Rapport général n° 77 (1995-1996) de M. René RÉGNAULT , fait au nom de la commission des finances, déposé le 29 novembre 1995

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N°77

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1995.

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 1996, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Alain LAMBERT,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Deuxième partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 9

AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE, ÉQUIPEMENT ET TRANSPORT :

IV - MER: MARINE MARCHANDE

Rapporteur spécial : M. René REGNAULT

(1) Cette commission est composée de MM. Christian Poncelet, président ; Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, vice-présidents ; Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Emmanuel Hamel, René Régnault, François Trucy, secrétaires ; Alain Lambert, rapporteur général ; MM. Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Philippe Marini, Marc Massion, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Alain Richard, Maurice Schumann, Michel Sergent, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (l0ème legisl.) : 2222, 2270 à 2275 et T.A. 413.

Sénat : 76 (1995-1996).

Lois de finances.

PRINCIPALE OBSERVATION

1. Un budget sous influence

Les évolutions du budget de la Marine marchande sont très directement influencées par la situation financière de l'Établissement national des invalides de la marine. La subvention d'équilibre de l'État à l'ENIM constitue en effet près de 80 % du budget : la moindre inflexion de son niveau a donc automatiquement des répercussions considérables.

Pour 1996, la diminution de - 1 % de la subvention d'équilibre inscrite au chapitre 47-37 (- 48 millions de francs) explique les neuf dixièmes de la diminution globale du budget de la Marine marchande (-53,9 millions de francs).

Il convient donc d'être particulièrement attentif aux évolutions d'un régime de sécurité sociale qui devrait comporter en 1996 44.800 actifs cotisants pour 124.400 pensionnés. Ce ratio de 2.8, qui donne la mesure du déclin de la flotte de commerce française, place irrémédiablement le budget de la Marine marchande sous le signe du passé.

2. La nécessité de maintenir l'effort en faveur de la formation maritime

Dans la présentation de ses priorités budgétaires, le ministère indique que "le projet de budget pour 1996 est, s'agissant de la formation professionnelle maritime, animé par le souci de préserver l'effort de formation du service public de l'éducation maritime qui délivre un enseignement de qualité, de renommée mondiale. La sauvegarde du savoir faire enseigné est un objectif stratégique pour la France et l'Union européenne".

Votre rapporteur partage entièrement cet objectif, mais force est de constater que, si les dotations allouées aux Ecoles nationales de la marine marchande, à l'enseignement privé agréé, aux bourses et à la formation continue ont pu être préservées, les crédits consacrés à l'apprentissage diminuent de - 4,2 %.

Il importe pourtant plus que jamais de préserver le vivier des compétences maritimes, gage d'avenir essentiel pour notre flotte de commerce.

3. La rénovation du régime des quirats

Parmi les nombreuses mesures annoncées à l'issue du Comité interministériel de la mer du 27 octobre dernier, figure la mise en place d'une déduction fiscale pour les investissements effectués dans les navires de commerce.

Le système des quirats tel qu'il existe actuellement, ne semble pas très bien fonctionner et sera en tout état de cause fragilisé par l'article 55 du projet de loi de finances pour 1996 qui supprime l'imputation sur le revenu global des déficits relevant de BIC non professionnels.

La nouvelle formule, qui doit encore être acceptée par Bruxelles reste à définir mais pourrait s'inscrire dans le cadre la loi d'orientation fiscale annoncée pour le début de l'année prochaine.

4. Le pavillon-bis des Kerguelen va enfin recevoir la base légale qui lui faisait défaut

Le registre d'immatriculation des Terres Australes et Antarctiques Françaises, dit registre Kerguelen, a été institué par voie réglementaire (décret n° 87 - 190 du 20 mars 1987 et arrêté d'application subséquent). Dans le but de freiner le mouvement continu de dépavillonnement de la flotte de commerce française, ce pavillon-bis assouplit les conditions de nationalité relatives au personnel à bord : outre le capitaine et le second, un quart seulement de l'équipage doit être français. Tout l'intérêt de ce dispositif réside dans les conditions de rémunération et de couverture sociale des navigants étrangers, bien moins coûteuses que celles de leurs homologues français.

Les résultats du pavillon-bis des Kerguelen ont été conformes aux attentes : au 1er juillet 1995, 100 navires étaient immatriculés aux TAAF, soit environ 48 % de la flotte française, et le nombre des navigants s'élevait à 1.555, dont 855 français et 700 étrangers. On peut observer que la proportion des navigants de nationalité française, soit 55 %, est bien supérieure au minimum réglementaire.

Toutefois, ce registre d'immatriculation a été contesté dès son entrée en vigueur par les organisations professionnelles de navigants, qui font valoir notamment qu'un dispositif de nature réglementaire ne peut pas ainsi déroger à la loi. Le 27 octobre dernier, le Conseil d'État leur a donné raison en annulant le décret du 20 mars 1987 et ses arrêtés d'application.

Le pavillon-bis des Kerguelen devrait donc bientôt recevoir une base légale, avec l'adoption de l'article 22 du projet de loi relatif aux transports actuellement en instance devant l'Assemblée nationale après son adoption en première lecture par le Sénat.

Le registre des TAAF doit certes être considéré comme un moindre mal par rapport à la fuite des navires sous des pavillons de complaisance. Mais votre rapporteur estime que l'on ne peut pas pour autant se féliciter d'un tel abaissement des normes sociales en vigueur sur les navires français, imposé par la pression d'une concurrence internationale exacerbée. La légalisation du registre devrait être mise à profit pour fixer des garanties décentes pour les marins étrangers embarqués sous pavillon Kerguelen.

5. La CGM pourrait être privatisée en 1996

La Compagnie générale maritime met en oeuvre depuis 1992 un plan de restructuration énergique pour redresser durablement sa situation financière. Les réductions d'effectifs ont été doublées d'une politique salariale rigoureuse. Les navires de la CGM sont passés sous le pavillon Kerguelen le 12 août 1993. Les actifs non stratégiques ont été cédés. Le réseau des lignes a été recentré autour de trois filiales : CGM Orient, CGM Tour du monde et CGM Sud.

Toutefois, les résultats de la Compagnie tardent à se redresser : en 1994, ses filiales ont été toutes trois déficitaires et son déficit net global s'est établi à - 1 milliard de francs. Le déficit devrait être réduit à -200 millions de francs en 1995 et l'équilibre financier atteint en 1996, année au cours de laquelle la privatisation de la CGM est prévue.

L'ampleur de l'effort de recapitalisation fourni par l'État dans la perspective de la privatisation de la Compagnie mérite d'être soulignée : les dotations en capital de 700 millions de francs en 1994 et de 950 millions de francs en 1995 devraient être complétées en 1996 par une dotation supplémentaire de 1,3 milliards de francs.

Votre rapporteur, à titre personnel, n'est pas favorable à la privatisation de la CGM. En toute hypothèse, pour que sa privatisation s'effectue dans des conditions qui ne lèsent pas l'État, il faut au préalable un rétablissement effectif de son résultat. L'an dernier, à la même époque, le retour à l'équilibre financier de la CGM avait été annoncé pour 1995. Ce qui s'est révélé prématurément optimiste

AVANT-PROPOS

Mesdames. Messieurs.

Votre rapporteur fait partie des nombreux observateurs qui, toutes tendances politiques confondues, ont regretté que la répartition des compétences au sein du gouvernement formé en mai dernier par M. Alain Juppé ne confie le suivi des politiques maritimes dans leur globalité à aucun ministre en particulier. Il se félicite donc que cet oubli soit bientôt réparé.

Une mission a été confiée au mois de juin à M. Bernard Dujardin contrôleur d'État, sur les structures administratives en charge de la mer. Conformément aux conclusions de cette mission de réflexion, un Secrétariat général de la mer placé sous l'autorité du Premier ministre assurera la coordination permanente de la politique maritime de la France.

Outre cette tâche de coordination, le Secrétariat général de la mer assurera la préparation et le suivi des réunions du Comité interministériel de la mer et sera chargé d'une fonction de prospective et d'évaluation de la politique maritime.

Au-delà de cette réforme de structure, il convient d'examiner de quelle façon la priorité nouvellement affirmée en faveur de la politique de la mer peut se concrétiser sur le plan budgétaire. Force est de constater que le budget de la Marine marchande n'échappe pas à la rigueur générale cette année, la plupart de ses dotations pour 1996 étant présentées en baisse ou simplement reconduites à leur niveau de 1995.

