III. LA POSITION DE LA COMMISSION : UNE NÉCESSITÉ JURIDIQUE, UNE LÉGITIMITÉ À CONFIRMER

A. L'IMPOSSIBILITÉ JURIDIQUE D'ORGANISER LE PROCHAIN SCRUTIN PROVINCIAL ET DU CONGRÈS SANS RÉVISION CONSTITUTIONNELLE

1. L'atténuation de la dérogation aux principes d'égalité et d'universalité devant le suffrage

Comme l'atteste le graphique ci-dessous, la proportion d'électeurs inscrits sur la liste électorale générale qui, en application des dispositions constitutionnelles proposées, ne seraient pas admis à voter pour l'élection des assemblées de province et du congrès de la Nouvelle-Calédonie serait largement réduite. Elle serait divisée par 2,54, établissant ainsi à 7,6 % la part des électeurs non-admis à ces scrutins.

En outre, il est incontestable que cette atténuation de la dérogation aux principes d'égalité et d'universalité devant le suffrage permettrait de rétablir une proportion quasi équivalente à celle ayant été établie lors de la signature de l'Accord de Nouméa.

Plus généralement, comme l'a rappelé le Conseil d'État dans son avis sur le projet de loi constitutionnelle, « si les règles qui définissent l'établissement de ces listes ne sont pas modifiées, cet écart [en matière de proportion des électeurs inscrits sur la liste électorale générale et électeurs admis à participer aux scrutins provinciaux] ne pourrait que s'accentuer avec le temps »9(*).

2. La nécessité d'une disposition constitutionnelle pour dégeler le corps électoral comme pour maintenir des restrictions au corps électoral

D'une analyse partagée entre la commission des lois du Sénat et le Conseil d'État, seule une disposition constitutionnelle permettrait, d'une part, de dégeler le corps électoral calédonien, et d'autre part, d'établir de nouvelles - y compris d'une moindre rigueur - restrictions au corps électoral calédonien, justifiant ainsi pleinement la nécessité d'une telle révision constitutionnelle.

Plus précisément, comme l'a rappelé le Conseil d'État, « l'organisation politique issue de la mise en oeuvre de l'Accord de Nouméa ne peut, sous réserve des dispositions organiques intervenant dans le cadre des orientations définies par l'accord et à l'exception des cas dans lesquels les dispositions mêmes de la Constitution le permettent, être modifiée sans une révision de la Constitution, nécessaire pour s'écarter de ces orientations, et notamment pour modifier les dérogations aux règles et principes de valeur constitutionnelle que l'accord comporte »10(*).

Pour mémoire, comme l'a rappelé la commission des lois lors de son examen du projet de loi organique reportant les élections provinciales et du congrès de la Nouvelle-Calédonie, le Conseil d'État considère que ce prochain scrutin ne saurait, sans risque juridique majeur, se tenir sur la base du corps électoral restreint gelé prévu transitoirement par l'Accord de Nouméa.


* 9 Avis n° 407713 du Conseil d'État précité.

* 10 Ibidem.

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