Rapport n° 50 (1996-1997) de M. Josselin de ROHAN , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 30 octobre 1996

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N° 50

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997

Annexe au procès-verbal de la séance du 30 octobre 1996.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines,

Par M. Josselin de ROHAN,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Gérard Larcher, Henri Revol, Jean Huchon, Fernand Tardy, Gérard César, Louis Minetti, vice-présidents ; Georges Berchet, William Chervy, Jean-Paul Émin, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Alphonse Arzel, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jean Besson, Claude Billard, Marcel Bony, Jean Boyer, Jacques Braconnier, Gérard Braun, Dominique Braye, Michel Charzat, Marcel-Pierre Cléach, Roland Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Jacques Dominati, Michel Doublet, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard Dussaut, Jean-Paul Émorine, Léon Fatous, Hilaire Flandre, Philippe François, Aubert Garcia, François Gerbaud, Charles Ginésy, Jean Grandon, Francis Grignon, Georges Gruillot, Claude Haut, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Hugo, Bernard Joly, Edmond Lauret, Jean-François Le Grand, Félix Leyzour, Kléber Malécot, Jacques de Menou, Louis Mercier, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean-Marc Pastor, Jean Pépin, Daniel Percheron, Jean Peyrafitte, Alain Pluchet, Jean Pourchet, Jean Puech, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Roger Rigaudière, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca Serra, Josselin de Rohan, René Rouquet, Raymond Soucaret, Michel Souplet, André Vallet, Jean-Pierre Vial.

Voir le numéro :

Sénat : 511 (1995-1996).

Pêche.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi soumis à l'examen de la Haute Assemblée a pour ambition de préparer le secteur des pêches maritimes et des cultures marines à la prochaine décennie, en offrant aux hommes et aux entreprises un cadre juridique, économique et social rénové, nécessaire pour accompagner une mutation engagée déjà depuis plus de trois ans.

Cette mutation sans précédent du secteur des pêches maritimes est indispensable si, comme l'a annoncé M. Alain JUPPÉ, Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale du 24 mai 1995, le Gouvernement souhaite que « la mer redevienne un atout joué par notre pays avec plus d'audace .

Premier pays conchylicole et troisième pays pêcheur de l'Union européenne, la France dispose, à travers cette filière, d'un pôle économique important, tant en termes d'emplois directs et indirects que d'aménagement du territoire en général, du littoral en particulier. En effet, en dépit des difficultés graves que traverse cette filière depuis trois ans, elle reste un secteur économique actif, dont dépendent directement ou indirectement quelque 100.000 emplois, dont 17.500 marins-pêcheurs embarqués sur 6.000 navires et 14.000 conchyliculteurs.

Or, les « textes fondateurs concernant ce secteur sont rares : tout au plus peut-on relever le décret à valeur législative du 9 janvier 1852 sur l'exercice de la pêche maritime, modifié par les lois du 26 février 1966 et du 22 mai 1985. La loi du 5 juillet 1983 relative au régime de la saisie dans le domaine des pêches maritimes et celle du 3 juillet 1991 portant diverses dispositions en matière de pêches maritimes et de cultures marines ont permis une adaptation progressive de ce secteur à l'évolution des faits et des objectifs de la politique communautaire.

Bien que s'inscrivant dans la prolongation de ces différents textes, ce projet de loi d'orientation a un tout autre caractère. Au-delà, en effet, des mesures arrêtées depuis 1993 qui ont eu pour objet de remédier aux difficultés les plus urgentes de ce secteur, une réflexion en profondeur s'imposait pour engager la filière sur la voie de la restructuration et de la modernisation. Le Gouvernement en concertation avec les professionnels a élaboré un projet de loi fruit de cette réflexion. Ce texte vise à mieux gérer la ressource, à organiser la filière et à moderniser son statut légal, fiscal et social. En traitant l'ensemble des problèmes des pêches et des cultures marines, ce projet de loi s'apparente à la loi d'orientation agricole de 1960, qui avait permis de donner pour vingt ans un souffle nouveau à l'agriculture.

Face aux évolutions majeures de l'environnement international, communautaire et national du secteur des pêches maritimes et des cultures marines et aux nécessaires choix de modernisation, votre commission considère que ce projet de loi, attendu par la profession, est un texte courageux qui, dans un contexte européen préoccupant, permet de tracer des perspectives claires et de donner aux professionnels les moyens institutionnels et économiques de surmonter la crise profonde qu'a traversée la filière et de consolider l'équilibre encore fragile que connaît ce secteur.

Votre rapporteur a tenu, avant d'aborder l'examen des articles, à souligner, d'une part, l'attente suscitée par un tel texte dans la situation difficile que connaît le secteur, trop mal connu, de la pêche et, d'autre part, le caractère ambitieux de ce projet de loi d'orientation.

CHAPITRE PREMIER - UN PROJET DE LOI ATTENDU

« Il faut y croire, on n'a pas le choix dit un professionnel engagé dans le long et difficile parcours des négociations sur le projet de loi d'orientation. De tels propos sont révélateurs du séisme qu'à connu le secteur des pêches maritimes il y a maintenant un peu plus de trois ans, crise comparable aux événements de 1975 et 1980.

La gravité et la brutalité de la crise du secteur des pêches en France dont les causes sont multiples ont, semble-t-il, servi de « catalyseur à la prise de conscience, par les professionnels et les pouvoirs publics, de la nécessité de réorganiser en profondeur la filière 1 ( * ) . Les premières mesures adoptées, notamment sur le plan national, ont renforcé les atouts de ce secteur dont, cependant, la situation demeure préoccupante.

I. UN SECTEUR ÉPROUVÉ PAR LA CRISE

Au cours de ces dernières années, le secteur de la pêche a été en proie à une crise profonde dans l'ensemble de l'Union européenne et particulièrement en France. Cette crise a des causes multiples, d'ordre structurel aussi bien que conjoncturel.

A. UNE CRISE DONT LES FACTEURS SONT MULTIPLES

1. Les facteurs généraux de la crise

a) Un environnement économique défavorable

Des facteurs généraux -qui concernent l'ensemble des États de l'Union européenne- permettent d'expliquer l'ampleur de la crise dans le secteur des pêches maritimes.


Le problème spécifique de la raréfaction des ressources

La raréfaction de la ressource est l'une des raisons les plus fréquemment invoquées pour expliquer la crise des années 1990. Si la « surpêche a pu en effet entraîner une réelle raréfaction pour certaines espèces dans des zones géographiques déterminées, il ne faudrait pas que ce problème de ressource, reconnu et incontestable, soit amplifié de manière excessive, devenant la dimension exclusive motivant la prise de décision politique, notamment au niveau communautaire.

Comme d'autres activités de production primaire, la pêche consiste fondamentalement à prélever des biens naturels pour satisfaire des besoins économiques et sociaux. Toutefois, du fait de leurs spécificités, les ressources halieutiques marines imposent des contraintes particulières. Pour les besoins opérationnels d'analyse et de gestion des ressources, les espèces benthiques 2 ( * ) , demersales et pélagiques sont réparties en stocks dont les critères biologiques diffèrent (géographie, âge ...).

La disponibilité des ressources halieutiques est très largement déterminée par la nature et l'homme n'a qu'un contrôle très limité sur leur abondance et leur productivité. L'enjeu majeur pour les pêcheurs est de comprendre comment fonctionne chaque stock et d'adapter leurs modalités de capture, quantitativement et qualitativement, pour tirer durablement le meilleur parti de ce que la nature met à leur disposition 3 ( * ) .

Si les ressources vivantes de la mer appartiennent à la catégorie des ressources renouvelables (par la croissance et la reproduction), variables, composites et souvent inobservables, elles n'en demeurent pas moins vulnérables et limitées. Leur gestion peut être à ce titre comparée à l'utilisation des eaux souterraines. S'il est donc vrai, que la population d'un stock donné peut varier en fonction de l'évolution du milieu, il existe, à tout moment, une production maximale au-delà de laquelle le stock ne peut plus être exploité de façon durable. L'accroissement de l'effort de pêche au delà de ce point non seulement n'entraîne pas une augmentation des prises mais provoque parfois une réduction de la production annuelle.

Les activités de pêche dans l'Union européenne sont, pour certaines espèces, depuis longtemps confrontées à une raréfaction des disponibilités en poissons. Plusieurs indicateurs permettent en effet de dresser un diagnostic sur l'état des ressources : la fraction du stock sur laquelle porte l'exploitation, le taux d'exploitation de ce stock et l'abondance des adultes.

Selon l'Institut français pour la Recherche et l'Exploitation de la Mer (IFREMER), l'examen de l'état en 1995 des stocks halieutiques de l'Atlantique Nord-Est atteste que la plupart des ressources, qui présentent un intérêt primordial pour les pêcheurs français sont, pour le moins, pleinement exploitées, certaines étant nettement surexploitées (la morue en Mer du Nord, le merlan en Manche Est ou le hareng de mer Celtique). Il est même des cas où les stocks sont à un niveau si bas qu'ils ne donnent plus lieu à aucune pêche commerciale notable (la dorade rose par exemple).

Deux causes essentielles expliquent cette raréfaction : le fait que les capacités de captures actuellement mises en oeuvre dépassent les potentialités des stocks et la capture trop conséquente de jeunes individus. L'intensification excessive de l'effort de pêche a par ailleurs fait parfois tomber certaines pêcheries sous le seuil de rentabilité ; on se rappelle l'exemple de la pêche au hareng en mer du Nord, fermée à la fin des années 70. Pourtant, globalement, les réponses scientifiques au problème de la ressource restent très lacunaires. L'attitude de la Commission européenne paraît sujette à caution, et ce pour deux raisons essentielles : la première est sa tendance naturelle à fixer un « coefficient de précaution trop important, notamment en exigeant une réduction conséquente des armements, par rapport au risque réel de raréfaction des ressources halieutiques. La seconde est caractérisée par une tendance à globaliser la ressource.

Cependant quelques stocks de poissons pélagiques demeurent dans un état relativement satisfaisant . Il s'agit en particulier, de l'anchois et du thon qui offrent de réelles perspectives de développement.

Tout en prenant en compte les problèmes de la ressource, il ne faut pas que celui-ci soit la seule dimension qui motive la prise de décision politique. Ainsi le meilleur exemple est celui du hareng de Boulogne où l'interruption de la pêche totale pendant deux ans a provoqué la fermeture définitive d'une pêcherie. Quand la ressource a été reconstituée, les marchés n'existaient plus.


• Les tendances lourdes du commerce international

A cette raréfaction de la ressource, qui constitue une sorte « d'arrière-plan de la crise (la production communautaire de poisson est passée de 7 à 5,5 millions de tonnes au cours des dix dernières années), il faut ajouter les évolutions de l'environnement commercial général, qui se sont manifestées par la conclusion des négociations du cycle de l'Uruguay ayant débouché sur un abaissement général des protections tarifaires ainsi que par un démantèlement progressif des obstacles aux échanges. Les produits de la mer, ayant été inscrits au GATT (Général agreement on tariffs and trade) lors des négociations du DILLON Round en 1962, sont donc « sujets à la libéralisation des échanges internationaux, la Communauté ayant consolidé les droits des produits de la pêche.

Ce phénomène inévitable de mondialisation des marchés et d'internationalisation de la production affecte d'autant plus les producteurs européens que l'approvisionnement de l'Union européenne dans le secteur des produits de la pêche est structurellement déficitaire. C'est ainsi que l'auto-approvisionnement qui satisfaisait encore 71 % de la demande en 1983, est maintenant dépassé par les apports extérieurs et ne représente plus que 46 % des besoins.

Enfin la réduction des coûts de transports, notamment aériens, contribue à remettre en cause la situation préférentielle des productions domestiques au profit de pays bénéficiant de coûts de production moindres en particulier pour la main-d'oeuvre, pays qui tirent parti déjà, par ailleurs, de facilités tarifaires d'accès au marché européen (notamment les pays d'Amérique du Sud).


La multiplication des accords entre l'Union européenne et le reste du monde

Le grand nombre d'accords de pêches conclus entre l'Union européenne et le reste du monde, sont très favorables aux importations de produits de la pêche à des conditions tarifaires dérogatoires au tarif douanier commun. Cette politique provoque une forte concurrence pour les produits pêchés dans les eaux communautaires.

Le régime actuellement applicable à l'importation des produits de la pêche est le résultat de la politique tarifaire poursuivie par la Communauté avec ses partenaires depuis trente ans.

Ce régime s'appuie sur une réglementation douanière commune qui implique la taxation de tout produit en provenance de pays tiers à son entrée sur le marché communautaire. Les taux sont déterminés pour chaque produit à l'intérieur de la grille du tarif douanier commun (TDC).

Globalement, les taux du TDC se situent, pour la plupart des produits frais, réfrigérés et congelés dans une fourchette de 10 à 18 % et aux environs de 25 % pour les produits transformés. Certains produits tels le saumon (2 %) ou les céphalopodes (6 à 8 %) bénéficient d'un taux moins élevé.

Le caractère fortement déficitaire de l'approvisionnement, tant en matière première (poisson frais, réfrigéré et congelé) pour les besoins de l'industrie de transformation, qu'en produits transformés (poissons fumés, conserves) très prisés par les consommateurs, a conduit l'Union européenne à faciliter les importations sur le territoire communautaire en provenance de pays à moindres coûts de production ou mieux dotés sur le plan de la ressource. En raison d'une politique de libre échange prônée par l'Union européenne, ces pays disposent ainsi d'un accès privilégié sur le marché communautaire aux produits de la mer. Les propositions de la Commission européenne, qui concernent des secteurs de production déjà en proie sur le territoire de l'Union européenne, à de réelles difficultés s'inscrivent dans le cadre de réductions ou de suppressions tarifaires au TDC.

Ces exceptions tarifaires à l'égard du monde peuvent être, en premier lieu, conventionnelles s'inscrivant dans le cadre de la politique économique extérieure de développement (exemple des suppressions tarifaires consenties aux produits originaires des pays ACP signataires de la convention de LOME IV), de coopération (exemple des avantages consentis à certains pays du Maghreb tels que le Maroc ou la Tunisie ou de rapprochement des législations (exemples des pays de l'AELE, Turquie ...).

Elles peuvent, en second lieu, dépendre d'un régime d'exceptions autonomes qui concernent :

- le système de préférences généralisées (SPG) qui est un instrument autonome de politique commerciale offrant aux pays en voie de développement un tarif douanier préférentiel par apport aux pays développés, afin de stimuler le développement de leur économie.

Depuis sa création lors de la conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED) de New Dehli en 1968, le SPG a régulièrement fait l'objet d'un renouvellement.

A la suite de l'adoption de l'accord de Marrakech, la Communauté a jugé le moment opportun d'opérer une révision du SPG, avec le souci, sans remettre en cause les objectifs de développement qui demeurent la base du SPG, d'introduire une sélectivité des concessions en fonction du niveau de développement effectivement atteint par les pays concernés et de prendre en compte, par ailleurs, la sensibilité des produits pour le marché communautaire.

Ces concessions ont été précisées par le règlement CE n° 1256/96 du Conseil du 20 juin 1996 applicable à compter du 1er janvier 1997 jusqu'au 30 juin 1999. L'une des conséquences de ce règlement est que, par exemple, le surimi transformé a été classé dans la catégorie des produits sensibles, ce qui n'entraîne qu'une réduction de 30 % : le droit de base de 20 % passe donc sur ce produit à 14 % pour les pays bénéficiaires du SPG.

Dans le même temps, le régime spécial du « SPG drogue 4 ( * ) introduit en 1990 a été lui aussi reconduit jusqu'en 1999 et étendu à de nouveaux pays d'Amérique latine.

- Les importations en provenance de pays tiers pour l'approvisionnement du marché communautaire, qui constituent des exceptions autonomes à l'application du TDC.

Les apports de flottes communautaires ne pouvant satisfaire que la moitié des besoins du marché, la Communauté ouvre chaque année, à titre autonome et dans le cadre d'un bilan d'approvisionnement, certaines possibilités d'importations à droit réduit. Ces réductions sont qualifiées de « suspensions lorsqu'elles ne comportent pas de limitation quantitative et de contingents dans le cas contraire.

Ainsi près des deux-tiers des importations communautaires s'effectuent sous couvert d'un régime dérogatoire.

Ainsi, dans le cadre de sa politique internationale en matière de pêches maritimes, l'Union européenne a conclu 26 accords de pêche avec des pays tiers dont 24 sont appliqués effectivement (cf. annexe n° 2).

Ces accords représentent 30 % des captures effectuées par les pêcheurs communautaires (soit près de 2 millions de tonnes) et portent en partie sur le thon.

De plus, des mandats de négociation ont été définis au sein des instances communautaires de façon à permettre l'ouverture de discussions avec le Royaume-Uni pour les possessions d'Outre-Mer, et l'Afrique du Sud aux fins de conclusions d'accords de pêche.

Les mandats de négociations donnés à la Commission européenne prévoient, à côté du système classique des licences, la possibilité de constituer des sociétés mixtes et des associations temporaires d'entreprises, à l'image des instruments conclus avec l'Argentine et le Groenland ou actuellement en discussions avec le Venezuela, le Mexique et la Namibie.


Les carences du contrôle sur le territoire européen

Le règlement sur le contrôle des pêches au niveau européen date d'octobre 1983. Un dispositif spécifique de contrôle de l'effort de pêche a été mis en place le 1er janvier 1996 (communication par les navires de l'entrée et sortie de la zone de pêche) et une expérience de suivi des navires par satellite a été menée en 1996.

Cependant, l'insuffisance des contrôles de certains États et de l'Union européenne -qui ne dispose à cet effet que de 17 inspecteurs- favorise les importations « sauvages : on sait que certains États de l'Union « communautarisent abusivement la pêche d'États-tiers. Alors que les pêcheurs européens sont contrôlés de manière stricte dans les eaux norvégiennes, on constate une absence quasi-générale du contrôle des pêcheurs norvégiens dans les eaux communautaires.

b) Une conjoncture difficile au niveau européen

Des données d'ordre conjoncturel sont venues accentuer les déséquilibres économiques de la pêche européenne.


• La consommation

D'aucuns estiment que, contrairement, à celui d'autres denrées alimentaires, le marché des produits de la mer devrait continuer à s'accroître en raison de l'augmentation de la population, de l'urbanisation croissante, mais surtout de la valeur nutritive et diététique reconnue aux protéines animales d'origine aquatique, le poisson n'étant plus uniquement considéré comme un aliment économique mais comme une nourriture de qualité, une nourriture saine, naturelle et régénérante.

Cependant la récession économique observée en Europe en 1991 a entraîné une diminution de la demande, qui a affecté tout particulièrement les produits alimentaires et conduit les consommateurs à privilégier souvent des produits « bas de gamme (surgelés) au détriment du « haut de gamme (produits frais) beaucoup plus caractéristiques de notre production artisanale.

En 1994 la consommation totale des produits de la mer s'est élevée à 987.000 tonnes en poids net, ce qui donne un niveau de consommation moyen d'environ 18 kg par habitant.

Si la consommation « en frais , si bien ancrée dans nos habitudes alimentaires, doit se maintenir en particulier dans les pays de l'Europe du sud (France, Espagne, Italie ...), les produits surgelés (sous forme de plats cuisinés sous vide) continueront à accroître leur part de marché, en rapport avec le développement du travail féminin et l'essor de la restauration hors-foyer.

Ce dernier facteur a d'autant plus favorisé le mouvement d'importation, que l'on observe, par ailleurs, un accroissement de la « substituabilité des espèces entre elles, alors que la production française, par exemple, tirait avantage au contraire, jusqu'à une période récente, de sa forte diversité.


Les déséquilibres du marché

Comme on a d'ailleurs pu le constater pour d'autres produits, le marché est déséquilibré par des débarquements de poissons (tout particulièrement de cabillaud) capturés en grandes quantités, notamment par les flottes des pays de l'ex-URSS (Russie, États baltes), contraintes par leur désorganisation à écouler leur production sur le marché communautaire à des prix de braderie.

Le plus souvent transbordée en mer à bord d'autres navires, cette production est ensuite introduite sur le marché européen à partir des pays de l'Europe du Nord (Islande, Norvège).

Les facteurs internationaux de la crise sont multiples et complexes. Cet ensemble de données de tous ordres explique la gravité de la crise qu'a connue le secteur de la pêche maritime en Europe, tout particulièrement en France.

2. Les facteurs plus spécifiques à la France

Trois séries de raisons spécifiques à la France aggravent les déséquilibres constatés au niveau européen : les uns sont d'ordre économique, les autres d'ordre social et les derniers, et non les moindres, d'ordre financier.

a) Des facteurs économiques


Le problème des fluctuations monétaires

Les fluctuations monétaires intervenues ces dernières années au sein de l'Union européenne sont venues aggraver cette situation, induisant une évolution des courants d'échanges qui ont privilégié les pays à monnaie faible par rapport à ceux qui disposent d'une monnaie forte.

La France exporte une part importante (environ le tiers de sa production), notamment vers l'Espagne et l'Italie, marchés très rémunérateurs jusqu'à une période récente. Ces deux marchés très consommateurs et demandeurs de qualité ont été particulièrement rémunérateurs pour la pêche française.

Ceci explique que la compétitivité de notre production ait été très gravement affectée par les dévaluations monétaires intervenues en Espagne et en Italie, tandis que la faiblesse de la livre britannique permettait aux produits de la mer originaires de Grande-Bretagne, notre principal fournisseur, d'accentuer leur pénétration du marché français 5 ( * ) .

La perte estimée du chiffre d'affaires à l'exportation vers l'Espagne, pour la période 1991-1994 a été ainsi de 17 % pour une baisse de prix moyen de 31 %, l'augmentation de certains volumes n'a pas compensé la baisse de prix.

En ce qui concerne le marché italien, et pour la même période, la perte de compétitivité de nos productions s'est traduite non seulement par une diminution du prix moyen de 26 %, mais aussi par une forte réduction des volumes exportés (- 34 %) induisant une baisse importante de notre chiffre d'affaires à l'exportation vers ce pays (- 52 %).


• La dispersion de l'offre des produits de la pêche

Il existe une réelle hétérogénéité des produits de la mer . Il n'y a pas en effet un marché des produits de la mer mais des marchés : frais, congelé, transformé. Il n'y a pas une production mais des productions réalisées par des « métiers différents, sur des zones différentes, relevant d'entreprises à stratégie et à statut différents. Cette diversité peut représenter une très grande faiblesse pour la mise en oeuvre d'une stratégie de développement par une « politique de commercialisation conquérante (beaucoup de niches à exploiter, mais beaucoup de micro-filières à animer).

Il est apparu, ainsi, que la diversité des espèces produites sur le littoral français et que leur écoulement prioritaire sur le marché en déclin du frais entravaient la rationalisation d'une commercialisation, qui se caractérise déjà par une grande dispersion de l'offre face à une demande de plus en plus concentrée. Cette dispersion de l'offre a pour conséquence de renforcer le pouvoir des acheteurs d'aval.

Les produits de la mer surgelés constituent un exemple symptomatique de la dispersion de l'offre . En effet, dans ce secteur, tous produits confondus -qui se porte bien (+ 4 % en volume en 1994)-, les produits de la mer surgelés « tournent au ralenti (- 3 %). Un élargissement excessif des assortiments chez les distributeurs, en réponse à une demande accrue pour ces produits de service, a contribué, semble-t-il, à un défaut d'identification.

Face à cette diversité de produits proposés (du fait de leur origine, leur saisonnalité, leur qualité ...), le consommateur a parfois l'impression de manquer d'informations.


• Les charges liées au débarquement

La composition et le niveau des frais de débarquement sont très disparates selon les ports. Une partie des disparités s'explique par le fait que les services rendus à terre peuvent varier d'un port à un autre.

De plus, le poids de ces charges est accru par l'éparpillement des lieux de vente qui se confond parfois avec celui de débarquement.

Les causes de cet éparpillement sont liées à la variabilité de la productivité des structures à terre et au coût important des investissements dans les ports de pêche, en partie dû à la perspective de la mise aux normes européennes.

Il existe, ainsi, 46 criées en France métropolitaine (annexe n° 5), ce qui correspond à quelques unités près au nombre de ports de pêche.

Leur répartition sur le territoire est le fruit de traditions locales, plus que des besoins du marché : on recense ainsi 15 criées en Bretagne, dont 9 dans le Finistère, 8 en Loire-Atlantique-Vendée, 7 en Normandie et 7 en Méditerranée, toutes situées à proximité les unes des autres.

Les dix premières criées, soit le quart, réalisent les deux tiers des apports en valeur. Si l'interconnexion des criées est un progrès réel, les frais de débarquement sont en moyenne élevés et n'ont pas connu de diminution dans la période récente.

Une conséquence directe de cette diversité est la multiplication des ventes hors criée qui atteindraient aujourd'hui environ 40 % de la valeur des débarquements . Ceci aggrave le poids des charges pesant sur les navires qui restent sous criée, créant un phénomène de cercle vicieux.


La transformation des modes de commercialisation

Les modifications observées dans le négoce du fait de la part croissante des grandes et moyennes surfaces (GMS), qui représentent plus de 55 % de la commercialisation du poisson depuis 1995 et continue de croître de 2 % par an, produisent des effets parfois pervers.

Les différentiels de prix entre GMS et circuits traditionnels qui ne cessent de s'accroître, la propension des supermarchés à s'équiper d'un étal de marée en recourant si nécessaire au frais-emballé et un effort d'adaptation des assortiments de la part des grandes surfaces sont les raisons essentielles expliquant cette évolution. Les GMS attachent, certes, de l'importance à la qualité, mais exigent de plus en plus un approvisionnement régulier de produits standardisés au moindre coût. Les grandes enseignes, qui vendent 40 % de leur volume de poisson hebdomadaire le vendredi et le samedi, entendent de plus en plus planifier leurs promotions deux ou trois jours à l'avance et gèrent leurs besoins nationaux via un unique acheteur de centrale.

A la différence des autres produits alimentaires, dont la distribution en pré-emballés a commencé au cours des années 70, le rayon poissonnerie est resté traditionnel (« à la coupe ) en France jusqu'en 1995. L'évolution risque cependant d'être très rapide. La création, il y a deux ans, de trois plates-formes d'approvisionnement de GMS atteste de la part croissante de la grande distribution dans la commercialisation des produits aquatiques.

Ce poids des GMS ne pèse pas seulement sur les producteurs, les industriels de la conserve, de la surgélation et du saurissage doivent eux aussi parfois se plier aux exigences des GMS. Pour mémoire, en vingt ans, les deux tiers des conserveries ont fermé leurs portes.

Le développement de la politique de partenariat entre les producteurs et les GMS, à l'image de ce qui a été pratiqué dans le domaine agricole pour certains produits, est à ce jour encore insuffisant : l'application de la loi du 1 er juillet 1996 sur la loyauté dans les relations commerciales permettra peut-être à terme d'étendre aux pêches maritimes la formule d'un prix minimum d'achat ...

b) Des relations sociales spécifiques

Les règles sociales particulières qui s'appliquent aux relations entre marins ainsi que le mode de rémunération spécifique de « la part , ne sont pas étrangers à la brutalité et à la gravité de la crise des années 1993-1994.

La pêche est un secteur très ancien de l'activité économique qui s'est structurée autour de traditions de métier . Les textes applicables, remontant à 1681, ont été à peine rénovés en 1926 lors de l'élaboration du Code du Travail Maritime. « Culturellement l'activité de pêche est libre, « sans patente depuis Louis XIV. Si les marins de la pêche industrielle sont des salariés d'entreprise, travaillant en mer, il en va différemment dans la pêche artisanale avec une séparation beaucoup plus nuancée entre patron et salarié ; le patron n'est-il pas lui aussi souvent marin avant d'être employeur ?

La rémunération à la part (c'est-à-dire l'allocation au marin à titre de rémunération d'une part en nature du produit pêché puis de la vente du produit) assure le partage des risques et des bénéfices. Que se passe-t-il si la pêche est mauvaise et se vend mal ? Un salaire négatif n'est pas envisageable, un salarié ne pouvant participer aux pertes. Pourtant cela s'est vu en 1993. Ainsi, pendant longtemps, a régné un certain flou sur le statut du salarié à la pêche artisanale, ralentissant ainsi toute possibilité de réelle évolution.

c) Un contexte financier difficile

Des données financières pèsent, par ailleurs, sur la pêche française et aggravent ses fragilités. De nombreux producteurs demeurent fortement endettés ; ils doivent en effet acquitter d'importantes charges d'amortissement pour les navires de pêche récemment modernisés ou plus rarement construits. On peut estimer que ce poids en France des facteurs financiers est alourdi par un certain surinvestissement auquel s'étaient livrés nos producteurs avant la crise.

Cet aspect a été mis en évidence par le rapport d'audit sur la situation financière des navires de pêche artisanale et des organismes d'intervention 6 ( * ) .

La structure financière des entreprises de pêche est gravement déséquilibrée par la faiblesse des fonds propres et la part de l'endettement à court et moyen terme.

La pêche artisanale présente ainsi les caractéristiques d'une industrie lourde et capitalistique qui serait Financée comme une PME artisanale.

EXTRAITS DU RAPPORT D'AUDIT SUR LA PÊCHE ARTISANALE

Il s'agit en fait d'une économie d'endettement, qui était supportable tant que des chiffres d'affaires en hausse permettaient de faire face à des charges financières croissantes et qu'un taux d'inflation élevé permettait d'effacer une partie de la dette, mais qui s'est avérée très rapidement inadaptée à une évolution inverse et durable.

Le niveau des frais financiers et des amortissements a excédé très rapidement la capacité de remboursement générée par l'exploitation, ce qui a eu pour conséquence, en l'absence de réserves et de véritables fonds propres, un endettement supplémentaire à court terme onéreux, ainsi que des découverts bancaires, destinés à couvrir des résultats d'activité.

Cet endettement n'a fait que reporter et amplifier les difficultés, même si les difficultés immédiates ont pu être provisoirement masquées en trésorerie.

On constate de plus, l'inadaptation du cadre financier et comptable et la faiblesse des capacités de gestion à favoriser un financement inadéquat.

Les défauts du cadre comptable, découlant du statut d'entreprise individuelle, marqué par la confusion des caisses et des patrimoines, sont multiples et expliquent en partie la dégradation des ratios financiers : absence d'obligation de constituer des réserves durant les bonnes années, contrairement au statut de société, confusion des caisses et possibilités d'effectuer des prélèvements sur le compte de l'exploitant, en sus de la rémunération du patron (la part), ce qui explique en partie la faiblesse des fonds propres, notion qui elle-même a peu de signification pour une profession qui raisonne avant tout en trésorerie.

L'inconvénient de ce cadre est d'autant plus fort, que le patron pêcheur est avant tout un professionnel de la mer, qui privilégie la qualité technique de l'outil ainsi que l'investissement à bord par rapport à la constitution d'une réserve financière de précaution.

Cela pose bien évidemment le problème de la qualité des conseils en gestion dont bénéficient à terre les patrons pêcheurs mais aussi de la capacité de ces conseils à être entendus, ce qui renvoie au comportement individuel du patron pêcheur.

Enfin, le rapport a constaté des facteurs aggravants pour les bateaux acquis entre 1988 et 1991. En effet, les armements acquis durant cette période ont supporté des surcoûts ayant gravement déséquilibré les plans de financement et qui expliquent qu'aujourd'hui beaucoup d'entre eux soient dans une situation difficile. Ces surcoûts ont été dus notamment à l'instauration de septembre 1998 à mars 1991 d'un permis de mise en exploitation, au recours à des prêts à taux de marché et à l'inflation du coût de la construction.

B. LES RÉPERCUSSIONS D'UNE CRISE PERSISTANTE

Après « la décennie d'or constituée par les années 1980, le début des années 90 marque une rupture . Sous l'effet de l'habituelle dépression du marché en début d'année, la crise a éclaté en février 1993, puis s'est amplifiée en janvier 1994, pour atteindre son apogée en février 1994. Les prémisses de cette crise étaient détectables dés le début des années 1990.

Notre pays a ressenti profondément les effets de ces événements, qui se sont traduits notamment par une baisse du revenu des marins-pêcheurs et un ralentissement de la flotte tant en termes de navires que de marins embarqués.

1. Une baisse régulière des revenus depuis 1990

Sur la période 1980-1994, la production française des produits de la mer a progressé en francs courants de + 9,5 %. Cependant, en francs constants, on constate une quasi-stagnation de la valeur produite : de 8,45 milliards de francs en 1980 on est passé à 9,5 milliards en 1987 et 1988, années record, avant de redescendre progressivement à 8,2 milliards en 1994.

Depuis 1989, la production française des pêches maritimes (hors cultures marines) en volume s'est accrue régulièrement passant de 557.202 tonnes pour 1989 à 639.956 en 1995 ; cependant il est nécessaire d'apporter une précision sur la valeur de ces apports, qui n'a fait que baisser depuis 1989 passant de 6.563,9 millions de francs à 5.967,3 millions de francs en 1994. Les résultats de 1995 semblent attester d'une relative stabilisation du chiffre d'affaires ; mais le rapport entre les quantités produites et la valeur des apports reflète bien une réelle baisse des revenus des pêcheurs : en effet en 1989, il « suffisait de 333.000 tonnes de poissons pour obtenir un chiffre d'affaires de 4.538,5 millions de francs. En 1995, un tonnage supérieur de près de 5 % procure un chiffre d'affaires inférieur de 11 % à celui de 1989 en francs courants.

La diminution des revenus des marins-pêcheurs français est aussi à examiner au regard de la baisse des prix à la production . Alors que dans les années 80, les prix se sont maintenus autour de 12 francs, ceux-ci, dés 1990, ont connu une baisse constante, le prix moyen tombant sous la barre des 10 francs (9,55) en 1994.

Le revenu des pêcheurs, qui s'est constamment détérioré depuis plus de 5 ans, a pu se stabiliser en 1995, mais à un niveau très sensiblement inférieur à celui dégagé en 1989.

Par ailleurs la répartition des recettes entre l'armement et l'équipage, traditionnellement à 50/50, tend aujourd'hui vers un rapport plus favorable à l'armement de 55/45.

2. Un net ralentissement de la flotte de pêche au cours de ces dernières années

a) Une flotte ayant subi une forte restructuration

On assiste à une diminution régulière depuis 1986 du nombre de navires.

FLOTTE DE PÊCHE PAR TRANCHES DE LONGUEUR
(SITUATION AU 7 OCTOBRE 1996)

Cette baisse est, bien entendu, conforme aux objectifs des plans d'orientation pluriannuels (POP) successifs mis en place par l'Union européenne, notamment les plans de sorties de flotte mis en oeuvre depuis mars 1991 pour adapter les capacités de capture des bâtiments. Cependant elle est aussi une répercussion directe des tensions survenues dans ce secteur.

En effet, comme l'a constaté le rapport d'audit sur la situation financière des navires de pêche artisanale et des organismes d'intervention, l'examen des bateaux de 12 à 25 mètres avait montré une proportion significative d'armements dont les résultats financiers compromettaient la pérennité des outils. 7 ( * ) Une centaine de navires sur les 1.638 bateaux de 12 à 25 mètres, du fait de leurs difficultés d'exploitation, avaient été recensés comme économiquement non viables, une quarantaine d'entre eux ayant même un résultat d'exploitation négatif, c'est-à-dire qu'ils perdaient de l'argent à chaque sortie en mer.

b) La dégradation de la situation de l'emploi

Les effectifs de marins embarqués à la pêche font l'objet de deux modes de comptabilisation.

Traditionnellement, on se réfère au nombre de marins effectivement embarqués en fin d'année. Cependant ce mode de comptabilisation ne reflète pas l'activité de l'ensemble des marins qui ont embarqué de façon régulière en cours d'année. Aussi, le chiffre le plus significatif retenu pour les comparaisons internationales est celui des marins ayant embarqué à la pêche plus de trois mois en cours d'année.

Égal au tiers de ce qu'il était après la seconde guerre mondiale, le nombre de marins a décru régulièrement, parallèlement à la diminution de la flotte de 1990 à nos jours 8 ( * ) .

Alors qu'on comptait 19.769 marins embarqués à la pêche en 1990, ce nombre n'est plus que de 17.565 en 1995. Ainsi en cinq ans la filière a perdu plus de 2.000 marins 9 ( * ) .

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution du nombre de marins embarqués entre 1988 et 1995 :

ÉVOLUTION DES EMPLOIS À LA PÊCHE EN FRANCE DE 1988 À 1995
(NOMBRE EN MILLIERS DE MARINS EMBARQUÉS DE PLUS 3 MOIS PAR AN (sans compter la CPP)

Une telle évolution ne pouvait se faire sans heurts de toutes sortes, surtout si l'on pense qu'à cette nécessité structurelle de réduire la flotte de pêche s'est ajoutée une crise des marchés particulièrement forte à partir de 1993.

II. LES RÉPONSES COMMUNAUTAIRES ET NATIONALES

Des réponses à la fois communautaires et nationales ont été apportées à ce marasme de la pêche maritime française.

A. SUR LE PLAN COMMUNAUTAIRE

Il est nécessaire pour bien comprendre les mécanismes d'intervention européens dans le domaine de la pêche de procéder auparavant à un rappel de conditions de création de la Politique commune de la pêche (PCP) et des principaux moyens d'action de la Communauté européenne en la matière.

1. La naissance de l'Europe bleue et l'élaboration communautaire des pêches : un long cheminement

Le principe d'une politique commune de la pêche est déjà inscrit dans le traité de Rome en 1957 puisque, dans la section consacrée à la politique commune agricole, il est affirmé que le marché commun s'appliquerait aussi aux produits de la pêche (article 38). C'est ainsi qu'ont été mises en place progressivement et simultanément une organisation commune de marché (OCM) en 1970 et des mesures structurelles.

La Communauté est alors constituée de six États déficitaires en produits de la mer : la priorité est donnée à la satisfaction des besoins des consommateurs à l'instar de la PAC. Un important dispositif d'aide à la construction est mis en place dans le cadre de cet objectif.

Un changement s'opère à la fin des années 1970 . Les ressources se dégradant, l'interdiction consécutive de la pêche du hareng en mer du Nord marque un tournant dans l'histoire européenne des pêches. Elle ouvre une phase d'affichage d'une politique volontariste de gestion de l'exploitation des ressources halieutiques ; l'entrée dans la Communauté du Royaume-Uni et de l'Irlande, dont les eaux contiennent une large partie des ressources européennes, donnent à la Communauté les moyens d'une telle politique.

La période charnière dans l'élaboration de l'Europe bleue est donc l'année 1976 durant laquelle plusieurs initiatives importantes ont été prises, lesquelles ont modelé le visage de la politique commune de la pêche telle qu'elle se présente aujourd'hui.

C'est ainsi que :


• le Conseil européen de Bruxelles des 12 et 13 juillet 1976 a ouvert la voie à l'extension des limites de pêche des États membres de la Communauté à 200 milles ;


• la Commission, dans une communication au Conseil du 23 septembre 1976, a tracé les contours d'une future politique commune de la pêche, axée autour des principes suivants :

- création d'une « zone communautaire de pêche de 200 milles à partir du 1er janvier 1977,

- négociation d'accords de pêche avec les pays tiers intéressés,

- élaboration d'un régime communautaire de gestion des ressources.

Sur le plan externe, les années 1977 à 1983 sont caractérisées par l'adoption d'une attitude commune des États-membres face aux pays tiers : conclusion d'accords de pêche avec les pays de l'Europe du Nord, d'Afrique, d'Amérique, expulsion des pays de l'Est des eaux communautaires à la suite de l'échec des négociations avec ces pays, participation aux organisations internationales de pêche. C'est la résolution de la Haye du 3 novembre 1976 qui est le fondement du volet externe de la PCP.

Sur le plan interne , l'accord du 25 janvier 1983, créant une politique commune de la pêche, est le fruit de longues et difficiles négociations qui ont duré près d'huit ans ; le dernier volet de la PCP est achevé avec le règlement cadre de la politique de gestion et de conservation des ressources.

Depuis 1983, le retrait du Groenland en 1985, l'adhésion de l'Espagne et du Portugal à la Communauté qui a entraîné le doublement du nombre de pêcheurs européens ainsi que l'augmentation de 75 % de la capacité de pêche, de 45 % de la production et de 43 % de la consommation de poisson ainsi que le développement d'une politique de la recherche ont ponctué la mise en place de la politique communautaire.

Le dispositif de la PCP a été conclu pour vingt ans ; il a été cependant révisé en 1992 (CEE 3760/92) pour donner plus de cohérence à l'ensemble en mettant notamment l'accent sur le contrôle direct de l'effort de pêche communautaire et la possibilité de substituer des totaux admissibles de capture d'effort de pêche aux Totaux admissibles de capture.

Par ailleurs, un règlement établissant les niveaux d'effort de pêche à ne pas dépasser a été adopté par le Conseil des ministres le 15 juin 1995 et un dispositif spécifique de contrôle de l'effort de pêche a été mis en place le 1er janvier dernier.

2. Les instruments de la politique communautaire des pêches

La politique européenne des pêches concerne la gestion des ressources halieutiques, les structures et l'organisation des marchés ; elle a conduit à un très large transfert de compétence des pays membres à l'Union européenne en matière de pêche.

La politique commune de la pêche comporte trois volets fondamentaux :

- une politique commune des structures,

- une politique commune de la gestion et de la protection de la ressource ainsi que d'accès aux ressources halieutiques des pays tiers,

- et une politique commune des marchés.

Ces instruments sont utilisés, d'une part, dans le cadre du respect des « droits historiques (c'est-à-dire des droits de pêche exercés avant 1983) qui restreignent la capacité de chaque État à limiter l'exercice de la pêche aux non-nationaux dans la zone des 12 milles ainsi que, d'autre part, conformément au principe de la stabilité relative qui a pour objet de garantir la poursuite des activités liées directement ou indirectement à la pêche dans les régions concernées.

a) La politique structurelle

La politique structurelle de la Communauté européenne, élaborée en 1970 et redéfinie depuis, complète le dispositif visant à préserver les ressources halieutiques. Elle est constituée d'un ensemble d'aides à la construction et à la modernisation des navires de pêche, aux campagnes expérimentales ainsi qu'à l'arrêt définitif de l'exploitation.

A l'occasion de la révision des règlements des fonds structurels, le Conseil des ministres a décidé le 20 juillet 1993 d'intégrer dans les fonds le volet structurel de la politique commune de la pêche.

Sur un marché où la politique de soutien des revenus par celui des prix trouve rapidement ses limites, il reste les actions structurelles dont, au passage, les moyens sont pour la pêche dans le rapport inverse des crédits de soutien de la PAC.

En effet, alors que la politique agricole commune mobilise beaucoup de crédits provenant du Fonds Européen d'Organisation et de Garantie Agricole (FEOGA) garantie et moins de FEOGA orientation, la politique commune de la pêche utilise peu de crédits OCM (Organisation Commune de Marché) et davantage de crédits provenant des Fonds structurels (IFOP, PESCA).

La politique européenne de restructuration du secteur de la pêche s'exprime, d'une part par le biais de leviers financiers dans le cadre de l'Instrument Financier d'Orientation de la Pêche (IFOP) et d'autre part par la définition de programmes d'orientation pluriannuels (POP).

Préoccupée par l'excédent des capacités de capture de la flotte communautaire par rapport aux possibilités offertes par les différents stocks halieutiques, la Commission européenne a adopté en 1983 des programmes d'orientation pluriannuels des structures (POP) qui ont pour finalité la recherche d'une meilleure adéquation entre les ressources et les flottilles, par une maîtrise du développement de ces dernières.

Ces plans fixent des objectifs dont la réalisation conditionne tant l'octroi des aides communautaires que la légalité des aides nationales. La Cour de Justice des Communautés européennes a, d'ailleurs, indiqué que les objectifs finaux comme les objectifs intermédiaires du POP avaient une valeur impérative.

