Article 33 (Retiré) - Actualisation des modalités de détermination du prix du lait

Commentaire : Cet article vise à modifier les dispositions législatives en vigueur qui ne permettent pas de prendre en compte, pour la fixation du prix au producteur, des critères techniques relatifs aux possibilités de transformation du lait. Cet article a été retiré par le gouvernement dans le souci de conduire une concertation nouvelle contre les parties intéressées "sans doute, si la concertation aboutit, pour introduire une nouvelle disposition devant le Sénat par voie d'amendement".

L'excellent rapport de l'Assemblée nationale procède à une analyse très détaillée des modalités de détermination du prix du lait. Il rappelle que les critères régissant le paiement du lait aux producteurs sont fixés par la loi du 3 janvier 1969 relative à l'institution du paiement du lait en fonction de sa composition et de sa qualité, dite "loi Godefroy". Depuis la publication de cette loi, la filière laitière a profondément évolué. Une actualisation de la loi était devenue nécessaire.

I - LES CRITÈRES PRIS EN COMPTE POUR FIXER LE PRIX DU LAIT : DU "BIOLOGIQUE" AU "SANITAIRE"

Lors de l'adoption de la loi de 1969, les entreprises de transformation du lait produisaient généralement plusieurs types de produits. Peu à peu une spécialisation s'est effectuée et les entreprises ont recherché le lait correspondant au mieux à leur production. Pour ce faire, elles ont d'abord accordé des bonifications aux producteurs de lait leur livrant le lait recherché. Puis, prenant en compte l'amélioration globale de la qualité hygiénique et sanitaire du lait à la suite de directives communautaires, elles ont parfois Préféré imposer des réfactions sur le prix du lait mal adapté à la fabrication de leurs produits.

Cependant, certains producteurs de l'ouest de la France ont déposé des recours contentieux en arguant que les critères justifiant l'application de pénalités allaient au-delà des prescriptions de la loi de 1969 et du décret application n° 70-1056 du 16 novembre 1970 qui prévoient que les prix des laits doivent être déterminés en fonction de leur composition en matières grasses et en protéines et de leur qualité hygiénique et biologique. Les demandes ont été jugées recevables par les tribunaux mais aucune décision n'est encore intervenue au fond.

A la demande du Centre national interprofessionnel de l'économie laitière, une concertation a été engagée avec les professionnels du lait afin de pouvoir introduire dans la fixation du prix du lait des critères liés à l'aptitude du lait à fournir des produits transformés de bonne qualité.

Lors de la séance du 7 mars à l'Assemblée nationale, le ministre chargé des relations avec le Parlement a souligné : "Le Centre national interprofessionnel de l'économie laitière a saisi l'administration de propositions de modifications de la réglementation relative au paiement du lait en fonction de sa composition et de sa qualité. L'interprofession -je rappelle qu'elle comprend les producteurs, les transformateurs coopératifs et les transformateurs privés- souhaite introduire des critères liés à l'aptitude technologique du lait à fournir des produits transformés de bonne qualité. Les dispositions actuelles sont fixées par la loi du 3 janvier 1969, dite loi Godefroy. Le conseil de direction de l'office du lait à reçu mission de formuler un avis sur le dispositif élaboré pour répondre à la demande de l'interprofession ; le groupe de travail qui a été constitué a conclu que les aménagements demandés ne peuvent pas être menés à bien sans une modification de la loi Godefroy".

Les deuxième et troisième alinéas du 1° du I du présent article ont donc pour objet d'autoriser, à titre facultatif, la prise en compte de critères relatifs aux possibilités de transformation du lait et aux caractéristiques des produits susceptibles d'être obtenus pour la détermination du prix du lait.

Ces critères ne sont que facultatifs car des produits comme la poudre de lait n'exigent pas d'y avoir recours. Ils viennent ainsi compléter les critères obligatoires concernant la composition et la qualité du lait.

Il convient néanmoins de remarquer que cette nouvelle rédaction précise le critère relatif à la qualité en indiquant qu'il s'agit de la qualité "hygiénique et sanitaire". Ces deux termes ont été choisis de façon à englober, d'une part, les conditions d'élevage, l'exécution de la traite et la conservation du lait -on parle alors de conditions d'hygiène- et, d'autre part, les caractéristiques des produits dans l'optique de la sécurité du consommateur -on parle alors de conditions sanitaires.

Un décret précisera le contenu des engagements conclus entre les producteurs et les acheteurs de lait. Il indiquera également les modalités techniques de mise en oeuvre des critères.

