchette de 33,2 à 34,7 GW en 2028. Ces objectifs correspondraient à un parc de 14 200 à 15 500 éoliennes (contre environ 8 000 fin 2018).

En 2023, la PPE prévoit l'ouverture d'appels d'offres à hauteur de 1 850 MW. Un volume additionnel de 800 MW de nouveaux contrats par arrêté tarifaire est également attendu.

La PPE prévoyait le développement de parcs éoliens en mer, avec le lancement de six appels d'offres entre 2019 et 2023 pour une puissance installée de 3,8 à 4,4 GW puis l'attribution d'au moins 1 GW par an entre 2024 et 2028. Depuis 2020, 5 procédures de mises en concurrence représentant 4,3 GW ont été lancées. Un premier projet de 1 GW a été attribué en mars 2023.

Le parc éolien en mer posé, situé à Saint-Nazaire, d'une puissance de 480 MW est intégralement mis en service depuis la fin de l'année 2022. D'ici à début 2024, les parcs éoliens en mer de Saint-Brieuc et Fécamp (496 MW chacun) devraient être intégralement en service (les premières éoliennes ont été installées à l'été 2023). Les mises en service des parcs de Courseulles-sur-Mer, Dieppe-le Tréport et Yeu-Noirmoutier (1,4 GW au total) sont attendues en 2025 et celles des trois parcs pilotes flottants, totalisant une puissance de 85 MW, sont prévues entre 2023 et 2025.

La filière éolienne en mer devrait donc produire plus de 2 TWh en 2023, en nette augmentation par rapport à la production en 2022 de 0,6 TWh.

Source : projet annuel de performances pour 2024

b) Le fiasco de la révision des tarifs d'achat de contrats de soutien à la production d'électricité photovoltaïque pré-moratoire

Prévu par l'article 225 de la loi de finances initiale pour 2021, un mécanisme révisait à la baisse les tarifs d'achat de contrats de soutien à la production d'électricité photovoltaïque signés entre 2006 et 2011. Les textes règlementaires prévus (un décret et un arrêté) avaient été tardivement publiés le 27 octobre 2021. Les tarifs révisés avaient ensuite été notifiés aux installations concernées en fin d'année 2021.

Alors que la disposition législative avait été rejetée par le Sénat sur proposition de la commission des finances, le rapporteur spécial avait réitéré ses sérieux doutes quant à cette mesure dans son rapport du 29 septembre 2021 intitulé « Lumière sur la révision des contrats photovoltaïques »23(*). Elle avait en particulier alerté sur les risques contentieux liés à ce dispositif.

Après l'annulation de l'arrêté pris en application de la disposition législative par le Conseil d'État dans une décision rendue le 27 janvier 2023, le Gouvernement a finalement décidé d'arrêter les frais et de renoncer purement et simplement à appliquer le dispositif prévu par l'article 225 de la LFI pour 2021.

Si cette décision apparaît comme la conséquence implacable des nombreuses réserves que le rapporteur spécial avait formulé à l'occasion de l'examen de la disposition puis de son rapport d'information précité, elle n'en constitue pas moins un cruel aveu d'échec et un immense gâchis pour une mesure qui, au lieu de rapporter 4 milliards d'euros comme l'avait laissé miroiter le Gouvernement, ne se sera traduite que par des dépenses en pure perte. Ce fiasco, aussi peu reluisant que révélateur, est tout sauf de nature à redorer le bilan de la politique énergétique conduite ces dernières années.

c) La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 38 de la première loi de finances rectificative pour 2022 par la décision du 26 octobre 2023 du Conseil constitutionnel pourrait compromettre plusieurs milliards d'euros de recettes attendues par l'État

Parce que les cahiers des charges de certains anciens contrats de complément de rémunération prévoyaient des dispositifs de plafonnement des sommes reversées à l'État en cas de prix de marché supérieurs aux niveaux de rémunération de référence déterminés dans les contrats, l'article 38 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative (LFR) pour 2022 avait prévu une remise en cause partielle de ces mécanismes de plafonnement.

D'après la CRE, cette mesure « représente une part considérable »24(*), de l'ordre de 30 à 50 % des recettes exceptionnelles qui doivent être perçues par l'État entre 2022 et 2024. Toutefois, dans sa délibération du 13 juillet, en raison de la parution tardive des mesures règlementaires d'application de l'article 38 de la LFR du 16 août 202225(*), elle s'inquiétait des capacités d'EDF obligation d'achat (EDF OA), qui n'a pu s'organiser sur le plan opérationnel qu'au début de l'année 2023, à recouvrer rétroactivement les 1,7 milliard d'euros dus au titre de l'année 2022. Le 28 juin 2023, seuls 55 % de la somme totale avaient été effectivement recouvrés.

Cependant, les 3 à 4,5 milliards d'euros de recettes qui étaient attendues au titre de ce mécanisme, d'après les estimations réalisées par la CRE, sont désormais en suspens. En effet, après l'épisode de la révision des tarifs des contrats photovoltaïques (voir supra), l'État doit faire face à un nouveau revers juridique d'ampleur en matière de remise en cause a posteriori de contrats de soutiens conclus avec des producteurs d'énergie renouvelable.

