E. LE FONDS NATIONAL DE DÉVELOPPEMENT DES ENTREPRISE UN DISPOSITIF ABANDONNÉ ?

Le Fonds national de développement des entreprises, présenté comme l'une des mesures fondamentales de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, a une double vocation :

- accorder des prêts aux personnes physiques qui créent, développent ou reprennent une entreprise dans la limite d'un montant équivalent à leur apport en fonds propres au capital ;

- souscrire des garanties d'emprunts ou apporter une contre garantie aux engagements pris par les sociétés de caution, les sociétés de capital risque, les fonds communs de placement à risque, les sociétés de développement régional et les fonds de garantie de la loi Galland.

L'action du FNDE est limitée géographiquement aux zones éligibles à la prime d'aménagement du territoire (PAT), aux territoires ruraux de développement prioritaire (TRDP) ainsi qu'aux zones de redynamisation urbaine.

Le volet « prêts personnels » est incontestablement celui qui présente les plus grandes difficultés de mise en oeuvre, essentiellement en raison de l'hostilité de principe manifestée à son encontre par la direction du Trésor. Cette hostilité, apparemment irréductible, s'est manifestée dès l'origine avec force, en dépit de la volonté clairement exprimée par le Premier ministre, alors M. Edouard Balladur, de voir aboutir le dossier.

L'objectif poursuivi par M. Pasqua était de favoriser l'émergence de projets présentant une faible, voire une très faible surface financière. Le montant moyen des prêts du FNDE devait être, en effet, de 50 000 francs.

Les banques recevaient localement mission d'instruire les dossiers et de les transmettre pour financement au Crédit d'équipement des petites et moyennes entreprises (CEPME). Ce dernier percevait une commission au titre de son activité de prêteur.

Le ministre d'État aurait, en outre, souhaité offrir aux emprunteurs un taux d'intérêt réel nul. A défaut d'accord sur ce point, il s'était rallié à une formule comportant un taux d'intérêt réel à 3 % avec différé d'amortissement de trois ans à l'exemple des prêts aux jeunes agriculteurs ou aux commerçants.

Enfin, la DATAR avait conçu d'intéresser les banques à la démarche en leur imposant de prêter à l'entrepreneur une somme égale au montant de l'apport personnel et du prêt octroyé par le CEPME pour le compte du FNDE. Ainsi, pour un apport direct de 50.000 francs, le prêt du CEPME pouvait s'élever jusqu'à 50.000 francs et celui de l'intermédiaire bancaire à 100.000 francs, soit une injection totale de 200.000 francs en faveur du développement local.

S'exprimant au nom du gouvernement, M. Daniel Hoeffel avait annoncé au moins de décembre 1994 au Sénat, au cours du débat de deuxième lecture sur le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, que le volet « prêts personnels » du fonds national de développement des entreprises serait doté de 650 millions de francs pour l'exercice 1995 :

- 150 millions de francs de moyens budgétaires inscrits sur le compte d'affectation des produits de cession de titres du secteur public (8 ( * )) et destinés à la couverture des bonifications d'intérêt et des frais de non remboursement ;

- 500 millions de francs affectés par la Caisse des dépôts et consignations et correspondant à l'enveloppe que cette institution avait de toute façon prévu de dégager, en 1995, dans le cadre de son programme pluriannuel (1994-1996) d'intervention en direction des PME.

La Caisse était ainsi invitée à inscrire son action dans le sillage du mécanisme conçu par le gouvernement.

Même si le décret relatif à ce volet du fonds national de développement des entreprises est aujourd'hui prêt, il ne semble pas toutefois que sa parution puisse intervenir dans un avenir proche.

La direction du Trésor a tout d'abord réitéré sa totale hostilité au principe même des bonifications d'intérêt et à tout processus de réactivation de formes de crédit administré.

Le Trésor et la DATAR ont ensuite exprimé des opinions divergentes sur le coût prévisible des sinistres pour le budget de l'État. Les premiers, arguant de la facilité d'accès aux prêts du FNDE offerte à de petits entrepreneurs disposant d'une trop faible surface financière, ont évalué le taux de non remboursement à 50 %. Les seconds, soulignant au contraire le desserrement de la contrainte financière subie par les investisseurs, estiment que ce taux doit être situé entre 20 % et 30 %.

Enfin, d'une façon plus générale, la direction du Trésor et la DATAR continuent d'être en désaccord sur des points aussi fondamentaux que les taux d'intérêt proposés à l'emprunteur ou les sources de financement.

De son côté, la Caisse des dépôts et consignations a estimé que le Premier ministre n'avait pas le pouvoir de récupérer au profit de l'État son programme d'action en faveur des petites et moyennes entreprises.

L'annonce, le 27 novembre dernier, d'un plan en faveur des petites et moyennes entreprises aurait pu être l'occasion de mettre en place le FNDE. Le premier ministre n'a, en réalité, pas fait référence au fonds national de développement des entreprises et a décrit un dispositif parallèle qui pourrait bien sonner ainsi le glas de l'une des dispositions les plus innovantes de la loi Pasqua du 4 février 1995.

* 8 On notera toutefois que la loi de finances pour 1995 n'a prévu au titre des emplois du compte d'affectation que des dotations au capital des entreprises publiques pour un total de 8 milliards de francs.

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