TROISIÈME PARTIE - EXAMEN DES ARTICLES

Article premier (Article 1.1 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990) - Création de l'entreprise nationale France Télécom Transfert des biens


• L'article premier du projet de loi qui nous est soumis dispose que France Télécom est transformée en entreprise nationale, à compter du 31 décembre 1996. Cette entreprise est dotée d'un capital social dont plus de la moitié restera directement détenue par l'État.

L'entreprise sera régie :

- par la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990, relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, telle que modifiée et complétée par la présente loi ainsi que par le projet de loi de réglementation des télécommunications en instance de discussion ;

- par les dispositions applicables aux sociétés anonymes résultant notamment, du chapitre IV de la loi du 24 juillet 1966 qui ne seraient pas contraires à la loi du 2 juillet 1990.


L'ensemble des biens, droits et obligations, à l'exception de ceux
liés à l'enseignement supérieur des télécommunications, sont transférés à
l'entreprise nationale
France Télécom. Afin de permettre le maintien dans le
patrimoine de France Télécom des biens du domaine public qui lui avaient été
transférés en 1990 par l'État, il est mis fin à la domanialité publique de ces
biens, qui seront déclassés. Le transfert interviendra le 31 décembre 1996
et les biens seront déclassés à la même date.

Seuls les biens, droits et obligations nécessaires à l'enseignement supérieur des télécommunications sont repris par l'État. Cette mission incombe à l'État : la loi de réglementation des télécommunications a d'ailleurs posé le principe de sa prise en charge par l'État (L.35-6) à compter de 1997. Elle prévoit que les moyens d'assurer cet enseignement supérieur seront placés sous la tutelle du ministre chargé des télécommunications. Les écoles seront organisées en un ou plusieurs établissements publics à compter de la même date.


• Il est, pour finir, précisé que s'appliquera à l'entreprise nationale ainsi créée le dernier alinéa de l'article 37 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public. Rappelons que cet alinéa dispose :

« La dernière phrase de l'article 73 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales n'est pas applicable aux sociétés dont l'État détient la majorité du capital social. »

Or, cet article 73 de la loi du 24 juillet 1966 est relatif à la constitution des sociétés anonymes. Il indique :

« Art. 73 - La société anonyme est la société dont le capital est divisé en actions et qui est constituée entre les associés qui ne supportent les pertes qu'à concurrence de leurs apports. Le nombre des associés ne peut être inférieur à sept. »

Y déroger est donc nécessaire puisque le projet de loi prévoit, par ailleurs que le Conseil d'administration de France Télécom restera composé de vingt et un membres.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 2 (Article 9 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990) - Contrat de plan entre France Télécom et l'État

L'article 2 du projet de loi maintient le principe d'un contrat de plan entre France Télécom et l'État. Il n'en précise pas, pour des raisons qui se comprennent aisément, le contenu.

Il convient d'indiquer que le projet de loi de réglementation des télécommunications prévoyant que les objectifs tarifaires pluriannuels sont fixés dans le cahier des charges de France Télécom, ceux-ci n'ont plus à figurer dans le contrat de plan.

Par ailleurs, s'agissant d'une société de droit privé, les règles d'affectation des résultats relèveront des organes statutaires de la société.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 3 (Article 10-1 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990) - Conseil d'administration

Le conseil d'administration de France Télécom est régi par les articles 5 à 13 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, qui concernent notamment les sociétés anonymes dans lesquelles l'État détient directement plus de la moitié du capital social.

Par dérogation à cette loi, le conseil d'administration de France Télécom demeurera composé de 21 membres, au lieu de 18, que l'État détienne plus ou moins de 90 % du capital.

Rappelons, en effet, que l'article 5 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public prévoit que, pour les entreprises nationales, les sociétés nationales, sociétés d'économie mixte (SEM) ou sociétés anonymes (SA) majoritairement détenus par l'État, dont plus de 90 % du capital est détenu par des personnes morales de droit public, le conseil d'administration ou de surveillance comprend trois collèges de six représentants chacun.

Tant que l'État détiendra plus de 90 % du capital et conformément à l'article 5 de la loi du 26 juillet 1983, le conseil d'administration de France Télécom, sera composé de trois collèges, ayant un nombre égal de membres : représentants élus du personnel, représentants de l'État, personnalités choisies pour leur compétence. Par dérogation à cet article, chaque catégorie comportera sept membres.

Dès lors que la part de l'État dans le capital sera passée sous le seuil des 90 %, le conseil d'administration sera composé, conformément aux dispositions de l'article 6 de la loi du 26 juillet 1983, de représentants élus des personnels pour le tiers des membres du conseil. Sur les autres membres du conseil d'administration sont désignés par l'assemblée générale des actionnaires, conformément à la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, sous réserve des représentants de l'État, nommés par décret. L'État disposant de la majorité du capital social, c'est bien lui qui désignera la majorité des membres de cette catégorie.

Votre commission s'interroge sur les modalités de la protection des actionnaires minoritaires, conformément aux recommandations qu'elle avait émises dans son rapport déjà évoqué.

Les articles 7 à 13 de la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public sont également applicables au conseil d'administration de France Télécom.


• L'article 7 de la loi du 26 juillet 1983 prévoit que le conseil d'administration doit se prononcer sur les décisions relatives aux grandes orientations stratégiques, économiques, financières ou technologies de l'entreprise.


• L'article 8 de la loi du 26 juillet 1983 dispose que le conseil d'administration se réunit en séance ordinaire sur convocation du président et examine l'ordre du jour fixé par le président ou le conseil à la majorité simple. Le tiers au moins des membres du conseil d'administration peut convoquer le conseil s'il ne s'est pas réuni depuis plus de deux mois.


• L'article 9 de la loi du 26 juillet 1983 dispose que les membres du conseil d'administration disposent des moyens nécessaires à l'exercice de leur mandat (locaux, moyens de secrétariat notamment). Le conseil d'administration fixe les conditions d'accès de ses membres dans les établissements de l'entreprise.