Après le premier POP (1983-1987) qui n'a pas su geler la puissance motrice installée, un deuxième POP a été adopté pour les années 1987-1991 : il a fixé comme objectif une réduction de 2,45 % en puissance de la flottille française. Le principe des licences est exclu mais celui d'un permis de mise en exploitation est instauré en 1988 : toute entrée dans la flottille doit être compensée par un retrait équivalent en puissance installée. Il faut réduire de 10 % la flotte française pour atteindre les objectifs du POP II : il a entraîné la sortie de flotte d'environ 900 bateaux en 1991.

Si l'application du POP II en France s'est déroulée dans des conditions relativement souples (du moins en début de période), le troisième POP (1992-1996) a entraîné la réduction de la flotte française de 11,5 %.

Compte tenu des événements survenus en 1993 et 1994, pour ce troisième plan, le problème n'est plus tant d'inciter des bateaux à sortir de la flotte, que de permettre des sorties, rendues inéluctables par des situations financières catastrophiques, et ce dans des conditions sociales acceptables.

En 1990, le comité scientifique Gulland a préconisé une réduction de 40 % de la capacité de la flotte européenne . Le 12 mars 1996, le commissaire européen Mme Emma Bonino a annoncé : « La surcapacité de la flotte communautaire devra être réduite, car trop de pêche tue la pêche . C'est l'objectif global du POP IV qui doit couvrir la période 1997-1999 et qui sera abordé ultérieurement dans notre rapport.

Enfin, depuis 1994, la Communauté mène une politique active quant à la réduction des disparités de développement entre les régions de l'Union dans la mesure où les taux d'intervention financière sont plus élevés dans les régions défavorisées.

b) La politique de conservation et de gestion de la ressource halieutique et d'accès aux ressources extérieures

Dans le domaine de la politique de conservation et de gestion de la ressource, la politique commune a pour finalité d'assurer la reconstitution des stocks halieutiques et d'assurer à l'industrie de la pêche une base économique viable.

Elle est fondée sur :

- la « communautarisation des ressources des zones économiques exclusives des États-membres ;

- la fixation annuelle par le Conseil des ministres des prélèvements maximum admissibles ou TAC : totaux admissibles de captures, pour les différentes espèces placées sous ce régime ;

- l'adoption de mesures techniques (réglementation des engins, des périodes de pêche, des tailles minimales de capture des différentes espèces) de manière à assurer le maintien d'un stock d'individus reproducteurs suffisant ;

- un système de surveillance destiné à contrôler l'application et le respect des mesures arrêtées. En 1996, une expérience de positionnement continu des navires de pêche par satellite a été menée dans les États membres. La Commission a proposé l'extension progressive de ce dispositif de surveillance dès 1997 afin d'équiper tous les navires de plus de 15 mètres de longueur au 1er janvier 1999.

Par ailleurs, la communauté européenne développe une politique commune d'accès aux ressources halieutiques des pays tiers. Cette politique repose sur la conclusion de différents types d'accords.

La PCP a été jusqu'en 1992, essentiellement une politique de gestion des stocks axée sur des aspects biologiques et ayant pour objet principal la prise de mesures destinées à assurer la conservation des ressources menacées de surexploitation, se résumant à la prévention des captures excessives eu égard à la productivité des stocks par la recommandation d'un contingentement global des captures par espèces. Elle s'oriente désormais vers un aménagement des pêcheries en prenant en compte non seulement l'état des ressources mais également l'activité et la situation des flottilles, afin d'agir directement sur l'effort de pêche . Le règlement CEE 3690/93 a instauré la licence de pêche communautaire, révélatrice d'une conception novatrice de la protection des ressources reposant sur un contrôle du droit de pêche.

c) La politique commune des marchés

Instaurée en 1970, révisée en 1992 puis par un règlement du Conseil du 22 décembre 1994 (n° 3318/94), la politique d'organisation des marchés des produits du poisson doit constituer une des pierres angulaires de la politique commune de la pêche. Son objectif est de prévenir de trop fortes fluctuations dans les revenus des pêcheurs et d'assurer aux consommateurs un approvisionnement régulier en poisson de bonne qualité. Elle repose sur trois principes de base que sont les mesures communes de commercialisation, les organisations de producteurs et le régime des retraites.

Ainsi, au début de chaque saison de pêche, la Communauté fixe des prix d'orientation pour les principales espèces, d'où découlent les prix de retrait du marché. Lorsque la stabilisation des prix du marché nécessite des retraits de poisson de la commercialisation, une compensation financière partielle est assurée aux pêcheurs par la Communauté.

En outre, cette dernière édicte des normes communes de qualité des produits mis en vente.

Il est important de souligner que les organisations de producteurs jouent un rôle essentiel dans cette politique de commercialisation.

3. Les mesures prises au plan communautaire

a) Les mesures d'urgence

En 1993 et 1994, au plus fort de la crise, la France avait obtenu de la Commission européenne que soit soumise au respect de prix minima l'introduction sur le territoire communautaire de produits d'importation les plus importants (morue, lieu noir, églefin, merlu, baudroie, lieu d'Alaska, saumon). Un tel mécanisme, s'il ne constitue pas en soi un facteur de relèvement des cours, permet, en effet, leur stabilisation et freine les mouvements erratiques de prix qui, même lorsqu'ils portent sur de petites quantités, ont un effet très dépressif sur le marché.

Ce dispositif n'a pas été reconduit en 1995, les cours n'ayant pas connu les brutales et fortes dépressions des années précédentes.

b) Les autres mesures

Diverses dispositions ont été prises afin de répondre aux difficultés du secteur de la pêche maritime.


• Un règlement du Conseil du 22 décembre 1994
(n° 3318/94) a révisé un certain nombre de dispositions du règlement n° 3759/92 du Conseil du 17 décembre 1992 portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l'aquaculture.

Les principales modifications apportées reprennent, pour une large part, les propositions françaises : l'Union doit apporter notamment son concours financier aux organisations de producteurs qui mettent en oeuvre des plans d'amélioration de la qualité, ce qui permet d'inciter à la valorisation de la production communautaire. Par ailleurs, l'examen par la Commission de la validité des mesures d'extension de disciplines des organisations de producteurs décidées par les États membres doit s'effectuer a posteriori et non plus a priori. Ce nouveau dispositif vise à éviter que l'action des organisations de producteurs soit perturbée par les non-adhérents de ces organisations.

Le régime de l'intervention a été également modifié : lorsque les retraits de certaines espèces communautaires excédent, pour un mois donné, 10 % de la production mensuelle d'une organisation de producteurs considérée, l'Union les finance désormais à hauteur de 93 % du prix de retrait au lieu de 85 %. Cette mesure de crise limite la co-responsabilité financière des organisations de producteurs en cas de retraits importants, afin de permettre à ces structures de poursuivre leur mission de régulation du marché.

Par ailleurs, la Commission a accepté qu'une part significative des crédits IFOP (instrument financier d'orientation de la pêche) puisse être utilisée pour le cofinancement d'un fonds de garantie des organisations de producteurs destiné à faciliter l'organisation du marché de certaines espèces sensibles.


• Au printemps 1995,
la Commission européenne a approuvé le document proposé par la France dans le cadre de l'initiative européenne PESCA qui permettra d'accompagner financièrement durant la période 1994-1999 les projets présentés par les professionnels visant, soit à la diversification de leur activité, soit à la mise en oeuvre d'initiatives susceptibles de renforcer la compétitivité du secteur.

La France dispose à ce titre d'une dotation de 28 millions d'écus.


De son côté, le Conseil des ministres de la pêche du 15 juin 1995 a décidé que l'IFOP pourrait cofinancer des mesures de préretraite pour des marins pêcheurs désireux de quitter la profession.

B. SUR LE PLAN NATIONAL

Jusqu'au début des années 80, la gestion française des pêches s'est principalement définie sur des objectifs de politique économique générale avec, de manière ponctuelle, des éléments liés à la résolution de crises. Par exemple, les Fonds régionaux d'organisation des marchés (FROM) ont été crées sous l'effet d'importants mouvements sociaux (1964, 1965 et 1967 notamment) ; de même le Fonds d'intervention et d'organisation des marchés est issu des événements de 1975 liés à un effondrement des cours.

Cependant, face à l'ampleur de la crise des années 1990, un certain nombre de mesures ont été prises parallèlement à une réflexion d'ensemble sur la politique des pêches.

1. Les mesures prises en 1993 et 1994

A la suite du plan « Mellick II sur les sorties de flotte en 1991, du plan de soutien sur le réaménagement des prêts bonifiés et du plan « Josselin de février 1993, le Gouvernement a pris, durant les crises des années 1993 et 1994, d'importantes décisions visant à conforter la situation des entreprises et des équipages et à renforcer la compétitivité de l'ensemble de la filière.

Cette politique a eu tout d'abord pour objet de remédier aux difficultés les plus urgentes. Mais au-delà de décisions à caractère conjoncturel, d'autres avaient pour objet de restaurer durablement la situation du secteur en s'attaquant aux causes nationales de la crise. Elle a trouvé sa traduction dans :

- les mesures conjoncturelles arrêtées le 20 avril 1993,

- le contrat de progrès pour la pêche signé le 28 mai 1993 et complété le 16 septembre de la même année,

- les décisions arrêtées début février 1994 après l'importante dégradation des cours.

C'est ainsi que les taux de cotisations sociales ont été allégés et harmonisés en septembre 1993 et les charges financières réduites d'environ 50 % aussi bien pour la pêche artisanale que pour la pêche industrielle. Les marins pêcheurs ont bénéficié pendant six mois, du 1er janvier 1994 au 1er juin 1994, d'une réduction de 50 % de leurs cotisations sociales. Le 1er juin 1994, le compte épargne navire qui leur garantit un revenu minimum, a pris le relais. Des mesures d'urgence d'aide aux familles ont été débloquées à deux reprises.

Par ailleurs, les banques intervenant dans le secteur des pêches maritimes ont consenti à certaines entreprises un rééchelonnement de leurs emprunts en cours. Les charges financières ont été réduites aussi bien pour la pêche artisanale que la pêche industrielle avec la baisse du taux des prêts bonifiés, le réaménagement des emprunts en cours (allongement de la durée des prêts bonifiés pour les plus de 12 mètres, prise en charge par l'État de la bonification pour les prêts non bonifiés des plus petits bateaux, maintien de la bonification des armements industriels renégociant leurs prêts).

Enfin, les entreprises ont vu leurs fonds propres renforcés : 90 millions de francs y ont été consacrés par l'État entraînant une participation équivalente des régions.

Depuis les premières mesures conjoncturelles d'avril 1993, ce sont au total 1,5 milliard de francs que le Gouvernement a consacré tant en aides d'urgence qu'en allégement des charges sociales et financières ou encore en mesures de soutien du marché.

En 1994, dans le fil des propositions du rapport Guérin sur la commercialisation des produits de la mer , l'action des pouvoirs publics s'est développée sur les questions de mise en marché. Afin de répondre aux nouvelles conditions du marché, les priorités de la politique de restructuration de la filière ont été axées sur la connaissance anticipée des apports, la normalisation des produits, la mise en réseau des opérateurs du marché, la valorisation de la production ainsi que le renforcement et la modernisation du mareyage. La mise en oeuvre de ces actions a été confiée au Fonds d'intervention et d'organisation des marchés (FIOM).

Le 9 novembre 1994 enfin, un fonds de restructuration du mareyage a été crée, dont le montant initial a été fixé à 25 millions de francs et qui doit assurer une efficacité accrue à la commercialisation des produits.

2. Le plan pour la pêche de 1995

a) Les conclusions du rapport d'audit sur la pèche artisanale

Allant au-delà des plans d'urgence, il est apparu également nécessaire, parallèlement aux efforts de rénovation de la filière, de s'attaquer aux causes de la crise tenant aux structures de la pêche artisanale et de conforter la situation de ce segment essentiel de la flottille.

Le rapport de l'audit réalisé sur la situation financière des marins de pêche artisanale et des organisations d'intervention montre, en effet, que la situation des armements est préoccupante.

Il apparaît ainsi que la situation des 173 bateaux de pêche industrielle et semi-industrielle est difficile pour les marins pratiquant la pêche des espèces « blanc de fond (cabillaud, merlan, lieu noir, hareng).

S'agissant de l'armement artisanal, la situation serait très contrastée selon les catégories de navires.

Globalement, les navires de moins de 12 mètres (5.033 bateaux, 75 % du total) qui pratiquent une pêche de proximité connaissent la situation la moins défavorable, même si certains armements, notamment en Méditerranée, connaissent de réelles difficultés. D'une façon générale, la bonne valorisation des produits, des charges d'exploitation limitées, l'évolution positive des captures pour certaines espèces, l'ancienneté des équipements déjà largement amortis expliquent que cette catégorie connaisse des difficultés moindres.

En revanche, la situation des 12-25 mètres (1.638 bateaux) est beaucoup plus préoccupante : les résultats financiers d'une proportion importante des armements compromettent la pérennité des outils. Le rapport évalue les armements en difficulté à environ 370. Une centaine d'entre eux, avant imputation de toute charge d'endettement, connaîtraient des difficultés d'exploitation et une quarantaine aurait même un résultat d'exploitation négatif.

Les difficultés seraient d'ailleurs concentrées sur quatre départements : le Finistère, le Morbihan, la Loire-Atlantique, la Charente-Maritime, qui représentent 42 % de la flotte des 12-25 mètres, mais 61 % des navires de cette catégorie en difficulté. C'est dans ces départements que se trouvent majoritairement les armements dont la viabilité n'est pas assurée : 40 % dans le Finistère, un quart dans le Morbihan et la Loire-Atlantique, 10 % en Charente-Maritime.

En revanche, les flottilles de Méditerranée et du Nord, sembleraient bien placées pour gérer la période de mutation en cours. Alors qu'elles représentent près de 20 % de la flotte des 12 à 25 mètres, on ne relève que moins de 10 % de navires en difficulté (contre une moyenne nationale de 23 %), et un nombre très réduit (moins d'une dizaine) de navires en grande difficulté.

Le rapport estime aussi qu'il existe trois catégories de situation :

- les départements en crise : Finistère, Morbihan, Loire-Atlantique, Charente-Maritime ;

- les secteurs connaissant un nombre significatif de difficultés : la Bretagne nord, la Vendée, la Normandie ;

- les secteurs confrontés à des problèmes d'ampleur limitée : l'Aquitaine, la Méditerranée et le Nord.

Mais, cette approche régionale ou départementale recouvre d'importantes disparités entre ports d'une même zone géographique.

Ces disparités s'expliquent, en premier lieu, par la représentation des différentes catégories d'armements : les petits ports, centrés sur l'accueil des moins de 12 mètres, sont moins éprouvés . De même, les différents types de pêche sont variablement affectés : les ports de fileyeurs souffrent moins que ceux de chalutage, et, parmi les chalutiers, les chalutiers pélagiques moins que les chalutiers de fond. De leur côté, les types d'espèces pêchées -les espèces communes sont de plus en plus difficiles à valoriser, tandis que les espèces nobles ou pélagiques semblent mieux résister- expliquent la diversité des situations entre ports.

Il apparaît enfin qu'au sein d'une même région, les ports qui pratiquent une pêche axée sur des espèces à forte valeur ajoutée, et qui privilégient la qualité ont un prix moyen du poisson, y compris pour les mêmes espèces, largement supérieur à celui observé dans les ports qui connaissent des marées de plus longue durée.

b) Le plan de soutien à la pêche artisanale

A la suite de cet audit des armements à la pêche artisanale, M. Jean Puech, ministre de l'agriculture et de la Pêche, a proposé un nouveau plan de soutien d'une ampleur inégalée visant à consolider la situation de la filière. Ce plan de restructuration financière de la pêche artisanale vient donc compléter les mesures prises en 1994 : la réduction des charges sociales et financières des armements, le renforcement des fonds propres, la constitution du fonds du mareyage pour un coût budgétaire de 240 millions de francs. Il comprend quatre grandes séries de mesures.


• L'amélioration de la situation des marins

La situation du marin a été améliorée en prolongeant la durée de prise en charge du chômage intempéries (avec une durée possible de 40 jours), en prenant en compte le risque « avaries techniques , en clarifiant les contrats d'engagement et la définition des charges communes, en étendant aux patrons pêcheurs les mesures de cessation d'activité anticipée (CAA) et des allocations complémentaires de ressources (ACR) et en dégageant une nouvelle enveloppe pour les secours d'urgence.

L'aide annuelle de l'État a été multipliée par quatre et est passée en 1996 de 15 millions à 60 millions de Francs.


Le soutien aux armements en difficulté

Le rapport d'audit évalue à environ 370 le nombre de navires de 12 à 25 mètres qui rencontrent de graves difficultés, soit 25 % des navires de cette catégorie.

Parmi ceux-ci, 270 connaissent un résultat d'exploitation convenable, mais supportent des charges financières excessives. Par ailleurs, 100 bateaux sont difficilement viables en raison de résultats d'exploitation négatifs ou très faibles, avant même toute imputation des charges financières.

Dans ces conditions, le plan a retenu deux types de mesures : améliorer la situation financière des navires jugés viables (allongement de la durée des prêts bonifiés ...) et permettre une sortie de flotte dans des conditions sociales et financières acceptables pour la centaine d'armements qui paraissent non viables (le patrimoine personnel du patron pêcheur étant préservé).


Le soutien aux navires de moins de 12 mètres

L'audit a montré que la plupart des bateaux de moins de 12 mètres (75 % du nombre total des navires) ne connaissent pas de difficultés financières majeures qui seraient susceptibles de compromettre la poursuite de leur activité. Certains d'entre eux, supportant cependant des charges d'investissement excessives, bénéficient à ce titre d'un allongement de la bonification des prêts bonifiés et d'une exonération des plus-values en cas de cession.


La réduction des prélèvements au débarquement

La dernière mesure du plan a visé à réduire les prélèvements sur les produits de la mer opérés actuellement au moment de leur débarquement et de leur première mise en vente. Parmi les différents postes de charges pesant sur le compte d'exploitation et qui est déduit de la part réservée à l'équipage, celui des prélèvements au débarquement est le plus important.

Cette réduction vise à prolonger, à terre, les efforts de productivité réalisés en mer.


L'exécution du plan au 1er octobre 1996

L'opération de restructuration et de désendettement en cours permet ainsi à la pêche française de tirer parti de l'atout que représentent les efforts de modernisation engagés au cours des années 1980 : la moyenne d'âge de ses navires est en effet très sensiblement inférieure à celle de certains de ses concurrents, espagnols ou écossais par exemple.

Le coût total des mesures de désendettement et d'apurement du passif a été estimé à 225 millions de francs pris en charge solidairement par l'État (75 millions de francs), les banques, les collectivités territoriales étant invitées à participer à la même hauteur.

Sur 645 dossiers examinés par le Comité Interministériel de Restructuration de la Pêche Artisanale, 642 ont reçu une proposition au 30 septembre 1996. 407 ont été retenus à la fin du mois de septembre 1996. 35 pêcheurs ayant refusé les propositions du comité, ce sont donc 372 décisions qui sont mises en oeuvre, dont 124 en allongement de prêt, 98 en désendettement et 150 en apurement du passif (cf annexe n° 3).

L'exécution du plan suit son cours puisque 85 % des décisions d'allongement de prêt ont été notifiées aux patrons concernés, et 60 % de décisions de désendettement ont été exécutées et payées pour un montant de 29 millions de francs. L'essentiel de la procédure sera achevé dans les trois premiers mois de 1997.

c) Les autres mesures prises en 1995 renforçant la compétitivité de la filière


• Les mesures conjoncturelles

Pour donner aux organisations de producteurs les moyens de faire face à la crise, des fonds ont été mis à leur disposition afin, notamment, de financer des actions de valorisation des produits, des démarches communes de commercialisation et la mise en place de fonds de garantie.

Pour 1995, les sommes débloquées à ce titre ont atteint 65 millions de francs (dont 20 millions de francs au titre des fonds de garantie), 15 millions de francs supplémentaires étant mis en réserve à cet effet.

En outre, des campagnes de promotion très ciblées ont été lancées, soit pour faciliter l'écoulement de produits débarqués en grandes quantités, soit pour mettre en avant des productions de qualité.


Les mesures structurelles

Celles-ci s'articulent en trois volets : l'amélioration de la connaissance anticipée des apports grâce aux moyens financiers du FIOM, la qualité du produit et les actions de valorisation, afin de renforcer l'attractivité commerciale de la production française et le renforcement du mareyage. Comme le rapport Guérin l'a mis en évidence, ce maillon essentiel de la filière, premier acheteur de produits de la mer et a été directement affecté par la crise, alors même qu'il a été confronté à la nécessité de consentir des investissements importants pour mettre ses équipements en conformité aux normes sanitaires communautaires. Ce secteur, encore trop émietté, face notamment à la grande distribution, traverse aujourd'hui une période de profonde restructuration, caractérisée par la disparition de nombreuses entreprises.

Outre les subventions d'aides à l'équipement ou à la création de fonds de caution inter-portuaires délivrées par le FIOM, un fonds de structuration du mareyage -co-financé par le FIOM, les banques du secteur et l'Union du mareyage français- a été mis en place, en vue d'accompagner de manière sélective les initiatives de développement menées par certaines entreprises de mareyage viables (diversifications, regroupements, modernisations...).

Ces mesures s'insèrent dans une action à plus long terme d'amélioration des échanges et de renforcement des contrôles.

Le caractère structurellement déficitaire du commerce extérieur de la pêche a conduit enfin les pouvoirs publics à prendre un certain nombre de mesures pour améliorer nos échanges par le contrôle de la qualité des importations.

Par ailleurs, le budget des pêches maritimes et cultures marines a été voté pour l'année 1996 à près de 190 millions de Francs (chapitres 44-36 et 64-36), soit une augmentation de 30 % par rapport à celui de 1995.

III. UN SECTEUR DOTÉ D'ATOUTS RÉELS MAIS DONT LA SITUATION RESTE INCERTAINE

Il y a plus de trente ans, en 1965, la production totale s'élevait à 701.000 tonnes alors qu'en 1995, elle a atteint 857.000 tonnes, soit une augmentation de plus de 20 % entre ces deux dates. Mais que de bouleversements à l'intérieur de ces deux chiffres de production. Ainsi, on a assisté à une chute de près du tiers des débarquements de poissons frais (de 494.000 t. à 348.387 t.) mais à une montée en flèche des produits congelés (de 47.000 t. à plus de 160.000 t.) et à un bond en avant de la production d'huîtres (de 65.700 t. à près de 150.000 t.).

Au niveau de la flottille, le nombre de bateaux a été réduit de près de moitié (de 13.500 à 6.639) le tonnage par unité s'est accru sensiblement (de 21,3 tjb à 26,8 tjb) et surtout la puissance installée par bateau a plus que triplé (de 47,6 kw à 150,6 kw).

Quant au nombre de pêcheurs, il s'est véritablement effondré, passant de 51.500 à 17.565 inscrits maritimes.

Enfin le commerce extérieur s'est considérablement étoffé puisque les importations ont été plus que quadruplées (de 180.600 t. à 803.000 t.) et les exportations multipliées par 12,4 (de 30.330 t. à 376.000 t.). C'est dire combien les bouleversements ont été importants au cours de ces dernières décennies.

C'est dans un tel contexte qu'il s'avère d'autant plus important de souligner les atouts incontestables de la pêche française, et ce malgré la situation difficile de restructuration et de mutation qu'elle traverse.

A. LES ATOUTS DU SECTEUR DES PÊCHES MARITIMES ET DES CULTURES MARINES

1. Une filière riche en qualité et en diversité

a) La qualité des hommes


Un métier difficile

Le premier atout du secteur des pêches tient à la qualité de ses pêcheurs : le pêcheur pratique un dur métier : il passe la plus grande partie de sa vie sur la mer, de 200 à 260 jours par an, voire 300 jours et cela par marée d'un mois, de deux semaines, de 48 heures, ou encore dans le meilleur des cas par sorties quotidiennes. Ces matelots, mécaniciens, boscos, officiers de pont et machine, patrons de pêche et équipages ont, par ailleurs, une réelle capacité d'innovation qui s'est révélée de tout temps.

Touché en mer et à terre par l'information, le pêcheur doit rapidement l'analyser et la trier, souvent sous le stress, pour prendre les décisions qui façonneront son lendemain, placé sous le signe du risque. « C'est la rançon de la modernité qui l'a fait entrer de plain-pied dans l'économie de marché internationalisée .


• Une formation pluridisciplinaire

L'exercice du métier de marin-pêcheur nécessite, par ailleurs, de nombreuses aptitudes et compétences spécifiques. La sémantique suggère à l'évidence que les compétences essentielles attendues de ce professionnel « marin soient celles liées à la conduite et à l'entretien courant d'un navire, et pour le « pêcheur à la capture des animaux vivant en mer. Par ailleurs, les besoins en formation des marins doivent intégrer les aspects importants de la sécurité. Ainsi, le marin-pêcheur de la fin du siècle est-il un gestionnaire actif de la ressource, un producteur spécialisé dans un créneau qualitatif et quantitatif donné et un agent commercial faisant la promotion de ses produits.

L'observation détaillée du secteur « production des pêches maritimes française amène rapidement à la conclusion que le pêcheur est tout aussi difficile à définir que l'agriculteur. En effet les caractéristiques du métier varient considérablement en fonction de la taille des navires (de 4 à 80 mètres), de la technique de pêche utilisée (chalut, filet, casier, drague, ligne...), de la durée d'absence du port (de un à trente jours), des zones de pêche fréquentées, des espèces de poissons capturées (poissons de fond, poissons pélagiques, crustacés, mollusques...) et de la production visée (produits frais ou congelés, entiers ou en filets...).

De cette variété résulte une grande diversité de métiers qui nécessitent une qualification plus ou moins approfondie. En matière de formation des pêcheurs, il n'existe pas d'obligations internationales ; de simples recommandations des Nations Unies ont été publiées en 1988 présentant un certain nombre d'indications plus ou moins précises. Par ailleurs, le Comité économique et social de la CEE a émis un avis le 6 juillet 1988 pour orienter la réflexion de la Commission en matière de formation.

Si différentes formations sont proposées pour permettre l'acquisition des compétences nécessaires à l'exercice des diverses fonctions identifiées à bord (matelot, officier, capitaine) pour chaque catégorie de navigation définie par l'administration nationale (petite pêche, pêche côtière, pêche au large, grande pêche), il existe un réseau complexe des qualifications et des prérogatives qui leur sont attachées, un même brevet conférant des prérogatives différentes en fonction de la navigation accomplie ou de la puissance installée à bord.

Une formation minimale est obligatoire pour pouvoir travailler à bord des navires français : celle-ci peut être obtenue soit par la voie initiale soit par la formation professionnelle (par exemple avec le certificat d'initiation nautique réservé aux adultes âgés d'au moins vingt ans). De nombreuses formations continues offrent à un individu donné la possibilité d'acquérir des connaissances plus étendues l'autorisant à exercer des fonctions supérieures ou un métier différent. Il est donc toujours possible, respectant en cela l'une des traditions les plus anciennes du monde maritime, de partir du niveau de qualification le plus modeste pour accéder au brevet de commandement le plus élevé. D'ailleurs, l'accès aux brevets de commandement à la pêche ne peut se faire que par la voie de la formation continue, les professionnels considérant que seul ce mode de formation peut permettre d'acquérir les compétences nécessaires à l'exploitation des navires de pêche.

b) Une diversité et une technicité certaines de la flottille


L'atomisation de la pêche française est souvent présentée comme un handicap. En fait, si l'on veut occuper l'espace maritime, il faut des bateaux petits, moyens et grands. Cette diversité permet à la pêche française de s'adapter plus facilement en cas de difficultés ponctuelles sur tel ou tel stock.


• Cette avance technique porte notamment sur la flotte et sur l'informatisation de la filière dans son ensemble.

Certains de nos armements développent ainsi depuis 1989 de nouvelles technologies de pêche permettant le chalutage par des fonds situés au-delà de mille mètres ; ils ont pu accéder à des espèces jusque-là mal connues et non commercialisées. La France bénéficie d'une avance technique certaine sur ses partenaires de « l'Europe bleue , les organisations de producteurs recevant d'ailleurs des aides financières pour la conduite de campagnes expérimentales nécessaires au maintien de cette avance. L'exemple de la pêche thonière tropicale, avec notamment la seconde flotte de thoniers senneurs congélateurs de l'Union européenne, est à ce titre significatif. Deux nouveaux thoniers congélateurs de 67 mètres et 107 mètres viendront en 1996 et 1997 s'ajouter aux 53 navires de cette flotte -qui représente 7 % de la flotte mondiale- ; avec 107,5 mètres le second navire sera certes le plus grand thonier de la flotte française et le premier au monde à être propulsé par un moteur diesel-électrique (6.200 kw) mais surtout le premier à transformer le thon à bord.

De plus, au cours de ces dernières années, la filière des produits de la mer a connu, comme tous les secteurs économiques, un développement très important et une généralisation des outils informatiques au sein de tous les maillons de la filière -sur les navires, dans les criées, les entreprises de l'aval (mareyage, transformation...) et les organisations professionnelles-. L'un des facteurs importants de ce développement tient à une spécificité du secteur de la pêche : il s'agit d'optimiser l'organisation du marché dans un contexte de production extrêmement aléatoire et avec des produits périssables. Le FIOM intervient de manière essentielle dans ce processus de modernisation.

c) Une stratégie de qualité

La filière tente d'intégrer, peu à peu la qualité des produits, et ce, à tous les stades de la production et de la transformation.

La qualité des produits débarqués contraste parfois avec celle des pays de l'Europe du Nord. Selon une étude récente, commanditée par les Néerlandais, sur la qualité du poisson au débarquement, c'est la France qui arrive en tête.

Cependant votre rapporteur tient à souligner qu'une stratégie de qualité ne peut être efficace que si elle implique un nombre suffisant de professionnels. Une unique entreprise travaillant sur ce concept ne peut à elle seule créer un marché. Si une labellisation est mise en place, celle-ci ne peut être que collective, intégrant les différents maillons de la filière, c'est-à-dire le producteur -et la qualité du poisson qu'il débarque-, le mareyeur et le grossiste -qui travaillent selon les exigences liées aux cahiers des charges-, et enfin le distributeur -qui valorise le savoir-faire du mareyeur et renseigne le consommateur sur la dénomination et l'origine des espèces-.

2. Une filière qui tend à s'organiser et à se restructurer

La filière de la pêche a, depuis quelques années, effectué un important effort de restructuration et de modernisation : deux exemples illustrent cette tendance.

a) Les organisations de producteurs : des acteurs indispensables de la filière


La structure des Organisations de producteurs

En France, la création de la plupart des organisations de producteurs (OP) fait suite à l'adoption du règlement communautaire de 1970. Les OP ont, dans leur majorité, entre 12 et 20 années d'existence. Nombre d'entre elles résultent d'une conversion de structures préexistantes ; tels les FROM, dont la création remonte à la crise des marchés de 1965-1964.

On recense en France 29 organisations de producteurs dont certaines, spécialisées (cf. annexe n° 4). Il existe aussi au sein de ces OP, deux fédérations nationales d'OP, l'association nationale des organisations de producteurs de la pêche maritime et des cultures marines (ANOP) et la fédération des organisations de producteurs de la pêche artisanale (FEDOPA) qui ont un statut et des missions spécifiques. Les OP regroupent au total 2.268 navires adhérents contre 5.753 non-adhérents.

Les quantités commercialisées par les OP avoisinent le total des quantités vendues sous criée en 1993, soit 277.417 tonnes pour 3.721 millions de francs -les OP commercialisent certains produits en dehors des criées-. Ainsi l'adhésion aux OP est importante, voire prédominante pour certains segments de la flottille ou certains ports. Les adhérents d'OP sont plus nombreux parmi les unités de taille importante et principalement parmi les chalutiers. Les navires adhérents d'OP ont des caractéristiques (en moyenne 15,44 m et 247 kw) nettement supérieures à celles des navires non-adhérents (en moyenne 9 m et 100 kw). De même, la moyenne d'âge des bateaux adhérents d'OP est inférieure à celles des non-adhérents (respectivement 15 et 19 ans). Cette situation tient à deux raisons principales : les petites unités qui commercialisent directement ou qui sont spécialisées dans des espèces nobles ne sont pas concernées par les prix de retrait ; les unités désirant bénéficier des services offerts par la confédération (coopératives d'armement, d'avitaillement ou de gestion) doivent adhérer à une OP coopérative.

En matière d'effectifs, il apparaît que plus de la moitié des OP ont une faible taille avec une production annuelle inférieure à 5.000 tonnes qui représente moins de 100 millions de francs.


• Les missions des Organisations de producteurs

Dès l'origine, la mission clé des OP a été le soutien des cours, en particulier par la gestion des retraits : seuls, les adhérents d'OP peuvent bénéficier d'un tel soutien. Au fil des modifications réglementaires successives de la politique commune de la pêche, le rôle des OP s'est progressivement élargi. Depuis leur création, du fait de la croissance de leurs effectifs et de l'accroissement des problèmes du marché, leur poids économique s'est affirmé. Ainsi, au niveau de leur zone d'intervention, elles sont de plus en plus fréquemment associées à la gestion de la ressource par les comités locaux et régionaux qui, en France, en ont institutionnellement la mission depuis l'ordonnance de 1945.

Concernant leur fonction initiale de gestion des retraits, la majorité des OP ont un taux de retrait supérieur à 5 %, notamment pour le poisson bleu où l'on observe les plus forts taux. Outre les retraits et reports prévus par la CEE, l'originalité du soutien des cours en France tient au fait qu'il concerne toutes les espèces jugées représentatives, dont le soutien est alors financé par le budget propre de l'OP.

Les autres fonctions des OP sont diverses. L'importance de leur implication est liée à leur taille et à leur poids économique du fait des contraintes de budget, qui est avec l'influence des producteurs non-adhérents, leur principale contrainte de fonctionnement. En effet, le budget des OP est alimenté, avec un délai par les versements de la CEE pour les espèces du règlement de base et par des cotisations des membres, qui sont fonctions de leurs chiffres d'affaires. Outre ces sources régulières de financement, il peut s'ajouter ponctuellement des subventions du FIOM relatives à des actions précises de promotion ou de contrats d'approvisionnement des industries. Ainsi, le soutien des espèces non visées par la Commission européenne est-il contraint par les montants de cotisations ; assez fréquemment, les OP se voient obligées de suspendre le soutien de certaines espèces en cas de persistantes de la baisse en cours.

Les OP participent à des politiques de diversification des apports, avec un soutien financier du FIOM, et mettent en place des systèmes de prévision des débarquements. Elles contribuent aussi à la valorisation des productions en oeuvrant pour normaliser la production (poids, tri, présentation), améliorer la qualité des produits (modalités de contrôle, catégories de qualité, moyens de conservation) et en mettant en place des politiques contractuelles d'approvisionnement des industries de transformation et des actions promotionnelles pour valoriser la production de leurs adhérents (étiquetage, salons, publicités, affiches, fiches recettes...).

Enfin, la majorité des OP pratique une politique d'information, voire de conseil, plus ou moins importante en fonction de la disponibilité des dirigeants et de leur budget. Contrairement à d'autres pays (par exemple en Grande Bretagne ou aux Pays-Bas), la participation des OP françaises à la gestion des quotas (prévue par le règlement CEE 3759/92 du 17/12/1992) reste théorique, faute de règles de réparation homogènes et cohérentes et de moyens juridiques. En effet, une OP peut décider d'un plan de pêche mais ne peut l'imposer à l'ensemble des marins-pêcheurs.


Un effort de regroupement

Il apparaît que les OP sont devenues des acteurs indispensables pour au moins un tiers de la flotte française. Leur existence et leur logique d'intervention sont reconnues par l'ensemble de la profession et appréciées par leurs adhérents, en même temps que la place grandissante des grandes surfaces dans les circuits de distribution conforte le besoin de regroupement des producteurs, voire des OP pour lesquelles on observe d'ailleurs un processus de regroupement ou d'associations régionales. Outre la géographie, leur réglementation tend à les rapprocher, en même temps que la concurrence entre les structures limite leur capacité d'initiative individuelle 10 ( * ) .

Tandis qu'il semble que l'on s'oriente plutôt au niveau européen vers des politiques concertées dépassant l'échelle des ports et des structures, au contraire les OP françaises font montre d'une grande unité et de spécificités nationales qui les différencient par rapport aux autres structures européennes.

b) Le mareyage : un maillon essentiel de la filière


• En 1994, on a recensé 468 entreprises de mareyage qui employaient environ 10.000 salariés et traitaient 325.000 tonnes, pour un chiffre d'affaires global de 15,9 milliards de francs.

Il s'agit d'une activité implantée essentiellement sur la façade Manche et en Bretagne, près des trois-quarts des entreprises y sont implantés, notamment à Boulogne, dans le sud du Finistère et le Morbihan.

Les entreprises sont toutes des PME puisque la moitié emploie 10 à 50 salariés, plus du tiers moins de 10 salariés et seulement 15 % plus de 50 salariés. Seules 6 sociétés réalisent un chiffre d'affaires de plus de 100 millions de francs, dont seulement deux plus de 200 millions de francs.

D'un point de vue global, l'approvisionnement (625.000 tonnes) s'effectue de la manière suivante :

- 393.000 tonnes en criée (63 %) ;

- 106.000 tonnes par l'importation (17 %) ;

- 54.000 tonnes par achat direct auprès des producteurs (8,6 %) ;

- 31.000 tonnes auprès d'un autre mareyeur (5 %) ;

- 42.000 tonnes auprès d'un grossiste (6,5 %).

Cette répartition est variable selon les entreprises et leur implantation sur le littoral, notamment s'agissant des parts respectives des achats en criée et de ceux réalisés directement auprès des producteurs.


• L'évolution numérique du mareyage entre 1987 et 1994 fait apparaître une réduction du nombre d'opérateurs en 7 ans.

RÉPARTITION DES MAREYEURS PAR RÉGION ET ÉVOLUTION (1987-1994) (BASE POPULATION RECENSÉE)

L'obligation de mise aux normes sanitaires des ateliers a été inscrite dans la directive européenne n° 91/493/CEE du 22 juillet 1991, transposée en droit français par l'arrêté interministériel du 28 décembre 1992 : cette réglementation a instauré une réglementation sanitaire applicable aux produits de la pêche et de l'aquaculture sauf pour les coquillages vivants dont le régime découle de la directive n° 91/492/CEE. Ces textes disposent que les établissements de manipulation, c'est-à-dire de mareyage ou de transformation, doivent respecter un certain nombre de prescriptions, tant au niveau de leur équipement que de leurs règles de fonctionnement.

Au 1er juillet 1996, 684 ateliers faisaient l'objet d'un agrément mais un certain nombre de ces autorisations concerne des établissements de grossistes ne relevant pas stricto sensu du statut de mareyeur. On peut néanmoins estimer qu'environ 90 % des 480 mareyeurs exerçant leur activité au 1er janvier 1994 se sont conformés à cette réglementation.

L'effort de modernisation entrepris devra toutefois être poursuivi par la profession, notamment dans le domaine des règles d'exploitation, car l'agrément peut être retiré à tout moment s'il est constaté que l'établissement n'est pas exploité dans le respect des normes sanitaires.

3. Une méthode d'intéressement originale

Système commun à tous les pêcheurs du monde, la rémunération à la part consistait à allouer à titre de rémunération au marin une part en nature du produit pêché. Cette part, proportionnelle à la pêche, associait directement le marin à ses aléas. On faisait « bonne ou mauvaise fortune de mer . Progressivement elle s'est transformée en une part sur le produit de la vente de la pêche, soit résultant des us et coutumes, soit négociée par contrat individuel, voire accord collectif.

Schématiquement, pour la pêche artisanale française, le modèle de partage le plus courant dans les années 70 était : une part pour l'Armement, destinée à rémunérer le navire, et une part pour l'équipage. Celle-ci était à son tour partagée en deux parts pour le capitaine (en fait l'armateur), une et demie pour le mécanicien, une pour chaque matelot, quelle que soit son ancienneté et une demie pour le mousse. Avant de partager ainsi le chiffre d'affaires de la vente du poisson, étaient prélevés pour des raisons à la fois culturelles et historiques des frais dits communs : gasoil, vivres, glace, charges sociales, nécessaires à la pêche et dont la dépense était réputée avoir profité à tous. C'était une mutualisation de certains frais généraux.

L'administration des affaires maritimes, héritière d'une longue histoire au service des gens de mer, s'est préoccupée de contrôler dans « l'intérêt des petits marins la régularité de la rémunération à la part, pour éviter les abus pouvant résulter du gonflement des frais communs ou de la dissimulation d'une partie des ventes. La loi du 13 décembre 1926 traduisait cette préoccupation dans un article 33 révélateur : « aucune déduction autre que celles stipulées ne peut être admise au détriment du marin. .

En 1996, la rémunération à la part apparaît authentiquement moderne dans son principe. Les marins ont, en fait, inventé l'intéressement bien avant les salariés terrestres et nul ne souhaite remettre en cause aujourd'hui la nécessité de maintenir ce mode de rémunération qui correspond à l'intéressement aux fruits de l'entreprise.

4. Une préoccupation constante du Gouvernement français

Le dernier atout de la pêche française est certainement l'intérêt que lui attache le Gouvernement. Dès 1993, au plus fort de la crise, le Gouvernement a répondu en mettant en place un important programme de restructuration financière de la pêche artisanale et poursuivi un effort financier conséquent dans le cadre des différentes lois de finances, tant en 1995 qu'en 1996.

Le Gouvernement a constamment tenté de faire prévaloir les intérêts des pêcheurs français auprès de Bruxelles lors de la préparation des décisions communautaires : l'adoption par la Commission du document proposé par la France dans le cadre de l'initiative européenne PESCA est, à ce titre, significative. M. Philippe VASSEUR, ministre de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation, en rappelant le 13 juillet 1995 au Guilvinec, que la pêche française était « parfaitement intégrée dans les préoccupations gouvernementales , a confirmé la nécessité d'une réflexion en profondeur pour engager la filière sur la voie de la restructuration et de la modernisation.

En 1996, une forte progression des moyens alloués par l'État, les collectivités locales et le Crédit maritime a permis la mise en oeuvre du plan de restructuration de la pêche artisanale, notamment grâce à un vaste dispositif de désendettement.

Pour 1997, dans un contexte budgétaire difficile, les dotations sont maintenues au niveau de 1996, tant en dépenses ordinaires (147 millions de francs dont 125 millions de francs de subventions FIOM et 22 millions de francs pour la restructuration des entreprises) qu'en crédits d'équipement (40,2 millions de francs en autorisations de programme), ce qui permettra de poursuivre la modernisation de ce secteur.

B. UN SECTEUR FRAGILISÉ

Malgré l'ensemble des mesures prises tant au niveau national que communautaire, et l'effort financier considérable de l'État, le secteur des pêches maritimes et cultures marines demeure dans une situation préoccupante. D'aucuns résument cette fragilité en parlant de secteur dont les bénéfices sont d'ordre agricole, mais les coûts de nature industrielle.

Ainsi eu égard à l'importance des difficultés et aux résultats mitigés de la filière en 1995, une grande réforme s'impose.

Le graphique ci-dessous atteste de la situation fragile du secteur des pêches.

Évolution de l'offre globale et de la demande globale françaises en produits de la mer (1980-1994)

1. Un secteur à réformer

Si les réponses gouvernementales apportées à la suite du rapport de MM. Mettling et Henaff remis au Premier ministre en février 1995, constituent un premier train de mesures nécessaires, elles n'ont pu, en aucun cas, traiter d'un seul coup l'ensemble des problèmes de la filière.