Constitué pour près de 80 % par la subvention d'équilibre à l'Établissement National des Invalides de la Marine, ce budget est essentiellement tourné vers le passé, la dégradation du ratio démographique de l'ENIM donnant la mesure du déclin de la flotte de commerce française.

Les allégements de charges sociales, les aides à l'investissement des armateurs sont sans doute utiles et nécessaires, mais ne sauraient suffire. Votre rapporteur estime que l'avenir de notre marine marchande passe plus que jamais par une action globale, dépassant très largement les frontières de notre pays.

Face à la concurrence internationale déloyale dont souffre la flotte de commerce française, notre pays doit poursuivre sans relâche son action au sein de l'Organisation Maritime Internationale afin de faire prévaloir des normes de sécurité des navires et de formation des navigants décentes.

La France doit également poursuivre ses efforts au sein de l'Union européenne pour faire aboutir le projet de registre maritime commun EUROS, actuellement bloqué par une minorité d'États membres.

Seul le succès des ces actions internationales concertées permettrait d'éviter de recourir à un subterfuge tel que le registre bis des Kerguelen, dont notre pays ne saurait s'enorgueillir.

I. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES CRÉDITS

A. LES GRANDES MASSES DU BUDGET DE LA MARINE MARCHANDE

Le budget de la Marine marchande correspond au fascicule IV - Mer du budget de l'aménagement du territoire, de l'équipement et des transports hormis les crédits consacrés aux ports maritimes.

Ainsi définis, les crédits inscrits au budget de la Marine marchande pour 1996 s'élèvent à 5,690 milliards de francs, en diminution de - 0,94 % par rapport à 1995.

Si l'on prend pour base les crédits effectivement disponibles après les annulations résultant de l'arrêté du 28 juin, qui les avaient abaissés à 5,717 milliards de francs, on constate une diminution deux fois moindre, de - 0,48 %.

1. Les dépenses ordinaires

Les dépenses ordinaires diminuent en francs courants de - 0,9 %, pour s'établir à 5,367 milliards de francs. Elles constituent 94,3 % du budget de la marine marchande, dont 84,7 % pour les seules dépenses d'intervention.

Au sein de ces dépenses, les moyens des services (titre III) se montent à 548,7 millions de francs, en augmentation de + 1,5 % par rapport au budget voté de 1995.

Les interventions publiques (titre IV) diminuent de - 1,1 %, pour atteindre 4,819 milliards de francs. Cette baisse modérée contraste avec la forte progression de + 15,3 % enregistrée l'an dernier.

Les efforts d'économie consentis portent principalement sur :

- la suppression de 22 emplois ;

- la réduction des moyens de fonctionnement des services (- 2,7 millions de francs) ;

- la diminution des subventions à la formation professionnelle maritime (- 3 millions de francs) ;

- l'ajustement à la baisse de la subvention d'équilibre à l'ENIM (- 48 millions de francs).

2. Les dépenses en capital

Les dépenses en capital diminuent en crédits de paiement de - 1,8 % pour s'établir à 322,2 millions de francs. En autorisations de programme, elles diminuent de - 2,2 %, pour s'établir à un montant équivalent de 322,5 millions de francs. L'an dernier, elles étaient présentées en progression de + 4,4 % en crédits de paiement et de + 26,3 % en autorisations de programme. Elles constituent seulement 5,7 % du budget de la Marine marchande.

Les efforts d'économie consentis portent principalement sur :

- les investissements exécutés par l'État au titre de l'administration générale (- 1,3 million de francs en crédits de paiement) ;

- la subvention d'équipement à la Société nationale de sauvetage en mer (- 1,6 million de francs) ;

- la dotation au Fonds d'aide à la recherche (- 3 millions de francs).

Il convient toutefois de remarquer que les dépenses en capital s'inscrivent en nette progression par rapport aux crédits effectivement disponibles en 1995 : + 6,3 % en crédits de paiement et + 20 % en autorisations de programme.

En effet, les subventions d'investissement à la flotte de commerce (chapitre 63-35) ont été sensiblement réduites par l'arrêté d'annulation du 28 juin 1995 : - 22,5 millions de francs en crédits de paiement et - 60 millions de francs en autorisations de programme, soit des baisses respectivement de - 10 % et - 25 % par rapport aux dotations initiales.

Pour 1996, elles sont rétablies à leur niveau initial de 1995, soit 220 millions de francs en crédits de paiement et 240 millions de francs en autorisations de programme.

B. LES PRINCIPAUX AGRÉGATS DU BUDGET DE LA MARINE MARCHANDE

Le fascicule IV - Mer du budget de l'Equipement comportait traditionnellement sept actions. La transformation de ces actions en six agrégats a permis d'en rationaliser la présentation.

Les chapitres ne sont plus découpés entre plusieurs actions mais sont, chacun dans leur totalité, intégrés dans un seul agrégat. Ainsi, la principale simplification consiste à concentrer tous les crédits de personnel et de fonctionnement dans l'agrégat 01, qui accueille en outre les crédits consacrés à la recherche scientifique et technique (action 36) et s'intitule désormais "Administration générale et recherche".

L'action 37 "Gens de mer" est scindée en un agrégat 02 "Gens de mer, action sociale et formation maritime" et un agrégat 03 "Établissement national des invalides de marine", qui recouvre la subvention de l'État à l'ENIM. Cette subvention, qui constitue l'essentiel du budget de la marine marchande, se trouve ainsi clairement isolée.

L'action 32 "Polices maritimes et signalisation maritime", diminuée de ses crédits de personnel et de fonctionnement, est transposée sous l'agrégat 04 "Signalisation et surveillance maritime".

Les crédits affectés à la protection et à l'aménagement du littoral (action 33) sont regroupés avec les concours aux ports (action 34) dans l'agrégat 05"Ports maritimes et littoral". Conformément à la définition retenue pour le budget de la Marine marchande, seule la fraction "protection et aménagement du littoral" de cet agrégat est ici présentée, sa fraction "ports maritimes" faisant l'objet d'un rapport distinct.

Enfin, l'action 34 " Flotte de commerce" est transposée à l'identique sous l'agrégat 06 "Flotte de commerce".

1. Administration générale et recherche

Les crédits affectés à l'administration générale et à la recherche représentent 8,8 % du budget de la Marine marchande, en augmentation de + 0,5 % par rapport au budget voté de 1995.

Cette très légère progression, qui correspond d'ailleurs à une baisse de - 1,6 % en francs constants, recouvre des évolutions contrastées :

- une progression de + 2,2 % des rémunérations d'activité (378 millions de francs) ;

- une diminution de - 3,5 % des moyens de fonctionnement des services (74,3 millions de francs) ;

- une baisse plus marquée de - 6,7 % des dépenses d'équipement des services (8,7 millions de francs) ;

- une réduction drastique de - 48,3 % des subventions aux organismes de recherche (3 millions de francs) ;

La progression des dépenses de personnel s'explique d'abord par le fait que le budget de la Marine marchande a été relativement épargné par la réduction des effectifs budgétaires : la stricte application de la norme de réduction de - 1,5 % aurait dû aboutir à la suppression de 45 emplois, mais les suppressions effectives ne portent que sur - 22 emplois (7 en administration centrale, dont 6 à l'ENIM, et 15 en services déconcentrés).

Elle s'explique surtout par les transformations d'emplois intervenant dans le cadre de la réforme du statut des agents de l'État en mer. Ainsi que dans le cadre du protocole Durafour (extension en année pleine de la 6 ème tranche et application de la 7 ème tranche à compter du 1er août 1996).

Il convient enfin de remarquer que la diminution des moyens des services n'est qu'apparente. En effet, elle résulte d'une modification de nomenclature budgétaire qui aboutit au transfert d'une fraction des dépenses de télécommunication du chapitre 34-95 vers le chapitre 35-32, c'est-à-dire vers l'agrégat 04 "Signalisation et surveillance maritimes".