Selon M. Philippe Auberger, l'élargissement des critères pris en considération pour la fixation du prix du lait ne fait qu'entériner une pratique largement diffusée et devrait donc avoir peu de répercussion sur les prix actuels du lait. Toutefois, les débats à l'Assemblée nationale ont révélé certaines réticences à rencontre du projet de loi, certains députés craignent en effet que "parmi les critères additionnels pourrait être retenu celui de la lipolyse, ce qui diminuerait le prix payé aux producteurs et les pénaliserait ajustement car la lipolyse est le plus souvent imputable aux transporteurs qui agissent pour le compte de transformateurs".

Il importe enfin d'observer que le texte des deuxièmes et troisièmes alinéas du 1° du I du présent article fixent des critères techniques de différenciation du prix du lait et non le prix du lait lui-même. En effet, l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 6 novembre 1979 (affaire 10/79 TOFFOLI et autres contre la région de Vénétie) interdit la fixation de tarifs imposés par les autorités publiques ou à caractère indicatif.

II. - LA PROCÉDURE DE FIXATION DU PRIX DU LAIT : CONSÉCRATION DU RÔLE DES INTERPROFESSIONS

La loi du 3 janvier 1969 a été publiée à une époque où l'interprofession laitière n'existait pas encore. Le dispositif qu'elle prévoyait pour fixer, au niveau local, le prix du lait au regard des critères retenus (intervention d'un arrêté préfectoral après consultation des organisations Professionnelles laitières les plus représentatives) n'a donc pas perduré après la promulgation des lois n° 74-639 du 12 juillet 1974 relative à l'organisation interprofessionnelle laitière et n° 75-600 du 10 juillet 1975 relative à l'organisation interprofessionnelle agricole.

Le quatrième alinéa du 1° du I du présent article prévoit donc d'harmoniser le texte de loi et la pratique en indiquant que des grilles de classement des laits sont fixées, au niveau régional, au moyen d'accords interprofessionnels pouvant être homologués par arrêtés conjoints du ministre de l'Agriculture, de la pêche et de l'alimentation et du ministre de l'Economie et des finances, en application de la loi du 12 juillet 1974 précitée, ou pouvant être étendus en application de la loi du 10 juillet 1975 précitée, afin d'être obligatoires pour tous les producteurs et transformateurs de la zone concernée.

Les débats à l'Assemblée nationale ont fait ressortir une crainte devant l'extension des pouvoirs de l'interprofession. Selon M. Jean-Claude Lemoine : "cet article accentue le poids de l'interprofession qui est, on le sait, dominée par les transformateurs". Aux dires de M. Patrick Ollier : "D'autre part, alors que nombreux sont les petits producteurs qui ne peuvent pas faire valoir leurs droits, écrire dans la loi que c'est l'interprofession qui interviendra bloque le système et risque d'avoir des conséquences extrêmement graves. Nous préférerions que le Gouvernement conserve la possibilité d'intervenir, dans un souci de justice. "

Le champ d'application de la loi du 3 janvier 1969, modifiée par le présent article, ne se limite enfin pas au lait de vache, mais s'étend également aux laits de chèvre et de brebis. Or, l'aire géographique des organisations interprofessionnelles des laits de chèvre et de brebis ne couvre pas l'ensemble du territoire. Toutefois, ces interprofessions existent dans les régions où l'essentiel de la transformation est effectuée (Poitou-Charentes pour le lait de chèvre, Aveyron et Pyrénées-Atlantiques pour le lait de brebis). En outre, la loi ne concerne que les achats de lait par l'industrie de transformation et la production de fromage à partir des laits de chèvre et de brebis est souvent une production fermière effectuée dans des régions dépourvues d'outils de transformation industriel. La discontinuité géographique des organisations de ces secteurs ne fera donc pas obstacle à l'application de la loi.

Par ailleurs, le présent article remet en forme la loi du 3 janvier 1969. Les dispositions figurant ans l'article 3 sont modifiées et insérées à l'article 2 dont les dispositions actuelles sont supprimées puisque la définition des normes de composition et de qualité relève désormais de lé réglementation communautaire (directive n° 92/46/CEE du Conseil du 16 juin 1992 arrêtant des règles sanitaires pour la production de lait cru, de lait traite thermiquement et de produits à base de lait). En conséquence, l'article 4 qui définit les sanctions applicables en cas d'infractions aux décrets prévus à l'article 2 est abrogé. L'article 5 devient donc l'article 3 et les références qu'il contient sont adaptées au nouveau texte.

Enfin, le II du présent article supprime la référence à la loi du 3 janvier 1969 dans le texte de l'article L. 213-5 du code de la consommation qui énumère les cas de récidive légale en matière de conformité et de sécurité des produits de consommation. Cette suppression découle de l'abrogation de l'article 4.