• L'article 10 de la loi du 26 juillet 1983 fixe les règles de nomination du président du conseil d'administration qui est choisi parmi les membres du conseil, sur leur proposition et nommé par décret. Il peut être révoqué par décret.

L'État, qui gardera la majorité du capital, conservera donc la maîtrise entière de la nomination du dirigeant de France Télécom, ce qui était une condition posée par le Conseil d'État dans son anonyme (voir commentaire de l'article 5).


• L'article 11 de la loi du 26 juillet 1983 prévoit que la durée du mandat des membres des conseils d'administration est de cinq ans. En cas de vacance, le remplaçant n'exerce ses fonctions que pour la durée restant à courir jusqu'au renouvellement du conseil. Le mandat de membre du conseil d'administration est gratuit, sans préjudice du remboursement des frais exposés pour l'exercice dudit mandat.

L'article 11 régit également les règles de cumul des mandats de membre de conseil d'administration d'entreprises et d'établissements publics. Il dispose qu'un membre d'un conseil d'administration ou de surveillance d'une entreprise ou d'un établissement public ne peut détenir simultanément plus de quatre mandats.

En cas d'accession à un cinquième mandat, le membre de conseil d'administration ou de surveillance doit se démettre d'un de ses mandats dans les trois mois, faute de quoi il est réputé s'être démis de son nouveau mandat.

Enfin, l'article 11 précise que les dispositions des articles 95 et 130 de la loi du 24 juillet 1966 modifiée relative aux sociétés commerciales ne sont pas applicables aux membres du conseil d'administration ou de surveillance des entreprises ou établissements publics nommés par décret. Les articles mentionnés imposent à chaque administrateur de posséder un nombre d'actions déterminé par les statuts de la société, faute de quoi il est déclaré démissionnaire d'office.


• L'article 12 de la loi du 26 juillet 1983 dispose que les membres du conseil
d'administration nommés par décret peuvent être révoqués par décret à tout moment.

Les membres nommés par l'assemblée générale peuvent être révoqués à tout moment par l'assemblée générale.

En ce qui concerne les représentants élus du personnel au conseil d'administration, ils ne peuvent être révoqués qu'individuellement et seulement en cas de faute grave dans l'exercice du mandat d'administrateur, par décision du président du tribunal de grande instance, rendue en la forme des référés, à la demande de la majorité des membres du conseil.


• L'article 13 de la loi du 26 juillet 1983 prévoit que, dans les entreprises où des
personnes morales de droit public détiennent plus de 90 % du capital, au cas où des dissensions
graves entravent l'administration de la société, nommés par décret, peuvent être révoqués par
décret.

Pour les mêmes raisons, la totalité des membres élus par le personnel peut être révoquée par délibération de l'assemblée générale. Une telle révocation entraîne le renouvellement du conseil d'administration et ne peut intervenir qu'une fois par an. Cette disposition vise à permettre de remédier à une éventuelle situation de blocage du conseil d'administration qui mettrait en danger la continuité du fonctionnement de la société.

Pour que sa portée soit bien comprise, cette règle doit être combinée avec celle qui, à l'article 10, prévoit le maintien en fonction des actuels membres du conseil d'administration jusqu'à la date d'expiration de leur mandat. Il en résulte qu'en définitive les représentants du personnel élus l'an dernier au conseil d'administration resteront en place jusqu'au premier janvier 2001, mais que les autres membres du conseil pourraient être remplacés tout au long de cette période dès que la part de l'État sera passée sous le seuil dès 90 %.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 3 sans modification.

Article 4 (Article 23-1 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990) - Droit d'opposition de l'État à la cession ou à l'apport d'actifs

L'article 4 du projet de loi tire les conséquences du déclassement du domaine public des biens de France Télécom, prévu à l'article premier.

Il insère dans la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 un article supplémentaire, après l'article 23 relatif au domaine public de la Poste et de France Télécom.

Dans le souci de garantir la continuité du service public, une procédure spécifique est instituée afin d'éviter toute cession ou apport d'actifs à une autre personne morale qui ferait obstacle à la bonne exécution du service public confié à l'entreprise nationale. L'État est ainsi doté du pouvoir de s'opposer à ce type d'opération qui mettrait en cause la mission de service public de France Télécom.

L'État aura obligation de s'opposer à toute cession ou tout transfert des éléments d'infrastructure de réseaux nécessaires à l'exécution des missions de service public. Il pourra subordonner la réalisation de la cession ou de l'apport à la condition qu'ils ne portent pas atteinte aux obligations de France Télécom, notamment en matière de continuité du service public.

Les modalités de cette procédure d'opposition seront déterminées par la futur cahier des charges de France Télécom, approuvé par décret en Conseil d'État. Le non respect de la procédure impliquerait la nullité de l'opération.

Cet article vise, de la sorte, à permettre de garantir que, malgré le déclassement des biens de France Télécom relevant du domaine public, il ne sera pas porté atteinte à l'intégrité du réseau de l'exploitant public et à la continuité du service public.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 sans modification.

Article 5 (Article 29-1 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990) - Garantie du statut des fonctionnaires. Recrutement externe de fonctionnaires. Comité paritaire

L'article 5 du projet qui nous est soumis constitue une de ses dispositions les plus importantes d'un point de vue social. Il contient des dispositions relatives au statut des personnels, ainsi qu'à leur expression collective. L'article 5 du projet introduit dans la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, un nouvel article 29-1, au sein du chapitre VII intitulé « Personnel » .

Il tend à organiser l'évolution à moyen terme de la structure du personnel de l'entreprise nationale dont la création est décidée à l'article premier du projet.

Rappelons que France Télécom compte 155.000 agents, dont la moyenne d'âge est de 43 ans. 97 % d'entre eux sont des fonctionnaires. La pyramide des âges en 1995 est la suivante :

Le statut des personnels fonctionnaires de France Télécom demeure inchangé dans le cadre du nouveau statut de France Télécom. L'article 29 de la loi précitée prévoit qu'ils sont régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État. Les personnels, qui conservent leur statut de fonctionnaires, sont placés sous l'autorité du président de l'entreprise nationale, comme ils étaient placés sous celle du président de l'exploitant public. Le président nomme et recrute donc aux emplois de ses services.