2. Gens de mer

Les crédits consacrés aux gens de mer représentent 3,2 % du budget de la Marine marchande, en diminution de - 2,6 % par rapport au budget voté de 1995. Ils atteignent 180 millions de francs en crédits de paiement et 6 millions de francs en autorisations de programme.

a). Formation professionnelle maritime

Dans le domaine de la formation professionnelle maritime, la plupart des subventions de fonctionnement sont reconduites en 1996 à leur niveau de 1995 : 6 millions de francs pour les Ecoles Nationales de la Marine Marchande ; 4,3 millions de francs pour l'enseignement privé agréé ; 4 millions de francs pour les bourses ; 17,5 millions de francs pour la formation continue maritime. Seuls les crédits consacrés à l'apprentissage, via l'Association pour la Gérance des Écoles de Formation Maritime, diminuent de - 4,2 %, pour s'établir à 68,2 millions de francs.

Les subventions d'équipement progressent en crédits de paiement de + 1,5 %, pour atteindre 6,9 millions de francs, mais diminuent de -7,7 % en autorisations de programme, pour s'établir à 6 millions de francs. Elles sont réparties de façon à peu près égale entre les ENMM (3,2 millions de francs en crédits de paiement) et l'AGEMA (3,7 millions de francs en crédits de paiement)

b). Action sociale

Les crédits inscrits au chapitre 46-37 "Allocations compensatrices" sont maintenus en 1996 à leur niveau de 1995, soit 72 millions de francs. Ils sont destinés à assurer un revenu de remplacement aux marins du commerce et de la pêche licenciés pour raison économique, s'ils sont âgés de plus de 50 ans et réunissent plus de 30 annuités de service.

3. Établissement National des Invalides de la Marine

D'un montant de 4,528 milliards de francs, la subvention d'équilibre de l'État à l'ENIM (chapitre 47-37) représente à elle seule 79,6 % du budget de la Marine marchande. Elle s'inscrit en diminution de - 1 % par rapport à 1995.

Deux facteurs prévisionnels rendent possible cette diminution des concours budgétaires à l'ENIM :

- alors que les dépenses de pensions devraient encore connaître un progression sensible de + 5,9 %, en raison des améliorations des droits intervenus en 1995 (revalorisation des salaires forfaitaires et relèvement à 52 % du taux des pensions de réversion), les dépenses d'assurance maladie devraient continuer à décroître, sur un rythme de - 1 % ;

- surtout, les transferts de compensation en provenance des autres régimes de sécurité sociale devraient rester dynamiques après le relèvement du taux de la surcompensation intervenu en 1993, et progresser de + 8,2 % pour atteindre 2,958 milliards.

En conséquence, la part de la subvention de l'État dans les ressources de l'ENIM devrait diminuer de 51 % en 1995 à 48,7 % en 1996.

4. Signalisation et surveillance maritimes

Les crédits consacrés à la signalisation et la surveillance maritimes représentent 2,2 % du budget de la Marine marchande, en augmentation de + 1,1 % par rapport au budget voté de 1995. Ils atteignent 124,2 millions de francs en crédits de paiement et 63,2 millions de francs en autorisations de programme.

L'augmentation apparente des crédits d'entretien et d'exploitation des services de police et de signalisation maritimes (chapitre 35-32), qui progressent de 6,5 % en 1996 pour atteindre 41,2 millions de francs, résulte de l'affectation directe aux Centres opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) d'une fraction (2,9 millions) des crédits de télécommunication précédemment rattachés au chapitre 34-95. Si l'on fait abstraction de cette modification de nomenclature budgétaire, les crédits du chapitre 35-32 apparaissent en fait simplement maintenus à leur niveau de 1995.

Les crédits d'équipement des services de police et de signalisation maritime (chapitre 53-32) diminuent de - 6,5 % en autorisations de programme, pour s'établir en 1996 à 56,5 millions de francs, mais progressent de 3,1 % en crédits de paiement, pour atteindre 65,8 millions de francs en 1996. Ces crédits permettront :

- de poursuivre la modernisation des CROSS exigée par les engagements internationaux de la France au titre du nouveau Système mondial de détresse et de sécurité en mer ;

- de renforcer les Unités littorales des affaires maritimes (ULAM) parla mise en chantier de 4 nouvelles vedettes côtières destinées à remplacer celles existantes de Saint-Brieuc, Arcachon. Ajaccio et Bastia.

5. Protection et aménagement du littoral

Avec un montant de 12,8 millions en crédits de paiement et de 10,8 millions en autorisations de programme, les crédits consacrés à la protection et à l'aménagement du littoral représentent seulement 0,22 % du budget de la Marine marchande.

Les moyens affectés à la lutte contre la pollution accidentelle du littoral et de la mer sont maintenus en 1996 à leur niveau de 1995, soit 1,8 millions de francs en fonctionnement (chapitre 35-33) et 5 millions de francs en équipement (chapitre 53-30, article 90).

Les moyens affectés aux schémas de mise en valeur de la mer (chapitre 53-30, article 60) diminuent de 10,7 % en crédits de paiement, pour s'établir à 2,5 millions de francs, et d'un tiers en autorisations de programme, pour s'établir à 2 millions de francs. Cette dotation devrait néanmoins être suffisante pour permettre la poursuite des onze schémas déjà lancés.

Les moyens affectés aux opérations de protection du littoral contre l'érosion marine et les effets des tempêtes (chapitre 63-30, article 30), soit 3,5 millions en crédits de paiement et 7 millions en autorisations de programme, bénéficieront notamment à la région Picardie.

6. Flotte de commerce

Les crédits consacrés à la flotte de commerce sont maintenus à leur niveau de 1995 en autorisations de programme, soit 240 millions de francs, et diminuent très légèrement de - 0.6 en crédits de paiement, pour s'établir à 341 millions de francs. Ils représentent 6 % du budget de la Marine marchande, mais 68,3 % de ses dépenses en capital.

Cette légère baisse s'explique par la réduction de 2 millions de francs de la contribution aux charges sociales de la CGM (chapitre 45-35) au titre de l'effort de maîtrise des dépenses de l'État : cette subvention s'établit pour 1996 à 121 millions de francs, en diminution de - 1.6 % par rapport au budget voté de 1995.

En revanche, les subventions à la flotte de commerce sont reconduites à leur niveau de 1995 (chapitre 63-35), soit 220 millions en crédits de paiement 240 millions en autorisations de programme. Il convient toutefois de rappeler que ces crédits, destinés à financer les aides à l'investissement et les aides à la consolidation et la modernisation, ont été réduits de 22,5 millions en crédits de paiement et de 60 millions en autorisations de programme par l'arrêté d'annulation du 28 juin 1995

A l'issue du Comité interministériel de la mer du 26 octobre 1996 le Gouvernement a rendu publiques deux mesures d'amélioration du dispositif d'aide aux armateurs :

- le champ de la prime d'équipement sera étendu aux navires d'occasion de 10 à 15 ans d'âge, sous réserve d'un contrôle technique qui permettra d'établir que leur durée de vie prévisible justifie l'aide ;

- le taux maximum d'aide à l'investissement sera porté de 10 à 15 %pour les opérations d'un montant inférieur à 80 millions de francs, et de 10 à 12,5 % pour les opérations d'un montant compris entre 80 et 120 millions de francs. En effet, le surcoût d'exploitation lié au pavillon français est proportionnellement plus élevé pour les petits navires.

C. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En seconde délibération, sur proposition du Gouvernement. L'Assemblée nationale a voté les minorations de crédits suivantes :

Titre III : - 1,995 millions de francs

Chapitre 34-95 "Dépenses d'informatique et de télématique" :

- 0,271 million de francs

Chapitre 34-95 "Dépenses d'informatique et de télématique" :

- 0,271 million de francs

Chapitre 34-97 "Centres de responsabilité - Matériel et fonctionnement" :

0,579 million de francs

Chapitre 35-32 "Polices maritimes et signalisation maritime - Entretien et exploitation :

- 0,823 million de francs

Chapitre 35-33 "Protection et aménagement du littoral - Entretien et exploitation" :

Chapitre 37-32 "Signalisation maritime - Service technique de la navigation maritime et des transmissions de l'équipement"

- 0,036 million de francs

- 0,150 million de francs

Titre IV : - 0,117 million de francs

Chapitre 41-10 "Actions de promotion dans le domaine maritime" :

- 0,024 million de francs

Chapitre 46-32 "Polices maritimes - Subventions" :

- 0,093 million de francs

Également en seconde délibération, sur proposition du gouvernement et conformément au souhait exprimé par sa commission des finances, l'Assemblée nationale a majoré de 1 million de francs le chapitre 46-32, article 20 "Société nationale de sauvetage en mer".

