EXTRAITS DU BULLETIN DES COMMISSIONS

LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL, DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE/

Mercredi 17 janvier 1996 - Présidence de M. Jacques Larché, président. La commission a tout d'abord examiné, sur le rapport de M. Pierre Fauchon, rapporteur, la proposition de loi n° 389 (1994-1995), adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à élargir les pouvoirs d'information du Parlement et à créer un office parlementaire d'évaluation des politiques publiques.

M. Pierre Fauchon, rapporteur, après avoir rappelé que Gouvernement et Parlement se préoccupaient depuis déjà quelques années d'évaluer les politiques publiques, a indiqué que la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM. Dominati et Fourgous, avait pour objet de renforcer les capacités évaluatives du Parlement en instituant un organisme parlementaire spécialisé dans l'évaluation des politiques publiques. Il a précisé que ce dispositif était précédé par un titre premier comportant plusieurs dispositions destinées à renforcer les pouvoirs de contrôle des commissions parlementaires, pouvoirs dont il a rappelé qu'ils devaient rester l'apanage des Assemblées et de leurs commissions.

Le rapporteur a ensuite donné une définition de l'évaluation des politiques publiques, tant ex ante qu'ex post, en insistant sur le caractère technique de la démarche de connaissance des effets d'une action publique et le caractère politique du jugement porté sur l'efficacité de cette action.

M. Pierre Fauchon, rapporteur, a retracé la mise en place par le Gouvernement en 1990, à l'initiative de M. Michel Rocard, d'un comité interministériel chargé de coordonner les évaluations conduites par les administrations de l'État, assisté d'un fonds et d'un conseil scientifique de l'évaluation.

Le rapporteur a ensuite rappelé que la Cour des comptes ainsi qu'un certain nombre de services de l'administration d'État avaient d'ores et déjà intégré une dimension évaluative dans leurs travaux d'investigation. Il a fait observer que le Parlement, et singulièrement le Sénat, avait agi dans le même sens. Il a évoqué, à titre d'exemples, les études commandées par la mission d'information sur l'aménagement du territoire, les travaux de certaines commissions d'enquête, de la délégation du Sénat pour la planification et de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. Il a toutefois estimé que la démarche évaluative restait trop morcelée et que l'approche à moyen terme des politiques publiques était insuffisamment développée en raison des contraintes que l'ordre du jour imposait aux commissions.

Après avoir écarté l'exemple américain en raison de la spécificité de l'organisation institutionnelle des États-Unis, M. Pierre Fauchon, rapporteur, a estimé que la création d'une structure commune aux deux Assemblées, susceptible d'engager des démarches évaluatives à moyen terme, constituerait un apport indéniable à la réflexion des parlementaires.

Abordant le titre premier de la proposition de loi, le rapporteur a signalé que l'article premier faisait obligation aux personnes convoquées par les commissions de déférer à la convocation. Il a estimé que cette disposition pouvait être utile sous réserve d'y ajouter une obligation de déposer.

Il a ensuite évoqué l'article 2 de la proposition de loi initiale supprimé par l'Assemblée nationale qui prévoyait d'étendre aux rapporteurs pour avis les pouvoirs des rapporteurs spéciaux des commissions des finances. Il a estimé que la suppression de cette disposition était justifiée par le souci de ne pas diluer le contrôle budgétaire dont la responsabilité principale incombait à ces commissions.

Le rapporteur a ensuite évoqué l'article 2 qui élargit aux autres commissions la faculté actuellement réservée aux commissions des finances de saisir la Cour des Comptes d'une demande d'enquête. Il a indiqué que, sous réserve des observations de la commission des finances, il n'y voyait pas d'obstacle.

Il a enfin annoncé qu'il proposerait un amendement permettant de renforcer temporairement les pouvoirs des commissions en les autorisant à demander à l'Assemblée le droit d'utiliser, pour une durée et dans un but déterminés, des pouvoirs semblables à ceux dévolus aux commissions d'enquête.

Abordant ensuite le titre II qui institue un office parlementaire d'évaluation des politiques publiques, il en a approuvé le principe, estimant que cet organisme contribuerait à revaloriser le rôle du Parlement par l'amélioration de la qualité de son information. Il a toutefois souhaité que certaines modifications soient apportées au texte adopté par l'Assemblée nationale afin, d'une part, de prévenir toute dérive vers une autonomie excessive de l'office au risque d'empiéter sur les responsabilités propres des Assemblées et, d'autre part, d'assurer la prise en compte du caractère bicaméral du Parlement, notamment en cas de divergence de majorité entre les deux Assemblées.