Ce rapport a trouvé son prolongement dans deux missions du COPERCI (comité permanent des coordinations des inspections du ministère de l'agriculture) confiées à MM. Basset, Porry, Roulon et Mme Quilleriet portant respectivement sur la modernisation du statut de l'entreprise de pêche artisanale et sur le rôle des organisations de producteurs. L'un de ces documents 11 ( * ) envisage, notamment, d'étendre à la pêche le dispositif applicable aux agriculteurs en difficulté, en transposant le dispositif « Agridif , qui repose sur la détection la plus précoce possible des difficultés, afin de déclencher, en temps utile, un plan de redressement adapté.

Les causes multiples de la crise du secteur de la pêche en France nécessitent des solutions adaptées et plurielles en fonction du stade où va s'effectuer l'intervention : il est en effet impossible de régler de manière symétrique les dysfonctionnements du marché de la pêche et les problèmes qui pèsent sur le statut légal, fiscal et social des marins-pêcheurs.

Par rapport à d'autres flottilles européennes, les coûts de production des navires français restent élevés (charges sociales, informatisation parfois excessive -sur un coût de 6 millions de francs on compte parfois 1 million de francs d'électronique-). Ainsi, les contraintes économiques et sociales pèsent lourdement sur la flotte de la pêche artisanale, nécessitant une réforme de grande ampleur.

2. Les pêches maritimes et les cultures marines en 1995 : un secteur fragile

a) La production


Une stabilisation très relative pour la pêche maritime

Le chiffre d'affaires des pêches maritimes françaises s'est élevé en 1995 à 5,6 milliards de francs correspondant à une production de 643.900 tonnes de poissons, de crustacés et mollusques (hors cultures marines) répartie en :

PRODUCTION FRANÇAISE DES PÊCHES MARITIMES ET DES CULTURES MARINES

Les résultats 1995 prolongent globalement la tendance de l'année 1994 : la stagnation des quantités débarquées en criées (- 1 %) s'accompagne d'un recul de la valeur des ventes d'environ - 3 %.

Ainsi, en 1995, si certaines espèces ont contribué à maintenir le chiffre d'affaires total des criées, du fait d'une abondance plus élevée que les années précédentes, d'autres ont, par contre, enregistré un manque à gagner important, soit du fait d'un durcissement de la réglementation (limitation de l'effort de pêche aux filets maillants dérivants), soit en raison des aléas du recrutement, très importants dans le cas du poisson bleu. Cette dépendance à l'égard de la ressource, plus forte dans le cas de flottilles spécialisées, a entraîné de fortes disparités régionales. En 1995, ce sont les entreprises basques et vendéennes qui ont été fragilisées par des mauvaises pêches d'anchois et par les limitations d'effort de pêche imposées à une partie de la flottille germonière.

Sur le début de l'année 1996, le bilan que l'on peut dresser de la situation du secteur pêche est encore réservé. De bons débarquements de bar et de rouget ont permis de compenser des déficits sur d'autres espèces comme le merlu et le merlan. Des signes plus encourageants sont toutefois décelables, avec notamment un retour de l'anchois dans le Golfe de Gascogne, et une meilleure tenue des cours de certaines espèces. La revalorisation des cours de la sole, espèce phare de la pêche française, contribue à accroître le résultat des ventes sous criées.

Selon les prévisions disponibles, le suivi journalier des ventes en criées montre un redressement des différents indicateurs. Une comparaison sur les 9 premiers mois des années 1996 et 1995 indique une augmentation des apports de 3,5 %, du chiffre d'affaires de 5,65 % avec des prix moyens en légère hausse.

Cette reprise paraît toutefois fragile car très sensible aux indicateurs « ressources , la crise du marché ayant accru la pression sur les stocks pêchés et exacerbé le poids des contraintes inhérentes à l'exploitation des ressources.


• La production contrastée des cultures marines

Le chiffre d'affaires des cultures marines s'est élevé pour sa part à 2,79 milliards de francs correspondant à une production de 227.670 tonnes, en 1995.

L'aquaculture marine regroupe deux grands volets : la conchyliculture ou aquaculture traditionnelle et les cultures marines nouvelles. Elle compte 14.085 emplois répartis dans 6.681 entreprises.

La conchyliculture demeure l'activité essentielle pour l'année 1995 avec une production de 215.000 tonnes, dont 147.000 tonnes d'huîtres (144.300 tonnes d'huîtres creuses et 2.700 tonnes d'huîtres plates), 64.000 tonnes de moules et 4.000 tonnes d'autres coquillages (palourdes, bigorneaux, ...). Après une diminution observée en 1991 et 1992 (123.000 tonnes), la production d'huîtres creuses a retrouvé, depuis 1993, son niveau de 1990. Cependant, compte tenu des conditions climatiques exceptionnelles, une forte mortalité a atteint les naissains d'huîtres creuses au cours de l'été 1994. Il en est résulté de fortes diminutions de productions dans certains bassins. La sécheresse et l'apparition d'une algue toxique (gymnodinium) en Bretagne et en Vendée observées au cours de l'été 1995 ont occasionné également des pertes de cheptels. De nouvelles mortalités de juvéniles en 1996 ne peuvent manquer d'inquiéter.

Sur un plan socio-économique, la conchyliculture occupe une place importante dans la plupart des régions littorales, souvent marquées par un taux de chômage supérieur à celui de la moyenne nationale. Elle contribue au maintien du tissu socio-économique.

Les difficultés rencontrées en conchyliculture sont liées essentiellement :

- aux risques d'épizooties, qui peuvent être aggravés, dans certains bassins, par de trop fortes densités du cheptel en élevage ;

- à la dépendance étroite du secteur vis-à-vis de la qualité des eaux augmentée par les nouvelles normes de salubrité des coquillages, plus exigeantes ;

- à l'atomisation des structures de production et de commercialisation face à une concentration de la demande de plus en plus forte qui engendre une baisse des prix et affecte la santé financière des entreprises ;

- au morcellement du parcellaire exploité sur le domaine public maritime qui freine la modernisation des exploitations.

Afin de surmonter ces difficultés, les objectifs rappelés dans le plan de secteur pour la période 1994-1999 restent notamment :

- la modernisation des entreprises, notamment par la mise aux normes sanitaires des établissements conchylicoles ;

- la restructuration des bassins conchylicoles par des aménagements de zones. L'élaboration d'une méthodologie en matière de quantification de la capacité de production des bassins permettra de proposer à la profession des schémas de réaménagement des parcs ostréicoles ou de restructuration des bouchots à moules ;

- la diversification des techniques de production, notamment par le développement de la conchyliculture en mer ouverte qui permet la colonisation de nouveaux sites ;

-l'organisation de la profession, afin de mieux répondre aux contraintes et besoins du marché des produits de la conchyliculture ;

- la poursuite des efforts de recherche en matière de pathologie, génétique et physiologie.

LES ENTREPRISES DE CULTURES MARINES EN 1995

b) Les navires


La flotte française compte environ 6.509 navires en activité au 7 octobre 1996 totalisant une puissance de 991.561 kilowatts et une capacité de 176.356 tjb.

Elle se répartit, au 1er janvier 1996, en 164 navires de plus de 25 mètres correspondant à des navires de pêche semi-industrielle et industrielle, 1.582 navires de pêche artisanale, hauturière et côtière (de 12 à 25 mètres) et 4.847 petits côtiers d'une longueur inférieure à 12 mètres.

La Bretagne représente 41 % de la puissance totale, les trois régions méditerranéennes 17,3 %, chacune des autres régions de la façade Manche-Atlantique de 5 % (Haute-Normandie, Poitou-Charentes, Aquitaine à 10 % (Nord-Pas-de-Calais - Picardie, Basse-Normandie, Pays de Loire).

On recense actuellement 5.955 entreprises d'armement à la pêche dont 138 de type sociétaire (le détail est précisé dans le commentaire de l'article 8).


• Avant 1992, le rythme annuel de construction de navires armés à la pêche artisanale était d'environ 40 à 50 par an. Un record de construction a été atteint en 1988 avec 118 nouveaux bateaux.
Actuellement on compte 2 à 3 constructions par an : ce chiffre est notablement insuffisant puisqu'entre temps la flotte vieillit. Il faudrait dès lors construire une quinzaine au moins de navires chaque année pour ne pas être confronté rapidement à une obsolescence totale de la flottille artisanale.

Par ailleurs, les aides à la construction ont été momentanément gelées en avril 1996.

c) Les effectifs


• Les effectifs pour 1995 (17.565 marins) et les prévisions pour 1996 attestent de la poursuite d'une baisse régulière du nombre de marins en France.

Ce recensement de la population maritime est possible en France grâce à l'inscription maritime et aux fichiers du Centre administratif des affaires maritimes (CAAM). Cette évolution de la diminution des effectifs de marins se retrouve un peu partout en Europe même s'il est extrêmement difficile, par exemple sur l'arc Atlantique, de trouver le nombre d'actifs de la pêche de l'Écosse à l'Andalousie.


• Selon l'UNEDIC, le nombre de demandeurs d'emploi indemnisés à la pêche était de 707 en mars 1990, 576 en mars 1991, 511 en mars 1992, 479 en mars 1993, 477 en mars 1994 et 294 en 1995, soit une baisse continuelle dont le rythme s'est ralenti pour se stabiliser en 1994. Le dernier chiffre, fortement à la baisse, s'explique par la mise en place par l'UNEDIC d'un nouveau système de comptage.

La proportion de chômeurs indemnisés est établie aux environs de 3,25 % de la population active du secteur en 1994 et 1,68 % en 1995 avec le nouveau système. Cependant ces chiffres doivent être maniés avec précaution compte tenu des incertitudes qui reposent sur la comptabilisation du chômage à la pêche.

3. Une tendance lourde à la dégradation des termes de l'échange

a) Un déficit chronique de la balance commerciale

Le déficit commercial de la France, dans ce secteur, est structurel : la production nationale ne couvre qu'environ 50 % de la demande intérieure. Cette situation est d'ailleurs celle de l'ensemble de la Communauté : le déficit de la balance commerciale de l'Union représente, globalement, 45 % du bilan des approvisionnements.

Ce déséquilibre s'explique par la conjonction d'une forte demande communautaire -tant en matière première (poisson frais, réfrigéré et congelé) pour les besoins des industries de transformation, qu'en produits transformés (poissons fumés, conserves...) très prisés par les consommateurs- alors que, dans le même temps, on assiste à la diminution des captures débarquées par les flottilles de l'Union, confrontées à une diminution des ressources.

Comme l'illustre les tableaux ci-après, le déficit commercial enregistré en 1995 (10,7 milliards de francs) est l'un des plus mauvais chiffres enregistrés depuis 1990, dû en partie à une augmentation du flux d'importations.

Évolution du solde de la balance commerciale des produits de la mer de la France
(en milliards de francs par an)

Cette augmentation en valeur du déficit de la balance commerciale est due en partie en 1995 à une progression des flux d'importations conjuguée à un léger repli des exportations, malgré une bonne tenue de leur valeur.

Évolution du solde de la balance commerciale des produits de la mer de la France
(en millions de tonnes par an)

Le déficit de la balance commerciale des produits de la mer n'a cessé de croître au cours des années 1980, passant de sept milliards de francs constants en 1980 à onze milliards de francs constants en 1990. Après un maximum d'onze milliards de francs constants en 1991, on assiste à une relative stagnation de la tendance. Le déficit du commerce extérieur atteint 10,1 milliards de francs en 1994 et 10,76 en 1995.

L'analyse de l'approvisionnement des marchés français de produits de la mer est riche d'enseignements 12 ( * ) (les pourcentages représentent les parts respectives de la pêche nationale et des importations dans l'approvisionnement d'un marché) :

b) Les importations


En 1995, le montant des importations s'est élevé à 15,6 milliards de francs pour 803.000 tonnes.


• Ce déficit est dû en premier lieu aux importations de poissons frais (21 %), de crustacés (21 %), de préparations et conserves de crustacés et mollusques (18 %) et de filets (15 %). Quatre espèces (crevettes, saumons, thon et cabillaud) concentrent 47 % de la valeur des importations en 1995.

Importations françaises de produits de la mer par espèce en 1995


• Nos principaux fournisseurs sont le Royaume-Uni (un peu moins de 2 milliards de francs), la Norvège (1,6 milliard) et le Danemark (1,3 milliard). Cependant l'origine extracommunautaire des importations françaises prédomine (55 %). La progression la plus spectaculaire provient des importations depuis la Côte d'Ivoire qui s'accroissent de 79 % en 1995 par rapport à l'année précédente pour s'établir à 1,18 milliards de francs.

Importations françaises de produits de la mer en 1995 par pays fournisseur

c) Les exportations

En 1995, le montant des exportations atteignait 4,80 milliards de francs pour 376.000 tonnes. Nos principaux clients sont l'Espagne (26 %), l'Italie (15 %), l'Allemagne (11 %), l'UEBL (9 %) et la Côte d'Ivoire (6 %).

Exportations françaises de produits de la mer par espèce en 1995

Exportations françaises de produits de la mer en 1995 par pays client (en millions de tonnes)

*

* *

Face à cette situation qui montre la fragilité du secteur, et afin de tracer des perspectives claires et de donner aux professionnels les moyens institutionnels de surmonter la crise actuelle et d'accomplir la mutation que tous reconnaissent aujourd'hui nécessaire, le Gouvernement, après une concertation étroite avec les milieux professionnels et à la lumière de plusieurs rapports, a décidé de présenter au Parlement un projet de loi d'orientation.

CHAPITRE II - UN PROJET DE LOI AMBITIEUX DANS UN CONTEXTE COMMUNAUTAIRE PRÉOCCUPANT

Le secteur des pêches maritimes et des cultures marines fait l'objet d'une politique commune intégrée : son orientation est donc très dépendante des règlements et décisions du Conseil et de la Commission de la Communauté européenne.

Ainsi, en s'inscrivant dans un contexte communautaire préoccupant, dû aux négociations sur le POP IV, le projet de loi du Gouvernement prend une nouvelle dimension.

I. UN CONTEXTE COMMUNAUTAIRE PRÉOCCUPANT

La signature, ces derniers mois, de deux traités importants -l'accord des Nations unies sur les stocks chevauchants et les stocks de poissons grands migrateurs et le code international de conduite pour une pêche responsable- a été considérée, sur le plan international, comme le signe d'une détente relative en matière de pêche. L'année 1996 s'est présentée, au niveau européen, sous de moins bons auspices.

Le retard constaté au début de l'année 1996, dans la mise en oeuvre du POP III par la France, les tensions avec les îles anglo-normandes et surtout les difficiles négociations sur le POP IV attestent de cette situation quelque peu préoccupante.

A. LA POSITION DE LA FRANCE AU SEIN DES PÊCHES EUROPÉENNES EN 1996

1. Les pêches européennes

S'agissant des États de l'Union européenne, la dernière situation disponible correspond aux données fournies par la Direction Générale XIV au 1er juin 1996.

La flotte communautaire comprend près de 100.000 navires, totalisant 8,1 millions de kW et 2 millions de tonneaux. Les activités de pêche restent en général concentrées sur l'Atlantique nord, intertropical et sud, ainsi que dans les mers adjacentes de l'Atlantique et dans une moindre mesure dans l'océan Indien.

TABLEAU SUR LA FLOTTE COMMUNAUTAIRE
au 1er JUILLET 1996

La France se trouve ainsi dans une position intermédiaire , entre les États producteurs du sud de l'Europe (Espagne, Italie, Portugal et Grèce) et les États du nord de l'Europe (Danemark, Pays Bas, Allemagne et Royaume-Uni) orientés davantage vers la transformation.

2. Le bilan de l'application du POP III

Après deux POP à faible valeur contraignante, la Commission et le Conseil ont adopté dans le cadre du troisième POP (1993-1996) des niveaux importants de réduction des flottes communautaires. Il s'agit en effet de réduire une surcapacité de ces flottes, présentée comme étant dommageable à la fois pour la ressource et la rentabilité des exploitations. Chaque État membre voit donc l'évolution de sa flotte encadrée par un POP qui lui est propre.

Le troisième POP, ou encore le POP III, se fonde sur une approche différenciée des flottilles de chaque État membre, suivant les ressources que celles-ci exploitent. Ainsi, le POP définit pour chaque État membre des objectifs ciblés pour chacun des segments de sa flotte que celui-ci est tenu d'atteindre à la fin de l'exercice, au 31 décembre 1996. Ces objectifs sont exprimés en Kilowatts (mesure de puissance du navire-Kw) et en tonneau de jauge brute (mesure du volume du navire-TJB).

a) Le bilan de l'application du POP III en France

Le troisième programme d'orientation pluriannuel fixe à la flotte française un objectif de 949.087 kw au 31 décembre 1996 pour une situation initiale au 1er janvier 1992 de 1.720.428 kw. Il est défini par huit segments de flottille.

Afin d'atteindre cet objectif de réduction de la puissance de la flotte française, des permis de mise en exploitation des navires qui contingentent les entrées de flotte et des plans de sortie de flotte sont mis en oeuvre depuis 1991. Ils visent à encourager les sorties de flotte de navires par le versement d'aides à l'arrêt définitif.

En 1995, un plan de sorties de flotte a été ouvert comme les années précédentes. Ce plan a permis le départ de 200 navires, représentant 20.151 kw. Il a concerné à 40 % des chalutiers, ce qui a répondu aux objectifs de réduction prioritaire de ce type de navires dans le cadre du POP.

Le montant des aides versées dans ce cadre par l'État s'élève à 32 millions de francs dont la moitié est prise en charge par l'Union européenne. Des aides des collectivités territoriales et des mesures sociales d'accompagnement (CAA et ACR) ont été mises en oeuvre.

La France respecte les objectifs pour certains d'entre eux et met tout en oeuvre pour atteindre ceux qui sont les plus difficiles à honorer (segments des chalutiers et des navires polyvalents en Atlantique).

Un plan a été ouvert en juin 1996 dans la limite de 30.000 Kw. La France a néanmoins dû interrompre en avril 1996 l'allocation d'aides publiques, nationales et communautaires, à tout projet d'investissement qui se traduirait par un accroissement de la flotte en terme de Kw ou de TJB, en raison d'un retard constaté sur les objectifs intermédiaires au 31 décembre 1995.

b) L'application du POP III par les autres États membres

Le Royaume Uni et les Pays Bas connaissent les retards les plus significatifs dans la mise en oeuvre de ce programme. N'accordant pas d'aides publiques aux investissements, ces États ne se sont pas préoccupés des conséquences financières de leur non respect du POP, jusqu'à ce que la Commission envisage d'élargir les sanctions financières au-delà du seul champ des aides à la pêche.

L'Espagne, le Portugal et le Danemark respectent leurs objectifs. Les autres États membres connaissent des situations variables selon les segments ou suivant les paramètres, comme la France. Le tableau joint présente leur situation au 31 décembre 1995.

A l'heure actuelle, la France est en mesure de respecter les objectifs définis au niveau communautaire, puisqu'il ne manque que 20.000 Kw, afin d'atteindre le chiffre prévu par le POP III.

Présentation synoptique des résultats par État membre

au 31. 12. 1995

B. LES RELATIONS ENTRE LA FRANCE ET « SES VOISINS MARITIMES

1. Les relations entre la France et l'Espagne : une concertation institutionnalisée

Les relations franco-espagnoles concernant le secteur des pêches maritimes ne se résument pas à quelques incidents entre navires, qui traduiraient une opposition quasi traditionnelle entre des deux communautés nationales de gens de mer. La réalité est de nature différente.

L'appartenance des pêcheurs à deux nations n'est pas, bien évidemment, la cause première des tensions qui peuvent apparaître surtout en certaines saisons entre les flottilles. Il s'agit assez souvent de difficultés de cohabitation des différents métiers de la pêche.

Ces divergences peuvent être purement techniques, ou résulter de la concurrence sur le marché des produits pêchés.

Les structures socio-économiques différentes des deux secteurs français et espagnol se traduisent par l'adoption de techniques de pêche parfois en opposition sur les mêmes zones et pour des espèces identiques. Au sein de la Communauté européenne, faute d'harmonisation des coûts sociaux, une technique peut rester rentable dans un pays et devenir peu efficace dans un autre, y compris sur les mêmes zones de pêche.

Ce constat peut engendrer des difficultés d'occupation de l'espace quand ces techniques apparaissent difficilement compatibles et si le poisson est concentré sur une zone étroite : par exemple, les chalutiers qui suivent les lignes de sonde (c'est-à-dire la ligne de fond qui leur permet de conserver la même profondeur d'immersion du chalut) rencontrent des palangres (longues lignes posées au travers de leur route).

Le dialogue sur zone, éventuellement facilité par des mesures préventives du type « code de bonne conduite , est le seul moyen d'éviter le conflit. Il est, en revanche, rendu plus aisé lorsque des rencontres entre institutions professionnelles ont permis les contacts personnels nécessaires entre les responsables des organisations, et mis en place des procédures simples de règlement des situations conflictuelles.

Plus qu'en toutes circonstances, ces situations peuvent être sensiblement améliorées par des rencontres professionnelles. Mieux encore, ces rencontres permettent de révéler des situations, de soulever des problèmes dont l'ampleur, voire même l'existence, étaient restées sous-évaluées, et d'étudier ces solutions.

C'est ce qui explique le succès rencontré par les travaux du Comité franco-espagnol des pêches maritimes (COFEP) qui s'est réuni pour la première fois à Madrid le 28 février 1995, quelques mois après deux affaires violentes survenues en mer en mars 1994 (le chalutier Laetitia) et un juillet 1994 (le fileyeur La Gabrielle), afin d'instaurer un climat de dialogue après les violents affrontements de 1994.

Cinq réunions du COFEP ont déjà eu lieu ; ces rencontres entre représentants de l'administration et des professionnels des deux pays leur ont permis de rapprocher leurs points de vue sur un certain nombre de sujets relatifs aux pêches.

Les deux premières réunions ont permis d'entamer la discussion et de constater que les intérêts des pêcheurs français et espagnols étaient liés, notamment en ce qui concerne l'anchois. La troisième réunion a permis de constater un accord sur le bon déroulement de la campagne germonière, même si chaque partie conservait ses appréciations quant à l'utilisation des techniques de pêche.

Le quatrième COFEP a permis de confirmer et de prolonger jusqu'en 2002 l'accord de 1992 sur l'anchois ; ce COFEP a également pris l'initiative d'une rencontre des organisations de producteurs des deux pays afin d'envisager des solutions communes à apporter au marché de l'anchois.

Le cinquième COFEP a consacré ses travaux aux questions de cohabitation entre métiers. Les difficultés ont été examinées et les professionnels des deux pays ont convenu de préparer un code de bonne conduite qui sera soumis au prochain COFEP. Un groupe de contact a été constitué afin de faire face à tout incident grave qui interviendrait entre les pêcheurs des deux parties. Cette rencontre a également été l'occasion d'aborder la question spécifique du stock de merlu du golfe de Gascogne, d'envisager les mesures techniques d'une véritable gestion de cette ressource et les conditions d'une meilleure organisation du marché.

Un certain nombre d'acquis tout à fait significatifs sont donc à mettre à l'actif de ces rencontres. Elles contribuent à entretenir la bonne qualité de nos relations avec l'Espagne qui nous permettent notamment de mener une politique très active d'échanges de quotas et de rapprocher nos points de vue dans les négociations communautaires.

Par ailleurs, le régime transitoire auquel était soumis l'Espagne (et le Portugal) depuis leur adhésion à l'Union européenne a pris fin le 1er janvier 1996. A la demande de la France, et en vue de protéger ses antériorités de pêche, une protection particulière a été introduite pour certaines espèces non soumises à quotas (coquilles Saint-Jacques, crustacés, espèces profondes).

La mise en place de ce nouveau régime s'est déroulée dans de bonnes conditions durant l'année 1996.

2. Les relations entre la France et les îles anglo-normandes : des négociations en cours

a) Les données du problème

Les relations de pêche avec les îles anglo-normandes ont de longue date posé problème, d'une part en raison de leur statut particulier vis-à-vis du Royaume-Uni, d'autre part en raison de leur position géographique.

Ces problèmes sont rendus plus complexes encore par la non-appartenance de ces territoires à l'Union européenne, sauf sur le plan de l'accès au marché, dont elles bénéficient en vertu d'un protocole annexé à l'acte d'adhésion du Royaume-Uni.

Jersey et Guernesey sont enfin dans une situation juridique différente vis-à-vis de la France. Nos liens avec Jersey sont régis par une convention franco-britannique, dite du régime de la baie de Granville de 1843, qui est toujours en vigueur. Nos relations avec la seconde relèvent d'une convention multilatérale de 1964, la convention de Londres sur les pêches, qui avait défini les droits de pêche entre États européens. Celle-ci n'est plus d'actualité depuis l'instauration d'une politique commune de la pêche (1977) sauf en ce qui concerne les îles anglo-normandes.

b) Les relations avec Jersey

Le problème réside dans le désir exprimé par les autorités de Jersey de modifier profondément le régime de la baie de Granville. Ce régime, instauré en 1843, périodiquement consolidé et confirmé par divers accords postérieurs (1951, 1964), règle clairement les droits de pêche des deux parties : droits exclusifs aux britanniques dans une zone de 3 milles autour de Jersey, droits exclusifs aux français à l'intérieur d'une ligne brisée « A-K le long de la côte du Cotentin, égal accès à la ressource pour les navires des deux pays dans la zone intermédiaire appelée « mer commune ».

Au Royaume-Uni qui, en 1989, avait proposé un projet d'accord qui abrogeait le régime de la baie de Granville en se fondant sur la volonté d'autonomie de Jersey et sur la volonté de cette île d'élargir ses eaux territoriales en vertu des nouvelles dispositions du droit de la mer, la France a répondu, en 1992, par un projet d'accord de coopération pour une gestion commune de la ressource, qui ne remettrait pas en cause le régime de la mer commune. Une telle évolution ne peut résulter que de l'accord des parties ainsi que l'a reconnu explicitement la délégation britannique au cours d'une rencontre.

Les négociations en cours avec Jersey recouvrent, d'une part, le tracé d'une ligne de délimitation maritime, et d'autre part, l'élaboration d'un régime commun de gestion.

c) Les relations avec Guernesey

La convention de Londres dispose explicitement que le droit de pêche et de juridiction est exclusivement réservé aux navires de l'État riverain jusqu'aux 6 milles de la ligne de base de sa mer territoriale, et que le droit de pêche est exercé, dans la zone de 6 à 12 milles, par l'État riverain et par les navires des autres États contractants s'ils prouvent qu'ils y ont exercé la pêche entre 1953 et 1962 (notion de droits historiques).

C'est sur cette base qu'un décret britannique de 1965 a accordé des droits de pêche à certains de nos pêcheurs à l'ouest de Guernesey pour certaines espèces seulement.

Les discussions, dont l'ouverture a été demandée par le Royaume-Uni en 1988 pour préciser les limites des eaux territoriales de Guernesey, n'ont abouti qu'en 1992, se traduisant par la fermeture à la pêche française d'une zone de pêche située entre Guernesey et la côte du Cotentin, à l'intérieur des eaux territoriales de Guernesey, et dite du « haricot .

L'accord a, cependant, permis de limiter très partiellement les conséquences économiques néfastes de cette évolution en autorisant 37 pêcheurs français à venir travailler dans une partie du « haricot appelée « banc de la Schole jusqu'en 2010.

Des discussions sont en cours sur la consolidation des droits des pêcheurs et l'élaboration d'un régime commun de gestion des zones de pêche.

C. LE REFUS « D'UNE EUROPE BLEUE SANS PÊCHEURS

Le projet de loi sur la pêche maritime et les cultures marines a sans aucun doute une dimension européenne, intervenant à un moment crucial des négociations européennes sur la Politique commune de la pêche, et notamment sur son volet structurel à travers le POP IV.

Les totaux admissibles de capture (TAC), les quotas nationaux qui en découlent, les mesures techniques (maillages, tailles minimales, etc...), la capacité de capture (POP), les conditions d'accès à la ressource communautaire et à celle des pays tiers (licences), la politique des marchés (prix de retrait) comme celle des structures (subventions) sont autant de strates mis en place par l'Union européenne.

Alors qu'un objectif conséquent de réduction de la flottille de pêche artisanale a été avancé par la Commission, ce projet de loi vient consacrer l'importance de ce secteur économique en France en lui donnant de nouveaux moyens pour affronter la concurrence internationale.

Sans pouvoir mieux organiser la pêche au niveau communautaire, -ce qui devrait être la mission essentielle des instances européennes- ce texte propose une vision d'ensemble du secteur pour les dix années à venir. Il apparaît donc comme un signal clair et déterminé de la position française en faveur du secteur de la pêche maritime et des cultures marines en direction de la Commission européenne.

La politique commune de la pêche, souffre, en effet d'un certain nombre d'insuffisance.

1. Un volet structurel discutable

a) La position de la Commission

La négociation sur le POP IV a commencé au Conseil Pêche du 22 avril 1996. Elle est supposée s'achever avant le 31 décembre 1996, date d'expiration du POP III, après que le Conseil arrête la décision qui en détermine les grandes lignes et que la Commission adopte, en relation avec chaque État membre, le programme spécifique à chacun d'entre eux.

La Commission a proposé au Conseil l'adoption d'une décision de réduction très importante des flottes de pêche. Elle s'est heurtée à l'opposition de la plupart des États membres.

Ce POP doit s'appuyer sur l'aide d'un groupe scientifique indépendants, une synthèse des consultations de professionnels de la pêche, des orientations retenues par le Conseil des ministres, et le résultat des travaux de la commission qui arrêtera à la fin de 1996 le nombre de navires de pêches par État.

Afin d'enrayer la raréfaction de la ressource, la Commission tente d'agir à la fois sur l'activité par le mécanisme des efforts de pêche et sur la capacité de pêche, en proposant une restructuration des flottilles.

Pour Mme Emma Bonino, Commissaire européen, le POP IV représente une opportunité pour réduire la flotte qui pourrait assurer sa restructuration et non son déclin. Une flotte moins pléthorique doit permettre aux pêcheurs européens d'accroître leur compétitivité pour répondre à la concurrence grandissante des pays tiers.

En contrepartie de ces efforts pour la période 1994/1999, 3 milliards d'écus prélevés sur les fonds structurels seront mis à la disposition des États membres par l'Union européenne.

L'ensemble des aides communautaires structurelles au secteur représente aujourd'hui sur la période 1994-1999 la somme de 2,8 milliards d'écus pour la totalité des quinze États-membres de l'Union, dont 1.3 milliards d'écus pour la flotte. Ramenées à chacun des 300.000 marins environ dénombrés dans la Communauté, ces aides représentent près de 30.000 Francs par homme sur la période considérée.

b) Le Conseil des ministres du mois d'octobre 1996

Les ministres chargés de la Pêche, lors du dernier Conseil, en date du 14 octobre ont fait front -à l'exception de ceux du Danemark et dans une moindre mesure, de l'Allemagne- contre les propositions de la Commission européenne de réduction des flottes pour la période 1997-2002 renvoyant le problème à des entretiens bilatéraux entre chaque État et la Commission, pour que celle-ci puisse présenter des propositions détaillées pour le prochain conseil pêche du 22 novembre.

Le commissaire européen à la pêche, Mme Emma Bonino avait pourtant bien pris soin, ces dernières semaines, d'expliquer que l'objectif de réduction de 40 % des prises fixé pour cette période chez les espèces les plus menacées (cabillaud, églefin, merlu, sardine, saumon de la Baltique) ne se traduirait pas par un taux de « casse équivalent (cf. annexe n° 5), un chiffre de 30 % étant proposé pour les poissons plats et une réduction de 12 % pour les espèces dites en équilibre, à l'exception du thon tropical et des espèces profondes (annexe n° 6).

En fait, selon les calculs des experts de la Commission, si l'on tient compte de mesures de réduction d'activité (moins de jour en mer) et de protection des ressources, le taux correspondant de mise hors service des flottes serait de 15 %, soit 2,5 % par an.

Pour les espèces se défendant mieux, cette réduction serait encore inférieure. De plus, la Commission propose aussi d'exempter la « petite flotte côtière , moins prédatrice et plus pourvoyeuse en emplois. Elle considère toutefois que cette notion est uniquement valable pour les navires de moins de sept mètres, alors que les États membres mettent la barre beaucoup plus haut (14 mètres par exemple pour la Grèce et l'Espagne).

Fort de la réduction de 10 % de sa flotte de pêche pendant cette période, la France, estime qu'il lui est difficile d'aller au-delà sans menacer l'équilibre de certaines régions côtières.

2. Une approche scientifique intéressante, mais jugée trop schématique

a) Le rapport Lassen

Pour préparer sa proposition, la Commission a sollicité l'avis d'un comité scientifique, dont les recommandations sont connues sous l'appellation de rapport Lassen, du nom de son président. Le rapport, à partir d'une compilation des données disponibles sur l'état de stocks faisant l'objet d'un suivi scientifique, conclut à la nécessité de réduire la mortalité par pêche de façon spectaculaire (30 à 40 % en 6 ans) sur la plupart des stocks en question.

Bien entendu les diagnostics donnés dans ce rapport sont plus ou moins fiables suivant que les stocks ou groupes de stocks analysés sont :

- scientifiquement suivis selon une approche analytique solidement argumentée par des séries historiques fiables ; en général leur exploitation est alors gérée par TAC.

- moins bien suivis quand pris individuellement parce que moins fragilisés par l'exploitation ou plus difficiles à analyser en termes d'impact de l'exploitation sur leur état, ou quantitativement moins importants. En général, il s'agit de ressources côtières, à plus forte variabilité interannuelle d'abondance ou de disponibilité. Leur exploitation est alors gérée soit par des TAC de précaution, soit par des mesures de natures différentes (licences, cantonnements, ...).

La difficulté de l'exercice auquel s'est livré le groupe d'experts a résidé dans la confrontation entre l'état d'exploitation des ressources et l'activité des flottilles. Il est évident, macro économiquement, à l'échelle de l'Europe, que la capacité de capture est supérieure aux capacités de production biologique de la ressource, et que c'est sur ce front que, globalement, il convient d'agir dans un double souci de pérennisation de la ressource et de recherche d'une optimisation de l'investissement. On ne se trompe certainement pas d'ordre de grandeur si on fait le pronostic que, à long terme, si on diminuait de moitié la pression par pêche sur le stock de morue de la mer du nord (tous métiers confondus), les débarquements pourraient être doublés (avec les effets induits sur le coût de revient de la tonne débarquée). Un discours semblable pourrait être tenu concernant les stocks de merlus Sud et, dans une moindre mesure, Nord - tous métiers confondus.

b) La position française

Mais ce raisonnement ne peut être généralisé à l'ensemble des stocks ; c'est la conclusion que tire la France après un essai d'application à ses flottes de pêche des propositions que la Commission tire de son interprétation des recommandations du groupe d'experts.

En effet, conditionnée par des impératifs de rentabilité, la tendance naturelle d'évolution de la composition de la flotte française démontre un désengagement progressif de sa participation à l'exploitation des ressources traditionnelles les plus menacées, et un intérêt croissant pour des pêches « opportunistes ciblées sur les stocks classés par le rapport Lassen dans la deuxième catégorie :

- quasi disparition de la flotte spécialisée de chalutiers de grande pêche ;

- diminution continue des chalutiers semi-industriels ;

- stagnation des chalutiers côtiers spécialisés ;

- développement des fileyeurs et des navires artisans hauturiers polyvalents.

Cette évolution se traduit par un double constat :

- un certain nombre de quotas attribués à la France ne sont pas atteints dans des proportions qui parfois, en ce qui la concerne, dépassent les recommandations de diminutions préconisées à terme par le groupe d'experts ;

- une proportion croissante des captures des flottilles les plus performantes repose sur des stocks de la deuxième catégorie auxquels ne s'appliquent pas les objectifs de diminution des mortalités par pêche préconisés dans le rapport des experts.

Dans un tel contexte, on peut comprendre la difficulté pour la France de suivre les lignes proposées par la Commission.

La Commission se fonde sur ces indications pour demander une réduction de même niveau de l'importance des flottes de pêche des États membres qui exploitent ces stocks.

Il est incontestable que de nombreux stocks de pêche son surexploités, notamment ceux qui intéressent les flottes de plusieurs États membres.

En revanche, de nombreuses ressources, moins communément pêchées, ne sont pas soumises à une telle surexploitation. Elles constituent une part très significative des captures des navires français (entre 40 % et 80 %). Or, elles ne sont pas prises en compte dans le rapport scientifique et, donc, dans la proposition de la Commission.

La France ne conteste pas la validité des recommandations du rapport Lassen. Elle réfute néanmoins les tendances à l'extrapolation qu'en fait jusqu'à présent la Commission pour généraliser de telles conclusions à une politique de réduction opposable à tous les navires de pêche. Elle conteste également que la Commission transpose l'impératif de réduction de la mortalité par pêche en un coefficient de réduction du volume des flottes de pêche de niveau identique, sans tenir compte de mesures alternatives de réduction de l'effort de pêche qui peuvent aboutir à un effet analogue sur les ressources menacées.

La France estime par ailleurs que la proposition de la Commission ne répond pas à des questions essentielles, à savoir :

- la nécessité de conserver un niveau de flotte suffisant pour permettre à l'État membre de continuer à capturer les quotas de pêche dont il dispose ;

- la nécessité de ne pas opérer de discrimination entre les États membres, discrimination qui découlerait de l'application de taux de réduction des flottes identiques, que ceux-ci sous-exploitent ou surexploitent leurs quotas ;

- la nécessité, surtout, de tenir compte des captures d'espèces hors quotas dans les objectifs nationaux de réduction ;

- la nécessité de prendre en compte a priori dans la définition des objectifs de réduction des flottilles l'effet de toutes les mesures nationales de réduction de l'effort de pêche qui viennent limiter l'impact des flottilles sur la ressource.

3. Une organisation commune de marché quasiment inexistante

Votre rapporteur a pu constater, lors de ces auditions, qu'une masse de règlements communautaires existait sur la ressource mais, par contre, qu'un tout petit nombre de textes en matière de régulation des marchés a été pris.

L'OCM « pêche s'inscrit en effet dans une simple perspective de stabilisation des marchés. Elle ne représente que 26 millions d'écus des sommes consacrées par la Communauté au soutien des marchés agricoles.

Ce manque d'ambition de l'OCM « pêche se ressent tant au niveau interne qu'externe.

a) L'insuffisance des mécanismes internes

En effet, les mécanismes internes de l'OCM « Pêche -décrits au chapitre précédent- n'ont pas l'effet stabilisateur qu'on pourrait attendre sur les cours du poisson. Par ailleurs, l'expérience des années de crise vécues par le secteur de la pêche ont permis d'arriver à un constat d'incohérence portant sur l'un des aspects fondamentaux de l'OCM « Pêche : la faculté pour une organisation de producteurs reconnue d'appliquer ou non les prix de retrait communautaires.

La France a appelé l'attention de la Commission européenne et du Conseil des ministres de la pêche sur cette question en faisant valoir que le seul remède, en la circonstance, lui paraissait être le fait de subordonner réglementairement la reconnaissance d'une organisation de producteurs au respect des prix de retrait communautaires.

La Commission doit d'ici la fin de l'année 1996 présenter au Conseil un rapport sur cette question et, de manière plus générale, sur le rôle actuel des organisations de producteurs et les perspectives envisageables.

b) La carence du régime externe

L'OCM a deux séries de conséquences :

- la très grande libéralisation des échanges des produits de la mer : plus des deux tiers des importations de produits de la mer sur le territoire communautaire s'effectuent en exonération totale ou partielle de droits de douane.

Cette orientation répond certes à la nécessité d'approvisionner un marché structurellement déficitaire. Elle s'inscrit également dans le contexte plus large de la politique d'association et de coopération de l'Union.

- la faiblesse des mécanismes de sauvegarde prévus par l'OCM « pêche : ceux-ci sont encadrés par les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) qui rendent exceptionnelle leur mise en oeuvre.

En particulier, le mécanisme des prix minima à l'importation qui peuvent être imposés dans des conditions de crise grave est d'une utilité limitée en raison du faible niveau réglementaire de ces prix (le prix de retrait) et des difficultés du contrôle d'un tel dispositif dans le cadre du marché unique.

Le projet de loi soumis à votre commission ne peut pas régler à lui seul les carences de la Communauté européenne en matière de politique de marché. Cependant il tente, au niveau national, d'organiser au mieux la filière de la pêche et des cultures marines ; en cela, il peut être considéré comme un exemple pour l'Europe.

II. UN PROJET DE LOI AMBITIEUX

A. LES OBJECTIFS DU PROJET DE LOI D'ORIENTATION

Afin de donner aux professionnels les moyens institutionnels de surmonter la crise actuelle et d'accomplir la nécessaire mutation de la filière, le Premier ministre a souhaité dès sa prise de fonction que soit préparée une loi d'orientation ainsi que les mesures réglementaires propres à assurer la modernisation de la filière.

Cette préparation s'est faite en concertation étroite avec les milieux professionnels et a été étayée par plusieurs rapports : l'un portant sur la filière de commercialisation a montré la nécessité de mettre en oeuvre un pilotage par le marché, et un autre sur la situation des pêcheurs en difficulté a mis en évidence l'intérêt de favoriser la mise en société des entreprises.

Ce projet de loi vise cinq objectifs : ceux-ci sont précisés dans l'exposé des motifs du projet de loi n° 511.

1. Mieux gérer la ressource

L'objectif recherché est de développer les moyens d'une gestion rationnelle de la ressource en permettant sa conservation à moyen terme -indispensable à la pérennité du secteur lui-même- et un équilibre harmonieux entre les activités des différentes flottilles. Cette gestion rationnelle passe par la préservation du caractère de patrimoine collectif de la ressource halieutique disponible, ainsi que par la préservation de la qualité des eaux littorales, nécessaire au développement des productions aquacoles.

Le projet de loi consacre le rôle directeur de l'État dans la détermination des conditions d'accès à la ressource de manière à éviter une patrimonialisation des droits de pêche, quotas ou licences, susceptible de bouleverser la structure socio-économique de la profession. Il affirme également l'incessibilité de ces droits. Il est, par ailleurs, largement admis désormais que le marché doit commander la gestion de la ressource.

2. Organiser la filière

Dans le prolongement des mesures arrêtées depuis 1994, le projet de loi vise, d'une part, à redéfinir le rôle du mareyage et à remédier à la dispersion actuelle des points de débarquement, à mieux contrôler les quantités débarquées et leur état sanitaire et à rationaliser les infrastructures portuaires et leur fonctionnement. D'autre part, il réaffirme le rôle des organisations de producteurs au sein de la filière, dans la gestion des quotas de leurs adhérents.

Par ailleurs, pour instaurer le nécessaire pilotage par le marché, et non « par l'aval de la filière comme le mentionne maladroitement l'exposé des motifs, il convient de renforcer le rôle économique de l'actuel fonds d'intervention et d'organisation des marchés des produits de la pêche et des cultures marines (FIOM) pour en faire un véritable office des produits de la mer.

Enfin, il est proposé de créer un conseil supérieur d'orientation qui serait, dans le prolongement de la Commission de suivi mise en place en 1994, une instance consultative, placée auprès du ministre, chargée d'assurer la cohérence des différents aspects des politiques concernant les pêches maritimes et les cultures marines tant en matière économique et sociale que de formation ou de recherche sans pour autant se substituer aux organismes existants (CNPM, CNC, FIOM, ...).

3. Moderniser le statut légal et fiscal des entreprises de pêche

Ces préoccupations sont au coeur du dispositif. Dans un souci de clarification, le projet de loi réaffirme le caractère commercial de l'activité de pêche.