Au total, les crédits du budget de la Marine marchande ont été minorés de -2,112 millions de francs et majorés de 1 millions de francs par rapport au projet de loi de finances, soit un solde négatif de - 1,112 millions de francs.

II. LA SITUATION DE L'ENIM

Alors que le gouvernement vient d'annoncer, dans le cadre de son plan de réforme de la sécurité sociale, une redéfinition des conditions d'équilibre des régimes spéciaux, il est intéressant d'examiner les perspectives de l'Etablissement National des Invalides de la Marine, régime de sécurité sociale des gens de mer.

A. UN RAPPORT DÉMOGRAPHIQUE DÉGRADÉ

L'ENIM est un établissement public à caractère administratif doté de la personnalité civile et de l'autonomie financière. Il couvre, à l'égard des marins professionnels du commerce, des pêches maritimes et de la plaisance, ainsi que des ayants droit de ces marins, les risques : accidents du travail, maladie, maternité, invalidité, vieillesse et décès. Les agents du régime sont au nombre d'environ 700.

L'ENIM administre deux caisses qui n'ont aucune autonomie financière ou administrative, ni localisation géographique, les tâches étant effectuées soit dans des quartiers d'affaires maritimes, soit dans des centres spécialisés à Paris ou en province :

- la Caisse de Retraite des marins (CRM), chargée du service des pensions et autres avantages de vieillesse ;

- la Caisse Générale de Prévoyance (CGP), qui gère tous les autres risques de prévoyance sociale, selon les modalités adaptées à la profession ; accidents du travail, maladie, maternité, invalidité, décès, pertes d'effets maritimes en cas d'avarie ou de naufrage.

Les accidents du travail et l'invalidité peuvent entraîner l'attribution de rentes, liquidées et servies par la CGP au marin ou à ses ayants droit, par concession ou par réversion.

L'ENIM n'assure pas cependant le versement des prestations familiales qui incombent à deux caisses : la Caisse nationale d'allocations familiales des marins du commerce et la Caisse nationale d'allocations familiales de la pêche maritime.

L'ENIM est un régime de protection sociale structurellement déséquilibré en raison d'un rapport démographique défavorable, qui tend encore à se dégrader comme le montre le tableau ci-dessous :

Effectifs couverts par l'ENIM

* Actifs pensionnés et avants droits

** Estimations

B. LES PRÉVISIONS FINANCIÈRES POUR 1996

Le budget prévisionnel de l'ENIM pour 1996 s'appuie sur les hypothèses économiques et sociales fixées par le gouvernement, appliquées aux crédits inscrits au budget primitif pour l'exercice 1995. Toutefois, ces hypothèses sont encore susceptibles de variations jusqu'à l'arrêt du document budgétaire définitif soumis à l'avis du conseil supérieur de l'Établissement.

Au total, le volume budgétaire augmenterait en 1996 de + 3,43 % par rapport au budget primitif 1995, en dépenses comme en recettes, pour atteindre 9,285 milliards de francs

PROJET DE BUDGET DE L'ENIM POUR 1996

1. L'évaluation des dépenses

a). Les prévisions de dépenses de pensions sont fondées sur les éléments suivants :

- en ce qui concerne la Caisse de Retraite des Marins, les charges ont été évaluées sur la base d'une augmentation de + 5.89 %. taux résultant notamment de l'évolution des salaires forfaitaires estimée à + 2.45 % de la croissance du nombre des pensionnés (+ 1.75 %) conjuguée avec le glissement vieillesse technicité ou GVT  (+0.5  %)

- en ce qui concerne la Caisse Générale de Prévoyance, l'incidence de l'évolution des salaires forfaitaires et du nombre de prestataires conduit à une évolution des dépenses de pensions maladie/invalidité de - 1.02 %.

b). Pour les prestations maladie servies par la CGP, les tendances générales observées et prévues en matière d'assurance maladie ainsi que les paramètres propres au régime ont conduit à une évaluation des dépenses en baisse de 1,4 %.

c). Les dépenses d'action sanitaire et sociale ont été abondées de + 2,17% pour permettre aux actions engagées de se poursuivre dans de bonnes conditions ;

d). Au titre des frais d'exploitation, les prévisions sont fondées sur les éléments suivants :

- en ce qui concerne les frais de personnel, la fin des opérations de délocalisation de deux services en province, et de reclassement des agents restés à Paris, permettra de diminuer sensiblement la dotation budgétaire effective. ;

- les crédits de fonctionnement informatique, quant à eux, devraient être stabilisés à 14,5 millions de francs correspondant à la poursuite de la mise en oeuvre du schéma directeur de l'informatique de l'ENIM ;

- les autres frais de fonctionnement non informatique sont estimés sur la base d'une légère baisse de 1,68 % liée notamment à la fin des opérations de délocalisation.

e). enfin, les dépenses exceptionnelles (remises de dette et admission en non-valeur) se stabilisent à hauteur de 15,7 millions de francs pour permettre de répondre, dans le cadre de la réglementation applicable, aux difficultés de paiement des entreprises, notamment dans le secteur de la pêche maritime.

2. L'évaluation des recettes

a). Les recettes propres

En ce qui concerne les cotisations des marins et les contributions des armateurs, l'ensemble des paramètres pris en compte pour leur évolution conduite à une augmentation en volume de 8,26 %

b). Les transferts de compensation

En 1996, si les mêmes modalités de calcul que celles retenues en 1995 produisent leur effet, l'ENIM devrait recevoir 2,958 milliards de francs au titre de la compensation généralisée et de la compensation spécifique entre régimes spéciaux, y compris les régularisations sur exercices antérieurs.

La compensation bilatérale avec la Caisse Nationale de l'Assurance Maladie des Travailleurs Salariés s'établirait, elle, à 568 millions de francs

c). La subvention d'équilibre

Compte tenu de produits atteignant 4,757 milliards de francs et de charges s'élevant à 9,285 milliards de francs, la subvention de l'État destinée à équilibrer le budget primitif pour 1996 s'établit à 4,528 milliards de francs, soit une diminution de - 1,04 % par rapport à celle de 1995 (dotation initiale).

L'incidence sur le budget de l'ENIM des mesures d'exonération de cotisations sociales décidées depuis 1993

En 1993, deux mesures ont été décidées en faveur de la flotte de commerce

- l'extension de 35 à 70 % de la fraction de l'équipage total pouvant bénéficier du taux de contribution armatoriale réduit à 11,6 %. pour les navires des lignes régulières internationales de fret immatriculés au registre "Kerguelen" ;

- l'allégement à 17.6 % au 1er janvier 1994 de la contribution armatoriale pour les navires à passagers et de charge effectuant des liaisons internationales ou transocéaniques.

Ces deux mesures ont représenté une perte de recettes de 127 millions de francs pour l'ENIM, compensée par une dotation supplémentaire comprise dans la subvention de l'État inscrite au budget initial 1994.

En 1994, la contribution armatoriale a été ramenée à 17,6 % au 1er mars, pour les navires de pêche autres que ceux du secteur artisanal bénéficiant déjà de taux inférieurs. Par ailleurs, pendant cinq mois, le taux de cotisation des marins à la pêche a été abaissé de moitié et une dotation d'aide d'urgence aux familles a été versée. Le coût de ces mesures en 1994, 217,5 millions de francs, a été compensé par une dotation complémentaire en cours d'année.

Les nouveaux taux de contribution armatoriale étant encore actuellement en vigueur, le coût de ces allègements est pris en compte dans le calcul de la subvention d'équilibre de 1995 et 1996

C. UN FINANCEMENT BUDGÉTAIRE PRÉPONDÉRANT

Le tableau ci-dessous récapitule pour la période 1992-1996 les parts relatives de chacune des trois grandes catégories de recettes de l'ENIM :

Il montre :

- la lente dégradation des cotisations de l'ENIM, qui suit la baisse du nombre des actifs cotisants et l'accroissement des exonérations :

- la stabilisation, après une forte progression en 1992 puis 1993. des compensations inter régimes, qui tiennent compte des facteurs démographiques et des capacités contributives (masses salariales) des régimes ; certaines évolutions, d'une année sur l'autre, résultent de régularisation d'exercices antérieurs. De plus, il est à noter que depuis l'exercice 1993, de nouvelles modalités de calcul de la surcompensation entre régimes spéciaux ont entraîné une forte augmentation des acomptes au titre de ce type de compensation ;

- l'évolution corrélative de la subvention de l'État, dont le niveau résulte du croisement des deux catégories de ressources précédentes.