En conséquence, il a proposé la constitution d'un office commun financé à parité par les deux Assemblées et composé de la réunion de deux délégations regroupant, dans chaque Assemblée, le président et le rapporteur général de la commission des finances, un représentant de chaque groupe politique et un représentant de chaque commission autre que la commission des finances. Il a par ailleurs estimé que les attributions de l'office pouvaient être élargies et la formulation de ses pouvoirs simplifiées afin d'éviter les effets nécessairement limitatifs d'énumérations trop précises.

Il a, enfin, fait valoir que les délégations ne retrouveraient leur autonomie qu'en cas de conflit entre les deux Assemblées ou, si elles souhaitaient, le cas échéant, procéder à des évaluations particulières pour le compte de leur Assemblée. Il a précisé qu'en pareil cas les frais seraient supportés par celle-ci.

M. Jacques Larché, président, a remercié le rapporteur pour le travail considérable de réflexion et de consultation qu'il avait accompli.

M. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances et rapporteur pour avis, s'est interrogé sur l'opportunité de la création d'un office parlementaire d'évaluation des politiques publiques en estimant, d'une part, que le Parlement n'avait sans doute pas utilisé avec suffisamment d'efficacité les moyens dont il disposait d'ores et déjà, d'autre part, que seule une volonté politique forte pourrait relancer une nouvelle dynamique en matière d'évaluation. En conclusion, il a approuvé le dispositif proposé par le rapporteur, notamment la réunion de deux délégations au sein d'un office commun qui lui a paru répondre à un souci pragmatique, dans la mesure où, en cas de désaccord persistant entre les deux Assemblées, l'office pourrait continuer à travailler dans des conditions satisfaisantes.

M. Robert Pagès s'est déclaré réservé quant à l'efficacité de l'office proposé par l'Assemblée nationale en estimant que celui-ci ne contribuerait pas réellement au renforcement des pouvoirs du Parlement affaiblis par le poids des prélèvements européens sur le budget national et la pratique des ordonnances. Il a déclaré que son groupe s'abstiendrait ainsi qu'il l'avait fait à l'Assemblée nationale.

M. Christian Bonnet a estimé que la création d'un office supplémentaire ne ferait qu'accroître les pesanteurs du fonctionnement du Parlement. Après avoir indiqué qu'il ne croyait pas à l'impulsion d'une nouvelle dynamique, il a déclaré qu'il ne pouvait approuver la proposition de l'Assemblée nationale.

M. François Giacobbi a fait observer que la création d'un nouvel office ne rencontrait qu'un « enthousiasme modéré ».

Après avoir évoqué la question de l'efficacité de l'office qui pouvait apparaître comme un instrument d'autocensure parlementaire susceptible de devenir un lieu de mise en cause du Gouvernement, M. Luc Dejoie a considéré que la création de deux délégations risquait de favoriser des divergences entre les évaluations commandées par l'une et l'autre des Assemblées, ce qui ne pourrait que contribuer à brouiller l'image du Parlement. Il a conclu en estimant qu'il serait préférable de ne pas créer d'office plutôt que de développer des divergences inutiles au sein du Parlement.

M. Philippe de Bourgoing a estimé que les moyens existants pourraient être mieux utilisés mais que l'office tel que présenté par le rapporteur méritait d'être expérimenté.

M. Patrice Gélard a considéré que la composition proposée par le rapporteur était plus compliquée que celle de l'Assemblée nationale en raison du nombre différent des groupes dans les deux Assemblées.

M. Jean-Marie Girault a craint les effets d'un absentéisme prévisible et a conclu au rejet de la proposition de l'Assemblée nationale.

M. Paul Girod a fait valoir que les offices américains ne pouvaient pas être retenus comme modèles en raison de la spécificité de l'organisation institutionnelle des États-Unis. Il a estimé qu'en France le Gouvernement émanant de la majorité parlementaire, l'utilité de l'office n'était pas démontrée.

M. Robert Badinter s'est inquiété des conditions de publication des travaux de l'office. Il a par ailleurs souligné que l'évaluation des politiques publiques étant souvent proche du contrôle politique du Gouvernement, l'opinion publique risquait d'assimiler les études publiées par l'office à autant de jugements portés par le Parlement sur la politique gouvernementale. Enfin, il a rappelé le rôle des Cours des comptes auprès de certains Parlements européens.