Cette situation est conforme à l'avis du Conseil d'État, en date du 18 novembre 1993, relatif au rattachement des corps de fonctionnaires de France Telecom en cas de transformation de l'exploitant public en société anonyme.

Dans cet avis, la haute juridiction répondait aux ministres de la Fonction publique et de l'Industrie, des Postes et Télécommunications et du Commerce extérieur, demandant si des règles ou principes constitutionnels s'opposeraient à ce que des corps de fonctionnaires soient rattachés à une société anonyme et gérés par son président.

Le Conseil d'État a énoncé les conditions de la constitutionnalité du maintien du statut de fonctionnaire au personnel de France Télécom en cas de transformation de l'exploitant public en société anonyme. Ces conditions sont les suivantes :

- d'une part, le président de France Télécom doit être une « autorité subordonnée » au sens de l'article 4 de l'ordonnance du 28 novembre 1958 portant loi organique, prise en application de l'article 13 de la Constitution. Le président de France Télécom, s'il est une « autorité subordonnée », pourra se voir déléguer le pouvoir de nommer les fonctionnaires des corps rattachés au nouvel exploitant public. Sur ce point, l'avis du Conseil d'État est clair :

« On ne saurait admettre que le président de la future société anonyme France Télécom puisse se voir reconnaître la qualité « d'autorité subordonnée » au sens de l'article 4 de l'ordonnance du 28 novembre 1958 si le Gouvernement ne dispose pas à son égard du même droit de nomination et de révocation , et si la liberté d'appréciation du Gouvernement ne demeure pas entière dans l'exercice de ce pouvoir. La loi à intervenir devra donc déroger , sur ces points , au droit commun des sociétés anonymes » .

Rappelons que dans les sociétés anonymes à conseil d'administration, c'est le conseil d'administration, élu par l'assemblée générale de tous les actionnaires selon le principe une action égale une voix, qui nomme son président.

Comme indiqué dans le commentaire de l'article 3 du projet de loi, conformément à l'article 10 de la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, le président de France Télécom sera nommé et révoqué par décret, parmi les membres du conseil d'administration, au sein duquel l'État demeurera, en tout état de cause, majoritaire et sur la proposition du conseil d'administration. Le président de France Télécom peut donc être regardé comme une « autorité subordonné » ;

- la deuxième condition fixée par le Conseil d'État au maintien de fonctionnaires au sein d'une société anonyme est le respect du principe constitutionnel selon lequel « des corps de fonctionnaires de l'État ne peuvent être constitués et maintenus qu'en vue de pourvoir à l exécution de missions de service public » .

En conséquence, le Conseil d'État énonçait les quatre critères auxquels devrait satisfaire la loi de transformation de France Télécom en société anonyme.


• Les missions de service public de France Télécom doivent être définies et figurer dans son objet.

Cette condition est satisfaite tant par la loi n° 357 de réglementation des télécommunications qui charge France Télécom d'assurer le service public des télécommunications, que par l'article 3 de la loi du 2 juillet 1990, qui reste applicable et qui dispose que « France Télécom a pour objet (...) d'assurer tous services publics de télécommunications... » .


• La loi doit prévoir que le capital de la société anonyme devra rester majoritairement détenu, directement ou indirectement, par l'État.

Cette condition est satisfaite par l'article premier du projet de loi qui insère un article 1-1 dans la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990, disposant que « l'État détient directement plus de la moitié du capital social » (de France Télécom). Il convient de rappeler que l'exclusion d'une détention directe était un des voeux exprimés par le récent rapport d'information rendu public par notre commission.


• La loi doit fixer les règles essentielles d'un cahier des charges imposant à la société anonyme le respect d'obligations garantissant la bonne exécution du service public.

Sur ce point, les règles essentielles du cahier des charges de France Télécom, détaillées à l'article 8 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, imposent le respect des obligations garantissant la bonne exécution du service public. L'article 8 de la loi du 2 juillet 1990 dispose que le cahier des charges précise notamment les conditions de la desserte de tout le territoire, de l'égalité de traitement des usagers, de la qualité et de l'accessibilité des services, de leur neutralité de leur participation à l'aménagement du territoire...


• Enfin, le Conseil d'État posait comme condition le fait que la loi édicte des dispositions propres à garantir que le statut de droit privé de France Télécom ne puisse avoir pour conséquence de porter atteinte au principe de continuité du service public.

L'article 4 du projet de loi instaure une procédure d'opposition de la part de l'État contre toute cession ou apport d'infrastructure contraire à la continuité du service public.

Les conditions juridiques nécessaires au maintien de fonctionnaires dans l'entreprise nationale France Télécom sont donc satisfaites.

L'article 5 du projet de loi rappelle que les articles 29 et 30 de la loi du 2 juillet 1990 continuent d'être applicables aux personnels fonctionnaires : il s'agit des articles disposant que ces fonctionnaires sont régis par des statuts particuliers. De ce fait, les dispositions des statuts particuliers ainsi que les droits et obligations des fonctionnaires d'État demeurent applicables à l'ensemble des fonctionnaires de France Télécom.


• Une précision aux implications sociales importantes est ensuite apportée. La possibilité de procéder à des recrutements externes de fonctionnaires en position d'activité perdurera jusqu'au 1er janvier 2002, le recrutement de fonctionnaires en position de détachement restant possible au-delà de cette date, comme dans toute entreprise publique. Par ailleurs, la promotion interne par changement de corps demeure ouverte sans limitation dans le temps, ce que permettent les dispositions des statuts particuliers des corps de fonctionnaires de France Télécom.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, la date de 2002 a été fixée en concertation avec certaines des organisations représentatives du personnel qui ont accepté de négocier les conditions sociales de la transformation de France Télécom en société anonyme. Cette date ne constitue donc nullement une décision prise de manière arbitraire par le Gouvernement.