Il s'attache, ensuite, à promouvoir le développement de la mise en société en assurant la neutralité de cette transformation en matière économique et sociale et en opérant une véritable distinction entre le patrimoine personnel du patron-pêcheur et le capital social de leur entreprise. La transformation du statut juridique des entreprises d'armement en société constitue une évolution particulièrement souhaitable. Elle permet en particulier l'adoption d'un cadre juridique, financier et comptable mieux adapté à la réalité et à la valeur de l'actif.

L'indispensable poursuite de la modernisation du secteur nécessite également la mise en place d'un nouveau dispositif de régime de sécurité sociale des marins et l'adaptation de la fiscalité, compte tenu du niveau très élevé des immobilisations.

Enfin, comme en agriculture, l'adoption de dispositions favorables à la première installation et à la pluriactivité est proposée.

L'ensemble de ce dispositif permet de distinguer, comme le souhaite la plupart des professionnels, le traitement économique du traitement social.

4. Adapter les cultures marines

Le secteur des cultures marines est dans une situation économique différente de la pêche. Il est aujourd'hui confronté à la concurrence d'autres activités (tourisme, agriculture) et à des contraintes environnementales de plus en plus fortes.

L'assimilation des pectinidés à la suite d'un compromis entre l'Union européenne et le Canada, le Pérou et le Chili constitue un exemple de la concurrence que doit affronter ce secteur sur le marché international. A l'issue des négociations, l'ensemble des pectinidés commercialisés à l'état de surgelé ou transformé pourront utiliser l'appellation Saint-Jacques, sous réserve de faire figurer le pays d'origine sur l'emballage du produit.

Le projet de loi affirme le caractère agricole de ces activités et vise par plusieurs mesures techniques à conforter sa place et son rôle, primordial pour le développement économique de plusieurs régions littorales, en lui appliquant les dispositions sur l'entraide agricole, en reconnaissant de manière autonome cette catégorie de navigation et enfin en donnant la possibilité aux conchyliculteurs de constituer des droits réels sur leur concessions.

5. Moderniser les relations sociales

Comme le précise l'étude d'impact du Gouvernement sur le projet de loi, les dispositions d'ordre social constituent un élément important de ce texte. En effet la modernisation du secteur des pêches maritimes passe autant par une modernisation des relations sociales dans cette branche que par son adaptation économique aux nouvelles donnes tant communautaires que du marché ou de la ressource halieutique.

La modernisation du statut social des marins pêcheurs a fréquemment été souhaitée. Les textes applicables, remontant à 1681, ont été à peine rénovés en 1926 lors de l'élaboration du Code du Travail Maritime. Le projet de loi prévoit plusieurs améliorations du régime de travail à la pêche et aux cultures marines, notamment en matière de licenciement et temps de travail. Ainsi la loi d'orientation paraît être une grande étape dans cette modernisation sociale de la pêche et des cultures marines.

Il propose une réponse pragmatique à l'application du SMIC permettant d'en concilier le principe avec le système original de rémunération « à la part , et consistant à lisser sur l'année le calcul de la rémunération minimale en tenant comte en particulier du temps de travail à la pêche.

Enfin, l'affiliation aux ASSEDIC des marins pêcheurs artisans a fait l'objet d'un débat approfondi avec les professionnels. Ce débat a fait ressortir le besoin de mieux évaluer la réalité du chômage à la pêche ainsi que les avantages et inconvénients respectifs d'une affiliation des pêcheurs au régime de droit commun et d'un système propre à la profession, avant de prendre une décision définitive.

B. LE CONTENU DU PROJET DE LOI

Le projet de loi regroupe 7 titres et 37 articles :


Le titre premier traite de l'orientation de la politique des pêches et des cultures marines

L'article premier énonce les objectifs de la politique commune des pêches maritimes et des cultures marines.

L'article 2 crée un Conseil supérieur d'orientation des politiques halieutique, aquacole et halioalimentaire, qui a pour rôle d'assurer la cohérence des différents volets de cette politique (ressource, marché, structures, relations sociales, formation, recherche).

L'article 3 prévoit d'instituer un Office des produits de la mer (OFFIMER), destiné à remplacer le Fonds d'intervention et d'organisation des marchés des produits de la mer en l'inscrivant dans le cadre légal des offices agricoles.


Le titre II traite de l'accès à la ressource

L'article 4 affirme, d'une part, la compétence de l'État dans la délivrance des autorisations de pêche notamment sous forme de licences et dans la répartition des quotas de capture et, d'autre part, l'incessibilité de ces droits.

Il prévoit également les conditions dans lesquelles l'État peut confier aux organisations de producteurs la gestion de certains quotas de captures de leurs adhérents dans le cadre d'un plan de gestion élaboré par elles.

L'article 5 renforce les sanctions administratives applicables pour les infractions à la police des pêches maritimes en prévoyant la possibilité de suspendre les autorisations de pêche.

L'article 6 prévoit de sanctionner pénalement le fait de pêcher sans licence professionnelle et sans permis de pêche spécial lorsque ceux-ci sont exigés.

L'article 7 comble un vide de la loi n° 83-582 du 5 juillet 1983 sur les saisies en désignant dans les départements non littoraux une autorité administrative habilitée à exercer les prérogatives reconnues jusque-là aux seuls chefs de quartier des affaires maritimes.


Le titre III traite de l'entreprise de pêche

L'article 8 répond à un souci de clarification juridique de la situation de l'entreprise de pêche artisanale et consacre la nature commerciale de la pêche maritime professionnelle.

L'article 9 complète la définition du propriétaire embarqué au sens de la réglementation ENIM, en reconnaissant le maintien du statut du patron embarqué sur son navire pour les périodes où le patron n'est pas embarqué sur son navire, ces dernières ne devant pas dépasser 50 % au plus du total des services validés chaque année par l'ENIM au titre de la navigation.

Les articles 10 à 13 visent à encourager la mise en société des entreprises de pêche artisanale en neutralisant au plan fiscal le passage du statut d'entreprise individuelle à celui de société de personne (exonération de la taxe professionnelle pour ces nouvelles sociétés et de cotisations patronales pour l'équipage du navire prévue au bénéfice des propriétaires embarqués par l'article L. 43 du code des pensions de retraite des marins).

L'article 14 introduit l'étalement de l'imposition des plus-values à court terme réalisées lors de la cession d'un navire de pêche ou de parts de copropriété de navires de pêche avant le 31 décembre 2003 sous réserve de réemploi dans un navire de pêche neuf ou d'occasion ou de parts de copropriété correspondantes.

L'article 15 exonère d'impôt pendant soixante mois 50 % des bénéfices réalisés par les artisans pêcheurs en première installation, à titre individuel ou dans un cadre sociétaire, à condition qu'ils aient suivi une formation à la gestion et présenté un plan d'installation.

L'article 16 abaisse le seuil de soumission à l'agrément ministériel des projets d'investissement en défiscalisation en matière d'armement à la pêche dans les départements d'outre-mer.

L'article 17 crée de nouveaux cas de validation des services à terre des marins.

Les articles 18 et 19 encouragent la pluriactivité.


Le titre IV traite de la mise en marché

L'article 20 précise les conditions d'agrément des points de débarquement qui doivent désormais présenter les garanties nécessaires à l'enregistrement statistique des données et à la vérification de leur qualité sanitaire.

L'article 21 prévoit l'habilitation des agents chargés de la police des pêches à constater les infractions aux mesures d'extension de discipline.

Les articles 22 et 23 sont relatifs au statut du mareyeur. L'article 22 définit son rôle, l'article 23 sanctionne l'exercice illicite de cette activité.

L'article 24 prévoit la création d'une commission consultative régionale associant l'ensemble des partenaires publics ou privés concernés, chargée de veiller à la bonne organisation des débarquements et à la rationalité des investissements.

L'article 25 vise à habiliter les agents des affaires maritimes à constater les infractions en matière de réglementation des normes communes de commercialisation concernant les produits de la pêche.

L'article 26 donne les moyens à l'administration de sanctionner les manquements au respect de la règle de préavis par les membres d'une organisation de producteurs souhaitant la quitter, en infligeant une sanction financière à l'organisation de producteurs qui accueille un nouvel adhérent n'ayant pas rempli cette obligation.


• Le titre V traite des cultures marines

L'article 27, dans un souci de clarification, affirme la nature agricole des activités d'aquaculture marine.

L'article 28 étend le mécanisme de l'entraide agricole à l'aquaculture marine.

L'article 29 modifie la loi du 1er avril 1942 relative aux titres de navigation maritime, d'une part, pour ériger les cultures marines en genre de navigation distinct de la pêche, du commerce et de la plaisance et, d'autre part, pour créer la faculté d'ouvrir un rôle d'équipage pour les embarcations conchylicoles.


Le titre VI traite de la modernisation des relations sociales

L'article 30, dans un souci d'homogénéité et de lisibilité, rassemble toutes les dispositions modifiant la loi du 13 décembre 1926 portant code du travail maritime.

Il comporte vingt paragraphes en chiffres romains.

Le I abroge le 7° de l'article 10-7 qui permet à la pêche de conclure des contrats d'engagement à durée déterminée successifs dérogatoires au seul motif que les marins sont rémunérés « à la part .

Le II modifie l'article 11 du code du travail maritime afin, d'une part de moderniser les expressions de "rémunération à la part" et, d'autre part, de créer une nouvelle obligation à l'égard des employeurs, lorsqu'il est fait usage de ce mode de rémunération, d'informer le marin sur les éléments comptables justifiant la rémunération perçue.

Le III crée un article 24-2 dans le code du travail maritime qui étend aux marins salariés des entreprises de cultures marines les dispositions du code du travail relatives à la modulation du temps de travail et au remplacement du paiement des heures supplémentaires par un repos compensateur.

Le IV modifie l'article 26-1 du code du travail maritime qui n'applique qu'aux marins du commerce, du remorquage et de la plaisance les dispositions du code du travail relatives au repos compensateur.

Le V crée un article 26-2 dans le code du travail maritime qui étend aux marins salariés des entreprises de cultures marines les dispositions des articles 993 et 993-1 du code rural relatif au repos compensateur.

Le VI porte abrogation de l'article 27 du code du travail maritime.

Le VII modifie l'article 28 du code du travail maritime pour définir les modalités d'application du repos hebdomadaire.

Le VIII crée un article 28-1 dans le code du travail maritime qui fixe le repos hebdomadaire des marins salariés des entreprises de cultures marines dans les conditions de l'article 997 du code rural.

Le IX modifie l'article 33 du code du travail maritime afin, d'une part, comme au II ci-dessus, de moderniser les expressions de « rémunération à la part et, d'autre part, de prévoir de nouvelles dispositions.

Le X confie à un décret le soin de déterminer par voie conventionnelle le mode de calcul de la rémunération à la part.

Le XI , en modifiant le deuxième alinéa de l'article 50 du code du travail maritime, étend à la pêche le principe général du code du travail d'interdiction de toute sanction pécuniaire pour motif disciplinaire.

Le XII permet aux armements à la pêche de déroger par voie conventionnelle à l'article 72 du code du travail maritime relatif aux vivres.

Le XIII crée un article 72-1 dans le code du travail maritime permettant par voie conventionnelle d'appliquer aux marins salariés des entreprises de cultures marines l'article 72 du code du travail maritime qui ne leur est normalement pas applicable.

Le XIV a pour objet d'étendre aux marins de la pêche, du commerce et de la plaisance, les règles particulières aux salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.

Le XV abroge l'article 102-20 du code du travail maritime rendant applicable aux marins salariés la procédure de droit commun du code du travail organisant le licenciement des salariés.

Le XVI abroge l'article 111 du code du travail maritime en supprimant les notions de mousse et de novice.

Le XVII modifie comme suit l'intitulé du chapitre II du livre VI du code du travail maritime.

Le XVIII modifie l'article 114 du code du travail maritime pour permettre la transposition de la directive (CE) 94-33 du 22 juin 1994 relative à la protection des jeunes travailleurs.

Le XIX modifie l'article 115 du code du travail maritime pour tenir compte des dispositions de la Convention internationale du Travail n° 138 du 6 juin 1973 concernant l'âge minimum d'admission à l'emploi et ratifiée par la France.

Le XX renvoie à un décret le soin de déterminer les modalités d'application des articles 111 à 115.

L'article 31 rassemble les dispositions modifiant le code du travail.

L'article 31 comporte six paragraphes en chiffre romain.

Le I concerne l'article L. 742-9 du code du travail et rend applicable aux entreprises d'armement maritime les dispositions du code du travail relatives à la protection et au reclassement des travailleurs victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.

Le II et le III complètent les articles L. 951-1 et L. 952-1 du code du travail et permettent aux employeurs du secteur de la pêche maritime et les cultures marines de verser à un organisme collecteur paritaire agréé la contribution qui n'aurait pas été utilisée directement au financement de la formation professionnelle au profit de leurs salariés.

Le IV complète l'article L. 953-3 du code du travail et précise que les Caisses de mutualité sociale agricoles reversent le montant de leur collecte à l'organisme collecteur paritaire agréé.

Le V complète l'article L. 953-4 du code du travail afin de créer un Fonds d'assurance formation agréé par l'État pour la formation des travailleurs indépendants à la pêche maritime et les chefs d'entreprises de pêche maritime occupant moins de 10 salariés.

L'article 32 prévoit que le Gouvernement présentera au Parlement dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi un rapport sur la situation du chômage à la pêche et ses causes ainsi que sur les moyens d'améliorer la protection des marins pêcheurs contre les différentes formes de chômage rencontrées à la pêche.

L'article 33 institue un Fonds national d'aide à la préretraite à la pêche auquel est affecté une subvention de l'État, un concours de l'Instrument financier de l'orientation de la pêche, conformément au Règlement (CE) n° 2179/95 du 20 novembre 1995, et des contributions financières des professionnels.

L'article 34 précise les conditions d'affiliation des pêcheurs à pied professionnels à un régime de protection sociale, condition nécessaire à la définition de leur statut.


Le titre VII traite de dispositions diverses.

L'article 35 permet d'étendre les dispositions de la loi du 25 juillet 1994 relative à la constitution de droits réels sur le domaine public aux installations immobilières affectées aux cultures marines, ainsi qu'au mareyage, sur le domaine public portuaire géré par les départements.

L'article 36 abroge le statut légal du mareyage de 1948 rendu caduc par la réglementation communautaire issue de la directive du 22 juillet 1991.

L'article 37 fixe les conditions d'application de la présente loi outre-mer.

CHAPITRE III - L'APPRÉCIATION PORTÉE PAR VOTRE COMMISSION

Votre commission accueille très favorablement ce projet de loi d'orientation qu'elle juge courageux dans un secteur éprouvé par la crise. Elle vous propose cependant un certain nombre d'aménagements de ce texte, tout en respectant l'architecture d'ensemble du projet.

I. UN ACCUEIL TRÈS FAVORABLE DE VOTRE COMMISSION AU PROJET DE LOI D'ORIENTATION SUR LA PÊCHE MARITIME ET LES CULTURES MARINES

Votre commission accueille très favorablement ce projet de loi et ce pour trois raisons essentielles. Tout d'abord, ce texte, qui a fait l'objet d'une concertation de grande envergure avec les professionnels, propose une vision globale de la pêche et des cultures marines en France ; de plus, ce projet, tout en s'inscrivant dans le respect du cadre européen de la politique communautaire de la pêche, est soucieux de préserver la spécificité et la richesse de notre patrimoine marin. Enfin, ce dispositif global met en place une législation moderne par rapport à celle de nos voisins européens.

A. UNE VISION GLOBALE DU SECTEUR DE LA PÊCHE ET DES CULTURES MARINES ÉTABLIE EN CONCERTATION AVEC LES PROFESSIONNELS

1. Une vue d'ensemble du secteur de la pêche et des cultures marines

Comme le souligne l'étude d'impact du Gouvernement, il existe dans ce secteur une réelle complexité de l'ordonnancement juridique. Sur le plan national, la pêche est régie par un droit ancien et complexe.

Le décret « à valeur législative du 9 janvier 1852 fixe les principes essentiels, s'agissant de la ressource, de la flotte de pêche, des marchés et des cultures marines et renvoie à des décrets en Conseil d'État le soin d'en fixer les modalités d'application. Ce texte a été modifié à de nombreuses reprises, notamment par la loi du 26 février 1966 relative aux transports. Les principales mesures de ce secteur résultent aujourd'hui des lois du 22 mai 1985 et du 3 juillet 1991 portant diverses dispositions relatives aux pêches maritimes et aux cultures marines.

Les autres lois importantes en matière de pêche sont la loi du 5 juillet 1983 relative au régime de la saisie et la loi du 2 mai 1991 relative à l'organisation interprofessionnelle des pêches maritimes et des élevages marins et à l'organisation de la conchyliculture.

S'agissant des dispositions concernant le régime social des marins, le texte fondateur est le code de travail maritime du 13 décembre 1926.

Le projet de loi soumis à l'avis de votre Haute Assemblée constitue le premier texte d'orientation de cette filière. Le parallèle peut être fait avec l'agriculture qui, depuis une trentaine d'années, a déjà connu plusieurs lois d'orientation et de modernisation.

Le Gouvernement a désiré couvrir le plus largement possible ce secteur, en prévoyant des mesures sur la gestion de la ressource, l'organisation de la filière et les cultures marines, tout en dotant la profession d'un statut fiscal, social et légal moderne.

Votre commission apprécie non seulement l'intérêt du Gouvernement pour ce secteur quelque peu délaissé, d'un point de vue juridique, mais aussi et surtout sa volonté, sans être exhaustif, de traiter l'ensemble des questions soulevées par la filière de la pêche et des cultures marines.

2. Une concertation ayant abouti à un texte consensuel

D'aucuns, peu informés du processus de négociations, ont pu considérer que la présentation de ce texte d'orientation tardait. Ce projet de loi, en effet, a fait l'objet d'une large concertation avec l'ensemble de la filière, « du marin au consommateur , en passant par les patron-pêcheurs, les mareyeurs, les Organisations de producteurs et les secteurs de la transformation (congélation, conserverie...) ainsi que de la distribution.

Votre rapporteur, au cours des 23 auditions qu'il a effectuées, a pu mesurer la réalité et l'ampleur de cette négociation.

En effet, les personnes auditionnées (la liste figure en annexe n° 1 du présent rapport), ont reconnu à la fois la volonté de concertation du Gouvernement et le caractère « globalement positif de ce texte.

Deux points, ayant fait l'objet d'intenses négociations sans pour autant réunir l'unanimité, ont eux aussi été abordés, de manière spécifique, dans le projet de loi, traduisant à nouveau, s'il en était besoin, la démarche constructive des professionnels de la filière et du Gouvernement : il s'agit, en premier lieu, des modalités de lissage sur tout ou partie de l'année de la rémunération à la part ainsi que la fixation de la durée du travail hebdomadaire retenue pour le calcul du salaire minimum interprofessionnel de croissance (article 30-X) qui seront déterminées dans un accord national professionnel ou des accords de branche étendus. En second lieu, en raison des discussions, parfois vives, sur le rattachement éventuel de la profession aux ASSEDIC, le Gouvernement, en accord avec la profession vous propose d'étudier ce problème du chômage à la pêche avant de s'engager sur la voie législative.

B. UN TEXTE RESPECTUEUX DU DROIT COMMUNAUTAIRE MAIS SURTOUT SOUCIEUX DES PARTICULARITÉS DE LA PÊCHE FRANÇAISE AU SEIN D'UNE POLITIQUE EUROPÉENNE JUGÉE PARFOIS TROP LACUNAIRE

1. Le projet de loi d'orientation traduit le respect du droit communautaire

Plusieurs articles visent à assurer un meilleur respect des engagements communautaires de la France dans le secteur des pêches maritimes :


• l'article 4
du projet de loi assure une meilleure gestion des quotas en rappelant le rôle essentiel de l'État dans l'attribution des autorisations de pêche ainsi que dans la répartition des quotas de capture ;


l'article 6 du projet de loi sanctionne les infractions aux règles européennes notamment en matière de détention de permis de pêche spéciaux de débarquement des produits de la pêche ;


les articles 22, 23 et 36 qui adaptent le statut du mareyage afin de le mettre en conformité avec la réglementation européenne issue des directives de 1991 ;


les paragraphes XVIII, XIX et XX de l'article 30 qui transposent la directive « jeunes travailleurs n° 94/33 du 22 juin 1994 ;


enfin, l'article 33 du projet de loi instituant un Fonds national d'aide à la préretraite à la pêche s'inscrit dans le cadre du Règlement n° 2719/95 du 20 novembre 1995.

2. Le projet de loi d'orientation traduit la volonté française de préserver et promouvoir le secteur de la pêche

Lors de sa venue à Quimper à l'occasion du séminaire européen des pêches les 13 et 14 mai 1996, Mme Emma Bonino, Commissaire européen a incité les marins-pêcheurs au changement et souligné que « la transformation et le commerce sont fondamentaux .

Le projet de loi d'orientation, sans nier l'importance de ces activités industrielles et commerciales, cherche à établir un équilibre entre tous les secteurs de la pêche et des cultures marines, du producteur au distributeur, affirmant le souhait de conserver une véritable filière de la pêche en France. Ainsi, ce texte tient à confirmer les spécificités du secteur de la pêche française.

Ainsi, l'organisation du marché, qui fait si cruellement défaut au niveau communautaire, est renforcée par l'attribution aux Organisations de producteurs de prérogatives étendues et par la mise en place de l'OFFIMER, organe de régulation et d'organisation du marché, dans lequel l'ensemble des professionnels de la filière sont représentés.

De plus, l'incitation au passage à la forme sociétaire et les mesures fiscales envisagées permettent aux entreprises de pêche de consolider leur situation financière.

Enfin, un important volet social vient combler les lacunes non seulement du droit français, mais aussi parfois européen, la Politique commune de la pêche ayant parfois tendance à oublier que derrière des navires se trouvent des hommes.

C. UN DISPOSITIF MODERNE DANS UNE EUROPE PLURIELLE

a) L'application du droit communautaire dans le secteur de la pêche

Le secteur de la pêche étant fortement réglementé par la Communauté européenne, les législations nationales consistent assez largement en une adaptation des règles internes aux règles communautaires.

Cette situation résulte également du fait que la politique commune de la pêche est juridiquement fondée, non sur des directives, mais sur des règlements européens directement applicables dans l'ordre juridique interne des États membres, où selon le droit communautaire, ceux-ci jouissent d'une supériorité sur toutes les autres normes de droit interne.

Les règlements européens traitent, pour l'essentiel, des conditions d'accès dans les eaux des différents États membres, de l'instauration de quotas de pêche, de la réglementation des engins de pêche (chalutage), de la fixation de tailles minimales de capture et de l'interdiction ou de la limitation de la pêche dans certaines zones.

Ils définissent également, en particulier, les limites dans lesquelles les États membres sont habilités, et ceci à titre résiduel, à adopter par eux-mêmes des mesures de conservation des ressources de pêche. Si une large autonomie est laissée aux États membres pour la gestion et la répartition des quotas de pêche qui leur sont attribués, les conditions dans lesquelles ceux-ci peuvent adopter d'autres réglementations nationales restent assez restrictives, dans la mesure où celles-ci sont soumises au contrôle préalable de la Commission pour vérification de leur conformité à la politique commune de la pêche et, surtout, ne sont opposables qu'aux seuls pêcheurs ressortissants de l'État membre qui les a édictées.

De ce fait, l'essentiel de la réglementation des pêches applicables dans les eaux des États membres de la CEE est d'origine communautaire, et les mesures nationales ne sont appelées qu'à jouer un rôle complémentaire, notamment vis-à-vis des stocks « locaux .

b) Le projet de loi d'orientation au sein des législations européennes

Les réponses apportées par le projet de loi s'inscrivent dans un environnement juridique et économique relativement hétérogène, témoignant de la diversité des législations nationales en matière maritime.


En ce qui concerne le principe de non-patrimonialisation des droits de pêche (licence, quota...), la France affiche une position différente de celle de biens d'autres États pour lesquels l'appropriation privée de la ressource est la solution idoine. Le mécanisme du quota individuel transférable (QIT) provoque dans de nombreux États, notamment aux Pays Bas, un renchérissement artificiel du coût des navires. Les néerlandais estiment, qu'une appropriation privée des « droits de pêche permet, d'une part, à l'État de récupérer des ressources lors de chaque transfert de droits, et d'autre part, évite un développement d'un marché parallèle qui se crée parfois dans un État où les droits de pêche font l'objet d'une appropriation collective. Cependant, en France, les pêcheurs ont déjà été confrontés, lors de la mise en place des PME, à de tels phénomènes qui se sont concrétisés, notamment, par une course aux kilowatts entraînant une augmentation du prix de la flotte. Ainsi la France souhaite ne pas donner de valeur à la ressource tant qu'elle n'est pas pêchée. Cette position de principe provoquera très certainement une réflexion sur ce thème au niveau européen, même si, à l'heure actuelle, l'application du principe de subsidiarité est de rigueur.


• L'organisation de la filière et du marché par le renforcement du rôle des Organisations de producteurs et la mise en place d'un office de la mer apporte des réponses concrètes à l'atomisation de la filière « Pêche
, si souvent évoquée par les autorités communautaires. Les trois séries de mesures en faveur des OP (mieux sanctionner le non respect de la règle du préavis et les infractions aux règles d'extension de disciplines, mieux impliquer les OP dans le gestion de certains quotas) renforcent l'efficacité des OP françaises. Le projet de loi d'orientation, par ces dispositions, permet à la législation française de prendre une avance certaine sur les législations espagnole et britannique.


• L'étalement des plus-values de cession et les diverses dispositions fiscales ne font, cependant, que combler un retard évident en matière d'encouragement des investissements en France par rapport à ce qui se pratique en Espagne et aux Pays Bas. En effet, l'étalement des plus-values de cession en cas de réinvestissement apparaît comme la règle dans la plupart des pays de l'Union européenne.

II. LES AMÉNAGEMENTS PROPOSÉS PAR VOTRE COMMISSION

Votre commission, tout en accueillant très favorablement ce projet de loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines, vous propose trois catégories d'amendements :

ï la première regroupe des amendements de précision et de nature rédactionnelle. Il s'agit notamment de rectifier certaines erreurs ou de préciser les dispositions envisagées : c'est le cas par exemple des amendements portant sur le Conseil Supérieur des politiques halieutique, aquacole et halio-alimentaire ;

ï la deuxième vise à modifier certaines dispositions du texte, sans pour autant porter atteinte au mécanisme mis en place : c'est le cas notamment de l'âge pour bénéficier de l'abattement fiscal prévu à l'article 15 ou de la suppression du quatrième alinéa de l'article 35 sur la collectivité en charge du versement de l'indemnité d'éviction de l'occupant temporaire ;


la troisième complète le dispositif mis en place par le Gouvernement : il s'agit, notamment, des articles additionnels sur la bande côtière, sur le bilan des dispositions fiscales envisagées ou portant sur la modification de la loi du 2 mai 1991 sur les missions du comité national de la conchyliculture.

Outre ces amendements, deux aspects ont retenu plus particulièrement l'attention de votre rapporteur.

Il s'agit, en premier lieu, des dispositions envisagées en faveur des jeunes marins. Outre le nécessaire développement de l'apprentissage que votre rapporteur vous propose, la possibilité pour cette catégorie de pêcheurs, qui s'installent pour la première fois, de bénéficier d'une capacité réelle d'autofinancement en cas d'acquisition de navires se révèle indispensable. En effet, l'étalement des plus-values de cessions concernent avant tout les marins-pêcheurs déjà en place. Par ailleurs, si le dispositif proposé par l'article 15 du projet de loi (abattement de 50 % du bénéfice imposable durant les soixante premiers mois de l'installation) est intéressant, il risque ne pas avoir à s'appliquer puisque les jeunes marins-pêcheurs ne dégagent que peu de bénéfices au cours des premières années d'installation.

Ainsi, il nous paraît nécessaire tout à la fois, d'encourager de telles mesures, d'envisager un dispositif particulier réservé aux jeunes pêcheurs qui s'installent et de pouvoir, dans quelques années, dresser le bilan de ce dispositif fiscal afin d'en examiner l'efficacité.

En second lieu, lors des auditions de votre rapporteur, le problème des « quotas hopping a été évoqué à maintes reprises. En effet, certains navires battant pavillon français sont rachetés par des ressortissants communautaires non français : ceux-ci, tout en conservant le pavillon d'origine afin de bénéficier des quotas français emploient une très faible part de main d'oeuvre française, et débarquent leur poisson dans des ports voisins, alimentant toute une activité d'aval. Compte tenu des règles communautaires, il est excessivement difficile de se prémunir contre de telles pratiques qui ont fait des ravages sur la flotte de certains États, notamment celle du Royaume-Uni dont 20 % sont détenus par des sociétés néerlandaises et espagnoles.

Bien qu'il ne concerne, pour l'instant en France, que 2 % de la flotte, soit environ 16.000 kilowatts, ce phénomène heurte le principe de la stabilité relative des quotas.

La loi n° 96-151 du 26 février 1996 relative aux transports a mis en place, dans son article premier, un système préservant le lien substantiel entre les navires et le territoire national. Ainsi, lorsqu'une société qui possède un navire portant pavillon français a son siège social situé sur le territoire d'un État membre de la Communauté européenne autre que la France, l'exploitation et l'utilisation du navire doivent être dirigées et contrôlées à partir d'un établissement stable du territoire français.

L'instauration d'un mécanisme comparable pourrait, selon votre rapporteur, ne pas suffire à restreindre ce phénomène de quotas « hopping .

Votre rapporteur ne souhaite pas modifier le projet de loi en introduisant une disposition spécifique sur ce problème afin de respecter l'homogénéité de ce texte. Pourtant, il serait opportun d'en mesurer dés maintenant les conséquences afin de déboucher sur des solutions concrètes qui préserveraient la flottille française tout en respectant les principes communautaires.

Votre commission apprécierait, en conséquence, de se voir préciser les moyens que le Gouvernement envisage de mettre en oeuvre afin de limiter cette pratique.

CHAPITRE IV - LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE M. PHILIPPE VASSEUR, MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE LA PÊCHE ET DE L'ALIMENTATION, LE MARDI 22 OCTOBRE 1996, DEVANT LA COMMISSION

M. Philippe Vasseur a effectué deux commentaires avant de préciser les grands axes du projet de loi d'orientation. Il a rappelé les caractéristiques de la crise de 1993-1994 liée aux problèmes de ressources et à la chute brutale des prix. Cette dernière était elle-même en partie due à l'internationalisation de la production, à la stagnation de la consommation de produits de la pêche et au développement des grandes et moyennes surfaces.

Il a souligné que cette crise avait été ressentie de manière plus aiguë en France en raison, d'une part, du poids des charges financières pesant sur la flottille artisanale modernisée dans les années 1980-1990 et, d'autre part, de la grande dépendance de la production française vis-à-vis des marchés du sud de l'Europe bénéficiant de dévaluations compétitives.

M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation, après avoir indiqué les principales mesures d'urgence mises en oeuvre pour faire face à ces événements -réduction des cotisations sociales, plan de restructuration...- a précisé les idées forces de ce projet de loi.

Il a fait observer que la recherche d'un meilleur ajustement de la production aux besoins du marché, l'amélioration de la gestion des entreprises, des relations sociales et la consolidation des activités de cultures marines constituaient les principales pistes de réflexion, à la suite de la crise des années 90.

Il a, ensuite, insisté sur l'insertion de ce projet de loi dans la politique de pêche au niveau communautaire.

Après avoir regretté l'insuffisance des mécanismes mis en place par l'organisation commune des marchés (OCM) et constaté la diversité des pratiques des organisations de producteurs (OP), il a exprimé le souhait de voir réviser cette OCM, la Commission européenne devant déposer un rapport d'analyse sur ce point avant la fin de l'année, a-t-il ajouté.

Il a, enfin, précisé que la France avait globalement respecté les exigences du troisième programme d'orientation pluriannuel (POP III) et a déclaré le POP IV inacceptable en l'état actuel des choses. Il a souhaité, par ailleurs, un aménagement des mesures techniques communautaires.

Après avoir rappelé la forte mobilisation de la profession durant la phase préparatoire, il a indiqué que le projet de loi était un texte relativement consensuel.

Il a, ensuite, énuméré les cinq orientations du projet de loi. En consacrant le caractère collectif de la ressource (titre II), le ministre a précisé que ce texte réaffirmait l'incessibilité des droits à produire et la responsabilité particulière de l'État en matière de fixation des conditions d'accès à la ressource. Il a ajouté que les OP pourraient se voir confier la gestion de certains quotas dans le cadre d'un plan qu'elles auraient élaboré.

Il a exprimé son regret de ne plus voir figurer dans ce projet de loi -à la suite de son passage devant le Conseil d'État- l'engagement du Gouvernement de présenter un rapport sur la bande côtière.

M. Philippe Vasseur a ensuite mis l'accent sur le second axe du projet de loi, l'organisation de la filière (titres I et II). Après avoir rappelé les limites de l'organisation actuelle du marché des produits de la pêche en France dues à l'atomisation de l'offre et à l'insuffisante prise en compte des données du marché, il a considéré que le pilotage de la production par le marché était devenu un objectif incontournable. Il a évoqué, à cette occasion, la transformation du fonds d'intervention et d'organisation des marchés pour les produits de la mer (FIOM), en office de type agricole (OFIMER), favorisant ainsi, d'une part, le dialogue jusqu'ici insuffisant entre la production et l'aval et la vocation purement économique de ce nouvel organisme, d'autre part.

Il a également fait allusion au Conseil supérieur d'orientation des politiques halieutiques, aquacole et haléoalimentaire. Il a indiqué que cette instance consultative, présidée par le ministre, devait avoir pour objectif de rechercher la cohérence des différents aspects de la politique des pêches et des cultures marines.

Le ministre a ajouté que d'autres dispositions -rationalisation des points de débarquement, redéfinition du mareyage...- rejoignaient cette même orientation, visant à mieux structurer la filière.

M. Philippe Vasseur a ensuite insisté sur la modernisation de l'entreprise de pêche qui constituait le troisième axe de ce projet (titre III).

Après avoir rappelé les objectifs du texte en la matière, il a indiqué que cette modernisation passait par la création d'une forme originale de société, la société de pêche artisanale, comparable au groupement d'aide à l'exploitation en commun (GAEC) en agriculture.

Il a énuméré les dispositions visant à envisager le passage en société afin d'assurer la stricte neutralité sur le plan fiscal et social entre le patron-pêcheur artisan et la société de pêche. Il a indiqué, à cet égard, que l'étalement des plus-values de cession attendu par la profession et accepté par la Commission, constituait une mesure essentielle du dispositif du projet de loi.

Il a, enfin, mis l'accent sur les dispositions favorables à l'installation des jeunes et à la pluriactivité.

M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation a tenu à souligner l'importance du volet social du projet de loi et, notamment, l'amélioration des conditions de vie et de travail des marins-pêcheurs avec la fin du dérôlement abusif, le clarification des engagements à la pêche et l'application de la réglementation sur le salaire minimum de croissance (SMIC) combinée à une harmonisation du régime de rémunération « à la part .

Il a ensuite fait état de la création d'un fonds national d'aide à la préretraite et de l'engagement du Gouvernement de présenter un rapport sur l'importance du chômage à la pêche et le choix d'un régime de protection contre le chômage.

Il a indiqué que ce dernier point avait suscité un très large débat dans la profession, loin d'être consensuel, les clivages dépassant très largement les oppositions syndicales classiques.

Le ministre, après avoir précisé la dernière orientation relative aux cultures marines, consacrant le caractère agricole de cette activité, a reconnu que ce texte était attendu par la profession et s'est réjoui que le Sénat l'examine en priorité.

M. Josselin de Rohan, rapporteur, après avoir rappelé que la politique française de la pêche s'inscrivait dans une politique commune de la pêche fortement intégrée au niveau européen, s'est interrogé sur le bien-fondé des positions de Mme Emma Bonino, commissaire européen qui, considérant l'état de surpêche permanent, prônait ainsi une réduction drastique des flottilles. Il a indiqué, d'une part, que la vision de Mme Bonino se révélait très malthusienne et que, d'autre part, l'Europe s'orientait peu à peu vers une politique consumériste par l'importation, à droits nuls, d'espèces venant du reste du monde. Il a interrogé ensuite le ministre sur l'insuffisance de l'OCM pêche en indiquant que les OP souhaitaient un marché mieux organisé.

M. Philippe Vasseur a indiqué qu'il partageait l'analyse du rapporteur et exprimé son désaccord avec la politique de Mme Bonino. Il a affirmé que la France se devait de rester un pays producteur et donc pêcheur. Il a souhaité que les contrôles soient renforcés au niveau communautaire. Il a ensuite fait état du paradoxe qui consistait à considérer peu à peu le retrait comme un débouché pour des espèces importées du reste du monde, estimant ainsi nécessaire la réforme de l'OCM pêche.

Répondant à M. Bernard Seillier, qui s'exprimait au nom de la commission des Affaires sociales, sur les dispositifs mis en place aux articles 33 et 34 du projet de loi d'orientation, le ministre a précisé que l'article 34, prévoyant l'affiliation à la mutualité sociale agricole (MSA) pour les pêcheurs à pied professionnels, était neutre pour l'établissement national des Invalides de la marine (ENIM). Il a, ensuite, indiqué que le bénéfice de la préretraite était ouvert à toutes les catégories de marins, sous certaines conditions précisées dans le texte du projet de loi. Il a ajouté que ce mécanisme concernait quelques dizaines de marins-pêcheurs et que le fonds national, cofinancé par l'Europe, ne pouvait pas verser d'indemnités de cessation d'activité.

M. Josselin de Rohan, rapporteur, après avoir rappelé les mécanismes de l'étalement des plus-values de cession, a demandé au ministre si la question de l'investissement initial des jeunes pêcheurs avait été envisagée.

Le ministre a rappelé que, compte tenu du contexte budgétaire, la profession avait opté pour l'étalement des plus values de cession au détriment, par exemple, des « quirats . Il a indiqué que pour l'installation des jeunes était prévu un abattement fiscal, sans pour autant que soit résolu le problème de l'investissement initial.

En réponse à Mme Anne Heinis, M. Philippe Vasseur a distingué l'allocation des autorisations de pêche de l'attribution de quotas. Il a reconnu que si la France ne pêchait que 70 % de ces quotas, elle était souvent en dépassement sur certaines espèces comme le cabillaud, le maquereau ou la sole.

M. Félix Leyzour, après s'être inquiété du danger que constituait la trop forte réduction de la flottille française, a demandé au ministre la présentation d'un bilan pour l'application du POP III en Europe.

Le ministre s'est engagé à effectuer ce bilan lors de l'examen par le Sénat du projet de loi d'orientation sur la pêche, au mois de novembre prochain.

II. EXAMEN DU PROJET DE LOI PAR LA COMMISSION, LE MERCREDI 30 OCTOBRE 1996

M. Josselin de Rohan, rapporteur, a indiqué que ce texte avait pour ambition de préparer le secteur des pêches maritimes et des cultures marines à la prochaine décennie, en offrant aux hommes et aux entreprises un cadre juridique, économique et social rénové, nécessaire pour accompagner une mutation engagée depuis déjà plus de trois ans.

Il a ensuite rappelé l'importance de ce pôle économique, tant en termes d'emplois directs et indirects que d'aménagement du territoire, en général, et du littoral, en particulier.

Il a souligné qu'après la spirale de crise du début des années 90 qui avait provoqué une baisse sensible du chiffre d'affaires et des apports liée à la réduction de la flotte, la diminution de l'effort de pêche et la raréfaction de certaines espèces, les professionnels et les pouvoirs publics avaient pris conscience de la nécessité de réorganiser en profondeur la filière, afin de la restructurer et de la moderniser.

Après avoir rappelé les mesures arrêtées depuis 1993 qui avaient eu pour objet de remédier aux difficultés les plus urgentes de ce secteur, il a précisé que le projet de loi avait été élaboré en étroite concertation avec les professionnels, permettant ainsi d'obtenir un relatif consensus sur l'essentiel des dispositions proposées.

Après avoir brièvement présenté le projet de loi, il a précisé que deux points, concernant l'un les modalités de rémunération et l'autre l'affiliation des marins à un régime d'assurance chômage, - ayant fait l'objet de larges négociations, sans pour autant réunir l'unanimité-, avaient eux aussi été abordés, de manière spécifique, dans le projet de loi, traduisant la démarche constructive des professionnels de la filière et du Gouvernement.

Il a tenu à souligner que ce projet de loi s'inscrivait dans le respect du cadre européen défini par la politique communautaire de la pêche et, qu'en particulier, plusieurs articles visaient à assurer un plus grand respect des engagements communautaires de la France.

M. Josselin de Rohan, rapporteur, s'est inquiété du contexte communautaire préoccupant dans lequel se déroulaient les négociations sur le quatrième programme d'orientation pluriannuel. Il a indiqué que, lors du dernier Conseil des ministres de la pêche, la très grande majorité des États membres avait refusé les propositions de la Commission européenne. S'il a reconnu qu'il convenait d'éviter tout amalgame et de s'attacher à examiner le dispositif proposé avec précision, il n'en a pas moins indiqué qu'il était globalement inacceptable, en rappelant que la France était l'un des États qui aurait respecté à la fin de l'année les objectifs du POP III.

Il a fait savoir que ce projet de loi d'orientation cherchait à établir un équilibre entre l'ensemble des secteurs de la pêche et des cultures marines, affirmant ainsi la volonté de la France de conserver une véritable filière de la pêche et de préserver la spécificité et la richesse du patrimoine marin.

Il a considéré que l'organisation du marché se trouverait renforcée par l'attribution aux organisations de producteurs de prérogatives plus étendues, ainsi que par la mise en place de l'Office de la mer (OFFIMER), organe de régulation et d'organisation du marché, dans lequel l'ensemble des professionnels de la filière seraient représentés. Il a confirmé que ces dispositions permettaient à la législation française de prendre une avance certaine sur les législations espagnole et britannique.

Il a, ensuite, fait remarquer l'importance du dispositif incitatif pour le passage à la forme sociétaire et du volet fiscal envisagé par le projet de loi, notamment l'étalement des plus-values de cessions en cas de réinvestissement.

Enfin, il a attiré l'attention sur l'importance du volet social du texte, qui venait combler les lacunes du droit français, mais également du droit européen.

En ce qui concerne le principe de la non-patrimonialisation des droits de pêche, il a indiqué que la France affichait une position différente de celle de nombreux autres États pour lesquels l'appropriation privée de la ressource était la meilleure solution, soulignant que le mécanisme du quota individuel transférable provoquait, dans certains États, notamment aux Pays-Bas, un renchérissement artificiel du coût des navires.

M. Josselin de Rohan, rapporteur, a insisté sur le fait que la France souhaitait donc ne pas donner de valeur à la ressource tant qu'elle n'était pas pêchée. Il a observé que cette position de principe provoquerait très certainement une réflexion sur ce thème au niveau européen, même si, à l'heure actuelle, Mme Bonino lui avait confirmé que l'application du principe de subsidiarité était de rigueur.

M. Josselin de Rohan, rapporteur, a ensuite fait part des aménagements au projet de loi qu'il comptait proposer à la commission, en distinguant les amendements de précision, ceux qui tendaient à modifier certaines dispositions du texte, sans pour autant porter atteinte au mécanisme mis en place et enfin ceux qui complétaient le dispositif du Gouvernement. Outre ces aménagements, le rapporteur a attiré l'attention de la commission sur deux aspects particuliers du secteur des pêches.

Il a évoqué, en premier lieu, l'absence, pour les jeunes pêcheurs, de mesure fiscale incitative en matière d'autofinancement lors de la première installation et de mise en place d'un système d'apprentissage.