III. LE DIFFICILE REDRESSEMENT FINANCIER DE LA COMPAGNIE GÉNÉRALE MARITIME

La Compagnie Générale Maritime poursuit depuis novembre 1992 la réalisation du plan de restructuration qu'elle a adopté pour redresser durablement sa situation financière.

Trois idées principales ont alors prévalu pour définir la nouvelle stratégie de l'armement. Il était nécessaire de recentrer rapidement l'activité de la société sur son métier traditionnel d'armateur de lignes régulières. De nouvelles conditions de travail tant à bord des navires que parmi les services à terre devaient être élaborées en concertation avec les partenaires sociaux. La création de filiales par lignes ou par agences devait dynamiser les activités les plus importantes du groupe et responsabiliser les agents.

Dans le cadre, par le biais d'allégements successifs de services, d'importantes réductions d'effectifs et de fermeture progressive de ses secteurs d'exploitation les plus lourdement déficitaires, la compagnie est parvenue à rationaliser ses structures et à recentrer son réseau sur les liaisons sur lesquelles elle est traditionnellement bien implantée.

En contrepartie de ces efforts, l'État, qui reste décidé à soutenir la société, a joué son rôle d'actionnaire principal en procédant progressivement à sa recapitalisation.

Dans ces conditions, malgré un environnement économique et maritime qui reste très difficile, la société, dorénavant mobilisée autour d'une stratégie claire, semble désormais en mesure de rétablir l'équilibre de son compte d'exploitation, élément essentiel de la réalisation effective de sa privatisation.

A. LA RATIONALISATION DES STRUCTURES

La compagnie est progressivement parvenue à rationaliser ses structures en se désengageant de secteurs non stratégiques et en négociant de nouvelles conditions de travail avec ses partenaires sociaux.

1. Les cessions d'actifs non stratégiques

Un programme de cessions d'actifs portant à la fois sur le matériel pour l'essentiel non directement lié à l'activité commerciale de l'entreprise, l'équipement naval (navires et conteneurs), le parc immobilier et les participations dans les sociétés ne revêtant pas une importance stratégique pour la CGM, a été engagé.

En contrepartie de ces cessions d'actifs et constatant la réalisation effective des mesures de restructuration engagées par la Compagnie, l'État, soucieux de jouer son rôle d'actionnaire principal, lui a versé une première dotation en capital de 700 millions de francs

Cette première dotation a été complétée en début d'année 1995 par une nouvelle dotation de 950 millions de francs

2. Les nouvelles conditions de travail

Cette action a concerné les personnels navigants et les personnels sédentaires.

En ce qui concerne le personnel sédentaire, faisant suite au plan social engagé dès l'été 1992 qui a abouti à 460 suppressions d'emplois, un plan complémentaire a été adopté en juillet 1993 portant sur 140 nouvelles suppressions d'emploi. Parallèlement, une centaine de transferts d'emplois dans des entreprises extérieures, à l'occasion d'externalisation de certains services de la CGM, a pu être réalisée.

Un plan social complémentaire a été négocié dès que la décision du retrait des lignes d'Extrême Orient a été prise. Il prévoit le départ de plus de 400 collaborateurs, y compris le personnel étranger.

La création de sept filiales, regroupant les services de lignes et les agences le 1er mai 1993, s'est accompagnée de la transformation du statut des personnels sédentaires de la Compagnie. Dorénavant, au lieu d'être soumis à un statut proche de celui de la fonction publique, ces agents sont soumis aux conventions collectives de branche qui s'appliquent dans ce secteur. Cette évolution a permis d'introduire une plus grande souplesse dans la gestion de ces personnels.

Ces mesures s'accompagnent d'une politique salariale très rigoureuse. Depuis 1992, en raison des difficultés que connaît l'entreprise, les augmentations salariales appliquées ne sont plus que celles qui résultent de l'application des accords conclus antérieurement et de la transposition des accords de branche signés par le Comité Central des Armateurs de France.

En ce qui concerne le personnel navigant, afin de réduire ses coûts d'armement tout en bénéficiant des nouvelles dispositions lui permettant d'alléger ses charges sociales, la Compagnie a été amenée à immatriculer le 12 août 1993 ses navires sur le registre d'immatriculation du territoire des Terres Australes et Antarctiques Françaises, dès lors que ce registre devenait accessible aux navires de lignes régulières.

La CGM a également signé avec les organisations syndicales, le 30 décembre 1993 un accord qui pour une durée de trois ans fixe la composition de la flotte et le nouveau régime d'armement des navires. Celui-ci prévoit notamment le rapatriement à bord des tâches d'entretien désormais confiées à des équipes de renfort jusqu'en 1996, avec une stabilisation de la flotte au niveau de 16 unités. Cette action permet de dégager une économie annuelle de 50 millions de francs

Le nombre de navigants qui s'élevait à 1.073 au début de l'année 1993 se stabilisera au niveau de 620 (dont 240 officiers et 380 marins).

Cette réduction de l'emploi provoquera une réduction sensible de la masse salariale correspondante qui, de 365 millions de francs en 1991, se stabilise à 250 millions de francs en 1994.

B. LA RÉDUCTION DU RÉSEAU

Le réseau des lignes desservies par la Compagnie Générale Maritime couvrait, jusqu'en 1992, l'ensemble de la planète. Né de la fusion du réseau de la Compagnie Générale Transatlantique et de celui de la Compagnie des Messageries Maritimes, il permettait de relier les ports français de métropole à l'ensemble des autres ports du monde.

Devant les difficultés successives apparues dans certains secteurs, la Compagnie a progressivement cessé de desservir ses lignes les plus déficitaires et sur lesquelles, face à une concurrence exacerbée, elle souffrait d'un handicapé lié à sa taille relativement petite. C'est ainsi que la Compagnie a été amenée à abandonner la desserte de l'Amérique du Nord en 1992, puis celle de l'Extrême-Orient en 1994.

Désormais, le faisceau de lignes desservies par la CGM regroupe essentiellement des lignes Nord-Sud dont le point fort demeure la desserte des départements et territoires d'outre-mer. Il est organisé en trois filiales :


CGM ORIENT

Réalisant un chiffre d'affaires de 1.148 millions de francs en 1994, cette filiale a dégagé un résultat net négatif de près de 200 millions de francs, confirmant ainsi la poursuite de la dégradation de sa situation.

La baisse des taux de fret à l'import d'Europe, accentuée par la faiblesse des exportations japonaises et la faiblesse du dollar face au franc, s'est poursuivie. La recette moyenne en Francs a accusé une baisse de 25 % au cours de l'année 1994.

Devant cette chute des frets et le risque d'une amplification de la détérioration des résultats liée à l'accroissement du nombre des services, le retrait de la participation de CGM Orient au service commun TSA dans lequel elle était associée à l'armement hollandais Nedlloyd et à l'armement de Malaisie MISC, est intervenu en nombre 1994. Cette décision achève le retrait de la CGM des lignes EST-OUEST initiée en 1992 avec la sortie des trafics Transatlantiques.


• CGM TOUR DU MONDE

Réalisant un chiffre d'affaire de 643 millions de francs, cette filiale dégage un résultat net négatif de 45 millions de francs

Le service CGM Tour du Monde offre, au départ d'Europe du Nord (Anvers, Hambourg, Dunkerque, Le Havre) et de la Méditerranée (Marseille, Gènes et Algésiras) un départ mensuel à destination des États-Unis (Savannah), des îles du Pacifique (Tahiti, Nouméa), de l'Australie (Melbourne, Sydney, Brisbane), de la Papouasie-Nouvelle Guinée (Laè), de l'Indonésie (Djakarta) et du sous-continent indien (Colombo)

La part de marché de la Compagnie représente sur le secteur Sud Pacifique 35 %, mais sa situation reste toutefois fragile. Une part importante des volumes transportés est en effet étroitement dépendante de la situation économique des territoires de la zone du Pacifique Sud. Or, tant en Nouvelle Calédonie qu'en Polynésie, les importations et les exportations se situent actuellement à un niveau relativement faible.

Le programme des escales est en outre régulièrement perturbé par la situation politique dans la région. Les grèves à répétition dont est, depuis la fin du mois de juillet, victimes les navires de la CGM dans les ports australiens, constituent en outre un facteur conjoncturel de dégradation de la situation de la CGM Tour du Monde.