Votre commission émet cependant le souhait que les recrutements ne soient pas opérés d'un coup « pour solde de tout compte » dès l'application de la loi mais, au contraire, de façon progressive, au rythme d'apparition des besoins tout au long de la période définie.

Le tableau ci-après, qui présente les prévisions de départs « naturels » à la retraite des fonctionnaires de France Télécom -hors soutien et appui- permet d'apprécier ce rythme potentiel d'embauche de jeunes fonctionnaires.

Tout au long des années où l'arrivée de nouveaux fonctionnaires restera possible, des personnels contractuels de droit privé pourront toutefois être recrutés en parallèle sous le régime des conventions collectives.

Le premier alinéa de l'article 31 de la loi du 2 juillet 1990 ne s'appliquera pas aux personnels contractuels de l'entreprise nationale France Télécom : ils pourront donc être recrutés sans limitation qualitative ou quantitative.

Enfin la situation des agents non titulaires de droit public est inchangée. Leur contrat se poursuit avec la nouvelle société. L'article 44 -dernier alinéa- de la loi du 2 juillet 1990, qui règle leur situation n'est pas modifié.


• De nouvelles dispositions concernent la représentation et l'expression collective du personnel de France Télécom. Ces dispositions sont rendues nécessaires par la future augmentation de la proportion de personnels employés sous convention collective, augmentation qui résulte de l'évolution des modalités de recrutement à France Télécom.

Un comité paritaire est créé en vue de permettre l'expression collective des intérêts du personnel. Présidé par le président de France Télécom ou son représentant, ce comité comprend des représentants de l'entreprise, un collège représentant les agents fonctionnaires et un collège représentant les contractuels relevant de la convention collective ainsi que les agents non titulaires de droit public. Ces deux collèges se répartissent les sièges réservés aux représentants des personnels, en tenant compte de la proportion de chacune des deux catégories dans l'effectif global de l'entreprise nationale.

La création de ce comité paritaire spécifique à l'entreprise a, selon les auteurs du projet de loi, l'avantage de permettre la représentation de tous les personnels de l'entreprise, fonctionnaires et contractuels, tout en maintenant le paritarisme qui constitue, pour les fonctionnaires de France Télécom, une garantie essentielle. Il permettra aux agents fonctionnaires et à ceux qui ne le sont pas et qui relèvent soit de la convention collective soit d'un statut de droit public, d'être représentés compte tenu de leurs effectifs respectifs au sein de l'entreprise.

Rappelons qu'actuellement au sein du comité technique paritaire (CTP) de France Télécom, dont les agents contractuels peuvent être membres, l'attribution des sièges est effectuée sans qu'ils puissent exprimer leurs préférences collectives. Le décret du 21 mai 1992 relatif au CTP prévoit, en effet, qu'il est tenu compte des voix obtenues aux élections aux commissions administratives paritaires, où seuls les fonctionnaires peuvent voter.

Le comité paritaire dont l'institution est proposée tiendra lieu du comité technique paritaire prévu par l'article 15 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984.

L'article 15 dispose que « Dans toutes les administrations de l'État et dans tous les établissements publics de l'État ne présentant pas un caractère industriel ou commercial, il est institué un ou plusieurs comités techniques paritaires. Ces comités connaissent des problèmes relatifs à l'organisation et au fonctionnement des services et des projets de statuts particuliers. Ils comprennent, en nombre égal, des représentants de l'administration et des représentants des organisations syndicales de fonctionnaires. »

Toutefois, les domaines de compétence du CTP sont également confiés au comité paritaire (organisation de l'entreprise, questions relatives au recrutement des personnels et projets de statuts particuliers). Le comité sera informé de la gestion et de la marche générale de l'entreprise. Se trouve donc maintenue la dérogation de la loi du 2 juillet 1990 à l'obligation législative d'instaurer un comité d'entreprise dans les sociétés de droit privé comportant plus de cinquante salariés.

Un décret en Conseil d'État précisera les attributions, les modalités de fonctionnement et la composition du comité paritaire spécifique et de ses deux collèges.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 5 sans modification.

Article 6 (Article 30 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990) - Financement des retraites

L'article 6 du projet de loi vise à insérer au deuxième alinéa de l'article 30 de la loi précitée du 2 juillet 1990 un c) et un d). Rappelons que cet article est relatif aux retraites des agents des exploitants publics la Poste et France Télécom.

Le deuxième alinéa dispose que la liquidation et le service des pensions allouées sont effectuées par l'État. En contrepartie, les exploitants publics versent au Trésor public le montant de la retenue sur les salaires (disposition a)) et une contribution complémentaire permettant la prise en charge intégrale des dépenses (disposition b)).

Les prescriptions c) et d) introduites par l'article 6 du projet de loi visent, en réalité, à déroger au précédent système de financement des retraites pour l'entreprise nationale France Télécom.

L'article 6 du projet qui nous est soumis regroupe des dispositions dont les implications sociales sont non négligeables. Il s'agit de rien moins que la garantie de la pérennité du régime des retraites par delà l'évolution statutaire de France Télécom. Les engagements solennels donnés au personnel par le Premier ministre sont ainsi inscrits dans la loi.

(1) Les éléments du problème : les fonctionnaires relèvent du régime spécial de retraites de la fonction publique défini par le code des pensions civiles et militaires.

Dans le système actuel de financement des pensions de retraites des agents fonctionnaires de France Télécom, ces pensions sont versées directement par l'État, France Télécom remboursant chaque année à l'État, à due concurrence, le montant des charges de retraites de ses agents fonctionnaires (article 30 de la loi du 2 juillet 1990). Le remboursement s'effectue grâce à une retenue sur le traitement des fonctionnaires, au taux de 7,85 %, tel que fixé par le code des pensions civiles et militaires et à une contribution complémentaire de France Télécom qui permet la prise en charge intégrale des pensions des agents fonctionnaires retraités de France Télécom.

Le régime des pensions civiles et militaires étant un régime à prestations définies et non à cotisations libératoires comme l'est le régime général, France Télécom s'engage sur le futur pour assurer le financement, en tant que de besoin, des retraites de ses fonctionnaires.