M. Jacques Larché, président, a estimé que le Parlement s'apprêtait à créer une structure dont il ne maîtrisait pas toutes les conséquences, notamment la perception qu'en aurait l'opinion publique. Il s'est par ailleurs inquiété des conséquences que les commissions devraient tirer des évaluations d'un tel office, si, par exemple, elles concluaient à l'insuffisance des moyens pour la mise en place des tribunaux criminels départementaux envisagés par le Gouvernement.

M. Robert Badinter a souligné que l'évaluation telle que définie par la proposition de loi portait non seulement sur l'adéquation des moyens financiers aux objectifs poursuivis mais également sur l'adéquation des moyens administratifs et juridiques, ce qui conduirait l'office à porter un jugement critique d'ensemble sur l'oeuvre du Parlement susceptible de discréditer les Assemblées aux yeux de l'opinion publique. Il a estimé que, pour ce motif, l'initiative prise par l'Assemblée nationale s'apparentait à une démarche d'apprenti-sorcier.

En réponse à ces diverses observations, M. Pierre Fauchon, rapporteur, a fait valoir que, de manière générale, le Parlement avait besoin de disposer d'informations plus objectives et plus précises ; à cet égard la création d'un office parlementaire spécialisé pouvait être considéré comme un apport intéressant même si elle relevait pour partie d'un pari dont il se proposait d'ailleurs de limiter les incertitudes.

S'agissant de la réunion de deux délégations au sein d'un office commun, le rapporteur a précisé qu'il ne s'agissait pas dans son esprit de créer deux structures autonomes dotées de services propres mais bien de répondre à une préoccupation d'équilibre politique, à laquelle le Sénat ne pouvait être qu'attaché. Il a ensuite estimé que le Parlement ne pouvait qu'être renforcé par le développement de moyens autonomes d'expertise avant de rappeler que la création de l'office s'inscrivait dans une démarche de revalorisation du rôle du Parlement dans son ensemble. Enfin, il a insisté sur le caractère politique de la décision de procéder à une évaluation, du choix de l'évaluateur, des modalités de l'évaluation et de la décision de publication des résultats de l'étude. Il a considéré que ce caractère politique rendait nécessaire que les deux Assemblées exercent un contrôle effectif sur l'office.

M. Maurice Ulrich a rappelé l'objet même de la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale et estimé qu'il n'était pas illégitime que le Parlement se dote d'un organisme susceptible d'apprécier les conditions dans lesquelles les administrations mettaient en oeuvre les lois votées. Il a considéré que l'évaluation ainsi comprise permettrait de relancer l'action gouvernementale lorsque celle-ci tendait à s'essouffler, et de supprimer les dispositifs devenus inutiles. Il a donc considéré que la création d'un office parlementaire d'évaluation des politiques publiques s'apparentait à un acte de salubrité législative.

M. Paul Girod a fait observer que les rapporteurs spéciaux de la commission des finances rencontraient des difficultés récurrentes dans leurs relations avec la Cour des Comptes, qui pourraient être résolues par un texte prévoyant la mise à disposition du Parlement des rapports internes de la Cour.

M. Paul Masson a exprimé sa surprise devant les réticences et les objections formulées par ses collègues alors que la création de l'office avait pour objet de revaloriser le rôle du Parlement. Attirant l'attention sur le développement insuffisant de l'évaluation des politiques publiques, il a insisté sur l'importance d'une analyse rétrospective appuyée sur des instruments techniques appropriés. Il a enfin estimé que la Cour des Comptes n'avait pas pour mission de faire de l'analyse politique et que ce rôle devait rester l'apanage des Assemblées, avant de conclure à l'importance de la création d'un instrument moderne au service du Parlement.

M. Philippe de Bourgoing a confirmé qu'il approuvait la proposition du rapporteur puis il a évoqué le rôle que pourrait jouer l'office en matière d'évaluation de d'une législation comme la loi sur le littoral à laquelle l'administration avait donné une portée singulièrement éloignée de son objectif initial.

A l'issue de cet échange de vues, M. Jacques Larché, président, a consulté la commission sur l'opportunité de procéder immédiatement à l'examen des articles. Face à un partage égal des voix, et après avoir souligné que les propositions du rapporteur apparaissaient comme la seule solution raisonnable, il a estimé préférable de renvoyer à la réunion du mercredi 24 janvier 1996 la suite de l'examen du rapport de M. Pierre Fauchon ainsi que l'examen du rapport de M. Michel Rufin sur la proposition de loi n° 390 (1994-1995) adopté par l'Assemblée nationale, tendant à créer un office parlementaire d'amélioration de la législation.