Il a précisé qu'il lui paraissait important tout à la fois d'encourager les mesures proposées et, en même temps, de prévoir un dispositif particulier, afin d'améliorer l'autofinancement des jeunes pêcheurs.

Il a indiqué, par ailleurs, qu'il lui paraissait important d'envisager un dispositif en matière d'apprentissage pour la pêche dans le projet de loi.

Il s'est inquiété, en second lieu, du problème des « quotas hopping . Il a indiqué que des ressortissants communautaires non français, après avoir racheté des navires battant pavillon français afin de bénéficier des quotas français, employaient une très faible part de main-d'oeuvre française, et débarquaient leur poisson dans des ports voisins de la France, alimentant toute une activité d'aval. Il s'est interrogé sur les possibilités de se prémunir contre de telles pratiques.

Le rapporteur a proposé de demander au Gouvernement de lui préciser les moyens qu'il envisageait de mettre en oeuvre pour faire face à cette difficulté.

M. Josselin de Rohan, rapporteur, a souligné cependant que, si le texte proposé à la commission donnait aux professionnels les moyens d'affronter la mutation en cours dans ce secteur, seule la volonté des hommes et, tout particulièrement, le développement d'un véritable esprit de filière pourrait assurer le succès des pêches maritimes françaises de demain.

A l'issue de cette présentation, M. Félix Leyzour a souligné que le secteur de la pêche restait mal connu en France. Après avoir indiqué les principales caractéristiques des pêches maritimes françaises, il a reconnu que le projet de loi reposait sur une approche globale et relativement consensuelle de la filière.

Il a cependant estimé que ce texte ne réglait pas les problèmes structurels de la pêche dûs en partie à l'environnement communautaire et à la libéralisation des échanges.

M. Alain Pluchet s'est félicité que le projet de loi ait fait l'objet d'une concertation parfaite. Faisant référence à la codification rurale, il a estimé opportun de créer également un code de la pêche.

Après avoir souscrit à la proposition de M. Pluchet qu'il a jugée pertinente, M. Josselin de Rohan a relevé à l'intention de M. Félix Leyzour les dispositions du projet de loi qui présentaient un caractère structurel : puis il a souligné que les dispositions concernant la société de pêche artisanale constituaient un volet essentiel pour l'avenir des pêches.

La commission a procédé, ensuite, à l'examen des articles.

Elle a tout d'abord adopté sans modification l' article premier (objectifs de la politique des pêches et cultures marines).

A l' article 2 (création du conseil supérieur d'orientation des politiques halieutique, aquacole et halio-alimentaire), la commission a adopté, outre un amendement de nature rédactionnelle, deux amendements, l'un complétant les missions de cette instance, l'autre précisant ses domaines d'intervention.

A l'article 3 (transformation du fonds d'intervention et d'organisation des marchés des produits de la mer (FIOM) en office de la mer), elle a adopté un amendement de nature rédactionnelle au premier alinéa du texte proposé par le paragraphe II de cet article pour l'article 12 bis de la loi n° 82-847 du 6 octobre 1982 relative à la création d'offices d'intervention dans le secteur agricole et à l'organisation des marchés.

A l' article 4 (répartition des autorisations de pêche et gestion des quotas), elle a adopté un amendement visant à placer en priorité le critère de l'antériorité dans l'attribution des droits de pêche.

A l' article 5 (sanctions administratives à la réglementation des pêches), elle a, sur proposition de son rapporteur, adopté un amendement tendant à mieux garantir les droits de la défense.

Elle a ensuite adopté sans modification l' article 6 (sanctions pénales ou administratives pour le fait de pêcher sans permis de pêche spécial).

A l' article 7 (modifications de la loi n° 83-582 du 5 juillet 1983 relative au régime de la saisie), la commission a adopté un amendement tendant à donner une nouvelle rédaction pour le premier alinéa de l'article 7 de la loi n° 83-582 du 5 juillet relative aux saisies.

Après l'article 7, la commission a ensuite sur proposition de M. Josselin de Rohan, rapporteur, a adopté un amendement introduisant un article additionnel tendant à demander au Gouvernement un rapport sur la bande côtière.

En réponse à une question de M. Félix Leyzour, M. Josselin de Rohan, rapporteur, a précisé que le projet de loi traitait de la pêche à pied professionnelle à l'article 34 sans pour autant évoqué le secteur de la pêche de loisir, faisant l'objet d'une législation particulière.

La commission a adopté sans modification l' article 8 (définition du caractère commercial de la pêche maritime) et l' article 9 (définition du patron-pêcheur embarqué).

Après l'article 9, la commission a adopté un amendement introduisant un article additionnel visant à demander au Gouvernement un rapport sur la situation du conjoint du patron-pêcheur.

A l' article 10 (définition de la société de pêche artisanale et affirmation de la neutralité économique et sociale pour ces sociétés), la commission a adopté, outre un amendement d'ordre rédactionnel, un amendement visant à consacrer la neutralité fiscale du passage en société de pêche artisanale pour l'artisan pêcheur.

A l' article 11 (extension des conditions d'imposition de la part de pêche des artisans pêcheurs aux associés de la pêche artisanale), la commission a adopté deux amendements, l'un de nature rédactionnelle, l'autre tendant à insérer dans le troisième alinéa de l'article 34 du code général des impôts l'adhésion de la société de pêche artisanale à un centre de gestion agréé.

La commission a adopté sans modification l' article 12 (exonération de la taxe professionnelle).

Après l'article 12, la commission, sur proposition de son rapporteur, a adopté un amendement introduisant un article additionnel visant à inscrire dans la loi l'exonération de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie pour les sociétés de pêche artisanale et les artisans pêcheurs.

A l'article 13 (exonération des cotisations patronales pour la société de pêche artisanale), la commission a adopté un amendement visant à préciser la notion de marin embarqué dans l'article L. 43 du code des pensions de retraite.

A l'article 14 (étalement des plus-values de cession), la commission a adopté un amendement visant à permettre le réinvestissement de la plus-value dans un ou plusieurs navires.

A l'article 15 (aide à la première installation), la commission a adopté :

- un amendement visant, à reculer l'âge pour bénéficier de l'abattement fiscal et à introduire la présentation d'un plan d'installation pour le jeune pêcheur ;

- un amendement de coordination.

Répondant à MM. Louis Moinard et Félix Leyzour, M. Josselin de Rohan, rapporteur, a indiqué qu'il était nécessaire à terme de relever le niveau de formation dans ce secteur d'activité.

Elle a adopté l'article 15 ainsi modifié.

Après l'article 15, la commission a, sur proposition de son rapporteur, adopté un amendement introduisant un article additionnel tendant à instaurer un système de fonds commun de placement quirataire pour favoriser l'autofinancement des jeunes pêcheurs, lors de leur première installation.

Interrogé par M. Félix Leyzour, M. Josselin de Rohan, rapporteur, a indiqué que toutes les régions littorales contribuaient à l'autofinancement des jeunes pêcheurs pour leur première installation tout en veillant à l'assainissement de la situation financière du secteur.

La commission a adopté sans modification l' article 16 (seuil de soumission à l'agrément ministériel des projets d'investissement).

A l'article 17 (validation des services à terre), la commission a adopté deux amendements d'ordre rédactionnel.

La commission a adopté l' article 18 (exercice d'une activité complémentaire) sans modification.

A l'article 19 (embarquement de passagers sur un navire de pêche), la commission a adopté un amendement tendant à préciser le nécessaire respect des règles de sécurité lors de l'embarquement de passagers.

Après l'article 19, la commission a, sur proposition de son rapporteur, adopté un amendement introduisant un article additionnel visant à apprécier les effets des dispositions fiscales du présent projet de loi sur le passage à la forme sociétaire.

A l'article 20 (points de débarquement et extension de discipline), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

La commission a ensuite adopté sans modification les articles 21 (Habilitation des agents des affaires maritimes), 22 (Définition du rôle du mareyage) et 23 (Exercice illicite du mareyage).

A l'article 24 (schémas portuaires), la commission a adopté un amendement de nature rédactionnelle.

Elle a adopté l'article 25 (sanctions des infractions à la réglementation relative au débarquement des produits de la pêche) sans modification.

La commission a adopté deux amendements de nature rédactionnelle aux articles 26 (sanctions du non respect de la règle de préavis pour quitter une organisation de producteurs) et 27 (qualification agricole de l'activité des cultures marines).

Elle a ensuite adopté l'article 28 (extension de l'entraide agricole aux conchyliculteurs et aux éleveurs marins) et l' article 29 (création d'un genre de navigation culture marines) sans modification.

Après l'article 29, elle a, sur proposition de son rapporteur, adopté un amendement introduisant un article additionnel tendant à permettre aux structures professionnelles de la conchyliculture de participer à la défense de la qualité des eaux conchylicoles.

A l'article 30 (dispositions modifiant la loi du 13 décembre 1926 portant code du travail maritime), la commission a adopté, outre un amendement rédactionnel, un amendement tendant à insérer un paragraphe additionnel à l'article 30 visant à étendre les dispositions du code du travail sur l'apprentissage à la pêche artisanale.

Elle a ensuite adopté, à l'article 31 (dispositions modifiant le code du travail-formation professionnelle), un amendement tendant à prévoir le reversement par la caisse nationale d'allocations familiales des pêches maritimes du montant des sommes collectées auprès des chefs d'entreprises conchylicoles relevant de l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM) au fonds d'assurance formation « pêche .

La commission a adopté sans modification l' article 32 (rapport sur la situation du chômage à la pêche) et l' article 33 (préretraite).

A l'article 34 (affiliation des pêcheurs à pied professionnels à un régime de protection sociale), la commission a adopté un amendement tendant à rectifier une erreur matérielle.

A l'article 35 (constitution de droits réels sur le domaine public maritime), la commission a, sur la proposition de son rapporteur, après les interventions de MM. Jean-François Legrand et Félix Leyzour, adopté deux amendements : l'un tendant à la suppression de l'accord du représentant de l'État pour les principales décisions de gestion du domaine public portuaire, l'autre visant à supprimer le troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 34-8-1 du code du domaine public.

Elle a ensuite adopté l' article 36 (abrogation de la loi du 7 septembre 1948) et l' article 37 (outre-mer) sans modification.

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La commission a, enfin, adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.

DEUXIÈME PARTIE - EXAMEN DES ARTICLES

TITRE PREMIER - DE L'ORIENTATION DE LA POLITIQUE DES PÊCHES MARITIMES, DES CULTURES MARINES ET DES ACTIVITÉS HALIO-ALIMENTAIRES

Article Premier - Les objectifs de la politique des pêches et cultures marines

Par les principes qu'il énonce, l'article premier constitue en quelque sorte « le préambule de la loi .

Le projet de loi souligne, dans le premier alinéa de cet article, que la politique des pêches maritimes et des cultures marines doit être élaborée en conformité avec la Politique commune de la pêche ainsi que dans le plus strict respect des engagements internationaux conclus par la France : on sait en effet que les accords internationaux tant bilatéraux que multilatéraux en matière de pêche sont nombreux.

Les objectifs sont ensuite précisés dans cinq alinéas.


• Le deuxième alinéa -a)-
traite de la gestion durable de la ressource qui doit s'effectuer parallèlement au respect et à une valorisation des ressources halieutiques tant dans la zone des 200 milles que dans les eaux ou la France dispose de droits de pêche.

Cet alinéa insiste donc sur la nécessité pour tout un secteur de pouvoir poursuivre cette activité de pêche tout en s'engageant à respecter et à valoriser l'environnement marin. Cette exploitation durable et raisonnable peut s'effectuer, non seulement dans la zone des 200 milles marins, mais aussi dans toutes les zones où la France dispose de droits de pêche en vertu d'accords internationaux. Les droits de pêche détenus par la France sont à la fois les « droits historiques détenus par la France (c'est-à-dire les droits exercés par la France à la date du 25 janvier 1983 dans les eaux territoriales des autres États européens), ainsi que ceux obtenus en vertu d'accords de pêche conclus entre l'Union européenne et les pays tiers.


• Il est désormais largement admis, comme le précise le troisième alinéa -b)- , que c'est le marché tant national qu'international qui commande la gestion de la ressource. La filière « Pêche maritime et cultures marines a donc trois axes indissociables : la production, la transformation et la commercialisation. La prise en compte de ces trois volets est essentiel à l'élaboration d'une politique de la pêche pour les dix ans à venir.


• La modernisation de tous les outils de la filière est considérée comme primordiale dans le quatrième alinéa -c)- : celle-ci comprend non seulement la flottille mais aussi, eu égard à l'importance de la transformation et de la commercialisation, l'ensemble des entreprises situées en aval de l'acte de production. Le cas notamment du mareyage est ainsi abordé dans la suite du projet de loi.


• Le cinquième alinéa -d)- fait du développement des cultures marines, dont la production tant en volume qu'en valeur n'a fait qu'augmenter ces dernières années, un objectif essentiel de la politique de pêche et des cultures marines. La promotion de ce secteur doit s'effectuer, cependant, selon les termes mêmes du projet de loi, dans le respect de l'environnement marin.

Globalement, la qualité du milieu marin dans lequel s'opèrent les activités aquacoles et conchylicoles est satisfaisante.

Ce milieu est cependant l'objet d'agressions multiples, c'est ainsi que le dinophysis, algue microscopique phytoplanctonique apparaît régulièrement et naturellement dans les eaux littorales notamment en période estivale.

La présence d'une autre algue unicellulaire, l'alexandrium minutum, est également surveillée car sa concentration peut entraîner la présence d'une toxine paralysante (PSP). Il est important que les pouvoirs publics se préoccupent activement de suivre ces agressions et d'en réduire les méfaits, soit dans le cadre de groupes de travail internes, soit en liaison avec les autres ministères concernés (Environnement, Santé, ...).

Au plan communautaire, la directive du Conseil n° 79-923 du 30 octobre 1979 relative à la qualité requise des eaux conchylicoles a été adoptée en vue notamment « de sauvegarder certaines populations conchylicoles des différentes conséquences néfastes résultant du rejet dans les eaux de mer de substances polluantes .

La France a désigné ses eaux conchylicoles, et en assure ainsi (par l'IFREMER), un suivi global.


• Le sixième et dernier alinéa -e)- traite de la modernisation et du développement des « activités diversifiées sans les préciser et introduit la notion d'aménagement du littoral en faisant référence à l'économie des différentes régions littorales.

Cet aménagement est sous-entendu derrière l'ensemble des mesures proposées. La pêche et les cultures marines constituent en effet des activités économiques primordiales après le tourisme pour nombre de zones littorales tant au regard de la valeur ajoutée que de l'emploi direct et indirect qu'elles génèrent.

Cet article appelle une remarque quant à la portée purement indicative des termes employés.

Il est évident que l'on ne peut que souscrire à une pétition de principe aussi généreuse, mais il convient de s'interroger sur la portée juridique de telles affirmations.

En fait, il s'agit d'une affirmation, sans réelle portée normative, dépourvue de toute sanction administrative.

Or, l'ambition assignée à une loi est d'être appliquée longtemps : il convient qu'elle ne soit ni abrogée, ni vidée de son contenu dans les années qui suivent sa publication. La rédaction d'un texte législatif doit s'efforcer d'éviter bon nombre d'obstacles afin de répondre à cette ambition.

Les deux caractéristiques essentielles de la loi prises dans son sens générique sont, selon la doctrine, la généralité et la force obligatoire.

Formulé à l'aube du XIXe siècle, l'adage du grand Portalis « les lois sont des volontés conserve son actualité et doit guider le législateur. Il faut se garder de céder à la tentation des formules incantatoires ou déclaratives qui, trop souvent, s'insèrent au début d'un texte de loi, alors même qu'elles devraient figurer dans son préambule, voire dans son exposé des motifs. Tel est le reproche que votre commission peut formuler à l'encontre de l'article premier du projet de loi qui dispose que « la politique de la pêche maritime a pour objectif ... . Ce reproche ne vise pas le contenu du texte mais des réserves peuvent être exprimées sur la portée juridique d'une telle affirmation.

On aurait pu, par exemple, concevoir de compléter le cinquième alinéa de l'article en prenant en compte les intérêts socio-économiques de cette filière dans le cadre de la politique de protection du littoral et d'aménagement du territoire : de même, il aurait pu être fait allusion à une nécessaire politique de qualité et d'identification des produits de pêche et des cultures marines, et ce à quelque stade de la filière que l'on soit.

Cependant, compte tenu du caractère prospectif de ce texte, votre rapporteur vous propose d'adopter cet article, sans cependant céder à la tentation de l'amender

Suivant son rapporteur, votre commission vous propose, cependant, d'adopter l'article premier sans modification.

Article 2 - Création du Conseil Supérieur d'Orientation des politiques halieutique, aquacole et halio-alimentaire

L'article 2 crée un Conseil supérieur d'orientation des politiques halieutique, aquacole et halio-alimentaire dans le prolongement de l'actuelle Commission de suivi de la pêche, mise en place le 5 mars 1994 pour veiller à la mise en oeuvre des mesures décidées en février 1994. Cette commission se réunit une fois par mois en regroupant les professionnels et les administrations concernés.

Le premier alinéa instituant ce Conseil précise, d'une part, qu'il s'agit d'une instance consultative, placée auprès du ministre chargé des pêches et des cultures marines et définit, d'autre part, sa mission qui se révèle très large puisqu'il peut être consulté par le ministre sur toute question relative à l'application de la politique des pêches et des cultures marines (ressource, marché, structures, relations sociales, formation, emploi et recherche).

Le deuxième alinéa insiste sur deux objectifs de cette nouvelle instance : elle a pour rôle d'assurer la cohérence de l'ensemble des aspects des politiques des pêches et des cultures marines et de veiller à l'équilibre entre les « différents secteurs de production .

Le troisième alinéa a trait à la composition du Conseil, conçu comme une instance de dialogue régulier entre le ministre et les représentants du milieu professionnel au sens large (production, transformation, commercialisation, distribution, recherche, institutions financières...) en présence de représentants des ministères intéressés.

Le quatrième et le cinquième alinéas indiquent la participation du Comité national de la conchyliculture et du secteur d'élevages marins à ce Conseil supérieur lorsque des sujets d'intérêt commun méritent d'y être évoqués.

Le sixième et dernier alinéa prévoit un décret sur la composition et les missions du Conseil supérieur d'Orientation.

Ce Conseil supérieur d'orientation des politiques halieutique, aquacole et halio-alimentaire s'apparente au Conseil supérieur d'orientation de l'économie agricole et alimentaire instauré par la loi n° 80-502 du 4 août 1980 à l'article 4-I et qui a été modifié par l'article 2 de la loi n° 95-95 sur la modernisation de l'agriculture en date du 1er février 1995.

La spécificité de la filière des pêches maritimes et des cultures marines nécessite, semble-t-il, à juste raison, la distinction entre une instance propre à ce secteur et un organe à compétence agricole et agro-alimentaire.

Il s'agirait d'une instance qui n'est pas appelée à se substituer aux organismes existants (CNPM, FIOM, CNC...) qui ont chacune un rôle et des compétences propres et ont acquis dans leur domaine une légitimité indiscutable.

L'article 2 de ce projet de loi a pris le parti délibéré de ne pas détailler l'ensemble des missions confiées au Conseil supérieur d'orientation des politiques halieutique, aquacole et halio-alimentaire, en renvoyant cette fonction à un décret, alors que le paragraphe I de l'article 4 de la loi n° 80-502 avait précisé l'ensemble des domaines dans lesquels le Conseil examine et peut rendre des avis. Ce choix « de ne pas surcharger la loi paraît judicieux à votre rapporteur. Néanmoins, votre commission vous propose trois amendements, l'un étant de nature rédactionnelle.

Le second amendement porte sur l'inexactitude du terme « secteur de production inscrit au deuxième alinéa : compte tenu du nom que porte ce nouvel organisme (CSO des politiques halieutique, aquacole et halio-alimentaire), de la diversité de sa composition et des termes utilisés à l'article premier (« production, transformation et commercialisation ), il est plus opportun de parler des « différentes activités de la filière .

Le troisième amendement, sans atteindre le niveau de précision du texte sur le Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire, indique les domaines d'examen de ce nouvel organisme, et ceci indépendamment des attributions qui lui seront conférées par les dispositions réglementaires ultérieures.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2, sous réserve de trois amendements.

Article 3 - Transformation du FIOM en office de la Mer

Cet article prévoit d'instituer, par voir réglementaire, un Office des produits de la mer, destiné à se substituer au Fonds d'intervention et d'organisation des marchés des produits de la mer en l'inscrivant dans le cadre légal des offices agricoles.

Crée en 1975 sous la forme d'un établissement public industriel et commercial, le Fonds d'Intervention et d'Organisation des Marchés des produits de la pêche maritime et des cultures marines (FIOM) est, pour la France dans le secteur des produits de la mer, l'organisme correspondant du FEOGA. Il dispose pour 1996 d'un budget de 148 millions de francs dont 125 millions de francs de subventions de l'État.

Les cinq missions prioritaires du FIOM sont l'annonce anticipée des apports qui permet d'équiper les bateaux en matériel de prévision des débarquements et de mettre en place des logiciels pour le traitement des données, la mise en réseau des opérateurs de la filière consistant à faciliter les actions à distance par l'interconnexion informatique de criées, la normalisation des appellations et des tailles pour les principales espèces des pêcheries françaises sur tout le littoral, l'amélioration de la qualité et la valorisation des produits de la mer et l'aide à la modernisation et à la mise aux normes des ateliers.

Le paragraphe I de l'article 3 modifie le titre de la loi n° 82-847 du 6 octobre 1982 relative aux offices en matière agricole afin que celle-ci puisse s'appliquer aussi, pour partie, au secteur des produits de la mer.

Le paragraphe II de l'article 3 ajoute un article 12 bis à la loi précitée en indiquant qu'un décret en Conseil d'État « peut créer un office dans le secteur des produits de la mer. Le dernier alinéa du II indique que ce décret précisera les modalités selon lesquelles les avis rendus par l'office et mentionnés aux articles 3, 5 et 7 sont donnés pour le secteur des produits de la mer, allant ainsi dans le sens d'un rapprochement avec l'organisation et le fonctionnement des offices agricoles.

L'insertion d'un article 12 bis et non pas d'un nouvel article dans le titre portant sur « les dispositions diverses de la loi de 1982 est justifié principalement par deux raisons : tout d'abord, les éléments généraux concernant les offices sont au titre I de la loi de 1982 : or, seul ce titre doit être appliqué à l'OFFIMER, le reste du texte étant totalement de nature « agricole . De plus, les avis du CSO sur les offices agricoles sont évoqués dans ce seul titre. Comme l'OFFIMER renvoie au CSO « Pêche , il est logique que la disposition le concernant soit la plus proche possible des articles en cause. Ainsi, afin de montrer l'homothétie entre les offices agricoles et le futur OFFIMER, votre rapporteur souscrit totalement à ce choix de technique juridique.

La création de ce nouvel office a notamment comme conséquences :

- un rééquilibrage de la composition du conseil d'administration permettant d'obtenir une parité réelle entre l'amont et l'aval de la filière et donc une meilleure organisation de celle-ci : la filière comprend bien entendu le marin-pêcheur, l'organisation de producteurs, le mareyeur et l'ensemble du secteur de la transformation, de la distribution et de la commercialisation. Sa composition pourrait s'inspirer de celle de la Commission de suivi tout en étant de taille plus réduite de manière à faciliter le dialogue en son sein.

- la création de comités spécialisés par produits ou groupe de produits assurant un réel suivi de la ressource ;

- le rattachement du personnel au statut commun des offices ; ces personnels disposent ainsi d'un statut stable.

- le transfert de la "section sociale" qui gère les caisses de chômage-intempéries au Comité national des pêches maritimes et des élevages marins afin d'attribuer à chaque institution la pleine et entière responsabilité de ses compétences.

Le service social des pêches maritimes constitue, en effet, une direction du comité national des pêches maritimes et des élevages marins.

Il intervient dans l'ensemble des communes situées dans la circonscription des quartiers des affaires maritimes où il assure une permanence, tant en métropole qu'outre-mer, totalisant sur le littoral 35.000 heures de présence effective en 1995.

Les actions prioritaires en 1995 et 1996 ont essentiellement porté sur les problèmes financiers des familles : habitat, santé, formation et réinsertion professionnelle (bourses et prêts), loisirs (classes de découverte, colonies de vacances), situations d'urgence (aides exceptionnelles, secours aux orphelins, aux marins malades ou accidentés, aux veuves de marins disparus en mer, etc.)

La transformation du FIOM en OFFIMER permet la constitution d'un organisme à vocation économique, assurant un véritable rôle de pilotage de la filière, notamment par le dialogue interprofessionnel et un encouragement au développement d'une politique de partenariat entre l'amont et l'aval. Cet outil au service des professionnels de la pêche et des cultures marines doit permettre d'assurer rapidement la traçabilité des produits de l'amont à l'aval.

Cependant, à l'instar des dispositions portant création des offices agricoles (article premier de la loi de 1982), votre commission vous propose un amendement permettant d'inscrire dans la loi d'orientation la création de cet office de la mer et non sa simple possibilité.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 3 sous réserve d'un amendement.

TITRE II - DE L'ACCÈS A LA RESSOURCE

Article 4 - Répartition des autorisations de pêche et gestion des quotas

L'article 4 affirme, d'une part, la compétence de l'État dans la délivrance des autorisations de pêche notamment sous forme de licences et dans la répartition des quotas de capture et, d'autre part, l'incessibilité de ces droits.

Le premier alinéa indique la nécessaire modification de l'article 3 du décret du 9 janvier 1852 sur l'exercice de la pêche maritime à cet effet.

Le deuxième alinéa (1° de l'article 4 modifiant le deuxième alinéa de l'article 3 précité) prévoit que, lorsque la mise en application des règlements de la Communauté européenne l'exige ou le permet, ou lorsque la pêche s'exerce dans les eaux ou par des activités ne relevant pas du champ d'application de ces règlements, les paragraphes I, II et III s'appliquent. La suppression des mots « des décrets fixent les conditions dans lesquelles peuvent être prises les mesures suivantes est donc une disposition de coordination avec les 2° et 3° de l'article 4.

Le troisième alinéa introduit un paragraphe I dans le texte modifié.

Le quatrième alinéa (2° de l'article 4 précisant les termes du I de l'article 3 du décret précité) prévoit qu'un décret en Conseil d'État détermine les conditions dans lesquelles l'autorité administrative agit dans l'exercice de ses pouvoirs : celle-ci doit tenir compte, cependant, non seulement de la protection de la ressource mais aussi des impératifs de gestion des marchés, des équilibres économiques et sociaux et des antériorités des producteurs. Une telle définition des critères de répartition assure un cadre stable mais non figé de ces activités. Cependant, la non patrimonialisation ne devant pas se traduire par une insécurité pour les armements qui ont besoin de visibilité pour, leur gestion, il est prévu de conserver comme critère d'attribution des droits de pêches les antériorités.

Le cinquième alinéa réaffirme le caractère annuel des attributions de licences : une telle mesure contribue à empêcher leur patrimonialisation tout en marquant la volonté de l'État de garantir un cadre stable de nature à préserver au mieux les intérêts des armements. Cependant cette disposition ne fait pas obstacle à des cessions en cours d'année lorsque par exemple un pêcheur arrête son activité.

Il est à noter que la délivrance des autorisations de pêche s'effectue soit directement par l'autorité administrative mentionnée au présent alinéa soit « sous son contrôle , comme le précise le texte du projet de loi : ce contrôle pourrait être exercé dans le cadre d'une répartition effectuée par le Conseil national des pêches marines : cet organisme est, en effet, l'émanation de l'organisation interprofessionnelle des pêches maritimes et des élevages marins qui repose sur le principe de l'élection par collège et par catégorie de représentants des pêcheurs d'une part, des patrons et armateurs, d'autre part : l'ensemble des organisations professionnelles siègent au sein de cette instance : ainsi l'attribution des autorisations de pêche peut-elle être faite par l'ensemble des acteurs de la filière, sous le contrôle de l'autorité administrative.

Par ailleurs, le lien est maintenu entre une entreprise et un navire lors de la délivrance de ces autorisations afin de demeurer dans le cadre de la pêche artisanale.

Le sixième alinéa prévoit également les conditions dans lesquelles l'État peut confier aux organisations de producteurs ou à leur unions (pour leurs adhérents) ainsi qu'à des navires ou des groupements de navires la gestion de certains quotas de captures.

Cette répartition de sous-quotas peut donc être faite par la profession organisée (en OP ou en Union) ou, lorsque ce n'est pas le cas, par des navires ou des groupements de navires ; le navire ou le groupement de navires ne sont pas des personnes mais des biens et ce sont leurs propriétaires (personne physique ou morale) qui sont les attributaires réels des autorisations de pêche. Ces dispositions sont reprises des textes réglementaires en vigueur.

L'incessibilité des droits résultant de ces sous-quotas et le caractère annuel de ces attributions sont réaffirmés. Cette règle de l'incessibilité des droits de pêche, quotas ou licences, a pour conséquence de ne pas leur donner de valeur comptable ni de les faire figurer à l'actif du bilan.

Pour mémoire, le Règlement n° 847/96 du Conseil du 6 mai 1996 a introduit une marge de souplesse dans la gestion annuelle des quotas de pêche : en effet, dans la limite de 10 % d'un quota, les États membres ont la possibilité de reporter un solde de quota disponible en fin d'année ou d'anticiper les captures sur le quota de l'année suivante.

Le septième alinéa introduit un paragraphe II dans le texte modifié.

Le huitième alinéa souligne que l'allocation par l'autorité administrative aux organisations de producteurs ou à leur unions de la gestion de certains quotas de captures de leurs adhérents doit s'effectuer dans le cadre d'un plan de gestion élaboré par elles. Ce plan doit respecter un certain nombre d'objectifs comme ceux d'assurer un développement économique durable du secteur de la pêche et de garantir l'accès à la ressource et la bonne utilisation de celle-ci. La constitution d'un tel plan devrait permettre de mieux gérer la ressource en fonction du marché.

Le neuvième alinéa précise qu'un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du plan de gestion des organisations de producteurs et les conséquences pour l'attribution des quotas l'année suivante en cas de non respect des règles précédemment édictées.

Les dixième et onzième alinéas insèrent un paragraphe III qui reprend les mots supprimés au deuxième alinéa de l'article 4, permettant ainsi une meilleure coordination avec la rédaction du nouvel article 3 compte tenu de la création de deux paragraphes.

Le douzième et dernier alinéa abroge dans ce paragraphe III nouvellement crée le 2° de l'article 3 du décret précité ainsi que quelques mots dans le 5°. Cette abrogation est la conséquence logique de l'allocation par l'État d'autorisations de pêche et de sous-quotas conformément aux paragraphes I et II.

Outre l'affirmation de la non patrimonialisation des quotas ou des licences de pêche par l'affirmation du rôle directeur de l'État et de l'incessibilité de ces droits, ce dispositif permet de développer le rôle des organisations de producteurs à l'interface de la ressource et de la mise en marché ; par ailleurs, celles-ci sont sécurisées afin de pouvoir gérer les apports, pour autant qu'elles gèrent effectivement leur sous-quota.

Votre commission, tout en approuvant ce dispositif, vous propose d'adopter un amendement au quatrième alinéa de cet article en inversant l'ordre d'énumération des conditions dans lesquelles les décrets en Conseil d'État déterminent la délivrance des autorisations de pêche et la répartition de quotas de capture par l'autorité administrative : elle estime primordial de considérer comme premier critère d'attribution les antériorités, les autres critères ne jouant qu'à titre subsidiaire.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 ainsi modifié.

Article 5 - Sanctions administratives à la réglementation des pêches

Cet article renforce les sanctions administratives applicables aux infractions à la police des pêches maritimes en prévoyant la possibilité de suspendre les autorisations de pêche.

Le premier alinéa indique la disposition législative modifiée : il s'agit de l'article 13 du décret du 9 janvier 1852.

Le deuxième alinéa précise que le ministre chargé des pêches maritimes et des cultures marines peut prendre un certain nombre de sanctions à la suite d'infractions définies dans les articles 6, 7 et 8 du décret de 1852. Parmi celles-ci, la suspension des autorisations de pêche délivrées en application de la réglementation nationale ou communautaire (licences...) s'ajoute à la liste prévue dans le texte initial (suspension des droits et prérogatives afférents aux brevets, diplômes ou certificats de capitaine...).

Les trois alinéas suivants établissent des garanties en cas de sanction. Conformément au respect des principes des droits de la défense, les intéressés sont tenus informés des charges qui pèsent sur eux (avant que les poursuites soient engagées), ont accès à leur dossier et disposent d'un délai pour présenter leur défense. La sanction, prise après avis d'un conseil de discipline, doit d'abord être motivée dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'État.

Votre rapporteur tient à souligner que les professionnels seront très attentifs au texte d'application portant sur la composition de ce conseil de discipline.

En outre, le sixième alinéa prévoit un délai de prescription d'une année pour la poursuite des infractions susmentionnées.

Enfin, le septième et dernier alinéa précise que la décision de sanction peut être assortie d'un sursis à exécution et faire l'objet d'un recours de plein contentieux devant le tribunal administratif. Ce type de recours juridictionnel permet notamment à l'intéressé de demander au juge administratif de condamner l'Administration au paiement d'indemnité.

Sous réserve d'un amendement précisant au cinquième alinéa les droits de la défense, votre commission vous propose d'adopter l'article 5 ainsi modifié.

Article 6 - Sanctions pénales ou administratives pour le fait de pêcher sans licence ou sans permis de pêche spécial

L'article 6 prévoit de sanctionner pénalement le fait de pêcher sans licence professionnelle et sans permis de pêche spécial lorsque ceux-ci sont exigés. De même, il renforce le régime de l'amende administrative pour les infractions à la réglementation prise par l'organisation professionnelle issue de la loi du 2 mai 1991.

Il est composé de trois paragraphes.

Le paragraphe I donne une nouvelle rédaction pour le 14° de l'article 6 du décret du 9 janvier 1852 : il tire les conséquences de l'évolution de la réglementation, désormais largement issue des textes communautaires ou professionnels en prévoyant la possibilité de sanctionner leur application comme pour les réglementations d'origine étatique. Il est prévu ainsi de sanctionner le fait de pêcher sans les licences de pêche délivrées par les comités des pêches ou sans les permis de pêches spéciaux, dont la création est prévue par la réglementation communautaire.

Le paragraphe II de ce même article donne une nouvelle rédaction pour le a) de l'article 6 de la loi n° 91-411 du 2 mai 1991 relative à l'organisation interprofessionnelle des pêches maritimes et des élevages marins et à l'organisation de la conchyliculture. Le projet de loi accentue les effets de l'amende administrative prévue en cas de manquements aux délibérations prises par l'organisation professionnelle et rendues obligatoires : tout en maintenant que le montant unitaire de l'amende ne peut dépasser le maximum prévu pour la contravention de la cinquième classe et que son produit est versé à l'Établissement National des Invalides de la Marine (ENIM), le montant de l'amende est fixé désormais en fonction du volume pêché en infraction aux délibérations rendues obligatoires.

Le paragraphe III complète l'article 6 de la loi du 2 mai 1991 en prévoyant un délai de prescription pour la poursuite des infractions susmentionnées d'une année et en précisant que la décision de sanction peut être assortie d'un sursis à exécution et faire l'objet d'un recours de plein contentieux devant le tribunal administratif. Ce mécanisme est identique à celui mis en place à l'article 5.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 6 sans modification.

Article 7 - Modifications de la loi du 5 juillet 1983 relative au régime de la saisie

Cet article permet l'intervention de l'administration à tous les stades de la filière de commercialisation en prévoyant des possibilités de saisir les produits de la pêche dans les départements non littoraux.

Il est constitué de quatre paragraphes.

Le paragraphe I substitue aux termes d'» autorité maritime et d'» autorité maritime compétente celui d'» autorité compétente dans les articles 2, 3 et 4 de la loi n° 83-582 du 5 juillet 1883 relative au régime de la saisie. Ces articles concernent, d'une part, la saisie de tous les instruments utilisés à des fins de pêche, de même que les navires ou toute embarcation et, d'autre part, la destination des saisies des produits de la pêche. La modification envisagée est nécessaire pour l'article 4 puisque désormais les personnels des Directions départementales de l'agriculture et de la forêt ou des Directions de la concurrence et de la répression des fraudes, qui ne sont pas des autorités maritimes, peuvent effectuer des saisies des produits de la pêche. Concernant les articles 2 et 3, le projet de loi a entendu harmoniser les rédactions puisque même après l'introduction par l'article 7 du paragraphe III, seuls les chefs de quartier des affaires maritimes sont habilités à saisir les instruments et les navires de pêche.

Le paragraphe II complète la liste des personnes compétentes pour rechercher et constater spécifiquement les infractions dans le domaine des pêches maritimes en y incorporant les vétérinaires inspecteurs et les techniciens des services vétérinaires ainsi que les agents de la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Ces autorités sont habituellement habilitées à effectuer la recherche et la constatation des infractions dans tous les départements pour les produits alimentaires. Le deuxième alinéa de ce paragraphe II précise qu'un décret en Conseil d'État fixe les modalités de ces contrôles.

Le paragraphe III comble un vide de la loi n° 83-582 du 5 juillet 1983 sur les saisies en désignant dans les départements non littoraux une autorité administrative habilitée à exercer les prérogatives reconnues jusque-là aux seuls chefs de quartier des affaires maritimes et qui de ce fait ne pouvaient s'exercer ailleurs que sur le littoral (personnels des Directions départementales de l'agriculture et de la forêt ou des Directions de la concurrence et de la répression des fraudes). Cette habilitation est cependant strictement limitée aux seuls produits de la pêche.

Cette disposition rend nécessaire une nouvelle rédaction du premier alinéa de l'article 7 de la loi n° 83-582 du 5 juillet 1983 sur les saisies afin d'harmoniser les textes tant sur la notion d'autorité maritime que sur celle de chef du service des affaires maritimes. En effet, l'article 5-III de la loi n° 96-609 du 5 juillet 1996 portant dispositions diverses relatives à l'outre-mer a modifié cet alinéa en lui donnant une version différente, sans prendre en compte préalablement le changement opéré par la loi n° 96-151 du 26 février 1996 sur les transports dans son article 12-II. Votre commission vous propose donc un amendement afin de clarifier les textes.

La coordination avec les dispositions antérieures nécessite un paragraphe IV. Celui-ci concerne les officiers et agents habilités à appréhender, les instruments à des fins de pêche, les produits de la pêche et les navires ou toute embarcation, et qui doivent les remettre à l'autorité maritime compétente pour saisie (c'est-à-dire les chefs de quartier des affaires maritimes). Le texte initial parle « des officiers et agents autres que l'autorité maritime désignée au premier alinéa de cet article 7 ; compte tenu du nouvel alinéa introduit au III, il est, en effet, nécessaire de préciser « des officiers et agents autres que les autorités désignées aux premier et deuxième alinéas du présent article .

Votre commission vous propose d'adopter l'article 7 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 7 - Rapport sur la bande côtière

Cet article concerne la bande côtière.

Du fait de sa proximité et de l'intérêt vital qu'elle a toujours représenté pour les communautés littorales, la mer côtière a de tout temps suscité un fort sentiment d'appartenance. Le retour à la côte des gros chalutiers en mal de ressource et la conversion galopante de nombreuses flottilles au métier du filet n'ont fait qu'exacerber les tensions. La bande côtière, en tant que bien collectif libre d'accès était par définition difficile à gérer du fait de sa potentialité, devenue trop faible pour admettre sur une même zone la cohabitation de métiers aux techniques incompatibles.

La bande côtière n'est pas une et indivisible. Par ailleurs, la configuration du site est un facteur important de vulnérabilité des eaux.

Or, la notion de bande côtière est inexistante en droit. Seule la limite des 12 milles retient l'attention du juriste : c'est la limite des eaux territoriales. La question de la gestion à l'intérieur de cette zone est, pour cette raison, souvent isolée de celle, plus générale, de l'ensemble de la Zone économique exclusive française. D'une part, parce que ses eaux sont réputées riches, fragiles et convoitées à la fois mais surtout parce que cette bande côtière bénéficie, en droit communautaire, d'un statut particulier en matière d'accès la ressource. Il convient cependant d'être clair sur le sujet : le droit communautaire ne retient le particularisme de la bande côtière qu'en ce qui concerne l'accès des autres États membres (article 6 du Règlement CEE n° 3760/92 du 20 décembre 1992). En revanche, le régime communautaire de gestion et de conservation des ressources a vocation à s'appliquer à cet espace comme dans le reste de la ZEE.

En 1970, les six premiers États membres de la CEE ont décidé de communautariser leurs eaux. Ils ont exclu toutefois de ce processus une bande littorale de 6 milles, réservée à leurs nationaux. En 1983, le statut dérogatoire de la bande côtière est maintenu et l'étendue des eaux territoriales passe à 12 milles, et ce jusqu'en 2002, entretenant ainsi la confusion entre les notions de bande côtière et mer territoriale. Des pêcheurs d'autres États membres sont toutefois admis à exercer leur activité dans ces 12 milles sur la base d'accords de voisinage ou de « droits historiques .

Ce régime dérogatoire n'a pas fait l'objet de révision.

La bande côtière constitue donc une zone, avec celle des 12 milles, particulièrement sensible pour la gestion de la ressource, où se concentre la majeure partie de la flottille. Surexploitation, conflits entre métiers, non-respect de la réglementation sont les questions qui reviennent le plus souvent.

La mise à plat des règlements, souvent anciens et inadaptés, paraît nécessaire à l'élaboration de nouveaux textes prenant en compte des objectifs de protection d'une zone sensible et de cohabitation des métiers, et à la réalisation de contrôles rigoureux de la zone.

Cependant si les problèmes sont bien identifiés, les solutions ne font pas l'objet d'un consensus. Un travail de réflexion et d'approfondissement apparaît nécessaire qui ne peut être mené à bien dans les délais impartis pour la présentation du projet de loi d'orientation.

Dès lors, il est proposé de prévoir dans la loi, le principe de la présentation, dans un délai de deux ans, d'un rapport par le Gouvernement. Ce délai permettra d'étudier en concertation étroite avec les professionnels les moyens de remédier aux difficultés actuelles et en même temps de préparer la renégociation du règlement communautaire qui interviendra avant l'échéance de 2002.

Au-delà, cette réflexion pourrait s'étendre à la gestion intégrée de la zone côtière, prônée par l'Union Européenne, et prenant en compte sa fragilité et les risques d'interactions avec les autres activités littorales.

Votre commission vous propose d'adopter l'article additionnel après l'article 7.

TITRE III - DE L'ENTREPRISE DE PÊCHE

Article 8 - Définition du caractère commercial de la pêche maritime

L'article 8 est composé de deux alinéas : il consacre le caractère commercial de l'activité de pêche maritime.

Le premier alinéa indique que l'activité de pêche maritime est réputée commerciale si trois conditions cumulatives sont réunies :

* l'activité doit être exercée à titre professionnel ;

* elle doit être pratiquée à bord d'un navire ;

* la commercialisation des produits doit être l'objectif de cette activité.

Le deuxième alinéa précise qu'un décret fixe la date à partir de laquelle ces commerçants doivent s'inscrire au registre du commerce et des sociétés.

Les tableaux ci-dessous montrent la faiblesse de la forme sociétaire dans le secteur des pêches maritimes.

NOMBRE D'ENTREPRISES D'ARMEMENT À LA PÊCHE EN FONCTION DE LEUR STATUT JURIDIQUE (ÉTUDE D'IMPACT DU GOUVERNEMENT)

CLASSEMENT DES ENTREPRISES D'ARMEMENT À LA PÊCHE EN FONCTION DU NOMBRE DE LEURS NAVIRES

Cet article répond à un souci de clarification juridique de la situation de l'entreprise de pêche artisanale et consacre la nature commerciale de la pêche maritime professionnelle conformément à la jurisprudence traditionnelle des cours d'appel qu'un arrêt de la Cour de cassation avait remis en cause. Il exclut toutefois de cette définition la pêche à pied qui constitue pour sa part une activité de nature agricole.