Compte tenu des hypothèses faites sur l'emploi et la répartition par âges du personnel de France Télécom, le maintien du système conduirait à une évolution, à un rythme proche du rythme actuel jusqu'en 2005, des charges de retraites, puis à une augmentation sensible de ces charges.

Or, il ne fait pas de doute que, dans la mesure où France Télécom sera placé, à compter du 1er janvier 1998, en situation concurrentielle, tant sur le marché des services que sur celui des infrastructures de télécommunications, le niveau des charges sociales de France Télécom sera un élément déterminant de compétitivité. Pour que France Télécom puisse participer de façon dynamique à la concurrence, il est essentiel que ses charges soient équivalentes à celles de ses concurrents. Une augmentation des charges de retraites de France Télécom pénaliserait, en effet, ses capacités concurrentielles.

Les agents contractuels, pour leur part, relèvent du régime général de sécurité sociale et des régimes complémentaires ARRCO et AGIRC pour les contractuels régis par la convention collective et IRCANTEC pour les agents contractuels de droit public.

(2) Les solutions apportées à l'étranger : la plupart des opérations de changement de statut et d'ouverture du capital des opérateurs téléphoniques européens se sont accompagnées d'un traitement spécifique des dettes de retraite accumulées. On peut évoquer le cas de British Telecom, de Deutsche Telekom, de Portugal Telecom, ainsi que, de manière moins précise, de Telefonica, le Teledanmark, et de KPN.

On trouvera en annexe au présent rapport des éléments détaillés sur ce sujet.

Les opérations de changement du statut et d'ouverture du capital ont toujours été précédées, ou accompagnées, de la fermeture des régimes particuliers de retraite existants auparavant.

Dans la totalité des cas également, sauf Deutsche Telekom, les taux de cotisation « faciaux » aux régimes de retraites sont faibles. Ils doivent être cependant maniés avec prudence, des contributions exceptionnelles compensant à intervalles réguliers les insuffisances de couverture des engagements.

Les opérateurs se partagent en deux groupes : ceux qui avaient suffisamment provisionné les engagements futurs, d'une part ; ceux qui ne l'avaient pas fait, d'autre part.

Les premiers (BT, KPN) n'ont pas eu à inventer des solutions innovantes. Les seconds ont, en revanche, été confrontés à l'obligation de couvrir rapidement d'importants déficits actuariels.

Dans trois cas, cette couverture a été effectuée par affectation des produits de l'ouverture du capital (Deutsche Telekom, Portugal Telekom, Teledanmark). Pour eux, le problème des retraites a déterminé le mode de privatisation retenu.

Dans le dernier cas (Telefonica), la couverture des déficits actuariels s'est opérée par transfert de la charge à l'entreprise et, par conséquent, par endettement. Entourée d'importantes incertitudes juridiques, cette dernière opération a été sévèrement sanctionnée par le marché. Le résultat aujourd'hui est clair : l'entreprise est sous-évaluée.

Parmi d'autres, la note Telefonica de Kleinwort Benson du 11 octobre 1994 indique : « même en tenant compte de l'exceptionnel engagement de retraite, l'entreprise est une bonne opportunité » . Le vendeur initial -l'État espagnol-, s'est donc, semble-t-il, inutilement appauvri.

(3) La solution retenue par le projet de loi : la « soulte »

Le système mis en place par le projet de loi ne change rien au régime de paiement des pensions de retraites des agents fonctionnaires de France Télécom, mais il permet de garantir à France Télécom de participer à la concurrence dans des conditions satisfaisantes.

Le dispositif retenu est d'ailleurs similaire à celui recommandé par votre commission dans son rapport d'information « L'avenir de France Télécom : un défi pour la France » .

L'État continuera à garantir le versement des charges de pensions de retraites des agents fonctionnaires de France Télécom. L'article 6 de la loi met cependant en place une réforme des modalités de financement de cette charge par France Télécom.

Le paiement par France Télécom de la totalité des charges de retraite de ses agents est remplacé par une contribution « employeur » à caractère libératoire. Un tel mécanisme n'affecte pas les cotisations des salariés, maintenues à un taux de 7,85 % du traitement indiciaire brut fixé par le code des pensions civiles ou militaires.

Le taux de la contribution « employeur » est calculé afin d'égaliser, entre France Télécom et les autres entreprises du secteur des télécommunications, les niveaux de charges sociales et fiscales obligatoires pesant sur les salaires, pour les risques communs aux salariés de droit commun et aux fonctionnaires (c'est-à-dire en excluant la cotisation chômage).

Le taux de la contribution sera révisable et fixé par décret en Conseil d'État.

Un tel mécanisme n'a pas d'effet sur le niveau des prestations perçues par les agents de France Télécom.

Le transfert d'une partie des charges de retraites des fonctionnaires de France Télécom au budget général crée, sans conteste, une charge nouvelle pour l'État. Afin d'en diminuer l'importance, il est prévu que France Télécom verse à l'État une contribution forfaitaire exceptionnelle -parfois appelée « soulte » - dont le montant et les modalités de versement seront fixés en 1996 par la loi de finances.

L'article 6 exclut, pour finir, l'entreprise nationale de France Télécom du champ d'application du mécanisme des compensations vieillesse généralisée et spécifique prévues à l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale et à l'article 30 de la loi du 2 juillet 1990.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 6 sans modification.

Article 7 (Article 31-1 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990) - Négociation sociale à France Télécom

L'article 7 du projet de loi a pour objet de donner une consécration législative au principe de négociation sociale au sein de la nouvelle entreprise France Telecom. Il insère un nouvel article 31-1 dans la loi du 2 juillet 1990 précitée relative à l'organisation du service public de la Poste et des Télécommunications.

Le processus de négociation repose sur une démarche déconcentrée et contractualisée de conclusions d'accords thématiques avec les organisations représentatives du personnel, notamment dans les domaines de l'emploi, de la formation, de l'organisation et des conditions de travail, de l'évolution des métiers et de la durée du travail.