[...]

Mercredi 24 janvier 1996 - Présidence de M. Jacques Larché, président et de M. François Giacobbi, vice-président.

[...]

Elle a ensuite repris, sur le rapport de M. Pierre Fauchon, l'examen de la proposition de loi n° 389 (1994-1995), adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à élargir les pouvoirs d'information du Parlement et à créer un office parlementaire d'évaluation des politiques publiques.

M. Jacques Larché, président, a rappelé qu'à la suite d'un partage égal des voix sur l'opportunité de passer à l'examen des articles de la proposition de loi, la commission avait accepté, à sa demande, de reprendre sa réflexion au cours de la présente réunion.

M. Pierre Fauchon, rapporteur, a précisé que l'institution d'un office parlementaire spécialisé dans l'évaluation des politiques publiques lui avait paru constituer une idée nouvelle intéressante mais que sa mise en oeuvre devait être assortie de certaines précautions destinées à prévenir tout risque de dérapage. A cet égard, il a souligné la nécessité d'un ancrage solide de l'office au sein du Parlement afin d'éviter la création d'un organisme de plus en plus autonome au fil des ans et qui en viendrait à prendre des décisions de caractère politique au lieu et place de l'Assemblée nationale et du Sénat. Il a en outre souhaité que la composition de l'office soit adaptée pour éviter autant que faire se peut l'apparition de blocages politiques en cas de différence de majorité entre les deux Assemblées. Enfin il a rappelé que l'amendement qu'il proposait s'efforçait précisément de répondre à ce double souci en prévoyant que l'office serait composé de deux délégations constituées dans chaque Assemblée qui ne retrouveraient leur autonomie qu'en cas de désaccord entre l'Assemblée nationale et le Sénat.

La commission a tout d'abord examiné le titre premier qui renforce les pouvoirs d'information du Parlement

Elle a tout d'abord adopté, sur proposition de son rapporteur, un amendement tendant à compléter l'article premier (obligation de déférer aux convocations des commissions permanentes) par l'obligation de déposer devant une commission permanente.

De même, elle a adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article premier pour ouvrir aux commissions la faculté de demander à l'Assemblée à laquelle elles appartiennent, pour une durée limitée et pour un objet déterminé, d'exercer les pouvoirs des commissions d'enquête.

Abordant l'examen de l'article 2 (demandes d'enquêtes à la Cour des Comptes), M. Pierre Fauchon, rapporteur, a précisé que l'extension des pouvoirs de la commission des Finances à l'ensemble des commissions ferait l'objet d'un examen attentif par la commission des Finances saisie pour avis, et que la commission des Lois aurait, le cas échéant, à statuer sur un amendement.

La commission est ensuite passée à l'examen du titre II qui institue un office parlementaire d'évaluation des politiques publiques. Elle a examiné un amendement présenté par son rapporteur tendant à une nouvelle rédaction de l'intégralité de l'article 3.

S'agissant du paragraphe I de cet article qui définit la mission de l'office, M. Pierre Fauchon a suggéré de retenir une formule générale prévoyant l'expertise de toute politique publique au lieu de rémunération limitative adoptée par l'Assemblée nationale. Il lui a semblé préférable de parler d'expertises par des organismes extérieurs plutôt que d'évaluation, dans la mesure où les études susceptibles d'être commandées à ces organismes devraient présenter un caractère technique dénué de toute appréciation politique.

M. Jacques Larché, président, a souhaité que soit immédiatement abordée la question de la saisine de l'office et a manifesté son opposition de principe à une saisine par les membres de celui-ci.

M. Robert Badinter s'est également élevé contre toute autosaisine.

M. Jean-Jacques Hyest a rappelé que les discussions à l'Assemblée nationale avaient fait clairement apparaître que l'office travaillerait à l'initiative des commissions ou des Bureaux chargés de filtrer les demandes des groupes ou des parlementaires. Il a estimé nécessaire de conserver un cadre strict de saisine afin d'éviter toute dérive.

M. François Giacobbi a considéré qu'il n'était pas envisageable de prévoir une autosaisine de l'office. Il a par ailleurs objecté que la formulation de l'objet de l'office proposée par le rapporteur était trop large.

M. Patrice Gélard a souhaité que le Parlement soit considéré comme le destinataire des travaux de l'office.

M. Michel Rufin a rappelé que les dictionnaires considéraient comme politiques publiques tout ce qui se rapportait aux affaires publiques. En conséquence, il a demandé que la définition des missions de l'office soit encadrée.