Compte tenu des observations critiques présentées par quelques députés, le gouvernement a cru devoir retirer cet article 33. Votre rapporteur a pris contact avec tous les organismes représentatifs de la filière (producteurs, transformateurs privés, coopératives) qui lui ont confirmé leur attachement à une adoption "rapide" de la modification de la loi Godefroy. Ils ont rappelé leur accord sur les objectifs poursuivis qui visent à :

- "formaliser la procédure d'organisation du paiement du lait au niveau régional au moyen d'accords interprofessionnels ;

- rendre possible l'adoption de nouveaux critères (de composition, de qualité hygiénique ou d'aptitude technologique) dont l'intérêt est avéré et après négociation entre producteurs et transformateurs ;

- actualiser l'arrêté du 2 mai 1985 et notamment ses annexes, qui définissent les modalités techniques de prélèvement et d'analyse."

Votre rapporteur s'attachera, compte tenu des délais d'examen du projet de loi, à rechercher les voies d'un consensus avant le débat en séance publique.

Décision de la commission : votre commission a pris acte du retrait de cet article. Elle estime cependant urgent de parvenir à une modification de la loi "Godefroy".

Article additionnel après l'article 33

Option des SARL de famille pour l'impôt sur le revenu lorsqu'elles exercent une activité agricole

Commentaire : Cet article additionnel vise à élargir le champ d'application de l'option des SARL de famille pour l'impôt sur le revenu en autorisant ces dernières à opter lorsqu'elles réalisent une activité agricole.

Lors des débats sur la seconde loi de finances rectificative pour 1995, le Sénat a examiné un amendement présenté par notre collègue Michel Souplet et visant à élargir le champ d'application de l'option des SARL de famille pour l'impôt sur le revenu des personnes physiques en autorisant ces dernières à opter lorsqu'elles réalisent une activité agricole.

Les dispositions actuelles excluent de ce dispositif les SARL de famille n'exerçant pas une activité de nature industrielle, commerciale ou artisanale.

Comme il a été indiqué à la tribune de la Haute Assemblée :

"Un nombre croissant d'exploitations agricoles à responsabilité limitée constituées entre parents et donc soumises à l'impôt sur le revenu des personnes physiques réalisent une activité agricole et une activité commerciale, les deux étant intimement imbriquées (...). Cette connexité des activités n'est pas compatible avec la scission des activités dans deux structures juridiques différentes, une EARL -exploitation agricole à responsabilité limitée- réalisant l'activité agricole et une SARL ou une EURL -entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée- réalisant l'activité commerciale.

Ces sociétés peuvent réaliser ces opérations commerciales tout en restant assujetties à l'IRPP tant que les recettes commerciales ne dépassent pas le double seuil fixé à l'article 75 du code général des impôts, c'est-à-dire 30 % du chiffre d'affaires ou 200.000 francs. Si elles viennent à dépasser l'un de ces seuils, ces EARL basculent dans le champ d'application de l'impôt sur les sociétés, ce qui est comptablement et fiscalement très lourd pour ces sociétés, qui sont le plus souvent de petites structures.

Afin de conserver leur statut social, il pourrait être envisagé de Permettre à ces sociétés de type familial de se transformer en SARL avec la Possibilité d'option pour l'IRPP".

Cette proposition intéressante soulevait toutefois quelques difficultés techniques d'application qui devaient être préalablement expertisées. Cette expertise a été conduite conjointement avec les services ministériels concernés et les organisations professionnelles. Ces difficultés ont été aplanies, et le présent article additionnel doit pouvoir être accepté par le Sénat.

L'article 239 bis AA du code général des impôts autorise les entreprises familiales exploitées sous la forme de société à responsabilité nuitée qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale à sortir du champ d'application de l'impôt sur les sociétés au moyen d'une option pour le régime des sociétés de personnes.

Conformément aux dispositions de l'article 8 5° b du code général des impôts, le même régime des sociétés de personnes s'applique aux associés une exploitation agricole à responsabilité limitée. Toutefois, dans cette situation, la réalisation d'opérations commerciales au-delà des limites prévues à l'article 75 du code (30 % du chiffre d'affaires ou 200.000 francs de recettes titre d'un exercice) rend la société redevable de l'impôt sur les sociétés en application du 2 de l'article 206.

Le présent article additionnel vise à élargir l'option pour le régime des sociétés de personnes prévu à l'article 239 bis AA aux sociétés à responsabilité limitée qui exercent une activité agricole.

Cela permettra ainsi aux exploitations agricoles à responsabilité limitée qui viendraient à dépasser les limites fixées à l'article 75 de conserver leur assujettissement au régime des sociétés de personnes lors de leur transformation en société à responsabilité limitée à caractère familial dès lors que l'option prévue à l'article 239 bis AA sera exercée dans l'acte constatant la transformation, conformément à l'article 46 terdecies B de l'Annexe III au code général des impôts

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet

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