Le paragraphe I du texte proposé pour l'article 31-1 de la loi du 2 juillet 1990 organise les structures de concertation et de négociation, mises en place au niveau local et au niveau national par France Télécom après avis des organisations syndicales, qui seront chargées de suivre l'application des accords signés.

Une commission paritaire de conciliation, dont la composition sera fixée par décret, assurera la cohérence de ce suivi en favorisant le règlement amiable d'éventuels différends sur l'interprétation locale de ces accords.

Le paragraphe II du texte proposé pour l'article 31-1 de la loi du 2 juillet 1990 affirme le principe de la négociation d'un accord sur l'emploi avant le 31 décembre 1996.

Un tel accord devra porter sur une liste de sujets dont l'établissement est là aussi, selon les informations fournies à votre rapporteur, le fruit d'une concertation.

(1) Temps de travail

L'aménagement du temps de travail est un thème central de la négociation collective, qui sera discuté à France Télécom.

(2) Conditions de recrutement de personnels fonctionnaires

Il convient de rappeler qu'aux termes du deuxième alinéa du 1 du texte proposé pour l'article 29-1 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 par l'article 5 du présent projet de loi « France Télécom peut procéder jusqu'au 1er janvier 2002 à des recrutements externes de fonctionnaires pour servir auprès d'elle en position d'activité » .

Le besoin de recrutement est évalué à quelque 5.000 postes à pourvoir dans les années à venir. Votre commission émet le souhait que les recrutements de fonctionnaires soient opérés de façon progressive, conformément aux besoins, sur la période ainsi ouverte et que l'on se garde de la tentation d'un recrutement massif pour solde de tout compte.

(3) Gestion des carrières des personnels fonctionnaires et contractuels.

Il paraît souhaitable que la gestion des carrières, tant des personnels fonctionnaires -qui constitueront encore pour un certain temps la grande majorité- que pour les personnels contractuels, dont la proportion sera appelée à croître significativement, après 2002, fasse l'objet de négociations au sein de l'entreprise. C'est là, en effet, un point central de la motivation des personnels auquel la direction de France Télécom se doit d'être attentive.

(4) Départs anticipés de personnels

Cette question avait fait l'objet de propositions précises dans le récent rapport d'information rendu au nom de votre commission des Affaires économiques 12 ( * ) .

Notons, pour mémoire qu'au cours des dix dernières années, 33.000 agents de France Télécom sont partis en retraite et 15.800 ont été recrutés. Les effectifs employés par l'opérateur public de télécommunications sont donc passés de 172.200 à 155.000 alors même que jusqu'en 1990 il était une administration d'État et que, depuis le 1er janvier 1991, il était doté d'un statut équivalent à celui d'un EPIC.

Il est actuellement prévu par France Télécom que, dans les dix ans qui viennent, toutes choses égales par ailleurs, ses effectifs globaux devraient continuer de baisser pour atteindre environ 125.000 en 2005, soit une baisse de 30.000 en dix ans.

Bien entendu, si -comme cela peut être escompté-, l'irruption de la concurrence entraîne un accroissement important du marché téléphonique, de tels chiffres n'auront plus aucune validité puisqu'ils sont principalement fondés sur une progression de la demande équivalente à celle enregistrée pendant la décennie précédente.

D'aucuns tendent même à considérer que si France Télécom sait s'adapter rapidement à son nouvel environnement, elle pourrait tirer profit du flux de création nette d'emplois dont l'ensemble du secteur des télécommunications devrait bénéficier dans les prochaines années.

Cependant les chiffres précédemment cités sont les seuls sur lesquels il soit aujourd'hui possible, en l'état de la situation, de se fonder pour établir une politique prospective et leur pertinence deviendrait moins contestable si l'expansion du marché est moins forte que prévue ou, surtout, si France Télécom ne sait pas prendre le « virage » que lui imposera la concurrence.

Dans ces hypothèses, aucun licenciement n'est pour autant à craindre. Le statut de fonctionnaire l'exclut. En outre, les départs en retraite suffisent, à eux seuls, à assurer tous les ajustements nécessaires car leur nombre, d'ici à 2005, est supérieur au chiffre de 30.000 (41.000 agents vont partir). En fait, à ne jouer que sur les départs naturels, et dans une hypothèse d'activité modérée de France Télécom, on s'interdirait de recruter à la mesure des besoins de rajeunissement de l'entreprise.

Imagine-t-on de ne recruter que 11.000 jeunes en dix ans, soit la différence entre une baisse des effectifs et le nombre de départs naturels ? Un tel choix conduirait à une considérable élévation de la moyenne d'âges et ne semble pouvoir être retenu.

Il est donc indispensable de mettre en oeuvre un programme de congés de fin de carrière conjugué à une politique de recrutement volontaristes de jeunes : 30.000 à 35.000 congés de fin de carrière d'ici 2005 permettront de recruter environ 30.000 jeunes, soit 3.000 par an. Il a pu, ainsi, être parlé d'un « plan de rajeunissement » de France Télécom.

Si, par ailleurs, les recrutements pouvaient être plus importants que ceux que laisse prévoir l'hypothèse « modérée » visée plus tard, l'effet de rajeunissement serait encore plus prononcé.

Si l'on ne fait rien, France Télécom sera, en 2005, le grand groupe le plus âgé de France. Le plan de rajeunissement permettrait, selon les mêmes experts, de stabiliser la moyenne d'âge.

Si l'on ne fait rien, la pyramide de France Télécom sera totalement déséquilibrée en 2010 : une écrasante proportion de quinquagénaires, une très faible proportion d'agents entre 35 et 45 ans. France Télécom serait alors une entreprise où des agents de 27 ans sont dirigés en moyenne par des agents de 55 ans. Le plan de rajeunissement, permettrait, dès lors, toujours selon les mêmes experts, de « recylindrer » la pyramide.

Le « plan de rajeunissement » anticipe sur les flux de sortie naturels, comme le montre le schéma suivant. Cette anticipation devrait permettre, selon les experts, de retrouver dès 2010 un équilibre démographique relatif.