CGM SUD

Réalisant un chiffre d'affaires de 2.299 millions de francs, CGM Sud dégage en 1994 un résultat net négatif de 98 millions de francs. Cette situation traduit la fragilité des positions que la compagnie occupe dans les dessertes des départements d'Outre Mer, de l'Afrique de l'Est et de l'Amérique Latine.

En 1994, la forte augmentation de capacités offertes sur les Antilles françaises par Marfret, Geest et Caribtainer a entraîné une chute des volumes. Pour contrecarrer cette tendance, des concessions tarifaires nécessaires au maintien des parts de marché de la Compagnie sur les Antilles françaises ont gravement détérioré la rentabilité de ces lignes.

Toutefois, un effort d'accroissement de la qualité des services, associé aux investissements réalisés dans les deux sites antillais de pré réfrigération de conteneurs isothermes et, au Havre, dans une chaîne de palettisation, a permis le renouvellement du contrat de transport des bananes antillaises vers l'Europe pour une durée de 4 ans. A l'aller, vers les Antilles, ces efforts, associés à la baisse des tarifs, ont permis à la Compagnie de récupérer progressivement des volumes puis des parts de marché.

C. UN RÉSULTAT EN AMÉLIORATION MAIS ENCORE NÉGATIF

En 1994, le déficit net de la CGM (résultat consolidé part du Groupe) est de - 1.006.7 millions de francs.

Il se décompose de la façon suivante :

- Résultat courant - 505,7 MF

- Résultat exceptionnel - 501 MF

Le résultat courant, quoique décevant et très en retrait par rapport aux prévisions, est cependant en amélioration de près de 92 millions de francs par rapport à celui arrêté en 1993.

Le résultat exceptionnel comprend, outre les provisions destinées à couvrir les dépenses de restructuration et de plans sociaux à venir, une provision complémentaire de 68 millions de francs pour couvrir la dépréciation sur le marché immobilier de l'immeuble du siège social.

L'ensemble des mesures mises en oeuvre commence à donner des résultats tangibles et les prévisions faites par la société pour 1995 font état d'un résultat net négatif ramené à 200 millions de francs. La CGM devrait pouvoir atteindre l'équilibre financier en 1996, année au cours de laquelle sa privatisation est prévue.

Cette procédure, engagée par un décret de juillet 1995, se déroulera en informant étroitement les partenaires sociaux de la compagnie. Le gouvernement estime qu'elle devrait permettre à la CGM de bénéficier à l'avenir du concours d'un actionnariat dont la structure et le rôle sera comparable à ceux des armements concurrents présents sur les mêmes marchés.

IV. LE REGISTRE DES TERRES AUSTRALES ET ANTARCTIQUES FRANÇAISES

A. LA LÉGALISATION DU REGISTRE DES KERGUELEN

1. Une réponse à la concurrence internationale

Sous la pression de la concurrence internationale, les armateurs français ont été poussés depuis vingt ans à immatriculer leurs navires sous des pavillons étrangers plus économiques que le pavillon français.

Afin de lutter contre cette fuite des navires français vers des pavillons dits de complaisance tels que ceux des Bahamas, de Vanuatu, du Libéria ou de Saint-Vincent, qui offrent des conditions d'exploitation très favorables, mais aussi afin de pouvoir conserver, pour des raisons de défense nationale, sous notre pavillon une flotte commerciale suffisante pour assurer, le cas échéant, par voie de réquisition les approvisionnements lointains en cas de crise ou de guerre, les pouvoirs publics ont cherché à définir un cadre juridique permettant de trouver, sous pavillon français, des conditions économiques d'exploitation plus proches de celles en cours sur le marché international.

La France a donc dû se résoudre à imiter ses voisins européens pour conserver sa flotte de commerce : en Allemagne, une loi du 23 mars 1989 a institué un "registre bis" qui autorise l'embarquement de marins étrangers dont les contrats sont régis par leur loi d'origine, l'Espagne a ouvert par une loi du 24 novembre 1992 un registre dans les îles Canaries qui sont dotées de l'autonomie administrative, l'Angleterre dispose d'un régime de libre immatriculation à l'île de Man.

Ainsi, un décret n° 87-190 du 20 mars 1987 a ouvert un registre d'immatriculation aux Terres Australes et Antarctique Françaises. En permettant de rattacher les navires à un lointain Territoire où le code du travail maritime ne s'applique pas et où les marins de nationalité étrangère ne bénéficient pour leur protection sociale que d'un régime d'affiliation volontaire, les armateurs pouvaient ainsi embarquer sur leurs bâtiments jusqu'à 75 % de marins étrangers, de préférence à des marins français, pour des charges salariales sensiblement réduites.

2. Des résultats conformes aux objectifs

Ce "registre Kerguelen" a connu un incontestable succès. Si à partir de l'année 1988, de nombreux navires français ont changé leur immatriculation métropolitaine pour celle des TAAF, ce mouvement s'est encore accru dans un premier temps, avec l'extension en 1992 du bénéfice du registre Kerguelen aux navires transporteurs du pétrole brut et, dans un deuxième temps, avec l'assouplissement en 1993 de la périodicité des "touchées" des navires dans les Terres Australes puisqu'il suffit désormais aux navires de ne pas effectuer de touchée exclusive dans un port de la métropole.

La flotte de commerce sous contrôle français

Ce tableau montre que les navires immatriculés dans les TAAF représentent 39,6 % de l'ensemble des navires sous pavillon français en nombre, mais 73,2 % en tonnage.

Au total, la flotte de commerce sous contrôle français se répartit ainsi : 40,7 % de navires immatriculés en métropole, 26,7 % de navires immatriculés aux TAAF, et 32,6 % des navires sous pavillon étranger.

Il est intéressant d'examiner plus finement l'évolution du nombre des navires immatriculés dans les Terres Australes et Antarctiques Françaises depuis 1987, en distinguant les navires passés de l'immatriculation métropolitaine à l'immatriculation TAAF de ceux qui ont été francisés et directement immatriculés dans les TAAF.

On observe ainsi qu'au cours des années 1988 à 1990, la proportion de navires d'origine métropolitaine était supérieure aux navires directement immatriculés TAAF, mais qu'en 1991, la tendance s'est inversée pour atteindre la proportion de 2/3, puis en 1994 est passée à 5/4 (5 navires d'origine métropolitaine pour 4 navires à immatriculation directe TAAF), mouvement expliqué par l'intégration de la flotte CGM et des navires pétroliers sous le régime TAAF.

En 1995 les navires des deux origines métropolitaine et immatriculation TAAF directe ont tendance à s'équilibrer, le tonnage des premiers étant toutefois double de celui des autres.

En termes d'emplois des marins français, l'institution du registre Kerguelen n'a pas été aussi néfaste qu'on aurait pu le craindre.

Le nombre d'emplois correspondants est passé de 268 (dont 104 français) au 1er mai 1988 à 1555 (dont 855 français) au 1er juillet 1995, avec une pointe à 1.580 (dont 885 français) au 1er janvier 1994, après l'intégration de 19 navires de la CGM en décembre 1993, qui étaient armés avec des équipages en totalité français.

La légère baisse du nombre d'emplois depuis le 1er janvier 1994 est imputable au remplacement progressif des personnels d'exécution français (départs en retraite ou anticipés) par des personnels étrangers, ainsi qu'au remplacement de navires anciens par des unités plus récentes, de tonnage souvent plus modeste et nécessitant une main d'oeuvre restreinte. Néanmoins, la tendance à l'accroissement de la flotte, et par voie de conséquence, à la création d'emplois, qui s'est dessinée au cours des six premiers mois de l'année devrait être confirmée fin 1995.

On constate surtout que la proportion effective de navigants français, soit 55 %, est bien supérieure au minimum réglementaire de 25 %.

3. Une absence de base légale

Depuis son ouverture en 1987, le registre des TAAF était contesté par les organisations professionnelles de navigants. Sur la forme, celles-ci considèrent qu'un simple décret ne pouvait pas ainsi créer un registre d'immatriculation dérogeant aux obligations du pavillon français. Sur le fond, elles estiment qu'un tel "pavillon-bis" est contraire tant aux principes constitutionnels qu'aux engagements internationaux de la France, dans la mesure où il n'offre aucune garantie sociale aux navigants étrangers qui en relèvent et les place dans une situation très défavorable par rapport à leurs homologues français.