M. Maurice Ulrich a suggéré que le programme annuel d'évaluation décidé par l'office soit approuvé par chacune des Assemblées.

M. Robert Badinter a souligné que l'Assemblée nationale avait souhaité confier deux missions à l'office : informer le Parlement sur les résultats des politiques publiques déjà mises en oeuvre et lui fournir des évaluations sur les politiques publiques dont la mise en oeuvre était envisagée.

M. Jean-Jacques Hyest a alors rappelé que l'évaluation a priori du coût d'une politique publique susceptible d'être décidée avait été à l'origine de la création de l'office, les députés ayant estimé qu'il était nécessaire que le Parlement puisse bénéficier de travaux d'évaluation distincts de ceux commandés par le Gouvernement.

Il a par ailleurs indiqué que la définition des missions de l'office retenue par l'Assemblée nationale était destinée à prévenir tout empiétement sur les pouvoirs de contrôle des commissions.

M. Jacques Larché, président, a alors rappelé les termes de l'article 22 du Règlement du Sénat qui confie aux commissions permanentes le soin d'informer le Sénat pour lui permettre d'exercer sa fonction de contrôle de l'action gouvernementale.

Après les observations de M. Georges Othily sur la distinction entre évaluation, contrôle et expertise, M. Philippe de Bourgoing a suggéré que le texte précise expressément que c'est à l'intention du Parlement et sur la demande de celui-ci que l'office diligente des expertises.

M. Jacques Larché, président, a estimé que la question des modalités de saisine de l'office devait être examinée avant la définition des missions de celui-ci. En conséquence, il a consulté la commission sur l'éventualité d'une autosaisine de l'office. La commission a décidé d'exclure toute autosaisine.

S'agissant de la définition du champ des évaluations conduites par l'office, et après un large débat auquel ont pris part MM. Robert Badinter, François Giacobbi, Luc Dejoie, Jacques Larché et Pierre Fauchon, rapporteur, sur la distinction entre évaluation et expertise, M. Jacques Larché, président, a évoqué le moment de l'intervention de l'office et craint que le jugement porté par celui-ci sur un projet gouvernemental restreigne la marge d'appréciation de la commission chargée d'examiner le texte.

M. Luc Dejoie a indiqué qu'il partageait ses craintes.

Puis, M. Jean-Jacques Hyest a rappelé la nécessité pour le Parlement de disposer d'experts indépendants susceptibles de lui fournir des éléments d'information distincts de ceux utilisés par le Gouvernement. Il a estimé pour ce motif qu'il n'était pas envisageable d'écarter l'évaluation a priori.

A la demande de M. Jacques Larché, président, M. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des Finances, rapporteur pour avis, a précisé que lors d'un premier échange de vues, la commission des Finances avait plutôt perçu l'office comme un outil à caractère budgétaire dont les travaux étaient destinés à éclairer le Parlement sur le coût et l'efficacité des mesures susceptibles d'être décidées. Il a par ailleurs précisé qu'à son sens l'expertise en amont ne pourrait être pratiquée que pour les propositions de loi. Enfin, renvoyant aux travaux préparatoires pour éclairer les débats ultérieurs éventuels, il a suggéré que la définition des missions de l'office soit suffisamment large.

M. Maurice Ulrich a rappelé que l'Assemblée nationale n'avait pas entendu créer une machine tournée contre le Parlement mais un organisme susceptible d'évaluer dans quelle mesure le Gouvernement avait effectivement mis en oeuvre les moyens nécessaires à l'application d'une politique décidée par le Parlement. Il a estimé que les travaux de l'office étaient exclusivement destinés à l'information des commissions.

Après avoir donné lecture d'un extrait du message adressé par le Président de la République au Parlement, soulignant la nécessité pour les Assemblées d'évaluer l'adéquation entre le coût et l'efficacité d'une dépense publique, M. Jacques Larché, président, a estimé qu'il était possible de prévoir des évaluations en amont sous réserve que celles-ci soient limitées à l'appréciation des effets de nature économique et financière.

M. Charles Jolibois a considéré que le terme d' « expertises » proposé par le rapporteur conduisait à doter l'office d'une compétence par trop extensive.

M. Pierre Fauchon, rapporteur, a estimé que l'évaluation allait au-delà de l'expertise dans la mesure où elle comprenait non seulement une analyse technique mais également un jugement de nature politique.

