Article 55 (nouveau) - Aménagement du monopole de Gaz de France

Commentaire : Issu d'un amendement du gouvernement, le présent article a pour objet d'autoriser l'extension du périmètre d'intervention des régies municipales de gaz aux communes connexes non encore desservies par un réseau public de gaz.

I - RÉGIME ACTUEL

La loi du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz a, dans son article 23, prévu une dérogation au monopole et autorisé le maintien des services publics locaux de distribution du gaz en cours d'exploitation à la date de promulgation de la loi.

Il s'agissait des services locaux exploités sous forme de régies, de sociétés d'économie mixte dans lesquelles les collectivités détenaient plus de la majorité du capital, ou bien de SICAE (Sociétés d'intérêt collectif agricole pour l'électricité) ou de coopératives d'usagers.

L'article 88 de la loi d'orientation relative à l'administration territoriale de la République du 6 février 1992 a réaffirmé ce principe en l'inscrivant à l'article L. 374-2 du code des communes.

Ce dernier article a également permis une régularisation de la situation en vigueur au 1 er juillet 1991. Il a autorisé les régies créées après la loi de 1946. En effet, l'ambiguïté de la rédaction de l'article 23 a permis la création de nouvelles régies, ou l'extension de régies existantes, alors que les travaux préparatoires de la loi de nationalisation semblaient clairement en interdire la possibilité. De fait, le nombre de situations "irrégulières" était faible en 1991 : trois régies créées à Aire-sur-Adour dans les Landes en 1957, à la Réole en Gironde en 1961 et à Brou en Eure-et-Loir en 1963, deux pensions de régies existantes à Bordeaux (sur 35 communes voisines) et à Dreux (sur 10 communes), deux régies municipales d'électricité ayant étendu leur activité à la distribution du gaz à Bonneville en Haute-Savoie (1986) et à Villard-Bonnot en Isère (1988).

Aujourd'hui, la distribution non nationalisée du gaz concerne environ 400.000 usagers, soit 3 % du total des clients de gaz naturel. Le volume des ventes de ces régies est d'environ 11 milliards de Kwh alors que celui de Gaz de France est proche de 407 milliards de Kwh, soit une distribution non nationalisée d'environ 2,7 % des ventes.

Distribution non nationalisée de gaz

A la fin de 1995, on recense 16 distributeurs de gaz naturel non nationalisés (auxquels s'ajoute la société monégasque de l'électricité et du gaz de Monaco). Ils desservent 169 communes.

- Régie municipale de Dreux (12 communes)

- Syndicat intercommunal de l'usine à gaz de Huningue-Saint-Louis (4 communes)

- Service gaz et eau de la ville de Guebwiller (7 communes)

- Gaz de Barr (10 communes)

- Gaz de Strasbourg (63 communes)

- Régie municipale de Colmar (13 communes)

- Régie municipale d'électricité, de gaz et d'eau de Saint-Avold (1 commune)

- SICAE de la région de Péronne (3 communes)

- Régie municipale de distribution d'énergie de Villard-Bonnot (3 communes)

- Gaz et électricité de Grenoble (1 commune)

- Régies municipales de Bazas (1 commune)

- Société du gaz de Bordeaux (43 communes)

- Régie municipale multiservices de la ville de La Réole (3 communes)

- Energies services de Lannemezan (1 commune)

- Régie municipale d'Aire-sur-Adour (1 commune)

- Régie municipale gaz et électricité de Carmaux (3 communes).

II. LA MODIFICATION PROPOSÉE

Le présent article propose une nouvelle rédaction de l'article 88 de la loi du 6 février 1992, en y ajoutant la possibilité pour les services publics locaux de distribution du gaz en activité au 1 er janvier 1996 d'étendre leur "activité aux communes connexes à celles qu'elles desservent.

Outre la proximité géographique, cette extension comporte deux conditions :

- les communes "connexes" ne doivent pas disposer d'un réseau public de gaz,

- la rentabilité de l'investissement devra être suffisante pour que la commune puisse concéder la distribution de gaz sur son territoire. Il est précisé que "cette rentabilité sera appréciée, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État, en fonction des recettes et des dépenses prévisionnelles actualisées, y compris le montant des investissements envisagés pour réaliser la nouvelle desserte en gaz."

Cette disposition ouvre une brèche dans le strict monopole de Gaz de France en matière d'extension de la desserte de gaz naturel en France. De fait, Gaz de France raccorde chaque année environ 250 communes nouvelles à son réseau.

Toutefois, depuis plusieurs années, les régies existantes demandent l'ouverture d'un droit à l'extension de leurs activités. Des initiatives parlementaires ont été menées à plusieurs reprises en ce sens, sans néanmoins parvenir à l'adoption définitive des amendements déposés.

Par ailleurs, la Commission européenne, saisie d'une plainte déposée le Syndicat des entreprises gazières non nationalisées, a demandé à l'État français une modification du cadre juridique actuel, afin de permettre à un opérateur mieux placé que Gaz de France pour desservir une commune nouvelle d'avoir la possibilité de le faire.

C'est donc dans ce contexte qu'intervient le présent article. On notera qu'il maintient clairement les principes de la loi de 1946 et du monopole de Gaz de France, celui-ci n'étant remis en cause qu'au profit des régies et services locaux existants.

Votre commission approuve cette disposition essentiellement pragmatique qui doit permettre d'offrir un meilleur service aux usagers.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

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