Un tel programme est coûteux. Selon des experts, il représente un coût actualisé de l'ordre de 20 milliards de francs. Mais il est d'une importance stratégique.

(5) L'emploi des jeunes

L'emploi des jeunes est à la fois le moyen de remédier aux problèmes qui se posent à la génération des 16-25 ans et la voie du rajeunissement de la pyramides des âges de France Télécom. L'inscription de cette question à l'ordre du jour de la négociation sociale apparaît pleinement justifiée.

(6) L'évolution des métiers

France Télécom devra sans doute opérer un redéploiement des métiers, notamment en faveur des fonctions commerciales et financières. Il est essentiel que les personnels soient étroitement associés à la réflexion sur ce sujet.

Votre commission s'est interrogée sur le point de savoir si une précision pourrait être apportée par le projet de loi à la question des oeuvres sociales. Elle vous propose, en outre, d'adopter l'article 7 sous réserve d'un amendement faisant une référence explicite aux conditions accordées au personnel pour l'attribution des actions qui lui seront proposées lors de l'ouverture du capital.

Article 8 (Article 32 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990) - Participation

L'article 8 du projet de loi vise à compléter l'article 32 de la loi précitée du 2 juillet 1990 relatif à l'intéressement et à la participation des salariés et à l'actionnariat des salariés (chapitre premier de l'ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986). Il propose d'ajouter un quatrième alinéa à l'article 32 qui rend applicable à France Télécom, à compter de l'exercice 1997, les dispositions du chapitre II (participation des salariés aux résultats de l'entreprise) et du chapitre III (plans d'épargne d'entreprise) du titre IV du livre IV du code du travail.

En effet, France Télécom, exploitant public, n'était pas concerné par le chapitre II de l'ordonnance du 21 octobre 1986, relatif à la participation des salariés aux résultats de leur entreprise, ni par le chapitre III relatif au plan d'épargne entreprise, repris par les articles du code du travail précités.

Dès l'entrée en vigueur des mesures prévues par le présent projet de loi, France Télécom, entreprise nationale, relèvera du champ de cette ordonnance qui s'applique à toutes les entreprises de plus de cinquante salariés, quel que soit leur statut. En conséquence, les contractuels de France Télécom pourront à cette date bénéficier des mesures édictées par l'ordonnance précitée. Votre commission sera cependant conduite à demander sur ce point, une précision au Gouvernement s'agissant des contractuels de droit public.

Une disposition législative était indispensable pour faire bénéficier de ces dispositions les fonctionnaires qui sont soumis, à la différence des salariés, à un régime statutaire et réglementaire. Tel est l'objet du présent article.

Il a pour effet que la participation et les plans d'épargne entreprise pourront s'appliquer à l'ensemble des personnels de l'entreprise national de France Télécom, indépendamment de leur statut. Ceci constitue sans conteste une source de motivation à long terme pour l'ensemble du personnel de France Télécom.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 8 sans modification.

Article 9 (Article 32-1 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990) - Actionnariat des salariés

L'article 9 du projet insère dans la loi du 2 juillet 1990 un article 32-1 qui étend aux agents de France Télécom les dispositions du code des sociétés relatives à l'actionnariat des salariés (articles 208.1 à 208.19 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales), ainsi que les dispositions relatives aux modalités d'application des privatisations décidées par la loi du 2 juillet 1986 (articles 11 à 14 de la loi du 6 août 1986 relative à l'actionnariat des salariés) et les dispositions relatives aux fonds communs de placement d'entreprise (chapitre III de la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux OPCVM).

Une disposition législative était, en effet, nécessaire, comme à l'article 8, pour permettre l'application de ces dispositions aux fonctionnaires.

La mesure portée par l'article 9 englobe l'ensemble des actuels agents de groupe France Télécom, indépendamment de leur statut. Elle s'applique également aux anciens agents de France Télécom, ayant été affectés pendant au moins cinq ans à France Télécom, exploitant public ou entreprise nationale. Votre commission avait justifié une telle mesure dans son rapport d'information comme une marque de reconnaissance -entièrement justifiée- du fait qu'une part de la valeur de France Télécom est « le fruit des efforts et du talent de la communauté d'hommes et de femmes » qui l'ont construit.

Le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 32-1 de la loi du 2 juillet 1990 indique que « 10 % du capital de France Télécom seront proposés au personnel de l'entreprise » , dans le cas d'une vente par l'État d'une fraction (inférieure à 49 %) du capital de France Télécom.

Pour votre rapporteur, le personnel devrait bénéficier de plusieurs avantages lors de l'acquisition d'actions de l'entreprise : une réduction pouvant aller, dans le respect du principe constitutionnel de propriété, jusqu'à 20 % lors de l'achat des titres ; à terme, la distribution d'une action gratuite pour dix achetées ainsi qu'un abondement éventuel dans le cadre d'un plan épargne entreprise.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 9 sans modification.

Article 10 (Article 49 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990) - Dispositions transitoires

L'article 10 du projet de loi insère un nouvel article dans la loi du 2 juillet 1990 précitée. Ce nouvel article 49 fixe les éléments nécessaires à la constitution et au fonctionnement initiaux de la nouvelle entreprise France Télécom. Il porte sur quatre points : les statuts initiaux de la société ; son capital social initial ; l'établissement de son bilan d'ouverture ; son premier conseil d'administration.


Les statuts initiaux seront déterminés par décret en Conseil d'État.

Leur modification interviendra conformément au droit des sociétés commerciales, c'est-à-dire par l'assemblée générale des actionnaires, dès lors que l'État ne détiendra plus la totalité du capital.


Le montant initial du capital social de l'entreprise détenu dans sa totalité par l'État au 31 décembre 1996 sera fixé par arrêté des ministres chargés de l'économie, du budget et des télécommunications. Il sera établi à partir des fonds propres de France Télécom et tiendra compte des incidences de la présente loi.