Cette reconnaissance de la qualité de commerçant entraîne l'inscription des pêcheurs au registre du commerce et des sociétés -ce qui constitue ipso facto une présomption de poursuite d'activité- et leur donne la possibilité d'être électeurs et éligibles dans les organismes consulaires. Par ailleurs, en caractérisant dans la loi, la pêche d'activité commerciale, il est confirmé que les procédures de prévention et de traitement des difficultés des entreprises de pêche relèvent bien des tribunaux de commerce : ceux-ci ont, en effet, une grande pratique de ces procédures qui les amènent à privilégier la poursuite de l'activité des entreprises. En outre, ces procédures favorisent des démarches préventives sous l'autorité du tribunal de commerce. L'inscription au registre du commerce et des sociétés permet également d'attester de l'existence et de la continuité de l'entreprise de pêche au-delà de l'activité ou du désarmement temporaire ou définitif des navires dont les dirigeants de l'entreprise sont les propriétaires. En matière fiscale, l'absence de registre des entreprises de pêche conduit le plus souvent l'Administration à appeler les plus values à court terme constatées lors de la vente de l'unique navire, l'assimilant à une cessation d'activité alors même qu'un réinvestissement ultérieur est prévu, voire en cours.

Par contre, la création d'un registre spécifique pour les pêcheurs a été écartée afin d'harmoniser l'inscription de toutes les entreprises commerciales.

Cette reconnaissance implique également que l'activité du conjoint du patron pêcheur, dans le cadre de l'entreprise de pêche, est régie par les dispositions de la loi n° 82-256 du 10 juillet 1982 relative aux conjoints d'artisans et de commerçants travaillant dans l'entreprise familiale, et peut prévoir, en conséquence, un mandat général d'administration courante.

Selon l'étude d'impact du Gouvernement, l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés entraîne un coût de 700 francs pour une personne physique et de 1.200 francs pour une personne morale. S'ajoutent des frais de constitution de dossier d'environ 300 francs, de publication de moins de 1.000 francs et d'enregistrement de 500 francs. Pour mémoire, les mentions initialement portées au registre doivent faire l'objet d'une mise à jour régulière car elles sont opposables aux tiers. En cas de cessation totale d'activité, l'intéressé doit demander sa radiation dans un délai d'un mois ; il est radié d'office au terme d'un an.

Votre commission vous propose d'adopter sans modification l'article 8.

Article 9 - Définition du patron pêcheur embarqué

Cet article complète la définition du propriétaire embarqué au sens de la réglementation de l'ENIM, en reconnaissant le maintien du statut du patron embarqué sur son navire pour les périodes où le patron n'est pas embarqué sur son navire. Ces périodes de « débarquement ne doivent pas dépasser 50 % au plus du total des services validés chaque année par l'ENIM au titre de la navigation.

Une telle disposition permet au patron-pêcheur de se consacrer davantage à la gestion économique de son entreprise et à la commercialisation des produits pêchés par son navire, en lui donnant la possibilité de travailler pour son entreprise, à terre, tout en conservant son statut de patron embarqué et donc le bénéfice du régime de l'ENIM.

Cette disposition est donc neutre pour l'ENIM dont le nombre de cotisants actifs est estimé à 45.000 et de retraités bénéficiant de pensions (réversion incluse) à 120.000.

Votre commission vous propose d'adopter sans modification l'article 9.

Article additionnel après l'article 9 - Rapport sur la situation du conjoint du patron pêcheur

Par analogie avec d'autres secteurs (lois du 4 juillet 1980 pour le conjoint collaborateur agricole et du 10 juillet 1982 pour les artisans-commerçants et du 11 février 1994 pour le conjoint salarié), l'instauration d'un statut du conjoint de pêcheur ou du conchyliculteur est à examiner. En effet la plupart de femmes mariées à des pêcheurs ou des conchyliculteurs participent effectivement à l'activité de l'entreprise. Elle est souvent secrétaire, comptable ou commerçante : elle assure un véritable travail et contribue à la bonne marche de l'entreprise. Pourtant lors des événements majeurs de la vie (retraite, veuvage, liquidation ou vente de l'entreprise, divorce), ces conjoints se retrouvent sans droits. Ceci aboutit parfois à des situations difficiles.

Cependant, compte tenu des spécificités de l'activité de pêche artisanale, le statut du conjoint de pêcheur pose trois questions :


• la possibilité de doter le conjoint d'un mandat général d'administration courante lui permettant d'exercer, au nom de l'entreprise, des responsabilités liées à la gestion et à sa direction, n'emporte pas pour autant la nécessité de créer un statut de salarié et donc de mettre en place une rémunération particulière imputée sur l'armement. L'enregistrement de l'entreprise de pêche au registre du commerce et des sociétés (RCS) ne fait pas acquérir automatiquement au conjoint un mandat général d'administration courante ; il faut pour cela que l'identité du conjoint soit inscrite sur le RCS ;


• la possibilité de faire bénéficier le conjoint - collaborateur du crédit d'impôt formation prévu par la loi « Madelin du 11 février 1994 est à étudier ;


• en ce qui concerne le statut social, le conjoint peut relever, soit du régime d'assuré volontaire du régime général, soit du régime d'ayant droit du chef d'entreprise.

Toutes ces questions nécessitent un examen approfondi qui pourrait déboucher, comme le propose l'article additionnel après l'article 9, sur un rapport du Gouvernement au Parlement dans un délai de deux ans après la publication de la loi.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel après l'article 9.

Article 10 - Définition de la société de pêche artisanale et affirmation de la neutralité économique et sociale pour ces sociétés

L'article 10 pose les principes permettant d'assurer la neutralité de la mise en société des entreprises de pêche artisanale tant en terme économique que social.

Il se décompose en trois paragraphes.

Afin d'encourager la mise en société des entreprises de pêche artisanale, le paragraphe I indique, en premier lieu, que la société de pêche artisanale est une société de personne, c'est-à-dire relevant de l'impôt sur le revenu -on trouve parmi ce type de société la société en nom collectif, la société en commandite simple, la société à responsabilité limitée (SARL) de famille et l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL), sauf choix pour l'impôt sur les sociétés-.

Il précise, en second lieu, les critères que doit remplir une société pour être assimilée à une société de pêche artisanale. Peut donc être qualifiée de société de pêche artisanale, la société :

* dont 100 % des droits sociaux et des droits de vote sont détenus par un ou des pêcheurs, qui en assurent la direction et sont embarqués sur le ou les deux navires, propriété de la société ;

* dont 100 % des droits sociaux et des droits de vote sont détenus par un ou des pêcheurs qui en assurent la direction par un ou des pêcheurs embarqués sur le ou les deux navires dont la société est copropriétaire majoritaire ; toutefois, lorsque le navire est détenu en copropriété avec un armement coopératif agrée par le ministre chargé de la pêche dans le cadre d'un portage temporaire d'une durée maximale de 10 ans, le respect du pourcentage précédent n'est pas exigé. Les parts détenues par les ascendants, descendants ou conjoints des marins pêcheurs sont assimilées à celles détenues par ces derniers.

Ainsi sont indiqués les types de sociétés qui sont assimilés au patron pêcheur artisan. La nécessité de détenir 100 % des parts sociales, que la société soit propriétaire ou copropriétaire du navire, est une disposition visant à simplifier le contrôle du caractère artisanal de l'entreprise. De plus, pour des raisons d'aménagement du littoral et de pérennité des équilibres portuaires, le caractère artisanal ne peut être réservé à une entreprise susceptible d'être propriétaire d'un nombre illimité de navires.

Cette disposition a un très fort lien de parenté avec celle portant sur le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) mis en place par la loi du 8 août 1962 -dont le nombre aujourd'hui avoisine les 50.000-.

La GAEC est une société civile de personnes particulières dont les dispositions législatives sont codifiées par les articles L. 323-1 et suivants du code rural et les modalités d'application de ces articles sont fixées par les décrets n° 64-1193 et 64-1194 du 3 décembre 1964.

L'objet de ces groupements est de permettre la réalisation d'un travail en commun dans des conditions comparables à celles existantes dans les exploitations de caractère familial : leur capital et la responsabilité de leurs membres sont variables.

Tout comme pour le GAEC, la société de pêche artisanale vise à unir aux avantages sociaux et humains de l'exploitation artisanale, les avantages économiques d'une exploitation compétitive, équipée et gérée rationnellement.

Le paragraphe II de l'article 10 pose les principes de la neutralité de la participation à une telle société au regard de la réglementation économique (régime de subventions à l'investissement, prêts bonifiés) ou sociale (réglementation de l'ENIM). Cette neutralité, indique ce deuxième alinéa, s'exerce tant vis-à-vis des pêcheurs associés que de leur famille.

Le paragraphe III consacre une tradition maritime : en effet il aurait été inéquitable, qu'en cas d'accident en mer du marin pêcheur propriétaire ou copropriétaire, artisan exploitant en entreprise individuelle ou en association au sein d'une société, que les avantages dont bénéficiaient ces marins ne soient pas attribués à leurs veuves et aux orphelins, et ce jusqu'à ce que le plus jeune des enfants ait atteint la majorité.

Les crises récentes ont montré les inconvénients créés par l'absence quasi générale de forme sociétaire des entreprises de pêche artisanale.

Le passage en société des entreprises de pêche artisanale a pour objectifs de répondre aux besoins d'une véritable gestion d'entreprise, de permettre une distinction claire entre le patrimoine personnel et le patrimoine professionnel et d'autoriser la constitution d'un véritable patrimoine d'entreprise.

Le rapport Basset-Porry a confirmé l'intérêt qui s'attache à lever les obstacles qui s'opposent à cette mise en société, liés aux particularités de la situation des patrons pêcheurs artisans : fiscalité de la part de pêche du patron, exonération de la taxe professionnelle, bénéfice du régime de l'ENIM, exonération de l'article 79 du Code du travail maritime (prise en charge du premier mois) et régime de subventions à l'investissement.

Faciliter la mise en société implique de lever ces obstacles en offrant à la société de pêche artisanale un traitement comparable, sans remettre en cause pour autant les particularités reconnues au pêcheur artisan.

Il est cependant très difficile d'adopter une définition générale de l'entreprise de pêche artisanale. En premier lieu, une telle définition serait contraire à toutes les règles juridiques puisqu'il n'existe dans aucun droit de définition de « l'entreprise . En second lieu, toute personne ne rentrant pas dans cette définition de l'entreprise de pêche artisanale pourrait être considérée par l'administration comme n'étant plus un artisan et donc ne bénéficiant plus des exonérations de taxe professionnelle et autres. Enfin, elle pourrait également remettre en cause des exonérations sociales dont bénéficient les navires de 12 mètres ou exclure les propriétaires embarqués armant plusieurs navires qui donnent lieu à cotisations réduites.

Il convient, selon votre commission, de préciser ce texte par deux amendements :

- dans le paragraphe I, il est opportun de faire référence à la nouvelle notion proposée par l'article 9 du propriétaire embarqué.

- dans le paragraphe II, comme pour les associés de GAEC (article L. 323-13 du code rural) et au nom du principe dit « de la transparence , votre commission estime qu'il est primordial de rappeler que les associés de la société de pêche artisanale ne peuvent pas être dans une situation plus défavorable que celle des autres artisans pêcheurs, non seulement sur un plan économique et social comme le mentionne le projet de loi, mais aussi sur le plan fiscal.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 10 sous réserve de ces deux amendements.

Article 11 - Extension des conditions d'imposition de la part de pêche des artisans pêcheurs aux associés de la pêche artisanale

L'article 11 étend les conditions d'imposition de la part de pêche des artisans pêcheurs aux associés de société de pêche artisanale définie à l'article 10. Il est constitué de deux paragraphes (A et B).

Le paragraphe A indique que l'exception constituée par la rémunération « à la part dans la pêche assimilée à un salaire et non à un bénéfice industriel et commercial (BIC) est annulée dans le premier alinéa de l'article 34 du code général des impôts (CGI) relatif à la définition des bénéfices industriels et commerciaux. Ce paragraphe est rendu nécessaire par coordination avec le B.

Le paragraphe B crée un nouvel alinéa à l'article 34 du CGI. Cet alinéa classe les revenus correspondant aux rémunérations dites « à la part dans la catégorie non des BIC mais des salaires, que ces rémunérations aient été perçues par des artisans pêcheurs ou des pêcheurs associés embarqués au sens de l'article 9 du projet de loi.

Votre commission vous propose un amendement ayant pour objet de d'introduire la notion de centres de gestion agréés : ceux-ci contribuent, en effet, à une meilleure connaissance des revenus des professions indépendantes, notamment dans le secteur de la pêche maritime professionnelle. Une telle disposition est de plus cohérente avec le projet de réforme de la fiscalité qui prévoit un renforcement du statut des centres de gestion agréés.

Cette extension de l'article 34 du CGI à l'ensemble des sociétés de pêche artisanale placées sous le régime fiscal des sociétés de personne (donc imposables au titre de l'impôt sur le revenu et non au titre de l'impôt sur les sociétés) devrait coûter selon l'étude d'impact environ 2 à 3 millions de francs.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 11 sous réserve de deux amendements, dont un de nature rédactionnelle.

Article 12 - Exonération de la taxe professionnelle

L'article 12 insère à l'article 1455 du CGI relatif à la taxe professionnelle un 1° bis : cet alinéa propose d'accorder aux sociétés de pêche artisanale définies à l'article 10 l'exonération de la taxe professionnelle dont bénéficient les pêcheurs artisans jusqu'en 2003 (la taxe professionnelle étant exigible au 1er janvier de chaque année).

Il est de tradition, lorsqu'une exonération est accordée, qu'elle le soit à titre temporaire. De plus le fait de limiter dans le temps le bénéfice de cet avantage encourage d'autant plus les pêcheurs artisans exploitant en entreprise individuelle à opter en faveur de la forme sociétaire.

L'étude d'impact présente une prévision des incidences financières sur le budget des collectivités locales d'une telle disposition.

L'exonération de la taxe professionnelle n'entraîne pas de coût en lui-même. On peut cependant estimer que quelques artisans pêcheurs seraient passés en société en l'absence de mesures d'encouragement. Dans cet esprit on peut évaluer comme suit la perte pour les collectivités locales.

Hypothèse de calcul

- Nombre d'artisans-pêcheurs (source DGI-exercice 1992) :

. au forfait 2.300

. soumis à un régime réel d'imposition 2.200

- Nombre d'artisans-pêcheurs susceptibles

de passer en société (source CFPA) 1.500

- Estimation du montant moyen de TP par navire 30.000 F

On estime à 1 % de 1.500 par an le nombre d'artisans-pêcheurs qui passeraient en société en l'absence de mesure, soit 15.

On estime à 30 % de 1.500 le nombre d'artisans-pêcheurs qui passeraient en société du fait de la mesure, selon le calendrier suivant :

Ce coût est théorique : en l'absence de la mesure, ces armements n'adopteraient pas le statut de société et seraient donc exonérés. Le coût réel est donc celui de la première colonne.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 12 sans modification.

Article additionnel après l'article 12 - Exonération de la taxe additionnelle à la taxe professionnelle

L'artisan-pêcheur cotise actuellement au Comité local des Pêches et non à un organisme consulaire. L'affirmation de l'activité commerciale le rend ressortissant des CCI, à l'instar des sociétés de pêche artisanale.

Le champ d'application de l'extension à la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie ou taxe additionnelle à la taxe professionnelle des exonérations de taxe professionnelle dites « permanentes (par opposition aux exonérations dites « temporaires , accordées par délibérations des collectivités territoriales et limitativement énumérées dans la documentation administrative 6F 3111) couvre les articles 1449 à 1464 du code général des impôts.

L'article 1455 du code général des impôts, relatif à l'exonération de TP des pêcheurs, entre donc dans le champ d'application de l'extension de cette exonération à la taxe pour frais de CCI.

Le fait que l'exonération de TP soie envisagée dans le projet de loi à titre temporaire (jusqu'en 2003) pour les sociétés de pêche artisanale, n'a donc pas d'incidence sur l'extension à leur profit de l'exonération de taxe pour frais de CCI, l'article 1455 du code général des impôts modifié restant dans le champ d'application de cette extension.

Par ailleurs cette exonération n'empêche pas l'inscription des pêcheurs, en tant que commerçants immatriculés au registre du commerce et des sociétés, sur les listes électorales des chambres de commerce et d'industrie ni leur éligibilité.

Cependant aucune disposition législative n'indique que les sociétés de pêche artisanale et les artisans pêcheurs bénéficient de cette exonération de taxe, si ce n'est un simple document administratif.

Il apparaît donc nécessaire à votre commission de donner une base légale à cette disposition afin de prévenir tout contentieux.

Votre commission vous propose donc d'adopter l'article additionnel après l'article 12.

Article 13 - Exonération des cotisations patronales pour la société de pêche artisanale

Afin d'étendre à la société de pêche artisanale l'exonération de cotisations patronales pour l'équipage du navire prévue au bénéfice des propriétaires embarqués par l'article L. 43 du code des pensions de retraite des marins et de prendre en compte les dispositions des articles 9 et 10 du projet de loi, l'article 13 procède à une nouvelle rédaction de l'article L. 43.

Le premier alinéa du texte proposé pour le nouvel article L. 43 du code des pensions de retraite des marins précise que le propriétaire ou les copropriétaires d'un ou de plusieurs bateaux armés à la petite pêche, à la pêche côtière, à la pêche au large, aux cultures marines ou à la navigation côtière sont exonérés de la contribution patronale à condition d'être embarqués. Le secteur des cultures marines bénéficie en raison de la loi de cette exonération -elle en bénéficie aujourd'hui par assimilation à la petite pêche-.

Le deuxième alinéa du texte proposé pour le nouvel article L. 43 étend cette exonération à la société propriétaire ou copropriétaire majoritaire du navire en reprenant les termes de l'article 10 du projet de loi sur la société de pêche artisanale. Les parts détenues par les ascendants, descendants ou conjoints des marins sont assimilées à celles détenues par ces derniers.

Le troisième alinéa du texte proposé pour le nouvel article L. 43 prend en compte le cas du navire détenu en copropriété avec un armement coopératif agrée par le ministre chargé de la pêche dans le cadre d'un portage temporaire d'une durée maximale de 10 ans au terme duquel le marin accède à l'entière propriété. Ce marin embarqué est considéré comme marin propriétaire pouvant bénéficier de cette exonération de cotisation patronale.

Votre rapporteur vous propose de préciser par un amendement la notion de marin embarqué au sens de l'article 9 du présent projet de loi afin d'harmoniser la rédaction.

Le quatrième alinéa du texte proposé pour le nouvel article L. 43 précise que l'étendue de cette exonération est fixée par voie réglementaire en fonction de la longueur du bateau et, pour le pilote, du volume annuel de navires pilotés dans chaque station. Cette disposition figurait déjà dans le texte initial. Lorsque les navires sont dotés d'un certificat de jauge établi selon les mesures définies par la convention internationale d'Oslo de 1965 et délivré avant le 1er janvier 1996 (article 91-II de la loi n° 85-10 du 3 janvier 1985) les dispositions de l'article L. 43 dans leur rédaction antérieure à cette loi demeurent applicables.

Le cinquième alinéa du texte proposé pour le nouvel article L. 43 envisage le maintien de l'exonération en cas d'interruption ou de cessation d'activité dans des cas particuliers :

* l'interruption de la navigation due à une période de repos réglementaire, à l'accomplissement du service national, à un stage de formation professionnelle ou à la gestion de l'entreprise à condition que les périodes correspondent à moins de 50 % du total des services validés pour pension (article 17 du projet de loi, septième alinéa) ;

Ne figurent pas dans le texte initial de l'article L. 43 l'interruption due à une période de repos réglementaire (introduite à l'article 30 du présent projet de loi) ainsi que celle due à un stage de formation professionnelle ou à la gestion de l'entreprise ;

* la cessation de navigation provenant d'une inaptitude définitive ou temporaire, maladie ou accident lorsque ces événements donnent droit aux prestations de la caisse générale de prévoyance (cette mesure est présente dans la rédaction actuelle de l'article L. 43).

Les sixième et septième alinéas du texte reprennent les termes du dernier alinéa de l'article L. 43 qui consacre à nouveau une tradition maritime, à l'instar de l'article 10 du projet de loi : en effet, il aurait été inéquitable, en cas de décès du marin pêcheur propriétaire ou copropriétaire, artisan exploitant en entreprise individuelle ou en association au sein d'une société, s'étant trouvés dans les situations mentionnées à l'alinéa précédent, que les avantages dont bénéficiaient ces marins ne soient pas attribués à leurs veuves et aux orphelins, et ce jusqu'à ce que le plus jeune des enfants ait atteint la majorité.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 13 sous réserve d'un amendement.

Article 14 - Étalement des plus-values de cession

L'article 14 introduit l'étalement de l'imposition des plus-values à court terme réalisées lors de la cession d'un navire de pêche ou de parts de copropriété de navires de pêche avant le 31 décembre 2003 sous réserve de réemploi dans un navire de pêche neuf ou d'occasion ou de parts de copropriété correspondantes.

Cette disposition fiscale nécessite une modification de l'article 39 quaterdécies du CGI comme l'indique le premier alinéa du paragraphe A de l'article 14.

Le paragraphe A consacre la possibilité, en cas de cession d'un navire de pêche ou de parts de copropriété de navires de pêche, pour une entreprise de pêche maritime d'opter en faveur d'un étalement des plus-values à court terme sur huit ans avec une première année de différé et ce sous certaines conditions, en particulier en matière de réemploi. Cette faculté est ouverte jusqu'au 31 décembre 2003. Cette limitation dans le temps en matière fiscale est due à trois raisons essentielles : une pratique courante en matière fiscale est de ne pas attribuer un avantage à titre définitif ; de plus, il est utile d'assurer la modernisation et la pérennité des entreprises en encourageant les intéressés à agir rapidement afin de faciliter le renouvellement des outils de production ; enfin l'accord de la Commission européenne ayant été nécessaire pour obtenir ce qu'elle qualifie de manière générique « d'aide , une limitation de la durée de cette facilité fiscale a été demandée par la Commission. Les conditions posées par le premier alinéa du 1 quater pour bénéficier de cet étalement sont les suivantes :

- le contribuable acquiert ou s'engage à acquérir dans les 18 mois de la cession un navire pour les besoins de son exploitation. Si le contribuable achète plus d'un navire l'étalement des plus-values est possible à condition que cette opération ne reflète pas un changement d'activité. Votre commission vous propose cependant de clarifier ce point par un amendement ;

- cette acquisition porte sur un navire de pêche neuf ou d'occasion ou des parts de copropriété d'un navire ayant ces caractéristiques ; si cette acquisition porte sur un navire d'occasion, la durée résiduelle d'utilisation de celui-ci doit être d'au moins 10 ans et sa construction doit être achevée depuis 10 ans au maximum. Ces deux conditions, souhaitées par la Commission européenne, ne sont pas exigées si l'entreprise « justifie n'avoir pu y satisfaire, malgré ses diligences et pour des raisons indépendantes de sa volonté :

- le prix de ce navire ou de ces parts de copropriété doit être au moins égal au prix de revient du bien cédé, ce prix étant le prix de revient du navire lors de son acquisition, exclusion faite des amortissements.

Actuellement, lorsqu'un patron-artisan ou un armement réalise des plus-values lors de la vente d'un bateau ou d'une part de copropriété d'un armement, il doit acquitter une taxe. Si cette plus-value s'applique à un artisan, elle est payée en trois ans. Si elle est appliquée à une société d'armement, elle est exigible dès l'année suivant la vente. Ce dispositif vient donc modifier de façon importante le droit en vigueur.

Le deuxième alinéa du 1 quarter précise les conséquences en matière fiscale de la non inscription sur la déclaration de résultat de l'exercice de la cession de l'engagement du contribuable à acquérir un navire. Outre le non étalement de la plus-value et son imposition à l'expiration du délai de 18 mois à compter de la cession, le contribuable doit s'acquitter du versement d'un intérêt de retard, dû indépendamment de toutes sanctions, dont les modalités sont fixées par les articles 1727 et 1727 A du CGI.

Le troisième alinéa du texte proposé pour le 1 quarter indique que cette possibilité d'étalement des plus-values à court terme n'est pas envisageable en cas de cessions d'immobilisations entre sociétés du même groupe. Cette mesure est en effet logique puisque toute cession de plus value à l'intérieur d'un même groupe fiscal est neutralisée et fait l'objet d'un report d'imposition. C'est lorsque la cession sort du groupe qu'elle sera soumise à l'impôt et qu'elle peut bénéficier de l'étalement.

Le paragraphe B de l'article 14 du projet de loi modifie la rédaction du 2 de l'article 39 quaterdecies du CGI. C'est un alinéa de coordination compte tenu de la possibilité d'étalement de plus-values de cession pour les navires instaurée par le 1 quater.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 14 sous réserve d'un amendement.

Article 15 - Aide à la première installation

Cet article exonère d'impôt pendant soixante mois 50 % des bénéfices réalisés par les artisans pêcheurs en première installation, à titre individuel ou dans un cadre sociétaire. Il incite les jeunes pêcheurs à la création d'entreprises nouvelles nécessaires au maintien d'un secteur d'activité essentielle pour la vie du littoral à l'instar des dispositions prévalant en agriculture.

Cet article est constitué de trois paragraphes.

Le paragraphe I de l'article 15 insère un article 44 nonies dans le CGI qui prévoit un abattement de 50 % sur le bénéfice des artisans pêcheurs en première installation, celle-ci devant s'effectuer du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2003. Cet abattement est limité au titre des soixante premiers mois d'activité. Les conditions pour en bénéficier sont au nombre de deux :

- être âgé de moins de 35 ans au moment de l'installation ;

- avoir satisfait à des conditions de formation.

Cette mesure reprend la mesure d'allégement d'impôt dont bénéficient, sous certaines conditions, les nouvelles entreprises industrielles, artisanales et non commerciales soumises à l'impôt sur les sociétés et relevant d'un régime réel d'imposition de leurs résultats, sur les bénéfices réalisés au cours de leurs cinq premières années d'existence.

Il étend ensuite le bénéfice de cet abattement à la quote-part revenant au pêcheur associé d'une société de pêche artisanale, assurant ainsi une égalité de traitement entre l'artisan pêcheur et l'associé d'une société de pêche. Il est précisé que cette disposition ne s'applique pas dans trois cas déterminés :

- lorsqu'il se cumule avec d'autres pratiqués sur le bénéfice réalisé. Ce dispositif est identique à celui de l'article 73 B, quatrième alinéa, du CGI pour les jeunes agriculteurs (abattement de 20 % au titre de l'adhésion de l'agriculteur à un centre de gestion agréé) ou à l'abattement mentionné à l'article 217 bis du CGI (réfaction d'un tiers du résultat d'exploitation pour le calcul de l'impôt dans les DOM).

- lorsqu'il s'agit d'un bénéfice soumis à un taux réduit d'imposition. Ainsi, le bénéfice de la plus-value à long terme étant soumis à un taux proportionnel de 19 %, l'abattement de 50 % ne s'applique pas.

- quand il s'agit de rémunérations dites « à la part . La part, une fois certains frais exclus, se divise en deux : l'une revient aux matelots qui seront imposés au titre de l'impôt sur les sociétés, l'autre revient au patron pêcheur. Cette deuxième moitié est de nouveau scindée en deux, l'une étant une rémunération à la part pour le patron imposable au titre de l'impôt sur les sociétés, l'autre revenant à l'armement imposable aux BIC : seule cette fraction pourra bénéficier de l'abattement.

Ce graphique permet de mieux apprécier la fiscalité de la rémunération à la part.

RÉMUNÉRATION « A LA PART

VENTES BRUTES DE POISSONS

MOINS

Frais communs (carburant, huile, glace, vivres, appâts, frais de location d'appareils de navigation, frais de rôle -charges sociales, cotisations d'allocations familiales-, de criée, taxes interprofessionnelles, péages...)

=

PRODUIT SEMI NET À REPARTIR

Le paragraphe II complète le dernier alinéa du I de l'article 44 sexies du CGI en excluant les entreprises de pêche maritime du bénéfice des dispositions prévues aux alinéas précédents (exonération d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés suivant certaines conditions). Cet alinéa est nécessaire pour la coordination avec de l'article 44 nonies.

Le paragraphe III indique qu'un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application des conditions dans lesquelles les marins pêcheurs pourront bénéficier de cet abattement.

Le coût budgétaire de cette mesure pourrait, selon l'étude d'impact du Gouvernement, s'élever à environ 655.000 francs selon les hypothèses de calcul retenues :

le nombre de jeunes artisans pêcheurs est d'environ de 70 ;

le BIC moyen est de 33.500 F

Le taux moyen d'imposition est de 11,2 %

L'abattement consenti 50 %

soit un coût de la 1ère année pour une génération de 70 x 33.5000 F x 50 % x 11,2 % = 0,131 MF, et de 0,655 MF en croisière (1,131 MF x 5)

Votre commission vous propose deux amendements.


• Le premier amendement
a deux objets : il prévoit d'une part le recul de l'âge pour bénéficier de l'abattement fiscal compte tenu du coût moyen d'investissement (7 à 8 millions de francs) pour la pêche artisanale ; il introduit, d'autre part, une troisième condition, comme en agriculture, pour bénéficier de cet abattement. Il s'agit de la présentation d'un plan d'installation.


• Le second amendement est de coordination.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 15 sous réserve de ces deux amendements.

Article additionnel après l'article 15 - Autofinancement des pêcheurs lors de la première installation

Le projet de loi d'orientation énonce les objectifs de la politique des pêches, parmi lesquels figure « le maintien et le renouvellement d'une flotte adaptée... . Cela suppose une politique active en faveur :


• du renouvellement des outils


• du renouvellement des hommes.

S'agissant des outils, le dispositif d'étalement des plus-values réinvesties devrait faciliter le renouvellement de la flotte des armements déjà existants.

S'agissant des hommes, la modernisation du statut juridique, fiscal et social de l'entreprise de pêche artisanale devrait contribuer à rendre le métier plus attractif, mais rien n'est prévu pour soutenir l'autofinancement nécessaire à l'acquisition d'un navire, en particulier par de jeunes patrons.

Or, les contraintes pour un investisseur sont considérables : le financement équilibré d'un chalutier de 20 mètres neuf ou d'occasion, suppose un apport de 500 mille francs à 1 million de francs, hors de portée d'un jeune professionnel. Par ailleurs, les nouvelles modalités de plafonnement des aides imposées par l'Union européenne ont pour effet d'accroître de 30 % à 40 % les besoins d'autofinancement. La question de l'autofinancement des artisans pêcheurs s'établissant pour la première fois apparaît donc prioritaire pour assurer la relève professionnelle dans ce secteur.

Le dispositif proposé crée une incitation fiscale pour la souscription de parts de fonds de placement quirataire spécialement agréés par le ministre chargé de la pêche, dans la limite d'une enveloppe annuelle déterminée en fonction du POP et des paramètres d'évolution de la ressource et des marchés.

Le fonds de placement quirataire agréé a pour objet exclusif l'acquisition minoritaire de parts de copropriété de navire avec un pêcheur artisan, ou une société de pêche artisanale au sens de la loi d'orientation, dans le cadre d'une première installation.

Votre commission vous propose d'insérer dans le code général des impôts un article 238 bis HO qui permet une adaptation du dispositif d'exonération fiscale pour les navires de pêche artisanale et de modifier en conséquence les articles 163 unvicies et 217 nonies du code général des impôts.

Votre commission vous propose d'adopter l'article additionnel après l'article 15.

Article 16 - Seuil de soumission à l'agrément ministériel des projets d'investissement

L'article 16 abaisse le seuil de soumission à l'agrément ministériel des projets d'investissement en défiscalisation en matière d'armement à la pêche dans les départements d'outre-mer.

Le premier alinéa de l'article 16 indique que l'article 238 bis HA du CGI est complété à son premier alinéa du III ter. Cet article 238 bis HA concerne les entreprises qui ont la possibilité de déduire de leurs résultats imposables une somme égale au montant des investissements productifs réalisés dans des départements d'outre-mer.

Le deuxième alinéa précise que les investissements effectués dans le secteur de la pêche maritime mentionnés au I de l'article 238 bis HA sont désormais soumis à la procédure d'agrément préalable dès qu'ils dépassent un million de francs.

Jusqu'à présent, ces investissements productifs sont dispensés d'agrément si le montant total par programme ne dépasse pas la somme de 30 MF. A la demande des départements considérés, le seuil d'agrément est abaissé par le projet de loi à 1 MF. Cette disposition permet de mieux contrôler les investissements en construction de navires dans les DOM en défiscalisation, de manière à mieux gérer les flottilles locales et à éviter de déstabiliser la pêche artisanale par inflation des coûts.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 16 sans modification.

Article 17 - Validation des services à terre

Cet article crée de nouveaux cas de validation des services à terre des marins.

Il est composé de trois points distincts (a, b, c).

Il prévoit, à cet effet, une modification de l'article L. 12 du code des pensions de retraite des marins.

Dans ce cadre (a et c de l'article 17), est désormais pris en compte, pour la pension, le temps pendant lequel :

le marin ayant accompli au moins 5 ans de navigation professionnelle est titulaire de fonctions permanentes dans les organisations professionnelles ou syndicales maritimes et a cessé de naviguer pour exercer ces fonctions (7° de l'article L. 12) ;

le marin interrompt la navigation pour les besoins de la gestion de l'entreprise qu'il dirige, à condition que les périodes correspondantes représentent moins de 50 % du total des services validés chaque année civile (10° de l'article L. 12) ;

le marin ayant accompli au moins 10 ans de navigation professionnelle cesse de naviguer pour gérer de façon permanente l'entreprise d'armement maritime qu'il dirige (10° de l'article L. 12) ;

le marin, reconnu atteint d'infirmités ne lui permettant pas de continuer à naviguer, exerce l'une des activités visées ci-dessus (11° de l'article L. 12).

En outre, l'article 17, au b , ajoute au code des pensions de retraite des marins de commerce, de pêche et de plaisance un 9°) à l'article L. 12 afin d'autoriser la validation gratuite par la caisse de retraite des marins des périodes pendant lesquelles le marin perçoit une allocation versée en application de l'article 33.

Ces différentes dispositions ont deux objectifs principaux : en premier lieu, celui d'inciter à la professionnalisation et à une meilleure gestion du secteur en prenant en compte pour le calcul de la pension un certain nombre de fonctions à terre ; en second lieu, celui d'autoriser la validation gratuite, pour la caisse de retraite des marins, des périodes pendant lesquelles le marin perçoit une allocation versée par le fond national d'aide à la préretraite (crée par l'article 33 du projet de loi).

Votre commission vous propose d'adopter l'article 17 sous réserve de deux amendements.

Article 18 - Exercice d'une activité complémentaire

Cet article facilite l'exercice d'une activité complémentaire sans lien direct avec l'activité de pêche en aménageant la protection sociale des personnes concernées. Cette disposition encourage la pluri-activité à l'instar de ce qui se passe en agriculture.

Pour cela, il complète l'article L. 622-4 du code de la sécurité sociale en excluant les marins pêcheurs, qui se livrent à une activité exercée à titre accessoire sans lien direct avec la pêche, de la catégorie des « professions industrielles et commerciales au sens de l'article L. 622-4. Cette mesure permet aux pêcheurs de conserver leur statut particulier et de ne pas être rattachés à l'organisation autonome d'assurance vieillesse des professions industrielles et commerciales pour leur activité accessoire.

Ainsi l'activité complémentaire des marins peut être exercée en gardant le bénéfice du statut social de l'ENIM -dont le régime de cotisations journalières se révèle spécifique- et ne pas être soumise aux règles du régime des non salariés non agricoles.

Cette disposition offre donc des possibilités d'amélioration de la rentabilité de l'exploitation en permettant à l'entreprise de se livrer à une autre activité professionnelle annexe ou complémentaire et de percevoir des revenus connexes sans perdre le bénéfice du statut de pêcheur.

Selon l'étude d'impact du Gouvernement, par les échanges qu'elle permet entre milieux « urbains et monde de la pêche, la pluri-activité est porteuse des mêmes profits socio-économiques que le développement qu'elle a connu en agriculture.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 18 sans modification.

Article 19 - Embarquement de passagers sur un navire de pêche

L'article 19 impose en cas d'embarquement, à titre onéreux, de passagers assistant à l'activité de pêche elle-même, la souscription d'une assurance pour la couverture de la responsabilité civile du pêcheur, de l'armateur, celle des membres d'équipage et des personnes « occasionnellement admises sur le navire pour y exercer une activité .

Une telle mesure permet de couvrir le risque lié à l'embarquement des passagers par une assurance obligatoire.

Votre rapporteur estime important à cette occasion d'inscrire dans la loi l'exigence du respect des mesures de sécurité. S'il appartient a l'autorité réglementaire de définir plus précisément ces règles, le législateur doit veiller à ce que le respect de ces dispositions figure dans la loi.

Par ailleurs, votre commission souligne l'intérêt de prévoir des mécanismes de contrôle des effectifs et des embarquements déjà mis en oeuvre dans certains quartiers des affaires maritimes, afin d'éviter « l'embauche au noir de prétendus touristes.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 19 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 19 - Rapport sur les effets des dispositions fiscales prévues par la loi d'orientation

Les mesures proposées dans le cadre de ce titre III sont importantes sur le plan fiscal. Elles permettent d'assurer à la nouvelle société de pêche artisanale une égalité avec le pêcheur artisan.

Il est nécessaire de mesurer les effets réels de ces mesures sur le nombre de passage de navires en régime sociétaire.

En effet si l'étalement des plus-values de cession s'avérait inefficace et que, dans le même temps, les besoins financiers des entreprises de pêche n'étaient pas satisfaits, il serait opportun d'envisager de nouvelles solutions.

Votre commission vous propose d'adopter l'article additionnel après l'article 19.

TITRE IV - DE LA MISE EN MARCHE

Article 20 - Points de débarquement et extension de discipline

Cet article est composé de deux paragraphes, le premier portant sur les points de débarquement, le second sur la réglementation nationale en matière d'organisation de producteurs.

Le paragraphe I précise les conditions d'agrément des points de débarquement que devront désormais présenter des garanties nécessaires à l'enregistrement statistique des données et à la vérification de leur qualité sanitaire.

A cet effet le I de l'article 20 complète le 1° de l'article 4 du décret du 9 janvier 1852. Cette mesure vise à obtenir une meilleure gestion de la ressource et une transparence accrue de la mise en marché par la réduction progressive du nombre de points de débarquement en réservant l'agrément préfectoral à ceux qui apportent des garanties suffisantes relatives à la vérification de la qualité sanitaire des produits, à l'enregistrement des apports et à l'enregistrement des ventes. Cette définition des points de débarquement doit répondre impérativement à l'obligation communautaire d'enregistrement statistique des apports et de contrôle de la qualité sanitaire des produits débarqués.

L'impact en terme administratif de cette mesure est l'augmentation de la charge administrative sur les demandeurs d'agrément des points de débarquement.

Le paragraphe II crée une base légale (4° à l'article 4 du décret précité) en droit interne pour les dispositions réglementaires en matière de reconnaissance et de contrôle des organisations de producteurs (OP), d'extension de leurs règles aux non adhérents et de mise en oeuvre par ces organisations du régime des prix de retrait prévu par la réglementation communautaire.

Le titre II du règlement 3759/92 du Conseil du 31/12/92 définit les missions et obligations des organisations de producteurs. Cependant, il n'existe ni statuts ni règlement intérieur type pour ces structures et selon les diverses formes juridiques qu'elles peuvent prendre, les modes de fonctionnement varient sensiblement.

Compte tenu du caractère particulier de leur activité et de leurs sources de financement émanant en grande partie de fonds publics et à défaut d'instituer un statut type des organisations de producteurs, il convient de promouvoir l'instauration de règles communes, permettant notamment de clarifier les relations avec les adhérents, les non-adhérents et favorisant la transparence de gestion. C'est l'objectif du II de l'article 20.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 20 sous réserve d'un amendement de nature rédactionnelle.

Article 21 - Habilitation des agents des affaires maritimes

L'article 21 prévoit l'habilitation des agents chargés de la police des pêches à constater les infractions aux mesures d'extension de discipline. Afin de pouvoir sanctionner le non respect notamment des règles mises en place par les organisations de producteurs, il est nécessaire de désigner une autorité compétente dans la recherche et la constatation de ces manquements en matière d'extension des règles des OP aux non-adhérents et de mise en oeuvre des régimes de retrait.

Cet article complète l'article 16 du décret du 9 janvier 1852 ; ce texte, initialement, prévoit, implicitement, que les infractions définies dans le décret de 1852 aux articles 6, 7 et 8 sont recherchées et constatées par un certain nombre d'autorités habilitées à cet effet. Ainsi en précisant que cet article s'applique à toutes les infractions aux dispositions du présent décret ainsi qu'à l'ensemble des textes d'application, on inclut les règles édictées par les OP sur la base de l'article 4 du décret de 1852.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 21 sans modification.

Article 22 - Définition du rôle du mareyage

Cet article définit l'activité de mareyage. Le statut des mareyeurs-expéditeurs trouve ses sources dans deux textes :


la loi n° 48-1400 du 7 septembre 1948 portant statut et organisation de la profession de mareyeur-expéditeur : ce texte composé de six articles établit un contrôle sur la profession, notamment par la délivrance d'une carte professionnelle. Par ailleurs, des sanctions aux infractions commises à la présente loi et à ses décrets d'application sont envisagées ;


le décret n° 67-769 du 6 septembre 1967 : il définit le statut du mareyeur-expéditeur et s'avère quelque peu restrictif par rapport au travail des mareyeurs d'aujourd'hui. Il présente des contradictions puisqu'il définit le mareyage comme le tri, l'allotissement et le conditionnement, alors que les produits pouvant être commercialisés par un mareyeur, toujours selon ce décret, sont des poissons entiers, en filets ou tronçonnés.

L'ensemble de ce dispositif est devenu caduc depuis la transposition en droit français des directives communautaires au titre desquelles les opérateurs disposant d'un établissement de manipulation des produits de la pêche agrée peuvent les commercialiser sur l'ensemble de l'Union européenne.

Il est, dès lors, nécessaire de faire la distinction entre les fonctions de base et les fonctions résultant de l'intégration d'opérations de transformation supplémentaires. L'activité du mareyeur peut être analysée à partir de différentes fonctions :

- fonctions techniques : tri, allotissement, conditionnement, étêtage, tranchage, filetage, congélation, élaboration de rôtis, brochettes... ;

- fonctions commerciales : négoce, approvisionnement majoritaire en criée puis élargissement à d'autres sources d'approvisionnement (import, inter-port...) ;

- fonctions financières : le mareyeur assure un relais financier lié à sa fonction de négociant ;

- produits commercialisés : des produits frais aux produits congelés et élaborés.

La fixation des limites de la profession par rapport aux autres métiers qui exercent tout ou partie de la fonction de mareyage, tel que les importateurs, les transformateurs ou les exportateurs est impérative. De plus, un mareyeur exerçant plusieurs activités (mareyage, poissonnerie...) doit être considérée selon le « centre de gravité de son activité.

D'après l'article 22, les conditions nécessaires pour qu'une activité soit qualifiée de mareyage sont les suivantes :


• être commerçant,


• être le premier acheteur des produits de la pêche maritime,


• ces apports doivent être destinés à la consommation humaine,


• ils sont achetés en vue de leur commercialisation,


• disposer d'un établissement de manipulation des produits de la pêche faisant l'objet d'un agrément sanitaire.