Après bientôt neuf ans de procédure, le Conseil d'État a finalement donné raison à l'Union Maritime CFDT et à la Fédération Nationale des Syndicats Maritimes, qui avaient introduit deux recours parallèles.

Considérant que le décret attaqué " a entendu en réalité modifier les champs d'application respectifs du code du travail maritime et du Code du travail de l'outre-mer" et "que cette mesure, en vertu des articles 34, 37 et 74 de la Constitution, ne pouvait légalement être édictée par décret", le Conseil d'État a annulé le décret du 20 mars 1987 ainsi que tous ses arrêtés et circulaires d'application.

Le Conseil d'État ne s'est donc expressément prononcé que sur la forme. Mais votre rapporteur estime que sa décision constitue une invite au législateur à intervenir pour fixer les normes sociales qui doit être appliquées sur les navires immatriculés. Il souhaite que cela puisse être fait à l'occasion du vote de l'article 22 du projet de loi relatif aux transports, actuellement en instance devant l'Assemblée nationale, qui doit enfin donner au registre Kerguelen la base légale qui lui faisait défaut depuis sa création.

B. L'INSTITUTION D'UN REGISTRE EUROPÉEN EST PLUS QUE JAMAIS NÉCESSAIRE

1. La fixation de normes de sécurité minimales ne saurait suffire.

Face à la crise très grave qui affecte les flottes européennes depuis les années 1970 et aux risques qu'elle comporte en termes de cohésion économique et sociale, la Communauté cherche à développer une politique commune des transports maritimes.

La seule avancée récente dans ce domaine est l'adoption et le renforcement de mesures liées à la sécurité maritime. Ces mesures concernent les sociétés de classification habilitées à effectuer l'inspection et la visite des navires, ainsi que le niveau minimal de formation des professionnels maritimes.

Lors du Conseil des Ministres des 13-14 mars 1995, les quinze ont décidé, dans le cadre d'un programme général de renforcement de la sécurité des transports maritimes de passagers, de rendre obligatoire de façon anticipée, pour tous les ferries assurant des services réguliers entre les ports européens, le code ISM (International Safety Management Code) dont l'objet est d'établir une norme internationale pour la gestion de la sécurité.

Votre rapporteur, toujours attentif aux questions de sécurité maritime, approuve ces mesures récentes. Mais il estime qu'elles ne touchent pas au fond du problème et souhaite que le projet de registre communautaire puisse se concrétiser au plus vite.

2. Le projet de registre communautaire est en panne.

Ce registre communautaire, nommé "EUROS", aurait vocation à accueillir des navires battant pavillon d'un État membre sous certaines conditions et pourrait bénéficier de certains avantages.

Les débats ont jusqu'à présent porté sur la proportion de ressortissants de l'Union nécessaire à l'armement du navire et sur l'aide financière que les États pourraient apporter à ces navires, soit au titre de leur politique générale d'aide, soit en fonction d'exigences supplémentaires en ce qui concerne la nationalité des équipages.

La France a, dès l'origine du débat, été favorable à des actions communautaires en faveur des navires de l'Union et du savoir-faire maritime communautaire. Le renforcement de l'identité maritime communautaire à l'égard des pays tiers, tout comme une plus grande harmonisation des conditions d'exploitation des flottes des États membres constituent en effet des objectifs à long terme qui doivent conduire chacun des membres à développer une approche constructive.

De son côté, la Commission a entrepris d'enrichir son projet initial en suggérant que les conditions d'armement des navires soient adaptées aux différents marchés et en apportant d'utiles précisions sur ses intentions en matière d'aides publiques. Mais les États membres qui sont, dans l'ensemble, favorables à l'adoption de mesures positives pour les registres communautaires, n'ont pu à ce jour aboutir à un consensus sur ce projet de règlement.

Votre rapporteur regrette que la prise de conscience de l'affaiblissement maritime de l'Europe soit si lente à se faire.

La présidence française de l'Union a contribué à faire émerger cette prise de conscience. Dans sa communication sur la politique maritime européenne, soumise aux Conseils des ministres des transports de janvier et mars 1995, la France a proposé de relancer l'action communautaire. Tirant un bilan inquiétant des quinze dernières années, elle a suggéré une attitude plus offensive de l'Union dans les enceintes internationales, proposé des positions strictes à l'égard des navires sous normes et des registres fantômes, et demandé l'instauration d'un code de bonne conduite entre les armateurs européens pour le transport de passagers.

Les débats qui se sont instaurés sur la base de ces propositions ont permis aux États membres, à l'exception de trois d'entre eux (Grèce, Grande-Bretagne, Danemark), d'accorder globalement leurs vues à celle de la France, et de constater qu'une majorité forte existait en faveur d'une relance de la politique maritime communautaire, même si une minorité ultra libérale s'opposait farouchement à toute initiative en ce domaine, notamment pour tout ce qui touche à l'aspect social du secteur.

Ce débat a clarifié les positions et a montré l'étendue des différences de positions entre les États-membres : le risque subsiste donc aujourd'hui que la politique maritime de l'union se limite à un renforcement de la sécurité maritime et à la mise en oeuvre des principes de la concurrence dans ce secteur.

V. LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT ET DE PROTECTION DU LITTORAL

La politique d'aménagement et de protection du littoral n'absorbe qu'une part infime du budget de la Marine Marchande : 13 millions de francs en crédits de paiement et 11 millions de francs en autorisations de programme. Il s'agit toutefois d'une action chère à votre rapporteur qui a souhaité cette année y consacrer quelques développements.

A. L'AMÉLIORATION DE LA CONNAISSANCE ET DE L'UTILISATION DE L'ESPACE LITTORAL

Elle se fait par la mise en oeuvre des schémas de mise en valeur de la mer institués par l'article 57 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 (article complété par l'article 18 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 dite loi "littoral"). Ces schémas de mise en valeur de la mer, élaborés par l'État avec la participation des collectivités locales, doivent définir les grandes orientations de zones littorales présentant une unité géographique et maritime au sein desquelles il convient d'organiser dans l'espace une pluralité d'activités concurrentes ou complémentaires. Ils sont opposables aux documents d'urbanisme.

Onze schémas de mise en valeur de la mer ont été lancés à ce jour :

- Pointe du Raz à l'Odet (Finistère) en 1988 ;

- Baie de Bourgneuf (Loire-Atlantique et Vendée) en 1988 ;

- Etang de Thau et sa façade maritime (Hérault) en 1988 ;

- Baie de Lannion (Côtes d'Armor) en 1989 ;

- Golfe de Saint-Tropez (Var) en 1990 ;

- Littoral charentais (Charente-Maritime) en 1990 ;

- Camargue (Bouches du Rhône) en 1990 ;

- Secteur de Trégor-Goëlo (Côtes-d'Armor) en 1993 ;

- Baie de Saint-Brieuc (Côtes d'Armor), en 1993 ;

- Rade de Lorient (Morbihan) en 1993 ;

- Bassin d'Arcachon (Gironde en 1993)

Une demande forte s'est exprimée pour d'autres schémas :

- Étang de Berre ;

- Littoral du Pas de Calais ;

- Côtes Nord du Finistère ;

- Baie du Mont-Saint-Michel (ou tout au moins sa partie Ouest : baie de Cancale).

Le coût unitaire moyen d'un schéma de mise en valeur de la mer est de l'ordre de 2 millions de francs et la participation financière sollicitée des collectivités territoriales est en général d'un tiers.

C'est sur cette base qu'ont été financés les premiers schémas de mise en valeur de la mer, sauf dans les régions Languedoc-Roussillon et Provence-Alpes-Côte d'Azur où l'État et la région se sont engagés à financer à parts égales les schémas de mise en valeur de la mer (les schémas de Thau, de Saint-Tropez et de la Camargue ont été lancés sur cette base).

De plus, les schémas d'aménagement régionaux (SAR) de la Corse et des départements d'outre-mer en cours d'élaboration comportent un chapitre individualisé valant schéma de mise en valeur de la mer.

Le premier schéma de mise en valeur de la mer, celui du Bassin de Thau, a été approuvé le 20 avril 1995. Quatre autres schémas sont proches d'aboutir : la Baie de Bourgneuf, la Baie de Lannion, la Pointe du Raz à l'Odet et le Littoral Charentais, confirmant ainsi que les schémas de mise en valeur de la mer peuvent être des instruments efficaces de dialogue local.