Cette fois c'est une décision du Conseil constitutionnel du 26 octobre 202326(*) qui a déclaré inconstitutionnel l'article 38 de la première LFR pour 2022 au motif que le renvoi à un arrêté pour déterminer le seuil au-delà duquel les revenus des producteurs n'étaient plus captés par l'État relevait d'une incompétence négative du pouvoir législatif. L'analyse de cette décision ainsi que la solution proposée par le Gouvernement pour répondre à cette déclaration d'inconstitutionnalité sont présentées de façon détaillée infra dans le commentaire de l'article 52 sexies.

2. Les crédits budgétaires dédiés à soutenir l'injection de biométhane progressent de façon significative

En matière de gaz naturel, le biométhane constitue la principale source d'énergie renouvelable, raison pour laquelle l'État soutient financièrement son injection dans les réseaux de transport et de distribution de gaz naturel27(*).

Évolution du coût budgétaire des soutiens
à l'injection du biométhane (2018-2024)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après la délibération n° 2023-200 de la CRE du 13 juillet 2023 modifiée

Les crédits consacrés au soutien public à cette filière avaient considérablement augmenté depuis 2018, faisant craindre un emballement comparable à la situation observée à la fin de la première décennie des années 2000 concernant les contrats d'obligation d'achat d'électricité d'origine photovoltaïque. Dès 2018, la CRE avait alerté l'État sur les niveaux excessifs de rentabilité de la filière mais ce n'est qu'à la fin de l'année 2020 que celui-ci est intervenu. L'arrêté du 23 novembre 2020 a ainsi révisé le dispositif de soutien au biométhane afin de tenir compte de la maturité atteinte par la filière et de l'évolution des coûts de production. Ce décret réduit le tarif d'achat, prévoit sa dégressivité trimestrielle et renforce les conditions d'accès aux contrats. Ces évolutions doivent limiter la rémunération moyenne des capitaux investis à environ 7 %.

Toutefois, pour tenir compte de l'inflation des coûts de construction pour les nouvelles installations, le tarif d'achat de biométhane a été revalorisé par l'arrêté du 20 septembre 2022. Avec une indexation sur l'inflation observée au moment de la signature du contrat d'achat, cet arrêté doit permettre de préserver l'équilibre économique des nouveaux projets d'installations.

Parallèlement, un dispositif de soutien de type obligation d'achat mais accordé par appel d'offres, destiné à soutenir les projets de toute taille, a été mis en place en 2022. Le premier appel d'offres a été lancé à la fin du mois d'avril 2022 pour la contractualisation d'une capacité de production cumulée de 500 GWh par an.

État des lieux de l'injection de biométhane

Au 31 mars 2023, 551 installations produisent du biométhane valorisé par injection dans les réseaux de gaz naturel pour une capacité de production cumulée de 9,9 TWh PCS /an.

La PPE fixe une fourchette comprise entre 14 et 22 TWh PCS/an en 2028.

À la fin du premier trimestre, 844 projets se trouvaient encore en file d'attente pour une puissance de 15,4 TWh PCS/an.

Source : projet annuel de performances pour 2024

Évalué par la CRE dans sa délibération modifiée du 13 juillet dernier, le niveau des charges liées au soutien à l'injection de biométhane en 2024 pourrait atteindre 875,8 millions d'euros.

3. Le coût de la péréquation tarifaire en faveur des consommateurs des zones non interconnectées (ZNI) devrait diminuer de 9 %

Les coûts de production d'électricité en Corse ainsi que dans les départements, régions et territoires d'outre-mer sont sensiblement supérieurs à ceux de la métropole continentale. Aussi, au nom de la solidarité nationale, les consommateurs de ces zones non interconnectées (ZNI) bénéficient d'une péréquation tarifaire : les surcoûts des opérateurs historiques des ZNI - EDF Systèmes énergétiques insulaires (EDF SEI), Électricité de Mayotte (EDM) et Eau et Électricité de Wallis-et-Futuna (EEWF) - font l'objet d'une compensation par l'État.

En 2024, cette péréquation tarifaire, retracée par l'action 11 « Soutien dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain » du programme 345, devrait s'élever à 2 236 millions d'euros28(*), en diminution de 9 % par rapport à la révision des estimations au titre de 2023 réalisée par la CRE en juillet dernier.

Évolution du coût budgétaire de la péréquation tarifaire en faveur des consommateurs des ZNI (2017-2024)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après la délibération n° 2023-200 de la CRE du 13 juillet 2023

La diminution des charges prévisionnelles pour 2024 au titre des ZNI s'explique essentiellement par une augmentation des recettes liées aux hausses de tarifs réglementés de vente supérieure à la hausse attendue des coûts de production.

Sur l'enveloppe de 2 236 millions d'euros prévue par l'action 11 « Soutien dans les ZNI », 1 054 millions d'euros sont consacrés au soutien à la transition énergétique.