La commission a prévu, sur la proposition de son rapporteur, que l'office aurait pour mission de « faire expertiser à l'intention du Parlement les résultats économiques ou financiers d'une politique publique ».

Abordant ensuite l'examen du paragraphe II qui fixe la composition de l'office, M. Pierre Fauchon, rapporteur, a précisé qu'il souscrivait à l'essentiel du dispositif prévu par l'Assemblée nationale sous réserve que sénateurs et députés soient regroupés au sein de deux délégations dont la réunion formerait l'office.

M. Robert Pagès a estimé que cette solution emporterait très rapidement un blocage complet du fonctionnement de l'office.

M. Robert Badinter a craint le développement d'expertises concurrentes décidées par les deux délégations.

M. René-Georges Laurin a indiqué qu'il souhaitait s'en tenir au principe d'un office commun, dans les termes adoptés par l'Assemblée nationale.

M. Jean-Jacques Hyest a estimé que le dispositif prévu par le rapporteur permettrait de surmonter le cas échéant des oppositions politiques entre les deux Assemblées mais que, sauf difficulté de cette nature, l'office fonctionnerait comme une structure commune.

Après les observations de MM. Charles Jolibois, François Giacobbi, Jean-Marie Girault et Philippe de Bourgoing, la commission a adopté le principe d'une double délégation.

S'agissant de la saisine de l'office, M. Jean-Jacques Hyest a précisé que les Bureaux des Assemblées n'auraient pas une compétence liée à l'égard des demandes formées par les groupes politiques ou certains parlementaires et qu'ils seraient libres de ne pas les transmettre à l'office.

M. Robert Badinter a craint que le filtre ainsi constitué par les Bureaux ne conduise à une politisation excessive de la saisine de l'office.

M. Charles Jolibois s'est inquiété des délais d'évaluation, notamment en cas d'étude précédant l'adoption d'une nouvelle politique publique.

M. Jacques Larché, président, a estimé qu'il n'était pas possible d'envisager de fixer des délais et que l'absence d'évaluation pourrait, le cas échéant, être utilisée comme argument politique.

La commission a retenu le mode de saisine prévu par l'Assemblée nationale.

La commission a ensuite décidé de ne pas approuver la création d'un conseil scientifique, M. Pierre Fauchon, rapporteur, ayant fait valoir que la composition d'un tel organisme ne lui permettrait pas de réunir une diversité suffisante de spécialistes compétents dans les domaines multiples susceptibles d'être abordés par l'office. M. Michel Rufin a donné son plein accord à cette suppression.

Elle a, en revanche, adopté le paragraphe IV de l'amendement proposé par le rapporteur, après que celui-ci eut fait observer qu'il serait utile que les commissions concernées à titre principal par une évaluation puissent désigner l'un de leurs membres pour en suivre le déroulement.

Elle a également approuvé le paragraphe V de cet amendement qui permet à l'office de faire appel à la Cour des Comptes, au commissariat général du Plan et aux organismes administratifs remplissant des missions d'évaluation.

Sous réserve d'une modification de caractère rédactionnel, la commission a approuvé le premier alinéa du paragraphe VI du texte adopté par l'Assemblée nationale qui reconnaît à l'office le droit de recevoir communication de tout renseignement d'ordre administratif ou financier de nature à faciliter sa mission. Elle a en revanche considéré que les alinéas suivants étaient inutiles, son rapporteur lui ayant fait observer que l'office pourrait toujours informer les Bureaux des Assemblées en cas de difficulté et que, pour la réalisation de ses études, il ferait nécessairement appel à des personnes ou à des organismes choisis en fonction de leurs compétences dans le domaine concerné.

S'agissant du paragraphe VII de l'amendement relatif à la publication des travaux de l'office, la commission a estimé qu'il était préférable d'en confier la décision à la personne les ayant demandés.

Après avoir constaté que le rétablissement des dispositions adoptées par l'Assemblée nationale relatives à la saisine de l'office privait d'effet les deux derniers paragraphes de son amendement, le rapporteur les a supprimés.

Appelée à voter sur l'ensemble de l'article 3 ainsi modifié, la commission a émis un vote négatif qui a conduit M. Pierre Fauchon à ne pas conserver le rapport.

A la suite d'une intervention de M. Paul Masson, M. Michel Rufin a souhaité reprendre le rapport de la proposition de loi. La commission l'a désigné comme rapporteur.

Elle a décidé de renvoyer l'examen du rapport de M. Michel Rufin à une séance ultérieure.

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