La phase de montée en régime des schémas de mise en valeur de la mer s'est accompagnée, ces dernières années, d'une adaptation progressive de leur dotation en autorisations de programme. L'objectif pour 1996 est la poursuite de cet effort en maintenant le rythme de deux nouveaux schémas de mise en valeur de la mer par an.

Votre rapporteur relève la lenteur du processus d'élaboration des schémas de mise en valeur de la mer et estime que la modestie des moyens qui y sont consacrés n'y est pas étrangère : 2,5 millions de francs en crédits de paiement et 2 millions de francs en autorisations de programmes seulement sont prévus à ce titre pour 1996.

B. LES ACTIONS DE PROTECTION DU LITTORAL CONTRE LES PHÉNOMÈNES NATURELS OU ACCIDENTELS

1. Les travaux de défense contre les eaux de la mer

Le ministère de l'Aménagement du Territoire, de l'Équipement et des Transports, compétent pour les aides aux travaux de défense des lieux habités, intervenait par le passé sous forme de subventions d'investissement aux collectivités locales et aux associations syndicales de propriétaires des terrains protégés.

L'État a engagé une réflexion approfondie sur l'évolution de sa politique dans ce domaine. A la suite des travaux d'un groupe de travail interministériel placé sous l'égide du Conseil Général des Ponts et Chaussées, il a été décidé de concentrer ses moyens sur les études et actions d'intérêt collectif représentant des enjeux au niveau national : études d'ensemble de l'évolution des côtes et des moyens à mettre en oeuvre, amélioration des méthodes de défense...

Afin d'assurer la cohérence des opérations de défense contre la mer menées par les collectivités locales et les associations syndicales de propriétaires, l'élaboration de schémas techniques globaux à l'échelon pluri communal ou pluri départemental a été préconisée.

Toutefois, au cours des derniers exercices, le chapitre consacré aux subventions pour les travaux de défense des lieux habités contre la mer n'avait été alimenté que par les réserves parlementaires. Compte tenu de la faiblesse des dotations, il n'a pu être envisagé qu'une répartition ponctuelle de ces crédits aux régions prioritaires.

Pour 1996, le projet de loi de finances prévoit les crédits nécessaires à la tranche annuelle du contrat de plan avec la Région Picardie destinée au financement de la Digue des Bas Champs, soit 3,5 millions de francs en crédits de paiement et 7 millions de francs en autorisations de programme (chapitre 63-30).

Pour l'avenir, le Comité interministériel d'aménagement du territoire de Troyes du 20 septembre 1994 a annoncé la relance d'une politique en la matière, avec la mise en oeuvre de contrats littoraux. Cette mise en oeuvre sera fonction des moyens qui pourront être dégagés soit au niveau du chapitre précité, soit dans le cadre du Fond national de l'aménagement et du développement du territoire.

2. La lutte contre la pollution accidentelle du littoral et de la mer

Après plusieurs années d'investissements importants en matériel de lutte contre la pollution par les hydrocarbures, la politique du ministère de l'Aménagement du Territoire, de l'Equipement et des Transports, responsable de la lutte contre la pollution du littoral (plans POLMAR-terre), repose sur les axes suivants :

- la poursuite du remplacement d'un linéaire conséquent de barrages anti-pollution réformés ou devant l'être ;

- l'amélioration des conditions de mise en oeuvre et d'entreposage des matériels acquis les années précédentes ;

- l'amélioration des conditions d'accès (notamment nautique) aux centres de stockage ou l'adaptation des moyens de transport.

- Plus précisément, l'année 1996 poursuivra les efforts déjà développés en 1995 sur les points suivants :

- la recherche de techniques innovantes de lutte, notamment en ce qui concerne la bio restauration des milieux ;

l'amélioration des connaissances concrètes : évaluation des nouveaux matériels de lutte contre la pollution, notamment ceux disponibles dans les pays voisins ;

- la diffusion de ces connaissances, par des actions concrètes d'information sur les possibilités de remise en état d'un site et la diffusion des études réalisées par le CEDRE (Centre de documentation, de recherche et d'expérimentations) sur les pollutions accidentelles des eaux, avec lequel des contrats pour la mise à jour des plans POLMAR départementaux continuent à être passés ;

- enfin, la poursuite de la formation technique, au moyen d'exercices sur le terrain, du personnel susceptible d'intervenir en cas de rejets marins accidentels, qui reste une priorité et un gage de l'efficacité du dispositif du Plan Polmar, notamment pour la validité des plans de pose de barrages.

C. L'AMÉLIORATION DE L'ACCÈS DES PIÉTONS LE LONG DU LITTORAL

La servitude de passage des piétons le long du littoral, sur les propriétés privées riveraines du domaine public maritime a été instituée par la loi n° 76-1285 du 31 décembre 1976 pour permettre la réalisation d'un sentier sur l'ensemble du littoral français.

La mise en oeuvre de cette servitude, effectuée par les services déconcentrés de l'État (directions départementales de l'équipement ou services maritimes), en concertation avec les élus locaux et les propriétaires concernés, comprend deux étapes :

1. La définition du tracé de la servitude

Le tracé de droit consiste en une bande de trois mètres de largeur en limite du domaine public maritime. Ce tracé peut être modifié et exceptionnellement suspendu, afin de tenir compte des obstacles naturels et bâtis ainsi que des chemins existants : il fait alors l'objet d'une enquête publique et est approuvé par arrêté préfectoral. L'administration a recours également à cette procédure en l'absence de tout obstacle lorsque des travaux sont envisagés dans les secteurs où la limite du domaine n'est pas fixée. En tout état de cause, la délimitation, quand elle existe, n'est que déclarative, de sorte qu'elle peut être rapidement périmée si un mouvement des eaux se produit.

L'engagement de cette première étape est subordonné à la prise de conscience de l'intérêt du sentier du littoral par les collectivités locales et à la qualité des négociations menées avec les agriculteurs et les propriétaires d'habitations dont les terrains sont grevés par la servitude. On observe des différences de rythme d'avancement des dossiers suivant les départements.

2. L'aménagement du sentier

La fréquentation par le public du sentier du littoral nécessite des aménagements plus ou moins importants, dont la réalisation est fonction, d'une part, de difficultés techniques rencontrées sur le terrain (côtes rocheuses...), d'autre part, des financements disponibles.

Actuellement, plus de 1.200 km de sentier ont été aménagés et ouverts au public en plus du linéaire de côte de 3.337 km que l'on peut considérer comme déjà ouvert au public.

Afin d'appuyer une politique locale dynamique de mise en oeuvre du sentier du littoral et encourager certaines régions, un financement complémentaire de 300.000 F de la servitude de passage a été effectué au cours des derniers exercices, par transfert de crédits.

Il reste à aménager et à financer plus de 1.400 kilomètres de linéaire côtier. Au rythme actuel, 25 à 30 ans seront encore nécessaires pour achever la mise en place de la servitude le long du littoral.

La dotation de 900 millions de francs en CP et 700 millions de francs en AP (chapitre 53-30. article 20) est destinée au développement du sentier du littoral notamment dans les secteurs difficiles d'accès et présentant néanmoins un intérêt paysager, ainsi qu'aux délimitations du rivage pour lesquelles une demande croissante se manifeste de la part des propriétaires riverains.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 8 novembre 1995, sous la présidence de M. Christian Poncelet, président, la commission a procédé à l'examen du budget de l'Aménagement du territoire, Equipement et Transports - IV. Mer - Marine marchande pour 1996.

M. René Regnault, rapporteur spécial, a tout d'abord présenté les grandes lignes du projet de budget de la Marine marchande, ainsi que ses principales observations.

M. Jacques Rocca Serra, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, a estimé qu'il était regrettable que la France soit contrainte de recourir à un pavillon bis tel que le "registre Kerguelen" pour être compétitive par rapport aux autres pays européens, et a souhaité l'instauration d'un pavillon européen qui imposerait les mêmes obligations à tous ses membres.

M. Christian Poncelet, président, a alors observé qu'il existait un phénomène analogue dans le secteur du textile, où la France devait subir la concurrence d'articles "naturalisés" européens sur le territoire de l'Union sans y avoir été réellement produits.

M. René Regnault, rapporteur spécial, a plaidé pour que la légalisation du "registre Kerguelen" s'accompagne d'une harmonisation des pavillons européens.

La commission a alors décidé de réserver son avis, jusqu'à ce qu'elle se prononce sur l'ensemble du budget de l'Aménagement du territoire, Équipement et Transports.

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