Les 1 182 millions d'euros restants représentent la part dévolue à la production non renouvelable de la péréquation tarifaire :

- les surcoûts de production d'électricité supportés par l'opérateur historique pour l'électricité produite par les installations qu'il exploite et qui fonctionnent à partir d'énergies fossiles ;

- les surcoûts d'achat d'électricité produite à partir d'énergies fossiles supportés par l'opérateur historique.

4. Le soutien à la cogénération se résorbe progressivement

La cogénération correspond à la production combinée de chaleur et d'électricité par des installations fonctionnant au gaz naturel29(*). Pour la soutenir, l'État obligeait EDF et les entreprises locales de distribution d'électricité (ELD) à conclure des contrats d'obligation d'achat ou de complément de rémunération avec les installations de cogénération à haute performance énergétique de moins de 12 MW. En contrepartie, il compense aux distributeurs d'électricité l'intégralité des surcoûts générés par ces mécanismes de soutien.

Conformément à la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), le dispositif de soutien à la cogénération a été abrogé à compter du 23 février 2021 en application d'un décret du 21 août 2020. Depuis cette date, les installations de cogénération à partir de gaz naturel ne sont plus éligibles à un soutien et aucune nouvelle demande de contrat ne peut donc être acceptée. Dans la mesure où les producteurs disposent d'un délai de deux ans pour mettre en service leur installation, plus aucune nouvelle centrale ne sera soutenue à compter du début de l'année 2023. Les contrats en cours ne sont pas impactés par cette abrogation.

La capacité installée en cogénération poursuit sa diminution. Elle devrait s'élever à 1,8 GW en 2024 alors qu'elle atteignait 2,7 GW en 2020. Les installations de cogénération devraient produire 4,9 TWh en 2024, un niveau également en baisse régulière.

Évolution de la puissance installée et de la production soutenues en cogénération (2022-2024)

Source : commission des finances du Sénat d'après la délibération n° 2023-200 de la CRE du 13 juillet 2023

Pour 2024, dans sa délibération modifiée du 13 juillet 2023, la CRE évalue les charges relatives au soutien à la cogénération à 107,8 millions d'euros. Le projet annuel de performances du présent PLF a inscrit 100,5 millions d'euros à l'action 12 « Soutien à la cogénération au gaz naturel et autres moyens thermiques ».

5. L'amorce d'un soutien à la production d'hydrogène décarboné

En 2024, pour la première fois, l'action 18 « Soutien hydrogène », créée en 2023, est dotée d'une enveloppe de crédits dédiée : 680 millions d'euros en AE et 25 millions d'euros en CP.

Ces montants doivent permettre la mise en oeuvre à compter de 2024 d'un dispositif de soutien à la production d'hydrogène décarboné par lequel la puissance publique compense au producteur, sur une période de 10 à 15 ans, la charge liée à la différence de coût de production entre de l'hydrogène décarboné et de l'hydrogène produit à partir de combustibles fossiles.

De premiers appels d'offres sont prévus en 2023 avec un objectif de déploiement à horizon 2029 d'une production d'hydrogène décarboné soutenue pour une puissance de 1 GW d'électrolyse. Il est prévu que la montée en puissance du dispositif se réalise en trois étapes. Un premier objectif de 150MW en 2024, une deuxième phase de 250MW en 2025 puis 600MW dès 2026 avant de parvenir à l'objectif d'1 GW en 2029.


* 22 La diminution des crédits relatifs aux frais divers en 2024 s'explique par les intérêts dus par les fournisseurs pour lesquels les acomptes de CSPE versés au titre d'une année se trouvent être en réalité supérieurs aux CSPE effectives. Ces écarts dus aux fluctuations des prix de gros de l'énergie sont amplifiés dans le contexte actuel.

* 23 Rapport d'information de Mme Christine LAVARDE, fait au nom de la commission des finances

n° 864 (2020-2021) - 29 septembre 2021.

* 24 Délibération n° 2023-200 de la CRE du 13 juillet 2023.

* 25 L'arrêté fixant le prix seuil n'ayant été publié que le 28 décembre 2022.

* 26 Décision n° 2023-1065 QPC du 26 octobre 2023.

* 27 Dans cette perspective, l'article L. 446-2 du code de l'énergie prévoit que les fournisseurs de gaz naturel sont tenus de conclure des contrats d'achat de biométhane produit par les installations éligibles à l'obligation d'achat. L'application de ces contrats génère un surcoût, qui correspond à la différence entre le prix d'acquisition du biométhane et le prix moyen constaté sur le marché de gros du gaz naturel ainsi qu'aux coûts de gestion du dispositif. C'est ce surcoût, évalué tous les ans par la Commission de régulation de l'énergie (CRE), que l'État prend à sa charge.

* 28 En plus des charges calculées au titre de la seule année 2024, ce montant intègre 30 millions d'euros qui correspondent à d'anciennes régularisations au titre de la période 2012-2021.

* 29 Ce processus permet d'atteindre des rendements énergétiques globaux supérieurs à ceux obtenus via la production séparée de chaleur (chaudières) et d'électricité (centrales électriques) et de générer ainsi des économies d'énergie primaire. La chaleur produite est généralement utilisée par injection dans un réseau de chaleur ou pour un processus industriel.

Partager cette page