• Le bilan d'ouverture de l'entreprise nationale sera établi par un arrêté des ministres chargés de l'économie, du budget et des télécommunications sur la base du bilan de l'exploitant public au 1er janvier 1996 et du compte de résultat de celui-ci pour l'année 1996. Il pourra prendre en compte les charges exceptionnelles résultant de la loi, à savoir :

- le transfert à l'État des biens actuellement affectés à l'enseignement supérieur ;

- la charge que représente la contribution forfaitaire exceptionnelle dont l'entreprise sera redevable envers l'État dans le cadre de la réforme du financement des retraites (cf. article 6). Cette charge, d'un montant estimé actuellement entre 30 et 50 milliards de francs, sera fixée dans la loi de finances pour 1997.

Il pourra également tenir compte des allégements qui en résultent (exemple : provision pour retraites).


Le conseil d'administration actuel de France Télécom constituera le premier conseil d'administration de la nouvelle société. Les membres de ce conseil sont maintenus en fonction jusqu'à la date d'expiration de leur mandat à savoir le 1er janvier 2001.

Ceci ne fait pas obstacle à ce qu'il soit mis fin par décret à tout moment au mandat des représentants de l'État ou des personnalités qualifiées, nommées par décret, (article 12 de la loi du 26 juillet 1983) ou à une révocation de l'ensemble des membres en cas de dissensions graves (article 13 de la loi du 26 juillet 1983).

Votre commission qui a débattu de cette question estime d'ailleurs que cette possibilité aura impérativement à être mise en oeuvre dès que la part de l'État sera tombée à moins de 90 % pour garantir les droits des actionnaires minoritaires en nommant au conseil d'administration des administrateurs les représentant.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 10 sans modification.

Article 11 - Coordinations diverses avec la loi du 2 juillet 1990

L'entreprise nationale France Télécom ne sera plus soumise à certaines des dispositions précédemment applicables à l'exploitant public France Télécom. Ces dispositions, de nombre limité, n'auront donc vocation à s'appliquer, après le 31 décembre 1996, qu'à la Poste. Pour éviter toute ambiguïté, il est nécessaire de procéder à un certain nombre de modifications rédactionnelles des articles de la loi du 2 juillet 1990 modifiée par la présente loi dont la rédaction initiale de 1990 concerne à la fois France Télécom et La Poste.

Tel est l'objet de l'article 11 du projet de loi qui porte sur les dispositions suivantes :

- celles concernant la composition du conseil d'administration : les dispositions régissant le conseil d'administration de France Télécom figureront dans l'article 10-1 de la loi du 2 juillet 1990 modifiée. L'article 10, dans sa rédaction initiale résultant de la loi du 2 juillet 1990 ne concernera plus que la Poste. Les paragraphes I, II et III modifient donc l'article 10 pour en limiter l'application à La Poste ;

- celles concernant le domaine des exploitants publics. Le domaine de France Télécom sera déclassé par l'article 1-1 de la loi et soumis à des dispositions spécifiques précisées par l'article 23-1 de la loi du 2 juillet 1990 modifiée par la présente loi : l'article 23 dans sa rédaction initiale ne continuera donc de s'appliquer que pour La Poste : les paragraphes IV et V de l'article 11 procèdent aux modifications rédactionnelles correspondantes ;

- celles concernant le financement des retraites. Seuls le a) et le b) de l'article 30, tels qu'ils sont issus de la loi du 2 juillet 1990 seront applicables à La Poste.

France Télécom continuera d'être soumis au a) de cet article qui n'est pas modifié, ainsi qu'aux nouveaux c) et d) du même article qui sont introduits par la présente loi.

Les paragraphes modifiés de l'article 11 tirent les conséquences rédactionnelles de la modification du financement des retraites de France Télécom :

- celles concernant l'emploi de contractuels. Seront applicables à France Télécom les dispositions du troisième alinéa du nouvel article 29-1 (France Télécom emploie librement des agents contractuels sous le régime des conventions collectives), ainsi que celles, modifiées, de la première phrase du deuxième alinéa de l'article 31 (l'emploi des agents soumis au régime des conventions collectives n'a pas pour effet de rendre applicable à la Poste et à France Télécom les dispositions du code du travail relatives aux comités d'entreprise). Les dispositions de l'article 31 dans sa rédaction initiale issue de la loi du 2 juillet 1990 resteront, dans leur ensemble, applicables à la Poste.

Les paragraphes VIII à X de l'article 11 tirent les conséquences rédactionnelles de ces modifications.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 11 sous réserve d'un amendement rédactionnel.

Article additionnel après l'article 11 - Propriété de Télévision de France

La modification statutaire de France Télécom comporte des conséquences s'agissant de Télévision de France (TDF).

Rappelons que l'article 51 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication a posé les fondements juridiques de TDF.

L'article dispose :

« Une société dont les statuts sont approuvés par décret, et dont la majorité du capital est détenue par des personnes publiques, assure la diffusion et la transmission, en France et vers l'étranger, par tous procédés de télécommunication, des programmes des sociétés nationales mentionnées à l'article 44.

« Elle peut offrir, concurremment avec d'autres opérateurs, tous services de diffusion et de transmission aux exploitants de services de communication audiovisuelle.

« Elle a vocation à procéder aux recherches et à collaborer à la fixation des normes concernant les matériels et les techniques de rediffusion sonore et de télévision.

« Elle est soumise à la législation sur les sociétés anonymes , sous réserve des dispositions contraires de la présente loi. Un cahier des charges approuvé par décret en Conseil d'État fixe les obligations de la société, compte tenu notamment des impératifs de la défense nationale et du concours qu'elle est tenue d'apporter au fonctionnement de la commission nationale de la communication et des libertés. »

Par amendement, votre commission vous propose d'adopter un article additionnel modifiant le premier alinéa de cet article 51, de telle sorte que la formule de détention du capital « par des personnes publiques » soit remplacée par la formule, jugée plus adaptée à l'évolution statutaire de France Télécom, de détention « directement ou indirectement par l'État » .

Votre commission vous propose d'adopter cet amendement.

* 12 Cf rapport n°260 (Sénat 1995-1996).

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