Votre commission est favorable à cette définition du mareyage.

Elle vous propose d'adopter l'article 22 sans modification.

Article 23 - Exercice illicite du mareyage

Cet article sanctionne l'exercice illicite de cette activité. Il met en conformité la réglementation française avec la réglementation européenne issue des directives de 1991 dans un souci de loyauté de concurrence entre les entreprises, en réprimant l'exercice frauduleux de cette profession lorsque les normes sanitaires ne sont pas respectées.

Le premier alinéa de cet article fixe une amende pour toute personne physique contrevenant à l'exigence d'un agrément sanitaire dans le cadre de l'exercice de l'activité de mareyage.

Le deuxième alinéa concerne les personnes morales qui peuvent être déclarées responsables pénalement pour le non respect des prescriptions élaborées dans l'alinéa précédent. La responsabilité pénale des personnes morales trouve sa source législative dans l'article 121-2 du code pénal et le taux maximum de l'amende applicable aux personnes morales est prévu à l'article 131-8 de ce même code.

Le troisième alinéa complète ces mesures en précisant que seront habilitées à rechercher et constater les infractions au présent article les agents mentionnés à l'article 16 du 9 janvier 1852 et à l'article 6 de la loi n° 83-582 du 5 juillet 1983, dont la modification est proposée par le paragraphe II de l'article 7 afin d'élargir les autorités compétentes dans la recherche et la constatation des infractions.

La directive européenne n° 91/493/CEE du 22 juillet 1991, transposée en droit français par l'arrêté interministériel du 28 décembre 1992 a instauré une réglementation sanitaire applicable aux produits de la pêche et de l'aquaculture sauf pour les coquillages vivants dont le régime découle de la directive n° 91/492/CEE. Ces textes disposent que les établissements de manipulation, c'est-à-dire de mareyage ou de transformation, doivent respecter un certain nombre de prescriptions, tant au niveau de leur équipement que de leurs règles de fonctionnement.

Les établissements remplissant ces conditions doivent avoir fait l'objet d'un agrément délivré par les services vétérinaires avant le 31 décembre 1995. La grande majorité des mesures nécessaires pour faire respecter cette échéance dont le terme est connu depuis plus de trois ans par les opérateurs économiques ont été prise. Seuls les ateliers dont les travaux sont substantiellement engagés ou pour lesquels un dossier technique et financier a été approuvé ont pu bénéficier d'un délai pour achever leurs travaux durant le premier semestre 1996.

Afin de faciliter la réalisation de cette modernisation, des aides publiques ont été consenties aux entreprises qui ont réalisé les investissements nécessaires. Elles émanent de la Communauté européenne dans le cadre de l'Instrument financier d'orientation de la pêche (IFOP), de l'État (ministère de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation et fonds d'intervention et d'organisation des marchés des produits de la pêche maritime et des cultures marines -FIOM-), ainsi que des collectivités territoriales (conseils régionaux et généraux). Le FIOM a ainsi consacré plus de 80 millions de francs à cette action depuis 1988.

De plus, il est apparu essentiel d'éviter toute source de distorsion de concurrence entre les opérateurs, afin que les entreprises qui ont engagé, avec les soutiens publics précités, des investissements importants pour moderniser leurs installations, ne soient pas perturbées par celles qui n'auraient pas accompli le même effort.

C'est pourquoi l'attention de la Commission européenne a été appelée sur cette question en lui demandant de vérifier la stricte homogénéité des contrôles conduits à cet effet par les États membres, tant vis-a-vis des entreprises communautaires que sur les produits importés des pays tiers. Les services de la Commission ont d'ailleurs prévu des inspections dans tous les États membres. Au plan national, les contrôles menés dans ce cadre ont été renforcés.

Au 1er juillet 1996, 684 ateliers faisaient l'objet d'un agrément mais un certain nombre de ces autorisations concerne des établissements de grossistes ne relevant pas stricto sensu du statut de mareyeur. On peut néanmoins estimer qu'environ 90 % des 480 mareyeurs exerçant leur activité au 1er janvier 1994 se sont conformés à cette réglementation.

L'effort de modernisation entrepris doit toutefois être poursuivi par la profession, notamment dans le domaine des règles d'exploitation, car l'agrément peut être retiré à tout moment s'il est constaté que l'établissement n'est pas exploité dans le respect des normes sanitaires.

Votre commission vous propose d'adopter sans modification l'article 23.

Article 24 - Schémas portuaires

L'article 24 prévoit, à son premier alinéa, la création d'une commission consultative régionale associant l'ensemble des partenaires publics ou privés concernés, chargée de veiller à la bonne organisation des débarquements et à la rationalité des investissements en matière de débarquement des produits de la pêche.

Si comme le précise le second alinéa, la composition et les attributions de cette commission seront déterminées en Conseil d'État, le premier alinéa de l'article 24 précise qu'elle est présidée par le Préfet de région.

Le rapport de MM. Mettling et Henaff de février 1995 avait constaté le coût important des investissements dans les ports de pêche :

La perspective de la mise aux normes européenne a déclenché un effort d'investissement important qui va bien au-delà de ce qui est strictement nécessaire à cet objectif et qui, outre son coût pour les pouvoirs publics, pèsera in fine sur les armements. Il s'ajoute aux investissements considérables réalisés dans la période précédente.

Ce surinvestissement s'explique par une absence de sélectivité dans les projets, favorisée par un taux de subvention cumulé (CEE, État, Collectivités locales) qui peut atteindre 80 % ainsi que par la capacité supposée de criées très modernes à fixer le marché et donc la flottille dans un port.

Il est pourtant établi que le marché se fait de plus en plus en dehors des criées, ceci s'appliquant particulièrement aux plus petites. L'effet de ces surinvestissements est souvent, en raison d'un taux de taxe élevé, le départ de certains armements. Or, ceci conduit à concentrer sur un nombre toujours plus réduit de bateaux des charges de plus en plus lourdes, contribuant ainsi à fragiliser ceux que l'on croyait aider.

Ainsi, il apparaît important de ralentir (pour les opérations engagées) voire d'interrompre pour les nouveaux projets, cette logique qui pèse lourdement sur l'exploitation des navires déjà en situation financière difficile et affecte la compétitivité de la production nationale.

Les avantages attendus par cette disposition nouvelle répondent à cette préoccupation qui tend à :

- viser à rationaliser les stratégies d'équipements et proposer aux divers acteurs une référence pour leurs décisions ;

- créer les conditions nécessaires à une indispensable concertation sur le choix des investissements.

Dans un premier temps, les schémas constitueront un degré supplémentaire (mais d'effet non obligatoire) de régulation ; ils doivent à court terme être une source de rationalisation et de simplification.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 24 sous réserve d'un amendement rédactionnel.

Article 25 - Sanctions des infractions à la réglementation relative au débarquement des produits de la pêche

Cet article vise à habiliter les agents des affaires maritimes à constater les infractions en matière de réglementation des normes communes de commercialisation concernant les produits de la pêche.

A cet effet, est ajouté un 9° à l'article L. 215-1 du code de la consommation qui a trait aux autorités qualifiées, disposant d'un pouvoir d'enquête et habilitées à rechercher et à constater les infractions énumérées aux chapitres II à VI du même code.

Une telle mesure permet d'améliorer la connaissance de l'offre, la transparence du marché et l'efficacité des mesures de soutien communautaire en sanctionnant le non respect des réglementations relatives au débarquement des produits de la pêche et aux normes communes de commercialisation.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 25 sans modification.

Article 26 - Sanctions du non respect de la règle de préavis pour quitter une organisation de producteurs

Cet article donne les moyens à l'Administration de sanctionner les manquements au respect de la règle de préavis par les membres d'une organisation de producteurs qui souhaitent la quitter, en infligeant une sanction financière à l'organisation de producteurs qui accueille un nouvel adhérent n'ayant pas rempli cette obligation.

Les deux premiers alinéas complètent l'article 14 de la loi n° 91-411 du 2 mai 1991 relative à l'organisation interprofessionnelle des pêches maritimes et des élevages marins et à l'organisation de la conchyliculture en permettant à l'administration, dans les conditions prévues aux trois derniers alinéas de l'article 6 concernant les manquements aux délibérations rendues obligatoires, à infliger une amende financière à l'organisation de producteurs qui accueille un nouvel adhérent n'ayant pas rempli cette obligation.

Le bénéfice de cette amende est attribué au nouvel office qui doit remplacer le FIOM (article 3 du projet de loi).

Le troisième et dernier alinéa de l'article 26 précise le montant maximal de cette amende, calculé selon le montant des cotisations versées par le producteur durant les deux dernières années.

Cette disposition vise à éviter les départs intempestifs, source de déstabilisation, à l'heure où la loi tend à conforter le rôle des OP dans la gestion de la ressource et la mise en marché des produits de leurs adhérents.

La réglementation communautaire prévoit l'obligation pour les organisations de producteurs reconnues, de faire figurer dans leurs statuts l'existence d'un préavis minimum d'un an pour les adhérents désireux de quitter l'organisation.

Or, malgré de nombreux départs, facteurs de désorganisation, les OP confrontées à ce type de difficultés n'engagent que rarement les procédures civiles nécessaires auprès des tribunaux, à rencontre de leurs adhérents récalcitrants, notamment en raison de la lourdeur de telles démarches.

Dès lors, la question se pose de l'opportunité de faire du non respect de cette règle de préavis une disposition d'ordre public, c'est-à-dire constatée par l'autorité administrative sur saisine de l'organisation de producteurs et sanctionnée sous forme d'une amende administrative suffisamment dissuasive, plus rapide qu'une décision pénale, donc plus efficace.

La Commission européenne, interrogée sur ce point, a indiqué qu'une telle orientation ne rencontrait aucune objection de sa part.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 26 sous réserve d'un amendement rédactionnel.

TITRE V - DES CULTURES MARINES

Article 27 - Qualification agricole de l'activité de cultures marines

L'article 27, dans un souci de clarification, affirme la nature agricole des activités d'aquaculture marine qui, à l'heure actuelle, ne se déduit qu'implicitement de la rédaction de l'article L. 311-1 du code rural et qui emporte le caractère civil de cette activité.

Le premier alinéa de l'article 27 complète l'article L. 311-1 du code rural ; cette nouvelle rédaction précisée dans le second alinéa consacre la nature agricole des activités d'aquaculture marine tout en levant l'équivoque sur l'incidence de leur affiliation à l'ENIM.

On comptabilise actuellement environ 6.090 entreprises conchylicoles. En fonction de la nature des travaux que mènent l'entreprise conchylicole sur l'estran et/ou en mer et donc de l'éventuelle utilisation d'un navire, les salariés de ces entreprises relèvent soit du régime de la MSA (Mutualité sociale des agriculteurs et ruraux) soit du régime de l'ENIM. La répartition entre affiliés à la MSA et à l'ENIM est la suivante :

Nombre d'entreprises

Régime social de l'exploitant

Proportion en %

6.090

Tous régimes confondus

100

1.594

MSA

26,2

4.496

ENIM

73,8

Votre commission vous propose d'adopter l'article 27 sous réserve d'un amendement rédactionnel.

Article 28 - Extension de l'entraide agricole aux conchyliculteurs et aux éleveurs marins

Cet article étend le mécanisme de l'entraide agricole à l'aquaculture marine. Ce mécanisme juridique de l'entraide agricole a été défini par l'article 20 de la loi complémentaire du 8 août 1962.

A cet effet, le premier alinéa complète à l'article L. 325-1 du code rural par un alinéa facilitant les échanges de main d'oeuvre. L'article 28 adapte donc pour la conchyliculture et l'élevage marin le mécanisme de l'entraide qui consiste en un échange de services en travail et en moyens d'exploitation.

L'article L. 325-1 du code rural indique par ailleurs que l'entraide peut être occasionnelle, temporaire ou intervenir d'une manière régulière. Le troisième alinéa de l'article du code rural précise que juridiquement cette pratique est un contrat à titre gratuit et ce même lorsque le bénéficiaire rembourse au prestataire tout ou partie des frais engagés. Ainsi l'entraide dans l'aquaculture marine respecte-t-elle les deux données essentielles de l'entraide que sont l'échange de services et la qualification d'acte à titre gratuit.

Le deuxième alinéa précise que l'entraide dans le secteur des cultures marines fait l'objet d'un contrat écrit ; ce contrat d'entraide sera très certainement visé par les services des affaires maritimes, limitant ainsi le travail clandestin.

L'exigence d'un contrat écrit est due :

- à la présence de ces entreprises sur le domaine public maritime, nécessitant ainsi certaines précautions juridiques ;

- à l'influence du droit du travail maritime, souvent qualifié d'autonome par rapport au droit du travail général.

Votre commission vous propose d'adopter sans modification l'article 28.

Article 29 - Création d'un genre de navigation « cultures marines

Cet article modifie la loi du 1er avril 1942 relative aux titres de navigation maritime, d'une part, pour ériger les cultures marines en genre de navigation distinct de la pêche, du commerce et de la plaisance et, d'autre part , pour créer la faculté d'ouvrir un rôle d'équipage pour les embarcations conchylicoles.

Le paragraphe I de l'article 29 complète l'article 5 de la loi du 1er avril 1942 en offrant la possibilité à l'autorité réglementaire de déterminer les diverses catégories de navigation, et par là même de créer un type de navigation pour les cultures marines distincte de la pêche maritime. Par ailleurs, la création d'une catégorie spécifique de rôle individuel ou collectif d'équipage est envisagée.

Le paragraphe II de l'article 29 ajoute un article 6-1 à la loi du 1er avril 1942 afin d'offrir la faculté à l'entrepreneur de cultures marines de créer un rôle d'équipage pour « les embarcations affectées à l'exploitation de parcelles concédées sur le domaine public maritime lorsque cette navigation n'excède pas une distance de 3 milles en mer : l'entrepreneur ne dispose actuellement, au titre de l'article 6, que d'un permis de circulation.

Ainsi, selon le droit en vigueur, l'exploitation d'embarcations conchylicoles (8° de l'article 5 de la loi précitée) nécessite un permis de navigation en deçà de 3 milles et un rôle d'équipage au-delà.

Or, c'est la même navigation que l'on soit dans la zone des trois milles ou au-delà. De plus, les entreprises conchylicoles sont comptabilisées dans la petite pêche. Cependant elles ne cotisent pas au comité local des pêches mais au Comité national de la conchyliculture.

Cette disposition permet, d'une part, de clarifier la situation en abolissant la limite de 3 milles de navigation qui détermine actuellement le fait d'avoir un rôle (et donc d'être affilié à l'ENIM) ou d'avoir un simple permis de navigation (et donc d'être affilié à la MSA), alors que cette limite ne correspond plus aux réalités du travail conchylicole et, d'autre part, de supprimer l'armement dit « conchyliculture-petite pêche (CPP) en distinguant ces deux activités.

L'armement actuel en CPP génère au moins deux difficultés. D'un côté , il introduit une brèche dans le contrôle des entrées de flotte. En effet on peut armer en CPP sans PME (parce qu'on est conchyliculteur) et, grâce à cela, pratiquer la petite pêche sans être comptabilisé dans la flotte de pêche.

D'un autre côté, les patrons en CPP peuvent être amenés à acquitter les taxes parafiscales à la fois aux comités locaux des pêches et aux sections régionales conchylicoles, même si leur activité ne relèvent que de l'une de ces deux activités.

Ces dispositions consacrent la spécificité des cultures marines liées à la fois au secteur maritime et au secteur agricole.

Votre commission vous propose d'adopter sans modification l'article 29.

Article additionnel après l'article 29 - Missions du Comité National de la Conchyliculture

Cet article vise à étendre les missions du Comité National de la Conchyliculture (CNC) en lui permettant, dans le respect des règles de la Communauté européenne, de celles des organisations internationales auxquelles la France est partie et des lois et règlements nationaux comme le précise l'article 8 de la loi n° 91-411 du 2 mai 1991, de participer à la défense de la qualité des eaux conchylicoles.

L'article 7 de la loi n° 91-411 du 2 mai 1991 relative à l'organisation interprofessionnelle des pêches et des élevages marins et à l'organisation de la conchyliculture crée une organisation interprofessionnelle de la conchyliculture : cette organisation comprend des comités régionaux, dénommés sections régionales (SRC) au nombre de sept actuellement recouvrant chaque bassin de production, et un comité national, le CNC.

Ce CNC est composé, d'une part, de représentants des exploitations conchylicoles et des salariés permanents de ces entreprises, qui constituent le groupé « Production et, d'autre part, de représentants professionnels de la distribution et de la transformation des produits conchylicoles, qui constituent le groupe « Commerce et Industrie .

Les missions du CNC sont définies par le décret n° 91-1276 du 19 décembre 1991 pris en application de la loi du 2 mai 1991. Ce décret précise les missions définies à l'article 8 de cette même loi qui confie au Comité national de la conchyliculture comme missions :

a) La représentation et la promotion des intérêts généraux de ces activités ;

b) L'association à la mise en oeuvre de mesures d'ordre et de précaution destinées à harmoniser les intérêts de ces secteurs ;

c) La participation à l'amélioration des conditions de production et, d'une manière générale, la réalisation d'actions économiques et sociales en faveur des membres des professions concernées ;

d) La participation à l'organisation d'une gestion équilibrée des ressources ;

e) La faculté de réaliser des travaux d'intérêt collectif.

La qualité du milieu d'élevage étant une donnée essentielle pour le maintien et le développement des activités conchylicoles, il apparaît normal que les structures professionnelles (SRC et CNC) puissent agir en ce domaine. Il convient donc de combler cette lacune.

Le terme « d'eaux conchylicole figure dans la directive 79/923 (CE) en date du 30 octobre 1979 relative à la qualité des eaux conchylicoles et peut donc être employé.

Votre commission vous propose d'adopter l'article additionnel après l'article 29.

TITRE VI - DE LA MODERNISATION DES RELATIONS SOCIALES

Article 30 - Dispositions modifiant la loi du 13 décembre 1926 portant code du travail
maritime

Cet article dans un souci d'homogénéité et de lisibilité, rassemble toutes les dispositions modifiant la loi du 13 décembre 1926 portant code du travail maritime.

Il comporte vingt paragraphes en chiffres romains.

Le paragraphe I abroge le 7° de l'article 10-7 qui permet à la pêche de conclure des contrats d'engagement à durée déterminée successifs dérogatoires au seul motif que les marins sont rémunérés à la part. Cette discrimination, qui ne se justifie pas, est abrogée. Les marins salariés à la pêche artisanale seront recrutés soit par contrat à durée indéterminée soit par contrat à durée déterminée dans les conditions de droit commun du code du travail maritime, qui restent assez flexibles.

Ce paragraphe met donc fin au système dit du « dérôlement abusif qui repose sur la fiction d'une succession de contrats d'engagement à la semaine. Cela permet aux armements (entre 15 et 20 %) de débarquer leurs marins, notamment en fin de semaine, avec comme conséquence une économie des cotisations ENIM pour les armateurs mais aussi pour le marin une forte diminution des services validés et ce jusqu'à 104 jours par an.

On peut espérer que cette mesure permet de supprimer un élément de précarité de remploi maritime dans le secteur de la pêche artisanale. Elle peut encourager les entreprises d'armement maritime à recourir à de véritables contrats à durée déterminée, des contrats à temps partiel annualisé ou des contrats à durée indéterminée.

Le paragraphe II modifie l'article 11 du code du travail maritime afin, d'une part , comme au IX ci-après, de moderniser les expressions de « rémunération à la part et, d'autre part, de créer une nouvelle obligation à l'égard des employeurs, lorsqu'il est fait usage de ce mode de rémunération, d'informer le marin sur les éléments comptables justifiant la rémunération perçue.

Ce paragraphe prévoit que le contrat d'engagement maritime (CEM), devant être écrit et visé par l'Administration maritime depuis Colbert et dont l'article 10 de la loi du 13 décembre 1926 a rappelé les caractéristiques (un contrat écrit précisant les fonctions et la rémunération du marin) mentionne deux éléments essentiels :

- la notion de rémunération « à la part consiste désormais en tout ou en partie « en une part sur le produit des ventes ou d'autres éléments spécifiés du chiffre d'affaires . Cette terminologie est plus précise que la formule en vigueur et permet de voir figurer dans la loi le mode de rémunération à la part régulièrement pratiqué.

- l'obligation nouvelle pour l'employeur d'informer le marin, au moins semestriellement, sur les éléments comptables justifiant cette rémunération. L'information expresse des marins sur les éléments comptables de cette rémunération à la part permet la vérification et la transparence de la rémunération, et réduit les risques de litiges pour abus ou incompréhension.

Le paragraphe III, dans un souci de parité avec les entreprises de conchylicultures agricoles et à la demande des entreprises du secteur maritime, crée un article 24-2 dans le code du travail maritime qui étend aux marins salariés des entreprises de cultures marines les dispositions du code du travail relatives à la modulation du temps de travail et au remplacement du paiement des heures supplémentaires par un repos compensateur.

En effet, le régime de travail à la conchyliculture est très proche de celui de l'agriculture. Les 6 à 7.000 entreprises conchylicoles existantes emploient du reste aussi bien des ouvriers conchylicoles affiliés à la mutualité sociale agricole (MSA) que des marins conchyliculteurs affiliés à l'établissement national des invalides de la marine (ENIM).

L'application aux marins salariés des entreprises de cultures marines des dispositions sur la modulation du temps de travail et sur le remplacement du paiement des heures supplémentaires par un repos compensateur est demandée par la profession dans un souci :

- de parité sociale avec les salariés du régime agricole ;

- de gestion équilibrée pour l'employeur confronté aux difficultés de l'application, dans une même entreprise, de deux droits sociaux différents et inégaux.

Les entreprises de cultures marines peuvent ainsi espérer mieux gérer leurs ressources humaines.

Le paragraphe IV modifie l'article 26-1 du code du travail maritime pour permettre l'application aux salariés des entreprises d'armement au commerce, au remorquage et à la plaisance des dispositions du code du travail relatives au repos compensateur.

Le a) du paragraphe IV précise que les marins embarqués à bord des navires armés au commerce, au remorquage et à la plaisance n'ont pas droit au repos compensateur « en cas de travaux urgents dont l'exécution immédiate est nécessaire pour organiser des mesures de sauvetage, pour prévenir des accidents imminents ou pour réparer des accidents survenus au matériel, aux installations ou aux bâtiments de l'établissement (article L. 212-12).

Le b) est un alinéa de coordination entre la modification de l'article L. 212-5-1 issue de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 et l'article 26-1 du code travail maritime.

La loi quinquennale pour l'emploi du 20 décembre 1993 a en effet modifié l'article L. 212-5 du code du travail que reprend dans son principe l'article 26-1 du code du travail maritime mais sans que la cohérence des deux textes ait été effectuée. C'est donc une modification rédactionnelle qui ne concerne pas les marins de la pêche auxquels ne s'appliquent pas le repos compensateur.

Le paragraphe V crée un article 26-2 dans le code du travail maritime qui étend aux marins salariés des entreprises de cultures marines les dispositions des articles 993 et 993-1 du code rural relatif au repos compensateur, dans un souci de parité avec les entreprises agricoles en termes sociaux, mais aussi de gestion pour l'employeur confronté à l'application de deux droits différents.

Le régime de travail, à la conchyliculture est, en effet, très proche de celui de l'agriculture. Au demeurant, les entreprises conchylicoles emploient aussi bien des ouvriers conchylicoles affiliés à la MSA que des marins conchyliculteurs affiliés à l'ENIM et parfois au sein d'une même entreprise, on rencontre les deux statuts.

Les ouvriers conchylicoles affiliés à la MSA relèvent du Code rural qui a étendu par l'article 993 du Code rural le régime du repos compensateur emprunté à l'article L. 212-5-1 du Code du travail, moyennant certaines adaptations.

Dans le même esprit que le III, ce texte vise à établir la parité entre les deux secteurs maritimes et agricoles de la profession.

Le paragraphe VI porte abrogation de l'article 27 du code du travail maritime relatif à l'entretien des fourneaux des navires et a la composition de l'équipage affecté à cette tâche.

Dans le cadre de la modernisation des normes sociales, il est proposé d'abroger une disposition désuète de l'avis des professionnels et dont certaines dispositions, de nature réglementaire, sont déjà réglées par voie de décret (décret du 26 mai 1967 sur les effectifs et décrets du 6 septembre 1993 sur la durée du travail à bord).

Le paragraphe VII modifie l'article 28 du code du travail maritime pour définir les modalités d'application du repos hebdomadaire, en prévoyant le repos par roulement ou différé à terre au retour de voyage ou dans un port d'escale.

Les deuxième et troisième alinéas de l'article 28 sont remplacés par les dispositions suivantes :

- le dimanche est consacré comme jour de repos hebdomadaire ;

- la nouvelle disposition renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de déterminer les modalités d'application pour tenir compte des contraintes propres aux diverses activités maritimes du genre de navigation ou de la catégorie de personnels concernés ; cependant des accords collectifs peuvent aller au-delà des dispositions réglementaires ;

- le repos est prévu par roulement ou différé à terre au retour de voyage ou dans un port d'escale pour tout ou partie de l'équipage.

Ces mesures visent à étendre à la pêche les dispositions de droit commun du travail maritime relatives au repos hebdomadaire applicables au commerce, pour moderniser et rendre plus lisible la réglementation en vigueur (article 23 du décret n° 83-793 du 6 septembre 1983).

Le paragraphe VIII crée un article 28-1 dans le code du travail maritime qui fixe le repos hebdomadaire des marins salariés des entreprises de cultures marines dans les conditions de l'article 997 du code rural, dans un souci de parité avec les entreprises du régime agricole.

En effet l'article 997 du code rural précise que « chaque semaine le salarié agricole ou similaire a droit à un repos, le dimanche, d'une durée minimale de 24 heures consécutives . Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application de cette mesure.

S'agissant des relations de travail dans les entreprises de cultures marines, caractérisées par la dualité des régimes sociaux applicables à leurs salariés (MSA ou ENIM), il est donc recherché un rapprochement des droits du travail agricole et maritime applicables aux salariés des cultures marines, et ce, quel que soit leur régime social.

Le paragraphe IX modifie l'article 33 du code du travail maritime afin, d'une part, comme au II ci-dessus, de moderniser les expressions de « rémunération à la part et, d'autre part, de prévoir deux nouvelles dispositions qui opèrent une clarification dans la définition des frais communs.

Le premier alinéa de l'article 33 vise à poursuivre la modernisation de la terminologie de la rémunération à la part. Celle-ci doit déterminer les dépenses et les charges à déduire du produit brut ou des autres éléments pris en compte pour former le produit net ; par « ces éléments , on entend la rémunération que peut percevoir l'équipage à l'occasion de l'affrètement du navire pour une campagne scientifique ou lors de l'embarquement de touristes. Cet alinéa précise qu'aucune autre déduction ne pourrait être faite au détriment du marin autres que celles stipulées dans le contrat d'engagement maritime.

Deux nouvelles dispositions sont introduites aux deuxième et troisième alinéas de l'article 33 :

- en cas de litige entre l'employeur et le salarié sur la rémunération perçue, il est institué une l'obligation pour l'employeur de communiquer au juge tous les éléments comptables ; ainsi en remplacement du contrôle des comptes par l'autorité maritime tombé en désuétude et qui ne correspond plus à la réalité, il est proposé, en s'inspirant de ce qui existe déjà dans le code du travail pour d'autres sujets, d'imposer à l'armateur de communiquer au juge, en cas de litige, les preuves de la régularité du paiement du marin en fonction des modalités du contrat (pourcentage, factures des frais, etc...). Le texte précise, par ailleurs, que ces éléments d'information doivent aussi être adressés à l'autorité chargée de l'inspection du travail maritime si celle-ci le demande ;

- les dépenses qui ne peuvent en aucun cas être imputées sur les « frais communs sont fixées par décret pris en Conseil d'État après avis des organisations professionnelles. Ce texte doit tenir compte des dispositions de l'article 72 du code que modifie l'article 30, portant sur le droit des marins a la nourriture ou à une allocation équivalente. Un décret déterminera donc la liste des frais illicites. Celle-ci pourrait reprendre la liste des frais énumérés à la circulaire du 29 septembre 1995 de la Direction des Gens de la Mer élaborée en concertation avec les partenaires sociaux, en lui donnant une base légale.

Le paragraphe X donne une nouvelle rédaction de l'article 34 du Code du travail maritime. Il confie à un décret le soin de déterminer par voie conventionnelle le mode de calcul de la rémunération à la part en prévoyant le lissage de la rémunération contractuelle à la part, ainsi que la définition de la durée du travail hebdomadaire retenue pour le calcul du salaire minimum de croissance.

Le texte vise à affirmer par voie législative que le principe de la rémunération à la part, maintenu, confirmé, se concilierait avec celui d'une rémunération minimale, en renvoyant à un décret pris après avis des partenaires sociaux les modalités pratiques.

Ce décret doit, selon les informations communiquées à votre rapporteur, retenir comme voie le lissage du produit des rémunérations résultant de parts de pêche sur tout ou partie de l'année ou d'une autre période adéquate ainsi que la faculté de définir par voie conventionnelle un volume hebdomadaire de travail forfaitaire servant au calcul du droit au SMIC mensuel.

Bien que la législation du SMIC, avec des modalités propres, s'applique aux marins, quel que soit leur genre de navigation, depuis 1950, le mode ancestral et consensuel de rémunération à la part, a occulte cette législation pendant des années -qui correspondaient aussi à une forte progression des rémunérations-.

A partir des années 90, en raison de la crise de la pêche, les rémunérations ont diminué, conduisant à des parts parfois inférieures au SMIC mensuel, quelquefois « négatives , engendrant des frustrations sociales et aussi des litiges portés devant le juge. Le 1er avril 1992, la Chambre sociale de la Cour de Cassation a reconnu aux marins rémunérés à la part le droit au SMIC, certains marins revendiquant « un filet de sécurité .

En 1994, le Ministère de l'agriculture a proposé un compte-épargne par navire ; l'État participe à la création d'un compte, alimenté par l'armateur et l'équipage, afin de compléter les parts de pêche à hauteur du SMIC, quand cela s'avère nécessaire. Ce système, fondé sur le volontariat n'a été retenu que par trente navires sur 2.000.

La circulaire du 29 septembre 1995 a rappelé que l'armateur se doit, soit mensuellement de compléter les parts de pêche lorsqu'elles sont inférieures au SMIC, soit de mensualiser le marin au SMIC en complétant ce salaire fixe par une prime d'intéressement aux résultats de la pêche.

Le SMIC est un salaire horaire, dont l'effectivité doit être assurée mois par mois. Ceci résulte aussi de son caractère « alimentaire : c'est le minimum pour vivre compte tenu des charges de la vie moderne (exemple des loyers mensuels).

Le lien SMIC-volume de travail, qui s'impose à d'autres professions ayant des horaires importants (en agriculture, par exemple) présente néanmoins une des difficultés d'application sereine du SMIC à la pêche où le volume d'heures de travail, difficilement quantifiable, obéit au principe : « pêcher le poisson quand il est là .

D'après l'étude d'impact du Gouvernement, et ce malgré la crise, les éléments comptables à la disposition des observateurs de la pêche, semblent indiquer que 80 % des armements sont en mesure de donner une masse salariale annuelle (total des parts de pêche) supérieure à 12 fois le SMIC mensuel (calculé sur une moyenne de 50 h/semaine).

C'est donc que l'application du SMIC rencontre peut être plus, pour une majorité, des difficultés d'ordre comptable voire culturel, qu'économique et rédhibitoire.

Cependant le SMIC, s'il ne fait pas disparaître la rémunération à la part, l'atténue par un minimum garanti. Il peut conduire à une modification apparemment négociée de la répartition : le marin courant moins de risques financiers, aura droit moins droit au bénéfice. Surtout, il impose à l'entreprise de pêche artisanale une gestion de trésorerie, un minimum de capitalisation.

Ce sera, conformément au droit moderne et de manière optionnelle, aux partenaires sociaux, par voie d'accord collectif, d'adapter à chacun de leur cas le cadre que leur offre la loi.

Le paragraphe XI, en modifiant le deuxième alinéa de l'article 50 du code du travail maritime, étend à la pêche le principe général du code du travail d'interdiction de toute sanction pécuniaire pour motif disciplinaire.

Cependant, les dédits stipulés dans les contrats d'engagement sont maintenus.

La modernisation des relations sociales dans les entreprises d'armement à la pêche doit impérativement introduire une telle mesure et exclure toute discrimination en cette matière par rapport au droit commun du travail (article L. 122-42 du code du travail).

Le paragraphe XII, en complétant l'article 72 par un alinéa supplémentaire, permet aux armements à la pêche de déroger par voie conventionnelle à l'article 72 du code du travail maritime relatif aux vivres.

Selon l'étude d'impact du Gouvernement, les partenaires sociaux ont conclu en 1995 de ne pas remettre en cause le principe de l'article 72 -donnant droit au marin à la nourriture ou à une allocation équivalente pendant leur inscription au rôle de l'équipage-, compte tenu de ses incidences sur le SMIC maritime et de l'attachement des marins de commerce à son maintien.

Cependant, il peut y être dérogé à la pêche par voie conventionnelle. Si un accord collectif de branche ou d'entreprise le prévoit, les vivres pourront être imputés dans les frais communs.

Ce système est retenu afin d'inciter à la conclusion d'accord collectif d'entreprise ou de branche dans le secteur de la pêche artisanale et semi-industrielle.

Le paragraphe XIII crée un article 72-1 dans le code du travail maritime permettant par voie conventionnelle d'appliquer aux marins salariés des entreprises de cultures marines l'article 72 du code du travail maritime sur le droit aux vivres qui ne leur est normalement pas applicable.

Le paragraphe XIV donne une nouvelle rédaction du 2° de l'article 93 du code du travail maritime pour permettre l'application aux marins salariés des règles particulières, mises en place pour les salariés victimes d'accident du travail, issues de la réglementation du droit commun du travail. Il est à mettre en liaison avec l'article 31, I ci-après.

Plusieurs jurisprudences de Cours d'Appel (Cour d'appel de Rennes dans l'affaire Beven du 28 janvier 1988, Cour d'appel de Poitiers en 1992...) ont mis en évidence la précarité du statut des marins victimes d'un accident du travail maritime ou d'une maladie en cours de navigation et ont en conséquence fait bénéficier les marins victimes d'accident du travail des dispositions du droit du travail général. La Cour de cassation en 1993 a refusé une telle application au nom de l'autonomie du travail maritime dans le silence du législateur afin d'encourager les pouvoirs publics à combler ce vide juridique.

Ainsi alors que le 2° de l'article 93 prévoit la rupture automatique du contrat pour cause de mise à terre du marin blessé ou malade, cette mesure est abrogée. C'est la suspension du contrat d'engagement maritime, dans les conditions de la jurisprudence du droit commun, qui prévaut désormais.

Le paragraphe XV abroge l'article 102-20 du code du travail maritime rendant applicable aux marins salariés la procédure de droit commun du code du travail organisant le licenciement des salariés. Cet article exclue, en effet, les règles du droit commun du licenciement pour « les contrats conclus pour servir à bord de navires armés à la petite pêche ou à la pêche côtière .

Les entreprises d'armement maritime à la pêche artisanale (petite pêche, pêche côtière et pêche au large lorsque dans ce dernier cas le propriétaire est embarqué) bénéficient encore d'un droit du licenciement maritime dérogatoire, les articles L. 122-14, L. 122-14-1, L. 122-14-2 et L. 122-14-4 ne s'appliquant pas.

De fait, le licenciement des matelots salariés à la pêche artisanale repose sur les articles 93 à 98 du Code du travail maritime qui prévoient un régime de résiliation sommaire du contrat proche de celui existant en droit commun avant la grande réforme de 1973 (et pour les marins, avant 1977, date de son extension).

Aujourd'hui, à la différence des entreprises de pêche artisanale, les entreprises artisanales ou agricoles appliquent, quel que soit leur effectif et que le chef d'entreprise travaille ou non avec ses ouvriers, le droit commun du licenciement.

Rien ne justifie donc que les entreprises de pêche ne soient soumises au même droit. De nombreuses jurisprudences ont montré le statut précaire du marin salarié à la pêche artisanale.

Le présent article vise à mettre fin à une telle disparité.

Il est à noter que le droit commun du licenciement s'appliquera seulement pour les marins engagés après la date d'entrée en vigueur de la loi, ce qui permet d'assurer une réelle sécurité juridique.

Le paragraphe XVI abroge l'article 111 du code du travail maritime en supprimant les notions de mousse et de novice qui ne correspondent plus à la réalité du marché de l'emploi à la pêche et au commerce maritime. L'obligation d'une qualification professionnelle minimale résultant du décret n° 67-690 du 7 août 1967 relatif aux conditions d'exercice de la profession de marin combinée avec l'allongement des formations maritimes initiales, a fait perdre toute raison d'être au noviciat.

Au 31 décembre 1994, on recensait à la pêche le nombre de postes embarqués ci-après :

Age

< 18

< 20

< 21

21 à 60 et +

Total

Conchyliculture

8

31

49

3.875

3.963

Petite pêche

33

91

71

6.641

6.836

Pêche côtière

16

49

51

1.792

1.987

Pêche au large

12

51

36

2.054

2.170

Grande pêche

5

4

6

15.441

15.456

On recense 74 marins embarqués de moins de dix et huit ans.

Ces emplois ne sont pas supprimés ni menacés par l'abrogation de l'article 111, il s'agit uniquement d'une question de dénomination. Ces marins deviennent des salariés à part entière tout en bénéficiant du régime de protection des salariés de moins de dix et huit ans.

Le paragraphe XVII modifie comme suit l'intitulé du chapitre II du livre VI du code du travail maritime qui devient : « Chapitre II. Dispositions spéciales applicables aux marins âgés de moins de dix-huit ans .

Le changement dans l'intitulé du Chapitre II est rendu nécessaire pour des raisons de caducité.

Le paragraphe XVIII modifie l'article 114 du code du travail maritime pour permettre la transposition de la directive (CE) 94-33 du 22 juin 1994 relative à la protection des jeunes travailleurs.

Le premier alinéa de l'article 114 du code du travail maritime précisent un certain nombre de tâches que les marins de moins de 18 ans ne peuvent pas effectuer (travail des chaudières ...) et définit des endroits où ils ne doivent pas travailler (compartiments dans lesquels la température est élevée), et ce pour des raisons de santé.

Le deuxième alinéa précise le rythme de travail des marins de moins de 18 ans. Ceux-ci ne peuvent pas :

- accomplir le service de quart de nuit de 20 heures à 4 heures du matin ;

- faire plus d'huit heures de travail au cours d'une même journée ;

- effectuer plus de 39 heures par semaine.

Par ailleurs le texte indique ce à quoi les marins de moins de 18 ans ont droit :

- une période de repos minimum ininterrompu de 12 heures pour chaque période de 24 heures passées à bord ;

- un jour de repos par semaine d'une durée minimale de 36 heures consécutives, tant en mer qu'au port.

Le troisième alinéa de l'article 114 précise les conditions de travail dans le service de la machine. Ces travaux étant difficiles, un régime spécial est aménagé. Les marins de moins de 18 ans ne peuvent pas faire partie des équipes de quart et ils doivent avoir obligatoirement une pause minimum de 30 minutes au bout de quatre heures et demie de travail consécutif.

Le quatrième alinéa de l'article 114 prévoit une dérogation aux règles précisées dans le deuxième alinéa pour les marins d'au moins 16 ans. Cependant cette dérogation reste très encadrée :

- ce doit être un accord collectif de branche étendu qui déroge aux dispositions précédemment fixées ;

- de plus, des conditions objectives doivent justifier une telle dérogation ;

- enfin, un repos compensateur approprié doit être octroyé à ces marins entre 16 et 18 ans.

Il est à noter que les dispositions transposées ne font qu'appliquer au secteur maritime des dispositions déjà prévues par le droit commun du travail, notamment celles concernant l'interdiction d'employer ces jeunes à des travaux dangereux pour leur sécurité et leur intégralité physique.

Il est prévu d'organiser par décret en Conseil d'État les modalités d'application de cette disposition législative, en tenant compte des particularités des professions maritimes et en usant de toutes les possibilités de dérogations ouvertes par la directive précitée (notamment ses articles 8 et relatifs à la durée maximale de travail hebdomadaire et de travail de nuit).

Le paragraphe XIX modifie l'article 115 du code du travail maritime pour tenir compte des dispositions de la Convention internationale du Travail n° 138 du 6 juin 1973, concernant l'âge minimum d'admission à l'emploi, et ratifiée par la France.

Le premier alinéa de l'article 115 interdit d'embarquer sur un navire, à titre professionnel, des jeunes âgés de moins de 16 ans.

Le deuxième alinéa de l'article 115 prévoit une dérogation à la règle précédente pour les jeunes âgés d'au moins 15 ans. De nouveau, cette dérogation est assortie de prescriptions précises :

- l'embarquement de jeunes âgés de 15 à 16 ans ne peut s'effectuer que pendant les congés scolaires ;

- ils peuvent prendre occasionnellement part aux activités à bords des navires.

Des formalités administratives doivent être remplies pour pouvoir embarquer ces jeunes gens : autorisation de l'inspection du travail maritime et certificat médical attestant de l'aptitude du jeune à naviguer.

Le troisième alinéa de l'article 115 indique que ces activités occasionnelles doivent porter sur des travaux « légers et qu'un repos minimal doit être garanti, fixée à la moitié de chaque période de congé scolaire -évitant ainsi que le jeune passe toute la période de vacances scolaires à travailler sur le navire-.

Il est à noter que cette disposition ne fait qu'appliquer aux professions maritimes une disposition relative à l'interdiction d'embauchage des jeunes de moins de seize ans existant déjà dans le droit commun du travail, compte tenu :

- de l'âge légal de fin d'étude scolaire,

- de l'âge minimum existant pour la libération des obligations concernant le service national.

Le paragraphe XX renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de déterminer les modalités d'application des articles 111 à 115. Ce décret est pris après avis des partenaires sociaux.

Selon les termes mêmes de l'étude d'impact, conformément à la directive (CE) 94-33 du 22 juin 1994, et en usant de toutes les possibilités qu'elle ouvre, il est prévu d'organiser le régime le plus adapté aux exigences des professions maritimes et de recourir aux dérogations qu'elle permet, dans le plus grand respect des règles du droit du travail.

Votre rapporteur estime que, en raison des spécificités du marché du travail dans le secteur de la pêche et des cultures marines, la transcription de cette directive risque de rendre plus complexe les règles du droit du travail. Cependant il vous propose d'adopter sans modification ce dispositif.

Votre commission vous propose, outre un amendement d'ordre rédactionnel au paragraphe XIV, d'insérer un paragraphe additionnel à l'article 30 visant à étendre les dispositions des chapitres VII, VII bis, VIII et IX du titre premier du livre premier du code du travail relatives à l'apprentissage aux jeunes embarqués à bord des navires armés à la pêche. Il est précisé que la dérogation d'âge visée à l'article L. 117-3 du code du travail est également applicable aux jeunes embarqués à bord des navires armés à la pêche comme apprenti, et ce nonobstant les dispositions de l'alinéa premier de l'article 115 du code du travail.

Cette disposition permet la mise en oeuvre de contrats d'apprentissage dans le secteur de la pêche et tend ainsi à faciliter l'embauche de jeunes dans le secteur des pêches et cultures marines.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 30 ainsi modifié.

Article 31 - Dispositions modifiant le code du travail - Formation professionnelle

Cet article rassemble les dispositions modifiant le code du travail.

L'article 31 comporte six paragraphes en chiffre romain.

Le paragraphe I dans son premier alinéa insère deux nouveaux articles au chapitre II du titre IV du livre septième du code du travail.

Le deuxième alinéa de ce I concerne l'article L. 742-9 du code du travail qui rend applicable aux entreprises d'armement maritime, quel que soit leur genre de navigation les dispositions du code du travail relatives à la protection et au reclassement des travailleurs victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle issues de la loi n° 81-3 du 7 janvier 1981. L'article ainsi crée renvoie à un décret en Conseil d'État la fixation des modalités d'application du présent article.

Cette disposition répond au souci exprimé par la Cour de Cassation dans son arrêt du 12 janvier 1993 (affaire Vendier).

Cette disposition complète celle prévue à l'article 30 XIV, qui modifie l'article 93 du code du travail maritime, aujourd'hui discriminatoire pour les marins victimes d'un accident ou d'une maladie professionnelle.

Le troisième alinéa crée un article L. 742-10 qui étend aux entreprises de cultures marines les dispositions du code du travail relatives aux groupements d'employeurs institués par l'article L. 127-1 du code du travail dans le secteur maritime, notamment conchylicole ou à la pêche. Il s'agit donc de faire bénéficier de cette disposition les conchyliculteurs marins, les conchyliculteurs rattachés à la MSA bénéficiant du dispositif général avec les aménagements autorisés pour les groupements agricoles (par exemple celui mentionné à l'article L. 127-9 sur la liste des utilisateurs de ce service).

Le groupement d'employeurs est une association « loi 1901 constitué de personnes physiques ou morales. Il permet à des PME de se constituer un personnel salarié mis en commun et utilisé pour chaque employeur membre en fonction de ses besoins. Il rencontre en secteur rural un certain succès, notamment pour répondre aux congés, absences, etc., du personnel titulaire de chaque employeur ou subvenir à des surcroîts réguliers de travail. Cette formule est avantageuse pour les exploitants mais aussi pour les salariés.

La loi ne fait en tous les cas qu'ouvrir une simple faculté économique pour le secteur des cultures marines.

Les paragraphes II à V ont pour objet d'adapter au secteur de la pêche maritime et des cultures marines, les dispositions du Code du travail relatives au financement de la formation professionnelle.

On distingue traditionnellement en matière de formation professionnelle :


les FAF (fond d'assurance formation) pour les chefs d'entreprises . Il s'agit de l'AGEFICE (association de gestion du financement de la formation professionnelle des chefs d'entreprises non libéraux et non médecins) pour ceux qui relèvent de l'ENIM ou du FAFEA (fonds d'assurance formation des exploitants agricoles) pour les chefs d'entreprises qui sont affiliés à la MSA ;


• Les OPCA (organisme paritaire collecteur agréé) pour les salariés
sont le FAFSEA (Fonds d'assurance formation des salariés des entreprises agricoles) agrée pour la branche « activités agricoles et assimilées et le FAF « Pêche agrée pour la branche « entreprises de pêche .

Par ailleurs, il convient, à titre liminaire, de préciser que les ressources des OPCA proviennent à titre principal des contributions des employeurs et que les entreprises conchylicoles sont libres actuellement d'adhérer à l'OPCA de leur choix, y compris un OPCA régional.

Les paragraphes II et III concernent la formation des salariés des entreprises de pêche maritime et de cultures marines.

Le paragraphe II complète l'article L. 951-1 du code du travail qui concerne la participation des employeurs occupant au minimum 10 salariés en faveur du développement de la formation professionnelle continue. Cette disposition permet aux employeurs du secteur de la pêche maritime et des cultures marines de verser à un organisme collecteur paritaire agréé, mentionné à l'article L. 953-4, la fraction de la contribution qui n'aurait pas été utilisée directement au financement de la formation professionnelle au profit de leurs salariés.

Ainsi l'OPCA peut-il collecter, par exemple, les contributions, dues au titre du plan de formation dans les entreprises de 10 salariés et plus, si celles-ci ne sont pas utilisées directement.

Le paragraphe III procède de la même analyse que le paragraphe II et complète l'article L. 952-1 du code du travail concernant la participation des employeurs occupant moins de 10 salariés en faveur du développement de la formation professionnelle continue. Cependant, dans ce cas précis, la contribution due au titre, notamment, du plan de formation est obligatoirement versée à un OPCA . Il n'y a pas, comme pour les entreprises de 10 salariés et plus, la possibilité de gérer elles-mêmes, directement, leur budget « plan de formation .

Le paragraphe IV traite plus spécifiquement des chefs d'entreprises de cultures marines : il complète l'article L. 953-3 du code du travail et précise que les Caisses de mutualité sociale agricoles reversent le montant de leur collecte à l'organisme collecteur paritaire agréé s'agissant des chefs d'entreprise de cultures marines et des travailleurs indépendants.

Un dispositif réglementaire complexe régit la formation professionnelle continue des chefs d'entreprises dans les différents secteurs d'activités. La plupart des textes sont antérieurs à 1993 (en s'appuyant essentiellement sur la loi n° 82-1091 du 23 décembre 1982 relative à la formation professionnelle des artisans et la loi n° 91-1405 du 30 décembre 1991 relative à la formation professionnelle et à l'emploi, modifiant le Code du travail) et encadrent la formation continue :

- des membres des professions libérales et des travailleurs indépendants (avocats, notaires, médecins, architectes et experts-comptables) et des professions non salariées (code du travail article L. 953-1) ;

- des non salariés artisans du secteur des métiers (code du travail, article L. 953-2) ;

- des non salariés agricoles ou assimilés (code du travail, article L. 953-3).

Le décret n° 93-281 du 3 mars 1993 précise le principe de généralisation à tous les non salariés : il prévoit la participation des travailleurs indépendants, des membres des professions libérales et des professions non salariées au développement de la formation professionnelle continue.

La loi quinquennale introduit en outre des mesures de rationalisation et de simplification pour le secteur agricole en matière de collecte des contributions. Enfin, la loi n° 95-115 du 4 février 1995 reprend ce principe et le généralise en organisant la mise en recouvrement des contributions de l'ensemble des non salariés au développement de la formation professionnelle. A cette fin, elle confie aux Unions Régionales de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales (URSSAF) la mission de collecte des contributions correspondantes (Code du travail, article L. 953-1). Les contributions sont alors versées à l'Agence Centrale des Organismes de Sécurité Sociale (ACOSS) qui reverse à chaque fonds d'assurance formation sectoriel (FAF) les contributions qui lui correspondent.

Concernant les non salariés agricoles et assimilés, les organisations les plus représentatives de l'agriculture et l'Assemblée Permanente des Chambres d'Agriculture ont créé le FAFEA ; celui-ci a été agréé par les ministres chargés de l'agriculture et de la formation professionnelle (arrêté du 23 mars 1993, article 1). Le recouvrement de la contribution au titre de la formation professionnelle continue des chefs d'exploitations ou d'entreprises agricoles est effectué en une seule fois par les caisses de la MSA et reversé au FAFEA.

Avec l'unification du FAF « Pêche , il est proposé que les caisses de mutualité sociale agricole reversent le montant de leur collecte à cet OPCA et non plus au FAFEA pour les chefs d'entreprises conchylicoles affiliés à la MSA.

Le problème reste cependant entier pour les chefs d'entreprises conchylicoles relevant de l'ENIM . Ceux-ci, en effet, compte tenu de la nature des travaux qu'ils exécutent, se trouvent exclu du champ de collecte du FAFEA. Ils cotisent donc, en tant que professionnels non salariés, à l'AGEFICE, l'organisme chargé du recouvrement des cotisations étant la Caisse nationale d'allocations familiales des pêches maritimes (CNAFPM) en application de la loi du 4 février 1995.

Votre commission vous propose un amendement afin de combler ce vide juridique.

Le paragraphe V insère un article L. 953-4 du code du travail afin de créer un Fonds d'assurance formation agréé par l'État pour la formation des travailleurs indépendants à la pêche maritime et les chefs d'entreprises de pêche maritime occupant moins de 10 salariés.

Le premier alinéa de l'article 953-4 prévoit le versement par les travailleurs indépendants à la pêche maritime et les chefs d'entreprises de pêche maritime occupant moins de 10 salariés, d'une contribution d'au moins 0,15 % du montant annuel du plafond de la sécurité sociale, pour assurer le financement de leur propre formation. Les types d'action de formation qui entrent dans le champ d'application des dispositions relatives à la formation professionnelle continue sont précisés à l'article L. 900-2 du code du travail.

Le deuxième alinéa de l'article L. 953-4 indique les modalités de recouvrement de cette contribution effectuée en une seule fois et contrôlée par la Caisse nationale d'allocations familiales des pêches maritimes.

Le troisième alinéa de l'article L. 953-4 précise que cette caisse reverse le montant annuel de la contribution à l'organisme collecteur paritaire agrée à cet effet par l'État.

Ces fonds réunifiés pourraient selon l'étude d'impact représenter un volume d'environ 5 milliards de francs, le nombre total de cotisants (chef d'entreprise, salariés, travailleurs indépendants, des pêches et des cultures marines) pouvant représenter environ 28.000 cotisants.

L'ensemble du dispositif de cet article permet d'apporter au secteur de la pêche maritime et des cultures marines la véritable autonomie en matière de politique de formation professionnelle continue et de collecte des cotisations qu'il réclamait depuis longtemps, tout en s'inscrivant dans la réforme de la formation professionnelle dont l'année 96 marque l'aboutissement, le nombre d'organismes collecteurs étant passé depuis le 1er janvier 1996 de 255 à 96.

A l'avenir, un seul « FAF pêche et cultures marines peut être agréé, commun aux salariés et non salariés du secteur.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 31 sous réserve d'un amendement.

Article 32 - Rapport sur la situation du chômage à la pêche

L'article 32 prévoit que le Gouvernement présentera au Parlement dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi un rapport sur la situation du chômage à la pêche et ses causes ainsi que sur les moyens d'améliorer la protection des marins pêcheurs contre les différentes formes de chômage rencontrées à la pêche. En effet le secteur des pêches maritimes est un des derniers secteurs économiques non affiliés aux ASSEDIC.

Ce particularisme s'explique par l'ambivalence du statut du marin pêcheur, longtemps tenu pour associé. A l'occasion du plan « Mellick de 1990, la question s'est posée pour la première fois d'étendre l'assurance chômage à la pêche artisanale. Cette extension a échoué, l'objectif recherché par une telle affiliation est de prévenir les conséquences sociales des Plans d'orientation pluriannuels (POP) de la pêche communautaire. Les réductions d'emploi pouvant découler de la réduction de la flotte de pêche française se trouveraient ainsi atténuées par une prise en charge des ASSEDIC, au travers de l'indemnisation de la perte d'emploi, mais aussi de l'aide à la reconversion et à la formation-reclassement.

Cependant ce secteur connaît un régime volontaire de chômage intempérie mis en place lors du conflit de 1975. Les caisses de garanties contre le chômage et les avaries, au nombre de 24 au début de l'année 1996, couvrent plus de 5.100 marins et assurent aux marins un salaire forfaitaire pour une durée totale de 40 jours en cas de mauvais temps ou d'immobilisation du navire. Cependant l'adhésion est individuelle et le mécanisme relève autant de l'épargne que de la socialisation des risques. Par ailleurs, la situation du chômage effectif par suite de licenciement, du chômage technique, de la mobilité et de la reconversion est à ce jour mal cernée.

Le débat préalable de la loi d'orientation au sein de la profession n'a pas permis de dégager une opinion claire sur l'opportunité d'affilier ce secteur aux ASSEDIC.

Votre commission vous propose d'adopter sans modification l'article 32.

Article 33 - Préretraite

Cet article comporte cinq paragraphes numérotés en chiffre romain.

Le paragraphe I institue un Fonds national d'aide à la préretraite à la pêche (FNAPP) auquel sont affectés une subvention de l'État (Ministère de la marine Marchande et Ministère des Pêches selon l'étude d'impact), un concours de l'Instrument financier de l'orientation de la pêche, conformément au Règlement (CE) n° 2179/95 du 20 novembre 1995, et des contributions financières des professionnels.

Ce sont des accords conclus entre les organisations représentatives au plan national d'armateurs et de marins à la pêche qui, selon le deuxième alinéa du I, fixent la nature et le montant de ces contributions et déterminent les modalités d'adhésion à ce fonds pour les pêcheurs artisans indépendants. Ces accords entrent en vigueur une fois étendus par le ministre chargé de la marine marchande.

Le paragraphe II précise que ce fonds assure le financement d'allocations qui peuvent être attribuées au bénéfice des marins pêcheurs, salariés ou non, ayant présenté une demande de préretraite et réunissant les conditions nécessaires à l'obtention de cette allocation.

De plus, ce paragraphe précise la contrepartie du versement de l'allocation de pré-retraite : la renonciation par le marin, et ce à titre définitif, à exercer toute activité de pêche professionnelle ainsi qu'à percevoir le revenu de remplacement que le pêcheur reçoit lorsqu'il a été involontairement privé d'emploi (article L. 351-1 du code du travail).

Le paragraphe III indique que la demande de préretraite présentée par un salarié, si elle est acceptée par l'employeur ou si elle est proposée par l'employeur, après acceptation du salarié, entraîne la rupture du contrat d'engagement maritime de plein droit du fait du commun accord des parties à la date d'acceptation de la prise en charge de l'intéressé par le Fonds national d'aide à la préretraite à la pêche et dispense l'employeur des obligations du droit du travail relatives au licenciement. Le marin renonce à titre définitif à exercer toute activité de pêcheur à titre professionnel.

Par ailleurs, l'acceptation par l'employeur de pêche maritime de la demande de préretraite par le salarié entraîne l'obligation pour cet employeur, sauf s'il cesse son activité lui-même ou en cas de vente du navire sans être remplacé, de procéder à une ou plusieurs embauches compensatrices de demandeur d'emploi sous contrat d'engagement maritime à durée indéterminée. Les salariés privés d'emploi par suite des mesures de restructuration du secteur au sens de l'article 11 du Règlement (CEE) n° 3760-92 du 20 décembre 1992 bénéficient d'une priorité de reclassement auprès de cet employeur.

Le paragraphe IV complète ce dispositif en indiquant que, dans le cadre départemental, des organisations représentatives d'armateurs et de marins pourront créer par voie conventionnelle et sous le statut associatif une bourse de l'emploi maritime afin d'aider avec le concours et la mobilisation de l'ANPE au reclassement effectif des marins privés d'emploi par suite des mesures de restructuration dans des emplois qui se libéreraient par suite de préretraite.

Ainsi cette mesure permet de mettre en évidence l'activité du reclassement-transfert.

Le paragraphe V prévoit un décret en Conseil d'État pour la fixation des conditions d'âge et de durée de période d'assurance précitées, ainsi que des conditions dans lesquelles la demande de préretraite doit être présentée, le montant de l'allocation, sa revalorisation, sa durée de versement, sa suspension en cas de reprise d'activité et le prélèvement de cotisations sociales sur le montant des allocations.

L'étude d'impact du Gouvernement précise que l'âge minimal pourrait être de 5 ans et la condition d'assurance de 30 ans dont 27 à l'ENIM. L'allocation de pré-retraite pourrait être égale à 65 % du salaire forfaitaire ENIM, sans être inférieure à 53 % de la 10 ème catégorie (actuellement 6.277 F/mois brut).

La France a été pionnière en matière de régime de préretraite à la pêche en 1991. Un schéma du même type a été adopté par l'Union européenne au travers du Règlement n° 2719/95. L'ambition du dispositif européen est de lier le nombre de préretraites volontaires de marins d'au moins 50 ans et justifiant d'une certaine ancienneté, au nombre d'emplois supprimés par suite des mesures de restructurations du secteur des pêches.

L'objectif de ce nouveau dispositif, assez proche de l'esprit de celui institué par la loi n° 96-126 du 21 février 1996 portant création d'un fonds paritaire d'intervention en faveur de l'emploi, est de favoriser des préretraites contre le maintien de l'emploi de marins pêcheurs plus jeunes. Il se substitue à l'actuel régime de cessation anticipée d'activité à la pêche institué dans le cadre du Plan « Mellick par l'accord tripartite de juillet 1991. Cependant, à la différence du régime général, aucune indemnité de cessation d'activité n'a été prévue.

Selon une enquête statistique, le nombre total de marins ayant au 1 er juin 1997 les conditions d'âge et de services et pouvant « prétendre à une demande de préretraite représente 1.920 marins pêcheurs.

Votre commission vous propose d'adopter sans modification l'article 33.

Article 34 - Affiliation des pêcheurs à pied professionnels à un régime de protection sociale

L'article 34 précise les conditions d'affiliation des pêcheurs à pied professionnels à un régime de protection sociale, condition nécessaire à la définition de leur statut et à l'édiction d'une réglementation de la pêche à pied professionnelle.

L'article 34 se décompose en deux paragraphes qui prévoit le rattachement des pêcheurs maritimes à pied professionnels au régime de la mutualité sociale agricole qui résulte de la nature de cette activité.

Le paragraphe I modifie le 5° du premier alinéa de l'article 1060 du code rural qui définit les catégories de personnes auxquelles le régime agricole de prestations familiales est applicable.

Le paragraphe II précise le rattachement des pêcheurs maritimes à pied professionnels au régime d'assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles de la MSA par une modification au 2° de l'article 1144 du code rural.

Cependant cette affiliation préserve le cas des quelques pêcheurs à pied qui d'ores et déjà sont affiliés à l'ENIM. Le retard quant à la définition d'un statut du pêcheur à pied professionnel est dû en partie à l'absence de régime social de rattachement. Si le régime social logique eut été celui de la MSA compte tenu du caractère de cueillette de cette activité, les seuils d'affiliation de la MSA étaient à la fin des années 80 assez élevés. Quant à celui de l'ENIM, il nécessitait l'existence d'un bateau. A partir de 1993, la MSA a assoupli le régime de ses seuils d'affiliation ; entre-temps, certains pêcheurs à pied se sont inscrits à l'ENIM.

Le statut social étant défini, la réglementation de la pêche à pied est du domaine réglementaire : l'application de mesures de contrôle sanitaire et de protection de la ressource devrait permettre de clarifier la situation de ceux qui souhaitent pratiquer cette activité dans le respect de la loi et de lutter contre le braconnage, par exemple en matière de pêche à la civelle.

Il est renvoyé dans le projet de loi à un décret en Conseil d'État paru antérieurement pour la définition de la qualité de « pêcheur maritime à pied professionnel . Or, la base législative qui est indiquée dans l'article 34 est la loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985 : ce texte est relatif à la forêt.

Il est ainsi proposé, par un amendement, de rétablir la référence exacte de la source législative visée dans l'article 34 : le décret qui définit la notion de « pêcheur maritime à pied professionnel a été pris en application de la loi n° 85-542 du 22 mai 1985.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 34 sous réserve de cet amendement.

TITRE VII - DISPOSITIONS DIVERSES

Article 35 - Constitution de droits réels sur le domaine public maritime

Cet article permet d'étendre les dispositions de la loi du 25 juillet 1994 relative à la constitution de droits réels sur le domaine public aux installations immobilières affectées aux cultures marines, ainsi qu'au mareyage, sur le domaine public portuaire géré par les départements.

L'article 35 complète, à cet effet, la section 3 du chapitre premier du titre premier du Livre II du code du domaine de l'État par un nouvel article L. 34-8-1.

Le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 34-8-1 prévoit que les dispositions de la loi n° 94-631 du 25 juillet 1994 complétant le code du domaine de l'État et relative à la constitution de droits réels sur le domaine public sont applicables aux ouvrages, constructions et installations à caractère immobilier affectées par exemple aux cultures marines ou au mareyage, sur le domaine public de l'État, y compris le domaine portuaire.

Le domaine public maritime se décompose traditionnellement entre domaine public naturel et artificiel. Si cette nouvelle disposition ne s'applique pas au domaine public maritime naturel, elle concerne le domaine public maritime artificiel dont le domaine portuaire, notamment celui mis à la disposition des départements ou ayant fait l'objet à leur profit d'un transfert de gestion, est un élément essentiel.

En effet, l'article 6 modifié de la loi du 22 juillet 1983 n° 83-683 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État, a confié au département la compétence pour le financement des dépenses d'investissement, le fonctionnement et l'élaboration du règlement des quelques 200 ports maritimes de pêche et de commerce, à condition qu'il ne s'agisse pas de ports autonomes ou de ports contigus à un port militaire -la liste de ces exceptions étant énumérée au décret n° 83-1121 du 22 décembre 1983-.

Le département est libre de choisir le mode gestion qu'il entend. Il peut ainsi concéder ou gérer directement les superstructures et les infrastructures. La concession peut bénéficier à des personnes publiques ou privées. Le principe veut, cependant, que toute création de droits réels sur le domaine public soit exclue : en effet, tolérer que le domaine public puisse être grevé, au profit de tiers, de droits réels, serait permettre un démembrement du droit de propriété dont il fait l'objet, et par suite une inaliénabilité partielle du domaine public. En conséquence, les clauses contractuelles conférant un droit réel sur une dépendance du domaine public sont nulles (arrêt du Conseil d'État du 6 mai 1985. Association Eurolat).

La loi peut, bien entendu, en décider autrement : l'article 13 de la loi du 5 janvier 1988 pour les collectivités locales (et leurs établissements publics) et la loi n° 94-631 du 25 juillet 1994 pour l'État (et ses établissements publics) offrent la possibilité de consentir, dans certaines conditions, à la création temporaire de droits réels sur le domaine public à l'instar du texte proposé par l'article 35 du projet de loi pour l'article L. 34-8-1, premier alinéa, complétant le code du domaine de l'État et relative à la constitution de droits réels sur le domaine public.

Ainsi est de nouveau illustrée une tendance qui va dans le sens d'un assouplissement, ou du contournement, des contraintes de la domanialité publique, de façon qu'elles ne soient plus un obstacle à une exploitation économiquement intéressante du domaine public, en un mot, à sa valorisation.

En l'espèce, il a été rappelé l'important effort de mise aux normes demandé à bon nombre de professions de la filière des pêches et des cultures marines. Cette exigence de mise aux normes a nécessité le plus souvent des investissements conséquents. La loi du 25 juillet 1994 n'autorisant pas la constitution de droits réels installations en faveur d'un occupant temporaire sur le domaine public maritime qu'il soit naturel ou artificiel, l'article L. 34-8-1 va permettre à ces professionnels de pouvoir hypothéquer leurs installations (conformément au troisième alinéa de l'article L. 34-2) puisqu'ils pourront détenir des droits réels sur le domaine public de l'État, y compris portuaire.

Les conditions de financement des immobilisations des établissements des professionnels de la pêche et des cultures marines sont donc améliorées.

Le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 34-8-1 précise qu'il appartient au Président du conseil général, en accord avec le représentant de l'État dans le département de délivrer les autorisations, décisions et agréments portant occupations constitutives de droits réels sur le domaine public.

Cet alinéa s'inscrit dans la logique de la décentralisation puisqu'il confie la délivrance notamment des autorisations d'occupation temporaire du domaine public à l'exécutif départemental ; cependant le texte précise que l'accord du représentant de l'État est nécessaire. Cette précision est sûrement due à la particularité du domaine concerné -qui est celui du domaine public de l'État.

Votre commission, tout en comprenant le nécessaire respect de l'unité du domaine public de l'État, vous propose un amendement tendant à supprimer l'obligation d'obtenir l'accord du représentant de l'État. En raison des lois de décentralisation, « la collectivité bénéficiaire de la mise à disposition assume l'ensemble des obligations du propriétaire. Elle possède tous les pouvoirs de gestion . La loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 énonce dans son article 6 « le département est compétent pour créer, aménager et exploiter les ports maritimes de commerce et de pêche .

Dans ce cadre, il peut prendre un certain nombre de dispositions de nature à modifier substantiellement le domaine qui lui a été transféré (création de quais, de terre-pleins, constructions de bâtiments, criées, etc...). En conséquence rien ne justifie, au nom du principe de la libre administration des collectivités locales, consacré par l'article 72 de la Constitution, que l'octroi de droits réels soit soumis à l'accord du Préfet.

Le troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 34-8-1 indique que l'indemnité du préjudice direct, matériel et certain, né de l'éviction anticipée du titulaire du titre d'occupation, mentionnée au troisième alinéa de l'article L. 34-3 du code du domaine public, est versée par le département, autorité qui est compétente pour attribuer une autorisation d'occupation temporaire du domaine portuaire. Il bénéficie, par ailleurs, du paiement de la redevance par l'occupant.

Cependant votre commission s'interroge sur l'utilité de cette disposition. Elle vous propose donc un amendement tendant à supprimer cette mesure, la collectivité responsable du paiement de « l'indemnité d'éviction pour un motif autre que l'inexécution de ses clauses et conditions se déduisant des termes mêmes de l'article L. 34-3 du code du domaine public.

Enfin le quatrième et dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 34-8-1 précise qu'un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application de l'article précité.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 35 ainsi modifié.

Article 36 - Abrogation de la loi du 7 septembre 1948

Cet article abroge la loi n° 48-1400 du 7 septembre 1948 portant statut et organisation de la profession de mareyeur-expéditeur. Ce texte composé de six articles établit un contrôle sur la profession, notamment par la délivrance d'une carte professionnelle. Par ailleurs, des sanctions aux infractions commises à la présente loi et à ses décrets d'application sont envisagées.

La réglementation communautaire issue de la directive du 22 juillet 1991 a, en effet, rendu caduc ce statut légal.

Votre commission vous propose d'adopter sans modification l'article 36.

Article 37 - Outre-mer

Cet article fixe les conditions d'application de la présente loi outremer concernant Mayotte et les Terres australes et antarctiques françaises. Pour les DOM, ces dispositions s'appliquent sauf précision contraire ; quant aux autres TOM -Nouvelle-Calédonie, Polynésie, Territoire de Wallis et Futuna-, ils ne sont pas soumis à cette législation.

Le décret à valeur législative du 9 janvier 1852 précise dans son article 23 qu'il s'applique à Mayotte ; ainsi il est juridiquement nécessaire d'indiquer expressément que, les articles 4, 5, 6 I, 20 et 21 du présent projet de loi, qui modifient ce décret, s'appliquent à Mayotte pour qu'ils puissent entrés en vigueur sur ce territoire. Dans le cas contraire « l'actualisation effectuée par le projet de loi ne pourrait pas être prise en compte et les anciennes dispositions du décret continueraient à s'appliquer.

L'article 13 de la loi du 5 juillet 1983 relative au régime de la saisie et complétant la liste des agents habilités à constater les infractions dans le domaine des pêches maritimes prévoit l'applicabilité de ce texte aux territoires de Mayotte et à celui des Terres Australes et Antarctiques Françaises. Or, l'article 7 du projet de loi modifie les articles 2, 3, 4, 6 et 7 de la loi précitée. Pour des raisons identiques à celles exposées ci-dessus, il est donc nécessaire qu'une disposition législative envisage l'application de ces nouvelles dispositions à ces territoires.

Le tableau ci-dessous fait le point sur la réglementation applicable en matière pêche dans les DOM-TOM.

Règlementation pêche textes de base applicables

Votre commission vous propose d'adopter l'article 37 sans modification.

ANNEXES

ANNEXE N° 1 - Liste des personnes auditionnées


Mercredi 2 octobre 1996

* Les Représentants du Ministère de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation

* Les Représentants du Ministère de l'Équipement, du Logement, des Transports, et du Tourisme

* Chambre Syndicale des Industries de la Conserve Appertisée - Pasteurisée

- M. Yves MICHELON, Directeur général

- M. Pierre COMMERE, Directeur « produits animaux »

* Confédération Française des Travailleurs Chrétiens

- M. Jacques LEPRÊTRE, Président du Syndicat des marins CFTC

- M. Jacques BIGOT, Secrétaire général

* Confédération Générale du Travail

- M. Yves L'HELGOUALC'H, Secrétaire général adjoint

- M. Serge LARZABAL, Président du Syndicat des marins CGT de Saint-Jean de Luz

* Confédération Française du Travail

- M. Jean-Marc BARREY, Secrétaire général

- M. Daniel LEFEVRE, Président du Comité régional de Basse-Normandie

* Fonds d'Intervention et d'Organisation des Marchés des Produits de la Pêche Maritime et des Cultures Marines

- M. Alain PARRES, Président

- M. Alain BERGER, Directeur

* Comité National des Pêches Maritimes

- M. Alain PARRES, Président

- M. Henri POISSON, Directeur général


Jeudi 3 octobre 1996

* Association Nationale des Organisations de Producteurs et FROM Bretagne

- M. Raphael SCANNAPIECO, Président

- M. Jacques PICHON, Secrétaire général

- M. Pierre PLORMEL, Directeur du FROM Bretagne

* Union des Armateurs à la Pêche de France

- M. Jean-Marc LE GARREC, Président

- M. Michel DION, Délégué général adjoint

* Confédération de la Coopération, de la Mutualité et du Crédit Maritime

- M. Maurice BENOISH, Président

- M. Jean-Louis de FEUARDENT, Secrétaire général

- M. Gérald EVIN, Directeur du Centre de gestion de la pêche artisanale

* Fédération française des Syndicats Professionnels Maritimes

- M. René LEQUELLEC, Secrétaire, Président du Comité local de pêche de Lorient

- M. Frédéric CHARRIER, Secrétaire général

* Union du Mareyage Français

- M. Joël LEMAITRE, Président

- M. Bernard STEINITZ, Secrétaire général

* Fédération des Organisations de Producteurs de la Pêche Artisanale

- M. Luc BLIN, Président

- M. Loïc JAGOT, Secrétaire général


Mercredi 9 octobre 1996

* Secrétariat Général pour la Mer

- M. Didier QUENTIN, Secrétaire général


Mardi 15 octobre 1996

* Syndicat National des Fabricants de Produits Surgelés

- M. Jean YORK, Vice-président


Mercredi 16 octobre 1996

* Société Centrale de Crédit Maritime Mutuel

- M. Michel GIBLAINE, Président

- M. Daniel DREUMONT, Directeur général

* Comité National de la Conchyliculture

- M. Jean ROGEON, Président

- M. Martial MONNIER, Secrétaire Général

* Chambre Syndicale des Constructeurs de Navires

- M. Jacques PIERIOU, Administrateur

- M. Fabrice THEOBALD, Secrétaire général

* Parlementaire honoraire

- M. Guy GUERMEUR

* Établissement National des Invalides de la Marine

- M. Gérard SYLVESTRE, Directeur

- M. Jean-François JOUFFRAY, Sous-directeur des affaires juridiques


Jeudi 24 octobre 1996

* Commission Européenne

- Mme. Emma BONINO, Commissaire européen

* Commission Européenne-Direction Générale pour la Pêche (DG XIV)

- M. Alain LAUREC, Directeur de la ressource

- M. Emilio MASTRASCCHIO, Directeur des structures et des zones dépendantes de la pêche

ANNEXE N° 2 - Liste des accords entre l'Union européenne et les Pays Tiers

On distingue traditionnellement trois types d'accords :

1 / Les accords « Nord »

2/ Les accords « américains »

3/ Les accords « Sud »

1. Les accords « Nord »

Les accords conclus avec l'Islande, la Norvège, les îles Féroé, prévoient le renouvellement annuel des échanges de quotas (fin d'année).

L'Union Européenne et les États Baltes viennent de conclure la négociation d'accords de pêche de deuxième génération, prévoyant en particulier la création d'entreprises conjointes.

S "agissant de l'accord Groenland renégocié fin 1994, l'instrument mis en oeuvre établit une contrepartie financière de 188,5 Mécus à verser par la communauté sur cinq années (durée de l'accord), et prévoit également la possibilité de créer des entreprises conjointes.

2. Les accords « américains »

L'accord UE/Etats-Unis prévoit des discussions annuelles en vue d'une éventuelle allocation de droits de pêche aux navires communautaires. Les discussions informelles qui se sont tenues en juillet 1994 et 1995 n'ont pas abouti.

L'accord UE/Canada adopté par le Conseil des ministres de la pêche de 1993 devait remplacer l'instrument conclu entre les deux parties en décembre 1981 et qui a été dénoncé par le Canada. Son entrée en vigueur dépend de sa ratification par le Parlement canadien qui n'est toujours pas intervenue.

Pour les deux accords ci-dessus, aucune contrepartie financière n'est prévue.

L'accord UE/Argentine prévoit une compensation financière de 162.5 Mécus sur cinq ans (coût annuel : 32,5 Mécus) dont 28 Mécus pour la coopération scientifique. Il expire en mai 1999.

3. Les accords « Sud »

ANNEXE N° 3 - Bilan du CIRPA au 30 septembre 1996

Propositions du Cirpa au 30 septembre 1996

Au terme d'un an et demi de travaux, le Cirpa a étudié l'ensemble des 645 dossiers déposés en France. 642 avaient reçu une proposition au 30 septembre 1996.

ANNEXE N° 4 - Tableau de synthèse de quelques caractéristiques des organisations de producteurs13 ( * ) (*)

ND : Données non communiquées par les OP.

(*) A l'exception de Bascopêche créée en 94 pour laquelle on n a pas de données

ANNEXE N° 5 - Liste des principales criées françaises

DUNKERQUE

GRAND-PORT-PHILIPPE

BOULOGNE SUR MER

DIEPPE

FECAMP

HONFLEUR

PORT-EN-BESSIN

GRANDCAMP

CHERBOURG

GRANVILLE

SAINT-MALO

ERQUY

LOGUIVY

SAINT-QUAY

ROSCOFF

BREST

AUDIERNE

DOUARNENEZ

SAINT-GUENOLE

LE GUILVINEC

LESCONIL

LOCTUDY

CONCARNEAU

LORIENT

QUIBERON

LA TURBALLE

LE CROISIC

NOIRMOUTIER

YEU

SAINT-GILLES-CROIX-DE-VIE

LES SABLES D'OLONNE

LA ROCHELLE

HENDAYE

SAINT-JEAN DE LUZ-CIBOURE

PORT-VENDRES

PORT-DE-BOUC

PORT-LA-NOUVELLE

AGDE

SETE

LE GRAU DU ROI

MARSEILLE

ARCACHON

OLERON (La Cotinière)

ROYAN

ANNEXE N° 6 - Propositions de la Commission européenne sur le POP IV

ANNEXE N° 7 - Poissons frais et réfrigérés référencés dans le JOCE

- Salmonidés :

- - Truites (Salmo trutta, Salmo gairdneri, Salmo clarki, Salmo aguabonita, Salmo gilae)

- - Saumons du Pacifique (Oncorhynchus spp), saumons de l'Atlantique ( Salmo salar ) et saumons du

Danube (Hucho hucho)

- Autres

- Poissons plats (Pleuronectidés, Bothidés, Cynoglossidés, Soléidés, Scophthalmidés et Citharidés) :

- - Flétans noirs (Reinhardtius hippoglossoides)

- - Flétans atlantiques (Hippoglossus hippoglossus)

- - Flétans du Pacifique (Hippoglossus stenolepis)

- - Plies ou carrelets (Pleuronectes platessa)

- - Soles (Solea spp.)

- - Cardines (Lepidorhombus spp.)

- - Autres

- Thons (du genre Thunnus), listaos ou bonites à ventre rayé :

- - Thons blancs ou germons (Thunnus alalunga)

- - Thons à nageoires jaunes (Thunnus albacares)

- - Listaos ou bonites à ventre rayé [Euthynnus (Katsuwonus) pelamis]

- - Autres

- Harengs (Clupea harengus, Clupea pallasii)

- Morues (Gadus morhua, Gadus ogac, Gadus macrocephalus)

- Sardines (Sardinapilchardus, Sardinops spp.), sardinelles (Sardinella spp.), sprats ou esprots (Sprattus sprattus)

- Eglefins (Melanogrammus aeglefinus)

- Lieus noirs (Pollachius virens)

- Maquereaux (Scomber scombrus, Scomber australasicus, Scomber japonicus)

- Squales :

- - Aiguillats (Squalus acanthias)

- - Roussettes (Scyliorhinus spp.)

- - Autres

- Poissons du genre Euthynnus, autres que listaos ou bonites à ventre rayé visés ci-dessus

- Rascasses du Nord ou sébastes (Sebastes spp.)

- Poissons de l'espèce Boreogadus saida

- Merlans (Merlangus merlangus)

- Lingues (Molva spp.)

- Lieus de l'Alaska (Theragra chalcogramma) et lieus jaunes (Pollachius pollachius)

- Anchois (Engraulis spp.)

Dorades de mer des espèces Dentex dentex et Pagellus spp.

- Merlus (Merluccius spp., Urophycis spp.)

- Castagnoles (Brama spp.)

- Baudroies (Lophius spp. )

- Merlans poutassous (Micromesistius poutassou ou Gadus poutassou)

- Espadons (Xiphias gladius)

- Chinchards (saurels) (Caranx trachurus, Trachurus trachurus)

- Autres : poissons de mer divers

ANNEXE N° 8 - Glossaire

ACR

Allocation complémentaire de ressources

ANOP

Association Nationale des Organisations de Producteurs

Aquaculture

Culture et élevage continentaux ou marins de crustacés ou poissons : on distingue traditionnellement dans l'aquaculture la conchyliculture et les cultures marines nouvelles

Armateur

Personne ou société qui exploite un navire. L'armateur n'est pas forcément le propriétaire, sauf en pêche artisanale.

Bosco

Maître d'équipage

CAA

Mesure de cessation d'activité anticipée

CAAM

Centre administratif des affaires maritimes

CCMCM

Confédération de la Coopération, de la mutualité, du Crédit

Maritimes

CIRPA

Comité Interministériel de restructuration de la Pêche

artisanale

CNC

Comité National de la Conchyliculture

CNPM/EM

Comité National des Pêches Maritimes et des Élevages

Marins

COFEP

Comité Franco-Espagnol des Pêches maritimes

Conchyliculture

Culture des huîtres et des moules

CPP

Conchyliculture et petite pêche

Criée

Lieu de première vente des produits débarqués

Crustacés

Crabes, crevettes, homards, langoustes, langoustines

DG XIV

Communauté européenne - Direction générale des pêches

Droits historiques

Droits de pêche exercés avant 1983, qui restreignent la capacité de chaque État à limiter l'exercice de la pêche aux non nationaux dans la zone des 12 milles

Effort de pêche

On parle de réduction de l'effort de pêche en visant l'instauration de licences, la sélectivité des engins...

ENIM

Établissement National des Invalides de la Marine

Espèces benthiques

Poissons vivant sur le fond des océans voire dans le substrat

(sole, cardine, plie)

Espèces demersales

Poissons vivant à proximité du fond sans y être inféodés

(dorade, morue...)

Espèces pélagiques

Poissons vivant en pleine mer(hareng, sardine, maquereau, thon, hanchois) par opposition aux espèces littorales

FAO

Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture. En anglais, Food and Agricultural Organization.

FEDOPA

Fédération des Organisations de Producteurs de Pêches Artisanales

FIOM

Fonds d'Intervention et Organisation des Marchés

FROM

Fonds régionaux d'organisation des marchés

GMS

Grandes et Moyennes Surfaces (Super-Hyper Marchés)

GREP

Groupe de Recherche pour l'Education et la Prospective

IFOP

Instrument Financier d'orientation de la pêche

IFREMER

Institut Français de Recherche pour l'Exploitation de la Mer

KW

Kilo Watt - Notion de puissance exprimée d'un moteur

Marée

Période durant laquelle le navire est en mer

Mareyeur

Grossiste en Produits de la Mer

Mesures techniques

Ensemble des mesures réglementant les caractéristiques et l'utilisation des moyens de capture (comme les engins de pêche, les navires...)

MIN

Marché d'Intérêt National

Mytiliculture

Elevage des moules

Mollusques

Coquilles St Jacques, les huîtres, les moules, les pétoncles...

MSA

Mutualité sociale Agricole

OCM Pêche

Organisation commune de marché de la Pêche

OIT

Organisation Internationale du Travail

OMI

Organisation Maritime Internationale

OP

Organisations de Producteurs

Ostréiculture

Culture des huîtres

PCP

Politique Commune des Pêches

Pêche germonière

Pêche au grand thon de l'Atlantique (Thon blanc)

PESCA

Initiative communautaire en faveur de la pêche

PME

Permis de mise en exploitation d'un navire de pêche

POP

Programme d'Orientation pluriannuel

PPS

Permis de pêche spéciaux pour certaines espèces de crustacés

Principe de précaution

Principe en vertu duquel une mesure peut être décidée à l'encontre d'une action sans que la preuve ait été apportée des effets néfastes de cette action

Principe de stabilité relative

Principe de répartition adopté en 1983 utilisant comme clef de répartition des TAC en quotas nationaux les captures observées antérieurement

Quota

Répartition des TAC par pays -notion plus politique-

quantité à pêcher par espèce

Quota « hopping »

Quotas que des ressortissants communautaires non français s'approprient en se portant acquéreurs de navires à pavillon français, en l'armant avec des équipages non français et en débarquant dans un port européen

Ressources halieutiques

Ressources exploitées ou exploitables par la pêche

Règles d'extension de discipline

Extension des règles de fonctionnement et d'organisation des OP aux non-adhérents

Saurisserie

Poissons fumés-séchés-salés + rayon traiteur (surimi, produits à tartiner, marinades...)

Stocks chevauchants

Stocks de poissons dont les déplacements s'effectuent tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des ZEE

TJB

Tonne de Jauge Brute (mesure de poids et volume)

TAC

Total admissible de captures (Appréciation scientifique)

Thonnier senneur

Navire armé à la pêche au thon équipé d'un long filet que l'on traîne dans l'eau sur les grèves régulières

Vénériculture

Culture des palourdes

ZEE

Zone Économique Exclusive. Elle s'étend jusqu'à 200 milles

des côtes

* 1 Avis n° 79 (1995-1996) Tome II-Pêche, présenté par M. Josselin de Rohan au nom de la commission des Affaires économiques et du plan sur le projet de loi de finances pour 1996.

* 2 Un glossaire des termes techniques figure à l'annexe n° 8 du rapport

* 3 Revue « POUR », édité par le Groupe de recherche pour l'éducation et la prospective n° 149-150 - 1996 « Les pêches maritimes françaises : bilan et perspectives ».

* 4 Entré en vigueur en 1990, le Système de préférences généralisées « Drogue » accorde aux pays andins et d'Amérique centrale des réductions tarifaires pour leurs importations sous condition de la poursuite d'efforts de ces États dans la lutte contre la drogue.

* 5 Avis n° 2275 (1995/1996) Pêche. Tome II, présenté par M. Aimé Kergueris au nom de la Commission de la Production et des Échanges sur le projet de loi de finances pour 1996.

* 6 Rapport d'audit établi par MM. Bruno Mettling, Pierre Henaff, Jean-Pierre Menanteau et Mlle Anne Mingasson -février 1995.

* 7 Rapport d'audit établi par MM. Bruno Mettling, Pierre Henaff, Jean-Pierre Menanteau et Mlle Anne Mingasson - février 1995.

* 8 Rapport n° 27 ( 1990/1991) présenté par M. Josselin de Rohan au nom de la commission des Affaires Économiques et du Plan sur le projet de loi portant diverses dispositions en matière de pèches maritimes et de cultures marines.

* 9 Étude d'impact présentée par le Gouvernement concernant le projet de loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines.

* 10 Article de Mme Hélème Rey « Les Organisations de producteurs : des acteurs majeurs de l'organisation et de la gestion de la pêche française », La pêche Maritime septembre 1995.

* 11 Rapport de mission sur la situation des pêcheurs en difficulté de MM. Daniel Basset, Jean-Louis Porry, Paul Roulon et Mme Annie Quilleriet-Eliez - mai 1995

* 12 Source : H. Bauer, FIOM, 1995

Source : H. Bauer, FIOM, 1995

* 13 Revue « Pour » diffusée par le Groupe de recherche pour réduction et la Prospective, « Pêches maritimes françaises, Bilan et perspectives » n° 149/150 - 1996

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